Idea Transcript
Delphine Demelas
Sur un air épique, sur un air lyrique : célébrer le bon connétable Edition critique et commentaires du manuscrit 428/(306) de la bibliothèque municipale d’Aix-en-Provence contenant La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier suivie de pièces lyriques. Volume I : Commentaires
Thèse présentée en vue de l’obtention du titre de Docteur Université d’Aix-Marseille 24 juin 2016
A mes grands-mères, nous resterons votre mémoire.
Remerciements « Il y a un lien secret entre la lenteur et la mémoire, entre la vitesse et l’oubli ». Cette citation issue d’un roman de M. Kundera, La Lenteur, paraît s’appliquer directement à un travail de thèse de doctorat. Dans un monde où l’être est prié d’aller toujours plus vite, la chance m’a été oferte de mener un projet de recherche sur plusieurs années, temps que je considère maintenant nécessaire à la fondation d’une rélexion solide et organisée. L’aboutissement de ce projet est au conluent de plusieurs paramètres, professionnels comme afectifs. En premier lieu, je tiens à remercier ma directrice de thèse, madame Valérie Naudet, pour la coniance qu’elle m’a accordée il y a de cela huit ans, lorsqu’elle a accepté de diriger mes recherches après ma licence. C’est elle qui m’a fait découvrir, dès ma première année de master, le plaisir d’éditer des textes médiévaux, passion qui ne m’a plus quittée depuis. J’aimerais également lui dire à quel point j’ai apprécié sa grande disponibilité et son respect sans faille de mes idées, même lorsqu’elle ne les partageait pas. Enin, j’ai été extrêmement sensible à ses qualités humaines d’écoute et de compréhension tout au long de mes travaux de recherche. Parce que les études médiévales à Aix-en-Provence ne seraient rien sans eux, je tiens à exprimer ma gratitude à l’ensemble des membres du CUER MA. Leurs cours de licence et leurs séminaires, toujours réalisés avec enthousiasme, m’ont donné le goût de la littérature du Moyen Age. Ils m’ont eux aussi fait coniance dès mes premiers pas dans la recherche en m’intégrant pleinement à l’organisation des colloques du groupe. Leur soutien tout au long de ces années, leurs précieux conseils et leur bienveillance envers les jeunes chercheurs m’ont permis d’évoluer dans un environnement plus que propice à la réalisation d’une thèse de doctorat. Le choix de la poursuite d’une thèse est également dépendant d’éléments pécuniaires. Je souhaite ainsi dire ma reconnaissance à la région PACA pour l’octroiement d’une bourse d’excellence régionale avec laquelle j’ai pu inancer mes recherches trois ans durant. Je remercie également le département de lettres modernes de l’Université d’Aix-Marseille pour m’avoir permis d’exercer une charge d’enseignement pendant quatre années. Enin, je souhaite exprimer ma reconnaissance au laboratoire de recherche CIELAM pour avoir inancer mes besoins et mes séjours de recherche. Ce travail n’aurait pu se faire sans le soutien de mon partenaire régional, la bibliothèque municipale d’Aix-en-Provence. La facilité d’accès au manuscrit 428/(306) ainsi qu’aux ressources nécessaires à mes travaux m’ont été d’une
aide précieuse et m’ont procuré un confort de travail rare. Je tenais à remercier le personnel de la bibliothèque pour sa gentillesse et sa disponibilité à chacune de mes visites. Ma gratitude s’adresse en particulier à madame Aurélie Bosc, directrice adjointe des collections, pour avoir accepté ce partenariat sans condition et œuvré au bon déroulement des séances de travail sur place. Mes remerciements vont également à monsieur Philippe Ferrand, responsable de l’espace patrimoine, pour son aide ain de tenter de retracer l’histoire du manuscrit. Je tiens à remercier madame Anne Mailloux, maître de conférences au département d’histoire du l’université d’Aix-Marseille, pour sa disponibilité. Nos séances de travail ont été d’une grande aide pour formuler de solides hypothèses sur la provenance du manuscrit 428/(306). J’exprime ma gratitude à tous les amis d’ici et d’ailleurs - chercheurs ou non - qui m’ont accompagnée dans cette aventure. Je voudrais remercier plus particulièrement mes compañeros de lucha, Renaud et Laura, pour leur soutien sans faille. J’adresse également un grand merci à Julia pour ses relectures. Je tiens maintenant à adresser mes plus vifs remerciements à ma famille pour leur présence et leur aide, sans lesquels je serais diicilement arrivée à ce niveau d’études. Je vous remercie d’avoir toujours cru en moi, même lorsque moi-même je n’y croyais plus. Le temps passe, les choses changent, mais l’amour reste intact. Enin, last but not least, cette aventure n’aurait pas été possible sans le soutien et l’afection absolus de mon mari, Guillaume. Ton amour, ton humour, ta joie de vivre, ta curiosité, ton intelligence, toutes les qualités qui font de toi une personne merveilleuse m’ont aidée à grandir et à tenir jusqu’au bout. Le meilleur reste à venir.
Sommaire
I II III
Description des témoins de la chanson Etude de la langue du manuscrit A Analyse littéraire : De Glay Aquin à Guesclin
Annexes
5 71 161 273
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”
U
Malem, inquit, domine mi, galeam quam coronam. — Charles VI Chronique du religieux de Saint-Denis
n beau jour, songeant au devenir du royaume, Charles V voulut éprouver son jeune ils, le futur Charles VI. Il lui présenta alors une couronne précieuse sertie de joyaux et un casque de soldat, et lui demanda quel objet il préférait. Choisirait-il la couronne, symbole de la royauté sédentaire initiée par son père ou bien le casque, synonyme d’une carrière militaire pareille à celle des anciens dux bellorum dont le parangon littéraire fut Charlemagne ? L’Histoire veut que l’enfant choisit sans hésiter le casque, au grand dam de son père. Ce trait de caractère modélisa l’image du roi jusqu’à sa mort, fou des armes et de la guerre avant de devenir fou tout court. Bernard Guenée en résume le portrait donné par son principal chroniqueur et contemporain, Michel Pintouin : En 1388, nous dit l’historien, il fut facile de décider Charles VI à partir en Gueldre : le roi aimait passionnément la guerre (bellorum cupidissimus) ; il aspirait à étendre la gloire de son nom ; il comptait pour rien les forces de ses ennemis ; il désirait passionnément voir des terres inconnues et lointaines (terras incognitas et remotas videndi ininita cupidine) 1 . Cet amour passionné pour le combat, cette volonté d’accéder à une renommée certaine et ce désir d’ailleurs, n’est-ce pas là ce qui constitue aussi les grandes lignes de la légende de Bertrand du Guesclin ? Celui que l’Histoire gardera en mémoire comme le roi fou s’avère être féru de la légende du connétable de son père, lui dont l’enfance fut baignée dans le récit des exploits du chevalier breton face aux ennemis du royaume de France. Le connétable aurait-il servi de modèle au roi ? La meilleure preuve de sa grande admiration pour Bertrand réside sans doute dans une de ses premières mesures politiques en 1389. Le roi choisit de clôturer la semaine de festivités organisée pour célébrer son couronnement par un hommage au connétable, alors décédé depuis une dizaine d’années. L’hommage se transforme en funérailles oicielles mêlant messes, démonstrations publiques du chagrin et lectures de textes exprimant le deuil ou l’admiration générale des 1. B. Guenée, « Le portrait de Charles VI dans la Chronique du religieux de Saint-Denis », Journal des savants [En ligne], 1997, p. 125–165, url : http://www.persee.fr/doc/jds_ 0021-8103_1997_num_1_1_1606, p. 139.
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4 prouesses du guerrier. Le choix d’ofrir cet hommage public au connétable place ainsi ce début de règne en opposition totale au précédent, Charles V n’ayant pas organisé les funérailles du connétable au moment de la mort de celui-ci 2 . C’est dans ce contexte que la légende de Bertrand du Guesclin a vu le jour. Certes, elle tient une place de premier plan à la in du Moyen Age, certes le leuron des textes qui la véhiculent est connu notamment grâce à une édition récente. Mais la critique est restée frileuse devant ce monument, comme d’ailleurs devant la production épique de l’automne du Moyen Age. J.C. Faucon, dans sa précédente édition de la chanson parue en 1991 3 , avait pourtant ofert de grandes avancées concernant le texte. Edition de la totalité du texte, étude des manuscrits, édition des variantes, recherches sur ce fameux Cuvelier...le médiéviste a permis à la communauté scientiique de prendre contact avec les 23000 alexandrins monorimes du manuscrit qu’il a choisi pour base et a donné au poème la possibilité de igurer au corpus de diverses thèses, comme celle d’Elisabeth Gaucher ayant pour thème la biographie chevaleresque 4 . Malgré ce travail considérable, de nombreux points restaient en suspens. De plus, de nouveaux témoins ont fait leur apparition à la in des années 90, nous invitant à reconsidérer l’ensemble des manuscrits. Cette édition reprend donc le travail là où J.C. Faucon l’a laissé. Nous proposons au lecteur une nouvelle version de la chanson grâce à la copie aixoise, chanson que nous n’avons pas souhaitée séparer des textes qui prennent place à sa suite dans le codex. Les pièces lyriques se trouvant à la in du manuscrit font partie intégrante de notre édition et de notre rélexion 5 . En ajoutant ainsi quelques pages supplémentaires d’analyse de la légende du connétable, nous espérons contribuer à la difusion et à la valorisation de ces textes leuves de la in du Moyen Age, souvent mal-aimés parce que mal compris.
2. On peut également penser que cette mesure créé le lien entre le règne du père et celui du ils. En efet, Charles V décède en septembre 1380, soit deux mois après le connétable. Ce cours délai ne lui aurait peut-être pas permis d’organiser un hommage digne de ce nom à Bertrand. Charles VI débute alors son règne en ordonnant les funérailles que son père n’avait pas eu le temps d’arranger. Il se place alors dans le sillage direct de Charles V. 3. J. C. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991. 4. E. Gaucher, La biographie chevaleresque : typologie d’un genre (XIIIe-XVe siècle), H. Champion, 1994. 5. Ces courts poèmes à la gloire du connétable étaient présents à la in du manuscrit de base choisi par J. C. Faucon, qui, préférant se concentrer sur la chanson, ne les édite pas.
Première partie Description des témoins de la chanson
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es manuscrits médiévaux contenant la version en vers de la vie du connétable de France sont aujourd’hui au nombre de dix. Deux nouveaux codex ont pu être recensés depuis la dernière édition de la chanson par J.C. Faucon 1 : le manuscrit 990 de la Beinecke Library de l’Université de Yale à New Haven ainsi que le manuscrit coté Hamilton 226 conservé à la Staatsbibliothek de Berlin. Pour les témoins déjà étudiés par J.C. Faucon, nous recensons les renseignements inédits que nos recherches nous ont permis de collecter. Les lettres de dénomination des manuscrits employées par Jean-Claude Faucon ont été précisées entre parenthèses. Nous comptons dix témoins, classés par ordre alphabétique : 1. A (E) : Aix-en-Provence (France), bibliothèque municipale (Méjanes), ms 428/(306) ; 2. Br : Berlin (Allemagne), Preussischer Kulturbesitz, Staabibliothek zu Berlin, ms. Hamilton 226, ; 3. L (A) : Londres (Angletterre), British Library, ms. Yates Thompson 35 2 ; 4. Mn (C/C’) : Le Mans (France), bibliothèque municipale, ms 14 ; 5. Mp (B1 ) : Montpellier (France), bibliothèque de la faculté de médecine, ms. H 250 ; 6. Nd (G) : Notre Dame (Indiana, U.S.A.), Hesburg Library, Notre Dame University, ms. Fr. c.2 ; 7. Nh : New Haven (Connecticut, U.S.A.), Beinecke Rare Book and Manuscript Library, Yale University, ms 990 ; 8. P (F) : Paris (France), Bibliothèque nationale de France, ms. fr. 850 ; 9. Pa (D) : Paris (France), Bibliothèque de l’Arsenal, ms. Arsenal 3141 ; 10. Pn (B2 ) : Paris (France), Bibliothèque nationale de France, ms. nouvelles acquisitions françaises 993.
1. J.C. Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991, p. 311 à 328. 2. Il y a eu un changement de cote du manuscrit depuis l’édition de J.C. Faucon, celui-ci le référençant comme « le ms de Londres, British Library, 20850 » (ibid., p. 311). La description donnée de ce codex dans son édition correspond bien à celle du manuscrit Yates Thompson 35. La cote 20850 n’est plus valide depuis le déménagement des collections de manuscrits médiévaux du British Museum vers la British Library.
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Le manuscrit A d’Aix-en-Provence 1.1 | Description matérielle Signalement
Cote actuelle : Aix-en-Provence (France), bibliothèque municipale (Méjanes), ms 428/(306) Dimensions : In folio, 280x205 mm Nombres de folios : 268 folios (532 pages) Date : 15 février 1441 (colophon) Origine : Région de Poitiers Manuscrit hétérogène
Support Papier Filigranes : bœuf couronné, Briquet 2809 ; bœuf queue à trois bouts, Briquet 2776 ; tête de bœuf à yeux et narines, (Briquet 14958 ?)
Encre Ecriture : encre noire Décors : encre rouge (lettrines)
Etat du manuscrit Bon état général : Tâches marges supérieures f° 1-3 et 265-268 ; copie lisible
Organisation du volume Manuscrit paginé : numéros de page ajoutés par une main postérieure à l’encre noire p. 1 à 532 9
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Description matérielle
Figure 1 – Ms. A, f°1r.
Chapitre 1 . Le manuscrit A d’Aix-en-Provence
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Lignes numérotées : par dix, marge droite, à l’encre noire, même main que paginantion, f° 1r : 10, 20, 30 ; Total des lignes à l’encre noire, marge inférieure gauche, f° 1r : 42 ; f° 1v : 84 ; f°2r 126 Cahiers : 5 XII120 + 1 (XII+ 1)142 + 4 XII238 + 1 II240 + 1 (XIII+1)268 — le cahier 1, 1-24 (p. 1 à 48 1 ) ; — le cahier 2, f° 25-48 (p. 49 à 96) ; — le cahier 3, 49-72 (p. 97 à 144) ; — le cahier 4, 73-96 (p. 145 à 192) ; — le cahier 5, 97-120 (p. 193 à 240) ; — le cahier 6, 121-142 (p. 241 à 284) ; — le cahier 7, 143-166 (p. 285 à 332) ; — le cahier 8, 167-190 (p. 333 à 380) ; — le cahier 9, 191-214 (p. 381 à 428) ; — le cahier 10, f° 215-238 (p. 429 à 476) ; — le cahier 11, f° 239-240, (p 477 à 479) ; — le cahier 12,f° 241-267 (p. 480 à 530) ; — + f° 268 (p. 532) Réclames : f°24 (p. 48) : A chascune ; f°48 (p. 96) : Et ilz ont respondu ; f°72 (p. 144) : fut lever ; f°96 (p. 192) : et la it con. ; f° 120 (p. 240) : traces de réclame massicotée ; f°142 (p. 284) : O luy Jehan de ; f°166 (p. 332) : Vous puet ; f°190 (p. 380) : en moy ne t. ; f°214 (p. 428) : Huon de caurelay ; f°238 (p. 476) : avons pris .I..
Ecriture Ecriture : une seule main
Mise en page Copie à longues lignes : 42 lignes par page, première lettre de chaque vers décalée
Décoration Lettrine : ouverture de chaque laisse, encre rouge 1. Les feuillets du manuscrit étant paginés, nous utilisons aussi dans cette partie les numéros de page en plus des numéros de folio pour permettre au lecteur désireux de consulter le codex de s’y repérer plus facilement.
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Contenu Fioritures et grotesques : marges supérieures
Colophon f° 265v : Explicit du bon connoistable de France/ messire Bertrant du Guesclin sans doubtance,/qui enterré fu a Saint Denis en France./ Et fu achevé sans aucune faillance/ Le quinzesme jour de fevrer, l’an quarante /mil quatre cens, c’on disoit par toute France.
Reliure Type de reliure : basane Date de réfection : 21 juillet 1838 (mention page de garde, voir remarques)
1.2 | Contenu Texte 1 : f° 1 à 265v La Chanson de Bertrand du Guesclin ; vers : alexandrins ; langue : français ; dialecte : poitevin Incipit : Seigneurs or faictes paix pour Dieu le roy divin ; Explicit : Cy ine de Bertrant a qui Dieu soit amis/Dieu le pere nous doint paix et paradis/et il veille amander touz noz ennemis Textes 2 : f° 266r à 268v Série de poèmes consacrés au connétable du Guesclin — Pièce 1 : auteur : Eustache Deschamps ; incpit : tuit li vaillant et li preux de jadis ; explicit : du plus vaillant qui soit en tout le monde — Pièce 2 : auteur : Eustache Deschamps ; incipit : estoc d’onnour et arbre de vaillance ; explicit : plorez plourez leur de chevalerie — Pièce 3 : auteur : Eustache Deschamps ; incipit : tuit chevalier qui alez par le monde ; explicit : tuit chevalier excetera — Piece 4 : auteur : anonyme ; incipit : Bien doit pleurer chevalerie ; explicit : et par son fait Espagne conquestee — Pièce 5 : auteur : anonyme ; incipit : l’escu d’argent a un aigle de sable ; explicit : l’escu d’azur a trois leurs de lys d’or
Chapitre 1 . Le manuscrit A d’Aix-en-Provence
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— Pièce 6 : auteur : anonyme ; incipit : en l’an de l’Incarnation/mil trois cens quatre vins ans ; explicit : si bon et de tel ordonnance/que il soit au proit de France — Pièce 7 : auteur : anonyme ; incipit : plourez princes ducs et barons ; explitcit : les leurs de lys du lieupart felon Ces mêmes poèmes se trouvent à la in des manuscrits P et Pn. Les pieces 1, 2 et 3 sont présentes dans le recueil médiéval des œuvres d’Eustache Deschamps, le manuscrit Bnf fr. 840. Ils sont édités et traduits dans l’anthologie consacrée au poète parue récemment 2 .
Bibliographie Edition de la chanson : variantes du manuscrit éditées dans J.C. Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991 Edition des poèmes : pièces 1, 2 et 3 édités dans E. Deschamps, Anthologie, sous la dir. de Clotilde Dauphant, Lettres gothiques, Paris : Livre de poche, 2014, p. 130, p. 132 et p. 380. Catalogue mentionnant le manuscrit : — G.F. Haenel, Catalogus librorum manuscriptorum : qui in bibliothecis Galliae, Helvetiae, Belgii, Britanniae M., Hispaniae, Lusitaniae asservantur, nunc primum editi a D. Gustavo Haenel, Collections spéciales, Sumtibus I.C. Hinrichs, 1830 — E. Rouard, Notice sur la bibliothèque d’Aix, dite de Méjanes, précédée d’un essai sur l’histoire littéraire de cette ville, 1831
1.3 | Images du manuscrit Les images sont tirées de clichés réalisés par nos soins avec l’aimable autorisation de la bibliothèque. Nous en proitons pour remercier le personnel de la bibliothèque municipale d’Aix-en-Provence pour nous avoir permis de consulter le manuscrit 428/(306) ainsi que les autres ressources de la bibliothèque à chaque fois que cela nous était nécessaire. 2. E. Deschamps, Anthologie, sous la dir. de Clotilde Dauphant, Lettres gothiques, Paris : Livre de poche, 2014, p. 130, p. 132 et p. 380.
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Images du manuscrit
Figure 2 – folio 140v cancellé par erreur
Figure 3 – folio 141v cancellé puis décoré par erreur
Figure 4 – détail folio 140v
Figure 5 – détail folio 141v
Figure 6 – Mention page de garde
Chapitre 1 . Le manuscrit A d’Aix-en-Provence
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5. Figure 7 – exemples de décors marges supérieures, f°3r, 40r, 78v, 83r, 234v
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Composition particulière
1.4 | Remarques La réfection de la reliure a eu lieu le 21 juillet 1838, comme le signale une marque sur la page de garde : Relié ce 21 juillet 1838, jour où la ville est déserte à cause du choléra qui nous désole depuis cinq jours. Cette mention est accompagnée de la signature du premier conservateur de la bibliothèque Méjanes, Etienne Rouard 3 . La bibliothèque disposant de peu de moyens à cette époque, le conservateur devait trouver cet ouvrage remarquable pour décider de lui ofrir une nouvelle jeunesse.
1.5 | Composition particulière Le texte s’étend sur douze cahiers. L’étude de la composition du manuscrit fait apparaître plusieurs problèmes d’agencement. Sur onze cahiers, dix sont réguliers et se composent de quarante-huit pages, soit vingt-quatre folios. Le cahier 6 est irrégulier. Il comporte quarante-six pages, soit vingt-trois folios. La composition particulière de ce livret est illustrée par le schéma du cahier 6. Les pages 251 et 252 ont été collées ensemble pour former un seul folio, ce qui explique le nombre de pages impair dans la première moitié du cahier. La page 253 est notée deux fois : une première à l’encre noire au folio 127r et une seconde (253 bis) au crayon à papier au folio 128r. La notation au crayon est postérieure à celle à l’encre. Le folio 128 avait été omis de la première pagination, révélant certainement la prise de conscience d’un problème de composition dans le cahier. Les pages 278 (folio 140v) et 280 (folio 141v) présentent la copie d’un même passage du texte et sont entièrement cancellées. La mention vacat tout dans la marge gauche de la feuille accompagne les ratures à la page 280. La page 278 présente deux mentions diférentes dans la marge gauche : — la première est, comme pour la page 280, l’inscription latine vacat tout qui est cette fois cancellée ; — la seconde est l’expression latine bonum est pour indiquer au relieur et au lecteur que cette partie du texte est à garder. 3. Nous tenions ici à remercier vivement l’équipe patrimoine de la bibliothèque pour son aide à l’identiication de cette signature
Chapitre 1 . Le manuscrit A d’Aix-en-Provence 131 f
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Figure 8 – Schéma du cahier n.6, ms A
La page 278 est à sa place dans le lot du texte, d’où la mention bonum est qui lui est attribuée. Cependant, l’enlumineur est intervenu sur la mauvaise page et a décoré le texte de la page 280 au lieu de celui de la page 278. Ces problèmes de copies ne semblent pourtant pas à l’origine du folio ajouté dans ce cahier, puisque, comme le montre le schéma, les bifeuillets correspondants sont intacts.
1.6 | Anciens possesseurs Le manuscrit était bien présent dans les collections de la bibliothèque plusieurs années avant sa restauration. Il est mentionné par Rouard dans sa notice sur la bibliothèque publiée en 1831. Il y décrit le manuscrit 428 comme : Une chronique en vers contenant la vie du connétable Duguesclin, écrite vers la in du XIVe siècle, très volumineuse et très intéressante, dont il est question dans le P. Lelong, tome 3 p 144, et qui n’a jamais été imprimée 4 . 4. E. Rouard, Notice sur la bibliothèque d’Aix, dite de Méjanes, précédée d’un essai sur l’histoire littéraire de cette ville, 1831, p. 158.
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Anciens possesseurs
Après vériication, aucun des manuscrits décrits par J. Lelong ne semble correspondre au manuscrit A 5 . Ni les supports en vélin, ni les formats in-4 ne peuvent se rapporter au codex d’Aix-en-Provence. Le manuscrit aixois porte une seule marque antérieure à l’époque de sa reliure. Nous pouvons lire au dos de la page de garde le titre suivant : Recuïle de vers françois dédié a ms du guesclin L’écriture date probablement du XVIIe ou XVIIIe siècle. La forme recuïle ne semble pas attestée dans les diférents dictionnaires consultés. 6 La réfection de la reliure en 1838 a probablement efacé toute trace d’anciens possesseurs. Aucune marque n’apparaît sur le manuscrit, ce qui rend son traçage diicile. Le catalogue le plus ancien mentionnant le codex 428 est celui de Gustav Haenel rédigé entre 1821 et 1826 puis publié en 1830, qui dresse une première liste des manuscrits présents à la bibliothèque d’Aix. L’œuvre est répertoriée sous le titre ”Vie du connétable Bertrant du Guesclin en vers”, vingt-troisième de la liste des in-folio 7 . La chanson se trouvait donc déjà dans les collections de la ville en 1821. On trouve également une trace du manuscrit dans le premier catalogue des manuscrit réalisé par Gibelin et Diouloufet, premiers bibliothécaires à gérer le fond Méjanes après la création de la bibliothèque 8 . On peut lire au numéro 42 de la table des manuscrits la mention suivante : (R 306) 42 : Chronique en vers contenant la vie du connétable Bertrand du Guesclin écrite en vers à la in du 14e siècle. 1 vol. rel. Il s’agit de la mention la plus ancienne du manuscrit A que nous avons pu trouver dans un inventaire. Seuls deux grands fonds ont été légués à la bibliothèque avant cette date : celui du marquis de Méjanes et celui de la famille Fauris de Saint-Vincens. La consultation des inventaires familiaux présents à la bibliothèque, dont nous donnons la liste ci-après, n’a pas permis de trouver une trace du manuscrit dans 5. J. L. Long et C. de Fontette, Bibliothèque historique De La France : contenant le catalogue des ouvrages, imprimés et manuscrits, qui traitent de l’Histoire de ce royaume, ou qui y ont rapport : avec des notes critiques et historiques, vol. 3, Herissant, 1771, p. 144 et 145. 6. On trouve une occurrence de recuil dans le DMF ainsi que le participe passé recuillé dans le dictionnaire Huget. 7. G.F. Haenel, Catalogus librorum manuscriptorum : qui in bibliothecis Galliae, Helvetiae, Belgii, Britanniae M., Hispaniae, Lusitaniae asservantur, nunc primum editi a D. Gustavo Haenel, Collections spéciales, Sumtibus I.C. Hinrichs, 1830, p. 1. 8. Aix-en-Provence, Bibliothèque municipale (Méjanes), archives de la bibliothèque, cote A3 1
Chapitre 1 . Le manuscrit A d’Aix-en-Provence
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une collection antérieure. Il est pour l’instant impossible d’expliquer comment le codex a voyagé jsuqu’à Aix-en-Provence.
Inventaires consultés Voici la liste des inventaires consultés à la bibliothèque d’Aix-en-Provence à l’occasion de nos recherches : 1. ms 308 (677) : Cathalogus paesulum Magalonensium 2. ms 1211-1212 (1134-1135) : Catalogue des manuscrits ayant appartenus au comte de Béthunes 3. ms 1213-1216 (136-139) : Table des manuscrits de M. le comte de Brienne 4. ms 1218 (1053) : Catalogue de la bibliothèque de Peiresc 5. ms 1220 (1050) : Catalogue des livres du cabinet du président Saint Vincens à Aix 6. ms 1296 (1178) : Œuvres diverses du président Fauris de Saint Vincens ils 7. ms 1998 (1864) : Catalogue et listes de livres appartenant à des collections particulières L’opportunité de consulter les archives de la bibliothèque nous a également était oferte. Voici la table des archives vues sur place : 1. A1 1 : Notes historiques sur les origines de la bibliothèque 2. A1 2 : Recueil des pièces de formats divers imprimées et reliées, relatives à la bibliothèque 3. A1 353 : Catalogue des livres nouveaux achetés par la ville ou donnés par le gouvernement 4. A1 36 : numéros d’entrée de 1 à 42700 5. A1 37 : concordance des manuscrits 6. A3 1 : Premier catalogue des manuscrits par Gibelin et Diouloufet (nouveau régime) 7. A3 8 : Notes bibliographiques par Rouard (catalogue des manuscrits)
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Étude des iligranes
1.7 | Étude des iligranes Le papier utilisé pour la copie permet de formuler quelques hypothèses quant au lieu de création. Trois iligranes sont présents dans le codex. Le iligrane majoritaire est celui représentant un bœuf portant une queue à trois bouts, proche du iligrane briquet 2776, présent à Poitiers en 1436 9 . Le deuxième, présent sur les feuilles du deuxième cahier, représente un bœuf identique au premier mais couronné. Le troisième est présent seulement à la page de garde. Il nous a été diicile d’établir si ce papier est d’origine médiévale. Il est certain qu’il est antérieur à la réfection de la reliure, celui-ci portant des mentions plus anciennes. Nos analyses porteront donc sur les deux iligranes des pages du texte. Le répertoire Picard 10 ne signale aucun motif de bœuf portant une couronne. C’est dans le catalogue Briquet 11 que nous pouvons trouver trois bovidés couronnés. Le iligrane briquet 2809 correspond à celui du manuscrit aixois. D’après les remarques de Briquet, ce iligrane ne se trouve que dans une zone particulière : Quand au bœuf couronné, 2808 à 2810, nous le croyons de provenance française, probablement poitevine 12 . La difusion du papier comportant ces iligranes correspond à une localisation géographique restreinte. La rédaction du manuscrit 428 à probablement eu lieu aux alentours de la ville de Poitiers. Cette thèse est également étayée par des traits linguistiques présents dans le texte rattachant la copie à la zone dialectale poitevine 13 .
9. C. M. Briquet, Les iligrannes [En ligne], Paris : Paris etc, 1907, url : http://www. ksbm.oeaw.ac.at, p. 197. 10. Les iligrannes Piccard [en ligne], url : http://www.piccard-online.de. 11. Briquet, Les iligrannes [En ligne], op. cit. 12. Ibid., p. 196. 13. Voir la partie grammaticale de la présente édition pour une étude détaillée de ces phénomènes.
Chapitre 1 . Le manuscrit A d’Aix-en-Provence
Figure 9 – Bœuf courroné, Briquet 2809, région de Poitiers
Figure 10 – Bœuf, queue à trois bouts, Briquet 2776, région de Poitiers
21
22
Étude des iligranes
Figure 11 – Tête de Bœuf, page de garde
Description des autres témoins
2
2.1 | Le manuscrit Br de Berlin 2.1.1
|
Description matérielle
Signalement Cote actuelle : Berlin (Allemagne), Preussischer Kulturbesitz, Staabibliothek zu Berlin, ms. Hamilton 226 Nombre de folios : 341 f° Dimensions : 325x240 mm Partie médiéval acéphale : lacunes complétées entre le XVIe et XVIIe siècle
Support Parchemin
Organisation du volume f° 1 à 12 : copie postérieure du texte médiévale (XVIe/XVIIe s.) f° 13 à 341v : partie médiévale (in XIVe début XVe s.)
Reliure Reliure : origine française, attribuée à Padeloup par le catalogue de la vente Hamilton Description : maroquin olive à encadrement de triple ilet maigre doré sur les plats ; dos orné de fers loraux, de points et d’étoiles aux entre-nerfs et de frises lorales sur les nerfs ; pièce de titre en maroquin rouge LE. ROMMANT. / .DE. MAITRE / .BERTRAN. / .DU. GLAICQUIN ; chants et chasses à dentelle dorée.
23
24
Le manuscrit Br de Berlin
2.1.2
|
Contenu
f°1-341 : La Chanson de Bertrand du Guesclin ; vers : alexandrins ; dialecte : Picard incipit : Seigneurs, or faictes paix pour Dieu le roy divin ; explicit : Dieu le pere nous doint et paix et paradis / Et il veuille amender trestous nos anemis / Et nous veuille garder trestous nos bons amis. Amen. f° 341r Titre inal. Explicit la vraye cronique de messire Bretrand / De Glayequin jadis connestable de France.
Bibliographie Description du manuscrit : D. Stutzmann et P. Tylus, Les manuscrits médiévaux francais et occitans de la Preussische Staatsbibliothek et de la Staatsbibliothek zu Berlin Preussischer Kulturbesitz : R. 1, Handschriften Bd. 5, Harrassowitz, 2007 Manuscripta Medievalia, url : http://www.manuscripta-mediaevalia. de
2.1.3
|
Remarques
La copie de la chanson connue sous la cote Hamilton 226 de la Staatbibliotek de Berlin est un des nouveaux témoins apparus depuis la précédente édition du texte. Tout comme le manuscrit Mn, Br est un objet hybride 1 . Sur les trois cent quarante-et-un folios qu’il contient, les douze premiers, probablement abimés, ont été restaurés entre le XVIe et le XVIIe siècle. Les folios 13r à 341v contiennent une version médiévale de la chanson et datent probablement du XVe siècle. La restauration du XVIIe siècle est donc moins importante que celle du manuscrit Mn. Au XVIIIe siècle, il faisait partie de la collection des ducs Hamilton père et ils avant d’être acheté par la bibliothèque de Berlin en 1882. 1. Nous renvoyons pour une description complète du manuscrit à la notice contenue dans D. Stutzmann et P. Tylus, Les manuscrits médiévaux francais et occitans de la Preussische Staatsbibliothek et de la Staatsbibliothek zu Berlin Preussischer Kulturbesitz : R. 1, Handschriften Bd. 5, Harrassowitz, 2007, ainsi qu’à la celle présente sur le site internet Manuscripta Medievalia, url : http://www.manuscripta-mediaevalia.de
Chapitre 2 . Description des autres témoins
25
Tout comme le manuscrit Mn, Br utilise dans son prologue le nom de Trueller pour désigner l’auteur du texte. Le texte qu’il renferme n’est cependant pas le même que celui contenu dans le codex du Mans. Le manuscrit du Mans n’est donc pas un objet unique, Br ayant de nombreux traits communs avec lui, tant au niveau de la confection que de son contenu.
2.2 | Le manuscrit L de Londres 2.2.1
|
Description matérielle
Signalement Cote acutelle : Londres (Angletterre), British Library, ms. Yates Thompson 35 Cote ancienne : British Library, ms. 20850 2 Dimension : 310 x 225 mm Nombre de folios : 289 f° Manuscrit homogène
Support Parchemin
Mise en page Type de copie : copie à longues lignes
Décoration Miniatures (14) : f° 1, 8, 16, 51, 62, 71, 80v, 90v, 129, 136, 177, 210v, 246, 250 2. Il y a eu un changement de cote du manuscrit depuis l’édition de J.C. Faucon, celui-ci le référençant comme « le ms de Londres, British Library, 20850 »(Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, op. cit., p. 311). La description donnée de ce codex dans son édition correspond bien à celle du manuscrit Yates Thompson 35. La cote 20850 n’est plus valide depuis le déménagement des collections de manuscrits médiévaux du British Museum vers la British Library.
26
Le manuscrit L de Londres Initiales : or iligranées en alternance encre bleue et rouge
Reliure Date : 18e siècle Type : marocain olive
2.2.2
|
Histoire
Destinataire Pierre de Craon : (1345-1409), chancelier de Louis, duc d’Anjou, probablement exécuté avant 1392, date de coniscation des biens du chancelier Armes de la famille Craon portées par deux colombes présentes sur le manuscrit (f°. 8, 51, 129).
Marques d’anciens possesseurs f° 1 : Inscription du titre, (15e s. ?) : « La vie de Bertrand du Guesclin (...) comte de Longueville et connestable », mention presque efacée f° 228v : Daniel Colombe, XVIIe s. : inscription « pour moy Daniel Colombe a qui appartient ce livre. D Colombe… »
Collections dans lesquelles le manuscrit apparaît Louis Jean Gaignat (1697-1768) : inventaire de sa collection : tome II, n. 3041 p. 126 G. F. Debure, Supplement à la Bibliographie instructive, ou Catalogue des livres du cabinet de feu M. Jean Gaignat, chez GuillaumeFrançois de Bure, 1769, ; acheté par Louis de la Vallière Louis César de la Baume-le-Blanc (1708-1780) : duc de la Vallière, manuscrit n° 2778, (cf Catalogue des livres de la bibliothèque de feu M. le duc de la Vallière, Paris : Bure (de), G., 1783, p. 258-259) Jean-Baptiste Joseph Barrois (1784-1855) Bertram Ashburnham (1797-1878) Henry Yates Thompson (1838-1928) inscription contre-plat : « [MS] civ / £bri.e.e [i.e. £120.0.0] / [bought from] Barroi / (?) / July 1901 »
Chapitre 2 . Description des autres témoins
27
Légué au British Museum en 1941 par Mrs Henry Yates Thompson
2.2.3
|
Images du manuscrit
Figure 1 – folio 51r
Figure 2 – folio 246r
Les images du manuscrit sont tirées du site internet http://www.bl.uk/ catalogues/illuminatedmanuscripts/record.asp?MSID=8125&. D’autres clichés du codex sont consultables à cette adresse.
2.2.4
|
Remarques
La cote du manuscrit de Londres a changé depuis l’édition de J.C. Faucon. La collection manuscrite du British museum a été déménagée à la British Library. La cote additional 20850 n’est désormais plus valable. Le codex qui nous intéresse porte désormais le numéro 35 de la collection Yates Thompson. Il faut aller chercher dans le catalogue en ligne des manuscrits enluminés de la bibliothèque pour en trouver une description complète 3 . Le premier possesseur 3. Nous renvoyons à cette description complète du manuscrit et des ses anciens possesseurs pour quiconque voudrait en savoir d’avantage sur ce codex British Library, Catalogue of illuminated manuscripts, url : www.bl.uk/catalogues/illuminatedmanuscripts.
28
Le manuscrit Mn du Mans
et commanditaire fut sans doute Pierre de Craon avant sa disgrâce en 1392. Le manuscrit passe ensuite dans des collections prestigieuses du XVIIIe siècle comme la bibliothèque de Louis Jean Caignat (1697-1768) ou celle du duc de la Vallière (1708-1780). Il entre en 1901 dans la collection d’Henry Yates Thompson qui lèguera une grande partie de ses livres à la British Library à sa mort en 1941 4 . Le manuscrit de Londres est un des rares de la tradition à comporter des miniatures 5 . On en dénombre quatorze qui illustrent plusieurs scènes marquantes du texte comme la bataille de Cocherel ou la capture et la mort de Dampietre.
2.3 | Le manuscrit Mn du Mans 2.3.1
|
Description matérielle
Signalement Cote actuelle : Le Mans (France), Médiathèque Louis Aragon, ms 14 Dimension : 245 × 180 mm Nombre de folios : 349 f° (698 pages) Date : XVe-XVIIIe (parties du manuscrit médiéval original copiées et restaurées au XVIIIe siècle)
Support Papier
Encre Encre noire 4. Pour en savoir d’avantage sur ce codex, nous renvoyons à la notice détaillée rédigée par la British Library consultable sur internet à l’adresse suivante : http ://www.bl.uk/catalogues/illuminatedmanuscripts en tapant le mot clé Cuvelier dans la barre de recherche, dernière consultation le 01/09/2015 5. Des reproductions de neuf de ces enluminures sont consultables sur internet à l’adresse suivante : http ://www.bl.uk/catalogues/illuminatedmanuscripts.
Chapitre 2 . Description des autres témoins
29
Organisation du volume Pagination : marge supérieure, encre noire Partie recopiée au XVIIIe siècle : p. 1 à 76, 83 à 86, 93 à 95, 243 à 269, 334 à 335, 364 à 365, 462 à 698 Réclames (parties médiévales) : p 127 place fait ; p. 146 tres bonne fermeure ; p. 178 fors que tout al ; p. 210 et absolucion ; p. 242 li autre Carualay ; p. 301 qui furent ; p 333 y ot ce jour ; p. 397 vous diray ; p. 429 seigneurs apres ; p. 461 que vous espouseres
Mise en page Type de copie : Copie à longues lignes Partie restaurée : 39 lignes par page Partie médiévale : 31 lignes par pages, initiale de chaque vers décalée
Décoration Partie médiévale : lettres d’attente pour l’enlumineur à chaque début de laisse. Décoration non réalisée.
Colophon p. 698 (partie restaurée) : Explicit la vraye cronique de Messire Bertrant / de Glaequin jadis connestable de France
Reliure Type : reliure carton, très abimée
Possesseurs et lecteurs Abbaye Saint-Vincent du Mans (XVIIIe s.) : p. 1 : Le Rouman de mss Bertran du Glaequin jadis chevalier et connestable. Inscrit au catalogue de la bibliothèque de Saint Vincent du Mans. 1719.
30
Le manuscrit Mn du Mans
2.3.2
|
Contenu
p.1 à 698 : La Chanson de Bertrand du Guesclin ; vers : alexandrins ; date : XVe et XVIIIe s. ; incipit : Seigneurs or faites paix pour Dieu le Roi divin ; explicit : et veuille amander trestous nos anemis/et nous veuille garder trestous nos bons amis/Amen
Bibliographie Edition de variantes : J.C. Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991 Reproduction : Manuscrit entièrement numérisé, disponible sur I.R.H.T., BVMM Bibliothèque virtuelle des manuscrits médiévaux, url : http : //bvmm.irht.cnrs.fr/, visité le 03/09/2015,
2.3.3
|
Images du manuscrit
Les images du manuscrit Mn proviennent de la page internet http://bvmm. irht.cnrs.fr/consult/consult.php?reproductionId=2892. Le manuscrit est entièrement numérisé et consultable sur le site de l’IRHT http://bvmm. irht.cnrs.fr/.
2.3.4
|
Remarques
Le manuscrit du Mans, comme le manuscrit Br de Berlin, est un manuscrit hybride dont des parties manquantes ou abimées ont été recomposées entre le XVIe et le XVIIe siècle. La reliure verte en carton laisse voir des traces d’usure marquées. Sur la première page on peut lire d’une main du XVIe ou XVIIe siècle : Le rouman de Messire Bertran du Glaiequin jadis chevalier et contestable de France. Inscrit au catalogue de la bibliothèque de Saint Vincent du Mans 1719.
2.3.5
|
Partie médiévale
Le texte copié au Moyen Âge commence à la page 77. C’est un texte à longues lignes dont l’initiale de chaque vers est décalée. Le manuscrit ne comporte aucun
Chapitre 2 . Description des autres témoins
31
Figure 3 – page 1
Figure 4 – page 77 : début de copie médiévale
Figure 5 – page 462 : in de copie médiévale
Figure 6 – page 698
32
Le manuscrit Mn du Mans
ornement, laissant apparaître des lettres d’attente à l’attention de l’enlumineur pour chaque début de laisse. La marge supérieure du premier folio médiéval du codex comporte la mention suivante : Suite de l’ancien roman de messire Bertran du Guesclin dot le commencement manque presque... l’an 1363 ou 64. On remarque que cette mention utilise ”Guesclin” et non ”Glaiequin” comme pour le premier feuillet du texte 6 . L’écriture semble d’ailleurs antérieure à celle des parties restaurées. Il s’agit certainement ici d’une marque d’un ancien possesseur de la partie médiévale déjà abimée par le temps. On retrouve la marque de cette écriture post Moyen Âge et antérieure au XVIIe siècle à la page 82. On peut lire dans la marge inférieure droite : il manque ici quelques feuillets. Cette remarque a été raturée par le copiste du XVIIe siècle pour signaler que les folios n’étaient dès lors plus manquants puisqu’il venait de les copier, ces feuillets constituant les pages 83 à 86 du codex. On retrouve une marque semblable de la même main à la page 92 : Il manque icy quelque chose Un feuillet copié au XVIIe siècle est également inséré après cette phrase, elle n’est cependant pas cancellée. La marge inférieure droite de la page 440 ofre au lecteur une mention assez remarquable. Le dernier vers est recopié au bas de la page dans une écriture gothique, diférente de la cursive utilisée jusqu’ici 7 . Un autre vers est placé dans la marge de droite dans une écriture gothique plus large que la première, mais celui-ci est à moitié rogné par le massicotage de la reliure.
2.3.6
|
Marques du XVIe/XVIIe siècle
De nombreux feuillets ont été refaits postérieurement pour tenter de remplacer les pages abimées du manuscrit : les pages 1 à 76, 83 à 86, 93 à 95, 243 à 269, 334 à 335, 364 à 365, 462 à 698 ont été copiées et ajoutées. Chaque 6. La diversité des formes du nom du protagoniste semble gêner le restaurateur qui corrige le nom de ”Guesclin” présent dans le texte médiéval en ”Claiquin dans la marge gauche de la page 80. 7. Ce vers est le suivant : Que tout ce qu’il encontre trebuche en sablon
Chapitre 2 . Description des autres témoins
33
début de laisse est marqué par un léger retrait et une majuscule en début du vers d’ouverture. Le copiste postérieur ne se contente pas de reproduire le texte manquant, il fait régulièrement des commentaires sur le texte qu’il copie ainsi que sur la partie médiévale. Les commentaires peuvent apparaître dans les marges comme dans le texte lui-même. Il peut s’agir de moyens de repérage, comme par exemple à la page 53 où l’on peut lire dans la marge de droite : Charles donne la Roche d’Orien à Bertran. Ou encore comme à la page 55 : Siege de Dinan Ces mentions marginales peuvent également être des précisions historiques, comme à la page 60 où l’on trouve ”Tiphaine Raguenot”, le nom complet de l’épouse de Bertrand, là où le texte copié n’utilisait que son prénom. Le copiste du XVIIe siècle propose parfois des notes de lectures. Par exemple, on trouve le vers suivant à la page 106 : Depuis fut adjourné encontre Pheleton En regard de ce vers dans la marge de droite se trouve l’inscription suivante : est adjourné par Feleton Le restaurateur a souhaité ici traduire le encontre par par et donne ainsi une traduction du vers ain d’aiguiller son lecteur vers le sens du texte médiéval. Le copiste du XVIIe siècle intervient également au sein du texte médiéval en ajoutant ou retranchant des morceaux de vers ou bien des passages entiers. À la page 192, le copiste insère un vers qu’il estime manquant : Et celle de Harcourt qui est blanche comme fee et celle d’Albret celle contree liee qui dolente est au cuer qu’ainsi sui asenee Le deuxième vers est ajouté postérieurement par le copiste du XVIIe siècle entre ceux du texte du Moyen Âge.
2.4 | Les manuscrits Mp et Pn de Montpellier et Paris Grâce aux travaux de J.C. Faucon, il a été possible d’établir que les manuscrits Mp et de Pn sont le début et la in d’un même codex 8 . Nos recherches ont 8. C’est d’ailleurs cette version de la chanson que l’éditeur a choisi comme manuscrit de base. Pour une description précise de ces deux œuvres, voir J.C. Faucon, La chanson de
34
Les manuscrits Mp et Pn de Montpellier et Paris
cependant permis de préciser la provenance de chacune des parties.
2.4.1
|
Description matérielle
Signalement Cote actuelle : Montpellier (France), Bibliothèque interuniversitaire. Section de Médecine, H 250 (première partie) Paris (France), BnF, Nouvelles acquisitions françaises, ms 993 (seconde partie) Dimensions : 260x190 mm Nombre de folios : Mp : 205 f° ; Pn : 140 f° ; Total : 342 f° Date : in du XIVe s. selon J.C. Faucon ; milieu du XVe s. selon T. Lassabatère Origine : région parisienne, selon J.C. Faucon ; région parisienne et rouennaise selon T. Lassabatère 9
Support Papier Filigranes : coupe à couvercle fermé (Briquet n°4583), haches d’armes (Briquet n°7510), lettre P gothique, gonfanon (Briquet n°11856), aigle.
Organisation du volume Manuscrit séparé en deux parties : probablement à la in du XVe siècle Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991, p. 313-323 9. Les travaux récents mettent en doute les conclusions de J.C. Faucon. L’ensemble manuscrit formé par Mp et Pn ne date pas de la in du XIVe siècle mais bien de la première moitié du XVe. Le manuscrit aurait connu deux aires de composition diférentes : Paris et Rouen. Voir à ce sujet T. Lassabatère, « Difusion et postérité de l’œuvre d’Eustache Deschamps : le témoignage des manuscrits », Les ”dictez vertueulx” d’Eustache Deschamps : forme poétique et discours engagé à la in du Moyen Age, 2005, p. 107–120, p. 109, ainsi que la notice consacrée au manuscrit Mp disponible sur la base de données Jonas de l’I.R.H.T., Base JonasIRHT/CNRS, Section romane, notice de ”MONTPELLIER, Bibliothèque interuniversitaire. Section de Médecine, H 250 ; PARIS, Bibliothèque nationale de France, Manuscrits, nouv. acq. fr. 00993, url : http://jonas.irht.cnrs.fr/manuscrit/36277, visité le 04/10/2015,
Chapitre 2 . Description des autres témoins
35
Signatures : Mp : f° 2 (a ii), plusieurs aux cahiers b et c, 42 (d i), 60 (e i), 125-126 (i i et i ii), 141 (k i), 160 (l iiii), 177 (m v) Pn : pas d’information disponible Cahiers : Mp : 13 cahiers ; I (14, f.1-13, du fait de 2 bis), II (12, f. 14-25), III (16, f. 26-41), IV (18, f. 42-59), V (16, f. 60-75), VI (18-1, f. 76-92 ; visible ce qui reste du f. entre 75-76), VII (16, f. 93-108), VIII (16, f. 109-124), IX (16, f. 125-140), X (16, f. 141-156), XI (18-2 ?; cfr. talon entre 156 et 157 ; f. 157-172), XII (14, f. 173-186), XIII (18-1, f. 187-203) Pn : pas d’information disponible
Ecriture Type : bâtarde typique, inclinée a droite, lettres parfois allongées dans la première et dernière ligne
Mise en page Type de copie : copie à longues lignes, entre 34 et 37 lignes par page
Colophon f° 137 : Explicit du bon connestable de France / Messire Bertran du Guesclin
Reliure Mp : information non disponible Pn : Reliure veau vert, au armes d’Urfé (de vair au chef de gueules ; I et C entrelacés aux quatre coins)
Possesseurs et lecteurs Pn — Johannis Morelet (XVe s, voir remarques) : f. 137 feuille collée à l’intérieur du premier plat et recopié f° 137 : Iste liber est Johannis Morelet advocati et consiliari Notri Regis
36
Les manuscrits Mp et Pn de Montpellier et Paris — Maistre Jehan Philippes (XVIe s, voir remarques) : f°140v Ce present livre apartient a maistre Jehan Philippes, demourant en la paroisse Sainct Sauveur de Rouen / Le livre du bon connestable de France, messire Bertran du Guesclin et autres bon rommans — Claude D’urfé (1501-1558) : Armes de Claude d’Urfé sur la reliure Mp — Bibliothèque Bouhier (1666-1744) : Sur page de garde en capitales rouges « ROMANT DE LA VIE DE BERTRAND DV GUESCLIN CONNESTABLE DE FRANCE »au-dessous en noir « PAR JEAN LI CUVELIERS. MS. De la Bibliothèque de Mr. le Président Bouhier D 72 MDCCXXI ». cotes D 72, D13, E22 10 — Marc Antoine Chartraire de Bourbonne (1737-1781) (héritier de Bouhier) ; manuscrit cité dans l’inventaire de sa collection Dijon, BM, ms 987 — Abbaye de Clairvaux (XVIIIe s.) : achat en 1782 de la collection Bouhier — Bibliothèque Médecine de Montpellier : achat en 1795 des manuscrits de l’abbaye de Clairvaux
Bibliographie Edition : — Edition Texte 1 : J.C. Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991, manuscrit de base — Edition Texte 2 : E. Deschamps, Anthologie, sous la dir. de Clotilde Dauphant, Lettres gothiques, Paris : Livre de poche, 2014, p. 130, p. 132 et p. 380 Analyse : — J.C. Faucon, « Note sur deux manuscrits de la Chanson de Du Guesclin par Cuvelier », Revue d’histoire des textes 8, 1978, p. 319– 323 — A. Vernet, « À propos d’un manuscrit de la Vie de Du Guesclin par Cuvelier », Revue d’histoire des textes 8, 1978, p. 325–327
2.4.2
|
Contenu
10. A. Ronsin, La Bibliothèque Bouhier. Histoire d’une collection formée du XVIe au XVIIIe siècle par une famille de magistrats bourguignons. Impr. Jacques et Demontron, 1971.
Chapitre 2 . Description des autres témoins
37
Texte 1 f°1-204v (Mp) / 1-f°137 (Pn) : La Chanson de Bertrand du Guesclin ; vers : alexandrins ; langue : français incipit : Seigneur, or escoutez, pour Dieu le roi divin explicit : Dieux liperes nous doint et paix et paradis//et il vuille amender trestouz nos anemys
Texte 2 f°137r à 140v (Pn) : série de poèmes consacrés au connétable du Guesclin — Pièce 1 : auteur : Eustache Deschamps ; incpit : tuit li vaillant et li preux de jadis ; explicit : du plus vaillant qui soit en tout le monde — Pièce 2 : auteur : Eustache Deschamps ; incipit : estoc d’onnour et arbre de vaillance ; explicit : plorez plourez leur de chevalerie — Pièce 3 : auteur : Eustache Deschamps ; incipit : tuit chevalier qui alez par le monde ; explicit : tuit chevalier excetera — Piece 4 : auteur : anonyme ; incipit : Bien doit pleurer chevalerie ; explicit : et par son fait Espagne conquestee — Pièce 5 : auteur : anonyme ; incipit : l’escu d’argent a un aigle de sable ; explicit : l’escu d’azur a trois leurs de lys d’or — Pièce 6 : auteur : anonyme ; incipit : en l’an de l’Incarnation/mil trois cens quatre vins ans ; explicit : si bon et de tel ordonnance/que il soit au proit de France — Pièce 7 : auteur : anonyme ; incipit : plourez princes ducs et barons ; explitcit : les leurs de lys du lieupart felon Ces mêmes poèmes se trouvent à la in des manuscrits A et P. Les pieces 1, 2 et 3 sont présentes dans le recueil médiéval des œuvres d’Eustache Deschamps, le manuscrit BnF fr. 840. Ils sont édités et traduits dans l’anthologie consacrée au poète parue récemment 11 .
2.4.3
|
Anciens possesseurs du manuscrit Pn
Le manuscrit de Paris contient la in du poème. À la in de celui-ci, on peut lire : 11. Deschamps, Anthologie, op. cit., p. 130, p. 132 et p. 380.
38
Les manuscrits Mp et Pn de Montpellier et Paris Iste liber est Johannis Morelet, advocati et consiliarii domini nostri Regis
Des travaux récents mettent en doute les conclusions de J.C. Faucon concernant l’origine et la date du manuscrit Mp/Pn. L’ensemble ne daterait pas de la in du XIVe siècle mais de la première moitié du XVe et aurait été probablement une double origine parisienne et rouennaise 12 . J.C. Faucon avait identiié Jean Morelet comme un procureur au baillage de Dijon au XVIe siècle. Or, nos recherches nous ont amenée à rapprocher cette signature d’une autre, celle de Jean Morelet, avocat normand de la in du Moyen Âge. Dans sa thèse sur les représentations hagiographiques à Rouen de la in du Moyen-Âge, Alexandra Blaise décrit une pierre tombale de la chapelle de la Vierge à Rouen : Jean Morelet et Nicole Daguenet sont tournés l’un vers l’autre en prière sous une arcature [...]. Deux inscriptions rappellent la date de leur mort et leur statut social : « Ci Gist Jehan Morelet Seigneur d’Anquetierville et en ses jours Advocat et conseiller du roy en pais de Caulx et bailli de Eu et de Longueville, qui trespassa l’an de grace Mil CCCC et XXI, le XXVII e jour de janvier » ; « Ci Gist Nicole Daguenet, Fame dudit Morelet qui trespassa l’an de grace Mil CCCC et XXX, le VIe jour de novembre. » 13 Jean Morelet serait donc un des premiers possesseurs du manuscrit puisque il décède en 1421. Nous pouvons trouver d’autres traces de l’avocat du roi dans les archives de Seine-Maritime : 1386-1387. – DUCHÉ DE LONGUEVILLE. – « Le compte Guillaume de Paris, vicomte et receveur de noble et puissante dame et Madame la contesse de Bar, dame de Cassel, on sa terre de la conté Longueville et de Vascueil, des receptes et mises faictes, pour et au nom de ma dicte dame la contesse, en sa dicte terre de Longueville, par son dit viconte et receveur, au terme de Pasques l’an de grâce mil CCC.IIII xx et sept. »– Gages et pensions à Jehan Beaucompère, bailli de Madame ; – à Guillaume de Paris, vicomte et receveur ; – à Ricart Le 12. Jonas-IRHT/CNRS, Section romane, notice de ”MONTPELLIER, Bibliothèque interuniversitaire. Section de Médecine, H 250 ; PARIS, Bibliothèque nationale de France, Manuscrits, nouv. acq. fr. 00993, op. cit. ; Lassabatère, « Difusion et postérité de l’œuvre d’Eustache Deschamps : le témoignage des manuscrits », op. cit., p. 109. 13. A. Blaise, Les représentations hagiographiques à Rouen à la in du Moyen Age (vers 1280 - vers 1530), version électronique disponible sur http ://www.theses.parissorbonne.fr/TheseABlaise.pdf, 2009, p. 451.
Chapitre 2 . Description des autres témoins
39
Petit, procureur de Madame ; – à Jehan Morelet, avocat du Roi au bailliage de Caux et de Madame 14 Le manuscrit est certainement originaire de la région de Rouen, ce que conirme l’étude de certains iligranes 15 . De plus, Jean Morelet était attaché au duché de Longueville, région coniée à Bertrand du Guesclin par le roi de France en 1364. À côté de cet ex-libris on trouve une autre mention qui semble postérieure : Ce present livre apartient a maistre Jehan Philippes, demeurant en la paroisse Sainct Sauveur de Rouen. Les recherches dans les archives de Seine-Maritime donnent deux résultats pour ce patronyme : 166-1769. – Fondations en l’église Saint-Martin-sur-Renelle : de Katherine Marcel, veuve de Jehan Le Gouppil, en son vivant, écuyer, seigneur du Coudray, ille de feu Etienne Marcel, en son vivant, bourgeois de Rouen, 1509 ; alors prêtres de la dite église, maître Guillaume Marcel, vicaire, maître Guilleberl Pouchet, messires Pierre Cuide, Estienne de la Quieze, maître Jehan Philippe, cités après les Trésoriers Jehan Laniy, Pierre de Lestre et Jean Pappillon. 16 1543-1563. – Procès, au sujet des dîmes de Ricarville, entre le chapitre et Jean Philippes, curé de la paroisse. –< < Examen de témoins faict à Arques devant nous Hucgues Estienne, à la requeste et instance des doyen, chanoines et chappitre Notre Dame de Rouen, à rencontre de maître Jehan Philippes, curé de Ricarville, 1544. » 17 Il est probable que le possesseur du manuscrit soit le premier Jehan Philippe, vivant en 1509. Il serait alors celui à qui les d’Urfé ont acheté le manuscrit. Anne de Graville, belle-mère de Claude d’Urfé, avait acquis de nombreux livres de sa 14. Archives départementales de Seine-Maritime, C. 2805. (Cahier.) – 19 feuillets, papier, non relié. Consultable en ligne, Archives départementales de Seine et Marne, http ://www.archivesdepartementales76.net, dernière consultation le 01/09/2013. 15. Lassabatère, « Difusion et postérité de l’œuvre d’Eustache Deschamps : le témoignage des manuscrits », op. cit., p. 109. 16. G. 7151. (Liasse.) – 12 pièces, parchemin ; 27 pièces, papier Archives départementales de Seine et Marne, op. cit. 17. G. 4170. (Liasse.) – 15 pièces, parchemin ; 44 pièces, papier ibid.
40
Le manuscrit Nh de New Haven
collection à Rouen 18 . Il pourrait s’agir du chaînon manquant entre Rouen et Dijon. Le codex a ensuite été transmis à Claude d’Urfé qui lui a donné une reliure portant ses armes.
2.5 | Le manuscrit Nh de New Haven 2.5.1
|
Description matérielle
Signalement Cote actuelle New Haven (USA), Beinecke Library (Yale University), ms. 990 Dimension : 363 x 269 mm Nombre de folios : 125 f° Manuscrit incomplet
Support Parchemin
Encre Ecriture : encre noire Décor : encre rouge
Organisation du volume Signatures : 74r : F iii ; 75r : F iiii ; 80r : c i ; 81r : c ii ; 82r c iii ; 83r c iiii ; 88r : D i ; 89r : D ii ; 90r : D iii ; 91r : D iiii ; 96r : C i ; 97r : C ii ; 98r : C iii ; 99r : C iiii ; 104r : B i ; 105r : B ii ; 106r : B iii ; 107r : B iiii ; 112r : a i ; 113r : a ii ; 114r : a iii ; 115r : a iiii Réclames : f° 8v car li ducs ; f° 16 celui de panebrot ; f° 24 or fu a pontorson ; f° 32 vos souldoiers sommes ; f° 40 car li droy que jay ; f° 48 quil gardent ceste ; f° 55 en portugal yrons ; f° 63 la fut des haulz ; f° 71 a bert. monss. ; 18. Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, op. cit., p. 314.
Chapitre 2 . Description des autres témoins
41
f° 79 mais enco n’estoit point ; f° 87 sil ny avoit que moy ; f° 95 englois irent sur eux ; f° 103 de bresiere assaillir ; f° 111 bonne dague et espee ; f° 119 qui dirent au commun
Mise en page Type de copie : copies sur deux deux colonnes, 46 lignes par colonne
Decoration f° 1 : marge inférieure illustrée (scène de bataille) très efacée ; initiale décorée (du Guesclin terrassant un dragon) ; baguette avec rinceaux de vignes marge gauche Initiales : début de chaque laisse, encre noire iligranée de rouge
Possesseurs et lecteurs Franciscus de Meyms (XVe s ?) : dernière page de garde : Je me recomende humblement a vous en plorant tendrement/Que vous ayez de moy souvenamse m’amour la plus bielle de Franche/Honour a dames/Franciscus de Meyms : XVe siècle ?, Picardie ? Etienne Tabourot des Accords (1547-1590) : f° 1 A moy Tabourot/A tous acords : XVIe s., marque du poète français Etienne Tabourot des Accords ; mention similaire dans le ms BnF fr. 60, disponible sur www. gallica.bnf.fr Richard Heber (1773-1833) : information donnée par la notice du manuscrit rélisée par la bibliothèque et consultable à l’adresse internet suivante http://hdl.handle.net/10079/bibid/9892502 Sir Thomas Phillipps (1792-1872) : ms 8193
Héraldique Plusieurs blasons sont dessinés sur la dernière page de garde à l’encre noire. A trois têtes de lévriers : armes de Milon de Beaumanoir, initiales M/B tracées sur le côté De sable plein : armes de la famille Gournay
42
Le manuscrit Nh de New Haven D’hermine bandé d’hermine : ?
Deux autres blasons restent diicilement descriptibles.
2.5.2
|
Contenu
f° 1 à 124v : La Chanson de Bertrand du Guesclin ; vers : alexandrins ; langue : français ; dialecte : picard ? incipit : Seigneurs or faittes paix pour Dieu le roy divin / Que nostre sire Dieux qui de l’yave ist vin ; explicit : Thiebaut du Pont quant oit ce Anglois serrement ; texte incomplet de la in
Bibliographie Consultation du manuscrit numérisé : Beinecke Digital Collections, http ://brbldl.library.yale.edu/vuind/Record/3726742, dernière consultation le 01/09/2015
2.5.3
|
Remarques
Le manuscrit de Yale est un des témoins de la chanson recensés depuis peu. Le manuscrit est amputé des derniers folios traitant de la mort de Bertrant, le dernier vers du folio 124v coupant la chanson au milieu d’une phrase 19 . Chaque page se compose de deux colonnes d’environ 45 vers chacune, soit environ 22500 vers. C’est donc ici une version plus longue de la chanson que celle du manuscrit d’Aix. À la lecture, elle s’avère diférente de la version éditée par J.C. Faucon et de celle d’Aix, bien que la copie se réclame toujours de Cuveller 20 .
2.5.4
|
Anciens possesseurs
Plusieurs traces d’anciens possesseurs sont dispersées dans le codex. Les marques les plus anciennes se concentrent sur le folio 125. On peut lire au bas du recto : Je me recomende humblement a vous en plorant tendrement Que vous ayez de moy souvenamse m’amour la plus bielle de Franche. 19. Thiebaut du Pont quant oit ce Anglois serrement, folio 124v. 20. Folio 1r.
Chapitre 2 . Description des autres témoins
43
Honour a dames Franciscus de Meyms La palatalisation du mot France ainsi que la lettre -i ajoutée à l’adjectif belle renvoie aux dialectes picards de la in du Moyen Age. L’écriture est très proche de celle du reste du manuscrit. Aucune de nos recherches n’a permis d’identiier Franciscus de Meyms. Le patronyme Meyms/Meyns semble originaire des Flandres occidentales, ce que conirment les quelques traits dialectaux identiiés dans cette courte dédicace. Plus haut sur le folio nous pouvons lire : A tort a droit et sans mesure Qu’il l’a il a bien basidure. Le sens du dernier vers nous échappe. Ces lignes semblent plus tardives que celles de la dédicace de Franciscus. Sur la première page on trouve l’inscription suivante : A moy Tabourot A tous acords Le manuscrit a appartenu au poète français de la Renaissance Étienne Tabourot, plus connu sous le nom de Tabourot des Accords. On retrouve les mêmes mentions dans le manuscrit fr 60 de la BnF 21 que Tabourot possédait également dans sa bibliothèque 22 . Le manuscrit intègre au XIXe siècle l’immense collection de Sir Thomas Phillipps au côté du manuscrit de Notre Dame 23 . Il a rejoint les collections de la Beinecke Library en 2003.
2.5.5
|
Images du manuscrit
Les images sont tirées du site internet Beinecke Digital Collections, http ://brbldl.library.yale.edu/vuind/Record/3726742, dernière consultation le 01/09/2015. Le manuscrit a été entièrement numérisé et est consultable à cette même adresse. 21. Paris, Bibliothèque Nationale de France, ms fr. 60 (ancien 6737 ; ancien Colbert 168). Le microilm du manuscrit est consultable sur internet à l’adresse suivante : http ://gallica.bnf.fr/ark :/12148/btv1b9059221b/f1.item 22. La devise de Tabourot ainsi que sa signature se retrouvent au début et à la in de deux des trois romans antiques composant le manuscrit : Le Roman de Thèbes (folio 1r et 41r) et Le Roman d’Énéas (folio 168r). 23. Le manuscrit de Yale portait dans cette bibliothèque la côte 8193 et celui de Notre Dame le suivait directement avec la côte 8194.
44
Le manuscrit Nh de New Haven
Figure 7 – folio 1r
Figure 8 – folio 124v : in du texte
Figure 9 – folio 125r : Blasons et mentions d’appartenance
Figure 10 – folio 125v : texte efacé (inventaire ?)
Chapitre 2 . Description des autres témoins
45
2.6 | Le manuscrit Nd de Notre Dame 2.6.1
|
Description matérielle
Signalement Cote actuelle : Notre Dame (USA), Hesburg Library, ms Fr c. 2 Anicienne cote : Corbett 51 (voir remarques) Nombre de folios : 298 folios Date : 28 mai 1464 (colophon) Origine : Saint-Denis (France), voir remarques Manuscrit homogène
Support Papier Filigranes : Briquet 10008, 385 et 8593 (voir remarques)
Mise en page Type de copie : copie à longues lignes
Décoration Initiales : début de chaque laisse, iligranées bleues et rouges
Colophon f° 298 : encre rouge ; Ce fut fait et par escrypt / le lundy xxviiie jour de may mil iiiic lxiiii
2.6.2
|
Contenu
f° 1 à 298 : La Chanson de Bertrand du Guesclin ; vers : alexandrins ; langue : français incipit : Seigneurs or faites pais pour Dieu le roy divin ;
46
Le manuscrit Nd de Notre Dame explicit : Chy ine de Bertran qui rengna loyaulment/Dieux ait de luy pitié par son conmandemant/et nous doinst joye et vie tout par amendement/Amen
Bibliographie Description : J.C. Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991 J. Corbett, Catalogue of the medieval and renaissance manuscripts of the University of Notre Dame, University of Notre Dame Press, 1978 Digital scriptorium, url : http : / / bancroft . berkeley . edu / digitalscriptorium/ Edition : edition de variantes : J. C. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991
2.6.3
|
Images du manuscrit
Des images du manuscrit sont consultables à l’adresse suivante : Digital scriptorium, url : http://bancroft.berkeley.edu/digitalscriptorium/.
2.6.4
|
Remarques
La copie a été réalisée sur papier et comporte 298 folios 24 . Le manuscrit Nd est le plus récent des témoins à contenir la chanson du connétable de France. En efet, on trouve au dernier folio un colophon indiquant une date : Ce fut fait et par escrypt le lundy xxviiie jour de may mil iiiic lxiiii La copie a été terminée le 28 mai 1464. Près de vingt-cinq ans après la copie d’Aix et presque quatre-vingt ans après l’émergence des premiers manuscrits du texte, la légende du connétable reste encore vivace et la version en vers continue d’être difusée. Le manuscrit a changé de cote depuis le dernier catalogue des collections médiévales de la bibliothèque réalisé par James Corbett et publié en 1978 25 . 24. Pour une description plus détaillée du manuscrit, voir Digital scriptorium, url : http: //bancroft.berkeley.edu/digitalscriptorium/ 25. J. Corbett, Catalogue of the medieval and renaissance manuscripts of the University of Notre Dame, University of Notre Dame Press, 1978.
Chapitre 2 . Description des autres témoins
Figure 11 – folio 1r
47
Figure 12 – folio 298v : Colophon avec date
L’établissement d’un nouveau classement dirigé par le Docteur David T. Gura est en cours de rédaction. Le manuscrit répond désormais au nom de Fr. c. 2 qui vient remplacer la cote Corbett 51 dans les étagères de l’Hesburg Library.
Filigranes et localisation du codex Une erreur apparaît dans l’identiication des iligranes de la notice du codex sur le site internet Digital Scriptorium 26 . Les premiers cahiers du folio 1r à 100v présentent une licorne comme motif iligrané. Cette igure est répertoriée comme étant proche du iligrane Briquet 11008. Or, cette référence correspond à une image représentant une main couronnée. Il s’agit en fait du Briquet 10008, licorne simple à tête de bouc. Deux autres motifs sont visibles dans les autres cahiers : une ancre qui semble correspondre au Briquet 386 et la lettre P surmontée d’un leuron à quatre feuilles que l’on peut rapprocher du Briquet 8593. 26. Digital scriptorium, op. cit.
48
Le manuscrit P de Paris
La licorne et la lettre P ont été observées à Saint-Denis en 1465. Cette date, très proche de la date de copie donnée par le colophon, peut constituer un indice assez solide pour la géolocalisation du codex. Seule l’ancre identiiée comme 386 vient contredire cette hypothèse. Cependant, en comparant le iligrane 386 avec celui qui le précède dans le catalogue, le 385, nous remarquons une similitude tout à fait frappante. Le motif 385 date comme les deux précédents de 1465 et a pour origine géographique Saint-Denis. Il est tout à fait probable que le rédacteur de la notice ait confondu les iligranes 385 et 386. Cependant, l’impossibilité d’effectuer des recherches sur place nous empêche de percer ce mystère. Toutefois, les rapports étroits de datation et de localité entre les iligranes 8593 et 10008 et le potentiel candidat 385 nous permettent de penser que la composition du codex a pu être réalisée aux environs de la basilique Saint-Denis.
2.7 | Le manuscrit P de Paris 2.7.1
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Description matérielle
Signalement Cote actuelle : Paris (France), blibiothèque nationale de France, manuscrit français 850 Cote ancienne : 72242 , cote de la bibliothèque royale de France Dimensions : In folio, 320x190 Nombre de folios : 144 f° Date : in XIVe Origine : région parisienne ?
Ancienne marque Tampon : « biblioteca regia », encre rouge f° 1 et 144v
Support Parchemin : plus épais f° 97r à 99v et 102r à 104v
Chapitre 2 . Description des autres témoins
49
Encre Ecriture : encre noire Décors : alternance encre rouge et bleue (initiales)
Etat du manuscrit Reliure : très abimée Ecriture : soignée
Organisation Manuscrit folioté foliotation moderne marge supérieure droite Réclames : marge inférieure droite : f° 7v (que vous laist), 16v (du sanc qui), 24v (Bertrant fu), 32v (perdu ara), 40v (car li rois), 48v (avarice et orgueil), 56v (ay las dit li rois), 64v (et dit li rois henris), 72v (et menrez la bataille), 80v (je m’en voi spar dela), 88v (et se besoing vous croist) , 96v (sire ce dit Dampietres), 104v (a besgues dit li rois), 112v (adont receut l’espee), 120v (et il n’estoient), 126v (li uns estoit), 134v (vous volez franchement) Cahiers : 19 cahiers 15 IV120 + 1 III126 + 2 IV142 + 1 I144 1 : 1r-7v ; 2 : 8r-16v ; 3 : 17r-24v : 4 : 25r-32v ; 5 : 33r-40v ; 6 : 41r-48v : 7 : 49r-56v ; 8 : 57r-64v ; 9 : 65r-72v ; 10 : 73r-80v ; 11 : 81r88v ; 12 :89r-96v ; 13 : 97r-104v ; 14 : 105r-112v ; 15 : 113r-120v ; 16 : 121r-126v ; 17 : 127r-134v ; 18 : 135r-142v ; 19 : 143r-144r
Ecriture Deux mains identiiées : 1er copiste : f°1 à 96, f° 100 à 101, f° 105à 144 ; 2nd copiste : f° 97 à 99, f° 102 à 104
Mise en page Type de copie : deux colonnes, 40 lignes par page
50
Le manuscrit P de Paris
Décoration f°1 : baguettes avec rinceaux de vignes marge gauche ; initiale S ornée Initiales : alternance d’initiales à l’encre rouge et bleue sur tout le manuscrit à chaque début de laisse
Colophon f° 143r : Explicit du bon connestable de France/messire Bertrand du Guesclin
Reliure Type : reliure cuir fauve Description : dos rouges avec entre-nerfs aux armes de Napoléon 1er (N couronné )
2.7.2
|
Contenu
Texte 1 f° 1 à 143r : La Chanson de Bertrand du Guesclin ; vers : alexandrins ; langue : français incipit : Seigneurs or faictes paix pour Dieu le roy divin explicit : cy ine de Bertran a qui Dieu soit amis/Dieux li peres vous doint et paix et paradis/et il veille amender trestous nos ennemis
Texte 2 f° 143v à 144v : série de poèmes consacrés au connétable du Guesclin — Pièce 1 : auteur : Eustache Deschamps ; incpit : tuit li vaillant et li preux de jadis ; explicit : du plus vaillant qui soit en tout le monde — Pièce 2 : auteur : Eustache Deschamps ; incipit : estoc d’onnour et arbre de vaillance ; explicit : plorez plourez leur de chevalerie — Pièce 3 : auteur : Eustache Deschamps ; incipit : tuit chevalier qui alez par le monde ; explicit : tuit chevalier excetera — Piece 4 : auteur : ? ; incipit : Bien doit pleurer chevalerie ; explicit : et par son fait Espagne conquestee
Chapitre 2 . Description des autres témoins
51
— Pièce 5 : auteur : anonyme ; incipit : l’escu d’argent a un aigle de sable ; explicit : l’escu d’azur a trois leurs de lys d’or — Pièce 6 : auteur : anonyme ; incipit : en l’an de l’Incarnation/mil trois cens quatre vins ans ; explicit : si bon et de tel ordonnance/que il soit au proit de France — Pièce 7 : auteur : anonyme ; incipit : plourez princes ducs et barons ; explitcit : les leurs de lys du lieupart felon Ces mêmes poèmes se trouvent à la in des manuscrits A et Pn. Les pieces 1, 2 et 3 sont présentes dans le recueil médiéval des œuvres d’Eustache Deschamps. Ils sont édités et traduits dans l’anthologie consacrée au poète parue récemment 27 .
Bibliographie Description : J.C. Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991 Edition : Texte 1 : manuscrit de base à l’édition J. Cuvelier, Chronique de Bertrand du Guesclin, sous la dir. d’E. Charrière, 1839 ; Variantes éditées dans Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, op. cit. Texte 2 : pièces 1, 2 et 3 éditées dans E. Deschamps, Anthologie, sous la dir. de Clotilde Dauphant, Lettres gothiques, Paris : Livre de poche, 2014, p. 130, p. 132 et p. 380.
2.7.3 A.
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Remarques
Ce manuscrit est le témoin qui contient le texte le plus proche du manuscrit
2.7.4
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Images du manuscrit
Les clichés du manuscrits ont été réalisés par nos soins avec l’aimable autorisation de la bibliothèque. Nous en proitons pour remercier monsieur Alexandre Tur, conservateur du département des manuscrits à la Bibliothèque nationale de France, de nous avoir autorisée à consulter le codex malgré la fragilité de sa reliure. 27. Deschamps, Anthologie, op. cit., p. 130, p. 132 et p. 380.
52
Le manuscrit Pa de Paris
Figure 13 – folio 1r
Figure 14 – Dos aux armes napoléonniennes
2.8 | Le manuscrit Pa de Paris Sigalement Cote actuelle : Paris (France), bibliothèque de l’Arsenal, ms 3141 Cotes anciennes : Bombarde n° 30 ; Paulmy n° 1716 (page de garde) Nombre de folios : 347 folios (f° 276 manquant), 300 × 225 mm
Marques particulières Tampon : « bibliothèque de l’Arsenal », aigle couronné, encre noire, f°1r et 345v
Support Parchemin : vélin très in, plus épais f° 79 à 82
Chapitre 2 . Description des autres témoins
53
Encre et écriture Ecriture : encre brune Rubriques : encre rouge Décor : encre bleue
Organisation du volume Ancienne foliotation : chifres romains : f° 69r : lxix ; f° 71r lxxi ; f° 98r : rognée Cahiers : Cahiers : 47 cahiers 13 III78 + 1 II82 + 24 IV275 + 1 (IV-1)283 + 8 IV340 + 1 (IV-3)345 + 3 talons + 3 feuillets Structure des cahiers et réclames : 1. : 1-6v 2. : 7r-f° 12v (sans le congié) 3. : 13r-18v 4. : 19r-24v (qui nous a fait) 5. : 25r-30v 6. : 31r - 36v (car apres(cancellé) refus a vo pere) 7. : 37r- 42v 8. : 43r -48v (ensemment que Bertran) 9. : 49r - 54v 10. : 55r-60v (tant par l’eaue) 11. : 61r-66v 12. : 67r-72v (dist a thibaut du pont) 13. : 73r-78v 14. : 79r-82v (dont quant bertran y vint) 15. : 83r-90v (car a honnour le mist) 16. : 91r 98v (dist jehan de chando) 17. : 99r-106v (puis ot du roy) 18. : 107r- 114v (mais tant com vous)
54
Le manuscrit Pa de Paris 19. : 115r-122v (amener en leur ost) 20. : 123r-130v (assailli a l’endroit) 21. : 131r-138v (ay bertran) 22. : 139r-146v (elyot et turquant) 23. : 147r-155v (puis que je vous en pri) 24. : 156v-163v (le prince y tramist) 25. : 164r-171v (que pietre le feroit) 26. : 172r-179v (viennent aux espaignols) 27. : 180r-187v (se vous avez) 28. : 188r-195v (a bertran mons) 29. : 196r-203v (atant es vous) 30. : 204r-211v (et yray veoir ma gent) 31. : 212r- 219v (ou pietre se loga) 32. : 220r-227v (par mer entrerent) 33. 34. 35. 36.
: : : :
228r-235v 236r-243v 244r-251v 252r-259v
(et aussi fait sa gent) (pour mener) (a ce siege y avoit) (les yeux n’eust)
37. : 260r-267v (et luy dist) 38. : 268r-275v (la vouldrent) Folio 276 manquant 39. : 277r-283v (quand chando) 40. : 284r-291v (fut de nege) 41. : 292r-300v (et de leniere) 42. : 301r-308v (la alerent) 43. : 309r-316v (vous venez) 44. : 317r-324v (françois) 45. : 325r-332v (et iiiic archiers) 46. : 333r-340v (au devant) 47. : 341r-345v + trois talons 346-348v : 3 feuillets (Chartes)
Chapitre 2 . Description des autres témoins
55
Mise en page Texte 1 : Copie à longues lignes, 37 lignes par page Mentions postérieures : glose du texte au crayon et encre noire, marges droites, gauches et interlignes
Décoration Initiales iligranées : alternance encre bleue/rouge et bleue/or f°1 : Encadrements de baguettes avec rinceaux de vignes et dragon, oiseaux, personnages (proche du ms London, British Library, Royal, 20 B VI et BnF ms fr. 2608 28 ) ; marge supérieure : miniature, blason d’azur à trois leurs de lys d’or (symbole des Valois) Miniatures : 77 miniatures aux f° 1, 40, 56 v, 62 vo, 74 v, 75 vo, 86, 87, 98 v, 104, 128, 129, 131 v, 139 (efacée), 144 v, 152, 162, 180, 211 v, 221, 235, 242 v, 250 v, 252 v, 271 v, 272, 272 v, 273, 273 v, 274, 275, 277, 278, 281, 281 v, 282 v, 283, 284, 285, 285 v, 287, 287 v, 288, 289, 289 v, 290 v, 291 v, 292 v, 294, 295 v, 307, 309 v, 310, 311, 312 v, 314, 318 v, 319 v (2), 323 v, 324 v, 327, 328, 328 v, 329 v, 337 v, 338, 338 v, 339, 339 v, 340, 342, 342 v, 343, 343 v, 345, 345 v décoration : traits rouges entre laisses 66v, 67r, 68r, 69v, 70v, 71v, 72r, 72v, 73r, 75r, 76r, 76v, 77r, 77v, 78r, 79r, 82r/v, 83v 84r, 85v, 87r, 88r Rubriques Table des rubriques disponibles dans l’ouvrage suivant : J. C. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin, t. 3, Editions universitaires du Sud, 1991, p. 349-360
Reliure Type : Reliure veau fauve Description : décor doré recto/verso, tranche dorée, six entre-nerfs, cinq nerfs ; deuxième entre-nerf titre : « Bertrand / du Guesclin » ; sixième entre-nerf encart papier collé avec mention de la cote manus 3141 28. Manuscrits consultables aux adresses suivantes : 1. Royal 20B IV : http://www.bl.uk/catalogues/illuminatedmanuscripts/record.asp?MSID= 8535 ; 2. ms 2608 : http://www.europeanaregia.eu/fr/manuscrits/ paris-bibliotheque-nationale-france-mss-francais-2608/fr.
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Le manuscrit Pa de Paris
Marques de possesseurs et lecteurs Page de garde (A recto) : Encre noire : 1716, 348 feuillets moins le feuillet 276, 77 miniatures, novembre 1877 Page de garde (A verso) : traces de trois mains diférentes — main 1 (la plus ancienne) ; encre brune : Ce mss. contient le Roman de Bertrand du Guesclin en vers. le mss. est beau et rare et n’est probablement pas de beaucoup postérieur au temps de la mort du héros. J’ay d’ailleurs vu le même Roman imprimé en prose chez Verard — main 2 : encre noire : Cellui ci est l’original ; l’histoire en Prose n’eu cse que l’extrait ou celui de Chroniques de St Denis et de l’histoire de (–oipart) tiré postérieurement au temp où vivoit Duguesclin. Ce livre au contraire est d’un (scribe) contemporain au temp du connétable ; l’abbé Le Boeuf dit qu’il s’appeloit Truiller et qu’il init (lou escrire) à l’an 1387. La présente copie n’est pas eloignée de la composition 29 . — main 3 : (la plus récente) ; encre brune : Mr de Barbaran le nomme cuvillier et paroit avoir tiré l’extrait qu’il donne (dans sa notice des anciens poetes françois) de ce mss cy l’avoir redigé du present manuscrit qui a appartenu a Mr de Bombarde. Na efectivement au dernier vers de la premiere page cy contre on voit clairement ecrit le nom de l’auteur cuvilier
2.8.1
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Contenu
Texte 1 f° 1 à 345v : La Chanson de Bertrand du Guesclin ; vers : alexandrins ; langue : français ; incipit : Seigneurs or faictes paix pour Dieu le roy divin ; explicit : Depuis fut connestable Olivier eslis ; ajout postérieur à l’encre noire des vers suivants : Cellui qui de Clisson maintient les ediis/Dieu lui doint si regner le pere Jesus-Cris/que se soit a l’onneur de France le païs/Cy ine de Bertrant a qui Dieu soit amis/Dieu le pere nous doint et paix et paradis/et il veuille amander trestous ses enemis/et nous 29. Les termes dont la lecture n’est pas assurée ont été placés entre parenthèses.
Chapitre 2 . Description des autres témoins
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vueille garder trestous nos bons amis/Amen/Explicit la vraye cronique de messire Bertran de Claquin
Texte 2 f° 346r à 348v : Recueil de chartes concernant Bertrand du Guesclin
Bibliographie Edition : éditions de variantes dans les travaux suivants : J. Cuvelier, Chronique de Bertrand du Guesclin, sous la dir. d’E. Charrière, 1839 J.C. Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991 Description : H. Martin, Histoire de la Bibliothèque de l’Arsenal, E. Plon, Nourrit et cie, 1900 H. Omont, Anciens inventaires et catalogues de la Bibliothèque Nationale, E. Leroux, 1908 J. C. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991 Reproductions : Bibliothèque de l’Arsenal, éd., Trésor de la Bibliothèque de l’Arsenal, t. 100, Bibliothèque Nationale, 1980
2.8.2
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Remarques
Le codex Pa est sans conteste le plus richement décoré de tous les témoins qui sont parvenus jusqu’à nous. Pas moins de soixante-dix sept miniatures accompagnent le texte de la chanson. L’objet a appartenu au marquis de Paulmy sous la cote 1716. Le texte provenait de la bibliothèque de M. de Bombarde où il portait le numéro 30 30 . Quelques variantes du texte avaient déjà été publiées au XIXe siècle par Charrière dans sa toute première édition de la chanson.
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Le manuscrit Pa de Paris
Figure 15 – folio 1r
Figure 16 – folio 268v
Figure 17 – folio 268v : chartes
Figure 18 – folio 268v
Chapitre 2 . Description des autres témoins
2.8.3
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Images du manuscrit
Les images sont tirées de clichés réalisés par nos soins, avec l’aimable autorisation de la bibliothèque.
30. Il est possible de consulter le catalogue des manuscrits de Monsieur de Bombarde par Etienne Barbazan dans H. Martin, Histoire de la Bibliothèque de l’Arsenal, E. Plon, Nourrit et cie, 1900, p. 284-287.
3
Principes d’édition 3.1 | Choix du manuscrit de base 3.1.1
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Editions réalisées
Le texte a fait l’objet de deux éditions diférentes : — la première est l’édition de d’E. Charrière, parue à la in du XIXe siècle : J. Cuvelier, Chronique de Bertrand du Guesclin, sous la dir. d’E. Charrière, 1839. Il connaissait les trois manuscrits de la tradition qui étaient conservés dans les bibliothèques parisiennes, à savoir P (BnF, fr ms 850), Pa (Arsenal, ms 3141) et Pn (BnF, Naf 993). Le choix de l’éditeur s’est porté sur P (BnF, fr ms 850) comme manuscrit de base avec l’utilisation de certaines variantes de Pa. — la seconde est celle de J.C. Faucon, parue au début des années 1990 : J.C. Faucon, La chanson de Bertrand Du Guesclin de Cuvelier, Editions universitaires du Sud, 1991. Deux manuscrits étaient alors inconnus du médiéviste : le ms Br (Berlin, Preussischer Kulturbesitz, Staabibliothek zu Berlin, ms. Hamilton 226) et le manuscrit Nh (New Haven, Beinecke Rare Book and Manuscript Library, Yale University, ms 990). Cette édition nous donne une base de donnée importante en s’attachant dans le troisième volume à publier toutes les variantes de manuscrits connus alors par le critique. L’importance d’une nouvelle édition est double. Premièrement, une nouvelle description des manuscrits s’avérait nécessaire en tenant compte des nouveaux témoins apparus depuis l’édition de J.C. Faucon. Il est également indispensable de donner des notices les plus complètes possibles des témoins existants, ce travail n’ayant jamais été efectué auparavant. Deuxièmement, le texte concernant le connétable constitue un élément de poids dans l’étude de l’évolution du genre épique à la in du Moyen Age. L’édition d’un autre témoin présente l’occasion d’apporter un regard nouveau sur la valeur littéraire de ces textes trop souvent décriés.
3.1.2
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Choix du manuscrit A
Les manuscrits P et Mp/Pn ayant déjà fait l’objet d’une édition, ils ont d’emblée été écartés pour le choix de notre manuscrit de base. Les manuscrits Mn, B et Nh étant incomplets, ils ne peuvent pas non plus servir de base à notre travail. Restent alors comme candidats toujours en lice L, Pa, Nd et A. 61
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Choix du manuscrit de base
Dans son étude, J.C Faucon relève la grande proximité de P et A en airmant que le codex A est une copie directe de P 1 . Cependant, malgré les rapprochements entre les manuscrits, J.C. Faucon indique que la réalisation d’un stémma est impossible et parle de diférentes versions de la chansons, qui s’entremêlent ou s’éloignent au gré des épisodes 2 . Ces manuscrits ont, bien entendu, tous des qualités certaines. Dès lors, pourquoi faire le choix d’éditer le manuscrit A alors que l’on pourrait l’écarter pour les motifs suivants : — d’abord parce que l’édition Charrière peut faire connaître A à travers P ; — ensuite parce que nous aurions pu saisir l’opportunité d’une nouvelle édition pour étudier une autre version de la Chanson que celles données par P et par l’ensemble Mp/Pn édité par J.C. Faucon. Le choix s’est porté sur le manuscrit aixois pour plusieurs raisons : — Le codex A présente, selon les travaux de J.C. Faucon, la version du texte la plus éloignée de celle qu’il a lui-même publiée 3 . Ainsi, l’édition de cette version permet de ne pas faire doublon avec l’édition la plus récente et d’apporter de nouvelles variantes du texte à tous ceux désireux de s’intéresser à la biographie en vers du connétable. — Le manuscrit A ofre la particularité de contenir à la fois La Chanson de Bertrand du Guesclin et sept poèmes dédiés à la mémoire du connétable en in de volume. Aucun des autres candidats potentiels (L, Pa et Nd) ne possède ces pièces lyriques. L’édition du manuscrit A permet ainsi de présenter pour la première fois l’ensemble chanson/poèmes constitué au Moyen Age, ensemble encore jamais édité ni étudié malgré les travaux précédents. L’unité de cet ensemble est étudié dans notre analyse littéraire du texte. — La proximité géographique du lieu de conservation du manuscrit avec notre lieu de travail, l’Université d’Aix-Marseille, a permis de multiplier les séances de consultation du manuscrit et par conséquent nous a permis un travail au plus près du codex. Un partenariat de travail a d’ailleurs été établi à cette occasion entre le CIELAM et la Cité du Livre ain de permettre à ces séances de se dérouler dans des conditions optimales 4 . Le choix du codex aixois comme manuscrit de base a donc été motivé par sa place particulière dans la tradition manuscrite en vers de La Chanson de Bertrand du 1. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier, op. cit., p. 334. 2. Ibid., p. 330 et p. 342. 3. Ibid., p. 342. 4. Nous tenons à remercier toute l’équipe patrimoine de la bibliothèque pour leur disponibilité et leur aide apportée à chaque fois que cela nous a été nécessaire.
Chapitre 3 . Principes d’édition
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Guesclin ainsi que pour sa facture spéciique.
3.2 | Etablissement du texte 3.2.1
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Principes généraux
Nous avons tenté d’apporter à notre lecteur une transcription au plus proche du manuscrit. Nous n’avons pas cherché à harmoniser les diférentes formes à l’intérieur du texte. Nous n’avons corrigé que lorsque l’erreur nous semblait évidente et créait des diicultés de lecture ou de compréhension. Lorsque les lacunes de notre texte s’avèrent plus importantes, nous avons eu recours aux leçons du manuscrit P présentant l’état du texte le plus proche de celui du codex aixois. Cette proximité est cependant synonyme d’erreur commune. Ain de palier aux faiblesses des deux manuscrits, nous avons utilisé les variantes du codex Nh, témoin apparu récemment et dont J.C. Faucon n’a donné aucune variante. Nous corrigeons le manuscrit en nous fondant sur des données linguistiques, ces corrections faisant l’objet de notes de in de volume pour justiier nos choix. Heureusement, ces diférentes lacunes se révèlent peu nombreuses, le copiste étant plutôt soigneux.
3.2.2
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Règles de transcription adoptées
Nous avons suivi les règles pratiques pour l’édition des anciens textes français et médiévaux de Mario Roques 5 , moyennant quelques adaptation pour le manuscrit que nous éditons. — L’accent aigu a été placé sur e pour distinguer -e tonique de -e atone en syllabe inale pour faciliter la lecture et éviter certaines ambiguïtés (aprés / apres) et sur certains monosyllabes. L’accent a également été ajouté sur le e des inales de participes passés en ez et sur celui de la désinence -ez marque de la P5, le z n’étant plus discriminé du s sous la plume du scribe 6 . — Le tréma a été placé sur les diférents hiatus selon les règles métriques et grammaticales de cette in de Moyen Age. Nos choix sont clairement expliqués sous le titre « hiatus » de la partie phonétique. 5. M. Roques, « Etablissement des règles pratiques pour l’édition des anciens textes français et provençaux », Romania LII, 1926, p. 243–249. 6. Voir le paragraphe consacré à l’étude graphique de s et z dans notre partie grammaticale.
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Etablissement du texte — La cédille est utilisée pour marquer le son [s] de c devant a et o (ex. : Françoys vers 34 et deça vers 46). — Les chifres romains ainsi que les chifres écrits en toutes lettres par le copiste sont reproduits tels quels. Les points entourant chaque chifre sont présents sur le manuscrit, il sont un fait du copiste : il sont par conséquent conservés. Nous respectons également la typographie utilisée par le scribe en retenant les indications suscrites ainsi que les majuscules et minuscules (ex. .iie . vers 673 ou encore ixc vers 5348).
Avoir et pouvoir Les futur I et II du verbe sçavoir et avoir ne présentent aucune forme avec e svarabhaktique, nous les avons transcrits avec un -u (saur- et aur-). Quant au verbe pooir, nous n’avons mis au jour aucune forme en pouv- ou peuv- nous permettant de conirmer la présence d’un -v. Nous avons choisi de transcrire ce verbe avec un -u en accord avec les travaux d’Omer Jodogne 7 sur le sujet.
Ponctuation Le codex aixois ne présente aucun signe de ponctuation particulier, mis à part quelques rares barres obliques venant marquer une césure ou la coupure d’une séquence graphique 8 . Nous avons choisi de ne pas utiliser une majuscule à chaque début de vers. Il nous semble plus utile de conserver un usage purement grammatical de ce signe pour ne pas entraver la lecture. La majuscule est donc uniquement employée ain de marquer le début d’une phrase pour aider au repérage de celles-ci.
3.2.3
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Présentation générale
L’édition comprend deux niveaux de notes de bas de page. Le premier contient les corrections faites par le scribe directement sur le manuscrit (exponctuation, cancellation). Le second niveau contient les indications de nos interventions sur le texte original ain de corriger les problèmes de grammaticalité lors d’erreurs manifestes du scribe. Ces corrections sont justiiées par des notes de in de volume. 7. O. Jodogne, « Povoir ou pouoir ? : le cas phonétique de l’ancien verbe pouoir », Travaux de linguistique et de littérature 4, 1966, p. 257–266. 8. Toutes les occurrences de ce phénomène sont indiquées en note de in de volume.
Chapitre 3 . Principes d’édition
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Il a été parfois nécessaire d’ajouter un vers en s’appuyant sur les manuscrits de contrôle pour conserver une harmonie grammaticale. Ces vers ajoutés sont indiqués entre crochets ([]). Ils sont pris en compte dans la numérotation générale au même titre qu’un vers normal. Seul l’ajout de vers entier est signalé dans le texte. L’ajout d’un mot dans un vers de A est seulement précisé en note de bas de page ain de ne pas entraver la lecture. Les notes de in de volume sont indiquées dans le texte par une astérisque en in de vers. Le lecteur peut ainsi facilement savoir lorsqu’une une note a été rédigée. Les notes indiquent d’abord la page de référence puis le vers concerné. Les laisses sont numérotées en chifres arabes. Leur trop grand nombre empêche une numérotation en chifres romains qui alourdirait grandement la lecture. Pour plus de confort, les vers sont numérotés deux à deux. Les numéros sont ainsi plus rapidement identiiables. Les changements de folios sont indiqués dans la marge entre crochets ([1v]). Des entêtes contenant la structure narrative du texte ont été créées pour aider le lecteur à se repérer dans la densité narrative du texte. Une table des matières signalant les épisodes du texte est également consultable en in de volume.
3.3 | Toilette du texte 3.3.1
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Résolutions des diicultés graphiques du manuscrit
ct/tt Il est parfois diicile de distinguer la séquence graphique ct de tt. Prenons pour exemple ces deux occurrences du substantif autorité : —
(f°80r) : les deux lettres semblent être efectuées de la même façon, deux traits de plume verticaux coupés par un trait horizontal plus in. Il semble donc bien que la graphie marque la présence de deux t ;
—
(f°25v) : on voit clairement dans cet exemple que la première lettre est bien plus courte que la seconde et plus ronde. La graphie semble donc bien marquer une diférence entre les deux lettres et
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Toilette du texte
le digramme ct est utilisé par le scribe 9 . Nous avons choisi de respecter cette diversité graphique en conservant ct et tt dans notre transcription.
Coupure des mots Nous tentons de conserver autant que possible les coupures de mots telles qu’elles sont efectuées par le scribe du manuscrit A. Cependant, certaines formes agglomérées présentent des diicultés. C’est particulièrement le cas de l’expression (f° 108r). L’agglomération du verbe aler et de l’adverbe en se fait sans accroc par le copiste. Or, il est diicile de garder l’expression rassemblée dans notre transcription, sous peine d’incompréhension de la part du lecteur. Il est impossible de séparer complètement les deux membres de l’expression à cause de l’utilisation de la géminée (vass en). Nous avons donc choisi de transcrire la locution vass’en. L’utilisation de l’apostrophe permet de rapprocher le verbe et l’adverbe tout en conservant un certain confort de lecture 10 .
3.3.2
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Résolution des abréviations
Aucun nom propre n’est abrégé dans le texte. Les abréviations suivantes ont été rencontrées. Elles ont toutes été résolues selon l’usage du texte mais ne sont pas indiquées dans l’édition par un signe distinctif ain de ne pas entraver la lecture. On retrouve des abréviations classiques comme la barre de nasalisation ou le signe tironien. Le plus souvent, les mots sont abrégés par contraction.
Abréviations — —
/ : la barre de nasalité a été transcrite par m devant labiale et n dans les autres cas ; : transcrite en crest, ici cretiennéz ;
9. Pour une étude des raisons de l’emploi de ce digramme, voir la partie graphie de notre introduction grammaticale. 10. Pour d’autres occurrences de l’expression voir les vers : 14906, 14961, 14984, 17168, 17232, 17247.
Chapitre 3 . Principes d’édition — — — — —
: transcrite et ; : transcrite ver, ici verité ; : signe tironien transcrit com devant labiale (compagnie), con dans les autres cas, ici conquester ; : transcrite pri, ici prison ; : transcrite pour ;
—
: transcrite pro, ici proposa ;
—
: transcrite ser, ici servira ;
—
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: transcrite en er, ici terres ;
—
: transcrite ar, ici marché ;
—
: transcrite plusers.
Mots contractés —
(f° 1r, vers 17) : transcrite faictes en accord avec la forme développée f°94r vers 7686
—
(f°1r, vers 19) : transcrite en que. La conjonction est toujours développée dans la transcription en accord avec l’usage du manuscrit où le e inal de que ne s’élide jamais devant voyelle ;
—
: transcrite en chascun ;
—
: transcrite par ;
—
: transcrite nostre ;
—
: transcrite vostre ;
—
: transcrite avoir ;
—
: transcrite faire ;
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Une édition LATEX —
: transcrite chevaliers ;
—
3.3.3
: transcrite seigneur ;
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Transcription des poèmes
Les sept poèmes présents à la in du manuscrit A sont transcrits à la suite du texte épique. Ils ne sont toutefois pris en compte ni dans le glossaire, ni dans les index, ni dans l’analyse grammaticale. En efet, trois poèmes sont déjà attribués à Eustache Deschamps, preuve qu’ils ont été composés dans une autre perspective que celle de La Chanson de Bertrand. De ce fait, ces poèmes ne sont pas issus du même contexte linguistique et littéraire que le texte principal 11 . Par conséquent, ils sont transcrits en respectant les mêmes règles que pour le texte général mais il ne sont pas pris en compte dans l’apparat critique. En revanche, l’ensemble formé par les deux textes est considéré par notre analyse littéraire.
3.4 | Une édition LATEX Le texte du manuscrit A a été codé en langage LATEX. Il s’agit d’un code informatique et un système de composition créé en 1983. Il permet de séparer la forme et le contenu d’un document. Il sert à confectionner des documents au contenu complexe et demande un investissement plus important que pour les logiciels de traitement de texte classiques. Voici par exemple le code employé au vers 10 : 11. Pour une analyse littéraire du rapport entre les poèmes et le texte principal, voir notre article : D. Demelas, « La poétique de la mort du héros dans La Chanson de Bertrant du Guesclin », Le héros et la mort dans les traditions épiques, à paraı̂tre,
Chapitre 3 . Principes d’édition qui tant fu redoubté jusques a l'ayve\edindex[glossaire]{Ayve@\textsc{Ayve} : \textit{s. f. : eau}} du Rin\edindex[noms]{rin@\textsc{Rin} : jusques a l'ayve du Rin},\edtext{}{\Aendnote{La forme \textit{ayve} semble d'un usage très rare. Plusieurs textes en ancien français comme \textit{La Chanson des Saisnes} de Jean Bodel ou \textit{Le Couronnement} de Louis présentent la forme \textit{aive}. Une occurrence d'\textit{ayve} se trouve dans le DMF dans \textit{Le Cartulaire de Saint-Victeur} de l'abbaye du Mont Saint-Michel. J. Pignon relève la forme dans la région de Parthenay et de Poitiers (\cite{jpignon}). La forme est sans doute volontiers archaïsante dans ce prologue qui reprend la technique de ceux des plus anciennes chansons de geste. Le manuscrit \textit{P} utilise la forme \textit{eaue}. Il s'agit sans doute ici d'un trait d'écriture du copiste du codex d'Aix-en-Provence.}}
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On trouve dans cet exemple plusieurs commandes : \edindex[glossaire] ; \edindex[nom] et \edtext{}{\Aendnote{}}. La première sert à placer l’entrée « Ayve » au glossaire. La deuxième fait entrer le nom de leuve « Rin » dans l’index des noms propres. La dernière correspond à la note de in de volume du vers 10. Toutes ces commandes permettent d’indexer automatiquement l’apparat critique sur le numéro de vers, grâce au package « reledmac », conçu pour l’édition critique. LATEX est une suite entièrement gratuite, adaptable à tout système d’exploitation. Une large communauté d’entraide s’est créée au il du temps sur internet et les créateurs de packages répondent bien souvent eux-mêmes aux problèmes des utilisateurs. LATEX est cependant dédié à l’édition de document au format papier et ne permet pas une exportation directe en ligne des données codées.
Deuxième partie Etude de la langue du manuscrit A
71
L
’étude de la langue du manuscrit A est consacrée à mettre en valeur les traits dialectaux du codex qui permettent la localisation du lieu de copie ainsi que les évolutions majeures du moyen français. En efet, le scribe use de traits de langue qui correspondent à la localisation suggérée par l’étude des iligranes : la région de l’Ouest de la France, et plus particulièrement du Poitou. Le codex aixois, sous ses apparences de «manuscrit de peu d’intérêt 1 », est en fait un témoin précieux qui permet de revoir à des dates plus anciennes des faits linguistiques attestés jusqu’à aujourd’hui seulement à la Renaissance ou au XVIIe siècle. Cet ancrage à l’Ouest permettra également de formuler des hypothèses quant à l’apparition et la difusion de la légende du connétable, visiblement très présente dans cette région sous domination anglaise jusqu’à la deuxième moitié du XVe siècle.
1. J. C. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin, t. 3, Editions universitaires du Sud, 1991, p. 335.
73
Phonétique et graphie
1
La partie phonétique et graphie s’attache d’abord à commenter les phénomènes phonétiques propres à la zone de l’Ouest trouvés sous la plume du scribe du manuscrit A. Les systèmes graphiques particuliers du manuscrit sont relevés et mis en relation autant que possible avec les traits de l’Ouest. Nous listons ensuite les traits du manuscrit caractéristiques du moyen français.
1.1 | Traits de l’Ouest 1.1.1
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-Ariu et -Aria
Le texte présente une évolution des suixes latins -aria et -ariu qui se retrouvent dans la zone poitevine, comme le signale J. Pignon dans sa thèse, mais également à l’ouest de la France : Dans la plus grande partie des Deux-Sèvres et dans une zone qui traverse la Vienne de l’Ouest à l’Est, on a des formes sans [y] : le plus souvent [-é] pour -ariu et, pour -aria [-er] 1 . Le manuscrit d’Aix présente les formes suivantes issues de cette évolution : — ripária > rivere 2784 [...] 18527 — voluntárius > voulenters 3534, 4522, 9825, 10010 — singulárius > sengler/sangler 8815, 18684, 19288, 21062 — plenária >plenere 1108 — denárius > deners 2182 — februárius > fevrer 21767 — semitárius > senter 14906, 17543 Ce phénomène permet une première localisation du lieu de copie car , comme le précise J. Pignon, : ce trait, dans l’ouest du domaine d’oïl apparaît donc comme essentiellement poitevin, aunisien et saintongeais (moitié nord de la province). Au nord de la Vienne, cependant, on a le type français. Au sud-est du même département, d’autre part, on trouve au masculin, d’abord [-yé], puis à l’extrême sud [–i] 2 . 1. J. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), Editions d’Artey, 1960, p. 108. 2. Ibid., p. 109.
75
76
Traits de l’Ouest
Les traces dans le texte de l’évolution particulière de ces suixes peuvent soutenir l’hypothèse que le lieu de copie peut être circonscrit dans un triangle formé par La Rochelle, Saintes et Poitiers.
1.1.2
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Voyelles
Diphtongaison conditionnée ĕ latin ĕ + yod La triphtongue iei issue de ĕ latin + yod ne se réduit pas à [i] mais à [ẹ]. J. Pignon explique cette évolution particulière dans la zone ouest du domaine d’oïl : Le propre de cette zone occidentale est de présenter une réduction particulière de la triphtongue iei. En français, il y a monophtongaison en i. Dans tout l’Ouest (y compris le normand), comme en domaine occitan généralement, la triphtongue s’est réduite à ei. Ensuite, de même que pour ie(r) issu de ariu, il y a eu, de la Saintonge aux conins méridionaux de la Normandie, réduction de ie à e. [...] Souvent cependant ei paraît être une graphie pour [é] 3 . Les exemples suivant peuvent être relevés dans le texte : ́ — dimĕdius > dimee 21111 ́ — pĕjus >pié 1025, 1093, 4800 ́ — *mĕdium locus > meilleu 20429, 21032 ; ́ — *illăei > lié 96 [...] 10600 En plus des graphies e et ei typiques de la région, les exemples relevés présentent la graphie ie ain de noter le résultat de l’évolution de e + yod. Les travaux de J. Pignon expliquent ce phénomène : Aujourd’hui, comme dans le passé, il y a donc opposition entre l’e du Poitou, de l’Aunis, de l’Ouest de la Saintonge, du Nord-Ouest du domaine d’oïl et d’une part l’i français, de l’autre la diphtongue ie(i) (ou le groupe ye(y)) du Limousin. Le sud-est du Poitou cependant (Basse-Marche et zone limitrophe) présente le même traitement que le Limousin [...]. Dans les Sermons poitevins eux-mêmes, il y a hésitation entre ie et e. Poitiers, au XIIIe siècle, paraît se trouver au point de rencontre des inluences venues du Nord-Ouest et de celles 3. Ibid., p. 127.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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venues du Sud-Est, sans parler de la poussée française (formes en i) qui s’y fait fortement sentir 4 . L’utilisation des formes du Nord-Ouest, du Limousin et franciennes (voir par exemple demie 7445 [...] 17800) par le scribe du manuscrit d’Aix laisse penser que la copie a pu être réalisée à Poitiers ou aux alentours, zone de conluence entre les diférentes graphies.
-E + u A côté du résultat français de l’évolution de e + u qui donne la triphtongue ieu, le manuscrit présente la réduction [ẹ] : déum > Dé 17849 Cette réduction est relevée par J. Pignon comme caractéristique du domaine poitevin 5 et se retrouve dans tout l’Ouest de la France.
Diphtongaison spontanée de ĕ latin Le manuscrit garde des traces graphiques d’un phénomène connu seulement dans la zone poitevine et au nord-ouest de la zone d’oïl : l’aboutissement de la diphtongaison spontanée de ĕ latin n’est pas [yę] mais [ę]. Les formes suivantes sont relevées dans le texte : ́ — de rĕtro > derrere 2489, 5784, 5920 ; 6066 ́ — fĕrum > fers 858 [...] 20682 — láetum > léz 433 [...] 19510 ́ — pĕtram > perres 2669, 2671, 3136 ́ — Pĕtrus > Pere 17369. L’analyse de ce phénomène permet à nouveau de rapprocher le lieu de copie près de la ville de Poitiers 6 . 4. Ibid., p. 126-127. 5. « Il paraît donc évident que les formes *dieu et *ieu, en poitevin, se sont réduites anciennement à dé et fé, comme dans le cas de la diphtongaison de l’e par yod. », ibid., p. 130. 6. « Il convient donc au terme de ces trois premiers chapitres de s’en tenir à cette seule certitude : le sud-est de la Vienne ... présente un traitement commun avec le domaine occitan (maintien de ie issu de -ariu ou de ĕ + yod) alors que le reste du Poitou se rattache au Nord-Ouest du domaine d’oïl (ie dvt e)», ibid., p. 139.
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Traits de l’Ouest
Evolution de la triphtongue [iẹu] L’évolution de la triphtongue [iẹu] formée par la diphtongaison de ĕ +[u] aboutit dans la zone de l’Ouest à des formes sans yod 7 , phénomène qui se retrouve sous la plume du copiste du manuscrit A : ́ — mĕlium > meulx 215 [...] 21133 ́ — lĕucam > leue 8774, 10953, 14799.
Loi de Bartsch On retrouve la perte du yod pour le résultat de la diphtongue survenue sous l’inluence de la palatale : — cogitáre > cuider 3312 [...] 20928 — cáram > chere 986 [...] 11447 — justiciáre > justicer 6336, 6996, 17549 — adlligátum > alé 6431. Ces formes sans yod se trouvent en abondance dans la région de l’Ouest et du Poitou au Moyen Age 8 .
eu = [ọ] L’évolution de la diphtongue de coalescence [eu] peut aboutir dans le domaine occidental, et particulièrement dans le domiane poitevin, à [ọ] 9 . Dans le texte, la forme entreulx se trouve à la rime dans une laisse en [ọ] (laisse 123, v. 3311) 10 . J. Pignon relève comme évolution possible du pronom illos > [ọ], ce que conirme l’exemple du texte. Les formes so/ço sont également présentes dans le texte pour le pronom neutre vers 2260 et 3036. Le lien entre le digramme eu et le son [ọ] est tel qu’il s’étend par analogie à d’autres termes : jeunes (pr jaunes) 3283 7. J. Pignon, La Gente Poitevinrie : recueil de textes en patois poitevin du XVIe siècle, Parlanjhe, 1960, § 14. 8. « Il est clair qu’au lieu du francien ie on a dans la plus grande partie du Poitou, depuis au moins le début du XIIIe siècle, e correspondant à a latin précédé de k’, t’ », idem, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 191. 9. Ibid., p. 277-290. 10. Le manuscrit P utilise la forme entr’aux à la rime dans la laisse correspondante.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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[o] non accentué > [œ] L’évolution de [o] en syllabe non accentuée ne suit pas le même schéma dans l’Ouest que dans le reste du territoire français. Plutôt que de se fermer en [u] au XIIe siècle, [o] garde diicilement son timbre et passe à [œ] 11 . Des exemples de cette évolution se trouvent dans le texte : — prŏbáre > preuver 2275 [...] 15561 ́ : seufrent 14823 / seufry 15680 — *sŭfferīre — ōrám : euree 15708.
Diphtongaison conditionnée de [ŏ] par yod L’évolution de la triphtongue créée par la diphtongaison de [ŏ] devant yod est diférente dans le domaine de l’Ouest et en poitevin : La diphtongaison conditionnée de ŏ par yod est un fait commun aux parlers occitans, du Nord-Ouest, du Centre et du Nord du domaine d’oïl. La triphtongue cependant se développe diféremment suivant les régions : [ẅi] en français, [wẹ] et [ẹ] au Nord-Ouest et en Poitou occidental, [œ] dans la plus grande partie de mon domaine, [ẅẹ] en Limousin 12 . Les formes suivantes sont à relever : — appŏdiáre : apoier 14931 ; appoyé 3048 — *vŏcitáre : voyder 3827 ; voidie 7429. Le paragraphe sur le développement d’un [w] après labiale 13 permet d’établir que le digramme oi vient aussi noter dans le manuscrit aixois le son [wẹ]. Sa présence dans les mots relevés indique certainement l’aboutissement particulier de la triphtongue dans la zone de copie du manuscrit. Par un phénomène de graphie inverse, le digramme uy peut alors se trouver pour noter le son [wẹ]. En efet, ce digramme vient noter l’aboutissement de cette diphtongaison dans la zone francienne (ex. : vuidier). C’est ce qui explique la forme buyrons au vers 4133 sous la plume du scribe. Pour lui, ce qu’un scribe francien note ui se prononce bien [wẹ] et non [ẅi], d’où l’utilisation possible de ces deux digrammes pour noter l’évolution poitevine. 11. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 368-369. 12. Ibid., p. 161. 13. Voir le paragraphe intitulé « Apparition de [w] après labiale » dans la partie Consonnes.
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Traits de l’Ouest
Par ailleurs, on remarque que le verbe boire présente à la P4 du futur de l’indicatif toutes les variantes graphiques possibles pour noter le son [wẹ] : buyrons 4133 ; berons 4465, 17092 ; boyrons 12800.
i + l mouillé Certaines formes indiquent que la présence d’un l mouillé a pu entraîner l’ouverture de la voyelle qui précède, contrairement au mouvement observé dans d’autres régions françaises au Moyen Age : — *apparículum > aparail 15291, 20470 (puis apparailler 5821, 10841) — parículum > parail 17165 ́ — pāpiliōnem > pavaillon 1287, 2222, 8476 14 Cette ouverture est constatée par J. Pignon dans la région de l’Ouest, mais date du XVIIIe siècle selon ses données : Ultérieurement, au cours du XVIIIe siècle, semble-t-il, un nouveau déplacement vers l’arrière va se produire dans le sud des Deux-Sèvres. Dans le groupe [-el’], l’l’ tend à fermer l’e, lequel par diférentiation s’ouvre en a 15 . Les exemples trouvés dans le manuscrit aixois permettent de penser que ce phénomène remonte à une date bien antérieure à celle énoncée par J. Pignon.
a = e en position inale A la laisse 187, rimée en a, on trouve en in de vers la forme verbale trouve au vers 4806. Les textes de la zone de conluence entre dialectes d’Oc et d’Oïl font part d’un maintien de [a] issu du féminin en inale inaccentuée 16 , passé à [e] dans la zone francienne (ex. : ella pour elle, ceta pour cette etc...). La copie °
de textes français entraîne donc des confusions graphiques fréquentes entre a et e chez les copistes du Sud-Ouest, comme le signale J. Pignon : Les scribes saintongeais et ceux de Coutumes de Charoux écrivant -es pour -as latin ont pu parfois au singulier noter e la voyelle inale qui se prononçait [a]. 14. La forme française pavillon est employée par le scribe à chaque fois que le mot se trouve à la rime, vers 2634, 13701 et 13903. 15. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 324. 16. Ibid., p. 43.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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Le -e inal féminin graphique ne correspond donc pas dans certaines zones occidentales et en poitevin à [e] mais au son [a]. Les scribes l’utilisent alors par °
analogie pour noter d’autres [a] inaux que ceux issus du féminin latin, comme c’est le cas dans le texte à la rime où le copiste se sert d’un e graphique pour noter le [a] inal des verbes du premier groupe au passé simple à P3 17 .
1.1.3
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Voyelles nasales
[ã] devient [õ] Le manuscrit présente quelques preuves de la vélarisation de la nasale [ã] en [õ]. Le verbe trouveront est placé à la rime dans une laisse en ent/ant au vers 8929 18 . La préposition en est graphiée on au vers 12255 : on messe. Ce trait, qui se retrouve dans la zone de l’Ouest du territoire, est selon Jaques Pignon très présente dans la zone poitevine : L’action nasale a eu une inluence fermante et vélarisante sur l’a qui précède [...]. Il est possible que la vélarisation ait afecté dans notre région la voyelle entière et non pas uniquement son segment inal. On aurait donc très tôt [ã/õ] que les scribes du Moyen Age transcrivent an 19 . La graphie du manuscrit donc oscille parfois entre an et on pour noter le son [õ] : — danjon 18503 ; 20185 ; 20796 ; 21266/ donjon 18495 ; 20291 ; 20959 — en pour le pronom on : 20603 — on pour la préposition en : 12255 — voulenters 3533, 4522, 9825, 10010 — despendre (pour despondre) 17281. La graphie du manuscrit indique donc une grande proximité phonétique, voire une prononciation identique, entre le résultat de a/e+ nasale ([ã] en francien) et le résultat de o+ nasale qui aboutissent dans la zone de copie tous les deux à [õ]. J. Pignon relève dans sa thèse cette proximité seulement à certains points géographiques 20 : 17. Le manuscrit P présente la forme trouva à la rime au vers correspondant. 18. Les autres manuscrits ont pour variante pour ce second hémistiche : ce qu’il iront trouvant. 19. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 336-337. 20. Cette caractéristique était encore présente dans les années 1960 dans seulement quelques
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Traits de l’Ouest Certaines confusions naissent en outre du mélange des systèmes français et patois [...]. Interrogé ensuite le sujet me dit que, pour lui, « il a le temps » et « il a le ton » se prononcent exactement de la même manière 21 .
Cette confusion relevée dans les années 60 du XXe siècle semblait déjà bien présente à la in du Moyen Age chez des locuteurs de la zone de copie du manuscrit. Au delà de la graphie, la morphologie et la métrique du texte peuvent être afectées, comme le prouve la section de la partie morphologie consacrée au pronom on.
[ũ] devient [ĩ] Le substantif commun est présent à la rime dans une laisse en [ĩ] (laisse LII) au vers 1438 22 . Cette diférence d’avec la prononciation francienne est une nouvelle fois particulière à la zone de l’Ouest, comme le montre J. Pignon : On remarque qu’au moins en position inaccentuée la délabialisation a eu lieu avant la nasalisation : [ũnœ] (lat. una) devient [ĩnœ], d’où [inœ]. La forme [inœ] est générale (sauf en zone occitane) au féminin et [in] fréquent au masculin devant initiale vocalique. Devant consonne on a presque partout [ẽ] mais in trouve [in] dans le sud du Thouarsais et en Bressuirais. 23
1.1.4
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Consonnes
m(i)n >n L’aboutissement de m(i)n latin mis en contact suite à la chute de la voyelle libre atone peut donner n : Luminare > luniere (1109). Selon J. Pignon : régions de la zone poitevine : « Niortais, nord du Mellois, reg. de Parthenay, Bressuirais, sud du Thouarsais. Même type de voyelle dans la Vienne, en Mirebalais et dans l’ouest de la région de Poitiers », ibid., p. 339-340 21. Ibid., p. 340. 22. Les variantes suivantes sont présentes dans les autres manuscrits : P= commin (barre nasalisation sur o) / JCF : couvin / Nh : mengier. 23. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 341.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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L’assimilation de l’m au n, dans le groupe -mn-, est donc un trait commun, dans l’Ouest, au poitevin et aux parlers d’oc. Ce trait se rencontrait certainement jusqu’à la Loire et, vraisemblablement au delà. Je n’en n’ai trouvé aucune trace dans les parlers du NordOuest. 24 Cette forme particulière pourrait être de prime abord considérée comme une erreur du scribe. Elle n’a cependant pas été corrigée, pouvant être considérée comme une pierre de plus à l’édiice ain de localiser la copie du texte à l’Ouest du territoire.
Apparition de [w] après labiale Le texte présente un développement de [w] après une consonne labiale devant [ẹ] ou [ẽ]. Ce phénomène est indiqué par l’utilisation de la graphie oi 25 : — mois = mets 17618 — mois = mes (messager) 20951 — voys = (je vais) 54 [...] 21338 — foys = (je fais 538) [...] 20482. Ce qui est graphié ai après labiale sous la plume d’un copiste d’une autre aire géographique est donc prononcé [wẹ] par un locuteur de la région au lieu de [ẹ]. Cette équivalence conduit le copiste du manuscrit aixois à utiliser sans distinction les digrammes ai, oi et la lettre e pour noter le son [wẹ] après labiale : — apaier (pour apoier) 13590 26 — mains (pour moins) 14057, 14059 — pléz (pour ployz) 4265 — fain (pour foin) 14031, 19307, 19428, 19439.
Diférenciation de -r par -l Devant une consonne labiale, le -l devient -r en in de syllabe. Ce trait est caractéristique de la zone francoprovençale 27 et se trouve également dans le 24. Ibid., p. 488. 25. idem, La Gente Poitevinrie : recueil de textes en patois poitevin du XVIe siècle, op. cit., § 26, et idem, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 499-502. 26. Pour [wẹ] dans apoier voir le paragraphe sur la diptongaison conditionnée de [ŏ.] 27. J. P. Chambon, « Pour la localisation d’un texte en moyen français : l’exemple du mystère de Saint Sébatien », Les formes du sens : études de linguistique française, médiévale
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Traits de l’Ouest
domaine poitevin 28 : Alma > arme 19434 La diférenciation peut également avoir lieu lorsque -l débute une syllabe, comme cela peut-être le cas dans d’autres partie du territoire : merencolient 16655.
1.1.5
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Graphies
Le h intervocalique La lettre h peut être utilisée comme signe disjonctif pour marquer un hiatus encore présent en moyen français ou disparu. Le plus souvent, les formes avec et sans h cohabitent dans le texte : 1. Disparition d’une dentale — *Appodiare : appouher 3538 / appouhé 3543 / appouha 16760 / appouer 3538 — cauda : couhe 11922, 18500 — Fodere : fouhir 4495 — Laudare : louher 1834 [...] 20591 /louer 3972 [...] 14582 / louhé 2547 [...] 21432 / loué 4891 ; alouhé 13362 — Rota : rouhe 12587, 15051, 15055, 19883 — Rotomagus : Rouhen 2724 [...] 4016 / Rohen 2994 [...] 20921 / Roen 4935 [...] 5858 — Tutari : tuhé 6047 / tué 1093, 2522, 4621, 11248, 18787 2. Disparition d’une consonne vélaire — Advocare : advohé 1622, 3006, 6412, 13088, 14447/ advouhé 13144 — Augurium : ehur 2971, 5599 — Jocari : jouher 156 / jouer 12355, 17558, 17717, 17900 / jouhé 1404 / joué 13364 / jouhe 6819 — Ruga : ruhe 329, 332 Jean D’auton (Angles) Vendée / rue 1416, 2978 — Vocare : vouhé 16730, 19499, 21678 / vouha 17231 / voua 18357 3. Disparition d’une labiale et générale ofertes à Robert Martin à l’occasion de ses 60 ans, 1997, p. 67–78, § 3 p. 69. 28. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 490.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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— Cubare : couher 4428 — *Bovarius : bouher 348 — *Hauwa : houhe 3952 / houe 8057 Cette utilisation de la lettre h est à rapprocher d’un usage régional. Cette pratique se trouve dans un texte rédigé en 1468 aux environs de Poitiers et présentant des traces de dialecte poitevin : Le Mystère de la patience Job, composé entre 1448 et 1478. L’édition moderne réalisée par Albert Meiller signale ce fait et retient des exemples similaires aux nôtres (louhé vers 830, jouherons vers 1244) 29 . La toponymie nous ofre également un indice d’une localisation restreinte de cet emploi. La ville de Couhé située dans la Vienne à 25 kilomètres au Sud de Poitiers semble porter la même marque graphique. Le nom de cette commune dériverait de l’anthroponyme latin Colnacio, qui aurait donné Couhec puis Couhé 30 . La présence du h intervocalique dans ce toponyme paraît résulter de la disparition de la nasale n. Ce mouvement similaire à celui observé dans le texte permet sans doute d’y voir une pratique locale.
1.1.6
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Evolutions phonétiques particulières
Paucum > poy Le latin paucum a pu évoluer dans le français de l’Ouest en poi. J Pignon signale d’ailleurs « qu’une aire [pwe] : [pwa] devant s’étendre sur la plus grande partie des Deux-Sèvres [...] jusqu’à la in du XIXe siècle ». Le texte présente les formes suivantes comme aboutissement de l’évolution de paucum : poy 1787 [...] 21281 ; pou 112 [...] 21578. Ces deux formes sont celles qui se trouvent dans les textes médiévaux de langue poitevine 31 . La forme française peu n’est pas représentée dans le texte.
Carrus > cher/chier/char Les formes cher et chier viennent marquer l’aboutissement de l’étymon carrus : 29. A. Meiller, La pacience de Job, mystère anonyme de XVe siècle, Paris : Editions Klincksieck, 1971, p. 21-22. 30. Le patrimoine des communes de la Vienne, éditions Flohic, article Couhé. 31. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 257-259.
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Traits de l’Ouest chier 7698 ; cher 3085, 7931, 8479, 10952 La forme francienne du mot se trouve également dans le texte : char 8978, 10987, 12475
Une première hypothèse serait de considérer les efets de la consonne palatale initiale sur le a. Cependant, les efets de la loi de Bartsch n’ont pas cours en cas de voyelle entravée. D’autres exemples montrent bien que a se maintient en cas de voyelle entravée : cattus > chat 5209, 8224, 14006 (chatz), 16750, 17778. Par ailleurs, hors du contexte palatal, le texte présente quelques fois une hésitation entre er et ar, comme il est courant dans les textes en moyen français 32 : ar > er — herbergier 2921, 7010, 14068, 17547 / harbergerie 2977 — harbergement 17795 ; herbergement 7537 — lermes 20502 Cette alternance entre graphies avec a ou avec e est un début de réponse. Elle n’explique cependant pas l’utilisation de la forme chier. Il faut ensuite coupler le phénomène d’alternance graphique avec celui de l’aboutissement de la diphtongue de [ĕ] tonique libre dans la zone poitevine 33 . L’absence de yod est également valable pour les diphtongaisons ayant eu lieu sous l’efet d’une palatale : — cara > chere 986 [...] 11447 — Pictavis > Poiters 19071 — justiciare > justicer 6336, 6996, 17549. Ces termes diphtongués se trouvent bien souvent à la rime avec d’autres mots graphiés -ier en inale (voir par exemple la laisse 520 senter rime avec chevaliers, aider avec huchier etc.). L’aboutissement de cette diphtongue peut être graphié indiféremment dans le texte ier ou er (chere/chiere 101, 199). Cependant, les mots chere et chiere se prononcent tous deux [z̃ẹr]. La graphie avec -i, issue de manuscrits d’autres régions plus septentrionales du domaine d’oïl, est en fait pour le scribe poitevin du manuscrit d’Aix l’équivalent phonétique de la graphie sans -i. L’équivalence entre er et ar et er et ier a pu alors créer la confusion du scribe : si er=ar et que er=ier, alors ar peut, par raccourci, être l’équivalent de ier. Ainsi, le texte présente trois formes graphiques diférentes pour marquer l’aboutissement de carrus. 32. C. Marchello-Nizia souligne la diiculté de déterminer si la séquence se prononçait ar ou bien si le r a eu une action fermante sur la voyelle. C. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, Armand Colin (version Kindle), 2005, Chapitre 4, §3.2. 33. Voir le paragraphe Evolution de ĕ tonique libre.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
1.1.7
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87
Localisation du manuscrit
Le manuscrit A fait donc état de traits linguistiques typiques de l’ouest de la France. L’occurrence de la forme luniere au vers 1109 pourrait paraître isolée mais elle devient parlante dans le contexte des exemples relevés pour nous aider à formuler une hypothèse de localisation plus précise dans la région de Poitiers. Il faut tout de même garder à l’esprit que la localisation d’un manuscrit français du XVe siècle ne peut pas se faire de la même façon que pour un texte anglonormand du XIIIe siècle. Les données linguistiques à relever sont plus éparses et parfois moins nombreuses que pour des textes plus anciens. Elles n’en restent pas moins présentes 34 . On retrouve des traits graphiques et linguistiques similaires à ceux du manuscrit A dans La Pacience Job, comme par exemple l’utilisation particulière de la lettre h en milieu de mot. Des traits morphologiques étudiés dans la partie suivante permettent également d’ancrer la copie dans la région de Poitiers. Ces données linguistiques sont étayées par des données codicologiques. En efet, nous avons vu que le papier du manuscrit A comportait un iligrane de bœuf couronné se trouvant seulement, selon Briquet, dans la région poitevine. Ainsi, cette superposition d’indices nous amène à formuler l’hypothèse que le manuscrit A a bien été rédigé dans les environs de Poitiers par un copiste originaire de la région. Les travaux de Jacques Pignon, auteur d’une thèse sur l’évolution des parlers poitevins, nous permettent de vériier que les phénomènes relevés se trouvent bien tous dans la zone dialectale poitevine à la in du Moyen Age 35 . Les textes littéraires du Moyen Age identiiés comme poitevin ou contenant des touches poitevines sont toutefois très peu nombreux. Pour son étude, Jacques Pignon en dénombre deux en patois poitevin et trois en langue mixte pour une période comprise entre le XIe et le XIVe siècle 36 . On compte parmi ces textes des Sermons Poitevins, une version de La passion de Sainte Catherine ou encore des chansons de Guillaume X de Poitiers. L’automne du Moyen Age n’est pas plus lorissant en textes venus de cette région occidentale. Villon s’amuse à décrire ses amours poitevines en usant de quelques traits linguistiques de la région 37 . Des Noëls Poitevins en langue mixte ont été composés au XVe siècle 38 . Une édition récente 34. A propos de la localisation d’un texte en moyen français voir Chambon, « Pour la localisation d’un texte en moyen français : l’exemple du mystère de Saint Sébatien », op. cit. 35. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit. 36. Ibid., p. 39-57. 37. F. Villon, Testament (le), sous la dir. d’A. Rychner J. et Henry, Droz, 1974, CIII, v. 1054-1069, p. 90. 38. Ces Noëls igurent dans le manuscrit Paris, Bibliothèque de l’Arsenal, ms. 3653. Ces
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Autres traits phonétiques dialectaux
permet d’ajouter à ce corpus un mystère médiéval du XVe siècle rédigé dans les environs de Poitiers, La pacience de Job 39 . Le témoin le plus ancien rédigé directement en langue poitevine date du XVIe siècle : il s’agit de La Gente Poitevinrie, recueil de textes dont Jaques Pignon a fourni une édition critique qui s’avère très utile pour l’étude de la langue du manuscrit aixois 40 . Ajoutons que la région de l’Ouest, plus particulièrement dans une zone comprise entre Le Mans et Poitiers, semble un territoire fécond pour la difusion de la légende du connétable. En plus du manuscrit 14 du Mans, qui semble avoir séjourné depuis le Moyen Age dans l’Abbaye de saint Vincent, du manuscrit A qui semble avoir été copié aux alentours de Poitiers, on trouve la trace d’une vie de Bertrand du Guesclin dans le catalogue d’un marchand de la ville de Tours au XVe siècle 41 , catalogue qui mentionne également le mystère de La Pacience Job. La légende en vers du connétable est donc bien représentée dans cette partie du territoire et le manuscrit A est certainement un nouveau chaînon pour tenter comprendre la difusion du texte dans la région occidentale, sous domination anglaise jusqu’à la seconde moitié du XVe siècle.
1.2 | Autres traits phonétiques dialectaux 1.2.1
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Emploi des féminins picards
Le manuscrit utilise de nombreuses formes de féminins picards pour l’accord des participes passés. La majorité se trouve à la rime : enragie 959, 3863, gaignye 970, chevauchie 979, deppecie 888, gaytie 981 ; rengie 6734 ; desploÿe 8503 ; 13165 ; 14373 ; 14764 ; 17995 ; 19920 ; 20277 ; laissie 10826 ; 17471 ; appareillie 10841 ; gaignie 10842, 11278 ; 12395 ; 14733 ; 19455 ; mucie 10965, 10966 ; negie 11637 ; embracie 11638 ; 13402 ; 14774 ; huchie 11642 ; deplaïe pièces ont été éditées au début du XXe siècle dans l’ouvrage suivant : H. Lemaı̂tre et H. Clouzot, Trente noels poitevins du XVe au XVIIIe siècle, G. Clouzot, 1908. 39. Meiller, La pacience de Job, mystère anonyme de XVe siècle, op. cit. 40. Pignon, La Gente Poitevinrie : recueil de textes en patois poitevin du XVIe siècle, op. cit. 41. On trouve en efet un manuscrit référencé « Bertrand du Glaiquin » au numéro 34 du catalogue, mais rien n’indique s’il s’agit d’une version en prose ou en vers. Voir A. Chéreau, Catalogue d’un marchand libraire du XVe siècle tenant boutique à Tours, Paris : Académie des bibliophiles, 1868, p.19.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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11643 ; rongie 12388 ; octroie 13166 ; 14215 ; 14739 ; 14793 ; 17750 ; ploye 13170 ; baillie 13171 ; 14287 ; envoie 14218 ; 14795 ; 17491 ; 17756 ; aiguisie 975, 14295 ; 15946 ; 17483 (aguisie) ; renoie 14378 ; abaissie 14738 ; baissie 14740 ; chaussie 14772 ; couroucie 14776 ; verolie 14779 ; chargie 14998 ; commaincie 15012 ; convoïe 15486 ; travaillie 15492 ; enforcie 15496 ; trespercie 15949 ; emploïe 16910 ; eforcie 17477 ; blecie 17488 ; renoncie 17497 ; baptisie 17740 ; iancie 17751 ; noncie 18014 ; glacie 19217 ; cerchie 19484. Certaines formes apparaissent à une autre place du vers : engagie 13510 ; jonchie 14892 ; redrecie 15971 ; desploÿe 20172. Enin, certains participes sont employés à la rime dans des laisses féminines en ee : traynie 8349 ; atraynie 10972 ; drecie 13901. Le substantif moitié s’emploie à la mode picarde dans des laisses en ie : moitie 212, 3227, 3765, 5521, 14748, 17503, 17965. Le manuscrit ne présente aucune occurrence du substantif dans des laisses rimées en [ẹ]. La forme picarde a donc été adoptée pour le reste des exemples trouvés dans le texte en milieu de vers : v. 664, 941, 5442, 7598, 9613, 9750, 13531 et 16010.
1.3 | Traits phonétiques du moyen français 1.3.1
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Hiatus
La tendance à la réduction des hiatus caractéristique du moyen français 42 se retrouve dans le manuscrit. Quelques cas de conservation sont tout de même à noter, notamment pour des besoins métriques. La politique d’usage du hiatus par le scribe du manuscrit A suit la tendance générale du texte : elle oscille entre conservatisme et renouvellement. Par exemple, les inales en -ion portent systématiquement un tréma, le disyllabisme étant toujours marqué par le mètre du vers alors même que sa disparition est bien actée en ce milieu du XVe siècle. Le choix aurait également pu être fait 42. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., Chapitre 4, § 1. Réduction des hiatus.
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Traits phonétiques du moyen français
de signaler dans cette partie ce disyllabisme et de ne pas le marquer visuellement dans l’édition. Cependant, il nous semble cohérent d’étendre l’usage du tréma à tous les cas de hiatus avérés par la métrique et non simplement à certains. Au contraire, certains hiatus nécessaires au maintien de l’harmonie métrique disparaissent sous la plume du scribe sans réajustement des vers. Prenons pour exemple le vers 8922 : La peüst on voir banieres a orfroys. L’absence graphique du -e marquant la présence du hiatus pour veoir ne permet pas de le signaler au lecteur. La métrique garde cependant trace de cette prononciation du verbe en deux syllabes, ce que prouve également des versions plus anciennes du texte 43 . Ne souhaitant pas surcharger l’édition, nous ne notons pas ces cas directement dans le texte. Ils seront signalés dans le relevé ci-dessous à la partie consacrée au hiatus eoi/ëoi par un astérisque. Des lecteurs médiévaux aguerris étaient peutêtre capables dans ces cas-là de recomposer eux-mêmes un alexandrin, même déicient visuellement. Le relevé suivant fait la synthèse des hiatus encore présents dans le manuscrit. Chaque forme est accompagnée des numéros de vers correspondants. Si elles existent, les occurrences des formes sans hiatus sont placées à la suite. Les formes verbales sont classées sous l’ininitif correspondant, accompagnées si nécessaire de la personne. La politique d’usage du tréma dans l’édition sera détaillée pour chaque cas de hiatus présent dans le manuscrit. La luctuation constante des formes permet diicilement d’avoir une politique globale de ponctuation, c’est pourquoi chaque cas est étudié en détail ain de savoir si l’hiatus se maintient ou non dans le codex aixois et par conséquent si le tréma est utilisé.
Hiatus maintenus Aucune trace de luctuation dans la prononciation ni aucune forme réduite n’est marquée par la métrique ou l’orthographe pour les hiatus suivants. Parce qu’ils sont systématiquement marqués par le texte, nous avons fait le choix de toujours utiliser un tréma sur les formes concernées. aï/ai L’hiatus aï se maintient dans tout le texte, suivant ainsi la tendance générale du moyen français. Une occurrence pose cependant problème : ayde au vers 3350. La métrique du vers semble montrer une absence de hiatus : et sans ayde donner 43. Voir par exemple la variante du manuscrit P : La peust on veoir banieres a orfrois.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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et sans moy convoier. La version du manuscrit P est toute autre : et sans aïde d’omme et sans moy convoier. Que faut-il alors conclure ? Le résultat présent dans le codex aixois peut être la conséquence d’une lecture erronée du vers d’une version proche de P provoquée par l’agglomération de de et du nom omme ou d’une version portant déjà la même variante. Toutefois, cette erreur est peut-être l’indice d’un début de périclitation du hiatus, entraînant le copiste à modiier la répartition des syllabes ain de retomber sur un vers de douze syllabes. Ayant afaire ici à l’unique cas d’absence potentielle du hiatus, nous pouvons tout de même airmer que la tendance générale est à la conservation de aï. Seul le substantif ayde au vers 3350 ne porte pas de tréma ain de marquer notre réserve, toutes les autres occurrences portent ce signe de ponctuation. 1. Verbes — aïder 13369 — aïrer 1188, 6174, 14562, 16554 — esbaïr 10369 [...] 18010 — haïr 3151 [...] 19969 — maïgné 1869, 1881 — traïr 1411 [...] 21123 — traïson 859 [...] 21639 — traïteur 6851 [...] 20800 — traïtre 2291 [...] 20651 — traÿner 3010 [...] 16741 2. Noms — abbaÿe 533 [...] 21751 — aïde 608, 5420, 6994 / ayde 3350 — aïe 960 [...] 21846 — aÿ 2968, 4898, 5610, 5979, 9157 — aÿr 15512 — aÿver 20601 — enhaÿr 20741 — envaïe 956 [...] 19885 — envaïr 4693 — haÿne 3449 [...] 18010 — païs 225 [...] aü/au
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Traits phonétiques du moyen français — aüner 853, 4833, 14493, 15697, 20484, 20486.
eï/ei 1. Verbes — ameneïs 19546 — beneïs 7602, 13067 — cheÿ 2481, 19061, 19062, 19112, 20719 ; cheït 19240 — cogneïs 334 — feïsse 9751, 12362, 13322 ; feïssent 18046 ; feïsmes 14439 — pourveÿ 14336, 17651 — regreïs 1240 — veïst 952, 4628, 19694 ; veïsséz 958, 3133, 3826, 3950, 4622, 6072, 7998, 13057, 13141, 13578, 14934, 15538, 17670, 18124, 19384, 20548 2. Noms/Adjectifs — Ansseïs 19571 — beneïsson 94, 6850, 7896, 11425, 12172, 13678, 13704, 16940, 16943 — leveïs 18247 — maleïçon 6842, 9682 (maleïsson), 16737, 16934, 19704, 21272 — maleïs 9834 / maleÿ 12525, 20640, 20665 — mescheÿ 10231 — pasteïz 333, 1241 — pongneïs 19568 — reÿne 3639, 6538, 6542, 6653, 7805, 8557, 8933, 8957, 8962, 12632, 12711, 13960, 14545 / roÿne 6366 [...] 16274. oï/oi 1. Verbes — conjoÿ 526, 4949 — encloÿrent 4788 — s’esjoïssent 2587 ; esjoÿ 10921, 12243, 20551 ; esjoÿrent 15515 — joÿroit 236 — oïr 5 [...] 21593 ; oïst 5848, 11772, 12486, 17516, 18712 ; oït 124 ; oï (ps p1) 355 [...] 21561 ; oï (ps p3) 233 [...] 21107 ; oï (pp) 352 [...]
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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20751 ; oïstes 20612 ; oÿsséz 5817, 8265 ; oÿrent 2449 [...] 21529 ; oÿe 197, 962 ; resjoïr 18783 ; resjoÿ 2362, 11509, 15121, 15143 ; resjoÿra 8467 2. Autres — oïl 3035, 12827, 18542 (oÿ), 20401 (oÿ) — Loÿs 4098 [...] 20420. ouë/oue — souëf 1328, 14832 uï/ui — Verbes brouÿr 9416 fuïr/fouÿr 15102 [...] 21385 suï 16272, 17155, 17280 suïr 16210, 17401 — Noms Juïf(s) 42 [...] 16798 juïfzerie 8162, 8245, 9526 huïsson 20767
Hiatus luctuants eu/eü L’hiatus eü a tendance à se maintenir, contrairement à la tendance observée dans les textes datant du milieu du XVe siècle 44 , particulièrement dans les formes verbales. La graphie n’indique jamais de formes réduites, seule la métrique permet de diférencier les fois où l’hiatus est prononcé. Le scribe du manuscrit d’Aix, comme ses prédécesseurs 45 , utilise la liberté dont il dispose ain d’assurer l’harmonie métrique du texte. L’hiatus -eü est donc convoqué au besoin et par conséquent toujours admis dans l’aire géographique poitevine au moment de la copie. Le relevé ci-dessous permet de faire le point sur l’emploi de ces formes. 44. « Mais au milieu du [XVe] siècle la réduction [du hiatus eü] est acquise, qu’il s’agisse des formes verbales, des substantifs [...] ou adjectifs. », Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit. 45. La luctuation dans l’emploi du hiatus eü se retrouve également dans les autres témoins de la chanson.
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Traits phonétiques du moyen français
La copie aixoise ne présentant aucune forme graphique réduite en u au lieu de eu, nous avons pris la résolution de placer un tréma là où la métrique l’indique, en accord avec les usages du moyen français. Verbes 1. Participes passés — savoir : sceü 3024, 8460, 13660, 16150 sceu 6615 — boire : beü 1308, 1979, 6592, 7204, 7260, 11371,19369, 19491, 19728 beu 7570, 13364, 19492 — recevoir receü 5591 [...] 20581 receu 93, 3329, 12030, 12599, 12672, 15826, 18959 — esmovoir esmeü : 396 [...] 21233 esmeu : 4622 [...] 20754 — voir veü 63 [...] 21186 veu 1151, 14237, 17139, 17569, 18743, 18781 — croire creü 9341, 11000, 11336, 11544, 11917, 13382, 17284, 17710 creu 9337, 16275 — cheoir cheü 2507 [...]18652 — avoir eü 2620, 13103, 16555, 19743 eu 154 [...] 18924 — cognoistre — cogneü 17159, 19733 cogneu 8163, 8356, 12735, 13710 2. Subjonctif imparfait — avoir P1 eüsse 9560, 11461, 13095, 13096, 17448 P3 eüst 505 [...] 21446 / eust 1451, 1869, 1921, 1925, 3887, 12950
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
—
—
— —
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P4 eüssons 5787, 16631, 16736 P5 eüsséz 10247, 17710 / eusséz 1479, 1701, 14030 P6 eüssent 6323 [...] 21750 / eussent 8692, 13102, 13190, 19710 pouvoir P1 peüsse 12833, 13550, 15818, 16255, 16300 P3 peüst 2281 [...] 21400 / peust 936 [...] 20821 P5 peüsséz 5426, 11406, 11448, 13537, 13868, 18731 / peusséz 12930 P6 peüssent 8097, 15315, 16804, 21387 devoir P3 deüst 2408 [...] 19273 / deust 1903 P4 deüssons 3550 P5 deusséz 17562 deüsséz 8029 P6 deüssent 3553, 11069, 13010, 16248, 16281, 17442, 19844, 19846 savoir P3 sceüst 16668 / sceust 5661 plaire P3 pleüst 1488, 3555, 7447, 9235, 11460, 12374, 12831 / pleust 123, 1479
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Traits phonétiques du moyen français
Noms/adverbes — armeure armeüre 893 [...] 21464 armeure 648 [...] 21384 — seurté seürté 7361, 7632, 19949 — seurement seürement 4408, 5440, 5647, 15316, 20704 — deuement deüement 2064, 8535, 10907
Hiatus disparus ëoi/oi Alors que l’usage de ce hiatus est toujours en vigueur sous la plume de Christine de Pizan ou Villon 46 , son usage est des plus luctuants dans le texte. Les formes ininitives du verbe veoir sont très souvent graphiées voir dans le manuscrit d’Aix. Pourtant, la métrique garde souvent une trace de la présence du hiatus et leur absence rend donc le vers hypométrique. Les vers perdant ainsi une syllabe ne sont pas pour autant remaniés par le scribe. Faut-il voir ici une méprise de l’harmonie métrique de la part du copiste, une perte totale du hiatus dans la région de rédaction ou bien un indice d’une copie destinée à un lectorat capable de retrouver le bon nombre de syllabes ? Une réponse peut être donnée en analysant l’occurrence du verbe pourveoir au vers 5511 : je les feray pourveoir de pain et de vin cler. Le copiste utilise le trigramme eoi alors même qu’aucun hiatus n’est nécessaire ain d’arriver à douze syllabes. Le manuscrit P, pourtant plus ancien, présente à cet endroit une forme réduite : je les ferai pourvoir de pain et de vin cler. Le rétablissement du e par le copiste du codex aixois peut être la preuve qu’il considère comme équivalent pourveoir et pourvoir et par conséquent qu’il considère l’hiatus comme caduc. Il en va de même pour la forme veoient pour noter la P6 de l’imparfait de l’indicatif. La présence du trigramme peut indiquer un hiatus, comme au vers 12760, ou bien une forme sans hiatus. Le dernier cas peut être illustré par l’occurrence du vers 4398 : et veoient les Françoys oultre l’eave passer 47 . On retrouve le même phénomène pour la notation de l’ininitif. Le vers 349 ofre une forme veoir qui 46. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., Chapitre 4, § 1. 47. Des autres occurrences de ce phénomène se trouvent aux vers 5886, 18298 et 20814.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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se prononce sans hiatus. De la même manière que l’exemple de pourveoir vu plus haut, la graphie garde en mémoire l’hiatus alors que sa prononciation n’est plus. L’équivalence phonétique entre les formes portant un trigramme et les formes réduites amène à penser que le scribe du manuscrit A n’admet plus la prononciation du hiatus ëoi. Là où les autres manuscrits plus anciens témoignent d’un état de langue où la possibilité d’une prononciation facultative de ce hiatus est admise, le manuscrit A sonne déinitivement le glas de ce hiatus. Cette disparition est peut-être locale, elle est cependant bien actée sous la plume du copiste. C’est pourquoi nous avons choisi de ne pas placer de tréma sur ces formes, même lorsque la métrique le permettait. La liste ci-dessous permet tout de même au lecteur de retrouver les cas où la métrique garde une trace de la présence d’un hiatus dans des formes plus anciennes du texte : — asseoir 21229 — cheoir 160 [...] 21365 / choient 14621 — mescheoir 10336 — pourveoir 5111, pourvoit 14552 — seoir 9782, 12913, 12914 ; sëoit 349, 13629 — veoir 1111 [...] 21178 veoient 1777, 3749, 12760 ; voient 4717
1.4 | Consonnes 1.4.1
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Métathèse du -r
Le texte présente plusieurs cas de métathèse du -r, phénomène qui se retrouve à travers tout le domaine d’oïl, y compris dans la région poitevine : refremee 3763 ; Berton 412 [...] 21430 ; Bertaigne 356 [...] 21505 ; bertonnant 412 ; deliverroye 7104 ; deliverray : 13493 ; monsterroit 1062 ; demousterrons 7539 ; liverrons 11319 [...], 19811 liverra 14341 ; Bretrant 2691 [...] 21640 ; terperça 15948 ; abevrer 19270 ; 19285 ; bregier 21718.
1.4.2
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R inorganique
Le texte présente un cas de -r inorganique formant ainsi un groupe consonantique explosif complexe : pasgres/pagres pour pages : 6240, 11237
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Systèmes graphiques particuliers
1.5 | Systèmes graphiques particuliers 1.5.1
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ou/au
Le résultat de l’enclise de la préposition a + le article peut être graphié ou : ou chastel 915 ; ou roiaume 9417 ; ou palais 9667 ; ou cheval 13741 / au matin 228 ; au pié 21746
1.5.2
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H
Le h à l’initiale Le h initial peut parfois disparaître, qu’il soit étymologique ou analogique. Les formes suivantes cohabitent dans le manuscrit : 1. cas du h latin — Hora : eure 121, 304, 808, 1587, 1993, 2517, 2522, 3102, 3806, 4002, 4377, 4442, 13881 [...] 21508 ; heure 1113, 1919, [...] 19446. — Habitus abit 3721, 3751, 10047, 15447 habit 3743, 12967 — Honorem onneur/onnour 66, 341, 353, 523, 541, 1058 [...] 21759 honneur 18, 131, 140, 144 [...] 21709 — Hereditas erité 21726 herité 43, 1627, 2013, 2168, 5903, 7678, 9285, 13737, 14821 — Hospitalis oustel 188, 221, 291, 298, 7127, 10429, 14157 hostel/houstel 1452, 1453, 1455, 1952, 5005, 5110 7125, 10431 [...] 19815 — Hominem omme 885, 4165, 6297, 8815, 9899, 17307 homme 361 [...] 21740 — Hispania
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
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hespaignolz 8287 Epaignolz 7817 — Hibernum iver 48 1999, 2900, 18944, 21569 2. cas du h germanique — Happia ache 21411 hache 680 [...] 21329 — Harmaskara achie 19975 hachie 12014, 13173, 14379 — Halsberg* aubert 1785, 2492, 14650, 14877 haubert 4746 [...] 18848 3. cas du h de collision — Augurium eureux 8812, 17387, 17898, 17899 heureux 139, 3400, 3421, 10459, 14053 eur 13008 heur 1811, 10017, 10461, 10750 — Altus hault 77 [...] 21738 ault 3912, 9868, 11134 [...] 21467 Arepennem arpent Ø harpent 11761, 12204 (confusion avec harpaga ?) — Opera heuvre 19273 euvre 3787 [...] 21737.
h initial et élision Le h initial peut bloquer l’élision du [ə] en position inale. Le prénom Henry entraîne toujours ce phénomène lors de ses nombreuses utilisations, comme par exemple dans les vers suivants : — et le conte Henry en la dame engendra (6933) 48. Le substantif hiver est toujours graphié sans h dans le texte.
100
Systèmes graphiques particuliers
— mais encontre Henry la guerre commainça. (6978) On retrouve ceci dans bien d’autres exemples : — humilier : Lors se sont enclinéz, chascun se humilia (7174) — hom : Henry est noble homs, s’a maniere hardie (8571) — hardi : aprés ce que Bertrant, o la chiere hardie (3403) — hauberger : car ja ne me verréz armer ne hauberger (17003).
1.5.3
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NG
Un g inal peut être introduit dans la graphie ain de distinguer u suivi de n 49 . C’est le cas pour l’article indéini masculin singulier : ung : 4129 [...] 19271 La lettre g marque également une volonté du scribe d’utiliser une graphie latinisante 50 : — vingt (< vigniti) : 800 [...] 19013 — oingt (< ungere) : 4001 — ataingt (< attingere) : 6092 — poings (< pugnus) : 11408.
1.5.4
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Alternance de consonnes
S/C Les lettres s et c sont employées indiféremment à l’initiale pour noter la sourde [s] dans les formes suivantes : 1. pour la forme se, pronom personnel des troisième et sixième personnes ce sont 611 [...] 21710 / se sont 780 [...] 21693 c’est 1082 [...] 19341 / s’est 458 [...] 21695 / c’estoit 5863 / s’estoit 678 [...] 17279 2. pour l’adjectif démonstratif singulier et pluriel se 14198, 14528, 16269 / ce 34 [...] 21432 ses 2091 [...] 19776 / ces 330 [...] 21319 3. pour le pronom démonstratif neutre s’estoit 18452 / c’estoit 1011 [...] 20976 49. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., § 1. Graphies. 50. Ibid., § 1. Graphies.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
101
4. pour la particule démonstrative si 11671 / cy 12920 5. pour l’adverbe de lieu sa 8034, 15405 / ça 992 [...] 20181 6. pour l’adverbe intensif cy 202, 8684 / si 55 [...] 21742 7. pour la conjonction marquant l’hypothèse : c’ 11490 se 130 [...] 21708
S/Z Le scribe emploie aussi bien le graphème s que z pour : 1. Marquer le pluriel — baillez 3045, 5683 / bailles 440 [...] 19824 — villez 10416 / villes 624 [...] 21597 — citéz 6420 [...] 19834 / cités 624 [...] 16889 — tentez 15512, 16246, 16279 / tentes 1605 [...] 15278 — durez 13870 / dures 3793 — logez 14831, 16280 / loges 1073 [...] 19251 — couppez 16850 / couppes 17116 2. Marquer l’adverbe — orez 1128 / ores 5 [...] 21286 3. Marquer la désinence de la deuxième personne du singulier — soiez 11515 ; auroiez tu 10091 4. Marquer la cinquième personne — estez 5178, 5686, 7142, 9363, 10182, 11171, 11195 , 11602, 11712 , 12094 , 12099 ; 13082 ; 14082 ; 15241 ; 16408 ; 16424 ; 16426 ; 17883 ; 17437 ; 17728 ; 17734 ; 18815 / estes 20189 — feistez 12146 Il a donc été nécessaire d’ajouter un accent sur le e avant z pour distinguer les cas de cinquième personne et de participes passés des substantifs pluriels (pour distinguer par exemple le participe passé arméz du substantif féminin pluriel armez).
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Systèmes graphiques particuliers
T/C Les lettres -c et -t peuvent parfois être employées indistinctement 51 : 1. ain de former un groupe consonantique complexe avec la liquide -r trectellée 7859 / cretel 15753, 20430 2. devant -i/ ou -e — pour marquer le son [t] parcie 16120 / party 19042 (vb partir) ; creancee 18426 / creantee 426 — pour marquer le son [s] pottesser 6354 / poccesser 5551.
CT/TT Le scribe utilise le groupe consonantique ct ain de marquer : 1. la séquence -itt présente dans l’étymon latin aboutissant à -ett en français moderne : — littera > lectre 4869 [...] 13143 — mittere > mectre 52 1045 [...] 20727 — promittere > promectrons 7286 — sagitta > saiectes 8475, 11635, 11637 2. la séquence -itt issue du suixe latin ittam aboutissant au suixe -ette en français : — *trumba+ittam > trompecte 3080 [...] 20048 — filia+ittam > illecte 4474, 8116 — carrus+ittam > charecte 11122 — bulla+ittam > bullectee 13201 — *Berg+ittam > Berguectes 16896, 16901 — clocca+ittam > clochecte 18899. 51. La forme tour du vers 18548 n’est pas prise en compte dans ce relevé. En efet, elle peut être le fruit d’une erreur de copie entraînée par la présence du substantif tour en place inale au vers suivant. Cependant, l’utilisation parfois indistincte des lettres c et t dans le manuscrit a conduit à ne pas corriger cette forme (cf ce paragraphe et le suivant). 52. La base mect est celle employée dans tout le texte où on trouve les formes : mectray, mectra, mectéz etc... Pour un relevé exhaustif des formes du verbe, se reporter au tableau correspondant dans la partie de l’introduction consacrée à la morphologie verbale.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
103
G/J Le son [z̆] peut être marqué dans le texte par la graphie -g, -ge ou -j : g
aubergon 13695, 15947 bourgois 9496 chalengoit 2020, 2731 / chalenga 629, 2022 changa 6062, 8116, 12967, 16052 charga 6556, 8116, 18587 deschargans 883 deschargoient 21389 Digon (Dijon) 13910 engaga 17646 enragoit : 3260 eslonga 6945 forga 11697, 19422 forgant 21321 gregoys 1850/ gregois 15163 juga 2580, 10287 haubergon(s) 3721, 15557, 19479, 19558, 20254 laidanga 6942 loga 568, 11072, 13945, 14178, 15454 s’obliga 13644 renga 11352
ge
Angeou : 7672 aubregeon 1812 bourgeoys 1247 changea 283 logea 1053, 7748, 7751, 9316, 21581 logeoit 1026, 14539 mangea 6549, 7772
j
bourjois(es) 6 [...] chalenja 541 chanja 19111 Anjou 10554 [...]
Alternance des consonnes sourdes et sonores Le texte présente une alternance entre les consonnes sourdes et sonores dans le cas des vélaires c et g ainsi que des labiales b et p. C/G Les lettres -c et -g alternent parfois à l’initiale de certains mots pour noter les sons [k] et [g] : — gravent 11246, 11253 / cravent 10439 [...] 20723 — confanon 8667,8675, 15800, 20172 ; confanonnier 17405 B/P Les lettres -b et -p peuvent se trouver à l’initiale des mots ou en position explosive pour noter : — le son [p] Pestien 2717 [...] 3256/ Bestien 2999 53 esbandy 5258 / espandy 5264 — le son [b] pendéz 3134 /bendéz 3910 54 53. Ville de Pestivien en Bretagne. 54. Il s’agit d’une forme de l’adjectif bandé.
104
Systèmes graphiques particuliers
C/Qu Le digramme -qu peut venir concurrencer la lettre -c à l’initiale ain de noter le son [k] pour rappeler l’orthographe latine : — Quare quar 567, 6762, 9736, 10839, 12855, 13871 / car 66 [...] 21736 — Quadrus quarrel 5657, 19585, 20246 / quarreaux 3951, 8475, 19294 / carreaux 3308, 3525, 3526, 5640, 19296 quarriere 11993 — Quadratus quarré 4103, 8816, 9773, 13199, 15404, 17609, 18440, 20476 / carréz 1610
1.5.5
|
Double consonne
Le texte présente des exemples de double consonne sans raison étymologique : — FF desconis 4966 ; afïans 7329 ; enlé 19841 — TT ditte 5009 ; attort 5487 ; auttorité 6441 — PP repponce 5134 ;champpïon 5956 ; 14257 ; pappe 7580 ; serppent 13851 ; reppent 17713 ; reppentiréz 19754 — SS conduissi 5425 ; chansson 5964, 6380, 6467, 7922 ; 10566
1.5.6
|
Graphies latinisantes
Le texte utilise des graphies latinisantes en introduisant dans la graphie des consonnes rappelant l’étymon, usage courant dans les manuscrits du XVe siècle 55 : — Recipere > reçoipt 8081 — *Accaptare > achapter 2945 [...] 15045 Certaines graphies reproduisent directement l’étymon latin : Aer > aer 2514 [...] 21316 55. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., § 1. Graphies.
Chapitre 1 . Phonétique et graphie
1.5.7
|
105
Consonnes superfétatives
Il arrive qu’une consonne superlue 56 vienne s’ajouter en in de syllabe d’un mot, sans motif étymologique apparent : tresort 7659 ; lisre 10710 ; adveugles 9991, 9992
56. L’adjectif « superfétatif » est préférable pour qualiier ces phénomènes graphiques plutôt que l’adjectif « quiescent » qui suggère que ces lettres n’étaient pas prononcées, point sur lequel il est diicile de trancher.
Le système morphologique du manuscrit A
2
Il n’existe aucune étude morphologique ou syntaxique propre au dialecte poitevin du Moyen Age tant les témoins de langue mixte issus de cette région sont rares. Les faits sont donc relevés et mis en relation autant que possible avec des phénomènes qui se retrouvent dans la zone occidentale du territoire de langue d’oïl ou commun aux textes en moyen français. La partie consacrée à la morphologie verbale propose des tableaux de conjugaison qui concentrent toutes les formes données par le texte pour de nombreux verbes.
2.1 | Morphologie dialectale L’emploi de déterminants typiques de la zone poitevine est certainement la marque la plus probante qui permet la localisation certaine du texte dans l’aire Ouest de la zone francienne de l’époque. Plus largement, quelques traits communs aux dialectes de l’Ouest se trouvent également dans le texte, notamment au niveau de l’emploi des conjonctions.
2.1.1
|
Possessifs
Le manuscrit aixois présente des formes particulières de déterminants possessifs . 1
No/Vo Les déterminants no et vo se retrouvent devant des substantifs singuliers : no no gent 14939, 14955, 15835, 19076 vo : vo courtoisie 10523 ; vo seur 15954 ; vo gent 19403.
Voustre Une occurrence particulière du déterminant à P5 se trouve au vers 12809 : voustre commandement. 1. Ibid., Chapitre 10, § 4.
107
108
Morphologie dialectale
Cet exemple doit être rapproché de la forme noutre présente dans les textes rédigés en patois poitevin au seizième siècle 2 .
Nous/Vous Certaines formes plurielles présentent également une graphie ou pour des besoins métriques évidents alors qu’elles sont considérées comme rares déjà au XIVe siècle 3 : nous nous armeures 876 ; nous vins 1552 ; nous gens 4193, 17331 ; nous biens 5138 ; nous barons 14631 vous vous enfans 1270 ; vous deux compaignons 12675 ; vous gens 15615 ; vous glaives 21362
2.1.2
|
Démonstratifs
Celles/Cestes Les formes anciennes celles et cestes féminin pluriel se retrouvent dans l’expression celles/cestes gens : celles gens 3119, 3133, 3770, 7014, 7086, 7420 ; cestes gens 11822 Un cas de forme renforcée icelles est à noter : icelles gent 1503 Une occurrence de la forme iceulx pour le féminin se trouve dans le manuscrit : iceulx avantures 2640 4 L’utilisation prolongée des formes celles et cestes au féminin pluriel indique, selon A. Dees 5 , une rédaction possible dans une aire géographique comprise entre le Poitou, le Berry, l’Anjou et l’Orléanais. Cette délimitation correspond parfaitement avec l’aire géographique de copie du manuscrit. 2. Pignon, La Gente Poitevinrie : recueil de textes en patois poitevin du XVIe siècle, op. cit., p. 51, § 43. 3. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., Chapitre 10, §5. 4. P=idem iceulz 5. A. Dees, Étude sur l’évolution des démonstratifs en ancien et en moyen français, Wolters-Noordhof Publ, 1971.
Chapitre 2 . Morphologie
2.1.3
|
109
Pronoms personnels
my, ty Quelques occurrences des formes picardes en -i sont à relever dans le manuscrit : indirect (à la rime) avec my 1637, 11100, 11928, 12902, 13985 ; ce poyse my 14840 ; car my sauve la vie 15000 6 ; de my 19665 ; de par my 20650 / de ty 11925 Ces pronoms personnels en -i sont particulièrement présents dans la zone picarde mais employés à la rime très souvent dans d’autres aires géographiques de la France 7 . Le scribe semble les employer plus pour des raisons littéraires que linguistiques, comme le montre le vers suivant qui lui permet d’exploiter toutes les possibilités à sa disposition : ne de moy ne de my 19666
ly indirect masculin Le manuscrit présente quelques survivances de la forme ly au masculin, pronom indirect : v. 1796, 2227, 2230, 15627. La forme ancienne est minoritaire dans cette version du texte datant de 1441 alors qu’elle était la forme la plus employée dans les manuscrits de la in du XIVe siècle, suivant ainsi l’évolution normale du moyen français où le pronom luy s’impose dès la seconde moitié du XVe siècle 8 . La forme ancienne se retrouve dans les textes poitevins jusqu’à la in du XVIe siècle 9 .
le féminin direct la :
Le manuscrit présente quelques formes de pronom personnel féminin le pour
6. Voir la partie syntaxe pour l’emploi des formes prédicatives avec l’impératif. 7. C.T. Gossen, Grammaire de l’ancien picard, Bibliothèque française et romane, Klincksieck, 1976, p124. 8. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., Chapitre 16, §1.2. 9. Pignon, La Gente Poitevinrie : recueil de textes en patois poitevin du XVIe siècle, op. cit., p. 47.
110
Morphologie dialectale queréz qui le teigne (la promesse) 9233 ; on le nomma (la rivière) 18967.
L’emploi de ces formes, qui se trouvent plutôt dans la région picarde, s’explique peut-être par analogie avec le pronom féminin lé/lie.
luy, lié et lé féminin indirect A côté de la forme majoritaire elle, le manuscrit A peut employer pour le pronom féminin régime lui, lie et lé : lui 15445, 15449 lié : 2321, 6841, 6942, 6953, 6954, 6955, 6968, 8558, 9523, 9524, 10598, 10600, 10618, 15455, 20850 lé : lé ennuya 10605 ; decouste lé 10635 L’emploi des pronoms féminins lié/lé est caractéristique des dialectes du domaine poitevin 10 .
On l’on Le pronom on se trouve quelquefois sous la forme l’on dans le texte : si l’on : 1903 ; ou l’on : 5068, 7906, 16674 ; se l’on : 5115 ; comment l’on :6928 ; dont l’on : 7443 ; a quoy l’on :8006 ; 8526 ; chiet l’on le va : 10756 ; ot l’on :15331 ; mort l’on n’y : 17143 ; et l’on prins : 17976 ; mais l’on ne scet : 20967 Cette forme se retrouve souvent dans des proverbes ou expressions proverbiales, sans doute pour rappeler son étymologie (article déini + homme). Les autres occurrences ne semblent pas témoigner d’une volonté d’éviter l’élision d’un -e inal atone, tendance présente dans les textes en vers de la in du Moyen Age 11 . De plus, le texte présente plusieurs formes sans l’ après voyelles : ex. si on : 2850 [...] 19689 ; se on 5260. 10. Idem, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 125. 11. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., Chapitre 16, 1.1, on/l’en/l’on.
Chapitre 2 . Morphologie
111
que l’on La copie présente tout de même un cas de l’on devant -e inal : la locution que l’on présente du 876 au vers 16504. Cependant, cette tournure n’est manifestement pas employée ain de bloquer l’élision du que. En efet, la présence de cette forme entraîne toujours l’hypermétrie du vers comme le montre l’exemple suivant : quant il sceu que l’on eu fait touz ses mineurs tuer (1189) 12 Pourquoi alors faire le choix d’une graphie qui mettrait à mal l’harmonie métrique du texte ? La démonstration a été faite dans la partie phonétique de la prononciation commune dans le texte de an/en et on en [õ], trait caractéristique des dialectes du sud du Poitou 13 . Le choix de cette graphie par le scribe pourrait s’expliquer par la confusion possible des deux phonèmes dans la zone de l’Ouest. On trouve dans le manuscrit trois manières diférentes de noter la séquence conjonction que + pronom on : que on/que l’on et c’on. Ces formes apparaissent à des endroits précis du codex, ce qui pourrait permettre de déceler une progression du copiste dans la notation de cette séquence. 1. f° 1 à 11r : que on Dans la première moitié du premier cahier, jusqu’au folio 11r, que est toujours développé devant on et en. Il faut peut-être voir là un système ain de permettre au lecteur de ne pas confondre visuellement le pronom d’avec la préposition malgré leur prononciation similaire. Seulement, la distinction est toujours purement graphique et ne permet pas à un auditeur de distinguer que en de que on, qui dans la séquence parlée de l’Ouest se prononcent tous deux [kõ]. Le remarquant, certainement après une première séance de lecture à haute voix des premiers feuillets, le scribe décide alors d’utiliser un autre système ain de ne pas apporter de confusion chez son public poitevin. 2. f° 11r à 200v : que l’on Au détriment de l’unité métrique, un -l graphique est inséré entre la conjonction et le pronom pour permettre une distinction phonétique entre [kõ] et [kəlõ]. L’ajout de ce phonème permet donc aux auditeurs de l’Ouest de discriminer le pronom et la préposition lors de la récitation du texte. 12. On trouve la variante suivante dans le manuscrit P : Quant il sot c’on ot fait tous ses mineurs tuer 13. cf partie 1.
112
Morphologie dialectale Cette volonté de discrimination a sans doute prévalu sur l’harmonie métrique du texte, le scribe privilégiant ainsi la compréhension des lecteurs poitevins. Sauf que... Le système est appliqué jusqu’au vers 16504 puis la forme que l’on disparaît brutalement au proit d’une autre chaîne graphique utilisée sporadiquement jusqu’alors : c’on (agglomérée en con dans le manuscrit). 3. f° 201r à 268v : c’on Une dizaine d’occurrences de c’on se trouve dans la première moitié du manuscrit jusqu’aux environs du vers 10000 14 . A partir du folio 138r, les formes c’on et que l’on entrent en concurrence jusqu’à la disparition de cette dernière à partir du folio 201r. Seul c’on sera utilisé jusqu’au dernier vers.
Plusieurs hypothèses peuvent expliquer ce changement de système en cours de copie. 1. Changement de scribe L’hypothèse d’un changement de copiste aurait pu facilement expliquer cette multiplicité de forme. Cependant, le manuscrit ne contient aucune trace manifeste de changement de main, la graphie restant constamment la même tout au long du codex. L’intervention de plusieurs scribes semble donc à proscrire ain d’expliquer ces variations. 2. Changement de manuscrit de copie L’utilisation de plusieurs manuscrits de copie pourrait expliquer l’utilisation de systèmes mixtes. Cependant, aucun manuscrit à coloration poitevine ou utilisant la forme que l’on ne se trouve parmi les témoins connus à l’heure actuelle. Il semble alors diicile de comprendre pourquoi une partie du texte serait adaptée à la prononciation locale et pas l’autre. 3. Changement de technique de copie Un élément à prendre en compte serait le passage d’une copie réalisée sous la dictée d’un autre clerc à une copie réalisée directement avec un manuscrit en regard par le scribe. Une première partie de la copie a pu se faire sous la dictée d’un clerc poitevin, obligé de trouver une parade phonétique ain de faire comprendre au copiste comment distinguer qu’on de qu’en, prononcés tous deux [kõ] par le locuteur de l’Ouest. Après avoir 14. La séquence c’on se retrouve au vers suivants : 285, 577 , 906, 2218, 2809, 4395, 6367, 6615, 8813, 9212, 9278, 9318, 9725, 9864.
Chapitre 2 . Morphologie
113
connu des diicultés lors de la copie des premiers folios, le scribe et le récitant décident de l’introduction du l’ dans la chaîne parlée ain de coucher la bonne forme sur le papier. Par automatisme, le l’ se retrouve dans la copie, créant ainsi des vers hypermétriques. S’en apercevant, le scribe commence alors à utiliser la forme con ain de noter les [kəlõ] du récitant. A partir du folio 201, la technique étant rodée, le copiste remplace automatiquement les [kəlõ] dictés par des con à l’écrit. Ou bien, victime d’une réduction de personnel dans l’atelier 15 , le scribe doit réaliser la dernière partie de sa copie non plus grâce à la dictée d’un tiers mais directement sur le manuscrit de copie. Il n’a alors plus besoin de distinguer phonétiquement on et en puisque le codex sous ces yeux lui permet de discriminer les deux formes. La dernière hypothèse semble la plus probable. L’apparition de la locution que l’on serait alors plus un fait qui permettrait de faciliter le travail du copiste plutôt que la compréhension de potentiels auditeurs, puisqu’elle disparaît dans le dernier tiers de la copie.
Qui et que Les formes qui et que entrent parfois en concurrence autant en fonction de pronom que de conjonction de subordination. Concurrence de que/ qui pronoms Les pronoms relatifs et interrogatifs que et qui peuvent parfois permuter en fonction sujet comme objet : — Interrogative directe « Seigneurs, je ne voys mie celluy pour qui je viens en la cité garnie. » Se dist le cappitaine : « Or ne me celéz mie : que demandéz vous, pour Dieu le ilz Marie ? – Je demande, dist il, Bertrant a la chiere hardie. » 1559-1563 — Relatif sujet retorna encontre eulx que sa mort ont juree 6075 Mais de telz en y ot que ne vont pas riant 20448 15. Les coupes drastiques dans les budgets dédiés aux métiers de la culture touchaient peutêtre déjà les ateliers du bas Moyen Age.
114
Morphologie du moyen français
— Relatif objet Aujourduy sera fait ce qui fait en sera ! 6011 Bertrant du Guesclin, qui le corps Dieu cravent 10439 16 La concurrence de que au cas sujet est relevée par G. Zink comme étant un trait se manifestant particulièrement à l’Ouest 17 . Tout comme l’inversion possible des pronoms ly et le en fonction COD et COI, cette caractéristique considérée comme anglo-normande a dû s’étendre à tout le territoire de l’Ouest. La proximité entre les deux formes devient telle qu’on retrouve parfois qui en fonction conjonction de subordination : 1. car il vit, s’il perdoit la tour de Bescherel, qui trop perdre pouoit. 2769-70 2. ainsi furent longtemps qui a mal leur tourna. 6550 3. Puis sont venuz ensemble par si grande ierté qui parmy les escuz sont les deux fers passé. 10321-22 4. Et quant le roy l’oÿ, si mua son semblant qui moult bien l’apparceu le noble Bertrant 10738-39 5. Les pillars renoiéz leurs a livréz touz sus, qui touz soient menéz dessus les préz herbuz 19513-14 6. Et tant fu la Bertrant, le ilz de chastelaine, qui la mort, qui a touz est et sera prochaine, l’assailli tellement qu’il n’ot ne cuer ne vaine 21648-50
2.2 | Morphologie du moyen français : entre évolutions et archaïsmes 2.2.1
|
La déclinaison des masculins
Quelques termes portent encore une marque de déclinaison dans ce manuscrit pourtant très tardif 18 . Ce sont tous des substantifs masculins ou adjectifs accor16. C. Buridant, Grammaire nouvelle de l’ancien français, SEDES, 2007, §445. 17. G. Zink, Morphologie du français médiéval, Presses Universitaires de France - PUF, 1992, p. 102. 18. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., Chapitre 7, § 1.
Chapitre 2 . Morphologie
115
dés au masculin prenant un -s au cas sujet singulier. Cette marque de lexion peut être étymologique ou bien analogique 19 .
Substantifs Quelques substantifs masculins présentent encore un -s de déclinaison au cas sujet singulier en fonction sujet : Artuz 387 ; roys 2683, 7778, 12966 ; le bobans 4042, 4673 ; le romans 4582, 4663, 7313, 16148, 17354 ; le bers 310 [...] 21655 ; homs 325 [...] 19292 ; cinges 8001 ; sires 413, 9699, 9814, ; Bertrans 10303 ; le princes 13350 ; le messages 7041, 19626 ; le heraux 1826 On trouve également une marque de déclinaison lorsque certains substantifs masculins sont attributs du sujet : bobuz 395 ; vassau 1079 ; son confortans 4033 ; roys 4057, 9097, 15218 ; oncles 4922 ; homs 471, 6744, 7480, 7786, 13381, 15377 ; amis 12094 ; sires 10186 Une marque de lexion peut apparaître lorsque certains substantifs masculins sont employés en apostrophe : homs 5687 ; proudons 6223 ; amis 15000, 15006, 15017, 16200, 16254, 16333, 17789, 18540 ; bers 2231 ; sires 10251 ; roys 15210 Enin, certaines appositions à un groupe nominal sujet peuvent revêtir une marque de lexion : Bertrant le preux et le menbruz 404 ; Bertrant le gentilz 799, 818, 2051, 2296, 3384, 4062, 4765 [...] 21743
Adjectifs De même que pour les substantifs, le manuscrit présente parfois une marque de déclinaison au cas sujet singulier pour certains adjectifs masculins ou formes adjectivales (participes passés, formes en -ant). Le plus souvent, le -s de lexion apparaît lorsque l’adjectif est en position d’attribut du sujet : 19. Les relevés présentés dans cette partie ne comportent que quelques exemples probants et ne prétendent pas à l’exhaustivité.
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Morphologie du moyen français irascus 384 ; gentilz 1525 ; soubtilz 2374, 3711 ; seignoriz 3709 ; postiz 6221 ; vifz 6223 ; sourprins 6230 ; avanturans 4035 ; iers 4063 ; grans 4576 ; portans 4578 ; conscentans 7309 ; cuidans 8181 ; contens 8185 ; engrans 8190 ; conquerans 8191 ; oublians 8193 ; habitans 10632 ; parcevans 10633 ; demourans 10634 ; passans 14509
L’adjectif peut porter une marque de lexion lorsqu’il est épithète d’un substantif masculin sujet singulier alors que ce dernier ne montre parfois aucun signe de déclinaison : le fors roy 18363 ; le fors duc poestiz 3502 ; homme vivans 4038 ; un chevalier sachans 8192 ; il est roy tenans 14510 ; le prince seignoris 10186 ; grans mercy 14842 ; gentilz 310 [...] 21723 ; sages homs 6744 Les adjectifs peuvent parfois revêtir la marque du cas sujet singulier lorsqu’ils sont employés en tant qu’épithètes d’une apostrophe : gentilz hayraut 1587, 4339 ; gentilz homs 5687 ; gentilz et noble roys 15210
2.2.2
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Les adjectifs épicènes
Un certain nombre d’adjectifs épicènes est conservé dans le manuscrit. Ils se retrouvent parfois en concurrence avec la forme féminine comportant un -e, fait fréquent dans la langue de cette époque 20 : grant : 4886, 13032, 13703, 17620, 17662, 19036, 20547, 20886 ; fort : 4995, 5032, 14399, 18176 ;loial : 5689, 6999 / loiale 7684 ; pleins 7575 ; souisant 9459 ; vaillant 9477, 15336 ; mortel 10587 ; bruiant 13267 ; trenchant 16419 ; puissant 17326, 18990, 2029, 21394 ; pesant 17862 ; combatant 18973 ; bouillant 19305 ; royal 19454 ; plaisant 20284 ; poignant 21343 ; tel 6472, 6490, 18673, 18718, 18822, 19147, 20134, 20521, 20764, 21553, 21610.
2.2.3
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L’article déini
20. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., Chapitre 7, § 2.
Chapitre 2 . Morphologie
117
De li à le/les La forme li antérieurement article masculin au cas sujet a totalement disparu dans le manuscrit aixois, sauf l’occurrence du vers 8180 : li auquans. La conservation de l’article archaïque au cas sujet pluriel émane certainement du fait que le groupe nominal était ressenti comme une locution. Le groupe est employé ailleurs avec l’article les (7305, 7390). Le passage de li à le au masculin singulier laisse plusieurs traces dans le manuscrit. En efet, l’article le peut se trouver sous une forme non élidée lorsqu’il accompagne un substantif commençant par une voyelle : le enfant 75, 326 ; le Arragonnoys 12649, 12682 ; le aguet 14870. L’élision nouvelle de l’article devant un substantif débutant par une voyelle entraîne automatiquement l’hypométrie du vers, celui-ci se trouvant amputé d’une syllabe. Comparons une occurrence de ce phénomène dans le manuscrit A avec les variantes des témoins P et Nh : — Et dist l’escuier a la chiere membree (A, vers 429) — Et dist li escuiers a la chiere membree (P, 3v c) — Et dist li escuier a la chiere membree (Nh, 4v c). L’élision retire une syllabe au vers 429 alors que celui-ci est régulier dans les autres témoins. Ce phénomène se trouve à de nombreuses reprises dans la copie aixoise de la chanson. La volonté du scribe de ne plus employer ces formes anciennes semble prévaloir sur la métrique du texte. Cependant, la présence d’articles non élidés dans la copie aixoise jette tout de même un doute quant à la disparition d’une syllabe dans la prononciation. Les articles élidés sont toujours attachés aux substantifs qu’ils accompagnent dans la scripta (par exemple lescuier au vers 429). Faudrait-il alors y voir des formes à développer ? Rien dans le manuscrit, sauf les rares exemples de maintien, ne permet de trancher en faveur de cette option. En revanche, les nombreux écarts métriques du manuscrit dus à la modernisation d’un état de langue plus ancien font plutôt pencher la balance vers une élision, sans que le doute puisse être tout à fait levé.
Les/lé et des/dé Les formes plurielles de l’article déini et indéini se trouvent parfois sans -s inal, conséquence de la chute de la silante en position inale :
118
Morphologie du moyen français
lé lé ostéz 320 ; lé Espaignols 8580 ; lé .vc . 14858 ; lé vignes 18404 ; lé ber Bourgoignon 20774 ; lé capitaine 21011 dé dé chevaliers de pris 2095 ; dé plus vaillans de touz 8531 Ces articles sont marqués dans l’édition par un accent aigu ain d’éviter toute confusion avec les formes le et de.
2.2.4
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Les possessifs
Moie, soue, soie A côté des formes plus modernes, le texte présente encore au féminin quelques occurrences de formes anciennes : Moie
Et je de moye part nous nous y assenton 20159
Soue
Icellui oncle avoit la soue ante epousee 263 qu’il veille avoir pitié de la soue maisnie 12386 dont chascun retournoit en la soue baillie 14222 ;
Soie
Lors jura Damedieu en la soie partie 17763 que voir ira Englois et la soie maisnie 17764.
On trouve un cas d’emploi de forme atone plutôt que tonique : le ton vers 16048.
Mon, son et les formes élidées au féminin Devant un substantif féminin à initiale vocalique, le texte oscille entre formes élidées et formes analogiques du masculin : formes élidées m’amie 17501, 21661 ; m’entente 16821 ; s’amour 70, (s’amort) 6652, 9791 ; s’amie 8563, 11504 ; s’amitié 9282 ; s’ame 15689 s’onnour 14010, 17025 formes pleines mon, son : mon argent 2833 ; son armee 5029, 5303 ; son ame 6673 ; son abusion 6836 ; son afaire 11092 On remarque que les formes élidées sont des formules igées utilisées souvent en poésie au XVe siècle ain d’obtenir un nombre de syllabes juste dans un vers 21 . Toutefois, le double emploi du substantif ame, autant avec son qu’avec une forme élidée, est le témoin d’un système qui s’étiole au moment de la rédaction de la copie aixoise. 21. Ibid., Chapitre 10, §2.
Chapitre 2 . Morphologie
119
P4 et P5 Nostre/Vostre Les formes nostre et vostre sont les plus courantes dans le manuscrit pour marquer la possession à P4 et P5 : Nostre nostre sire 2, nostre ost 1401 [...] nostre roy 21733 Vostre vostre ilz 114, vostre aÿe 990 [...] vostre honneur 21709 Noz/Voz Les formes noz et voz se rencontrent au pluriel : Voz/vos voz bons joiaux 790 ; vos gens 21295 Noz/nos : et mectons sur noz couls 875 ; Dedens Chastelairaut sont nos François entrer 19028
2.2.5
|
Masculin Féminin
Les démonstratifs Morphologie des démonstratifs du manuscrit A Singulier Pluriel devant consonne et voyelle : cellui / icellui / ce / cestui ces devant voyelle : cest/cel ceulx cest / ceste / celle / icelle ces/cestes celles / iceulx
Le manuscrit aixois présente un état de langue où l’opposition de cas pour les démonstratifs est révolue. Le relevé suivant montre bien que les diférentes formes peuvent être employées aussi bien dans un groupe sujet que dans un groupe régime. La disparition au masculin des formes anciennes cist et cil remplacées systématiquement par cellui entraîne une simpliication du système. L’opposition cas sujet/cas régime disparue, une autre semble se mettre en place. L’emploi des formes démonstratives est motivé au masculin par l’initiale des substantifs qu’elles accompagnent. Cellui et ce sont utilisés avant un substantif à initiale consonantique, cest et cel devant des substantifs à initiale vocalique. Il en va de même pour le féminin. Ce nouveau stade dans l’évolution des démonstratifs entraîne alors des modiications dans la métrique du texte. Là où les anciens témoins présentent des formes monosyllabiques au masculin singulier, le remplacement de celles-ci par
120
Morphologie du moyen français
cellui ajoute automatiquement une syllabe au vers. Comparons par exemple un vers du manuscrit aixois avec son homologue dans P : — et cellui bon escuier de Bertaigne la lee (A, v. 411) — et cil bon escuier de Bretaigne la lee (P, f° 3v c) Le changement conduit à une hypermétrie. La mise à mal de l’harmonie métrique par le scribe est visiblement volontaire et permet d’aboutir à la conclusion suivante : l’ancien système n’est visiblement plus compris par les destinataires du manuscrit. Le scribe, lui, le maîtrise encore puisqu’il remplace à chaque fois les bonnes formes au bon endroit mais il considère certainement que cil ou cist ne sont plus intelligibles pour ses lecteurs. Cette démarche est un des indices de la volonté de modernisation du texte ancien par le scribe.
Emploi des démonstratifs Masculin Ce — Sujet Et tant fu ce Bertrand par Fortune monté (36) ce deable Bertrant en la in en mourra (16342) — Régime tout ce qu’elle en dit et qu’elle en proposa advint depuis ce dy et depuis ce fait la (109-110) Se en ce point revenéz encores un autre ie (206) Ce chastel garderons, asséz vivres y a(16343) Cellui — Sujet cellui connoistable fu Bertrant appellé (26) que cellui faulx chastellain, ou tant a de tricherie, soit mort de male mort a grande villennie (3222-3223) Cellui roy Pietres d’Espaigne qui moult folement regna, avoit une moiller telle que l’on vous dira. (6530-6531) Cellui deable revient qui touz nous honnira (15464) — Régime Bertrant leva la hache a cellui approchement (716) pour occir et tuer cellui angloys chevalier (729) Mains hommes en cellui jour s’alerent aventurant (20283) Cel — Sujet Moult fu fort cel estour (15956)
Chapitre 2 . Morphologie
121
— Régime Ainsi it le faulcon cel aigle a mort livrer (5569) Cest — Sujet Cest archier ot nom, sans point de mansonger, Alain de Guigneux (18749-50) Cest aigle cy nous donne un malvait cop mortel (19588) — Régime se le duc breton qui nous doit justicier cognoissoit cest enfant (353-54) Féminin Cest/Ceste — Sujet Et pourtant ceste dame la paix moult desira (556) Par devant le chastel cest ost demouroit. (2762) Cest oufre cy endroit lui fauldra envoier (5456) — Régime Ceste matiere si vous voys ramentevant (587) qui a tenir jurront ceste divisïon (20158) Celle — Sujet en Bertaigne estoit celle perdicion (2601) au chastel furent celle gent choisie (5727) de toyle vestue estoit celle gent iere (21179) — Régime Quant Bertrant revenoit de celle compaignie (198) En celle ville sont noz Françoys descenduz (19727)
Ce Le déterminant ce est la forme la plus fréquente devant un substantif masculin singulier complément avec pour première lettre une consonne, fait courant en moyen français 22 : ce Bertrant 36, ce Jaconnelle 21432 22. ibid., Chapitre 9, § 1.1.
122
Morphologie du moyen français
De cist/cil à cellui Les formes sujet archaïques au masculin singulier cist et cil présentes dans les manuscrits plus anciens sont systématiquement remplacées par la forme cellui : — Seigneurs, cellui connoistable fu Bertrant appellé (A, v. 26) — Seigneurs, cilz connestables fu Bertrant appeléz (P, f° 1r a) — Seigneurs, cilz connestables fu Bertrant appellés (Nh f° 1r a) Le passage de cist/cil à cellui entraîne un déséquilibre de l’alexandrin et de nombreux vers à l’origine réguliers deviennent hypermétriques dans le codex aixois. Il en est de même pour les formes sujet renforcées icist et icil : A icellui temps avoit par devers Normendie (v. 3435)
Cest, ceste, cestui La forme cest est employée devant des substantifs masculins comme féminins commençant par une voyelle, sauf cas rares : Masc cest enfant 137, 355 ; cest estat 2686 ; cest assault 3507 ; cest yver 5113 ; cest adjornement 11247 ; cest archier 18749 ; cest aigle 19588 ; cest an 19598, 19683 ; cest anuytement 20721 Fem. cest ost 2762, 15495, 15564, 15652 ; cest oufre 5456 ; cest honneur 17491 23 , 21687 Devant voyelle cest mortel vie 16911 La forme ceste est employée indiféremment devant des substantifs féminins comportant une voyelle ou une consonne initiale : Cons. ceste mansion 87, ceste gent 20910 Voy. ceste ayve 4367 ; ceste achoison 2418, 12609 ; ceste adventure 21491, 21539 ; ceste espee 17483, 21725 ; ceste oice 17497 Le démonstratif cestui accompagne ponctuellement des substantifs masculins : cestui parlement 152, 14338 ; cestui fait 1692 ; cestui conseil 5085 ; cestui arbalestrier 5654 ; cestui prince 9875 ; cestui pourpris 10196 ; cestui joiel 10576 ; cestui chassement 12222, 17695 ; cestui chevalier 15385 ; cestui temps 16445 ; cestui convenant 21332. 23. Honneur est ici obligatoirement ressenti par le copiste comme féminin puisqu’il entraîne la présence du participe passé féminin picard envoye.
Chapitre 2 . Morphologie
123
Cel, celle Le déterminant cel est employé devant des substantifs masculins commençant par une voyelle : cel aventureux 498 ; cel aigle 5569, 19596 ; cel avoir 7597 ; cel art 9072 ; cel enfant 10615 ; cel adjornement 11457 ; cel (primer) empainte 15508 ; cel estour 15956, 19657 ; cel jour 15750 ; cel assault 18683 ; cel heuvre 19272 ; cel estat 20152 La forme renforcée n’apparaît qu’une seule fois dans l’exemple suivant : icel jor 11617 La forme celle accompagne indiféremment des substantifs féminins avec voyelle ou consonne initiale : Cons. celle compagnie 198, celle tour 21527 Voy. celle establisson 1182 ; celle heure 3606, 4387, 4544, 9338, 13882, 19446 ; celle eglise 3803, 6406 ; celle assemblee 4094, 4793, 5302, 19489 ; celle jornee 4223, 4821, 4827, 5305, 5315, 14644, 17594, 20495 ; celle annee 5042, 10087, 15569 ; celle envaïe 5395 ; celle juisve 6949 ; celle escole 9069 ; celle eaue 11858 ; celle abaïe 17114 Il en va de même pour la forme renforcée icelle, présente plus de soixante fois dans le texte : Cons. icelle parole 1553, icelle saison 21611 Voy. icelle jornee 1480, 10077, 10961, 12597, 13896, 17613 ; icelle envaÿe 6106, 11478 ; icelle juisve 6949 ; icelle assemblee 9447 ; icelle heure 13643 ; icelle armee 14309 ; icelle esperance 15458 ; icelle abbaïe 19538
Ces La forme démonstrative ces est nettement majoritaire dans le texte pour marquer le pluriel de substantifs féminins ou masculins avec voyelle ou consonne à l’initiale : Masc. ces chevaliers 368, ces bacinés 21319, ces escuz 5895 Fem. ces dames 331, ces banieres 20094, ces armes 15804.
Ceulx/celz/celles/cestes En parallèle à l’utilisation de la forme ces, des formes plus archaïques continuent d’être employées dans le manuscrit A.
124
Le système verbal du manuscrit A
Ceulx Ceulx est parfois utilisé comme démonstratif d’un substantif masculin pluriel sujet : ceulx .iii. 699 ; ceulx Pictars 3662 ; ceulx Engloys 4300 ; ceulx chevaliers 10567 ; ceulx pelerins 12920 ; ceulx Bretons 19381 ; ceulx bacinetz 21167 La forme renforcée est également utilisée comme déterminant : iceulx bassins 1778. Celz L’unique occurrence de celz se trouve au vers 18499 : celz François.
2.2.6
|
Particularités morphologiques des pronoms sujets
Le texte suit généralement les règles d’emploi des pronoms en moyen français. On trouve tout de même la trace de quelques cas d’usage de formes anciennes.
Il Le pronom il est parfois réduit à i lorsqu’il est précédé de que 24 : puis ce di qu’i nasqui 20626 ; si aloit mandant qu’i iroit a Paris 20878 ; qu’i le it chevalier 2080.
Ecrasement Quelques cas d’écrasements dus au pronom personnel on sont à relever : demand’on 870 ; apport’on 12413 ; appell’on 15014, 18528, 20329 ; gab’on 15018 ; nomm’on 17096 ; baill’on 18361.
2.3 | Le système verbal du manuscrit A 2.3.1
|
Inluences poitevines
Certains phénomènes phonétiques dialectaux vus en première partie inluent sur la morphologie verbale du texte. 24. Buridant, Grammaire nouvelle de l’ancien français, op. cit., § 335.
Chapitre 2 . Morphologie
125
Inluence du [w] après labiale La présence du digramme oi dans les formes du présent de l’indicatif est due au développement en poitevin d’un [w] après une consonne labiale 25 . Les formes suivantes sont concernées : — Aller P1 voys/vois 9499 [...] 20292 ; P3 : voit/vait 16233, 18534, 21676 — Faire P1 foys/foys/foy 538 [...] 20482 On trouve également pour le verbe aller des formes du subjonctif en voi, décrites par C. Buridant comme des formes du Nord et du Centre 26 . Elles ont peut-être été utilisées dans la zone poitevine sous l’inluence d’un radical du présent de l’indicatif en voi.
Disparition du e après radical consonantique En moyen français, on constate l’apparition d’un e entre un radical terminé par d, t, p, ou v et le morphème r du futur de l’indicatif (ex : prenderay). L’usage de ce e est systématique dans les manuscrits les plus anciens de la chanson. Cette lettre n’est pas juste svarabhaktique mais compte toujours dans la prononciation. Or, ce e disparaît totalement dans le manuscrit A, conduisant ainsi à une hypométrie des vers concernés. Prenons pour exemple un même vers dans deux témoins diférents : — ains les atendrons a pié et sans cheval (A, 4253) — ains les attenderons a pié et sans cheval (P, f° 27v d) L’absence du e après le radical du verbe attendre dans le manuscrit A entraîne une hypométrie, le vers se réduisant à onze syllabes. La première hypothèse consisterait à déduire de la disparition de cette lettre son absence de prononciation dans l’aire géographique de copie du manuscrit, au mépris de la métrique. Cependant, un phénomène dialectal poitevin permet d’expliquer cette absence. On constate dans cette aire géographique l’apparition d’un [œ] entre consonne et r 27 . L’absence de voyelle graphique entre consonne et r n’est pas 25. Voir la partie phonétique correspondante. 26. Buridant, Grammaire nouvelle de l’ancien français, op. cit., p. 281, § 227. 27. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 494-498.
126
Le système verbal du manuscrit A
synonyme de non prononciation mais au contraire de l’insertion permanente de [œ] avant r. De plus, ce fait est attesté par un vers rédigé en in de manuscrit de la main du copiste de A. Le mois de février est évoqué pour dater la copie sous la forme fevrer vers 21767. Pour retrouver un alexandrin, il est nécessaire de prononcer [fẹvœrẹ] et non [fẹvrẹ]. Les futurs sans e graphique entre consonne et r comportent donc bien une syllabe de plus qui permet de conserver l’harmonie métrique du texte.
Radicaux de boire au futur La diphtongaison conditionnée de [ŏ] par yod et le développement d’un [w] après une consonne labiale vient expliquer les diférentes graphies des radicaux de boire au futur 28 : — boyray 2233 — boyrons 12800 — beray 19503 — berons 4465, 17092 — buyrons 4133
Out pour avoir au passé simple La forme out au passé simple correspond à une variante du verbe considérée comme anglo-normande 29 . Une fois de plus, il semble que les paradigmes de la zone anglo-normande se retrouvent dans la zone poitevine.
Désinence de P4 : on(s) Plusieurs verbes conjugués dans le texte à la quatrième personne ne présentent pas de s inal mais simplement le digramme on : laisses : 428, 475, 540, 570, 575, 606, 683 [...] Ce fait est caractéristique des textes de l’Ouest selon C. Marchello-Nizia 30 . Leur présence systématique à la rime empêche cependant d’y voir là un trait de copiste. En efet, cette caractéristique est également présente dans les autres témoins 28. Pour un développement complet de ces problématiques, nous invitons notre lecteur à se référer aux paragraphes concernés dans la partie « Phonétique ». 29. Buridant, Grammaire nouvelle de l’ancien français, op. cit., p 280, § 227. 30. Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., Chapitre §.
Chapitre 2 . Morphologie
127
connus à ce jour. Elle n’est donc pas la conséquence d’un scribe poitevin mais certainement plus d’une volonté d’harmoniser les syllabes inales des vers et créer une homogénéité visuelle pour chaque laisse.
2.3.2
|
Radicaux palatalisés
Les verbes tenir et venir présentent encore dans le texte des radicaux palatalisés au subjonctif : — tiegne 13609 — viegne 17854, 20178 — viegnent 10873, 17680
2.3.3
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Evolution des désinences
Présent de l’indicatif : P1 Le présent de l’indicatif est marqué dans le texte par plusieurs évolutions propres au moyen français. Verbes du 1er groupe -e analogique On voit apparaître un -e à la premiere personne des verbes du premier groupe : après consonne commande 17546 après voyelle prie 1268 [...] 17765 Toutefois, les formes sans -e restent majoritaires : après consonne commant 884 [...] 21661 après voyelle pri 423 [...] 21728 -s analogique Un -s analogique de P2 peut apparaître à la premiere personne des verbes du premier groupe : commans 1824, 6864. Verbes des autres groupes
128
Le système verbal du manuscrit A
-s analogique • Après consonne Les verbes ayant un radical consonantique présentent à la première personne du présent de l’indicatif un -s de désinence analogique de P2 : — atens 7886 — prens 3060, 3211, 5015, 14381, 17105, 19804 — pers 5626, 7090, 10528, 16138, — rens 1428, 2180, 2445, 10584, 12049, 16431 — scens 396, 13679 — viens 1559 [...] 20066 / vien 7211, 11043 • Après voyelle Pour les verbes ayant un radical vocalique, la tendance est tout autre. A la première personne, on trouve encore majoritairement des formes sans -s, sauf pour les verbes voir, faire et estre : Formes sans -s — croy 19 [...] 19778 / croys 12106, 14142 — di/dy 54 [...] 21747 / dis/dys 18896, 19534 — doy 371 [...] 21061 / doys 1474 [...] 21635 — sçay 149 [...] 21436 Estre, faire, voir — foys 1808 [...] 17227 / foy 11443 — suis 336 [...] 21702 / sui 8274, — voys 362 [] 21197 / voy 137, 141, 2278, 11312, 11944, 12236, 16439 Ce -s analogique à P1 peut parfois devenir un -x sous la plume du scribe 31 : Voir P1 : voix 11314 Toute l’instabilité de l’usage de ce s dans le texte peut être résumée par les formes verbales utilisées dans le vers suivant : Sire, dist il, je croy et aparçoys clerement 5912
2.3.4
|
Désinences et chute des consonnes inales
La chute de la prononciation des consonnes inales amorcée au XIIIe siècle peut provoquer dans le texte un efacement graphique des désinences verbales des deuxième et troisième personnes. Par analogie avec les paradigmes faibles 32 , la désinence -t à P3 des passés simples forts a tendance à disparaître : 31. Ce phénomène est étudié dans la partie « graphies » de l’introduction. 32. Ce phénomène d’analogie inverse est relevé par C. Marchello-Nizia, Marchello-Nizia, La langue française aux XIVe et XVe siècles, op. cit., Chapitre 17, § 1.10.
Chapitre 2 . Morphologie P2
129
— va 3034
P3 — sceu 230 [...] 21741 / sceut 259, 1179, 2952, 5681, 7062, 7820, 11111 — receu 4753 [...] 21657 / receut 9117 — eu 154 [...] 18924 — peu 741 [...] 18343 / peut 246 — volu 593 [...] 21575
2.3.5
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Passé simple : renouvellement de formes anciennes
Passés forts en o/eu Le texte présente des formes anciennes et nouvelles pour les passés simples des verbes avoir, pouvoir et vouloir à P3 : — ot 66 [...] 21555 / eu 154 [...] 18924 — pot 9400, 18089, 18294, 18341, 18498 / peu 741 [...] 18343 — volt 14584, 16072 / volu 593 [...] 21575 La forme ot reste encore majoritaire pour avoir. Les deux possibilités semblent être employées sans distinction par le scribe, comme le montre le vers suivant : que en lui ot talent et le cuer moult eu grant 5758 Alors que volt est l’unique forme employée par les manuscrits plus anciens, elle disparaît presque complètement sous la plume du scribe poitevin et devient systématiquement volu. L’utilisation de cette dernière entraîne des problèmes métriques, puisqu’elle comporte une syllabe de plus que volt. Comparons les vers suivants dans les manuscrits A et P : — La volu a l’escuier la teste jus trenchier (A, vers 739) — La voult a l’escuier la teste jus trenchier (P, f° 5v c) Le vers 739 devient hypermétrique dans le manuscrit A alors qu’il comporte bien douze syllabes dans P. Le choix du copiste du manuscrit A peut être motivé par le fait que la forme ancienne n’est plus comprise dans l’aire géographique et à l’époque de la copie.
Réfection des paradigmes Aimer Le texte présente des traces d’un début de réfection des radicaux du verbe aimer sur les formes faibles au présent de l’indicatif :
130
Le système verbal du manuscrit A P3 : ame 7771,8124, 20466 / aime 2047, 15518.
2.3.6
|
Futur de l’indicatif
d entre consonne nasale et désinence En moyen français, un -d d’épenthèse entre un radical terminé par une consonne nasale et la désinence est systématiquement employée au futur 33 . Pourtant, le texte présente des formes avec et sans d, preuve d’une certaine volonté archaïsante : Tenir — P1 tiendray 1955, 4901, 9841, 10542, 10647, 11334, 16029 tenray 14142 — P2 tiendra 1970 [...] 16315 tenra 8573 — P6 tenrons 21331 Venir — P3 viendra 131 [...] 20450 vendra 1519, 12265 venra 6565, 15460 — P6 viendront 881 [...] 20936 venront 11575
Réduction à r du l du radical Au futur, la liquide l du radical du verbe vouloir peut se réduire à r : — P3 : vorra 7193 — P6 : vorront 20967
Substitution des radicaux On trouve encore une concurrence entre les radicaux 1 et 2 des verbes tenir et venir au futur : 33. Ibid., Chapitre 17, § 2.2.
Chapitre 2 . Morphologie
131
Tenir — tiendray 1955, 4901, 9841, 10542, 10647, 11334, 16029 ; tiendra 1970 [...] 16315 — tenray 14142 ; tenra 8573 Venir — viendra 131 [...] 20450 ; viendréz 1551, 2160, 3892, 5577, 7320, 7335, 7582 ; viendront 881 [...] 20936 — vendra 1519, 12265 ; venra 6565, 15460 ; vendréz 11293, 12100 ; venront 11575
Laier Le verbe défectif laier est encore employé dans le texte au futur de l’indicatif avec un radical [lẹ] graphié le ou lai : — P1 : lerray 5755 [...] 21668 / lairray 19541 — P3 : lerra 1670, 4336, 8922, 9674, 12861, 18227, 18405, 19983 / lairra 17156 / laira 17678 — P4 : lerrons 8648, 21212 /lairons 15653, 15657 — P5 : lerréz 1476, 5551, 8601 / lairréz 16565 — P6 : lerront 4522, 8944, 11787 / lairront 16934, 17119, 19655
Insertion d’un e entre r et nasale On observe parfois pour les verbes du premier groupe dont le radical se termine par une consonne nasale un e inséré entre les radicaux et le r morphème de temps, par analogie avec les autres verbes en -er : Donner — P1 donray 1640, 4529, 7155, 8935, 12061, 12504, 16317, 16995, 17549, 18822 / donrray 868, 915, 916, 2918, 3243, 7011 / donneray 517, 1169, 3847, 8128 — P3 donra 1534, 12860, 13425, 13782, 16830, 19139, 20358, 21293 / donrra 805, 865, 6018, 9222, 13975 / donnera 11507, 13367 — P4 donrons 12366 / donnerons 5725 Mener — P1 menray 5918 / meneray 4209, 7035 — P3 menra 8468, 12981, 16304, 16470, 19141 / menera 19145, 20745 — P4 menerons 1386 Ce -e semble toutefois muet et n’est pas pris en compte dans la métrique, comme le montrent les vers suivants : 1. Je vous donneray chevaux du tout a vostre baillie 517
132
Le système verbal du manuscrit A 2. Véz cy Pietres le roy qui vous donnera asséz 11507 3. nous leurs donnerons beaux dons a touz les plus petiz 5725 4. je meneray de mes gens dela ce derubent 4209.
Avoir et savoir : changement de radical Le scibe utilise les radicaux en a autant qu’en au pour le futur des verbes avoir et savoir : Avoir — P1 aray 4189, 5754, 7335, 8413, 11329, 13500, 21206 / auray 129 [...] 19746 — P3 ara 6961, 6976, 8349, 8409, 9914, 12534, 13819 / aura 279 [...] 21698 — P4 arons 2874 [...] 20418 / aurons 1246 [...] 21191 — P5 aréz 2875 [...] 13740 / auréz 1319 [...] 21279 — P6 aront 7531, 18563, 19235 / auront 1209 [...] 21370 Savoir — P1 saray 469, 1257, 7107, 8033, 9859, 12059, 12816 / sauray 3353, 15007 — P3 sara 4248, 10194, 12295, 14416, 17831 / saura 635 [...] 21208 — P4 sarons 2262, 10278, 15484 / saurons 2561 — P5 saréz 14444 / sauréz 464, 7458, 12813, 13068, 14805, 15452 — P6 saront 5634, 9618 sauront 5633, 21049 Les formes en au tendent cependant à être majoritaires, comme le veut l’évolution de ces radicaux à la in du Moyen Age.
Chapitre 2 . Morphologie
2.3.7
|
133
Tableaux des formes verbales
Les tableaux suivants ont été réalisés d’après un relevé des verbes les plus employés dans le texte ou ceux qui présentaient des formes particulières. Nous présentons dans ces tableaux toutes les occurrences possibles pour chaque verbe relevé, classées par mode, temps et personne et en indiquant les vers correspondants à chaque forme. Les verbes sont classés par odre alphabétique. ALER inf
p1
ind prés p2 p3 ind p s
p3 p1 p3
subj prés p4 p5 p6
AMER inf
ind prés
p1 p3
aler voys/vois
189 [...] 21141 9499, 9722, 11187, 12550, 12552, 12554, 13705, 13951, 13967, 16366, 16401, 18316, 19001, 20156, 20292 vous 17269 va 3034 voit 21676 vait 16233, 18534 alast 18193 (DMF=TL ?) voyse/voise 11615, 13952, 14130, 14719, 16227, 17310, 19252, 19253, 19254, 21458, 21694 voyse/voise 17654, 18209, 18862, 19083, 20163 voye 876, 9613 aille 887, 1908, 2255, 3291, 4309, 4498, 5516, 5791, 6277, 6920, 8932, 9100, 9639, 10128, 12572, 18180, 18181 aillons 5081 ailléz 9746, 16185, 16663 voisent/voysent 7867, 9614, 13953, 17829, 19082 aillent 5769
amer ame ame aime
7006 [...] 20562 5076, 10442, 14086, 15923 7771,8124, 20466 2047, 15518
134
Le système verbal du manuscrit A
AMER
ind p. s. AVOIR inf
p4 p5 p6 p3 p6
amons améz ament ama amerent
20436 6761, 11315, 17692 5781 530 [...] 20536 18156, 21482
p1
avoir aray
p3
auray ara
eurent
89 [...] 21961 4189, 5754, 7335, 8413, 11329, 13500, 21206 129 [...] 19746 6961, 6976, 8349, 8409, 9914, 12534, 13819 279 [...] 21698 2874 [...] 20418 1246 [...] 21191 2875 [...] 13740 1319 [...] 21279 7531, 18563, 19235 1209 [...] 21370 17183, 17798 66 [...] 21818 154 [...] 18924 9297, 10157 (?), 19700, 20240, 20749, 20762 140 [...] 21691
bailler baildra baildrons
1540 [...] 19186 2956, 2960, 19890 5695
boyre boyres
181 [...] 21194 2232
ind fut
p4 p5 p6 p3 ind p s
BAILLER inf ind fut BOYRE inf
p6
p3 p5
aura arons aurons aréz auréz aront auront out ot eu orent
Chapitre 2 . Morphologie BOYRE part prés
135
boyvent boyray beray berons buyrons boyrons bevoit bevoient beust
12485, 21091 2233 19503 4465, 17092 4133 12800 1014 4490, 7128 6549
p1
chanter champ chant
920, 1724, 7453, 8857 8690, 10296 68 [...] 21402
p3
cheoir cheÿ cheu
160, 2505, 3607, 8996 2481, 19061, 19062, 19112, 20719 4003, 10561
commander commant/ent commans
224 [...] 21189 884 [...] 21661 1824, 6864
CROUPIR* ind prés p3
croust
16460
DESPLAIRE ind p s p3
desplaisy
20639
doys
371 [...] 21061
ind fut
ind imp ind p s CHANTER inf ind prés CHEOIR inf ind p s
p1 p5 p3 p6 p3
COMMANDER inf p1 ind prés
DEVOIR* ind prés
p1
136
Le système verbal du manuscrit A
DEVOIR* p1 p3
doy deu deu
1474 [...] 21635 10811 1349, 2394, 16956
p1 p1 p6
dire dy/di dis/dys distrent
589 [...] 21636 54 [...] 21747 10256, 10812, 18896 (?), 19535 (?) 3994 [...] 21553
p1
donner donray
p3
donrray donneray donra donrra donnera donrons donnerons donront doint
4 [...] 20577 1640, 4529, 7155, 8935, 12061, 12504, 16317, 16995, 17549, 18822 868, 915, 916, 2918, 3243, 7011 517, 1169, 3847, 8128 1534, 12860, 13425, 13782, 16830, 19139, 20358, 21293 805, 865, 6018, 9222, 13975 11507, 13367 12366 5725 13783 193, 788 [...] 21761
ENJOINDRE* part p
enjoinct
19282, 20381
ENTRER inf
entrer
1017 [...] 21077 (DMF= Chr. Langstrof) 985 [...] 21473 128 (DMF=Fouché/ Tanquerey) 873
ind p s DIRE inf ind prés ind p s DONNER inf
ind fut
p5 subj prés
ind p s ind fut
p6 p3
p6 p3 p5
enterent enterra enterrons
Chapitre 2 . Morphologie ESLIRE inf part p
eslire eslis
9025, 20584 20117
esmaier esmaie
919 [...] 17031 19440
espoir
12907
faillir fauldray fauldra fauldrons fauldront faillistres
3988 1675 [...] 15218 1536 [...] 18695 7275, 14441 5401 17709
p1 p6
faire foys foyz foy feïsse feïssent
183 [...] 21710 538 [...] 20482 8773 11443, 11538 12362, 13321 18046
FALLOIR* subj imp p3
faussist
15975
FERIR inf ind prés
ferir ferrent
1422 [...] 21121 16118
ESMAIER inf ind prés
p3
ESPERER* ind prés p1 FAILLIR inf ind fut subj prés FAIRE inf ind prés subj prés
p1 p3 p4 p6 p4
p1
p6
137
138
Le système verbal du manuscrit A
FERIR ind fut subj prés
p3 p3
ferra iere
121 17313
FESTIER inf ind fut
p3
festier festira
12948, 18851 14353
part p
fouhir fouïr/fouÿr fuÿr/fuïr fyois
4495 15975, 16376, 18012, 18127, 21386 15102, 15667, 15736, 15755 19025
GESIR inf ind p s
gesir geu
3995, 4697, 13430, 14997, 20991 16041
haïr hé het ait hayst heent
3151, 10109, 12269 7026, 10444, 10928 7030, 16290,20465 11957 4946 9698
hontea hontoya
6012 6619
issir/yssir cy
1903 [...] 17205 12248
FUIR inf
HAIR inf ind prés
p3
p1 p3 p6
HONTEER* ind p s ISSIR inf ind p s ?
p3
p3
Chapitre 2 . Morphologie ISSIR ind fut
p3 p4
istra istrons
14353 19831
139
140
Le système verbal du manuscrit A
LAIER* ind fut
p1 p3
p4 p5 p6
LOUER
lerray lairray lerra lairra laira lairons lerrons lerréz lairréz lerront lairront
louer
loher lo lou
3972, 9741, 12367, 12713, 12720, 14782 1835, 1846, 2793, 2797, 3775, 6359, 7142, 8486, 9731, 12373, 15057, 15059, 16990, 20591 1833, 2397, 5541, 6378, 8015, 8962, 9104, 10143, 10807, 11815, 15099, 18671, 19272 12326, 13519 19684, 19995 19957, 20692
mectre mistrent
1381 [...] 20727 2111 [...] 20341
mener maine mene mainent
673 [...] 21079 13703, 14862, 16271, 16451, 20054 19575 18507
louher inf
ind prés MECTRE inf ind p s MENER inf ind prés
loer
p1
p6
p3 p6
5755 [...] 21668 19541 1670, 4336, 8922, 9674, 12861, 18227, 18405, 19983 17156 17678 15653, 15657 8648, 21212 1476, 5551, 8601 16565 4522, 8944, 11787 16934, 17119, 19655
Chapitre 2 . Morphologie MENER
menent menray meneray menra menera menerons menréz
2706, 5748, 9965, 19207 5918 4209, 7035 8468, 12981, 16304, 16470, 19141 19145, 20745 1386 11437
morir
p3
mur* murs* murt
1135, 1262, 4203, 5261, 5445, 5491, 6226, 6872, 7015, 8545, 8718, 8791, 10261, 11271, 11715, 13831, 15032, 15791, 15894, 16174, 16439, 17347, 20140, 21682 2772, 3807, 3998, 4816, 5016, 6842, 6869, 7094, 7683, 7729, 7741, 8032, 9694, 10111, 10240, 10248, 10530, 10722, 11031, 11268, 11272, 11713, 11893, 12181, 13453, 13879, 16289, 16432 689 12552 20152
p3
pluver pluoit
18709, 18713 17862
poursceu poursceurent
16022 17341
p1 ind fut
p3 p4 p5
MORIR/MOURIR
inf
mourir
ind prés
PLUVER inf ind imp
141
p1
POURSCEVOIR* p3 ind p s p6
142
Le système verbal du manuscrit A
POURVOIR* inf ind p s p3 POUVOIR*
p3 p4
ind prés p5 p6 p1
ind fut
ind p s ind imp
cond prés
pourveoir pourveÿ
5111 14336, 17651
puet pouons
832 [...] 21653 8951, 9950, 10810, 10818, 14088, 15596, 18445, 19675 8953 2390 [...] 20869 6161, 6162 4137, 5212, 11218 (+voy.), 11307, 16067 (+voy.), 16069 (+voy.), 17816, 17919, 19027, 19464, 20834 1384, 12812 (dvpé) dvpé : 13506 dvpé : 2845, 11330 4396 (dvpé), 6017, 7223, 10752, 11102, 18714, 21193 1369 (dvpé), 1638, 2599 (dvpé), 2839, 3595 (dvpé), 4523, 4901 (dvpé) [...] 20401 (dvpé), 20404 7860 (dvpé), 19188 4114 (dvpé) 741 [...] 18343 214 (?), 18095 (?) 9400, 18089, 18294, 18341, 18498 1195 [...] 20345 6546, 8112, 9019, 9044 3828, 3989 ab : 2912, 4932 ab : 20286, 20580 dvpé : 296, 3692, 10650, 18644 dvpé : 10047, 10744, 12748, 12782, 16724 ab : 7244, 7530 ab : 8782, 13528, 14251, 20994
poons pouéz poéz pouent
p3 p4
porray pourray porra porrons
p5
porréz
p6
porront pourront peu peut pot pouoit pooit pouoient porroie pourroie porroit pourroit
p3 p3 p6 p1 p3 p4 p5
pourroions pourroiéz
Chapitre 2 . Morphologie POUVOIR*
p6
PRENDRE
ab : 4495, 7355, 21386
prendre prandre prins pris prinse prise prinst prist prinstrent
p3 p6
preigne preignent
2831 [...] 21275 188 [...] 20652 437 [...] 21097 4846 (dvpé) [...] 21369 5297 3839 [...] 19660 (dvpé) 256 [...] 18687 96 [...] 21466 4691, 5005, 6881, 6924, 8219, 8235, 15285 3683, 16625, 17072, 17142, 18391, 20557 8078, 9660, 11279, 13288, 13896, 18710, 18711, 19032, 19814 15736, 18736, 20574, 21463, 21478, 21507 6580, 16228 20344
p1
prier pri/pry prie
6335 [...] 21680 423 [...] 21728 802 [...] 21822
querir querrir querre quier quiers
633 [...] 17680 3807 [...] 20156 8635 [...] 16351 8784, 12481, 18725 8948, 9404, 12699, 13509, 18719, 20595
inf masc part p
pourroient
fém p3 p6
pristrent
ind p s
prindrent prirent subj prés
PRIER inf ind prés QUERIR inf ind prés
143
p1
144
Le système verbal du manuscrit A
RESPONDRE* ind imp p3
responnoit
296
SAILLIR inf ind prés
saillir sault
3069, 15596, 15629 989, 2535, 8224, 14747
savoir sçay say scet savons savéz savent saray
SAVOIR inf
ind prés
p3
p5
saroiéz
946 [...] 20869 149 [...] 21436 108, 5268, 5517 358 [...] 21083 1242 [...] 21630 148 [...] 20770 49 [...] 21070 469, 1257, 7107, 8033, 9859, 12059, 12816 3353, 15007 4248, 10194, 12295, 14416, 17831 635 [...] 21208 2262, 10278, 15484 2561 14444 464, 7458, 12813, 13068, 14805, 15452 5634, 9618 5633, 21049 230 [...] 21741 259 [...] 11111 (analogie passés forts) 16254
p3
sauver sault
1366 [...] 21100 17199
p1 p3 p4 p5 p6 p1 p3
ind fut
p4 p5 p6
ind p s cond prés SAUVER inf subj prés
p3
sauray sara saura sarons saurons saréz sauréz saront sauront sceu/sceü sceut
Chapitre 2 . Morphologie SOLOIR* ind prés SUIR* part prés ind p s subj prés TAIRE inf ind p s TENIR inf ind fut
ind p s subj prés subj imp
p3
sieut
20581
p6 p3
suyant suirent sieve
4472, 4872, 11947, 12005 3684 4472
p3
taire taisi/taysi
12561 4430, 15635
p1
tenir tiendray
p6 p6 p3 p1 p3 p5 p6
tenray tiendra tenra tenrons tindrent teigne tenisse tenist tenistez tenissent
500 [...] 20770 1955, 4901, 9841, 10542, 10647, 11334, 16029 14142 1970 [...] 16315 8573 21331 1928 [...] 21775 4910, 9233, 17036, 21344 9161, 12374, 3322, 7798, 8548, 20345 12072 16238
p3
tollir tolir toust
5903, 14821, 16557 8381 15206, 15241
p3
TOLLIR inf ind p s
145
146
Le système verbal du manuscrit A
TROUVER inf ind prés subj prés VALOIR* part prés ind prés ind fut ind p s subj imp VENIR inf imp prés ind prés
p1 p1
p5 p3 p4 p3
p3
p2 p1 p6 p3
ind fut
p5
subj prés
246 [...] 21489 130 [...] 14779 9049, 17868 1489
vaillent vailléz vauldra vauldrons vailly/vailli vally valy/vali
1803 8316, 21671 2837, 11394, 17036 13870, 19648 5241, 19391 17135 13891, 16417, 19024, 20289, 21010 1765 [...] 21351
vaussist
venir vien vien viens venent viendra vendra venra viendréz
p6 p3
vendréz viendront venront vindrent veigne
p5
veignéz
p6 ind p s
trouver trouve treuve truisse
19078,
194 [...] 21704 2357, 6009 7211, 11043 1560 [...] 20066 924 [...] 20658 131 [...] 20450 1519, 12265 6565, 15460 1551, 2160, 3892, 5577, 7320, 7335, 7582 11293, 12100 881 [...] 20936 11575 980 [...] 21541 1542, 5680, 8627, 9081, 9549, 10657, 20559 94 [...] 15344
Chapitre 2 . Morphologie VENIR
subj imp
p6
veignent
p3 p5
venist venisséz
VESTIR inf
ind prés ind p s
p3
vivre vif vi vesqui
377 [...] 20432 791, 4798 142 533, 8110
p1
voir veoir/vëoir voix
1942 [...] 21169 349 [...] 21178 11314
p1 p3
vouhé veu voua vouha
16730, 19499, 21678 13839, 17542, 21031 18357 17231
p1 p3
vouloir veil veult vault
14251 337 [...] 20249 120 [...] 20577 21638
p1
inf
VOUER* part p ind prés ind p s VOULOIR inf ind prés
20331,
1891 [...] 21037 2818, 4177, 13651, 14888, 17183 4500, 10298, 10687, 15447, 20992, 21044, 21168
VOIR ind prés
13063,
vestir vesty vestu
part p
VIVRE inf
10729, 10876, 20519, 20558 605 [...] 21569 7214
147
148
Le système verbal du manuscrit A
VOULOIR p4
veust voulons volons
p5
veillons vouléz voléz
p6 p1 p3 ind fut
p5 p6
ind p s subj prés
subj imp
p3 p6 p3 p6 p1 p3 p5 p6
veilléz voulent volent vouldray vouldra vorra voldra vouldréz vouldront voldront vorront volu volt volurent veille veillet veillent vousisse voussist vousist vousistes voussisséz vousissent voussissent
16316 5506 [...] 20421 7278, 7654, 8587, 19744, 20432, 20804 8814, 11896 18 (dvpé) [...] 21283 2423, 2430, 5553, 6755, 12364, 13746, 16445, 19648, 20415, 21221, 21708 5 [...] 21189 3997, 6852 [...] 21199 2789 732 [...] 21194 840 [...] 21593 7193 13653 3897, 7010, 11508, 12369, 13515, 13518, 17802, 19557, 19830 3387, 16632, 21067 21064, 21234 20967 593 [...] 21576 14584, 16071 2391 [...] 21580 4 [...] 21762 7347 4085, 7581, 12902 13561 260 [...] 19441 14641 20380, 20389 20388 12750, 13553, 13803, 21072 7472
Syntaxe du manuscrit A
3
3.1 | Syntaxe du groupe nominal 3.1.1
|
Cas régime absolu
De nombreux cas de constructions en cas régime absolu sont présents dans le texte : la vie vaillant Bertrant du Guesclin 8 ; les joyaux sa mere 652 ; les compaignons Bertrant 910 ; un compaignon Bertrant 962 ; mere Dieu 990 ; l’amour Bertrant 2844 ; la teste detrenchie Pierre de Saquainville 4940-41 ; le ilz saincte Marie 5400 ; 16904 ; l’ost Charles de Blois 5734 ; la bataille Charlon 5963 ; la femme Charlon 6409 ; du sang saint Loÿs 6768 ; la mort Dieu 6799 ; la mort la roÿne 6837, 6896, 7061 ; la mort la dame 6905 ; ou nom Dieu 7098 ; l’avoir l’apostole 7667 ; la venue Bertrant 7721, 7916 ; les suers Henry 8755, 8801, 8803 ; la response Henry et Bertrant l’aduré 9266 ; les bourjois Henry 9588 ; l’ost Bertrant 10690 ; Aymerïon la gent 10917 : le service Charlon 12166 ; le corps Dieu 12199 ; la nouvelle Bertrant 13763 ; le sort Bertrant 13871 ; la rançon Bertrant 14277 ; l’ost Henry 14414 ; les gens Henry 14609 ; l’ost Bertrant le chevalier 14906 ; l’ost son frere Olivier 14907 ; le sepoulcre Dieu 15369 ; roy Henry la gent 15537 ; le ils le roy de Bel Marin 15567 ; la teste Pieron 16614 ; la teste Pietre 16622 ; le ilz Marie 16899 ; la vaisselle Bertrant 17596 ; 17619 ; cousin germain Bertrant 18168 ; des fais Karenlouet 18565 ; la demande Bertrant 19868 ; le conseil Bertrant 20053. L’analyse de ces occurrences permet de faire quelques remarques quant à l’évolution de la construction 1 . Les conditions syntaxiques et sémantiques propres à l’usage en ancien français semblent se maintenir. La cohésion entre le déterminé et le déterminant paraît tout de même plus lâche, le déterminé pouvant être accompagné d’adjectifs (la vie vaillant, la teste detrenchie). Le déterminant est toujours un animé singulier mais qui peut être multiple : la response Henry et Bertrant l’aduré. 1. Pour une analyse complète des règles d’utilisation du cas régime absolu en ancien français voir Buridant, Grammaire nouvelle de l’ancien français, op. cit., § 59-66.
149
150
Syntaxe du groupe nominal
3.1.2
|
Pronoms personnels
Avec l’impératif On trouve un cas d’emploi du pronom tonique devant un verbe à l’impératif 2 : car my sauve la vie 15000.
Emploi des formes prédicatives Le pronom personnel prédicatif lui se trouve parfois utilisé en tant que pronom conjoint direct : 1. Bertrant fu moult liéz quant cellui escouta. Adont ce i arméz, car cellui bien lui aida. 434-35 2. « A sa ille seréz a moullier espousant » [...] Se dist Pietres le roy : « je lui suis desirans » 14513-15 3. Vive ce Bertrant ! Vive qui regne tellement, qui ne nous laira mie cy vacquer longuement. Et n’atendra mie que Englois nullement lui viegnent querir sa, n’assieger nullement 17677-80 La présence du pronom prédicatif lui conjoint au verbe est considérée par G. Zink comme un trait anglo-normand : « L’Anglo-Normand tardif intervertit volontiers les CRd et ind. des personnes 3-6 et emploie le,la, (les) en fonction datifs et surtout luy, (ly), lur en fonction d’objets directs conjoints 3 . » Il est fort à croire que cette caractéristique se trouve également dans les dialectes du sud-ouest de la zone d’oïl, partageant souvent des caractéristiques dialectales avec la zone normande.
Emploi cataphorique Quelques cas d’emploi cataphorique du pronom personnel sont à relever dans le texte, entraînant ainsi la répétition du complément d’objet : 11589-90 : les/les .xM. premiers ; 12506 : et lui dist a Bertrant ; 13603 : le/Bertrant ; 18741 : le/bacinet ; 20322-23 : l’/la bourjoisie. 2. R. Martin et M. Wilmet, Syntaxe du moyen français, Editions BIERE, 1980, § 277. 3. Zink, Morphologie du français médiéval, op. cit., p. 100.
Chapitre 3 . Syntaxe du manuscrit A
151
3.2 | Conjonctions et adverbes de phrase 3.2.1
|
Si
L’adverbe de phrase si est encore employé dans le texte. Sa place est désormais rarement en tête de vers mais plutôt en signe d’ouverture de la zone verbale : 587 Ceste matiere si vous voys ramentevant ; 609 Et le duc si lui jure les sains de paradis ; 735 Mais Bertrant si ala ; 797 tantost si est chetifs ; 818 beaux dons si leur donna ; 983 si ne vous failléz mye (ouverture de l’hémistiche) ; 1550 qui la si l’envoia ; 1649 mais si entre voz ; 2094 que leur ville si fust ; 3251 qui si trés fort estoit ; 15411 si en fu ; 19896 si sceu Il subsiste quelques rares cas d’emploi en ouverture de vers : 3960 si avoit un grant pont ; 5497 si ne vous devons dire. L’adverbe peut également introduire un vers accompagné de la conjonction et : 1. Et si feray la ville foussoier et fermer 5114 2. Et si nous combatons comme gens desraee, car le vault meulx asséz de morir a l’espee qui ainsi mourir de fain comme beste desruee. 11270-72 3. Et si lui a le roy sa ille ordonnee et la doit espouser aprés guerre inee 15406 4. Et si seront touz prest ains .xve. passee 15409 5. Et si laisséz venir qui venir y vouldra : quant plus y viendra et plus y en mourra. 15473-74 6. Et si est aloyé a la paienne gent, il a Dieu relenquy et le saint Sacrement 15778-79. Ces derniers exemples sont certainement une preuve de la perte de tonicité de l’adverbe de phrase si qui doit être accompagné d’une conjonction en soutien.
3.2.2
|
Car
Car peut être employé en tant qu’adverbe de phrase : 1. Car un duc y avoit au temps que je vous dy qui estoit bon Françoys et fu tant qu’il vesqui 532-33
152
Conjonctions et adverbes de phrase 2. Car dedens Forgeray avoit d’Englois plenté et des gens au conte de Monfort la conté. 833-34 (ouverture de laisse) 3. Autres exemples : 4324, 5556, 6821, 7179, 7403, 8965, 9161, 9343, 9556, 9857, 9892, 9950 ... 21146
3.2.3
|
Mais
Mais peut être employé comme adverbe de phrase : 1. Mais Bertrant s’en fouy, tellement se mussoit que on ne le peut trouver par tout ou le querroit 245 2. Autres exemples : 2332 ; 2344 ; 3339 ; 12258 ... 21705.
3.2.4
|
Que causal
La conjonction que (parfois notée c’) a très souvent une valeur causale dans le texte. Voici les exemples relevés : 1. Nul ne veult deporter ja si grant ne sera, que quant on lui dit riens, en l’eure le ferra. (personne n’ose l’afronter, aussi grand soit-il, car dès qu’on lui adresse la parole, on reçoit des coups) 120-21 2. Et Bertrant se prinst a rire que pou y acomptoit 256 3. Autres exemples : 393, 407, 1627, 1834, 1920, 2040, 2182, 2586, 3877, 3908, 4395 (c’), 4412, 4481, 4530 , 4933, 4935, 5574, 5574, 5758, 6465, 9046, 10848 ; 12669 ; 12714 ; 13010 ; 13512 ; 13631 ; 15480 ; 16172 ; 16528 ; 16536 ; 16816 ; 17209 ; 18415 ; 18469 ; 18595 ; 21194 ; 21514 ; 21684.
3.2.5
|
Que temporel
Que peut avoir une valeur temporelle dans le manuscrit 4 : A l’issir de la ville, que congié lui it on (aux portes de la ville, au moment du départ) 10146. 4. Ibid., p. 104.
Chapitre 3 . Syntaxe du manuscrit A
3.2.6
|
153
Quant causal
Quant a une valeur causale dans les exemples suivants 5 : — Dieu, dist Charlez le roy, vous en soiéz loué quant au commaincement que je suys roy sacré m’avéz fait tel honneur 6 4891-93 — Autres exemples : 4894 ; 9488 ; 15474.
3.3 | Syntaxe de la zone verbale 3.3.1
|
Double objet
Des constructions verbales usant de double objet direct ou indirect sont employées dans le manuscrit 7 : 1. 1062 que jamais la cité ne monsterroit talon 2. Et quant Ferrant le voit qu’il est ainsi passé 14968 Dans le premier exemple, cité et talon sont tous les deux objet direct du verbe monstrer, le duc Lencloistre jurant de ne pas tourner le dos à Rennes assiégée par ses troupes. Dans le second exemple, Voir a deux objets directs : le et la complétive introduite par que.
3.3.2
|
Auxiliaire
L’auxiliaire qui sert à construire les temps composés est parfois en incidence sur plusieurs participes : 1. Il n’aura son pareil en tout le irmament et le plus honnouré et prisé grandement de touz ceulx du royaume de France vrayment. 145-147 2. A ce jour fu issu de Paris, je vous dy, d’ommes .xl.M. arméz et fervesty, et la ville gardee contre tout ennemy. 17306-17308 5. Buridant, Grammaire nouvelle de l’ancien français, op. cit., § 513. 6. « Dieu, dit le roi Charles, soyez loué car depuis le commencement de mon règne vous m’avez rendu de grands honneurs. » 7. Martin et Wilmet, Syntaxe du moyen français, op. cit., § 295.
154
Syntaxe de la zone verbale 3. Et puis se sont Englois de l’assault departy puis Jehan de Chando mené a Chauvegris. 18908-18909 4. En la ville se sont noz Françoys reposé, le pillage party et l’or in monnoié 19041-19042 5. Les oustes furent pris de noz gens louhee, cerchie fu la tour, ouverte et desfermee, la cappitaine aprés, a qui qu’il desagrée. 19483-19485
Ces diférents exemples sont les témoins d’une grande lexibilité dans l’emploi de l’auxiliaire. Estre et Avoir sont utilisés indiféremment dans l’exemple n°1 et n°4. L’exemple n°1 montre même avoir en incidence alors qu’il n’est même pas utilisé comme auxiliaire au vers 145 mais en temps que verbe. La citation n°5 indique qu’il faut parfois remonter plusieurs lignes avant de trouver l’occurrence en incidence sur plusieurs vers. Ici furent pris qui s’applique ensuite au cappitaine deux vers plus bas.
3.3.3
|
Valeur, temps et mode
Valeur de l’imparfait de l’indicatif Le manuscrit présente des cas d’imparfait atypique 8 employé pour exprimer des actions ponctuelles passées. Cet emploi est surtout utilisé pour créer des rimes en -oi, comme le montre l’exemple suivant : Quant son pere Regnalt la vérité savoit, dont il estoit venu et qui ce lui faisoit, adont it commander bien fort y bien destroit que on ne laissast enfant ou païs la endroit qui suist le sien ilz et cellui qui le suyvroit le pere une amande de cent sols paieroit. 220-27 D’autres cas similaires sont à signaler aux laisses suivantes : laisses rimées en -oi : 9, 102, 334, 340, 363, 473, 519, 613, 647, 682, 697, 715. Un seul emploi est à relever à l’intérieur d’un vers : Bertrant s’en retournoit qui moult se courrouça 19869. 8. Buridant, Grammaire nouvelle de l’ancien français, op. cit., § 296.
Chapitre 3 . Syntaxe du manuscrit A
3.3.4
|
155
Accords verbeaux
Accord au voisinage Le manuscrit présente quelques cas d’accord du verbe au voisinage : 1. La renforçoit l’estour et le tornoiement 166 2. car le duc de Lencloistre, ou tant ot hardement, et le Castal de Beuf y estoit ensement 10914 3. Et mains nobles barons aprés Bertrant s’en va. 18212
Accord au sens Le texte présente plusieurs occurrences de verbes au pluriel accompagnés d’un sujet singulier à valeur collective : — une chevauchie = vindrent 980 ; homme = approchent 1750 ; le conseil = eurent 3500, 5309 ; cincq cens ans = a passé 7390 ; le conseil = ont l’avoir 7614 ; la moitie = voysent ; disoient = l’un a l’autre 14009 ; les dix = dist il 1407071 ; la cité = defendent/ seufrent 14823 ; ceste gent = voient 15710l’embusche vaillent s’en sont venuz 15733 ; noble barné = sont 15793 ; le nomment toute gent 15889 ; n’oÿrent nulle gent 16639 ; tel y ot qui laissassent 19313 ; tant sont bien ordonné celle gent 20050 ; le commun de Poictiers n’y furent pas fainty 20204 ; s’aucun seigneur qui la fu furent moult dolant 20445 ; quant virent le commun 20552 ; le gait = vont 20696-97 ; chascun = vont 21336 ; le peuple = eüssent 21750-51.
3.3.5
|
Faire, Avoir et Estre
Faire pour Estre Le verbe faire est quelques fois employé plutôt que estre à des temps diférents, alors que d’autres témoins ofrent bien estre pour variante : 1. — si it Jehan David (A, 4843) — si ist Jehan David (P) — si fu Jehan David (Nh) 2. — it a redoubter (A 7998) — it a redoubter (P) — fust a redoubter (Nh)
156
Syntaxe de la zone verbale
On remarque que P et A emploient tous deux faire alors que Nh préfère estre, preuve de la proximité qu’entretiennent les deux premiers témoins.
Estre et Avoir Les auxiliaires peuvent être interchangeables lors de l’emploi de temps composés : — 3025, 15769 : aus armes sont courruz ; 8556 : d’une ille estoit a ce temps acouchie ; 15280 : en la cité avoit venu nouvellement : 15597 : qui est l’ame dampné ; 18512 : et Englois sont couruz ; 19763 : la se sont desjunéz ; 20133 : nous serons obeÿ ; 20147 : ilz soient obeÿs ; 20755 : a l’assault sont couru.
Estre + -ant Le texte emploie parfois le tour périphrastique estre + forme en -ant pour exprimer une action 9 : 1. Femmes qu’il y avoit qui furent leur suyant furent moult les Françoys de boyre confortant. (Les femmes qui les suivaient leur apportaient beaucoup de soutien en apportant à boire.) 4472-73 2. le roy Pietres fu ce mefait pardonnant. (Le roi Pietres pardonna ce méfait) 12576 3. si encontre moy vous estez nullement defendant, a mort vous mectray, n’en soiéz mescreant. (Si jamais vous vous défendez contre moi, je vous tuerai, soyez en certain.) 16426-27 Ce tour périphrastique est également utilisé avec une valeur durative 10 : 1. En celle cité fu le peuple moult marry pour le secours qui fu actendans ou pourpris. (A l’intérieur de la cité, le peuple était très peiné pour les renforts qui attendaient dans l’enceinte) 15126 2. se vous vous aléz a Henry accordant, en feu gregois sera ceste cité ardant 9. Martin et Wilmet, Syntaxe du moyen français, op. cit., § 357. 10. Ibid., § 357.
Chapitre 3 . Syntaxe du manuscrit A
157
(si vous vous accordez avec Henry, cette cité brûlera par les feux grégeois.) 15163
3.4 | Anacoluthes Le texte présente diférents cas d’anacoluthes, marquées surtout par l’absence de verbe régissant une proposition.
Absence de verbe régisseur de proposition Cappitaine le it adonc de Pontorson pourtant que en Normendie y avoit a foison de ennemis au duc qui Charles ot non, car le Castal de Buc, un moult hardy baron, avec Jehan Jouel, Saquanville Pieron et d’autre chevaliers y ot a grant foyson qui furent a Evreux et ailleurs environ (3643-49) Le vers marque une anacoluthe puisque les personnages énumérés (en gras dans l’exemple) ne sont les sujets d’aucun verbe. Ces chevaliers auraient pu être les compléments de la formule impersonnelle y ot du vers 3642. Cependant, le complément circonstanciel a grant foyson réduit l’extension de la formule et y ot ne peut accepter comme complément que d’autre chevaliers. En efet, l’expression a grant foyson s’applique seulement à un élément dénombrable, qualité qui ne peut s’appliquer à un seul personnage. On trouve donc bien dans ce passage une absence de verbe régisseur de la proposition coordonnée introduite par car. Le manuscrit Nh adopte une syntaxe plus canonique en employant plutôt que la proposition relative qui furent a Evreux (3649) la proposition estoient en Evreus, donnant ainsi un verbe régisseur à la proposition coordonnée. Le vers et d’autre chevaliers y ot a grant foyson fonctionne alors comme une hyperbate. De la même façon, la complétive introduite par que au vers 7026 et qui a pour sujet le bastard Henry ne comporte aucun verbe régisseur : nous faisons assavoir qu’il nous desplaist forment et si avons mal gré et portons maltalent que le bastart Henry, que je hé durement et que j’ai fait banir d’Espaigne entierement comme faulx traïtreur qui enchante ma gent,
158
Anacoluthes qui se veult faire roy par un abusement d’un juïf qui me het et Dieu scet bien commant. 7024-30
Répétition du sujet Et Bertrant qui venoit bien richement armé avec les chevaliers et escuiers senéz, aus bailles est venu Bertrant l’adduré 5174-76
Changement de personne (P6/P3) Tant furent afamé que la chair on menga des chevaux de la ville et ce que on y trouva. 13249-50 Ce changement est motivé par la nécessité d’une rime en a.
Solécisme 1. Quant Pietres le roy ot o lui les mescreans qui sont de Bel Marine, .i. païs qui est grant, au roy Pietres les vint presenter l’admirans et lui dist : « Roy d’Espaigne, véz cy confortans. 14503-06 2. Le bon duc de Berry et le duc de Bourbon, et le duc de Bourgoigne et Berry et Cliçon, quant ilz deurent entrer en la ville de nom, la y ot un abbé et bourjois a foison qui avoient tendu par noble establiçon de soye un petit ille, menu fu le coron. 20512-17 On passe dans le premier exemple du sujet Pietres le roy dans la proposition circonstancielle à l’admirans sujet du verbe principal vint. Cette leçon est retenue par tous les témoins connus à ce jour présentant cette laisse.
Zeugma 1. Pierre de Saquainville n’y vont mie oubliant et de ceulx qui sont mors a Cocherel devant. 4882-83
Chapitre 3 . Syntaxe du manuscrit A 2. le Besgues de Villaines, .i. chevalier de non, pour la bonté de lui, comme dit la chansson, et pourtant l’avangarde de ce jour lui bailla on. 3. la sont venu logier pour bataille et faire a vous grant encombrer 17771-72
159
Troisième partie Analyse littéraire De Glay Aquin à Guesclin
De l’histoire à la littérature : Bertrand du Guesclin le cas du manuscrit A
161
Introduction
”
”Par ma foy, sire”, di jou, ”vous dittes voir. Messire Bertran fut ung moult vaillant homme, et. aussi est messire Olivier de Clayquin, son frere.” ¶ A ce que je nommay Clayquin, le chevalier commença a rire et je luy demanday : ”Sire, pourquoy riéz vous ?” ”Je le vous diray”, dist il, ”pour tant que vous avéz nommé Clayquin. Ce n’est pas le droit sournom d’eulx, ne ne fu oncques, comment que tous ceulx qui en parollent les nomment ainsi, et nous autant bien comme vous, nous qui sommes de Bretaingne ; et messire Bertran, luy vivant, y eust voulentiers adreschiéz et remediet s’il eust peut ; mais oncques il ne pouoit, car le mot est tel qu’il chiet en la bouche et en la parolle de ceulx qui le nomment, mieulx que l’autre.” Et adont luy demanday : ”Or me dictes, sire, par vostre courtoisie, a il grant diferent de l’un a l’autre ?” ”Me Dieu, nennil,” dist il, ”il n’y a aultre diferent que on devroit dire messire Bertran du Glay Aquin, [...]” ¶ Ceste parolle que le chevalier me dist me ist grant bien et luy dis : ”Ha ! doulx sire, vous me feréz grant plaisir au recorder, et si le retenray de vous, ne jamais je ne l’oublieray ; car messire Bertran fut si vaillant homme que on le doit augmenter ce que on peult.” — Jehan Froissart Chroniques, livre 3 a a. Paris, BnF, ms. fr. 2650, f° 203r/v, édition disponible en ligne : http://www. hrionline.ac.uk/onlinefroissart/.
163
L 164
es contemporains de Bertrand du Guesclin, avant de souligner ses hauts faits, font très souvent référence à son extraordinaire renommée. Eustache Deschamps n’hésite pas à le faire rentrer au panthéon des preux. Michel Pintouin, chroniqueur du règne de Charles VI, précise que, lors de l’hommage rendu au connétable en 1389, l’évêque célébrant la cérémonie s’exclame « nominatus est usque ad extrema terre 1 », variante d’un verset biblique présent dans le livre des Maccabées 2 . Or, ce nom qui est porté jusqu’aux frontières du monde n’est peut-être pas le patronyme exact du chevalier. Comme nous le dit Froissart, le nom de Clayquin qu’il utilise pour faire référence à Bertrand n’est pas, selon le chevalier breton qu’il interroge, celui qu’il convient d’employer. Un passage en particulier de cet extrait nous renseigne sur le mode de difusion de la légende du connétable : le mot est tel qu’il chiet en la bouche et en la parolle de ceulx qui le nomment. C’est d’abord la parole des contemporains qui a donné un nom à Bertrand, un nom qui ne correspond pas forcément à son patronyme originel. La société de l’époque l’a, à travers la difusion de ses prouesses, littéralement re-nommé. Dans une société médiévale culturellement marquée par l’omniprésence de la voix 3 , les informations colportées par l’opinion publique semblent avoir autant de valeur qu’une nouvelle oicielle 4 . L’Antiquité utilise le terme fama ain de faire référence à la renommée 5 . Elle comporte deux versants : la rumeur et la réputation. Le terme passe en ancien français sous la forme fame et se trouve très souvent coordonné à celui de renommée 6 qui le supplante déinitivement à l’aube de la Renaissance 7 . 1. L. Belleguet, éd., Chronique du religieux de Saint-Denys, contenant le règne de Charles VI de 1380 à1422, t. 1, Collection de documents inédits sur l’histoire de France, Paris : Imprimerie de Crapelet, 1839, p. 602. 2. « Son nom a été célébré jusqu’aux extrémités de la terre », Maccabées 3, 9. 3. P. Zumthor, La lettre et la voix. De la ”littérature” médiévale, Poétique, Paris : Editions du Seuil, 1987, Chapitre 5. 4. C. Gauvard signale d’ailleurs que « le recours à la justiication écrite est encore loin de constituer la preuve la plus éminente à un moment où la hiérarchie des preuves n’est pas encore ixées. (...) Cette société, dans son plus grand nombre ne vit que par la parole proférée et se trouve, du même coup, sous la menace constante de subir des informations qu’elle ne peut pas contrôler ». C. Gauvard, « La Fama, une parole fondatrice », Médiévales, 1993, p. 5–13, url : http://www.persee.fr/doc/medi_0751-2708_1993_num_12_24_1265, p. 7–8. 5. Pour une analyse de l’évolution du terme fama au Moyen Age voir ibid. 6. Voir les exemples donnés sous l’entrée fame dans le ATILF, Dictionnaire du moyen Français [En ligne] (DMF), 2012, url : http://www.atilf.fr/dmf/. 7. La période médiévale voit une évolution de la représentation de la fama (Pour une analyse de cette évolution voir J. Cerquiglini-Toulet, « Fama et les preux : nom et renom
165 L’étude de la légende de Bertrand du Guesclin conduit dès lors à analyser une renommé plutôt qu’un personnage historique. Les auteurs contemporains sont nombreux à trouver en Bertrand une source d’inspiration pour leurs œuvres. Froissart, Deschamps, Villon, Cuvelier ou d’illustres anonymes qui composent durant la seconde moitié du XIVe siècle le prennent comme héros. Les médias de cette légende sont aussi divers que les formes du patronyme du connétable : biographie épique, pièces lyriques, chroniques, tapisseries...les épisodes célèbres de la vie du connétable semblent déclinables à l’inini. Deux formes littéraires se détachent de la production générale. D’abord le poème épique écrit par Cuvelier, texte qui a fait le succès d’images d’Epinal comme celle de Bertrand mourant recevant les clés de la ville de Chateauneuf-de-Randon de la part des Anglais, ou encore d’épisodes fameux comme celui de la rançon du chevalier où Bertrand ixe lui-même son prix. Ensuite, de nombreux poèmes à la gloire du connétable ont permis de façonner l’image du héros, particulièrement ceux d’Eustache Deschamps faisant de Bertrand le dixième preux ou encore ceux de poètes anonymes dépeignant dans leurs textes l’émotion qui saisit la société à la mort du connétable 9 . Comment passe-t-on de la fama aux textes littéraires à la in du Moyen Âge », Médiévales, 1993, p. 35–44, url : http : / / www . persee . fr / doc/medi_0751- 2708_1993_num_12_24_1268). Le Moyen Age hérite de deux traditions antiques de représentation de la réputation. De Virgile, on retrouve une peinture allégorique de la fama sous les traits d’un volatile dont les plumes sont couvertes d’yeux, d’oreilles et de bouches 8 . D’Ovide, la période reçoit une métaphore spatiale tirée des Métamorphoses : la maison de Renommée. On remarque une évolution notable entre les représentations de l’allégorie au XIIe et au XIVe siècle. Alors que dans les premiers moments de la littérature vernaculaire, la fama est celle qui révèle les secrets, le caché (Fama, par exemple, est coupable de dévoiler l’amour de Didon pour Enéas dans l’Enéas), elle devient à partir du XIVe siècle une valeur ultime à laquelle à laquelle chacun doit aspirer. Comme l’indique le refrain d’une ballade d’Eustache Deschamps : Plus que in or vaut bonne renommée, (A. H. É. de Queux de Saint-Hilaire et G. Raynaud, éds., Oeuvres complètes de Eustache Deschamps, t. 1– 9, Publications de la Société des anciens textes français, Paris : Firmin Didot & cie, 1880, t. 8, ballade n° 1354, p. 139-140). A la in du Moyen Age, fame se trouve déinitivement supplanté par renommé, le terme antique ayant perdu sa valeur d’antan (Pour une étude du vocabulaire de la réputation au Moyen Age voir G. Roques, « La Réputation dans la langue française : glossaire onomasiologique du Moyen Français », Médiévales, 1993, p. 45–56, url : http://www.persee.fr/doc/medi_0751-2708_1993_num_12_24_1269). 9. Citons par exemple le poème intitulé « La Remembrance Du Guesclin », certainement composé à l’occasion de l’hommage rendu au connétable par Charles VI en 1389. Le texte est consultable en ligne : J.-M. Cauneau et D. Philippe, « La Remembrance de Du Guesclin : mystères et enseignements d’un manuscrit angevin », Le Prince, l’argent, les hommes au Moyen Age, 2008, sous la dir. de J.-C. Cassard, Y. Coativy et A. Gallicé, url : http://books. openedition.org/pur/5382?lang=fr.
166 concernant Bertrand ? Quel est le chemin de la bouche des contemporains à la plume d’un auteur ? Quels sont les modes de construction qui ont conduit aux textes présents dans le manuscrit A ? Un résumé des données historiques à propos du connétable sera présenté ain d’essayer de comprendre sur quoi se fonde la légende, non pas dans l’intention de démêler le vrai du faux, mais pour étudier le point de départ et le contexte de naissance cette légende, celui de la Guerre de Cent Ans. Puis, un questionnement sur les auteurs connus sera nécessaire pour faire émerger des milieux d’inluence qui propagent la légende de Bertrand. Deux personnalités littéraires seront ainsi examinées : Deschamps et Cuvelier. Ensuite, nous ferons route vers l’étude des genres littéraires utilisés pour traiter du connétable. Les types lyrique et épique seront analysés selon les spéciicités de chacun pour comprendre la variabilité de la légende, la place que prend chaque œuvre dans la littérature contemporaine et ce qu’elles apportent à leur genre respectif. Enin, les caractéristiques de chaque type nous permettront de réléchir à l’ensemble formé par le manuscrit A, mêlant poésie épique et lyrique.
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Bertrand et la Guerre de Cent Ans
”
Je demande volontiers à qui touche l’honneur de tant de victoires : à Guesclin, à Guesquin ou a Gueaquin ?
1
— Montaigne Essais
Q
ui a vraiment été Bertrand du Guesclin ? Dans la mémoire collective, c’est un grand capitaine de la Guerre de Cent Ans arrivé au sommet de la hiérarchie militaire grâce à sa hardiesse, sa ténacité et surtout sa loyauté indéfectible envers le roi Charles V. C’est ce jeune homme au physique disgracieux, issu de la petite noblesse, dont le talent lui permettra de diriger l’armée française contre l’envahisseur anglais. Pourtant, cette image du connétable de l’armée du roi de France ne semble pas vraiment en adéquation avec le personnage historique, comme le décrit Georges Minois dans l’introduction de sa biographie consacrée au connétable 2 : La célébrité de[Du ] Guesclin n’a d’égal que la fragilité des sources qui le concernent … l’origine d’une image semi-mythique de Du Guesclin bâtie autour de quelques anecdotes popularisées par les manuels scolaires jusqu’au début des années 1960 : le laid garnement qui renverse la table familiale, le rusé Breton qui prend un château en déguisant ses hommes en bûcherons, le chevalier qui ixe sa rançon à un chifre énorme et déclare que toutes les ileuses de France travailleront ensemble pour la rassembler, le courageux connétable qui boute les Anglais hors de France, et qui meurt en prenant une place forte dont on vient déposer les clefs sur son lit de mort… Cette image avait besoin d’un sérieux dépoussiérage 3 .
Le nom même du connétable est incertain et on a en relevé quarante-six graphies diférentes dans les écrits médiévaux français, anglais et espagnols, dont 1. M. de Montaigne, Essais, sous la dir. d’E. Naya, D. Reguig-Naya et A. Tarrête, t. 1, Collection folio classique, Gallimard, 2009, p. 496. 2. L’idée d’une renommée surdimensionnée avait déjà occupé Philippe Contamine dans un article : P. Contamine, « Bertrand du Guesclin, la gloire usurpée », L’Histoire 20, février 1980, L’écart entre l’homme et la légende est toujours discuté, comme le montre un ouvrage récent : T. Lassabatère, Du Guesclin, vie et frabrique d’un héros médiéval, Perrin, 2015. 3. G. Minois, Du Guesclin, Fayard (version Kindle), 1993.
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La Guerre de Cent Ans : repères historiques
Bertrant du Guesclin, Bertrandus du Glesquin, Bertrand de Gloschin, Bertrandus de Claschin, Bertrand de Clauquin, Berterand de Charquin, Bertrand Glesquin, Bertram de Claiquin, Bertran de Glaequin, Bertram Glakin 4 ...même si les patronymes médiévaux sont soumis à la variante, il est parfois diicile d’identiier du premier coup d’œil la référence au personnage qui nous occupe. Il semble donc nécessaire dans un premier temps d’essayer de rassembler les données historiques actuellement attestées sur Bertrand ain de faire la part entre l’Histoire et la légende 5 .
1.1 | La Guerre de Cent Ans : repères historiques Bertrand du Guesclin a vécu dans une période importante du Moyen Age, celle qui a laissé un goût d’horreur et une image d’époque maudite : la phase initiale de la Guerre de Cent Ans. L’afrontement séculaire des royaumes de France et d’Angleterre trouve sa source dans une afaire de succession au trône français au début du XIVe siècle 6 . Depuis l’avènement d’Hugues Capet au Xe siècle, tous les rois de France avaient eu pour enfant au moins un ils pour leur succéder à la tête du royaume. Or en 1316, Louis X, roi de France, décède en ayant eu pour seul enfant une seule ille, Jeanne. Cette situation est si inédite qu’aucun document oiciel n’avait prévu le cas. La coutume médiévale permettait sans problème à une femme d’hériter des biens de son père. Ce n’est donc pas le sexe qui a joué en défaveur de Jeanne, mais son âge. La petite ille est alors âgée d’à peine quatre ans et le conseil des barons préfère éviter l’instabilité d’une régence. Philippe V, frère de Louis X, proite alors de l’occasion pour se faire nommer roi par le conseil en déclarant que « femme ne succède pas au royaume de France ». Ce qu’il ignore, c’est qu’il décèdera quelques années plus tard, en 1322, en ne laissant derrière lui que des héritières. La couronne passe alors naturellement au dernier frère de Louis X encore en vie, Charles IV. La loi des séries poursuit la famille capétienne puisque celui-ci mourra en laissant deux illes. 4. Ibid., § Efondrement du parti de Charles de Blois (1345-1353). 5. Les documents originaux de et concernant Du Guesclin peuvent être consultés dans l’ouvrage suivant : M. C. E. Jones, Letters, Orders and Musters of Bertrand Du Guesclin, 1357-1380, Woodbridge : Boydell Press, 2004. 6. Pour une analyse complète de la période, voir G. Minois, La Guerre de Cent Ans : naissance de deux nations, Tempus, Perrin, 2008 et surtout B. Bove, Le temps de la Guerre de Cent Ans 1328-1453, Histoire de France, Belin, 2014.
Chapitre 1 . Bertrand et la Guerre de Cent Ans
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En cette année 1328, le conseil de barons n’a plus de frère à qui remettre la couronne : le problème est alors devenu irréalisable. Certes, la reine est enceinte mais on ignore le sexe de l’enfant. Il revient donc au conseil de décider, si l’enfant à naître est une ille, qui succèdera à Charles IV. Il semble acquis depuis 1316 qu’une femme ne peut régner en France. Deux candidats sont en lice. L’héritier le plus direct s’avère être Edouard III d’Angleterre. Isabelle de France, sa mère, est la sœur de Charles IV, il est donc le neveu du roi. Le conseil examine aussi le cas de Philippe VI de Valois. Il est le ils de Charles de Valois, frère du roi Philippe le Bel qui est le père de Charles IV. Il est par conséquent le cousin du roi. Après débat, le conseil considère que si une femme ne peut prétendre au trône, elle ne peut alors pas non plus transmettre la royauté. Le dépoussiérage de la loi salique, que l’on connaît depuis Clovis sans avoir à la mettre en œuvre, implique donc qu’aucune femme ne peut prétendre à la couronne de France et ne peut la revendiquer pour ses enfants. Edouard III est relié à la famille de France par sa mère, il ne peut alors pas être élu à la tête du royaume. De plus, les barons étaient assez frileux à l’idée de laisser le royaume à un Anglais, les tensions étant grandes entre les deux monarchies depuis la conquête de la Guyenne par l’armée anglaise au XIIe siècle. Ces nouvelles dispositions entraînent alors un changement dynastique à la tête du territoire : les Valois succèdent aux Capétiens, après plus de trois cent ans de règne de ces derniers. La rancœur est grande de l’autre côté de la Manche. Edouard III n’a cependant pas d’autre choix que de prêter un hommage lige à Philippe VI en 1331. Le conlit naissant en Bretagne au début de années 1330 va être l’occasion pour lui de déier le nouveau roi. Ce conlit breton va être l’occasion pour Bertrand d’accomplir ses premiers faits d’armes et de se faire remarquer auprès des proches de la couronne de France.
1.2 | Le conlit breton, premiers faits d’armes de Bertrand C’est dans cette période instable que va naître Bertrand du Guesclin. Il voit le jour aux alentours de 1320 7 dans le manoir de Broons, à quelques kilomètres au sud de Dinan. Il est l’aîné d’une fratrie d’au moins dix enfants. Son père, Robert Du Guesclin, est le seigneur du domaine de Broons. Il épouse vers 1300 7. Aucun registre de baptême de l’époque n’a malheureusement été conservé, la date de naissance du chevalier ne peut donc pas être plus précise.
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Le conlit breton, premiers faits d’armes de Bertrand
Jeanne de Malemains, héritière de la seigneurie de Sens. La famille est de petite noblesse, mais certainement pas aussi pauvrement rentée que la légende le laisse entendre. Aucun document historique ne permet de déterminer ce qu’a pu être l’enfance de Bertrand 8 .
Les afrontements en Bretagne, une guerre par procuration C’est lors de la Guerre pour la succession du duché de Bretagne que l’on trouve les premières traces oicielles de sa présence. Le duc Jean III, à la tête du territoire breton, a rendu hommage à Philippe VI lors de son avènement et s’engage même à ses côtés lors de la campagne militaire que le roi organise en Flandres en 1340. En avril 1341, le duc, de retour à Caen après avoir combattu aux côtés du roi, tombe subitement malade et meurt peu de temps après. Or, il n’a aucun enfant et n’a laissé aucun vœu clair quant à sa succession. Son frère Guy de Penthièvre était mort bien avant lui, en 1331. Deux prétendants au titre se présentent alors : Jean de Monfort et Jeanne de Penthièvre. Le premier est le demi frère de Jean III, issu du second mariage de son père Arthur II avec Yolande de Dreux. La seconde est la nièce de Jean III, la ille de son frère Guy mort avant lui. L’argument de Jean de Monfort et de ses partisans est que, puisque la Bretagne est un duché rattaché au royaume de France, le droit français doit s’y appliquer. Les droits de tout héritier masculin passent avant ceux des héritières, et c’est même en ce sens que la succession au trône de France a été tranchée. Jeanne, elle, invoque le droit breton, qui admet qu’une femme puisse régner en laissant l’administration du territoire à son mari. Il est également admis qu’une ille revendique la succession de son père décédé en cas d’absence de frère. Dès lors, les deux camps vont engager le combat pour déterminer qui sera le prochain duc. Mais le conlit s’élargit très vite, car chaque partie reçoit l’appui d’une grande puissance antagoniste. Jean de Monfort, qui réussit en quatre mois à conquérir Nantes et les villes des alentours, est soutenu par Edouard III d’Angleterre en échange de la reconnaissance des droits de ce dernier à accéder à la couronne de France. Jeanne est reconnue légitime par Philippe VI. Elle est en efet la femme de son neveu, Charles de Blois, depuis 1337. On se retrouve alors dans une situation absolument contradictoire, comme le souligne Georges Minois : 8. L’enfance du chevalier est traitée seulement dans les textes narratifs concernant le connétable.
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On est en plein quiproquo volontaire, ce qui illustre le réalisme qui se dissimule derrière la façade du droit féodal. Philippe VI, qui doit son trône à l’exclusion des femmes, soutient son neveu au nom du droit des femmes à régner. Édouard III, qui revendique la couronne de France au nom du droit des femmes à la transmettre, soutient Jean de Montfort, qui ne peut être duc que par le principe inverse. En fait, seul compte le contrôle de la Bretagne : le front qui s’ouvre ici s’inscrit à l’intérieur du conlit plus vaste entre le Plantagenêt et le Valois. D’un côté, Édouard III et Jean de Montfort ; de l’autre, Philippe VI et Charles de Blois 9 .
Du « dogue noir » à l’homme lige de Charles V Les Du Guesclin choisissent le parti de Charles de Blois. Dans la région rennaise, on connaît efectivement peu Jean de Monfort et on préfère le prestige de la couronne de France qui entoure l’aura de Charles de Blois. Bertrand suit l’avis familial et entre au service de Charles de Blois. Cependant, entre 1341 et 1353, il n’est connu que pour des petits faits d’armes sans grande importance. Il mène durant ces années une sorte de guerrilla dans les forêts de la région, à la tête d’une petite troupe de cinquante hommes s’attaquant aux détachements anglais pour le compte de Charles de Blois. Ces actions en sous main lui valent le surnom de « dogue noir de Brocéliande » par les Anglais présents dans la région. La France change à nouveau de roi en 1350. Philippe VI laisse derrière lui un ils, Jean, qui est sacré le 26 septembre 1350. La nouvelle dynastie des Valois reste en place malgré le bilan catastrophique du règne de Philippe. Durant ces années, le pays a subi la pire épidémie de peste jamais vue jusqu’alors (1347). La guerre contre le camp anglais est un échec et coûte très cher au royaume. L’avènement de Jean intervient dans un contexte d’instabilité certaine. En 1356, Bertrand sort de l’ombre et entre au service de Pierre de Villiers, capitaine de Ponthorson pour le compte du nouveau roi de France. Il a entre 36 et 37 ans. Cette année correspond également à celle de la mort de son père, faisant de lui l’héritier du domaine de la Motte-Broons, ce qui lui donne peut-être le revenu suisant pour être adoubé 10 . Dès lors, son ascension dans la hiérarchie militaire est assez rapide. En 1357, il participe à la défense de Rennes et est nommé capitaine de Ponthorson et 9. Minois, Du Guesclin, op. cit., § La succession de Bretagne. 10. Ibid., § Bertrand sort de l’ombre 1353-1357.
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Le conlit breton, premiers faits d’armes de Bertrand
du Mont-Saint-Michel. Trois ans plus tard, en 1360, il devient lieutenant de Normandie, d’Anjou et du Maine. En 1362, il accède au titre de capitaine de Caen. Enin, l’année 1364 est déterminante pour sa carrière : il devient capitaine général de tous les territoires entre la Seine et la Loire, puis, après une entrevue avec Charles V le 17 avril, il est nommé chambellan de France. Le bilan militaire breton de Du Guesclin est en demi-teinte. Il est fait trois fois prisonnier entre 1359 et 1364. La première fois par Robert Knollys en décembre 1359 au Pas d’Evran. La deuxième fois à Juigné, il est capturé par Hugues de Calveley, à la tête des archers anglais. Enin, il est détenu par les Anglais après le désastre de la bataille d’Auray en 1364. Son seul grand succès sur le territoire breton en tant que serviteur de l’armée française, mis à part les escarmouches en forêt dont il était spécialiste, est la victoire de Cocherel le 16 avril 1364, victoire qui lui rapportera le duché de Longueville 11 . Cette même année 1364, Jean le Bon décède alors qu’il est parti à Londres pour renégocier le montant de sa rançon, comme cela était prévu suite à la défaite française à Poitiers en 1356 et la capture du souverain français par les Anglais. Charles V, son ils, lui succède naturellement. Il est sacré roi le 19 mai 1364. Après la mort de Charles de Blois lors de la bataille d’Auray, il est plus facile pour les deux partis opposés de trouver une issue à l’afrontement. Le traité signé entre Jeanne de Penthièvre et Jean de Monfort en 1365 stipule que Jean hérite de tous les droits du duché de Bretagne en échange de son hommage au roi de France, duché qu’il acceptera de rendre plus d’un an et demi plus tard. Bertrand sort perdant de cet accord. Depuis sa capture à Auray, il n’a plus le droit d’exercer son métier d’armes tant que le montant de sa rançon n’est pas versé a Jean Chandos. En mai 1365, Charles V décide de la racheter ain de remettre le capitaine en activité et de l’envoyer faire campagne en Espagne. C’est pour Du Guesclin le début d’une nouvelle aventure, après de nombreux mois d’inactivité. Il a alors quarante-cinq ans. 11. Le don de Charles V, bien que prestigieux, n’est pas sans contrepartie. Du Guesclin doit accepter de renoncer au duché si le roi lui ofre plus tard des terres de valeur égale. Il doit également livrer en échange tous les otages de prix que le capitaine a fait prisonnier lors des batailles précédentes. Il perd ainsi une source de revenu importante à l’époque grâce aux versements de rançon. Enin, le duché sera source de conlit perpétuel car revendiqué par la veuve de Philippe de Navarre, Yolande. Comme le souligne G. Minois : « A y regarder de près, la récompense de Cocherel n’est donc pas si brillante qu’il y paraît. Du Guesclin est dupé : contre ses beaux prisonniers, il reçoit un titre, des ennuis et pas un sou. », ibid., § L’exploitation de la victoire. Ce cadeau empoisonné fait par Charles V à son vassal est-il le signe de la déiance du roi et de son conseil face à ce petit noble de campagne ?
Chapitre 1 . Bertrand et la Guerre de Cent Ans
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1.3 | Tribulations en Espagne Une guerre sainte en apparence Après le désastre d’Auray, la paix est établie entre les deux camps rivaux de la partie occidentale du royaume. Depuis 1360, le traité de Brétigny signé entre Edouard III d’Angleterre et Jean II de France permet une trêve durable entre les deux puissances. Or, des millers d’hommes avaient été requis pour participer à l’efort de guerre d’un côté et de l’autre de la Manche. Ces souldoyers, payés pour combattre, se retrouvent ainsi sans moyen de subsistance après l’arrêt des conlits. Ils s’organisent alors en diverses bandes, appelées les grandes compagnies 12 , qui pillent et ravagent tout sur leur passage. Charles V doit trouver une solution au problème qui commence à devenir critique alors que le peuple a déjà soufert successivement de la guerre, de la famine et de la peste. C’est une idée vieille de trois siècles qui ressurgit alors en ce milieu du XIVe siècle : la croisade. Mais quelle croisade ? Comment revêtir d’oripeaux nobles et spirituels une entreprise qui ne vise qu’à nettoyer le royaume 13 ? Certes, il y a bien à cette époque une pénétration de l’armée musulmane dirigée par Mourad Ier sur le territoire européen. Cependant, c’est en Grèce que cette avancée a lieu, et aucun souverain chrétien ne répond à l’appel à l’aide de Pierre de Lusignan pour tenter de contrer la progression du sultan. C’est un autre choix qui est fait : l’Espagne. Lorsque Charles V arrive au pouvoir en 1364, les Anglais contrôlent pratiquement toute la partie occidentale du territoire français, de l’Aquitaine à la Guyenne. Le traité de paix récemment signé en Bretagne a consacré la victoire du protégé d’Edouard III. Avoir un allié en Castille permettrait au roi de France de 12. Pour étude du phénomène des compagnies durant la Guerre de Cent Ans, voir P. Contamine, « Les compagnies d’aventure en France pendant la Guerre de Cent Ans », Mélanges de l’Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes, 1975, p. 365–396, url : http : //www.persee.fr/doc/mefr_0223-5110_1975_num_87_2_2332 et K. Fowler, Medieval Mercenaries, The Great Companies, Wiley, 2001 13. Le mythe de la croisade est diicilement entretenu par les papes d’Avignon. L’organisation d’une hypothétique expédition leur permet de lever au besoin un impôt exceptionnel sur la population de la cité, mais reste toujours sans suite. Georges Minois souligne cette perte de vitesse de l’idéal de guerre sainte au XIVe siècle : « Le fait que l’on ait songé à la croisade comme à un moyen de débarrasser l’Europe de la racaille de ses mercenaires semi-brigands montre assez à quel niveau était tombé l’idéal de la guerre sainte » Minois, Du Guesclin, op. cit., § Les dessous d’une étrange croisade. C’est efectivement le souhait de Charles V que de proiter de cette noble entreprise ain de débarrasser le territoire des grandes compagnies.
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Tribulations en Espagne
faire pression au sud sur les Anglais et d’utiliser l’importante lotte castillane sur les côtes atlantiques. Henri de Trastamare correspond parfaitement au proil 14 .
Pierre de Castille ou l’inévitable éviction A la tête de la plus grande province d’Espagne depuis 1350, Pierre de Castille ne fait pas l’unanimité chez ses pairs. En efet, l’impopularité du souverain est grandissante, particulièrement auprès de la couronne de France. En 1353, Pierre épouse une princesse française, Blanche de Bourbon, sœur de Jeanne de Bourbon future reine de France. Pierre se détourne de Blanche pour sa maîtresse, Maria de Padilla, et laisse la reine vivre dans un état misérable durant huit années. Elle init par être assassinée à vingt-cinq ans au château de Medina Sidonia dans des circonstances qui demeurent obscures. Ce meurtre donne au roi de France un motif suisant pour déclencher une opération militaire contre celui qu’on surnomme désormais Pierre le Cruel. La mort de la reine Blanche donne également à l’Eglise un argument de poids ain de soutenir l’intervention en Espagne. Les souverains chrétiens reprochent également à Pierre sa proximité avec les musulmans et juifs de la péninsule. Il a aidé le prince du royaume de Grenade, Mohamed, à reprendre le pouvoir des mains d’un usurpateur. Il compte parmi ses conseillers de nombreux membres de la communauté juive issus de l’élite. Une rumeur commence même à courir insinuant que le roi est lui même un juif que sa mère aurait échangé à la naissance avec la reine. Henri, bien qu’étant le ils bâtard d’Alphonse X, s’érige alors comme le rempart chrétien dont a besoin l’Espagne pour la Reconquista. Il apparaît dès lors comme le successeur légitime de son père. Chaque parti suit donc un dessein bien particulier, comme le résume G. Minois : peu à peu se tisse le réseau d’alliances et de projets qui vont déboucher sur l’expédition d’Espagne. Les détails de ces préparatifs, qui couvrent l’hiver 1364-1365 et le printemps 1365, restent obscurs. Ce qui est clair, c’est que les partenaires de l’entreprise poursuivent chacun un but diférent qu’ils espèrent atteindre par un moyen commun, 14. Pour une analyse de l’alliance franco-castillane sous Charles V voir : A. Rucquoi, « Français et castillans : une ”internationale chevaleresque” », La ”France anglaise” au Moyen Age, colloque des historiens médiévistes français et britanniques. Actes du 111e Congrès national des sociétés savantes (Poitiers, 1986), Section d’histoire médiévale et de philologie, Paris : Editions, 1988, p. 401–419.
Chapitre 1 . Bertrand et la Guerre de Cent Ans
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baptisé croisade : Urbain V veut se débarrasser des compagnies en les envoyant contre les Sarrasins de Grenade ; Charles V veut placer en Castille un allié de la France, Henri de Trastamare, pour pouvoir utiliser la lotte castillane, et cela lui permet en même temps de nettoyer le royaume de la présence des compagnies 15 . Restait à trouver un homme capable de mener ces bandes de mercenaires jusqu’en terre sarrasine.
Bertrand du Guesclin prend la tête des compagnies Le choix de Du Guesclin s’impose à Charles V. La dizaine d’années qu’il a passée à harceler les troupes anglaises à l’aide d’un groupe d’une cinquantaine d’hommes dans la forêt de Brocéliande lui confère une réputation de chef de bande. De plus, qualités précieuses aux yeux du souverain, Bertrand est dénué d’ambitions politiques qui pourraient mettre en péril le projet et il a toujours fait preuve d’une loyauté sans faille envers la Couronne. Le roi paye donc sa rançon et lui propose de diriger l’entreprise de croisade. En 1365, Bertrand obtient le ralliement des mercenaires anglais avec l’approbation du Prince Noir et à l’instigation du pape. C’est à Chalon en octobre 1365 que la jonction des anciens adversaires a lieu. Par groupe de deux cents, à la mi-novembre, ils passent les Pyrénées. La Blanche Compagnie est en route.
A la reconquête du territoire espagnol (1365-1366) Pendant que les compagnies traversent les Pyrénées par petits groupes, Henri de Trastamare a réuni ses troupes du côté de Saragosse. Ils sont rejoints en l’an 1366 par Du Guesclin après un hiver passé à ravager la Catalogne. L’avancée de la Blanche Compagnie en péninsule ibérique est fulgurante. Début mars, le soldat anglais Hugues de Calveley emmène une partie des hommes attaquer la ville de Mangallon tandis que Bertrand se dirige avec le reste vers Tudela. Les deux villes prises, les compagnies se rejoignent à Borjà et prennent le château. L’armée d’Henri se rapproche de plus en plus de Burgos. Briviesca tombe en une journée, alors que Pierre la croyait capable de tenir un an. Le 28 mars 1366, Henri entre à Burgos et y est reconnu comme le souverain légitime et est couronné roi d’Espagne. Du Guesclin est récompensé pour son aide et reçoit des terres. Il est fait duc de Trastamare et certainement roi de 15. Minois, Du Guesclin, op. cit., § Les intrigues de Pierre le Cérémonieux.
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Tribulations en Espagne
Grenade. Cependant, ni l’un ni l’autre de ces territoires ne sont en possession du nouveau souverain et Du Guesclin n’en proitera pas plus que sa terre de Longueville, naguère donnée par Charles V. Tout semble se dérouler comme prévu. Pierre est en fuite et Bertrand et ses hommes ont placé Henri sur le trône en moins d’un mois d’action guerrière. Pour encourager la poursuite des actions de son eicace capitaine, Henri lui demande de traquer Pierre jusqu’à l’élimination. Cela devrait amener Du Guesclin vers le sud, vers cette Grenade dont il vient de recevoir la couronne. Tolède se rend en mai 1366, puis Cordoue et enin Séville 16 . Du Guesclin et Henri y entrent en conquérants à la mi-juin et y séjournent jusqu’à la in août.
Pierre s’allie au Prince Noir Après avoir reçu l’assurance qu’aucune attaque ne viendrait de Lisbonne, Henri décide renvoyer les compagnies dans leurs pays respectifs. Bertrand et quelques capitaines restent cependant à son service avec cinq cents lances ain de parfaire la conquête du territoire. Il faut maintenant soumettre le Nord, notamment la Galice, toujours idèle à Pierre. Le siège de Lugo est donc décidé. La ville, défendue par Ferdinand de Castro, résiste mieux que prévu et n’est toujours pas soumise deux mois après le début des opérations. Pendant ce temps, Pierre décide solliciter l’aide d’Edouard, le prince de Galles. Ce dernier a sans doute vu là l’opportunité de reprendre la main en Castille, désormais sous domination française avec l’avènement d’Henri. Après avoir accepté d’envoyer les compagnies anglaises détrôner Pierre, il va désormais les utiliser pour lui rendre sa couronne. L’union sacrée aura été de courte durée. A l’automne 1366, pendant qu’on s’active à Bordeaux pour préparer l’expédition en Espagne, Henri doit de son côté élaborer un plan de défense de la Castille. Le seul homme de coniance qu’il lui reste est Bertrand. Le siège de Lugo est abandonné et le Breton devient le bras droit d’Henri dans l’organisation de la défense du territoire. Dès les premiers jours du mois de janvier 1367, Edouard et son armée franchissent les cols des Pyrénées et s’installent à Pampelune.
Vers la bataille de Najera Malgré les réticences de Charles V, conscient de la supériorité anglaise, le nouveau roi d’Espagne engage le combat le 3 avril 1366 dans la plaine de Najera. 16. Séville était la ville préférée de Pierre le Cruel et où il venait de terminer de se faire construire un palais à l’Alcazar
Chapitre 1 . Bertrand et la Guerre de Cent Ans
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La débâcle est complète 17 , Henri doit fuir, Bertrand est capturé et leurs troupes décimées. La couronne d’Espagne revient alors sur la tête de Pierre.
Intermèdes français : Bertrand et sa rançon Bertrand est ramené à Bordeaux par l’armée du Prince Noir. Le montant de sa rançon tarde à être ixé. Une rumeur enle : le Prince Noir aurait-il peur de son prisonnier ? Pour couper court, il aurait alors décidé de laisser Bertrand ixer son prix. Ce dernier, poussé par l’orgueil, s’auto évalue alors à 460 kilos d’or, soit trois fois plus que ce qu’il valait à Auray 18 . La somme, empruntée à Charles V, est payée par le Breton lui-même. ll est libéré le 17 janvier 1368. Il s’engage alors auprès de Louis d’Anjou et participe à la conquête de la Provence, avant de devoir repasser en Espagne avec des chefs routiers pour récupérer ses possessions qu’un procès venait d’attribuer à un chef anglais. L’aide fournie à Louis lui vaut alors une excommunication prononcée par le pape de Rome le 1er septembre 1368 contre « tous les gens de compagnies qui osent attaquer la Provence sans motif légitime et sans déclaration de guerre 19 ».
Seconde phase de la guerre d’Espagne (1368-1370) Henri a repris la conquête de la Castille, acculant Pierre au sud. Le roi de France décide de lui envoyer de l’aide en la personne de Du Guesclin. Très vite, Pierre se retrouve enfermé dans Montiel. A l’occasion d’une évasion nocturne, il est capturé et livré à son frère qui ordonne son exécution. L’Espagne tombe 17. La disproportion des pertes dans cette bataille est remarquable, comme le signale G. Minois : « Du côté franco-castillan, l’estimation la plus faible est de douze mille cinq cents morts. En tout état de cause, la bataille de Najera détiendrait un véritable record médiéval, sinon absolu, avec un rapport des pertes de l’ordre de 1/ 130 (un demi-siècle plus tard, à Azincourt, le rapport sera 1/ 30) », Minois, Du Guesclin, op. cit., § Najera (3 avril 1367). 18. G. Minois a pu retrouver le montant exact de cette rançon dans des archives : « Il s’agit bien de cent mille doublons d’or de Castille, comme le prouve le seul document oiciel à ce sujet, la lettre de Du Guesclin du 17 décembre 1367, ixant les modalités du paiement : « Cent mille doubles d’or du coin, du poids et de l’aloi qui ont eu et ont cours au dit royaume de Castille », c’est-à-dire l’équivalent de 460 kilos d’or. Nous sommes encore bien loin des deux tonnes de la rançon de Charles de Blois et des cinq tonnes de la rançon de Jean le Bon. Mais nous sommes bien au-delà des 35 kilos de la rançon d’un chevalier moyen comme Guillaume de Grainville, pris à Cocherel, et surtout cela représente le triple de la rançon du même Du Guesclin après Auray : la cote du Breton avait monté en lèche en l’espace de trois ans, dans son opinion du moins », ibid., § Qui va payer ?. 19. Cité par ibid., § Intermède provençal.
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Le connétable à la reconquête du territoire français (1370-1380)
alors déinitivement entre les mains d’Henri, eicacement secondé par Bertrand. Le capitaine refuse d’ailleurs de répondre à un appel de Charles V pour achever sa mission en Espagne. Il ne rentre en France qu’en juillet 1370 ain de rejoindre les rangs de l’armée que le duc d’Anjou prépare pour faire face aux Anglais.
1.4 | Le connétable à la reconquête du territoire français (1370-1380) Bertrand est élu connétable (2 octobre 1370) Le traité de Brétigny est rompu en 1369 quand Edouard III réairme ses prétentions au trône de France. La guerre entre les deux royaumes reprend. Elle a cependant bien été préparée par Charles V qui a proité de la longue trêve pour faire renforcer les défenses des grandes villes, particulièrement de celles de l’Ouest. Suite à la retraite du vieux connétable Moreau de Fiennes en 1369, Charles V à besoin d’un homme de coniance pour mener à bien sa politique de reconquête du territoire français. Il lui faut de surcroit un général éloigné des intrigues de famille de la haute noblesse franco-anglaise ain d’éviter toute trahison. Encore une fois, Bertrand est l’homme de la situation. Sa loyauté n’est plus à prouver et son origine modeste le place loin des intrigues des plus grands. Ce choix fait l’unanimité lors de l’élection par le Grand Conseil du souverain le 2 octobre 1370. Cette nomination donne un élan nouveau aux combats et constitue le point d’orgue de la nouvelle stratégie du camp français.
La stratégie de reconquête 1370-1372 Usant tantôt de ruse 20 , tantôt de tactiques militaires plus classiques 21 , Bertrand, secondé par une poignée d’hommes 22 , sillonne pendant deux ans l’Ouest 20. Le 4 décembre 1370, il attaque avec son armée un groupe d’Anglais avec à leur tête Thomas de Grandson resté à l’arrière de la chevauchée menée par Robert Knollys dans l’Ouest du pays. Surprenant les Anglais qui pensait Du Guesclin à des dizaines de kilomètres, l’armée française remporte une franche victoire et plus de quatre-vingt capitaines anglais sont capturés, dont Thomas de Grandson lui-même. 21. Citons par exemple le siège de Beschrel en 1371 qui dure quinze mois et nécessite la mobilisation d’impotants moyens humains et inanciers. 22. Les historiens pensent en efet que Bertrand disposait de moyens très limités pour mener à bien sa mission. Pour la reconquête de l’Ouest du territoire, il est accompagné de seulement
Chapitre 1 . Bertrand et la Guerre de Cent Ans
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de la France. Il reprend aux Anglais la Loire, le Maine, l’Anjou (Poitiers tombe en 1372), une partie de la Normandie, puis enin La Rochelle. Il donne ainsi à la France un port équivalent à celui de Bordeaux, alors aux mains des Anglais. La mission de Bertrand est un succès. Il est accueilli par un véritable triomphe lors de son retour à Paris le 11 décembre 1372.
Retour en Bretagne En 1373, le problème breton refait surface. Jean IV, duc depuis 1364, a des mœurs un peu trop anglaises pour la noblesse bretonne. Il a épousé successivement deux anglaises et son conseil se compose pour moitié de lords. Or, les seigneurs bretons penchent plutôt du côté français. Olivier de Clisson, un des plus puissants nobles de la région, a rejoint le clan de Du Guesclin lorsque celui-ci a été élu connétable. Avec la reprise des afrontements entre Charles V et Edouard III, Jean IV est forcé de se prononcer en faveur d’un ou l’autre. De plus, un accord secret entre Jean IV et Edouard III est mis au jour par l’armée française. Il n’en faut pas plus à Charles V pour décider d’entrer en guerre contre ce vassal. Lâché par les seigneurs bretons, Jean doit s’exiler en Angleterre le 28 avril 1373. Bertrand reprend alors sa reconquête du territoire, se tourne vers le Sud et Toulouse, puis vers l’Aquitaine. Une paix relative est instaurée en 1374 23 . Elle dure trois ans. En 1377, les Français, proitant des décès successifs du Prince Noir et d’Edouard III, reprennent les hostilités. La Bretagne tombe à l’exception de Cherbourg. C’est donc devant un tribunal qu’achève de se jouer le combat du duché.
1.5 | Derniers combats et mort du connétable (13791380) quelques centaines d’hommes. Voir Minois, Du Guesclin, op. cit., § La victoire de Pontvallain. 23. Sur cette trêve et le passage de Bertrand dans le Périgord voir M. C. E. Jones, « Bertrand du Guesclin, the truce of Bruges and campaigns in Périgord (1376) », Soldiers, Nobles and Gentlemen, sous la dir. de Peter COSS and Christopher TYERMAN, Woodbridge, Sufolk : Boydell Press, 2009, p. 183–197.
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Derniers combats et mort du connétable (1379-1380)
Le litige breton Le parlement et la Cour des pairs de Paris prononcent la déchéance de Jean IV de Bretagne pour crime de lèse-majesté et la coniscation de ses biens au proit de la couronne de France. L’ambivalence entretenue par le duc entre les camps français et anglais lui a inalement desservi. Or, cette coniscation est mal perçue par Jeanne de Penthièvre, qui revendique le duché au nom de son défunt mari Charles de Blois. Ses objections, pourtant légitimes aux vues du droit féodal, sont toutefois rejetées par la cour. Les notables bretons sont également contre un rattachement du duché au royaume de France, et se retournent contre la Couronne au proit de ce même Jean IV qu’ils venaient de faire destituer Charles V décide alors de convoquer ses barons d’origine bretonne ain de connaître leur position. Bertrand du Guesclin, Olivier de Clisson, le vicomte de Rohan et le sire de Laval sont consultés. Entre ses origines bretonnes et son seigneur français, Bertrand choisit. Il renouvelle son attachement inconditionnel au roi. Cependant, il n’est pas suivi par tous les comtes de son lignage et se retrouve dans une position fâcheuse, écartelé entre liens de sang et lien vassalique. Il se fait alors discret et observe la nouvelle donne en Bretagne et le retour de Jean IV. Mais cette relative et inhabituelle inactivité de sa part semble suspecte depuis Paris : le connétable aurait-il rallié l’autre camp ? Sa idélité fait l’objet de débat à la Cour de Paris. Il est sauvé par le duc d’Anjou, frère du roi mais surtout frère d’armes de Bertrand, qui se porte garant de sa loyauté indéfectible envers la Couronne. Charles V le charge de rester en poste d’observation dans les environs de Saint-Malo ain d’être au courant des agissements de Jean IV. Il y demeure jusqu’en 1380.
Dernière mission en Auvergne (1380) Au printemps 1380, Charles V charge Bertrand d’engager des troupes en Auvergne contre les Anglais. Le connétable a soixante ans 24 . L’armée française s’installe devant Chateau-Neuf-de-Randon le 1er juillet 1380. Le 7 juillet, Bertrand tombe gravement malade. La tradition veut que ses symptômes apparaissent après l’absorption d’une eau de source trop froide par le connétable par un jour de grande chaleur. Dysenterie ou conjonction pulmonaire, Bertrand est au plus mal et fait venir un notaire ain de lui dicter son testament. 24. Peu de guerriers se retirent de la vie militaire. Chandos et Audrehem sont tous deux morts au combat septuagénaires quelques temps avant Bertrand. Minois, Du Guesclin, op. cit., § La mort du connétable.
Chapitre 1 . Bertrand et la Guerre de Cent Ans
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Il y stipule sa volonté d’être enterré à Dinan dans le caveau familial, lègue de l’argent aux églises de ses domaines pour que l’on prie pour lui et, sans héritier direct, il cède tous ses biens à un petit-cousin. Il décède le 13 ou le 14 juillet 1380.
Les quatre sépultures du connétable La dépouille mortelle de Bertrand est d’abord exposée à l’église des dominicains du Puy jusqu’au 23 juillet 1380. Une fois l’oraison funèbre prononcée, on pratique l’éviscération et l’embaumement. Ses viscères sont enterrés au Puy dans un tombeau recouvert d’un gisant représentant le connétable. Le 28 juillet, le corps arrive à Montferrant où il est exposé dans l’église. Cependant, l’embaumement a été mal réalisé et, sous la chaleur de l’été, ce qui reste des chairs du défunt commence à pourrir. On décide alors de faire bouillir le corps pour séparer les os et les chairs. Ces dernières sont enterrées sur place, mais les os du chevalier continuent leur périple. Arrivé au Mans, le cortège reçoit un message de Charles V. Le roi propose que le connétable soit enterré à Saint-Denis tout près de sa propre tombe. Ceci fait opposition au souhait du connétable. On tranche alors encore Du Guesclin en deux : son cœur est placé à l’église des jacobins de Dinan et ses os sont enterrés dans la nécropole de Saint-Denis 25 .
1.6 | Bertrand en nature, Bertrand en peinture Ces données ont été collectées dans diférentes biographies historiques consacrées au connétable, en particulier dans les travaux de Georges Minois et Thierry Lassabatère 26 . Cependant, ce travail de recherche s’avère diicile, car comme le dit Michael C. E. Jones : No modern scholary biography of the constable exists 27 . En efet, les diférentes études portant sur la vie du connétable s’appuient par moments, voire entièrement sur des éléments répandus par les chroniques et 25. Au sujet de la séparation des restes de Du Guesclin voir M. de Mauny, « La quadruple inhumation de Bertrand du Guesclin », Société d’émulation des Côtes-du-Nord. Bulletin et mémoires 112, 1983, p. 44–56. 26. G. Minois, Du Guesclin, Fayard (version Kindle), 1993 et T. Lassabatère, Du Guesclin, vie et frabrique d’un héros médiéval, Perrin, 2015. 27. « Il n’existe aucune biographie scientiique récente sur la vie du connétable » Jones, Letters, Orders and Musters of Bertrand Du Guesclin, 1357-1380, op. cit., p. xviii.
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Bertrand en nature, Bertrand en peinture
textes littéraires médiévaux 28 . Les documents d’archives sont pourtant nombreux, comme nous montre la publication de M. E. C. Jones consacrée à l’édition d’une partie de ceux-ci 29 . Comme c’est le cas pour beaucoup d’hommes et de femmes du Moyen Age, nous ignorons complètement ce qu’a pu être la jeunesse de Bertrand du Guesclin. Aucun document ne le mentionne avant son entrée au service de Charles de Blois en 1357 30 . Pourtant, toutes les biographies font la part belle à ses premières années en s’appuyant sur le récit de Cuvelier, le seul à donner des indications sur cette période de la vie du chevalier. C’est lors du récit de cette enfance que le texte rapporte que Bertrand : Le sauf conduit a prins, si le fait recorder car lyre ne savoit ne escrire ne compter. (1600-1601) Or, ces vers ont tout de suite été pris pour argent comptant par les biographes qui ont conclu à un illettrisme certain du connétable 31 , étant incapable de lire les missives reçues ou de signer ses propres courriers. Evidemment, qu’un chevalier du Moyen Age issu de la petite noblesse ne sache ni lire ni écrire, il n’y a pas de quoi s’en étonner 32 . Les travaux sur les documents historiques tendent cependant à remettre en cause ce fait considéré comme faisant partie intégrante du portrait du connétable. L’analyse des signatures de Bertrand présentes sur les documents d’archives mène M. C. E. Jones a conclure que : What the evidence does conirm, however, is that Cuvelier’s view that the Constable was completely illiterate is clearly false. It also demonstrates that his practice evolved over time : rarely using a signature prior to his second Spanish expedition in 1369-70, as Constable, his 28. L’ouvrage de M. Vernier, publié en 2003 et retraçant la vie du connétable, repose uniquement sur les informations fournies par les chroniqueurs médiévaux, R. Vernier, The Flower of Chivalry : Bertrand Du Guesclin and the Hundred Years War, Boydell Press, 2007. 29. M. C. E. Jones, Letters, Orders and Musters of Bertrand Du Guesclin, 1357-1380, Woodbridge : Boydell Press, 2004. 30. Ibid., n°1 p.1. 31. Georges Minois, par exemple, qualiie Bertrand de « brute illettrée » ou encore d’« écuyer laid comme un cauchemar, grossier et illettré » dans son livre Minois, Du Guesclin, op. cit., § Le duel de Dinan et l’apparition de Tiphaine. 32. Pour une analyse du niveau d’alphabétisme au sein de l’armée à la in du Moyen Age voir P. Contamine, « L’écrit et l’oral en France à la in du Moyen Age. Note sur l”alphabétisme de l’encadrement militaire », Histoire comparée de l’administration (IVe–XVIIIe siècles). Actes du XIVe colloque historique franco-allemand de l’Institut Historique Allemand de Paris, 1980, p. 102–113.
Chapitre 1 . Bertrand et la Guerre de Cent Ans
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letters were not only signed by a secretary but also not infrequently bore his sign manual as additional authority 33 . Cette analyse est à mettre en regard avec le témoignage d’Olivier du Guesclin, frère de Bertrand, qui, en 1390, s’oppose dans une afaire judiciaire à un seigneur espagnol lui réclamant de régler des prêts obtenus par son frère alors décédé. Olivier airme que son frère : n’avoit acoustumé de faire aulcunes obligations que il n’i mist sa main et le seing de son secrétaire 34 . Cet autographe du connétable n’étant pas présent sur les reconnaissances de dettes le mentionnant, le tribunal conclut en faveur d’Olivier. L’analphabétisme de Bertrand défendu par Cuvelier est donc un fait que l’analyse des archives historiques permet de remettre en question. Pour autant, est-il nécessaire de confronter les vers de ce poème de la in du XIVe siècle avec la réalité historique ? Les informations contenues dans ce texte ne sont-elles pas plutôt à mettre en regard avec les postulats littéraires de son temps ? Analyser le texte de Cuvelier en perspective avec les idées littéraires de l’époque et non avec les données historiques du personnage permet certainement de mieux l’éclairer. La question de l’alphabétisation des combatants est au cœur de la production d’Eustache Deschamps, poète de la in du XIVe siècle et qui a écrit de nombreux textes célébrant le connétable. Le titre de sa ballade 401, chevaliers ont honte d’estre clers, ou bien encore un des titres de chapitre du Miroir de mariage s’intitulant « chevalerie est aujourd’hui destructe parce qu’elle het l’étude » sont révélateurs de la position du poète. Il défend dans ses écrits la thèse selon laquelle le manque de savoir conduit à la déchéance de la société. Pourtant, Bertrand est le chevalier qu’il estime digne d’être un modèle pour les hommes de son temps 35 . Le portrait du héros inculte dessiné par Cuvelier s’oppose alors à celui 33. « Pourtant, ce que les preuves conirment, c’est que la vision de Cuvelier sur l’illettrisme complet de Bertrand est totalement fausse. Cette analyse démontre également que ses pratiques ont évolué avec le temps : alors qu’il utilise rarement une signature avant la seconde expédition espagnole en 1369-80, en tant que connétable, ses lettres sont non seulement paraphées par un secrétaire mais également très fréquemment signées de sa main comme un gage d’autorité supplémentaire. Jones, Letters, Orders and Musters of Bertrand Du Guesclin, 1357-1380, op. cit., p. xxxviii. 34. Contamine, « L’écrit et l’oral en France à la in du Moyen Age. Note sur l”alphabétisme de l’encadrement militaire », op. cit., p. 105. 35. La place que tient Bertrand au sein de la production d’Eustache Deschamps est analysée par J. P. Boudet dans l’ouvrage suivant : J. P. Boudet, H. Millet et K. Becker, éds., Eustache Deschamps en son temps, Publications de la Sorbonne, 1997, p. 55-61.
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Bertrand en nature, Bertrand en peinture
du parangon de la chevalerie présent dans les écrits de Deschamps, mais jamais Eustache Deschamps ne s’oppose à la personne réelle qu’a pu être Bertrand, pas plus que Cuvelier ne cherche à s’accorder avec elle. La production écrite autour de la igure du connétable est, dès les premiers témoins, une afaire de construction littéraire avant d’être un témoignage historique. Et cette légende naît du vivant même du connétable.
Les clés médiévales de la renommée
2
S
i les appuis du connétable cherchent à le magniier à travers sa renommée, ce n’est pas dans une perspective historique mais dans une optique de création. En efet, la renommée est une parole fondatrice, mais avant tout créatrice 1 . Nous avons vu plus haut combien il était dangereux de chercher des réponses dans les textes littéraires aux questions historiques autour de la igure du connétable. C’est bien parce qu’ils s’attachent à déinir la renommée de Bertrand que ces textes ne nous présentent aucunement une igure historique. Le renom qui colle à Du Guesclin vient s’ajouter, voire se substituer, à la personne même qu’a pu être Bertrand dans la réalité. Le Bertrand que nous connaissons aujourd’hui, et même que les contemporains ont connu à travers les textes littéraires, est résolument un autre 2 . Même si son nom est resté le même, la renommée fait de lui quelqu’un de diférent. Alors, pour analyser la spéciicité des textes contenus dans le manuscrit A, il faut d’abord s’interroger sur leur contexte de production et leur donner une place dans la vaste production littéraire défendant la renommée de Bertrand. Quels sont les circonstances qui ont vu naître sa légende ? Quels sont les médias qui ont permis la naissance de cet alter-ego ? Qui sont les gardiens de la lamme bertrandienne ?
2.1 | Une renommée entretenue du vivant 2.1.1
|
Bertrand et ses scribes
Certains historiens considèrent que le principal moteur de la renommée de Bertrand est Bertrand lui-même 3 . La source de cette airmation est encore une fois un passage du poème de Cuvelier où le jeune chevalier indique son désir 1. Comme le souligne C. Gauvard : « La renommée est essentielle à la constitution de l’individu. Elle vient prendre place à côté du nom pour déinir l’identité », Gauvard, « La Fama, une parole fondatrice », op. cit., p. 11. 2. Comme le précise C. Gauvard : « De tels modes de reconnaissance ne peuvent s’exercer que dans une société qui accorde une place prépondérante à la parole, une parole qui n’est pas seulement un outil destiné à transmettre un message, mais qui, fondatrice, crée un état. », ibid., p. 11–12. 3. B. Guenée, Du Guesclin et Froissart : la fabrication de la renommée, Taillandier, 2008.
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Une renommée entretenue du vivant
d’entretenir une horde de ménestrels ain qu’ils chantent ses hauts faits 4 . Aucune archive ne prouve que le connétable pratiquait le mécénat. Cependant, l’analyse des documents oiciels révèle une information importante : After his appointment as Constable, Du Guesclin had his own secretariat, which seems to have been stafed normally by three or four full-time clerks. [...] One Guillaume Regnault, served him throughout his Constableship as a clerk and secretary. Pierre de Voisins (1370-7), Jean Mauvoisin (1370-4) and Jean Le Page (1370-9) served continuously for several years. [...] and there is some evidence to suggest Le Page had been acting as head of the secretariat for some years before this date : in Spain in 1367 5 . Si Bertrand n’entretenait pas des ménestrels, il est clair qu’il payait des scribes ain de gérer sa correspondance. Il est diicile d’obtenir des informations sur ces personnages qui ont suivi le chevalier lors de ses pérégrinations. Jean Le Page semble être le plus idèle mais également le plus lettré puisqu’il a obtenu entre 1372 et 1373 un diplôme d’université 6 . Aucune preuve ne peut laisser entendre que ces scribes ont participé à la légende du connétable. Ce qui est sûr, c’est que Bertrand a été, au moins depuis la période espagnole, entouré de clercs capables de coucher sur papier des informations le concernant à mesure du déroulement des événements. De là est peut-être née l’idée que le breton rémunérait quotidiennement des ménestrels ain de propager sa geste. Ces écrits oiciels ont pu constituer une base de travail pour les poètes s’intéressant dès les années 1370 à la igure de Bertrand. C’est peut-être le cas d’Eustache Deschamps, le poète-fonctionnaire, qui a été l’un des premiers hommes de lettres à composer des vers à la gloire du breton juste après l’élection de ce dernier au poste de connétable. 4. Voir les vers 337-340 de notre édition. 5. « Après avoir été élu connétable, Du Guesclin eut son propre secrétariat, où, semblet-il, travaillaient d’ordinaire à plein temps trois ou quatre clercs. (...) L’un d’eux, Guillaume Regnault, l’a servi pendant toute la durée de son mandat de connétable en tant que clerc et secrétaire. Pierre de Voisins (1370-7), Jean Mauvoisin (1370-4) et Jean Le Page ont été à son service sans discontinuité pendant plusieurs années. (...) et des indices suggèrent même que Le Page était le secrétaire en chef quelques années auparavant : en Espagne en 1367. », Jones, Letters, Orders and Musters of Bertrand Du Guesclin, 1357-1380, op. cit., p. xxxvi. 6. Ibid., p. xxxvi.
Chapitre 2 . Les clés médiévales de la renommée
2.1.2
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Eustache Deschamps et le milieu orléanais
Eustache Deschamps, poète proliique de la in de XIVe siècle, est un des premiers a écrire des textes célébrant le connétable du vivant même de celui-ci. Eustache Morel, dit Deschamps, est plus jeune que Bertrand du Guesclin. Il est né autour de 1340 à Vertus en Champagne 7 . Très jeune, dans les années 1350, il rencontre le poète Guillaume de Machaut dont il se dira avoir été nourry 8 . Il engage en 1356 des études de droit à l’université d’Orléans qu’il termine en 1366. Deschamps connaît une carrière professionnelle de haut fonctionnaire royal. Il entre au service des comtes de Vertus entre 1366 et 1368. Il passe ensuite au service de l’hôtel royal en tant qu’huissier d’armes en 1368. En 1375, il devient bailli de Valois et sert Philippe d’Orléans, frère du roi de France Jean le Bon. A la mort de Charles V en 1380, il reste un serviteur de la cour de Charles VI, très proche des Marmousets. Il est nommé en 1389, après le retour de ceux-ci à la cour, bailli de Senlis. De 1393 à 1404, on le trouve au service de Louis d’Orléans, ils de Charles V, personnage dont il a toujours été proche même avant d’entrer à son service. Son décès survint entre 1404 et 1405. C’est à ce moment là que les Marmousets réunissent ses œuvres et les font copier dans ce qui est l’une des premieres compilations d’auteur français conservée : le manuscrit 840 de la bibliothèque nationale de France, copié par un certain Raoul de Tanguy. Au cours de sa carrière d’écrivain, Eustache Deschamps a rédigé plus d’une dizaine de pièces lyriques célébrant la personne du connétable. Ces œuvres sont les suivantes : ballades 206, 207, 222, 239, 1125, XXVIII, XXIX, LXIX, LXX, LXXI ; lai 313 ; rondeau 652, chant royal 362 9 . 7. Pour une étude de la biographie d’Eustache Deschamps ainsi que de sa production, voir Boudet, Millet et Becker, Eustache Deschamps en son temps, op. cit. L’intégralité de ses œuvres a été éditée au XIXe siècle dans l’ouvrage suivant : A. H. É. de Queux de SaintHilaire et G. Raynaud, éds., Oeuvres complètes de Eustache Deschamps, Publications de la Société des anciens textes français, Paris : Firmin Didot & cie, 1880. Plus récemment est parue une anthologie dédiée au poète : C. Dauphant, éd., Eustache Deschamps - Anthologie, Paris : Le Livre de Poche, 2014. 8. Queux de Saint-Hilaire et Raynaud, Oeuvres complètes de Eustache Deschamps, op. cit., ballade 447. 9. La numérotation en chifres arabes correspond à celle attribuée aux poèmes par le comte de Sainte-Hilaire dans son édition du manuscrit 840 de la BnF (idem, Oeuvres complètes de Eustache Deschamps, op. cit.). La numérotation en chifres romains correspond aux œuvres attribuées à Eustache Deschamps par G. Raynaud dans le dixième volume de l’édition des œuvres complètes du poète : A. H. É. de Queux de Saint-Hilaire et G. Raynaud, éds., Oeuvres complètes de Eustache Deschamps, t. 10, Publications de la Société des anciens textes français, Paris : Firmin Didot & cie, 1880. La liste des poèmes concernant le connétable est
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Une renommée entretenue du vivant
Trois de ces pièces ont été composées du vivant de Bertrand. La ballade 222, la plus ancienne, date de 1372, le chant royal 362 a été composé en 1373 et la ballade 239 avant 1380 10 . Deschamps écrit ces poèmes au moment où il rentre au service de Philippe d’Orléans, frère du roi Jean le Bon. Il est certain que la considération du duc d’Orléans pour Bertrand était très grande. Comme le signale Raymond Cazelles : On dit que c’est le dauphin 11 qui s’est avisé le premier de la valeur du chevalier breton et que c’est à lui qu’il doit sa carrière. Il n’en est rien. Ce n’est pas tant le futur Charles V qui donne à Bertrand, le 6 décembre 1357, une rente de deux cents livres que le Conseil qui agit en son nom. Ce n’est pas lui non plus [...] qui lui accorde la seigneurie de La Roche-Tesson, mais le duc d’Orléans. Lorsqu’il est fait prisonnier au Pont-de-Juigné, à la in de décembre 1360 ou au début de 1361, ce n’est pas le dauphin qui l’aide à régler sa rançon mais le duc d’Orléans, Charles d’Alençon et le roi Jean 12 . De plus, un document d’archives du 8 février 1361 accordant à Bertrand un saufconduit pour se rendre en Angleterre présente le Breton, alors au tout début de sa carrière militaire, comme étant un familiaris ducis orliens 13 . Philippe d’Orléans est donc le seigneur de Bertrand dans les années 1360 et il constitue un appui notable pour le chevalier en cas de problèmes. Un autre duc d’Orléans le suit dans cette voie : il s’agit de Louis d’Orléans, ils de Charles V. Bertrand l’a tenu sur les fonts lors de son baptême le 15 mars 1372 14 . Louis devient à la in du XIVe siècle un des plus ardents propagateurs de la légende du connétable et va jusqu’à installer une statue du chevalier dans sa galerie des preux au château de Coucy 15 . La légende semble donc germer vers les années 1370 dans l’entourage des ducs d’Orléans, dans un cercle très proche du roi mais jamais directement en lien avec lui. La récupération politique ne se fait cependant pas attendre longtemps. donnée dans l’ouvrage suivant : Boudet, Millet et Becker, Eustache Deschamps en son temps, op. cit., p. 58. 10. Ibid., p. 58. 11. Il s’agit ici de Charles V, encore duc de Normandie. 12. R. Cazelles, Société politique, noblesse et couronne sous Jean le Bon et Charles V, Genève : Droz, 1982, p.450. 13. Jones, Letters, Orders and Musters of Bertrand Du Guesclin, 1357-1380, op. cit., p. 3, document n° 11. 14. Minois, Du Guesclin, op. cit., § Montcontour et Sainte-Sevère. 15. Boudet, Millet et Becker, Eustache Deschamps en son temps, op. cit., p. 59.
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Charles V et plus encore son ils Charles VI vont donner l’impulsion nécessaire à la difusion massive de l’image du « bon Breton » 16 . Côté littérature, c’est après la mort de Bertrand qu’apparaissent des textes plus longs ain de célébrer sa mémoire. Entre 1380 et 1385 17 , un certain Cuvelier compose un texte de près de 23000 vers rassemblant les éléments de la vie du connétable. Qui a été cet homme lettré qui s’est intéressé à la vie de Bertrand ? Si il est encore diicile de le déinir avec précision, de nouvelles données permettent d’avancer de nouvelles hypothèses.
2.2 | La question Cuvelier Les travaux de J.C. Faucon ont permis de déinir les contours du portrait de Cuvelier. Voici sa conclusion : Tout ce que nous pourrions ajouter sur Cuvelier se déduit de son œuvre : c’était probablement un clerc, assez proche de la cour, sachant habilement ménager les susceptibilités des grands et utiliser des témoignages directs et originaux sur Du Guesclin. L’étude des traits de langue non susceptibles de relever du copiste pourrait nous indiquer une origine picarde, d’autant plus que le nom de Cuvelier est répandu dans les textes du Nord, [...]. Sa culture est assez étendue, mais il connaît particulièrement les œuvres épiques de son temps, dont certaines durent être écrites dans un milieu très proche du sien 18 . Des recherches dans diférentes archives ont permis à J. C. Faucon d’isoler plusieurs personnalités pouvant correspondre au faiseur de vers du poème. D’abord, on trouve dans un chansonnier du XVe siècle plusieurs pièces attribuées à un certain Jo Cuvelier 19 . Ensuite, un poète nommé Jacquemart Cuvelier apparaît 16. Pour l’analyse de la récupération politique de Bertrand par les rois de France voir F. Autrand, Charles V : le Sage, Fayard, 1994, p. 576-580 et 605-612 et F. Autrand, Charles VI : la folie du roi, Fayard, 1986, p. 225-227 17. Ces bornes chronologiques sont déinies grâce à deux éléments : la date de 1380 correspond à la mort de Bertrand, la date de 1387 est celle de l’achèvement de la première mise en prose du texte de Cuvelier par Jean d’Estouville. 18. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin, op. cit., p. 36-37. 19. Paris, Musée de Condé, ms. n°564 (ancien 1047). Pour l’édition et l’étude des pièces attribuée à Jo Cuvelier dans ce recueil voir ibid., p. 23-32.
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La question Cuvelier
dans un mandement de 1380 citant plusieurs ménestrels de Charles V 20 ainsi que dans l’œuvre médiévale intitulée Les Règles de la seconde rhétorique 21 . Dans cette dernière, l’auteur du traité cite parmi des rhétoriqueurs célèbres un certain : Jaquemart le Cuvelier, de Tournay, qui fut faiseur du roy de France, Charles le Quint 22 . Le plus troublant est de trouver dans ce même texte une version d’un prologue de La Chanson de Bertrand du Guesclin cité en exemple de « rime alexandrine pour faire rommans ». Toutefois, comme le remarque J. C. Faucon, il est nécessaire de ne pas faire trop vite le lien entre le Cuvelier présent au début du texte et cette laisse, les auteurs cités n’étant pas forcément pris pour exemple dans les parties du traité 23 . Cela dit, les données récoltées permettent de distinguer l’origine géographique de l’auteur du poème épique dédié à Bertrand : le nord de la France. Une plongée dans les archives de cette région nous permet d’émettre de nouvelles hypothèses quant à l’identité possible du poète. Le patronyme Cuvelier est en efet très présent dans le nord de la France médiévale. On trouve dans le répertoire des archives de l’actuel département du Nord 24 plusieurs personnes dont le proil pourrait correspondre à celui de l’auteur du long poème épique consacré au connétable. Le répertoire de la série G des archives anciennes du clergé séculier fait état de trois Cuvelier ayant vécu entre 1360 et 1390 : Jean, Jacques et Gilles. 25 . Le candidat qui semble l’emporter est Jacques le Cuvelier.
2.2.1
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Sur la piste de Jaques
Jacques est mentionné à plusieurs reprises dans les archives de la région lilloise 26 . Ces documents conirment que Jacques ou Jaquemes le Cuvelier était présent dans la région de Lille jusqu’au milieu des années 1370. Le plus intéressant reste son statut. Il est qualiié plusieurs fois de bailli de monseigneur le cardinal 20. L’original de ce mandement reste toutefois introuvable. Il est cité par comme étant extrait du manuscrit BnF, fr 2667. Cependant, cette référence est celle d’un codex contenant les Chroniques de Froissart. Voir ibid., p. 32, note 26. 21. E. Langlois, Recueil d’arts de seconde rhétorique, Collection de documents inédits sur l’histoire de France, Imprimerie nationale, 1902. 22. Ibid., p. 13. 23. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin, op. cit., p. 33. 24. http://www.archivesdepartementales.lenord.fr, consulté le 05/10/2015 25. Voir annexe A.1, p. 275. 26. Voir annexe A, p. 276.
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de Pampelune. Ce cardinal n’est autre que Pierre de Monteruc, nommé à ce poste le 20 novembre 1355 par Innocent IV, et prévôt de Saint-Pierre de Lille depuis les années 1350. Il fut un personnage assez inluent à la in du XIVe siècle, particulièrement au moment du schisme de 1378, comme le précise Jaques Verger dans un article consacré au cardinal : La rumeur absurde qui circula à Florence en 1378, selon laquelle « le roi de France venait de proclamer pape le cardinal de Pampelune », montre bien que pour l’opinion du temps Pierre de Monteruc était une des igures marquantes du Sacré Collège, mais aussi un adversaire résolu du retour en Italie 27 . Le cardinal est également un proche de la famille royale française 28 . Il aurait donc très bien pu conseiller au jeune roi ainsi qu’aux régents de prendre contact avec Jacques Cuvelier, son représentant et homme de coniance dans la région lilloise, ain de pouvoir installer l’armée sur place lors de la campagne en Flandres de 1382 29 . Il est diicile de savoir si Jaquemes le Cuvelier était toujours présent dans la région à ce moment là car les archives consultées ne mentionnent plus son nom à partir de 1374. Peut-être avait-il déjà changé de région pour rejoindre la cour de France ? Si la position du bailli est intéressante, sa disparition des documents oiciels nous empêche de voir directement une trace de l’auteur du poème. D’autres documents d’archives mentionnent Jacques Cuvelier dans un autre contexte. Il s’agit des documents de l’enquête pontiicale de 1373 sur l’ordre des hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem 30 . On y trouve Jacques cité deux fois : — Item, pour la pencion de Jaques le Cuvelier, conseiller de l’Ospital es parties de Flandres, en la chastellerie de Lille et d’environ et pour 27. J. Verger, « L’entourage du cardinal Pierre de Monteruc (1356-1385) », Mélanges de l’Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes, 1973, p. 515–546, url : http : //www.persee.fr/doc/mefr_0223-5110_1973_num_85_2_2294, p. 519. 28. Ibid., p. 519. 29. On trouve une autre mention d’un Cuvelier dans l’entourage des cardinaux limousins d’Avignon. Un certain Jean le Cuvelier, dit Bequet est cité comme étant un dilecti, un « protégé », du cardinal-évêque Jean de Cros (A. Courtel, « Les clientèles des cardinaux limousins en 1378 », Mélanges de l’Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes, 1977, p. 889– 944, url : http://www.persee.fr/doc/mefr_0223-5110_1977_num_89_2_2428, p. 895). Mais cette piste n’est pas plus fructueuse que les autres. 30. Tous ces documents ont fait l’objet d’une édition dans l’ouvrage suivant : J. Glénisson et A. M. Legras, L’enquête dans le prieuré de France, Documents, études et répertoires Institut de recherche et d’histoire des textes, Editions du Centre National de la Recherche Scientiique, 1987.
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La question Cuvelier
les pencion que li Hospital y a, 100s. par an, monnoie de Flandres, qui vallent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2fr. 3 quars 31 Jaques cumulait donc plusieurs postes, de bailli du cardinal à conseiller des hospitaliers. Son ailiation avec cet ordre pourrait expliquer la place que prend dans le texte l’épisode espagnol défendant l’idée de la nécessité d’une nouvelle croisade, si tant est qu’il en soit l’auteur. Jacques est également mentionné dans les suppliques et lettres de Clément VII, pape d’Avignon de 1378 à 1394 32 : 1. 1383, 27 juin Johanni Boit confertur parr. eccl. de Ramegnies. Ternacen. dioc. vac. per obit. apud romanam curiam Jacobi Guniberti, alias Cuvelier. Petri Sancte Marie in Via lata diac. card. famil 33 . 2. 1393, 15 mars Decano eccl. S. Petri Arien.. Morinen. dioc.. mandatur. quatenus Jacobo Le Cras. presb. can. eccl. Falcobergen.. de parr. eccl. de Renty. ejusdem dioc. vac. per obit. extra romanam curiam Jacobi Le Cuvelier, provideri faciat 34 . Ces deux suppliques traitent de la mort de Jacob Cuvelier. Cependant, ces mentions semblent faire référence à deux clercs diférents. Le premier, Jacob Gunibert, n’est certainement pas le même Jacques que nous avons suivi dans les archives du Nord. En efet, le patronyme Cuvelier est pour lui un surnom et non pas un nom si l’on en croit le terme d’alias employé par le copiste, contrairement à Jacques Le Cuvelier dont le deuxième nom n’est jamais identiié comme un cognomen. Cet argument est cependant assez ténu pour airmer qu’il s’agit là de deux personnages diférents, compte tenu de la luctuation médiévale de la notation de la dénomination. Un autre élément permet d’airmer qu’il est question dans ces mentions de deux personnages distincts. Le premier, Jacques Gunibert, a oicié de son vivant apud romanam curiam ; le second, Jacques le Cuvelier, extra romanam curiam. 31. Ibid., p. 287 et p.372. 32. Un autre Cuvelier est également cité dans une supplique datée du 17 février 1387 : « Clementi le Cuvelier, alias Becquet, cler. Cameracen. dioc. de ben. eccl. ad coll. eccl. S. Petri Duacensis aut B. Marie de Lenso. Atrebaten. dioc. dignemini providere ». K. Hanquet et al., Documents relatifs au grand schisme : Suppliques et lettres de Clément VII (1379-1394), vol. 3 ;vol. 13, Institut historique belge, 1934, n° 1227, p. 225. La même supplique datée du 2 avril 1387 (n°1249) se trouve à la page 231. 33. Ibid., n° 593, p. 488. 34. Ibid., n° 2326 p. 760.
Chapitre 2 . Les clés médiévales de la renommée
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En cette première période du Grand Schisme d’Occident, le premier sert le pape de Rome, le second le pape d’Avignon. Il ne peut donc s’agir ici d’une seule et même personne. De plus, dix ans séparent ces deux références. Il est peu probable que les charges laissées vacantes à la mort du premier n’aient été attribuées qu’une dizaine d’années plus tard. Nous avons vu plus haut que le Jacques qui nous occupe avait tissé des liens très étroits avec le milieu avignonnais. Il est donc presque certain qu’il est celui qui est cité dans la supplique du 15 mars 1393. A travers ce voyage archivistique, le portrait de Jacques le Cuvelier se dessine maintenant plus précisément. Il est un prétendant sérieux au titre de compositeur du texte pour de nombreuses raisons. Il est tout d’abord un homme qui a reçu une éducation certaine ain de pouvoir exercer les fonctions qu’il occupe. Par son titre de bailli, il exerce une activité similaire à celle d’Eustache Deschamps dont on connait l’immense production. Ce titre lui permet d’être en contact avec les grands de son époque, dont le duc de Bourgogne. Sa mention dans les suppliques permettrait de dater sa mort en 1393, soit dix ans après l’apparition des premiers manuscrits en vers traitant du connétable, ce qui lui laisse assez de temps pour composer le texte. Cependant, il y a tout de même un argument en défaveur de Jacques le Cuvelier. Les liens du personnage avec la curie avignonnaise ont été démontrés plus haut. L’homme a évolué des années 1370 jusqu’à sa mort extra romanam curiam, prenant ainsi position sans ambiguïté lors du schisme. Or, ce solide engagement ne correspond pas vraiment avec un épisode du texte. En efet, le passage de Du Guesclin en Avignon décrit par le poème 35 s’avère assez critique envers le pape de la cité, l’accusant notamment de refuser de participer inancièrement à l’efort de croisade. Un clerc si proche de l’entourage du pape aurait-il pu écrire ces lignes ? Il est toujours possible d’imaginer que cet épisode ait été ajouté a posteriori par un copiste diférent, mais rien ne permet de valider ou d’inirmer cette hypothèse actuellement 36 . Même si la piste de Jacques est une hypothèse solide, les arguments contraires conduisent à considérer d’autres igures que celle du bailli du cardinal. 35. Le passage s’étend de la laisse 275 à la laisse 285 de notre édition. 36. Le passage ne manque dans aucun des manuscrits complets, ce qui ne permet pas de prouver qu’une tradition sans cet épisode ait pu circuler au Moyen Age.
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La question Cuvelier
2.2.2
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Alias Cuvelier
L’évocation d’un certain Jacobi Guniberti, alias Cuvelier dans les suppliques avignonnaises 37 laisse penser que le nom présent dans les prologues du texte épique peut s’apparenter à un surnom. La présence de l’adverbe alias indique ici que Cuvelier est un pseudonyme plus qu’un patronyme. En regardant attentivement la composition des noms dans les archives, on voit se dessiner deux groupes. Le premier est composé de Jacques le bailli et de Jehan le prévôt. Les deux hommes portent le nom de Le Cuvelier. Dans le second groupe, on trouve Jacob Gunibert alias Cuvelier et Gilles Cuvelier. L’article le est absent dans deux mentions entre le prénom et le nom. Il n’est cependant pas certain pour Gilles que Cuvelier soit un alias. Gilles Cuvelier est mentionné dans l’inventaire des archives du département du Nord 38 . En remontant d’un cran dans l’inventaire, on trouve la référence suivante : 16 G 1531. — Idem. — par Jean As Croches et Gilles de Keynoit alias Cuparii, chanoines (1385) 39 . Le dictionnaire de Du Cange donne comme déinition à l’entrée cuparius : Cuparum seu doliorum artifex, Gall. Tonnelier, in quibusdam provinciis Cuvelier 40 . Le Gilles du document 1531 est donc bien le même chanoine que celui du document 1532. Il est issu d’une famille noble de la région de Valenciennes, les seigneurs du Quesnoy. On trouve sa trace dans diférents documents : 1. 1976, 26 janvier Egidio de Keynoit alias Cuvelier conferuntur canonicatus et prebenda eclesie S. Petri Insulensis Tornacensis dioceses cancantes per resignationem a Bertrando de Tyherno in utroque ... 41 37. Hanquet et al., Documents relatifs au grand schisme : Suppliques et lettres de Clément VII (1379-1394), op. cit., n° 593, p. 488. 38. Document 16 G 1532, annexe A p. 275 39. Archives départementales du Nord, url : http://www.archivesdepartementales. lenord.fr/, rubrique « instruments de recherche ». 40. Du Cange, Glossarium mediæ et inimæ latinitatis, L. Favre, 1883-1887, url : http: //ducange.enc.sorbonne.fr. 41. C. Tihon, Lettres de Grégoire XI (1371-1378) : Textes et analyses, Analecta VaticanoBelgica. Documents relatifs aux anciens diocèses de Cambrai, Liège, Thérouanne et Tournai vol. 3, Institut historique belge de Rome, 1964, n°3505, p. 254.
Chapitre 2 . Les clés médiévales de la renommée
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2. 1384-1385. — Compte de la fabrique de la collégiale Saint-Pierre de Lille, par Pierre de Bourgogne, chanoine. Domino Egidio Cuparii, qui dictus dominus prestiterat domino Johanni De Bosco certam summam pecunie, et fuit ordinatum per capitulum quod eidem solverem pro magistro qui fecit tabulam, xxvi franci valent un lb. vi s 42 . Gilles est d’abord cité dans les lettres du pape Grégoire XI. Assurant la fonction papale de 1370 à 1378, il est celui qui a organisé le retour de la curie à Rome en 1376 après la fuite à Avignon. Le destin de Gilles semble se construire en parallèle à celui de Jacques Le Cuvelier. Il n’y a aucune trace dans les archives de Jacques après le départ de Grégoire à Rome. Gilles entre en scène à ce moment là et reste présent dans le nord du royaume jusqu’à l’année 1386 au moins. Un Cuvelier en chasserait-il un autre ? Nous avons vu que Jacques était mort sans être revenu vers Rome, idèle à Avignon. Gilles, mentionné dans les lettres de Grégoire, a-t-il fait le chemin inverse ? La question reste encore sans réponse faute de document disponible. Cependant, si on admet que Gilles est l’auteur, cet élément pourrait expliquer la déiance du texte à l’égard des papes d’Avignon. L’alias est la formule qui se rapproche le plus de celle présente dans le texte : « Cellui qui le mist en rime fu Cuveliers nomméz 43 ». On ne trouve jamais la forme avec article dans les prologues des diférentes versions du poème épique. Toutefois, la prudence reste encore de mise avant d’avancer que le texte nous présente un alias plutôt qu’un nom de famille, compte tenu de la variance médiévale 44 . Alias, nom, patronyme ? Nos recherches n’ont pas permis de mettre directement en relation les Cuvelier des archives du Nord avec les ménestrels mentionnés à la cour du roi de France. Cependant, rien ne permet non plus d’associer les trouvères de Charles V au poème épique à la gloire du chevalier breton. Il faut peut-être s’interroger sur les commanditaires du texte ain d’avancer dans la compréhension de la propagation de la légende. 42. M. le chanoine Dehaisnes, Documents et extraits divers concernant l’histoire de l’art dans la Flandre, l’Artois et le Hainaut avant le XVe siècle, Lille : L. Danel, 1886, p. 609. 43. Il s’agit du vers 21 de la présente édition. Tous les manuscrits comportent la même mention, sauf le codex Nd qui ne présente dans le prologue aucun auteur pour le texte. 44. D’autant plus que, dans ce texte, l’article aurait pu disparaître pour des raisons métriques.
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2.2.3
La question Cuvelier
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Dans le giron des frères
Le patronyme Cuvelier est résolument originaire de l’extrême nord du royaume. Le voyage archivistique dans les inventaires et documents originaux a permis de faire émerger des personnalités qui ont le potentiel nécessaire pour être le faiseur de vers du texte épique célébrant le connétable. Mais qu’est-ce qui justiierait la naissance de ce texte en région picarde plutôt que parisienne ? Rien ne prouve que Charles V soit le commanditaire de ce texte. Le prologue du texte est fort peu loquace quant au personnage à l’origine de la commande : Cellui qui le mist en rime fu Cuveliers nomméz ; et pour l’amour du prince qui de Dieu fu sauvéz, ain que on n’eüst pas les faiz oubliéz du vaillant prince qui tant fu redoubtéz, en a fait les beaux vers noblement ordonnéz. (v. 21-25) 45 Cuvelier aurait composé son poème pour l’amour du prince. Certes, mais il est diicile d’identiier précisément un personnage de l’époque avec aussi peu d’indices. Il est vrai que les textes peuvent très souvent faire référence au roi en usant du substantif prince 46 . Ce mot peut également avoir pour référent un frère du roi, un prétendant au trône ou encore un seigneur inluent. Cette appellation ne suit donc pas à identiier derrière le prince du vers 22 la igure de Charles V. De plus, aucun inventaire de la bibliothèque royale entre 1380 et 1424 ne mentionne de volume du poème 47 . Il serait ainsi curieux qu’un commanditaire ne possède pas à un moment donné dans sa bibliothèque un exemplaire du texte qu’il a fait composer. Et même si l’on considère la faiblesse de l’exhaustivité des inventaires de bibliothèques médiévales, on peut tout de même ajouter qu’aucun des témoins connus à l’heure actuelle ne porte les traces d’un passage dans une collection royale. Les éléments en défaveur d’une commande royale pour ce texte semblent s’accumuler. Il faut alors se demander qui aurait bien pu faire exécuter ce texte ? Qui peut être le prince de Cuvelier ? Si nous prenons en considération les conclusions sur l’origine de Cuvelier, c’est 45. La version donnée est celle de la présente édition, mais toutes les versions contenant ce passage sont sensiblement équivalentes. 46. Voir l’article prince dans le DMF. 47. Voir les travaux de L. Delisle ainsi que le projet Europeana Regia, dont une partie est dédiée à reconstituer virtuellement le bibliothèque de Charles V : L. Delisle, Recherches sur la Librairie de Charles V, t. 2, Paris : H. Champion, 1907 ; Europeana Regia, url : http: //www.europeanaregia.eu/fr.
Chapitre 2 . Les clés médiévales de la renommée
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peut-être au nord du royaume qu’il faut chercher le foyer de naissance du texte. Entre 1380 et 1385, Philippe II le Hardi est à la tête de la Bourgogne et de la Flandre après un mariage avec Marguerite de Male. Philippe est le dernier ils de Jean II et donc le frère de Charles V. Il a combattu de nombreuses fois aux côtés de Bertrand entre 1370 et 1380 pour la reconquête du royaume. Le duc est féru de l’histoire du Breton, comme le prouve cette commande passée lors de l’été 1386 : Id. — A lui 48 pour aultres tapis de haute liche, ouvré d’or de Chippre et de ille d’Arras a l’istoire des Faiz de feu messire Bertran de Claquin (Du Guesclin), jadiz connestable de France, avec certiicacion de Jehan le gambier, donne le darrain juillet IIIIXX et VI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . VIIIc frans 49 . Cet extrait du compte d’Oudot de Douay, receveur général des inances du duc de Bourgogne du 1 juin 1386 au 22 janvier 1387 prouve bien que le duc s’interresse de très près à la légende du connétable. Bien avant le duc d’Anjou, son neveu, qui commande une tapisserie du même genre en 1407, Philippe est le détenteur d’un tel objet dès la deuxième moitié des années 1380. Alors qu’Eustache Deschamps écrit ses célébrations sous l’égide du milieu orléanais, il est fort probable que Cuvelier ait composé son long poème sous l’inluence du duc de Bourgogne. La Flandres est donc bien un terrain fécond pour la naissance du poème en vers, Philippe étant de plus un des plus grand mécène de son temps 50 . A défaut de pouvoir mettre un point inal à la question Cuvelier, l’étude des archives permet de distinguer une nouvelle personnalité dans la construction de la légende du connétable : Philippe le Hardi, duc de Bourgogne. Il se dessine alors, par comparaison avec le mécène d’Eustache Deschamps, le duc d’Orléans, un proil des exhausseurs des faits du connétable. Ils ont d’abord combattu auprès de Bertrand, dans les années 1360 pour le duc d’Orléans, dans les années 1370 pour le duc de Bourgogne. Ils sont proches du pouvoir royal sans jamais l’exercer, tous deux frères des rois, de Jean II pour le premier et de Charles V pour se second. Ils commandent tous deux des pièces littéraires diverses, variant selon les goûts et les besoins de chacun. 48. Il s’agit de Pierre de Beaulmez cité dans le document précédent, décrit comme étant « tapissier sarrasinois et vallet de chambre de monseigneur ». 49. Dehaisnes, Documents et extraits divers concernant l’histoire de l’art dans la Flandre, l’Artois et le Hainaut avant le XVe siècle, op. cit., p. 631. 50. Pour une analyse de la Bourgogne sous le gouvernement de Philippe voir B. Schnerb, L’État bourguignon : 1363-1477, Collection Tempus, Perrin, 2005.
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La question Cuvelier
Si la légende de Bertrand est diicile à appréhender, c’est certainement du fait de sa multiplicité. Elle n’émane pas d’une propagande orchestrée par un pouvoir central mais de diférents foyers. Elle n’est ni royale, ni familiale, mais locale 51 , générée par des partisans du connétable désireux de le célébrer pour des raisons qui leur sont propres. De cette diversité, les témoins conservés de nos jours en gardent une trace. Avant de nous pencher sur l’étude du contenu du manuscrit A, il nous faut évoquer cette variété littéraire ain de le comparer aux écrits de l’époque.
51. Les travaux de Raymond Cazelles ont permis de comprendre que la renommée du connétable n’était en fait pas entretenue directement par la sphère royale mais par sa périphérie, Cazelles, Société politique, noblesse et couronne sous Jean le Bon et Charles V, op. cit., p. 450.
Un homme, des styles
D
3
e la pièce lyrique à la chronique latine en passant par la prose, toutes les formes littéraires en vogue à la in du XIVe siècle semblent convenir à la narration des hauts faits de Bertrand. Eustache Deschamps, Froissart, Chrisitine de Pizan ou encore François Villon sont autant d’auteurs célèbres de la in du Moyen Age qui ont travaillé à difuser la renommée de Bertrand. Les manuscrits A, P et Pn gardent en eux la trace de cette diversité en mettant en regard La Chanson de Bertrand du Guesclin et sept courts poèmes placés en in de codex. Quelles sont les spéciicités de chacun de ces textes ? Comment se situent-ils par rapport à la production littéraire de l’époque ?
3.1 | Du guesclin, objet lyrique 3.1.1
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Eustache Deschamps, chantre du connétable
Les pièces lyriques d’Eustache Deschamps sont les plus anciens témoins connus aujourd’hui célébrant les prouesses de Bertrand. Elles sont les seules à pouvoir être datées avec certitude du vivant du chevalier breton 1 . On trouve à la in du manuscrit A deux poèmes attribués avec certitude à l’auteur : les ballades 206 et 207. Quelle est leur place au sein de l’œuvre de l’auteur ? Pourquoi ont-elles été choisies pour igurer à la suite de notre chanson ?.
Une posture classique On trouve dans l’édition des œuvres complètes d’Eustache Deschamps 2 plusieurs textes au sujet de Bertrand, revêtant des formes poétiques diférentes : la ballade, le chant royal, le rondeau et le lai. Pourquoi associer ces types à la igure du Breton, sachant qu’Eustache Deschamps est un auteur très soucieux de mettre en adéquation le style et le sujet de ses poèmes 3 ? Les pièces composées du vivant du chevalier respectent une trame classique. La ballade 222, le 1. Boudet, Millet et Becker, Eustache Deschamps en son temps, op. cit., p. 58. 2. Queux de Saint-Hilaire et Raynaud, Oeuvres complètes de Eustache Deschamps, op. cit. 3. Pour une analyse détaillée de ce phénomène voir S. Bliggenstorfer, « Interdépendances de formes et de contenu dans l’œuvre d’Eustache Deschamps », Les ”dictez vertueulx” d’Eustache Deschamps : forme poétique et discours engagé à la in du Moyen Age, 2005,
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Du guesclin, objet lyrique
plus ancien témoin, ne contient qu’une mention du connétable 4 . Il s’agit d’une célébration en trois strophes hétérométriques de la naissance du ils de Charles V, le futur Charles VI, où Bertrand tient un rôle mineur. Il n’est cité qu’à la in du second dizain : Depuis qu’il 5 vint cesser notre soufrance, Nostre ennemi furent en petit ploy. Par son naistre nous ist dieu demonstrance Que la victoire venoit avec soy. Resjouy fut le peuple en bonne foy, Car adonc furent perdens En pluseurs lieus Anglois [et] leurs aidens, Bertran de Guesclin li bons victorieus Connestables les fut persecutens, Si en devons estre trestuit joieux 6 . Dans cette strophe, Bertrand est l’instrument de la victoire, celui à qui revient le mérite est l’enfant royal, futur héritier du trône de France. Les deux personnages s’opposent par leur place respective dans la strophe. Le futur roi l’ouvre, le connétable la clôt, marquant ainsi la hiérarchie en place. Par l’utilisation de temps verbaux diférents, le poète oppose également le verbe venoit à l’imparfait au passé antérieur fut persécutens avec pour sujet Bertrand. L’action du connétable n’est que ponctuelle, elle n’a pas la pérennité de la fonction royale. Certes, l’épithète homérique attachée au patronyme du Breton est laudative, mais le chevalier n’en reste pas mois un simple truchement de la reconquête française, tout le mérite revenant au jeune ils de Charles V qui s’est donné la peine de naître. La première mention du connétable dans la production d’Eustache Deschamps présente donc le chevalier sous un aspect indubitablement latteur sans pour autant le placer au devant de la scène. Après la ballade 222, Deschamps rédige le chant royal 362 7 . Dans ce poème, l’auteur fait le bilan des exploits guerriers du chevalier à l’occasion de ses cinquante ans. Le thème du connétable connaît ici une expansion majeure puisqu’il passe de simple mention dans la ballade précédente à sujet principal du poème. 4. Pour consulter le poème, voir annexe B, p. 279. 5. Le pronom il fait référence au nouveau-né. 6. A. Englebert, Diachronie, url : http : / / www . diachronie . be. La ballade 222 est disponible directement à l’adresse suivante : http://www.diachronie.be/deschamps/ ballades/ballade_0220.html. 7. Le poème est reproduit dans sa totalité en annexe. Voir annexe B, p. 280.
Chapitre 3 . Un homme, des styles
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Le patronyme et le titre du chevalier servent de vers de cloture pour chaque strophe : B. du Guesclin, connestable de France 8 . La répétition du nom à cette place emphatique de la strophe indique l’importance que le personnage a acquise depuis sa mention dans la précédente ballade. Après des années au service de l’armée du royaume, le Breton est placé d’emblée parmi les neuf preux et est érigé au rang de parangon militaire dans l’envoi. Cette consécration de Bertrand par le poète n’en reste pas moins très formelle. En efet, la forme utilisée est celle qui représente le mieux la poésie de cour : le chant royal. Le chant royal et la ballade ont évolué en structure très proches à la in du Moyen Age 9 . Une diférence de ton marque cependant une frontière entre ces deux types de poèmes : En face du sérieux oiciel et conventionnel du chant royal, le message de la ballade paraîtra plus sincère 10 . La forme de ce poème tout entier dédié au connétable reste une forme oicielle, souvent utilisée lors de cérémonies de cour. De plus, le chant royal à cinq strophes avec envoi est d’un emploi commun dans la production poétique de la in du Moyen Age 11 . Si le message s’avère dithyrambique, le poète ne prend cependant aucun risque en proposant des vers organisés en une forme attendue, propice à la célébration des héros. Dans une autre pièce écrite avant la mort du connétable, Eustache Deschamps mentionne de nouveau Bertrand en in de pièce. La ballade 239 12 est une démonstration de la nécessité de se souvenir des hauts faits des anciens guerriers. Bertrand est mentionné en conclusion comme étant le seul homme contemporain du poète à pouvoir rivaliser d’ardeur au combat avec Jason ou encore Charlemagne : Helas ! et ou est cellui Du temps present qui ait conquis autrui, Qui puist montrer un royaume d’acquest ? Je ne le sçay. Fors Guesclin n’en congnuy : Chascuns deust congnoistre quelz il est. (v. 23 à 27) 8. Voir vers 10, 20, 30, 40 et 50. 9. Pour l’évolution des formes lyriques à la in du Moyen Age voir D. Poirion, Le poète et le prince : l’évolution du lyrisme courtois de Guillaume de Machaut à Charles d’Orléans, Presses universitaires de France, 1965. 10. Ibid., p. 368. 11. Voir à ce propos le tableau comparatif des formes de chants royaux et ballades réalisé par D. Poirion, ibid., p. 370. 12. Le texte est présenté en annexe. Voir Annexe B, p. 281.
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Du guesclin, objet lyrique
Certes, le connétable occupe encore une fois une place de choix sous la plume du poète, mais elle n’est pas centrale dans la ballade. Les exploits du héros lui donnent une place dans la production de Deschamps, mais il reste cependant toujours en marge. Tout ceci va changer après la mort du chevalier. On constate une évolution dans le traitement des pièces lyriques faisant état de Bertrand en accord avec la chronologie historique. En efet, sous la plume d’Eustache Deschamps, la mort du Breton constitue un tournant : il y a un avant et un après Bertrand du Guesclin.
1380 ou le tournant lyrique On compte trois ballades composées après la mort de Bertrand : les poèmes 206, 207 et 1125 13 . Cette forme rimée est pour les poètes de la in du Moyen Age le moyen lyrique le plus abouti ain d’exprimer un message plus sincère, même si le style reste fondamentalement attaché aux topiques anciennes 14 . La mort du connétable et l’émotion qu’elle provoque pousse le poète à sortir des formes poétiques conventionnelles, ce qui donne à la déploration de cette mort un aspect plus intime. Alors que Bertrand est simplement mentionné dans les ballades précédant sa mort, il envahit après celle-ci la totalité du poème, comme le montrent les pièces 206 et 207. Le poète dépeint l’émotion ressentie lors de la mort du connétable dans des vers qui mêlent visée panégyrique et expression de la douleur du deuil. Pour cela, il entrelace des expressions laudatives comme le « plus vaillant qui fust en tout le monde 15 » qui caractérisent Bertrand avec la répétition incessante du verbe « plourer » dans les refrains 16 . La rhétorique classique du planctus se mêle ainsi à la forme plus contemporaine de la ballade. La lamentation continue dans le rondeau 652 17 . Alors que, à la in du Moyen Age, ce type de poème est plutôt une pièce à danser 18 , Eustache Deschamps use de la forme pour inviter non pas à la réjouissance mais à l’expression d’une tristesse collective avec l’emploi une nouvelle fois de l’anaphore du verbe « plou13. Les textes sont donnés en intégralité en annexe A, p.283, 283 et 294. 14. « La ballade est une sorte de lettre poétique ; sa fonction est celle du message, un message développé, explicite et raisonné (...). En face du sérieux oiciel et conventionnel du chant royal, le message de la ballade paraîtra plus sincère. » Poirion, Le poète et le prince : l’évolution du lyrisme courtois de Guillaume de Machaut à Charles d’Orléans, op. cit., p. 368. 15. Ballade 207, vers 9, 18, 27. 16. Ballade 206, vers 10, 20, 30. 17. Le texte est donné en annexe B, p. 284. 18. « la mission d’un rondeau était surtout de faire danser. » Poirion, Le poète et le prince : l’évolution du lyrisme courtois de Guillaume de Machaut à Charles d’Orléans, op. cit., p. 324.
Chapitre 3 . Un homme, des styles
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rer 19 ». La douleur de la perte du chevalier est telle qu’elle vient même inonder d’autres formes poétiques plus traditionnellement dévolues à des thèmes plus joyeux. Le lacis de louanges et de plaintes trouve son apothéose dans le lai qu’Eustache Deschamps dédie à la mémoire du bon connestable du Guesclin 20 . Cette forme versiiée aux frontières de la narration et du lyrisme n’est pourtant pas la plus prisée des poètes contemporains, comme le précise D. Poirion : faute de structure bien déinie, le cadre du lai reste beaucoup trop général pour diriger le travail de l’artiste. Le poète doit à la fois inventer la structure de ses couplets et leur contenu. Il est à craindre que nos poètes de cour aient éprouvé comme un vertige devant le vide d’une liberté totale 21 . Eustache Deschamps franchit un pas de plus et s’afranchit totalement des codes en usage dans la poésie d’alors pour composer une œuvre totalement libre de contrainte avec Bertrand pour thème central, tout en conservant les codes classiques liés au thème de la déploration. En plaçant Bertrand au carrefour du neuf et du vieux, Deschamps illustre par le style la place qu’il veut donner au connétable dans la légende : celle d’un héros contemporain capable de rivaliser avec Jason ou Alexandre.
Unité des agencements Si l’on étudie de près les poèmes de Deschamps dans lequels Bertrand apparaît, on peut voir, malgré la diversité des pièces, une unité certaine. Le tableau suivant 22 permet de comparer les schémas de composition des pièces d’Eustache Deschamps faisant part du connétable. 19. Rondeaux 652, vers 3, 7, 13. 20. Le texte est disponible en annexe B, p. 285. 21. Poirion, Le poète et le prince : l’évolution du lyrisme courtois de Guillaume de Machaut à Charles d’Orléans, op. cit., p. 414. 22. Nous ne tenons pas compte dans ce tableau du lay du tres bon connestable (p. 285) ni du rondeau 652 (p. 284), leur composition répondant à des codes particuliers, comme nous l’avons évoqué dans la partie précédente. Les chifres de la colonne « vers » correspondent au nombre de syllabes par vers. Si la case contient plusieurs chifres, les strophes sont hétérométriques.
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Du guesclin, objet lyrique
Structure des Poèmes Strophes Ballade 222 dizains Chant royal 362 neuvains Ballade 239 neuvains Ballade 206 dizains Ballade 207 neuvains
poèmes d’Eustache Deschamps Layé Vers Rimes Envoi oui 10 ; 7 ababbccdcd non oui 10 ; 7 ababbccdcd quintil, ccaac oui 10 ; 6 ; 7 ababccdcd sizain, aadaad oui 10 ; 7 ababbccdcd non oui 10 ; 7 ababbccdcd non Tableau 1
Dans ce premier tableau, il est nécessaire de remarquer que le schéma de rimes ababbccdcd ainsi que les strophes layées sont systématiquement employés dans chaque pièce du corpus. Ainsi, au-delà d’une unité de thème, ces poèmes aichent une unité structurelle manifeste. De plus, ces pièces lyriques ne correspondent pas au schéma de construction majoritairement employé par le poète dans ses 1153 ballades, comme le signale C. Dauphant dans l’introduction de son anthologie consacrée à l’œuvre de Deschamps : Quatre formes majeures apparaissent à la lecture de ses œuvres complètes : le huitain décasyllabique (379 ballades [...]), le dizain décasyllabique (295 ballades [...]), le dizain octosyllabique (167 ballades [...]) , le huitain octosyllabique (91 ballades). [...] Les formes mineures sont aussi illustrées, en particulier les strophes hétérométriques dites layées où les décasyllabes laissent place à un seul heptasyllabe au centre de la strophe, à la première occurrence de la troisième rime. On trouve ainsi chez Deschamps le neuvain layé (49 ballades [...]), le dizain layé (47 ballades [...]) et le septain décasyllabique (38 ballades [...]) 23 . Le poète utilise donc des schémas de strophes plutôt marginaux pour l’époque lorsque Bertrand est évoqué, peut-être pour se démarquer de la production contemporaine qui a dû voir sa masse exploser après la mort du chevalier. Estil possible de voir dans cette unité constante une marque de Deschamps ain d’identiier facilement ses poèmes 24 ? 23. Dauphant, Eustache Deschamps - Anthologie, op. cit., p. 20–21. 24. L’unité entre le fond et la forme des ballades amoureuses dans la poésie d’Eustache Deschamps a été étudiée dans l’article suivant : Bliggenstorfer, « Interdépendances de formes et de contenu dans l’œuvre d’Eustache Deschamps », op. cit.
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Sous la plume d’Eustache Deschamps, Bertrand traverse ainsi toutes les formes lyriques possibles à la in du Moyen Age, de la plus oicielle à la moins codiiée, tout en présentant une unité de composition. Mais il n’est pas le seul poète à se lamenter de la mort du connétable. Plusieurs autres courts textes anonymes en vers ayant pour thème la disparition du chevalier sont parvenus jusqu’à nous, dont certains placés directement à la suite de pièces de Deschamps dans certains manuscrits contenant la Chanson de Bertrand.
3.1.2
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Textes Anonymes
Le manuscrit BnF fr. 840, tentative d’un scribe médiéval de rassembler la totalité des œuvres de Deschamps, contient certaines œuvres placées après La Chanson de Betrand du Guesclin dans certains codex de la tradition 25 Les ballades 206, 207 et le rondeau 652 sont les trois premières pièces copiées à la suite du poème épique dédié au connétable. Les quatre suivantes ont été attribuées à Eustache Deschamps par Gaston Raynaud lors de l’édition des œuvres complètes du poète au XIXe siècle 26 , sans autre argument que leur place après les trois poèmes d’Eustache dans les manuscrits contenant la chanson du connétable français. Un examen de ces quatre poèmes 27 à la lumière de notre précédente analyse permet de faire émerger certaines hypothèses quant à l’identité de l’auteur.
Comparaison des poèmes Parmi les poèmes qui suivent La Chanson de Bertrand du Guesclin igurent trois ballades, forme privilégiée par Eustache Deschamps et dont il a contribué à l’évolution. Le tableau suivant permet de comparer les structures des pièces courtes attribuées avec certitude à Eustache Deschamps 28 avec celle des poèmes anonymes copiés à la in du manuscrit A. 25. Voir l’études des manuscrits A, P et Pn. 26. Queux de Saint-Hilaire et Raynaud, Oeuvres complètes de Eustache Deschamps, op. cit., vol. 6 à 10. 27. Les quatre textes sont disponibles en annexe C, p. 297, 298, 298 et 300. 28. Voir Tableau 1, p. 204.
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Du guesclin, objet lyrique
Structure des poèmes anonymes du manuscrit A Poèmes Strophes Layé Vers Rimes Envoi Ballade A huitains non 10 ; 8 ababbcbc quatrain, bcbc Ballade B huitains non 10 ababbcbc non Pastourelle C 18 vers non 8 ababbbbccddeefgfg quatrain, fgg Ballade D neuvains oui 10 ; 8 ; 7 ababccaca non Tableau 2 Que penser des quatre poèmes achevant le codex aixois ? La comparaison des deux tableaux laisse apparaître qu’ils ne suivent en rien les schémas des poèmes du tableau 1. La strophe layée qui semble dévolue au connétable sous la plume de Deschamps se retrouve seulement dans la ballade D. Le schéma de construction des rimes se réduit dans les poèmes anonymes à trois sortes (abcd pour les poèmes de Deschamps, abc pour les autres poèmes), la pastourelle C mise à part. Le schéma à trois sortes de rimes reste cependant très fréquent dans l’œuvre du poète, caractérisant près de 50% de sa production écrite 29 . La présence d’une construction de rimes autre que celle présente dans le tableau 1 ne permet pas d’exclure l’hypothèse qu’Eustache Deschamps soit l’auteur de ces poèmes. Plus préoccupant peut-être, ces poèmes ne semblent pas non plus présenter d’unité lorsqu’on les compare entre eux. Les poèmes A et D débutent tout deux par un octosyllabe appelant à la déploration par l’usage du verbe plouréz. Ils possèdent cependant des schémas de rimes et de strophes diférents. La ballade B se trouve être très proche de la ballade A mais ne présente ni envoi ni octosyllabe introductif.
La pastourelle C La pastourelle C rapporte l’opinion de plusieurs bergers consternés d’apprendre la nouvelle de la mort de Bertrand. Le recours à une iction discursive centrée autour de l’opinion paysanne est fréquent chez Eustache Deschamps. En efet, on trouve sous sa plume plusieurs ballades, rondeaux, chants royaux et lais utilisant cet artiice rhétorique ain d’aborder des sujets délicats comme l’évo29. « Deschamps a ainsi écrit 479 ballades en ababbcbc et 505 en ababbccdcd. », Dauphant, Eustache Deschamps - Anthologie, op. cit., p. 21.
Chapitre 3 . Un homme, des styles
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lution de la Guerre de Cent Ans ou la politique contemporaine du royaume 30 . Le poème présent à la in du manuscrit A pourrait être un des premiers essais du poète pour traiter de ce thème 31 . Cependant, la forme des strophes reste bien éloignée des poésies pastorales présentes dans le manuscrit BnF fr. 840 contenant les œuvres de l’auteur. En efet, Eustache Deschamps n’utilise pratiquement jamais des strophes de plus de dix vers 32 . Ainsi, l’attribution de ce poème contenant dix-huit vers pour chaque strophe à Eustache semble diicile. Un autre auteur de la in du Moyen Age présente une production poétique oscillant autant entre strophes courtes et strophes longues. Il s’agit de Jean Froissart. Pourrait-il être l’auteur de la pastourelle C ? Selon le relevé de D. Poirion 33 , on trouve dans les ballades et chants royaux du chroniqueur onze poèmes construits à l’aide de huitains et huit poèmes utilisant des dizains contre sept poèmes en quatorzains et six en seizains. Froissart adopte dans ses seizains un schéma de rime unique susceptible de nous intéresser : ababbccddeefgfg. Si l’on compare ces rimes à celle de la pastourelle C, on remarque un schéma très proche : ababbbbccddeefgfg. L’ajout de deux vers au seizains est simplement compensé par l’insertion d’une rime plate en b, ce qui perturbe peu le schéma initial. On peut bien voir dans la longueur exceptionnelle des strophes de pastourelles de la in du Moyen Age la marque de l’auteur, comme le soulignent W. Kilber et J. Wimsatt : The stanza lengths of eight of the works fall within the normal range for the chant royal of eight to twelve lines. The other ives however have longer stanzas, suggesting Froissart’s custom. Of his twenty pastourelles, thirteen have stanzas of fourteen or sixteen octosyllabic lines 34 . 30. Pour une analyse de l’utilisation du monde paysan dans les poésies d’Eustache Deschamps, voir L. Kendrick, « L’invention de l’opinion paysanne dans la poésie d’Eustache Deschamps », Les ”dictez vertueulx” d’Eustache Deschamps : forme poétique et discours engagé à la in du Moyen Age, 2005, p. 163–182. 31. « Deschamps fait parler les paysans à plusieurs reprises dans ses poèmes, pour la première fois, peut-être, dans une ballade sur la mort de Bertrand du Guesclin en 1380, une ballade composée (selon son envoi) avant qu’un nouveau connétable soit nommé. », ibid., p. 171. 32. Nous renvoyons ici au tableau réalisé par D. Poirion qui compare les structures des strophes employées par les diférents poètes français de la in du Moyen Age, Poirion, Le poète et le prince : l’évolution du lyrisme courtois de Guillaume de Machaut à Charles d’Orléans, op. cit., p. 385–387. 33. Ibid., p. 385–387. 34. « La longueur des strophes de huit poèmes du corpus reste dans la norme du chant royal de huit à douze vers. Cependant, les cinq autres possèdent des strophes plus longues,
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Du guesclin, objet lyrique
La longueur de la strophe est bien une marque de l’inluence de Froissart sur l’évolution du genre. La pastourelle placée en avant dernière position dans le manuscrit A a donc été composée en suivant le modèle initié par l’auteur et non pas en suivant celui de Deschamps, calqué sur la structure du chant royal 35 . De plus, les vers introductifs de ce poème revêtent un ton particulier. Les deux premiers vers du poème C introduisent une date : En l’en de l’Incarnacion/Mil trois cens quatre vingts ans. L’insistance sur cette date en ouverture du poème pourraît être la marque du chroniqueur désireux de dater précisément les faits décrits. Qu’elle soit l’œuvre de Jehan Froisart ou d’un poète largement inluencé par lui, la pastourelle C correspond d’avantage par sa structure à la veine du chroniqueur qu’à celle de Deschamps.
L’unité du désordre Le tableau 2 36 a fait émerger l’hétérogénéité de l’architecture des quatre derniers poèmes clôturant le manuscrit A. On peut tout de même apercevoir une certaine unité dans la diversité apparente. Ces quatre pièces lyriques sont les témoins d’une certaine volonté d’expérimentation poétique. La ballade B est celle qui revêt la forme la plus classique selon les codes de l’époque. Le huitain de décasyllabes est la strophe majoritaire dans l’œuvre d’Eustache Deschamps 37 . Si cette ballade a été rédigée par Deschamps, pourquoi n’a-t-elle pas été retenue pour igurer dans le manuscrit de ses œuvres complètes ? Outre le fait que le scribe du manuscrit BnF fr. 840 aurait pu ne pas avoir eu connaissance de cette pièce, son schéma de rimes diférent du schéma constant mis au jour dans le tableau 1 38 aurait pu entraîner sa disqualiication du corpus poétique de l’auteur. L’auteur (ou les auteurs) des poèmes A et D innove par l’utilisation d’un vers d’introduction octosyllabique seulement à la première strophe 39 . Cette particuce qui correspond à l’usage de Froissart. Sur les vingt pastourelles qu’il a composées, treize comportent des strophes de quatorze ou de seize octosyllabes. » W. Kibler et J. Wimsatt, « The development of the pastourelle in the fourteenth century : an edition of ifteen poems with an analysis », Mediaeval Studies 45, 1983, p. 22–78, p. 27–28. 35. Les principales pastourelles composées par Eustache Deschamps sont reproduites en annexe de l’article suivant : Kendrick, « L’invention de l’opinion paysanne dans la poésie d’Eustache Deschamps », op. cit., p. 175–182. 36. Voir le tableau p. 206. 37. Dauphant, Eustache Deschamps - Anthologie, op. cit., p. 20. 38. Voir le tableau p. 204. 39. Cette particularité se trouve dans les versions des poèmes présents dans le A autant que dans celles de P.
Chapitre 3 . Un homme, des styles
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larité est peut-être la marque d’un auteur, mais nos recherches n’ont pas permis de rattacher ce phénomène à une pratique d’un grand nom de la littérature de la in du Moyen Age. La ballade D se détache également de la production de l’époque par son schéma de rime ababccaca qui n’est pas relevé par D. Poirion dans son étude 40 . Si ces pièces lyriques s’éloignent des modèles en vigueur, elles s’écartent également de la production d’Eustache Deschamps par leur conclusion. Nous avons vu dans une précédente partie que la mort du connétable avait provoqué un tournant lyrique dans l’élaboration de poèmes consacrés au chevalier, le narrateur s’y présentant comme inconsolable. Certes, la déploration est bien présente dans les quatre poèmes qui clôturent A. On trouve cependant un thème qui les isolent des pièces d’Eustache Deschamps. Examinons quelques exemples : — A, vers 17-19 Ha, doulce France, que dure departie Du vaillant homme qui tant vous honnoura Et qui gardé vous a vostre seignorie. — C, vers 55-58 Princes, Dieu qui tout scet et voit, Un connoistable nous envoit Si bon et de telle ordonnance Qu’il soit au prouit de France — D, vers 15-17 Or lui soit Dieu a in, Et nous octroit avoir tel champïon Qui garder puist par prouesce et engin Les leurs de lis du leupart felon. On trouve l’idée du regard vers l’avenir développée à chaque fois à des places stratégiques dans la ballade 41 . Dans la ballade A, l’inclination vers le futur du 40. Poirion, Le poète et le prince : l’évolution du lyrisme courtois de Guillaume de Machaut à Charles d’Orléans, op. cit., p. 385–387. 41. D. Poirion déclare à propos de la structure des idées dans la ballade médiévale : « Cette chaîne initiale, cette cadena, comme disent les poètes provençaux, maintient, dans la poésie sans musique, une attaque vigoureuse de la strophe, tandis que les vers suivants seront de structure plus souple et plus molle. Normalement ce sont ces quatre vers qui proposeront l’idée, les vers additionnels apportant un développement, une ampliication que résumera le refrain, s’il y en a un. » ibid., p. 383.
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Du guesclin, objet lyrique
royaume se situe à une place forte de la dernière strophe. Elle annonce la conclusion vers laquelle tend la démonstration des strophes précédentes. Il en va de même pour la ballade D qui utilise cette idée en in de deuxième strophe ain de sortir de l’impasse causée par la mort du connétable. L’évocation du futur est encore plus forte dans la pastourelle C qui l’emploie pour construire l’envoi, moment privilégié de l’expression d’une opinion où le narrateur reprend la parole à la première personne. Par ailleurs, le ton est assez diférent de celui employé par Deschamps. Prenons pour exemple quelques vers du lay du tres bon connestable 42 : La ina Honeurs sa vie, La mourut Chevalerie, La fut Vaillance perie, La fut Foys ensevelie, L’an mil .ccc. quatre vins. La fut notable sa ins. (v. 253-258) Sous la plume de l’auteur champenois, la mort de Bertrand prend des airs de in du monde. Face à un tel bouleversement cosmique, le regard du narrateur ne se tourne jamais vers l’avenir, alors que l’idée maîtresse des poèmes anonymes n’est pas seulement de pleurer Bertrand mais d’appeler à la poursuite des hostilités contre les Anglais et à la survie du royaume de France. Seule la ballade B reste de facture traditionnelle, mis à part son thème héraldique qui est peu traité en poésie lyrique. Il est temps de faire le bilan et de rassembler les éléments permettant d’estimer le rôle d’Eustache Deschamps. Faut-il lui attribuer tous les poèmes présents à la suite du texte épique célébrant Bertrand ? Il est diicile de se prononcer tant l’œuvre de Deschamps est monumentale et variée. Si l’on admet qu’il a pu rédiger ces textes, ils restent très marginaux dans la forme comme dans le fond par rapport aux poèmes sur Bertrand présents dans le manuscrit BnF fr. 840. La pastourelle C s’inspire également d’avantage du style que Jean Froissart a insulé à ces pièces que de la veine de Deschamps. En revanche, des évènements survenus dans la vie du poète en 1380 peuvent expliquer ce soudain désir d’avenir. Tous ces poèmes ont dû être rédigés entre la mort de Bertrand en juillet 1380 et la nomination d’Olivier de Clisson au poste de connétable de France en novembre 1380. Entre septembre et novembre 1380, la ville de naissance et de résidence de Deschamps, Vertus en Champagne, est entièrement détruite par l’armée anglaise. Son œuvre garde la trace du choc que cette attaque a provoqué 42. Voir annexe B, p. 285.
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211
chez lui et il se surnomme même « Brulé des Champs » après cet événement. C’est peut-être après avoir dû endurer lui-même les troubles de la guerre qu’il décide de souhaiter qu’un connétable de qualité égale à Bertrand soit nommé ain de protéger le royaume. Quoiqu’il en soit, ces poèmes restent les témoins d’un engouement lyrique autour de la mort du connétable. Après le décès du chevalier, d’autres textes versiiés apparaissent, témoignant de la pregnance de ce thème littéraire jusqu’à la in du Moyen Age 43 . Le représentant principal de cette mouvance est l’autre texte présent dans le manuscrit A, qui occupe 95% de l’espace : La Chanson de Bertrant du Guesclin. Comment ce texte se caractérise-t-il par rapport à la production littéraire de l’époque ?
3.2 | Du Guesclin, objet épique La in du Moyen Age voit leurir de nombreux textes s’attachant à mettre par écrit la vie de divers chevaliers. Un texte se détache de cette production littéraire par son style particulier : La Chanson de Bertrand du Guesclin. Il s’agit d’une biographie qualiiée d’épique, reprenant les techniques littéraires des anciennes chansons de geste 44 ain de narrer la vie du connétable français. Le choix d’une esthétique épique fait igure d’exception dans le paysage littéraire de la in du XIVe siècle. La période est en efet dominée par une production lyrique en pleine mutation à la recherche d’une ixité. Les derniers textes épiques 45 rédigés entre 1380 et 1490 sont soit des réécritures en alexandrins de chansons préexistantes, soit des mises en prose 46 . C’est alors même que la matière 43. On peut citer par exemple un long poème résumant les étapes de l’hommage rendu à Du Guesclin par la cour de France en 1389 intitulé La Remembrance de Du Guesclin, dont une édition est donnée dans l’article suivant : Cauneau et Philippe, « La Remembrance de Du Guesclin : mystères et enseignements d’un manuscrit angevin », op. cit. 44. Ce classement a été réalisé par E. Gaucher dans son étude de la typologie des biographies chevaleresques de la in du Moyen Age, Gaucher, La biographie chevaleresque : typologie d’un genre (XIIIe-XVe siècle), op. cit., p. 264-270. 45. Sur le devenir de l’épopée française à la in du Moyen Age voir les travaux de François Suard : F. Suard, Guide de la chanson de geste et de sa postéritélittéraire : XIe-XVe siècle, H. Champion, 2011 ; F. Suard, « L’épopée française tardive (XIVe-XVe s.) », Etudes de philologie romane et d’histoire littéraire ofertes à Jules Horrent, 1980, sous la dir. de J. M. d’Heur et N. Cherubini, p. 449–460 ; F. Suard, « Y a-t-il un avenir pour la tradition épique médiévale après 1400 ? », Cahiers de recherches médiévales [En ligne] 11, 2004, url : http://crm. revues.org/2032. 46. « Après 1400, on n’écrit plus guère de chansons de geste. Peut-être le remaniement
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Du Guesclin, objet épique
épique semble s’épuiser qu’est composé le poème célébrant la vie du chevalier breton, à contre-courant des modes littéraires en vogue au même moment. Le style du texte est ainsi résolument archaïque, d’abord par l’adoption d’un style du passé, l’épopée en vers s’avérant en déclin en 1380 47 , ensuite par le choix du style même. En efet, le style épique est par essence archaïque 48 , plaçant d’emblée les évènements récents de la Guerre de Cent Ans dans un passé plus lointain. Comment se construit l’archaïsme du texte ? Quelle place donner au poème au sein du genre épique ?
3.2.1
|
L’organisation de la laisse
au-delà du mètre, qui peut varier selon les épopées du Moyen Age, un élément structurel reste marqueur du style épique jusqu’à la in du XVe siècle : la laisse 49 . Strophes de longueur inégale organisées autour d’une même assonance ou rime, elles sont les garantes d’un découpage du récit épique. Cuvelier n’a donc pu passer outre cet impératif pour composer son poème et La Chanson de Bertrand du Guesclin comporte donc 728 laisses au total 50 . Comme de nombreuses chansons de geste tardives, les laisses de notre texte sont bâties à l’aide d’alexandrins monorimes. La longueur moyenne d’une laisse dans la version donnée dans le manuscrit A est de 29-30 vers. Si ces strophes épiques sont plus longues que celles de la désormais classique Chanson de Roland (14 vers par laisse), leur taille moyenne reste tout de même en deçà de celle de chansons tardives telles que Tristan de Nanteuil (48 vers par laisse) ou Lion de Bourges (49 vers par bourguignon de Renaut de Montauban est-il postérieur au XIVe s., mais ce n’est pas sûr ; la Geste des ducs de Bourgogne, écrite à la gloire de Jean sans Peur, est du premier quart du XVe s. En dehors de ces deux textes, rien à signaler. La translation en prose prend au contraire son essor dans la seconde moitié du XVe s. » idem, « Y a-t-il un avenir pour la tradition épique médiévale après 1400 ? », op. cit., § 1. 47. Ce fait est souligné par E. Gaucher dans son étude de la biographie chevaleresque : « Or, le temps n’est plus, où un public varié se pressait aux récits héroïques des jongleurs sur les routes des pélerinages ou lors des fêtes de saints patrons. Le biographe de Bertrand du Guesclin a donc délibérément choisi cette forme rétrograde. » Gaucher, La biographie chevaleresque : typologie d’un genre (XIIIe-XVe siècle), op. cit., p. 187. 48. L’idée d’un archaïsme intrinsèque aux style des anciens textes épiques est défendue par J. P. Martin dans l’article suivant : J. P. Martin, « Archaı̈sme et style épique », Efets de style au Moyen Age, Seneiance 58, 2012, p. 147–156. 49. Pour une déinition et une analyse de la laisse voir D. Boutet, La chanson de geste : forme et signiication d’une écriture épique du Moyen Age, Presses Universitaires de France PUF, 1993, p. 77–82. 50. Ce nombre correspond à la version du texte que nous éditons.
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laisse), voire même de certaines chansons anciennes comme le Couronnement de Louis (43 vers par laisse) 51 . Plus encore que l’assonance ou la rime, ce qui fait l’unité d’une laisse est son agencement interne. En efet, une laisse épique s’organise autour de timbres musicaux particuliers repérables stylistiquement par deux temps forts : les vers d’introduction et les vers de conclusion 52 . L’analyse de ces deux parties importantes des laisses de La Chanson de Bertrand du Guesclin contenues dans le manuscrit A permet de mettre au jour les ressorts épiques d’un des derniers textes du genre rédigé en français.
Relevé des types d’introduction et conclusion Si J. Rychner distingue trois types de vers comme possible prélude de chaque laisse des chansons de geste anciennes 53 , les travaux portant sur les poèmes épiques plus récents élargissent ce nombre. D. Boutet classe les vers d’introduction de Jehan de Lanson, chanson du milieu du XIIIe siècle, selon quatre types 54 . C. Roussel dans son analyse de La Belle Hélène de Constantinople, texte épique du XIVe siècle, en compte six 55 . L’inventaire exhaustif des vers d’introduction du texte qui nous occupe fait émerger la présence de six types de vers d’ouverture de laisse 56 , parfois un peu diférents de ceux relevés par C. Roussel. Comme les vers d’introduction, les vers de conclusion des laisses des chansons de geste anciennes ont été considérés par les critiques comme étant porteurs d’un timbre particulier. Les analyses de chansons plus tardives s’accordent à dire que, si l’attaque de la laisse se maintient comme moment fort, la conclusion perd de 51. Un relevé de la longueur moyenne des laisses des principales chansons du XIIe et XIIIe siècle peut être consulté dans l’ouvrage de D. Boutet, Boutet, La chanson de geste : forme et signiication d’une écriture épique du Moyen Age, op. cit., p. 77. C. Roussel propose un relevé similaire pour des chansons plus tardives dans l’étude suivante : C. Roussel, Conter de geste au XIVe siècle : inspiration folklorique et écriture épique dans La belle Hélène de Constantinople, Librairie Droz, 1998, p. 384. 52. En efet, selon J. Rychner : « Le premier vers d’une laisse a valeur d’intonation et le dernier valeur de conclusion, si bien que la laisse est nettement encadrée. », J. Rychner, La chanson de geste : essai sur l’art épique des jongleurs, Droz, 1955, p. 71. 53. Ibid., p. 69-71. 54. D. Boutet, Jehan de Lanson : technique et esthétique de la chanson de geste au XIIIe siècle, Presses de l’Ecole normale supérieure, 1988, p. 23. 55. Roussel, Conter de geste au XIVe siècle : inspiration folklorique et écriture épique dans La belle Hélène de Constantinople, op. cit., p. 385. 56. Un tableau récapitulatif de notre relevé exhaustif est donné en annexe D, p. 303.
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Du Guesclin, objet épique
sa puissance et revêt un caractère narratif. J. Subrenat considère par exemple dans son étude de Gaydon que : Nous ne retrouvons pas toujours ici la fermeté d’expression à laquelle les formules d’intonation nous avaient accoutumées. Souvent la conclusion s’étend sur deux vers, parfois sur trois. Elle garde toujours sa valeur pour le sens, mais on peut douter de sa puissance rythmique 57 . Plusieurs travaux s’accordent à ce constat 58 . C. Roussel va jusqu’à refuser la qualiication de « type » pour classer ces occurrences et préfère celle de « tendance générale 59 ». Le relevé de formes de conclusion des laisses de La Chanson de Bertrand du Guesclin 60 permet de formuler les mêmes conclusions. La partie inale de la laisse tend à s’allonger et il faut remonter parfois plusieurs vers ain de trouver l’élément d’impulsion qui indique l’achèvement. Nous penchons également pour des grandes tendances et non des types, contrairement au classement des vers d’introduction. Nous relevons trois grandes tendances : une conclusion centrée autour d’un ou plusieurs vers narratifs, une autre fonctionnant autour du discours et une dernière autour des interventions du narrateur-jongleur 61 . Qu’elles soient en introduction ou en conclusion, toutes ces occurrences peuvent être classées selon deux exigences distinctes. Dans un premier temps, les techniques anciennes sont directement reprises des anciens textes et appliqués à notre chanson. Dans un second temps, les méthodes épiques sont adaptées aux nouvelles contraintes 57. J. Subrenat, Étude sur Gaydon : chanson de geste du XIIIe siècle, Éditions de l’Université de Provence, 1974, p. 99. 58. On peut citer par exemple la conclusion de D. Boutet à propos de l’analyse des vers de conclusion de Jehan de Lanson : « Les aspects formels du procédé ont survécu tandis que le fonctionnement se faisait plus lâche, et suivant son évolution propre, à mesure que le genre épique subissait l’inluence du roman et se faisait plus narratif. », Boutet, Jehan de Lanson : technique et esthétique de la chanson de geste au XIIIe siècle, op. cit., p. 42. 59. « En dépit de ses contours lottants de l’élément conclusif, il est néanmoins possible de distinguer certaines tendances générales, qui corroborent globalement les quelques modèles esquissées par J. Rychner. » Roussel, Conter de geste au XIVe siècle : inspiration folklorique et écriture épique dans La belle Hélène de Constantinople, op. cit., p. 397. 60. Un tableau du classement exhaustif des conclusions de laisses peut être consulté en annexe E, p . 307. 61. Le tableau récapitulatif (p. 307) permet de classer les occurrences en cinq catégories diférentes. La catégorie « 1 vers narratif » et celle intitulée « proverbes ou expressions » ne sont en réalité que des sous catégories des grandes tendances déinies ici. Elles ont été séparées du reste à titre indicatif.
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stylistiques des chansons de geste tardives, particulièrement en conclusion. Comment se répartissent les éléments relevés dans les diférents tableaux ? Quelle est la part d’innovation du texte de Cuvelier dans ce domaine ?
Introductions classiques a. Type métadiscours Les vers d’introduction peuvent être les gardiens de la iction d’oralité entretenue par les épopées françaises du Moyen Age. Ces éléments métadiscursifs sont de trois espèces dans notre texte. On trouve d’abord les traditionnelles interventions de jongleur : Seigneurs, or escoutéz, pour Dieu le roy divin. (v. 1) Seigneurs, a icellui jour y ot assault moult grant (v. 8050) Le verbe voir peut également être employé de diférentes façons : Qui vist a celle heure les chevaliers monter (v. 4387) Atant véz les Juïfz, a qui Dieu doint encombrier. (v. 6870) Véz cy une raison faicte par les Juïfz. (v. 8620) Enin, le vers d’introduction peut évoquer la chanson elle même : L’istoire tesmoigne que Bertrant au corps gent (v. 665) La matiere nous dit et nous va tesmoignant (v. 18302) Toutes ces occurrences renvoient à des types très souvent utilisés par les diférentes chansons médiévales et relètent l’envie d’aicher clairement le choix du style épique. Leur place particulière dans l’ensemble de la narration est étudiée dans le chapitre suivant consacré à l’étude du cycle. b. Type Actoriel Dans les chansons anciennes comme dans les plus récentes, un des types majeurs de vers se trouvant en tête de laisse est celui s’ouvrant sur la mention d’un personnage. Si J. Rychner estime que, dans les premières chansons, les mentions se cantonnent à l’évocation du nom des héros en tête de vers, la catégorie nécessite un élargissement pour s’appliquer aux textes épiques plus récents. C. Roussel déinit ce type ainsi : Nom propre igurant en tête de vers (ou nom commun désignant un personnage par son titre ou sa fonction) et assumant la fonction
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Du Guesclin, objet épique sujet du verbe de la phrase 62 .
Nous avons opté pour une déinition encore plus étendue de ce type. Nous classons ici toutes les laisses du texte débutant par un vers utilisant dans le premier hémistiche un nom propre ou un nom commun ne renvoyant pas forcément à un animé humain et susceptible d’être l’instigateur d’une action. Le verbe, dont le nom en tête de vers dépend, est le plus souvent placé dans le second hémistiche ou rejeté aux vers suivants si le groupe nominal comporte une extension, qui le plus souvent s’avère être une proposition relative 63 . Les exemples de cette catégorie peuvent être classés selon quatre sous-types diférents selon l’environnement grammatical du premier hémistiche. ☞ Act. + estre Parmi les exemples relevés, on trouve des exemples de vers d’introduction assez typiques se composant d’un actant exprimé sous forme de nom propre ou nom commun suivi du verbe estre : Bertrant fu moult liéz quant cellui escouta. (v. 434) Henry fu moult doulant et plain de marrisson. (v. 6820) L’actant peut également être une entité plus abstraite : L’assault fu pesant et forment demenéz (v. 8206) La departie fu hideuse au desevrer (v. 10796) Le sujet en tête de vers peut parfois être pluriel en faisant référence à un groupe de personnes : François furent troys jours la bataille atendant (v. 20259) Ceulx de la ville furent esbahyz durement (v. 5262) Dans cette coniguration, le verbe peut être rejeté à la in du premier hémistiche ou en tête du second : Pietres le roy moult fu dolant et irascu (v. 8351) La princesse de Gales fu sage et vaillent. (v. 10623) Henry le roy d’Espaigne fu léz et joyant (v. 130149) Cette dernière remarque permet d’isoler les formes act.+ estre de celle composées d’un act. + verbe. En efet, seul le verbe estre ne semble pas pouvoir être éloigné de son sujet rejeté dans les vers suivants. 62. Roussel, Conter de geste au XIVe siècle : inspiration folklorique et écriture épique dans La belle Hélène de Constantinople, op. cit., p. 385. 63. Cf. ibid., p. 385.
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☞ Act.+ vb. Les mêmes remarques vues au dessus s’appliquent également aux exemples du type act. + vb. Bien entendu, on trouve des modèles classiques de premier hémistiche type nom de héros + vb. : Bertrant si vint a lui et avala sa lance (v. 1120) Le cappitaine vit Bertrant le chevalier (v. 1582) Les éléments se situant en tête de vers ne sont cependant pas forcément sujet du verbe principal : Toute gent de grant bien, hardie et combatant avoit en sa compaignie le noble Bertrant (v. 4109-10) La nature grammaticale désignant l’actant du premier hémistiche peut être différente de celle des exemples présents dans d’autres chansons : La trompecte Bertrant fu haultement sonnee (v. 4446) L’ost Charles de Bloiz s’est si bien exploictie (v. 5726) La pays du roy de France et du roy navarroys si fu faicte a Nervon, ce tesmoigne le voir (v. 6496-97) La table du roy Pietre, dont je vous voys comptant, ne saroit nombrer nul clerc lisant (v. 9026-27) On trouve à côté des noms propres et communs quelques exemples de nom avec expansion en ouverture de laisse 64 . c. Type descriptif Le type descriptif est sans doute celui qui illustre mieux la résistance des formules épiques dans le texte de Cuvelier. En efet, il s’agit là d’exemples utilisant une inversion entre le verbe et ses compléments, qualiiée souvent d’inversion épique tant elle a été usitée par les chansons de geste. On peut diviser les exemples en plusieurs sous-types selon le premier élément utilisé. ☞ Adverbe + estre Cette tournure, fréquemment employée dans les textes épiques plus anciens, n’est pas rare dans La Chanson de Bertrand du Guesclin : Moult fu dolant le duc, en lui n’ot que aÿrer (v. 1188) Moult furent les seigneurs esjoïz durement (v. 20551) 64. Nous avons choisi dans notre tableau d’isoler les exemples contenant une expansion. Il n’en reste pas moins qu’ils fonctionnent de la même manière que le type général act.+vb.
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Les deux exemples sélectionnés montrent que le sujet du verbe estre rejeté à la in du premier hémistiche peut être autant singulier que pluriel, même si la première option prédomine. On peut également rattacher à ce type les occurrences suivantes : En Bertaigne fu moult la guerre grandement (v. 2016) Le complément En Bertaigne est placé en tête du premier hémistiche ain d’éviter une césure du [ə] et ainsi conserver un vers de douze syllabes. Le sujet la guerre se trouve toujours après le verbe fu, l’inversion étant ainsi conservée 65 . ☞ Attribut + estre La coniguration attribut+estre+sujet est également caractéristique de l’épopée du Moyen Age. Cette catégorie est d’abord employée pour décrire des aspects de la bataille : Grant fu ceste guerre et moult empoestie (v. 2726) Forte fu la bataille de chascune partie. (v. 6106) Fiere fu l’envaÿe a ce commaincement. (v. 11214) Horrible fu l’assault, si dura longuement. (v. 20218) Elle peut être également utilisée ain de renseigner sur l’état d’esprit d’un personnage : Léz sont pour Bertrant ses proysmes et ses amis. (v. 522) Sage fu le bourjois et moult bien enparlé (v. 1307) ou servir à une description simple : Noble fu le digner, nul homs ne vit grigneur. (v. 17641) ☞ Impersonnel Un autre phénomène peut entraîner une inversion des éléments : la présence d’un verbe à tournure impersonnelle : Car dedens Forgeray avoit d’Englois plenté (v. 833) En Normendie avoit mains chasteaux souisant (v. 3446) A Melun ot assault qui fort fut maintenu (v. 3535) Avec Charles de Bloiz ot noble baronnie (v. 5384) 65. Dans l’exemple suivant : Noblement s’ordonnerent no crestïenné gent. (v. 15835), on remarque que l’inversion sujet/verbe est provoquée par la présence de l’adverbe noblement situé en tête du vers. On peut alors rapprocher cet exemple d’inversion de celle provoquée par le présence de l’adverbe moult en ouverture de laisse.
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En l’absence d’un sujet référentiel, c’est le complément le plus proche qui se retrouve postposé au verbe. Des éléments divers peuvent se trouver en première position tels que des compléments circonstanciels de lieu ou d’accompagnement. ☞ Vass’en L’inversion épique simple composée du verbe en tête de vers puis du sujet est rare dans notre texte. Lorsqu’elle est représentée, elle l’est de façon particulière : Vass’en l’Espaignol a pointe d’esperon (v. 8864) Va s’en le roy Henry, la champaigne a guerpie (v. 11962) Vass’ent Carenlouet a pié et sans destrier (v. 14904) Vass’ent Pietres le roy desconit et maté. (v. 14960) Le verbe aler et la préposition en se sont soudés pour former l’expression lexicalisée vass’en placée en ouverture de laisse. Tout l’arrière plan épique du copiste s’exprime ici en élevant au rang de formule un aspect stylistique d’inversion répandu dans les chansons. Les efets d’inversion permettent de rattacher le texte du manuscrit A au plus près des plus anciennes chansons de geste. Ces exemples restent cependant peu fréquents aux vues du nombre d’occurrences des autres types. d. Type rappel Le type « rappel » permet de faire référence en début de laisse à une situation exposée dans la laisse précédente. Dans la version donnée par le codex aixois, le vers débute généralement par les adverbes Or ou Ainsi et quelques autres bien plus rares comme Adont, Tant ou encore l’expression adverbiale En ce point. Le rappel ne dépasse pas le premier vers de la laisse et introduit toujours une proposition principale ou indépendante : Or fu Bertrant en l’ost entre lui et ses gens (v. 1414) Ainsi fu le conseil comme je vous voys comptant. (v. 1271) Ensuyvant est Bertrant a Guimgamp demouré (v. 2981) L’étude de l’exemple suivant permet d’illustrer son fonctionnement : Laisse 27 : Bertrant de sa grant hache lui va un tel cop parer le chief lui pourfendy et tout le hannepier, a terre l’abbaty, ce fu sans redrecier. (v.753-55) [...] Laisse 28 : Or fu le chevalier ainsi a la mort mis (v. 763)
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Le premier vers de la laisse 28 résume en une proposition indépendante l’action principale de la laisse 27. Bertrand, tombé nez à nez avec un chevalier anglais très bien armé, le tue lors d’un combat et en proite pour lui subtiliser ses afaires. Le vers de rappel réduit l’information de la laisse qui précède à son minimum et permet de créer un lien narratif entre les subdivisions du texte. e. Discours Une part non négligeable des laisses du texte s’ouvre sur la prise de parole d’un personnage 66 . Elle peut être directe : « Seigneurs, se dist Bertrant, voléz vous que je vous dye » (v. 2430) « Chastellain, dist Bertrant, par la virge Marie, » (v. 5117) « Ha, dist le roy Henry, par Dieu, seigneurs baron. » (v. 10867) Comme les montrent ces exemples, le vers s’ouvre soit par une apostrophe, le plus souvent seigneurs, soit par une interjection (Ha). L’apostrophe est toujours suivie d’une incise indiquant qui est le personnage qui prend la parole. Le vers peut également s’ouvrir sur une incise : Le chastellain a dit : « Sire, Bertrant gentilz, (v. 5135) Dist dam Pietre le roy qui la chiere ot iree : « Véz cy riche conseil, bien me plaist et agree. (v. 9764) L’incise peut être contenue dans le premier hémistiche ou bien s’étendre sur la totalité du vers si le nom est suivi d’une extension. Enin, on trouve un exemple de discours narrativisé en ouverture de laisse : Le roy Pietres manda ses bourjois naturelz. Et ilz y sont venuz quant il les a mandéz. (v. 8401-02) L’intérêt de cette catégorie réside dans le lien qu’elle entretient avec la laisse qui précède. Ces efets d’enchaînement sont étudiées dans une partie suivante. La Chanson de Bertrand du Guesclin présente donc des caractéristiques de chansons bien plus anciennes. Le codes d’écriture sont conservés et inscrivent pleinement le texte dans le genre épique. Cependant, certains types d’introduction et de conclusion ne rentrent pas dans les cadres mis au jour par les analyses de textes plus vieux. Faut-il voir dans cette relative nouveauté une adaptation de codes préexistants ou bien une volonté de s’afranchir du genre ? 66. Le même type est relevé par C. Roussel dans son étude de La Belle Hélène de Constantinople Roussel, Conter de geste au XIVe siècle : inspiration folklorique et écriture épique dans La belle Hélène de Constantinople, op. cit., p. 393.
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Des techniques expérimentales ? Les relevés pratiqués révèlent que les techniques non répertoriées précédemment sont présentes majoritairement en conclusion. La in de laisse semble un lieu propice à l’originalité. a. L’explosion du discours De nombreuses laisses du corpus se terminent par un élément déjà présent dans certains textes épiques plus anciens : le discours. En efet, D. Boutet dans son étude de Jehan de Lanson remarque que la moitié des laisses du texte étudié se termine par un discours 67 . Cependant, cette caractéristique n’est relevée ni dans La Belle Hélène de Constantinople ni dans Gaydon. Les vers de clôture utilisant un discours dans les textes épiques sont ceux qui contiennent l’avis d’un personnage ou d’un groupe de personnages exprimé sous forme de discours direct, comme : Et chil ont repondu : « Vous parlés sagement. » 68 Or, cette technique est utilisée en écrasante majorité par notre texte. Quels sont les caractéristiques de cette spéciicité ? ☞ Avis d’un personnage Les conclusions reprenant l’avis d’un groupe ou d’un personnage sont bien présentes dans notre texte d’étude. La part de discours direct se concentre sur un hémistiche, plus rarement sur un vers entier : Et la dame respont : « Je croy qu’il se esmeut ja. » (v. 133) a soy mesmes dist qu’il ne fust pas oÿ : « Je tiendray le marché que j’avoie promis. » (v. 1955) « Véz cy riche conseil », dient les mescreans. (v. 8591) L’exemple du vers 8591 montre que l’incise peut se trouver dans le second hémistiche du vers, selon les besoins de la rime. Cette clôture traditionnelle de l’épopée médiévale française devient cependant minoritaire dans le texte célébrant le chevalier breton. ☞ Discours de plusieurs vers 67. « Soixante-douze laisses s’achèvent sur de tels vers de conclusion, soit près de la moitié du total. », Boutet, Jehan de Lanson : technique et esthétique de la chanson de geste au XIIIe siècle, op. cit., p. 32. 68. Il s’agit du vers 4778 de La Belle Hélène de Constantinople cité par C. Roussel dans son étude, Roussel, Conter de geste au XIVe siècle : inspiration folklorique et écriture épique dans La belle Hélène de Constantinople, op. cit., p.397.
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La majorité des laisses présentant un discours inal se termine par un agencement d’un autre genre. En efet, bien loin de l’hémistiche de conclusion présentant la parole du groupe, les laisses du texte s’achèvent très souvent par un discours de plusieurs vers, qui s’étend parfois sur plus d’une dizaine de lignes 69 . Les exemples suivants témoignent de cet allongement : 1. Et le portier lui repond : « Ce fait a gaigner. J’avoie grant besoign d’avoir tel prisonnier. » (v. 12886-87) 2. « Dieu, dient les enfans de leur droit sentement, comment Bertrant sera de grant entendement. Dieu lui doint bonne in, a qui le mons apent, de venir a honneur a bon commaincement. » (v. 191-94) 3. Dist le conte Henry : « Je le voys clerement. Dieu m’en veille vengier, voyres, si vrayment que pour verité dire et faire justement j’ay la haÿne a lui ainsi villainement. Ne veil pas que pour moy aiéz encombrement, je m’en departiray asséz prochainement. » (v. 7050-55) 4. Et Bertrant du Guesclin s’escrioit a ault cry : « Avant. Assailléz fort, mes bons loiaux amis. A Dieu le veu. Ces gars sont ja touz desconiz. Tout l’avoir de leans vous est a bandon mis. » (v. 20214-17) L’exemple n°1 peut facilement être interprété comme un allongement du vers de conclusion donnant l’avis d’un personnage. En revanche, les autres exemples ne semblent pas relever d’un type particulier. Les paroles d’Henry dans la citation n°3 ne sont que la réponse à un personnage aragonais chargé de lire une lettre de Pietre. Il en va de même pour les paroles de Bertrand dans l’exemple n°4. Ils sonnent comme un ajout aux événements de préparatifs militaires décrits en amont de la laisse. Cet efet d’ajout est d’autant plus renforcé par la conjonction Et placée en amorce du discours. Si la technique de clôture d’une laisse par le discours existait déjà dès les premiers textes épiques français, elle est ampliiée de manière exponentielle dans la chanson qui nous occupe. Cette augmentation est telle qu’on trouve également en in de laisse d’autres type de discours que le discours direct : 69. Citons pour exemple le discours de Bertrand qui clôt la laisse 675 et qui s’étend sur plus de quarante lignes.
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1. et si lui i serement et bien lui iança que, s’il puet exploitter, Charles lui rendra. (v. 831-32) 2. Encores dit Merlin, ou temps qu’il sortissoit, que ce chevalier si erement regneroit en toutes les parties ou il habiteroit et que de la nature d’un oysel porteroit que l’on appelle estournel, que l’on prent o un ret. (v. 3271-75) 3. Un hayraut qui estoit d’une tunique vestu appella le Castal qui bien fu entendu. (v. 4500-01) 4. Dont parla le vassal a touz les barons et a touz les Anglois et aussi aus Bretons et aus fors Navarroys et aussi aus Gascons. (v. 7290-92) Les deux premiers exemples montrent que la conclusion de laisse peut s’efectuer à l’aide d’un discours rapporté. Les deux dernières citations ofrent des exemples de clôture de laisse au moyen d’un discours narrativisé. Le discours devient dans La Chanson de Bertrand du Guesclin la marque incontestable d’une in de laisse. Toutes les sortes y sont représentées, bien que le discours direct reste de loin l’élément le plus utilisé. Cette utilisation du discours en in de laisse dans des proportions immenses semble particulière au texte de Cuvelier, rendant ainsi prégnante une technique épique pourtant moins systématique dans les textes plus anciens. b. Vers plus de narrativité Plusieurs techniques d’introduction et de conclusion particulières au texte ont pour but de garantir la luidité des enchaînements narratifs des événements des diférentes laisses, perdant de vue le lyrisme originel du genre. Type Actoriel Un phénomène rencontré dans les occurrences du type d’introduction « actoriel » peut nous renseigner sur de nouvelles dispositions appliquées à la laisse. Dans les exemples de cette catégorie, le verbe principal accompagnant le référent exprimé au premier hémistiche peut se trouver aux vers suivants 70 : 1. Bertrant de Guesclin, avec plenté de gent, se party de Roen bien et hardiement (v. 4970-71) 70. Les exemples de rejet du verbe ont été séparés des autres dans le tableau récapitulatif et sont rangés dans la case correspondant au sous type ”act. + ø” ain d’en faciliter le repérage.
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Du Guesclin, objet épique 2. Les compaignons Bertrant, ceulx de devant et de derrier qui sur eulx vont portant la busche et le ramier, pour l’amour de Bertrant qu’ilz voyent approchier n’osoient retorner ne de lui esloigner. (v. 910-913) 3. Le chevalier engloiz qui fu en pameson, quant il revint a lui, il n’ot se douleur non. (v. 10130-31)
Le rejet du verbe aux lignes suivantes peut se faire avec n’importe quel type d’actant, du nom propre au complément du nom en passant par le nom commun désignant une fonction. Dans le texte donné par le manuscrit A, on constate que la place du verbe principal par rapport à l’actant exprimé en tête d’hémistiche est variable autant que l’entité référentielle est diverse. Il y a donc bien dans ce texte une dislocation du vers. Celui-ci n’est plus ressenti comme une unité, la séparation du verbe principal d’avec son sujet témoigne de l’allongement de l’ensemble narratif. Compléments circonstanciels La laisse peut s’ouvrir sur un complément circonstanciel de lieu, de temps et plus rarement par un complément d’une autre nature 71 . Les compléments de lieu sont le plus souvent des noms de villes : Par dedens Forgeray fu grande l’envaÿe. (v. 956) Il peuvent également être des noms communs avec pour référent un lieu intradiégétique : Enmy ceste bataille qui forment s’esforça 72 (v. 5957) Parfois, les deux options peuvent se combiner : En la ville d’Alroy estoient les Engloys (v. 5602) Les circonstancielles de temps sont en grande majorité introduites par la conjonction quand 73 : Quant le prince oÿ si l’evesque parler, a rire commainça, il ne s’en peu cesser. (v. 12306-07) 71. Pour une liste des laisses s’ouvrant sur un autre complément voir dans le tableau récapitulatif l’onglet ”autres c.c.”, annexe D, p. 303. 72. Le substantif bataille est à entendre ici au sens concret de « bataillon ». 73. La liste des autres outils introducteurs d’une proposition circonstancielle de temps est donnée dans le tableau récapitulatif en annexe D, p. 303.
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Deux diférences majeures séparent le type ”rappel” du type ”proposition circonstancielle”. La première est grammaticale. De par leur nature, les propositions temporelles et locatives qui occupent le premier vers ne sont pas des propositions principales et il faut parfois parcourir plusieurs vers avant de la trouver. La seconde diférence est narrative. Nous avons vu que le vers de type ”rappel” résume l’action précédente avant de relancer la narration. La proposition circonstancielle entretient un lien diférent avec celle qui précède. L’exemple suivant permet de mettre en lumière cette diférence : laisse 286 Touz les chevaliers et les hommes vaillans enclinerent Henry et le vont honnourant, car de son fait savoient l’aventure pesant, et comment le roy Pietres ala si mal regnant et Sarrazins aussi aloit il soustenant, et de sa femme aussi qui de bonté ot tant, qu’il y a fait mourir ; or lui viendra devant. Moult haÿ l’en avoient les petis et les grans. (v. 7723-30) laisse 287 Quant Bretrant vit Henry le noble guerrier, lors l’ala vistement tout par amours baisier (v. 7731-32) La proposition circonstancielle ne résume pas mais apporte une information nouvelle quant à la situation mise en place en in de laisse précédente. Dans l’exemple ci-dessus, la laisse 286 se clôt sur la description d’un hommage à Henri par ses hommes. La laisse 287 s’ouvre en précisant l’attitude de Bertrand lors de cet hommage. Ce type de vers crée moins de rupture entre les laisses et permet une transition plus luide en conservant la même situation diégétique que celle de la in de la laisse qui précède. La laisse s’ouvrant sur une proposition circonstancielle est un prolongement de la précédente. La spéciicité de ce type d’introduction fait que ces vers sont les plus nombreux. En efet, avec l’expansion que connaissent les chansons de geste à partir du XIVe siècle, le besoin de continuité narrative devient de plus en plus important. Les multiples occurrences de ces circonstancielles au détriment d’outils stylistiques plus classiques tels que l’inversion épique traduit l’accroissement de la partie narrative du texte épique contre la diminution drastique de phénomènes lyriques de répétition qui caractérisaient des textes plus anciens. Cette ampliication présente en début de laisse est d’autant plus visible en conclusion, place tonique déjà plus lâche dans les chansons anciennes.
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Une conclusion pleinement narrative L’élément le plus caractéristique du relâchement inal de la laisse est la grande proportion de vers narratifs utilisés pour clore une strophe. La conclusion peut se faire en un vers, à la manière des chansons de geste plus anciennes : — Et si fondy la mine, ne valu .i. bouton. (v. 1187) — De ce avoit Bertrant forment la chiere iree. (v. 5053) ou bien sur plusieurs vers : — Et quant il ot oÿ messe et le sacrement, tout droit au cappitaine ala appertement et la le it armer bien et sou sament. (v. 1725-27) — Chascun a son retour a trait l’espee forby puis se sont assembléz de cuer fel et hardy. (v. 2483-84) En comparant les occurrences classés sous cette tendance, il est tout de même possible d’ainer notre analyse. On trouve d’abord des vers de conclusion s’ouvrant sur des adverbes de type Lors, Ainsi ou La. 1. Lors — Lors se baise au partir et touz les compaignons. (v. 10795) — Lors lui tendy les clefz et se mist en sa baillie et Bertrant entra dedens et o lui sa baronnie. (v. 3249) 2. Ainsi — Ainsi le chastellain de la ville maistria. (v. 13253) — Ainsi par le païs est ceste gent passee, a si grande puissance venue et atraynie que ne le vous diroit personne qui soit nee. (v. 10971-73) 3. La — La ot bien .C. bourreaux de nouveaux devenuz. (v. 19522) — La it le roy Henry une telle envaÿe c’onques prince ne t aventurant sa vie, tellement que a ce jour monstra sa felonnie. (v. 11645-47) Certaines parties conclusives débutent par l’expression d’un complément circonstanciel de lieu ou de temps avec la conjonction quant : 1. Temps — Et quant Bertrant le voit, de sa jument descent, 74 74. La présence de la locution Et quant plutôt que quant en in de laisse est analysée par C. Roussel, Roussel, Conter de geste au XIVe siècle : inspiration folklorique et écriture épique dans La belle Hélène de Constantinople, op. cit., p. 398.
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envers le chevaliers sa droite voyë prent. (v. 724-25) — Quant la dame le vit, si cogneu son talent. (v. 12231) 2. Lieu — Hors de Burs sont yssuz, comme demie leue encontrerent la dame, blanche comme une fee. (v. 8774-75) — Au chastel Jousselin estoient les Françoys. (v. 5619) Les vers narratifs peuvent également commencer par un élément grammatical faisant référence à un personnage : 1. Bertrant lui it honneur et bel don lui donna. (v. 14471) 2. Le roy de Bel Marin trés bien les pourveÿ et tremist parmy mer tout ce qui leur failly. (v. 14336-37) 3. Cellui devant le saint se mist en oroison, en celle eglise usa sa vie, se dit on. (v. 6405) Le personnage peut être désigné par un nom propre, un nom commun représentant sa fonction ou encore un pronom. Enin, certaines conclusions sont annoncées par la présence d’une inversion épique : — Lïéz furent aucuns et l’autre dolant car des vivres avoient plus que l’on n’aloit pensant. (v. 1914-1915) — Moult fu grande la guerre en celle regïon. (v. 13805) Ces diférents exemples ne sont pas sans rappeler les types mis au jour lors de l’étude des vers d’introduction. En efet, on retrouve dans les vers narratifs de conclusion plusieurs techniques propres au vers d’ouverture de laisse comme l’utilisation du type rappel (or, ainsi), du type descriptif, de l’élément circonstanciel ou encore du type actoriel avec mention d’un personnage dans le premier hémistiche. On retrouve également des fonctionnements similaires à ceux étudiés dans la partie précédente. Prenons par exemple une occurrence de in de laisse à rattacher au type « rappel » : Ainsi comme les faulx angelz furent du ciel versé par l’ourgueil et par le vice ou ilz furent entré, ainsi chëu le prince dont je vous ay compté. (v. 10559-61) Il est évident que l’allongement de la laisse et de la masse narrative du texte ne permet plus aux auteurs de composer des vers de conclusion forts de la même manière que les textes anciens. Cependant, cet afaiblissement semble être compensé par l’usage de procédés spéciiques au vers d’ouverture de laisses qui ont conservés leur naturel plus puissant, comme nous l’avons montré plus haut. Si la
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conclusion des laisses de La Chanson de Bertrand du Guesclin tend, comme ses homologues de la in du Moyen Age, vers plus de narrativité, elle ne reste pas moins une place tonique importante et un marqueur du renouveau du style épique des épopées tardives, souhaitant s’adapter aux goût du jour tout en conservant des techniques séculaires. Ces occurrences sont les témoins de la conscience de l’auteur pour l’importance de cette place inale de la strophe dans les textes plus anciens. Les techniques épiques d’indication d’un rythme fort en début de strophe, toujours en vigueur à la in du Moyen Age, sont donc réutilisées ain de conserver une certaine rythmique de in de laisse. c. Métadiscours : du jongleur à l’auteur Les interventions du narrateur-jongleur constituent une des grandes tendances du texte ain de terminer une laisse. Cette particularité se retrouve dans pratiquement tous les textes épiques du Moyen Age qui continuent de cultiver la iction d’oralité comme marqueur indéniable du style épique. Ces interventions sont de plusieurs sortes. On trouve quelques exemples d’expressions invitant le public ictif à écouter le jongleur de plus près ou prêter attention à un élément de la trame narrative : — Atant véz cy les Engloys a pennon de cendal et regardant Françoys qui estoient aval ; ne les prisoient pas la monte d’un estal. (v. 4256-58) — Or oiéz de Bertrant de quoy il s’avisa : le conseil a mandé et chascun y ala pour oÿr de Bertrant ce que dire vouldra. (v. 4360-62) La majorité des exemples se caractérise par une autre type d’intervention que nous qualiions de narrative dans le tableau classant les diférents exemples 75 : 1. Par dela l’ayve dure, pour certain le vous dy, sont venuz les Françoys arméz et iers vesty ; si se sont descenduz enmy le pré lory. (v. 4176-78) 2. Touz pillars, murtriers, traÿteurs et larron estoient en la route dont je foys mencïon. (v. 7079-80) 3. Or nous dit la matiere par droite verité tant tindrent la cité en grant cruaulté qu’il en moru leens de fain, de lascheté, tant Juïfz, Paiens, que de Crestïenté, tant grans que petis .xxxm. passé. (v. 16795-99) 75. Voir annexe E, p. 307.
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Le narrateur peut ainsi se manifester en in de laisse ain d’apporter des précisions concernant l’élément décrit en amont (exemple n°2), attesté de la vérité du propos principal (exemple n°1) ou encore prolonger les données narratives de la laisse en donnant des informations supplémentaires (exemple n°3). Les propos du narrateur peuvent également renseigner le lecteur sur des faits à venir : 1. Ceste matiere si vous voys ramentevant pour revenir au fait du noble Bertrant et dire les proesces de quoy le ber it tant, oncques autant n’en irent Olivier ne Rollant. (v. 587-90) 2. Oncques homme ne fu, se croy je, si fortuné : en Engleterre fu prouvé et esgaré jusques de cy a ung temps que bien oïr porréz. (v. 6644-46) 3. Puis la donna dam Pietre, comme treuve lisant, au prince des Galois, ou tant ot de bonbant, tout droit en Angoresmes, si comme orréz avant recorder, si vous plaist, en un noble romant. (v. 9049-53) 4. Pour ce point fu le roy Pietres en la in meschant que morir lui convient, il estoit bien temps. Faussement ot regné, tout ainsi que un tirant. Si morra malement, comme orréz comptant. (v. 16173-76) Ces occurrences d’interventions de jongleur utilisent des prolepses ain de décrire les événements futurs et créer ainsi un horizon d’attente pour le lecteur. Ces exemples s’avèrent cependant diférents de la technique de captatio benevolentiae présente dans les textes plus anciens. Certes, on retrouve toujours le verbe oïr au futur permettant d’introduire l’idée d’un public ictif. Cependant, si nous regardons de plus près l’exemple n°1, on remarque une diférence notable d’avec les conclusions anciennes. Le narrateur utilise dans ces vers une technique de métadiscours plus poussée. En efet, les interventions de jongleur ont pour efet de créer un niveau métadiégétique dans lequel le jongleur se met en scène comme si le moment de lecture correspondait au moment de récitation. Ici, plus que le jongleur, c’est bien le narrateur qui se représente comme étant celui qui tire les icelles du récit. Il n’est pas question dans cet exemple d’intensiier un fait ain de le porter au regard des spectateurs, mais de démonter les icelles du récit ain de les exposer au lecteur. Le narrateur se justiie de son récit précédent (Ceste matiere si vous voys ramentevant pour) et annonce les événements qu’il
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va décrire ensuite (pour revenir au fait du noble Bertrant et dire les proesces de quoy le ber it tant). Les propos sont toujours orientés vers le maintien d’une iction d’oralité (présence du verbe dire v. 589) mais sont d’un autre niveau. De la technique des jongleurs, La Chanson de Bertrand du Guesclin conserve cette capacité à rompre la trame ain de s’adresser directement au lecteur. Les propos tenus par le narrateur sont utilisés ain de capter l’attention mais également pour donner des informations sur la narration qui est mise en place. Ces exemples sont les parfaits représentants de l’évolution du genre épique qui, en croisant la technique romanesque à la in du Moyen Age, prend plus de hauteur ain de réléchir sur lui même et en informer le lecteur. Plus qu’une iction d’oralité, c’est une iction de composition qui est présentée dans ces interventions. L’analyse des types d’ouverture et des tendances de conclusion des laisses de La Chanson de Bertrand du Guesclin fait émerger plusieurs remarques. D’abord, l’auteur de la chanson connaît les techniques épiques anciennes et sait les utiliser au besoin. Ensuite, contrairement aux résultats des analyses d’autres textes, la in des laisses du texte ne semble pas s’afaiblir. L’auteur cherche à ce qu’elle reste un espace tonique porteur de marques d’emphase. Les clôtures sont le laboratoire de nouveaux essais ain de concilier l’ancien et le nouveau et donner toute sa qualité épique au texte. Il n’en reste pas moins que, dans les épopées médiévales françaises, l’agencement interne des laisses compte autant que le rapport que les strophes épiques entretiennent entre elles. Comment les laisses de la chanson s’enchaînent-elles ? Peut-on mettre au jour des procédés de composition interstrophiques propres au style épique ?
3.2.2
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Enchaînements et reprises de laisses
La technique d’enchaînement des laisses est une pratique spéciique de l’écriture épique du Moyen Age. L’enchaînement est un des phénomènes stylistiques qui fait de la laisse un élément textuel au-delà du narratif 76 . D. Boutet le déinit ainsi : L’enchaînement, originellement beaucoup plus fréquent, a deux effets, sinon deux inalités : il lie fortement entre elles deux laisses successives, du point de vue formel, et il introduit un phénomène de 76. « Le problème est là : la laisse est d’abord une forme, et la narration, dans une chanson de geste, se présente comme une succession de cellules formelles qui entretiennent entre elles des relations complexes, qui ne sont pas seulement sémantiques. », Boutet, La chanson de geste : forme et signiication d’une écriture épique du Moyen Age, op. cit., p. 160.
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répétition et de variation qui correspond bien à l’esthétique générale du genre. Cette technique consiste en efet à reprendre, dans le ou les premiers vers d’une laisse, soit le contenu et/ou les formules du ou des derniers vers de la laisse précédente, soit des éléments choisis, épars ou non, de cette laisse avec, bien entendu, un changement d’assonance ou de rime qui impose un minimum de variation 77 . J. Rychner a dénombré trois types d’enchaînements caractéristiques des chansons de geste : bifurqué, dispersé et en escalier 78 . D. Boutet dans son analyse de Jehan de Lanson en ajoute d’autres, portant au nombre de quatorze les phénomènes possibles 79 . Quels sont les types d’enchaînements présents dans La Chanson de Bertrand du Guesclin ? Les principaux types d’enchaînement du texte seront privilégiés en isolant les particularité de La Chanson de Bertrand du Guesclin, sans prétendre épuiser les possibilités qu’ofre le texte, tant les combinaisons s’avèrent nombreuses.
Enchaînements classiques Certaines formes de techniques anciennes se trouvent dans le texte. Les enchaînements simples sont nombreux. L’enchaînement linéaire ou vertical 80 qui consiste en la reprise de l’élément conclusif au début de la laisse suivante est très souvent employé. Il permet une reprise tout en favorisant la variation 81 . Les représentants de cet enchaînement sont de plusieurs types. Enchaînements linéaires On trouve d’abord la reprise simple, qui peut être une répétition de mot ou de partie d’hémistiche : laisse 304 Et cellui de la Hussoie y soufry moult d’ahan car il fu renvoié es fousséz trebuschant ; bien ot les brafz rompuz, dont il fu moult pesant. laisse 305 L’assault fu pesant et forment demenéz. (v. 8203-06) 77. Ibid., p. 82. 78. Rychner, La chanson de geste : essai sur l’art épique des jongleurs, op. cit., p. 74–82. 79. Boutet, Jehan de Lanson : technique et esthétique de la chanson de geste au XIIIe siècle, op. cit., p. 63–78. 80. Subrenat, Étude sur Gaydon : chanson de geste du XIIIe siècle, op. cit., p. 110. 81. « La reprise simple n’est jamais une reprise mot pour mot. Le trouvère s’ingénie à mettre en œuvre des techniques de variation toujours diférentes. », Boutet, Jehan de Lanson : technique et esthétique de la chanson de geste au XIIIe siècle, op. cit., p. 69.
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L’attribut pesant est employé tantôt pour qualiier l’état du chevalier de la Hussoie blessé au combat, tantôt pour déinir la fureur de la bataille. La répétition de l’adjectif pesant dans les vers d’ouverture et de fermeture permet de lier les deux laisses par delà le narratif. La reprise peut-être également celle d’une idée ou d’un thème : laisse 3 En mains lieux disoit on que enfans nouveaux néz : « Taiséz vous ou ja le comparréz. Bertrand du Guesclin est deça arrivé. » laisse 4 Tout au commamcement de mon bon romant vous diray la vennue du noble Bertrant. (v. 44-48) L’enchaînement se fait sur la reprise du thème de l’arrivée de Bertrand, exprimée d’abord par le verbe arriver au vers 46 puis par l’emploi du substantif venue au vers 48. Cet enchaînement placé au tout début du texte permet au narrateur de faire une distinction importante. La clôture de la laisse 3 comporte comme verbe introducteur de discours disoit à l’imparfait, alors qu’on trouve au vers 48 la forme future diray. Cette répétition permet de faire la séparation entre igure historique du passé et igure littéraire en devenir qu’est le Bertrand du texte pour reléguer au passé l’image d’ogre qu’a le connétable dans la mémoire collective. Certains agencements peuvent être plus airmés : 1. laisse 290 De la doleur qu’il ot a terre se gicta. laisse 291 Dam Pietre fu dolant et la chiere ot iree. (7847-49) 2. laisse 474 Ainsi s’en va Bertrant, a Dieu se commanda. laisse 475 Ainsi s’en va Bertrant qui cuer ot de lÿon. (v. 13670-71) 3. laisse 287 Tout droit au Chastel Blanc a fait Bertrant logier. laisse 288 A l’entrer d’Arragon, au lieu par de deça, tout droit au Chastel Blanc Bertrant se logea. (v. 7746-48) Dans l’exemple n°1, l’idée de douleur se trouve exprimée dans le premier hémistiche de chaque vers, liant les deux laisses par la répétition d’une même idée, une première fois par l’utilisation du substantif doleur, un seconde par l’emploi de l’attribut dolant. La citation n°2 permet de voir une réutilisation d’un hémistiche entier entre les frontières des laisses 474 et 475. La première moitié de chaque vers, Ainsi s’en va Bertrant, est utilisée sans modiication, seul le second hémistiche fait passer une information nouvelle.
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Avec l’exemple n°3, la narration ralentit encore un peu plus. Le premier hémistiche tout droit au Chastel Blanc est répété au vers 7746 et 7748. Le second hémistiche reprend la même idée mais exprimée de façon diférente, celle du logement de Bertrand. Seul le vers 7747, en ouverture de la laisse 288, apporte un supplément d’information quant à la localisation précise du Chastel Blanc. Cependant, l’action principale est répétée sans qu’il y est une avancée narrative ou une diférence de perspective, prolongeant l’attente de la suite des événements. Du discours au discours Un des principaux enchaînements formels du texte est un enchaînement de discours. En efet, lorsqu’un discours, quel qu’en soit le type, débute une laisse, il suit le plus souvent un discours clôturant la laisse précédente 82 . Prenons pour exemple l’enchaînement entre les laisses 89 et 90 : laisse 89 « Comment ? ce dist Bertrant, il ne doit .i. bouton. Et il est, ce m’est advis, coutume et bien raison que si un homme est a tort mis en prison il en doit purement avoir delivroison. » laisse 90 « Seigneurs, se dist Bertrant, voléz vous que je vous dye » (v. 2426-30) Le discours de Bertrand est fractionné en deux parties. Si le locuteur reste le même, c’est l’interlocuteur qui change entre ces deux laisses. Le discours clôturant la laisse 89 était une réponse à une intervention de Robert Canole aux vers 2415-25. Le changement de laisse permet de donner à Bertrand de nouveaux interlocuteurs signalés par l’apostrophe Seigneurs au vers 2430. Le discours n’est donc pas simplement fractionné entre deux laisses ain de donner au texte une couleur épique. Au contraire, les possibilités stylistiques épiques sont exploitées pour créer un ralentissement de la narration inhérent au style du genre. Enchaînements horizontaux A côté des reprises simples, le texte ofre quelques exemples d’enchaînements horizontaux : laisse 138 Guillaume de Lonnoy qui estoit bien soultilz, leur a dit : « Beaux seigneurs, j’ay gicté mon advis comment Mante aurons ains deux jour acompliz. » Ores escoutéz comment le fait en fu bastiz. 82. L’inverse n’est pas à considérer comme valable. La masse importante de discours clôturant les laisses du texte invite à considérer ces paroles inales comme pouvant faire partie de divers procédés.
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Du Guesclin, objet épique Un jour prist de ses gens du tout a son devisz et si les a moult bien la vespree garniz : a loy de vignerons en a trente vestiz, ainsi comme vignerons se tenent ou païs quant ilz devoient aler es vignes du pourpriz ; en tel point proprement les a Guillaume mis : jacques et haubergons ont dessoubz leurs abiz et les riches couteaux et les bons brans fourbiz et leur a dit : « Seigneurs, entendéz a mes diz. Ainçoys que soit demain le droit jour esclarsy, je me iray embuscher si pourveü d’amis que je ne seray ja de mil homme sourpriz. » laisse 138 Si a dit le chevalier : « Seigneurs, ne vous doubtéz. A Mante de matin appareilléz seréz a loy de vigneron, ainsi comme vous veéz. Je seray en l’aguet richement ordonnéz. A la porte de Mante deux a deux vous iréz. A l’ouvrie de la porte, si tost que vous verréz la proye de la ville qui s’en va sur les préz, bien et hardiement la porte prendréz en encontre les gardes fort vous combatréz. Et se ainsi vous le faictes comme ouÿ avéz, nous entrerons dedens de combatre apprestéz, encores ne sera pas le commun tout levé la ville conquerrons, nostre est la fermeté, et Bertrant du Guesclin nous sera prés asséz. » (3711-39)
Le plan d’attaque de la ville de Mante est rapporté deux fois : une première fois dans la seconde moitié de la laisse 138 et une seconde fois au début de la laisse 139. La reprise se distingue de ce que l’on trouve dans les plus anciennes chansons. Alors qu’on attendrait plutôt deux discours diférents de Guillaume de Lonnoy reprenant les principaux détails du plan d’attaque, le premier discours est interrompu au moment même où l’annonce d’une stratégie est faite (v. 3712-13). Le narrateur prend alors la parole pour décrire lui-même la ruse mise au point puis la rend à Guillaume en guise de conclusion pour exposer sa propre action au sein du plan général à l’aide d’une première personne (je v. 3725-36). Enin, la laisse 139 s’ouvre sur le discours attendu de Guillaume présentant l’ensemble des faits.
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La reprise n’est donc pas directement parallèle. Le procédé ancien est revu ain, semble-t-il, de ne pas répéter frontalement deux fois le même épisode. Certes, les laisses parallèles des plus anciens textes épiques ne sont pas des répétitions directes, mais introduisent elles aussi une variable entre chaque strophe narrant le même événement. L’exemple montre que le fossé se creuse entre les deux parties de laisses. L’intervention du narrateur prenant à sa charge le récit éloigne les deux répétitions en ne les plaçant pas sur le même plan diégétique et temporel, l’un étant intégré à la diégèse et l’autre au moment de la iction d’énonciation. Le curseur de variabilité inhérente à la technique des laisses parallèles et similaires est repoussé un peu plus loin ain de ne pas retarder plus que de raison une narration déjà très fournie. Cette dernière remarque peut également expliquer la propension du texte à ne pas employer la répétition sur plusieurs laisses mais seulement sur des morceaux plus ou moins larges de strophes.
Reprises particulières L’analyse d’un exemple d’enchaînement horizontal montre que, si les procédés de répétition sont bien employés dans le texte, ils le sont de manière plus ténue que dans des chansons plus anciennes. D’autres techniques de répétitions peuvent être décelées grâce à l’étude des vers d’introduction et de conclusion. L’étude des tableaux de vers d’introduction et de conclusion 83 révèle que des reprises ont lieu ailleurs qu’aux frontières de laisses. Comparons l’introduction des laisses 129 et 130 : laisse 129 Le duc de Normendie manda de ses amis pour aler a Melun ou il estoit haÿ. (v. 3482-83) laisse 130 Le duc de Normendie it lors appareiller pour livrer a Melun un grant assault pleinier. (v. 3513-14) Les deux premiers vers de ces laisses se répètent autant sémantiquement que structurellement. Les vers 3482 et 3513 ont en commun le premier hémistiche Le duc de Normendie suivi d’un verbe au passé simple (manda, it). Les vers 3483 et 3514 comportent également des éléments communs à chaque premier hémistiche : pour + vb. ininitif + a Melun. Le contenu des laisses est pourtant diférent. La première fait le récit de la semonce du duc de Normandie et des chevaliers qui y répondent favorablement. La seconde raconte le début de l’assaut de Melun. Les laisses ne sont donc ni similaires ni parallèles. La narration ne 83.
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Du Guesclin, objet épique
s’en trouve pas ralentie, elle continue au contraire de manière linéaire. Leur composition fait tout de même part de répétitions présentant un autre lien que la simple continuité narrative 84 . Certains passages illustrent un lien encore plus prononcé. Les laisses 416 à 419 décrivent la déroute de la bataille de Nadres après la désertion du contingent espagnol engagé auprès d’Henri. Leurs introductions sont sensiblement similaires : laisse 416 Quant les Espaignolz virent leurs seigneurs approchier, ceulx qui furent devant moustroient le derrier. (v. 11847-48) laisse 418 Quant Bertrant du Guesclin le chevalier oÿ, tantost isnellement la presse derompy. (v. 11899-900) laisse 419 Quant le roy a oÿ parler le bon Bertrant, il tint trayte l’espee qui d’or va lambïant. (v. 11936-37) Là encore structure et mots se répètent. L’intensiication du processus de reprise, passant d’une laisse sur deux à une répétition d’une laisse à l’autre, traduit l’étau qui se resserre un peu plus sur Henri, Bertrand et leur armée amenés à réagir de plus en plus vite face aux événements qui se succèdent. Le deuxième vers contient la proposition principale. L’anaphore de quant permet de donner une unité à cet ensemble de laisses ayant un noyau narratif commun mais surtout une incidence les unes sur les autres. Ce schéma se trouve à de nombreux moments comme par exemple aux laisses 145, 147, 148 ou encore 504, 505, 506. Les liens des laisses dans La Chanson de Bertrand du Guesclin placent bien la strophe épique au-delà du plan narratif, sans pour autant se borner aux techniques lyriques que Rychner avait décelées dans son étude de La Chanson de Roland. Les laisses du texte peuvent être réunies en des ensembles plus larges de composition, obligeant à remettre en question l’unité narrative qu’elles pouvaient représenter dans des textes plus anciens. La possibilité d’une laisse essentiellement narrative a déjà été évoqué par E. Heinemann dans une étude du Couronnement de Louis : Par le nombre et la diversité d’incidents qu’elles contiennent, les laisses que nous avons examinées sont foncièrement rebelles au modèle lyrique préconisé par Rychner. La laisse de transition et l’incident débordant sur deux laisses révèlent d’un art avant tout narratif et non lyrique. Mais que la laisse soit dans son origine essentiellement lyrique ou autre chose encore, elle semble bien fournir les moyens d’organiser 84. Le procédé se trouve à de nombreux endroits de la chanson, comme par exemple aux laisses 60-61, 292-293 ou encore 607-608.
Chapitre 3 . Un homme, des styles
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le récit. Abstraction faite de tout lyrisme, elle se prête admirablement à l’art de la narration. Dans un sens, Rychner a raison : la laisse du Couronnement est narrative. Pourtant la laisse narrative ne manque pas d’art, et l’art de la laisse dans le Couronnement de Louis n’est pas négligeable. 85 La composition d’une laisse en fonction d’impératifs narratifs et non lyriques apparaît dès les plus anciens textes épiques français. Là où la Chanson de Bertrand, et peut-être de nombreux textes épiques tardifs, difère d’avec le modèle narratif ancien, c’est dans l’utilisation des codes épiques dans une conscience plus large de l’ensemble narratif, due à l’expansion des textes. L’union stylistique de strophes forme une unité narrative au-delà de la laisse, adaptation nécessaire aux exigences d’un texte long. La composition reste profondément épique par la présence de techniques stylistiques archaïques rappelant la visée lyrique certaine des premiers textes. Ces outils ne sont cependant pas simplement utilisés comme ornement pour donner au texte une coloration épique 86 mais sont recyclés pour devenir les marqueurs d’une construction épique sur un plan macro-structurel, introduisant dans le genre une notion plus vaste de l’unité.
85. E. Heinemann, « Sur l’art de la laisse dans le Couronnement de Louis », Charlemagne et l’épopée romane. Actes du VIIe Congrès international de la Société Rencesvals, Liège, 28 août–4 septembre 1976 II, 1978, sous la dir. de M. Tyssens et C. Thiry, p. 383–391, p. 381. 86. Voir par exemple dans la précédente édition du texte par J. C. Faucon l’analyse intitulée « Le moule épique », Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin, op. cit., p. 39-81.
Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
4
L
e statut de biographie épique du poème consacré à Bertrand du Guesclin n’est plus à défendre 1 . L’usage des modes d’écriture des anciennes chansons de geste relète nettement le choix de style opéré par l’auteur du texte. Cependant, si ce texte s’avère résolument épique, il ne semble pas suivre les codes épiques contemporains. En efet, l’écriture des chansons de geste tardives se caractérise par diférentes techniques 2 telles que l’entrelacement ou l’utilisation d’événements merveilleux, techniques qui trouvent leur source dans la rédaction des romans médiévaux 3 . Or, il ne semble pas que la biographie du chevalier breton suive ces modèles. Le texte ne pratique pas l’entrelacement, la narration est linéaire et abandonne Bertrand seulement pour préciser des faits et non pour suivre des aventures de personnages annexes. Quant au merveilleux, mis à part la foudre éliminant Daviot et Turquant, les meurtriers de l’épouse de Pietres, et la description de la table magique du roi d’Espagne, il n’est pas privilégié par l’auteur. Quel est alors le modèle d’écriture duquel s’inspire le texte ? L’absence de procédés épiques propres aux chansons contemporaines pousse à remonter un peu plus dans le temps. L’extension des perspectives de composition invite à repenser l’esthétique de la totalité du texte. Les codes épiques anciens s’appliquent bien au poème, mais l’agencement général nous pousse à regarder au-delà de la structure réduite d’une chanson de geste. L’unité toute entière de la biographie du connétable mérite d’être analysée grâce au spectre des codes épiques, mais pas simplement ceux d’une chanson de geste. Toujours dans cette volonté de prise de recul, il semble nécessaire de considérer l’ensemble formé dans le manuscrit A par La Chanson de Bertrand du Guesclin et des sept poèmes consacrés au connétable pour tenter d’émettre des hypothèses quant au choix de réunir ces divers textes 1. Sur la déinition de ce type de biographie à la in du Moyen Age, voir Gaucher, La biographie chevaleresque : typologie d’un genre (XIIIe-XVe siècle), op. cit., p. 187-191. 2. Pour un étude de la typologie des épopées tardives voir Suard, « L’épopée française tardive (XIVe-XVe s.) », op. cit. ; Roussel, Conter de geste au XIVe siècle : inspiration folklorique et écriture épique dans La belle Hélène de Constantinople, op. cit. 3. « L’extension se manifeste ainsi aussi bien dans la succession des générations que par la multiplication synchronique des comparses, phénomène qui conduit à recourir à la technique romanesque de l’entrelacement et aux formules de transition qui lui sont associées. », C. Roussel, « L’automne de la chanson de geste », Cahiers de recherches médiévales [En ligne], déc. 2005, url : http://crm.revues.org/2172, § 12.
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De la chanson au cycle
au-delà de leur thème commun. Comment déinir ces deux ensembles ?
4.1 | De la chanson au cycle Il est une forme d’écriture, née au XIIIe siècle, qui est la plus à même d’avoir été une source d’inspiration pour la biographie du connétable : la forme cyclique. Nelly Andrieux-Reix rappelle la déinition du cycle épique : Du terme « cycle » il existe deux déinitions, correspondant à deux groupes de réalités scripturaires : — ou le « cycle » se déinit par un thème commun, équivalent alors à « geste » pour dénommer la totalité des chansons contenant des même héros [...] — ou le « cycle » se déinit par une pratique spéciique de réécriture, sélection et ordination des chansons composées sur Guillaume et son lignage 4 . Ainsi, le cycle épique est un ensemble autonome de textes épars liés par des procédés d’écriture spéciiques. La structure du cycle de Guillaume renseigne également sur l’organisation générale des cycles de chansons de geste : Ainsi, des chansons parfois très éloignées dans le temps de leurs compositions, jusqu’alors éparses ou déjà regroupées seulement en tout petits ensembles, se sont-elles trouvées réunies sur un même support, ordonnées et subordonnées, refaites à la mesure de ce nouvel objet. Car le produit de ce travail d’assemblage et de (ré)écriture est un objet littéraire individué, où ce qui pouvait être originellement une chanson distincte se trouve déinitivement engagé dans la conjointure et le sen de l’ensemble narratif dont il relève désormais.[...] l’étude de ces objets cycliques dont la visée nous reste en partie cachée ; biographique, elle l’est de façon avouée : les chansons y igurent en ordre et place assignés par la chronologie relative de la vie de Guillaume, à commencer par ses Enfances pour s’achever par son Moniage 5 . 4. N. Andrieux-Reix, « Autour du cycle », Comprendre et Aimer la Chanson de Geste, 1994, p. 14. 5. N. Andrieux-Reix, « Des Enfances Guillaume à la Prise d’Orange : premiers parcours d’un cycle », Bibliothèque de l’école des chartes 147.1, 1989, p. 343–369, url : http://www. persee.fr/doc/bec_0373-6237_1989_num_147_1_450539, p. 343-344.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
241
Le modèle cyclique, considérant la chronologie de la vie du héros comme élément structurant, peut certainement inluencer un auteur de la in du XIVe siècle ayant pour ambition de conter la vie d’un héros contemporain de manière épique 6 . Dans quelle mesure le poème dédié à Bertrand s’inspire-t-il du modèle cyclique ?
4.1.1
|
Un projet aiché : le prologue
Le projet de l’œuvre est clairement exposé dès les premiers vers. En efet, les trois premières laisses annoncent le contenu et tendent également à donner une couleur particulière au texte. Sous la iction d’oralité propre aux prologues des chansons de geste, l’appel au public annonce plus qu’une matière, il fait part d’un projet d’écriture.
Un projet épique Un élément essentiel des chansons de geste est le prologue, passage quasiobligé dans lequel le narrateur/jongleur expose les données constitutives du texte qu’il propose de chanter. La structure canonique des prologues de chansons de geste a été étudiée par J.P. Matin dans son article intitulé « Sur les prologues des chansons de geste : structures rhétoriques et fonctions discursives » 7 . En suivant ses conclusions, on remarque que le prologue du texte suit les mêmes étapes qu’un incipit de chansons de geste plus anciennes 8 : 1. « Annoncer que l’on va (et ce que l’on va) chanter ». Cette annonce se trouve au vers 7 du poème où le narrateur emploie le verbe chanteray (et je vous chanteray commencement et in). 2. « Présenter les origines de l’histoire qu’on va raconter, tout au moins de la situation initiale ». Cette étape ne se trouve pas dans le prologue du texte. Nous nous interrogeons plus bas sur les raisons de cette absence. 3. « Annoncer le contenu de la chanson ». L’annonce de la teneur du texte suit directement le vers 7 évoqué plus haut : « et je vous chanteray commencement et in/de la vie vaillant Bertrand du Guesclin » (v. 7-8). 6. La proximité entre la vie du héros et le cycle épique a même conduit certains critiques à qualiier le cycle de Guillaume d’Orange de « biographie poétique », D. G. Hoggan, La biographie poétique de Guillaume d’Orange, Doctorat de l’Université de Strasbourg : Thèse dactylographiée, 1953. 7. J. P. Martin, « Sur les prologues des chansons de geste : structures rhétoriques et fonctions discursives », Le Moyen Age 2, 1987, p. 185–201, url : www.gallica.bnf.fr. 8. Ibid., p. 186.
242
De la chanson au cycle
4. « Ouvrir le récit ». Deux vers permettent la transition entre le prologue et la diégèse : « tout au commencement de mon bon romant/vous diray la venue du noble Bertrant » (v. 47-48) On remarque que le prologue ne déroge pas à la règle générale de l’allongement des textes épiques les plus récents. Mais au-delà des procédés communs de captatio benevolentiae, le prologue fait état d’un projet d’écriture particulier. Si l’aspect reste le même, le contenu a évolué, les premiers vers du texte voient leur perspective agrandie, abandonnant l’événement au proit d’une histoire globale.
Un projet total Si le prologue ne tente pas de rattacher le texte à une potentielle origine historique, le narrateur évoque tout de même des références passées dès les premiers vers du texte : Oncques depuis le temps le roy Alixandrin ne puis le roy Artus ne le bon roy Pepin ne du temps Godefroy ne de Salehadin ne regna oncques tel pour maintenir hutin, que croniques en sont, ne doubtéz qu’adevin. (v. 12-16) Cette partie inale de la première laisse s’organise autour de deux pôles : un pôle littéraire et un pôle historique. Ces deux axes sont délimités par la répétition du mot temps (v. 12 et 14). Le premier axe se structure autour de trois personnages : Alexandrin (Alexandre le Grand), Artus et Pepin, sur le même plan syntaxique. Nous avons là un représentant de chaque matière littéraire tel que le concevait le Moyen Age 9 : Alexandre pour la matière antique, Arthur pour la matière de Bretagne et Pépin le Bref pour la matière de France. Le second pôle mentionne deux noms : Godefroy de Bouillon et Salehadin (Saladin) 10 . Le texte fait référence ici à deux héros du Moyen Age : le premier héros du monde chrétien, le second héros du monde sarrasin. Une fois de plus, le narrateur propose de prendre de la hauteur par rapport aux codes épiques anciens. Cette partie du prologue traditionnellement dévolue à 9. Voir le célèbre prologue de Jean Bodel dans La Chanson des Saisnes qui déinit les trois matières de la littérature médiévale. 10. Pour une étude du personnage de Saladin dans la littérature médiévale occidentale, voir J. Richard, « Les transformations de l’image de Saladin dans les sources occidentales », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée [En ligne], juillet 2000, url : http : //remmm.revues.org/279.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
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« inscrire l’histoire racontée dans une histoire plus vaste, cyclique 11 » permet de placer le texte en regard de toute la littérature et des meilleurs héros du monde connu. Le projet se dessine alors. Le livre de Bertrand est une œuvre qui se veut totale et ne peut alors avoir comme point de comparaison que la totalité de la littérature, et non pas un événement en particulier 12 . De la même façon, une autre partie des prologues s’écarte de son but premier. Les rapides descriptions du héros s’accompagnent d’ordinaire d’une mention géographique ain de le situer dans un espace donné 13 . Or, cette mention géographique est bien utilisée dans le prologue du texte, mais avec un nouveau déplacement de focale. Les toponymes employés dans la proposition relative avec pour antécédent Bertrand aux vers 11 et 12, n’actualisent pas l’action du héros dans un lieu donné : qui tant fu redoubté jusques a l’ayve du Rin, en France, en Auvergne et dans le Limousin. Le verbe régisseur de la proposition est un verbe au passif, le texte ne cherche donc pas à déinir le rayon d’action du connétable. Ce sont les frontières de la renommé du héros qui sont délimitées dans ces vers (fu redoubté) et non celles de ses déplacements. Sa réputation de ier guerrier est sans limite : elle s’étend du Nord-Est au Sud-Ouest comme le suggère la rime entre Rin et Limousin. Le prologue présente donc un projet de texte unique et total. L’utilisation et l’adaptation des anciens codes épiques de l’incipit donnent le ton pour une chanson d’un nouveau genre, sans pour autant trahir l’esprit des prédécesseurs. Ce nouvel objectif de création se résume par une expression : un livre souisant (v. 20). Le substantif et l’épithète sont indissociables pour comprendre l’entreprise. L’œuvre se veut conséquente, apte à combler les attentes d’un public, et surtout parfaite, c’est-à-dire sans ajout ou retrait possible 14 . Il est nécessaire de constater que cette deuxième laisse métadiscursive n’a pas toujours été autonome dans les diférentes versions du texte. Par exemple, 11. J. P. Martin, Les motifs dans la Chanson de geste : déinition et utilisation (discours de l’épopée médiévale, I), Centre d’études médiévales et dialectales, Université de Lille III, 1992, p. 229. 12. On peut citer en contrepoint le prologue du Moniage Guillaume, reprenant tout les événements de la conquête d’Orange à la mort de Guibourc N. Andrieux-Reix, Le moniage Guillaume : Classiques français du Moyen âge, Champion, 2003, v. 11 à 31, p. 51-52. 13. Comme le souligne J. P. Martin, le prologue épique contient souvent « une qualiication du personnage, permettant de le situer géographiquement », Martin, « Sur les prologues des chansons de geste : structures rhétoriques et fonctions discursives », op. cit., p. 190. 14. Voir les déinitions données par le DMF du substantif livre et de l’adjectif suisant.
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De la chanson au cycle
dans le manuscrit Pn 15 , les laisses 2 et 3 ne forment qu’un bloc, alors que dans A les laisses 2 et 3 sont séparées par une lettrine marquant le vers d’introduction et de deux inales de vers diférentes, la première en ez, la seconde en éz 16 . L’autonomie qu’a acquis progressivement cette partie du texte est certainement un indice de la revendication de la chanson comme une œuvre indépendante et auto-rélexive.
Un héros de l’hic et nunc Par le choix d’un héros contemporain, la diégèse peut diicilement être placée dans un passé lointain et mythique, comme pouvait l’être l’époque de Charlemagne pour l’auteur de La Chanson de Roland au XIIe siècle. Prenons en contrepoint le prologue de Jourdain de Blaye en alexandrins, chanson de geste remaniée à la in du XVe siècle 17 contemporaine à la copie du manuscrit A : Signeur, or faites pais pour Dieu de magestés, Le glorieux Jesus qui en crois fu penés, Et vous orés istoire, s’entendre le volés. C’est d’unne des .III. gestez, saciés en verités. On n’en nomme que trois ou regna loiautés,[...] Mais de ce vous lairai et des .III. gestes orés. En l’Incarnation de Dieu qui fu penés De la dade du tamps .VIIc ans y contés Et environ .XL., Charlemagne li bers fu le cief des .III. gestes dont vous parler oés. Car il vient de Pepin le noble couronnés. Charles rengna lontans, s’ot ieux et ille assés Et sy ot pluseurs fames dont il fu espousés. (1-16) L’introduction du protagoniste se fait ici par l’évocation topique du passé glorieux de ses ancêtres et le place dans une temporalité éloignée du moment d’écriture. Pour Bertrand, ceci s’avère impossible. 15. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin, op. cit., p. 5, vers 19. 16. Il faut tout de même noter dans A un retour de la inale éz dans la laisse 3 pour les vers 29-30, 34-35 et 41-45, signe que les laisses étaient bien solidaires dans une version antérieure. Le -z reste présent comme marque grammaticale du pluriel des noms en é (contéz, héritéz, cretiennéz), pour la P5 (comparréz) ainsi que pour les participes passés pluriels (passéz, méz). Pour une étude du -z dans le texte, voir la partie grammaticale de la présente édition. 17. T. Matsumura, Jourdain de Blaye en alexandrins, 2 vol. Librairie Droz, 1999, p. 1.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
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La rédaction du texte a eu lieu seulement quelques années après la mort du connétable et de nombreux guerriers ayant combattu à ses côtés sont encore en vie 18 . Les exploits du connétable sont dans toutes les mémoires. Le texte est donc un texte de l’immédiat, presque journalistique à l’échelle du temps médiéval. L’auteur tente le diicile exercice de faire entrer dans la légende un personnage historique du moment, qui, malgré ses coups d’éclats, ne faisait pas l’unanimité de son vivant. La construction d’une légende fondée sur l’actualité de l’époque est même revendiquée par le narrateur du prologue : Seigneurs, ores faictes paiz et a moy entendéz. Vous qui vouléz raison et qui honneur gardéz ores vous traiéz vers moy ; je croy que vous orréz d’un livre souisant qui nouvel est riméz. (16-20) L’adjectif nouvel va à l’encontre même de la conception des textes épiques du Moyen Age qui se veulent des textes fondateurs remontant aux origines de la nation franque. Cette revendication dans les manuscrits A et P va même plus loin. On trouve en vers de clôture de la première laisse des manuscrits MP, Pa et Nh le distique suivant : Les croniques en sont, ne cuidés qu’adevin, A Saint-Denis en France escriptes en latin 19 Ce distique se réduit à un seul vers dans le prologue des manuscrits A et P : que croniques en sont, ne doubtéz qu’adevin. (16) Cette version ne revendique même plus la présence d’un modèle conservé à SaintDenis. La présence d’un que causal au début du vers 16 renseigne sur la prétention de cette variante de la tradition 20 . Le texte présenté au lecteur se veut désormais être la chronique du connétable rédigée directement d’après les connaissances du 18. C’est le cas de nombreuses personnalités que l’histoire qualiiera de Marmoussets, comme Bureau de la Rivière ou Olivier de Clisson, membres du premier le gouvernement du jeune roi Charles VI. 19. Il existe aujourd’hui une version médiévale en latin de la vie de Bertrand conservée en Autriche, Vienne, Österreichische Nationalbibliothek (ÖNB), ms. Cod. 3408, f° 179b188a. La notice de ce manuscrit est consultable en ligne à l’adresse suivante : http: //manuscripta.at/m1/hs_detail.php?ID=12290. Elle est peut-être le témoin de la circulation d’une biographie du connétable en langue latine parallèlement à la version romane. 20. Le vers peut se traduire ainsi : « car ceci en est la chronique, ne doutez pas de sa véracité ».
246
De la chanson au cycle
rédacteur des événements marquants de la vie du chevalier 21 . L’usage de l’adjectif nouvel à la laisse suivante se vaut alors pleinement : le texte a été rédigé récemment, il traite d’une matière jeune et en est la première mouture. Cette volonté de nouveauté n’est cependant pas à interpréter comme une volonté de rupture avec le temps passé ou de recherche d’originalité. Le temps novel n’est pas pour le Moyen Age une période qui fracture la linéarité. Il est le moment qui ouvre un nouveau cycle dans l’idée d’un retour perpétuel des choses. Le prologue du texte vient en efet présenter l’ouverture d’un nouveau cycle, mais s’appuyant sur les cendres littéraires des prédécesseurs cités juste après Bertrand. Du nouveau dans le sempiternel, quoi de plus épique que cette visée ? Le projet est donc bien déini dès l’introduction. Cependant, le déi est-il relevé ? Comment l’œuvre est-elle organisée pour répondre à cette volonté de totalité ?
4.1.2
|
Le découpage en unités
Unités narratives En accord avec l’idée d’une œuvre totale évoquée dans le prologue, le texte adopte la forme littéraire médiévale la plus à même de représenter cette volonté : la forme cyclique. L’ordonnance biographique permet l’évolution générale de la narration, de la naissance à la mort du héros. L’ensemble suit dans un ordre plus ou moins linéaire l’évolution des événements de la Guerre de Cent Ans. La disposition générale témoigne surtout d’une organisation propre aux cycles épiques 22 , comme 21. Cette volonté du texte de s’imposer comme autorité a également été relevée par D. Kullmann dans la conclusion de son étude des termes autoréférentiels du poème : « En in de compte, on n’a pas seulement afaire à une initiative de propagande politico-militaire, qui essaie de ressusciter l’ancienne épopée héroïque ain de s’en servir pour galvaniser le sentiment national et la résistance contre les Anglais. A cela s’ajoute un impératif sur le plan des connaissances de chacun : il faut connaître son propre passé littéraire. La littérature vernaculaire fait son entrée au rang de savoir respectable et, en même temps, un nouveau niveau de savoir est créé, un savoir indépendant du latin, qu’on attend désormais non seulement des intellectuels, mais de tout un chacun. » D. Kullmann, « Chanson ou livre ? le discours autoréférentiel et métalittéraire dans les chansons de geste du XIVe siècle », Por s’onor croistre : mélanges de langue et de littérature médiévales oferts à Pierre Kunstmann, 2008, p. 91–102, p. 102. 22. « Un manuscrit cyclique n’est jamais un simple rassemblement inorganique mais que, outre des selections opérées, il s’y révèle toujours une architecture qui est non seulement ordination des textes mais subordination. », N. Andrieux-Reix, « Un programme d’écriture
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
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le montre N. Andrieux : mais il y a plus, de toute évidence : la pensée cyclique, diversiiée en autant de variables qu’il y a de versions, voire de manuscrits, ne se manifeste pas seulement dans une ordination matérielle et dans les raccords internes qui s’ensuivent, elle regroupe les chansons en ensembles fonctionnels. 23 L’étude du prologue du manuscrit A a montré que l’objectif narratif du texte était de raconter de bout en bout la vie vaillant Bertrand du Guesclin. Dans une perspective de composition cyclique, le découpage du texte peut se faire alors ainsi 24 : 1. Enfances : laisses 4 à 21 2. Guerre de Bretagne : laisses 22 à 248 3. Episodes espagnols : laisses 249 à 575 4. Episodes français : laisses 576 à 728 D’autres modes de découpages sont cependant suggérés par le texte luimême.
Auto-références La volonté de conception de l’œuvre comme un cycle transparaît d’abord dans l’emploi des termes d’auto-référence. Lorsque les paroles du narrateur renvoient à l’œuvre elle-même, une variété de substantifs diférents est alors utilisée : livre, rommant, chanson, escript, istoire, matiere. L’analyse des termes autoréférentiels dans La Chanson de Bertrand du Guesclin a été efectuée par D. Kullmann 25 . Nous proposons ici d’exploiter des pistes qui ne l’ont pas été dans son article et de situer ces termes par rapport à l’hypothèse de composition cyclique. Le termes d’auto-référence sont souvent considérés comme synonymes dans les textes médiévaux lorsqu’ils servent d’éléments métadiscursifs. Le texte du manuscrit A n’échappe pas à la règle et présente souvent ces substantifs comme équivalents : et sa réalisation : les manuscrits B1 et B2 du cycle de Guillaume », Romania 104.2, 1983, p. 229–235, p. 229. 23. Idem, « Des Enfances Guillaume à la Prise d’Orange : premiers parcours d’un cycle », op. cit., p. 344. 24. Ce découpage a motivé la présence d’en-têtes structurantes dans la présente édition. 25. Kullmann, « Chanson ou livre ? le discours autoréférentiel et métalittéraire dans les chansons de geste du XIVe siècle », op. cit.
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De la chanson au cycle
— chanson (chansson) : 74 [...] 19367 — escript : 314 [...] 21742 — istoire : 665 [...] 21535 — livre : 20 [...] 21235 — matière 587 [...] 19100 — rommant (rommans/romant) : 47 [...] 20848 Ces termes sont le plus souvent employés dans des expressions destinées à combler le second hémistiche, à la rime, dans le contexte grammatical suivant : — se/si + nous/comme + dire + auto-référence (se nous dit l’escript 2080 ; si comme dit la chanson 2631 ; se nous dit le rommans 4663 ...) On a l’impression qu’ils s’emploient indiféremment selon les besoins de la rime et de la métrique. Cependant, il est des cas où ces termes s’emploient hors du cadre restreint de l’expression igée. Ces occurrences nous renseignent sur la rélexion menée par le ou les compilateur(s) de la légende. On peut ainsi délimiter trois niveaux selon le terme employé : celui de la chanson, celui du rommant, celui du livre. Ces termes seront utiles dans la déinition de chaque partie de la narration. La chanson La chanson est la plus petite unité narrative à laquelle le texte cyclique fait référence. On trouve dans le texte en position inale des laisses les mots suivants : Or commaince chanson (2054, 9798, 19153, 14203, 19153) Ou bien en début de laisse : 1. Seigneurs, ores escoutéz, franche gent honnouree, une bonne chansson de bien enluminee. (4219-20) 2. Seigneurs, ores escoutéz, si orréz bonne chansson (6380) 3. Seigneurs, ores escoutéz, chevaliers et barons et je vous chanteray une bonne chansson, de Bertrant Du Guesclin vous feray mencïon. (7921-23) Ces vers permettent de donner une nouvelle impulsion à la narration. Par exemple, le vers 2054 inclut dans la trame générale une partie de la guerre de Bretagne centrée autour de la victoire de Cocherel, élément déterminant du sacre de Charles V. La chanson est donc pour le texte l’événement, décrit avec ses origines et ses conséquences.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
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Le rommant Le deuxième niveau de composition du cycle de Bertrand est celui du rommant. Outre les emplois dans des expressions igées, on peut relever les exemples suivants : ainsi comme vous orréz recorder ou rommant (v. 4218, 7920, 9052) Or nous dit l’istoire, dont fait est le rommant (v. 13764) L’expression verbale oïr recorder que l’on retrouve trois fois dans le texte avec rommant pour complément indique bien que ce terme a un rapport direct avec la narration dans son acception première : « ce qui se raconte ». Le rommant est ce qu’on appelle aujourd’hui la diégèse. Cette analyse est appuyée par le vers suivant : Tout au commamcement de mon bon romant vous diray la vennue du noble Bertrant. (47-48) Juste après la in du prologue, ces deux vers sont employés comme ouverture de la laisse 4. Ils servent d’embrayeur à la narration et permettent de clôturer la partie métadiscusive initiale. Le niveau rommant est du degré de l’ordo, comme l’indique le substantif commaincement. Le rommant est le résultat du classement des éléments narratifs dans un ordre particulier, avec un début et une in. Le rommant commence avec ces vers, la partie narrative qui traitera du personnage principal de sa naissance à sa mort. Ce rommant est composé d’une suite d’événements : les chansons. Le livre Comme nous l’avons vu dans la première partie, l’utilisation du mot livre dans le prologue nous indique l’aboutissement du projet de création de l’œuvre. De la même façon, quelques occurrences du terme sont à relever hors de ce contexte : 1. Mais ou livre de Brut, la ou souvent lysoit, qui fu des fais Merlin, des sors qu’il sortissoit, avoit trouvé pieça et forment si fyoit (3263-65) 2. il a un sage clerc en la vostre patrie qui ou livre de Brut avise son estudie. (6622-23) 3. Mais ou livre de Brut trouve par sa clergie que un aigle naistra, s’il n’est en ceste vie (6728-29) 4. Mais j’ay estudié ou livre de Jason (8894)
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De la chanson au cycle
Le mot est à entendre dans ces exemples comme une œuvre qui fait le tour d’un sujet, d’une matière. Le livre de Brut est l’élément écrit qui fait le tour de la question des origines de la dynastie des Plantagenêts. Le livre de Jason fait certainement référence à une version complète du Roman de Troie. Le livre est donc dans ce texte l’élément le plus large de la composition. Ce niveau dernier est également déini par le texte pour lui-même : Or nous dit la matiere ou nostre livre s’appent (19100) Cette auto-référence, doublée par l’utilisation du pronom possessif, indique bien la nature de l’entreprise que nous avons sous les yeux lorsque nous regardons le texte. Le livre est ce qui dépend d’une matière pré-existante et qui la travaille en prétendant à l’exhaustivité. Il désigne une compilation aboutie, terminée, qui fait le tour d’une question, d’un personnage. Le livre est l’élément achevé dans la perspective du cycle : il est le manuscrit cyclique. Il est composé de deux niveaux : le rommant et la chanson. Ces frontières narratives sont marquées dans le texte par des aspects formels, permettant de délimiter des unités plus ou moins larges de sens.
4.1.3
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La narration cyclique des événements
Nous avons évoqué dans le chapitre précédent comment les enchaînements et les reprises de laisse peuvent structurer des unités narratives plus larges que la laisse. L’élargissement de ces unités va de pair avec une remise en question des anciens codes épiques, forgés pour la hiérarchie de la narration au niveau de l’événement. Quelles sont ces nouvelles unités ? Comment répondent-elles à la nécessité d’une narration cyclique ?
L’exemple de la bataille d’Alroy Tous les modes d’écriture vus précédemment montrent qu’un soin particulier est apporté à l’enchaînement entre les laisses. Mais quelle est leur utilité au niveau de la diégèse ? On l’a vu, ils permettent aux laisses de se succéder, mais qu’en est-il au niveau des épisodes ? Quels codes structurent les enchaînements d’épisodes et leur agencement interne ? Ain de le savoir, prenons l’exemple d’un épisode du texte et tâchons de comprendre son fonctionnement ainsi que les techniques d’écriture qui le délimitent et le structurent. La bataille d’Alroy, moment important de la guerre de Bretagne puisqu’on y voit mourir Charles de Blois et Bertrand subir sa première défaite, constituera la base de notre rélexion.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
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Débuter un épisode Une première question émerge d’emblée : comment délimiter l’épisode ? Le début pourrait être la laisse 218, lorsque la décision d’intervention est prise par le camp de Charles de Blois. Or, le texte ne fait état d’aucune technique particulière à cet endroit, l’introduction de la laisse 218 se rattachant fortement à la conclusion de la laisse 217 par la poursuite d’un dialogue entamé au milieu de cette dernière. Il faut poursuivre la lecture jusqu’à la laisse 223 ain de repérer un indice marquant le début de l’épisode : Seigneurs, or escoutéz, pour Dieu le droiturier. La bataille d’Alroy vous vouldray commaincer, ou il advint ennuy et mortel emcombrer. (v. 5804-06) La laisse commence par un passage reprenant les codes du prologue épique, déjà énoncés plus haut : captatio benevolentiae (v. 5804), annonce du contenu (la bataille d’Alroy) et ouverture du récit (commaincer) au vers 5805. Les laisses 218 à 222 raportant les préparatifs et discussions du conseil à propos de la bataille d’Alroy sont donc rejetées hors de l’épisode. Elles sont construites comme découlant directement de l’attaque précédente, celle du château de Jousselin, où l’idée de l’attaque d’Alroy a émergé. La rupture narrative induite par le prologue se fait la nuit avant la bataille, une fois toutes les forces antagonistes présentes. Raconter l’épisode On trouve ensuite un ensemble de trois laisses marquant une progression narrative. La laisse 224 introduite par Or, la laisse 225 commençant par Après et la laisse 226 débutant par Si comme. Ces trois ouvertures induisent des rapports de succession ou de simultanéité entre les événements relatés par chaque laisse (224 : préparation des Anglais ; 225 : préparation des Français ; 226 : face à face des deux contingents). Viennent ensuite à nouveau trois laisses liées par un processus de répétition analogue à ceux étudiés dans la partie précédente. Les laisses 227, 228 et 229 comportent toutes en introduction le mot bataille 26 ainsi que le verbe estre au passé simple, fu 27 . Avec cet ensemble, la narration fait un instant une pause. Ces laisses peuvent être considérées comme parallèles puisqu’elles sont chacune un point d’entrée dans la bataille, un ensemble de scènes se déroulant au même moment et non successivement. 26. Voir les occurrences v. 5931 ; v. 5941 et v. 5967. 27. Voir par exemple v. 5931 ; v. 5941 ; v. 5968 et v. 5969.
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De la chanson au cycle
La laisse 230, introduite par l’adverbe Or, permet d’insérer un événement qui va changer le cours de la narration et sur lequel le narrateur veut porter l’attention du lecteur 28 : l’erreur de Charles croyant avoir tué le duc de Monfort. Les deux laisses qui suivent décrivent les conséquences directes de l’attitude de Charles : l’attroupement des combattants anglais autour du duc de Blois (laisse 231) et son ressenti face à cet alux massif de chevaliers ennemis autour de lui (laisse 232). La narration est à nouveau suspendue avec les laisses 233 à 237. Le narrateur nous propose, pour employer une métaphore cinématographique, un travelling d’un camp à l’autre. Un premier sous ensemble peut être délimité laisses 223 à 225. La laisse 223 se concentre sur les agissements anglais avec la mention en introduction d’Olivier de Clisson, œuvrant dans le camp ennemi du royaume de France à cette période de la guerre. La laisse 234 s’arrête un instant sur la mêlée des deux armées (forte fu la bataille de chascune partie v. 6104). La laisse 235 achève le mouvement d’un camp à l’autre en se concentrant sur les activités de Bertrand au sein de l’afrontement. Le sous-ensemble suivant laisses 236 et 237 propose le même mouvement, mais de façon plus condensée. La laisse centrale relatant le combat des deux armées disparaît, laissant place à un afrontement de chevalier à chevalier. Les deux laisses débutent par deux vers utilisant des constructions similaires : Moult fu doulant Chando (v. 6148)/Moult fu hardy Bertrant (v. 6184). La similitude ne fait qu’exalter la diférence entre les deux attributs doulant et hardy : Chando est irrité alors que son camp domine le combat, Bertrand fait preuve de courage alors même qu’il se rend compte de la défaite imminente. Cette suspension de la narration permet de retarder le fait qui va inévitablement se produire et auquel le public de l’époque devait s’attendre : la mort de Charles de Blois. Conclure un épisode La conclusion de la bataille se fait en deux laisses : 238 et 239. Les deux éléments sont introduits par deux vers résumant les événements précédents : Ainsi Charles de Bloiz fu en l’estour octis (v. 6218) et Vaincue est la bataille, Bertrant est attrapé (v. 6233). La in de l’épisode n’intervient cependant pas à cet endroit. Le texte se poursuit par l’ajout de quatre autres laisses. Les laisses 240 à 243 narrent les conséquences de la défaite et la décision de signer un 28. Ces deux caractéristiques de l’adverbe Or en moyen français sont explicitées dans l’article concernant cet élément dans le DMF, consultable en ligne à l’adresse suivante : www.atilf. fr/dmf/.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
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traité de paix entre les deux partis revendiquant la Bretagne. Les répercussions sont graduelles. Les vers d’introduction utilisent tous le procédé actoriel et font mention de personnages de plus en plus important : Chando laisse 240 v. 6264 ; Monfort laisse 241 v. 6302 ; le roy de France laisse 242 v. 6319 et laisse 243 v. 6343. La coupure a lieu à la laisse 244 avec la présence en introduction d’un nouveau prologue : Seigneurs, ores escoutéz, si orréz bonne chansson. Le riche roy de France, que l’on appelle Charlon, volu actorder de Bertaigne et cesser la tenson du conte de Monfort, .i. moult noble baron. (v. 6380-83) Le prologue peut ainsi dans le texte être une marque solide du découpage de la narration. A bien y regarder, la coupure a lieu un peu plus haut, au milieu de la laisse 243 : Mais de ce me tayray, si vous vouldray compter de Bretrant du Guesclin qui tant it a louher, car le roy it depuis de prison delivrer, et vous diray comment, se le vouléz escouter. Puis vous diray aprés de Bertrant au corps ber qui en Espaigne ala roy Henry couronner et it de son païs roy Dempietre bouter, pourtant qu’il vouloit contre la foy aler et qu’il it la roÿne sa femme a mort livrer. Pour la plus loiale dame c’on peüst point trouver, la dame a ce seigneur on la ist marïer – au roy Pietre, lequel it tant a doubter – pourtant que on le vouloit en hault lieu assener. Seur fu de la roÿne qui Dieu veille sauver, qui en France pouoit la couronne porter. Le conte de Savoie volu la terce espouser, le conte de Harcourt eu la quarte a garder et la cinquiesme fu, ainsi comme je oÿ compter, au seigneur de l’Abret, on ne la puet celer. Et le duc de Bourbon, dont on doit bien parler, fu freres ces .v. dames, si en it plus a loer car du sang saint Loÿs les puet on bien nommer. (v. 6355-79) Ce passage opérant la transition entre l’épisode d’Alroy et le suivant reprend les
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De la chanson au cycle
codes du prologue épique, alors même qu’il se situe en in de laisse. Le narrateur prend la parole pour annoncer l’acte de déclamation à l’aide de plusieurs verbes comme compter v. 6358 ou diray v. 6361 et 6362. L’hémistiche se le vouléz escouter du vers 6361 peut s’apparenter aux techniques de captation benevolentiae. Enin, l’ensemble des autres vers résume le contenu du texte qui va être déclamé et annonce la partie espagnole. Les codes épiques d’introduction et de conclusion des laisses permettent au poète de structurer la narration, mêlant avancées et ralentissement de celle-ci. L’introduction d’un nouvel épisode ne se fait pas simplement par l’utilisation d’un prologue raccourci. Elle induit tout un travail d’enchaînement aux frontières des laisses qui prépare l’arrivé d’un autre événement. L’analyse d’un prologue particulier nécessite alors inévitablement l’étude du contenu de la laisse précédente. L’examen de ces procédés sur l’ensemble du texte peut sans doute nous permettre d’émettre des hypothèses quant au découpage voulu par l’auteur des grandes unités narratives du poème cyclique.
Prologues internes Les prologues internes s’avèrent des éléments importants pour comprendre l’organisation générale du poème. Nous entendons par prologue interne toute partie de laisse qui reprend les techniques d’écriture des prologues épiques vues plus haut, et qui ne se situe pas dans l’incipit mais partout ailleurs dans le texte. La présence de ce type de prologue peut être dans un cycle une façon pour le copiste de marquer la présence de plusieurs textes placés les uns à la suite des autres, comme dans les manuscrits reprenant la geste de Guillaume d’Orange 29 . C’est bien souvent la présence d’un prologue qui constitue l’argument principal des éditeurs modernes de poèmes épiques médiévaux pour découper les manuscrits en unités diverses 30 . Les prologues internes sont présents en nombre dans le poème épique consacré au connétable 31 . Nous avons vu avec l’étude de l’épisode de la bataille d’Alroy qu’ils pouvaient permettre de marquer une limite entre les chansons du texte. La comparaison de ces passages montrent qu’ils emploient, à quelques exceptions 29. Voir pour cela le tableau en annexe de l’étude du petit cycle de Guillaume d’Orange par N. Andrieux-Reix, Andrieux-Reix, « Des Enfances Guillaume à la Prise d’Orange : premiers parcours d’un cycle », op. cit., p. 369. 30. Il peut s’agir également selon la facture du manuscrit d’une miniature, d’une rubrique ou bien d’une initiale diférente. 31. Un tableau récapitulatif des prologues est proposé en annexe F, p. 311
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
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près, la même structure : appel au public, annonce d’une déclamation, indication du contenu. La particularité du texte réside d’abord dans la place de ces prologues dans la laisse. Comme le montre le tableau en annexe F, ces annonces du narrateur peuvent se trouver au début d’une laisse comme au centre 32 ou à la in 33 de celleci. Souvent, ils se combinent pour former un enchaînement entre deux laisses ain de préparer le terrain pour l’arrivée d’un nouvel épisode. On trouve également en amont d’un prologue ouvrant une laisse une formule proleptique du narrateurjongleur du type ainsi comme vous orréz recorder ou rommant. 34 concluant la laisse précédente. Ainsi, le prologue perd sa place d’en-tête mais gagne en autonomie en s’imposant comme un code structurant de l’écriture cyclique, marquant un ensemble dans un tout plus vaste et non plus une réunion de textes épars. L’écart de longueur entre les prologues ne permet pas de déterminer s’il peut s’agir de marqueurs d’unité de lecture ou de déclamation. En efet, le nombre de vers entre deux prologues peut varier de 64 à 4041. Cependant, la majorité des intervalles oscille entre 800 et 1500 vers. La longueur d’une séance de récitation peut, selon J. Rychner, aller de mille à deux mille vers par séance 35 . La scansion des épisodes par les prologues dans la geste de Bertrand pourrait alors correspondre à une unité narrative pouvant être lue ou récitée en une seule fois. Cette théorie, défendu par R. F. Cook 36 , donne ainsi à l’écriture cyclique épique une dimension pratique qui a peu été relevée par la critique. Le manque d’étude sur l’utilisation des techniques d’écriture cycliques dans des chansons de geste tardives nous empêche de poursuivre plus loin cette idée, sans point de comparaison à notre disposition. Quoi qu’il en soit, la présence de ces prologues indique la dimension d’un épisode épique tel que pouvait le concevoir un auteur de la in du XIVe siècle. Si nous analysons les occurrences relevées, nous remarquons qu’ils annoncent en majorité des épisodes guerriers, comme des batailles, des sièges ou le retour du héros dans les opérations militaires en cours. Le lien évident entre le thème de ces épisodes et l’esthétique épique impose certainement le choix du prologue de jongleur comme introduction modèle. Même si ils ne sont pas dans le texte 32. Voir l’exemple de la laisse 127. 33. Voir les occurrences relevées laisses 460, 492, 645 et 681. 34. Laisse 159, v. 4218. 35. Rychner, La chanson de geste : essai sur l’art épique des jongleurs, op. cit., p. 48-49. 36. R. F. Cook, « Unity and Esthetics of the Late Chansons de geste », Olifant 11.2, Summer 1986, p. 103–114, url : https://scholarworks.iu.edu/journals/index.php/ olifant/article/view/19335, p. 111-114.
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De la chanson au cycle
les seuls moyens formels d’inclure de nouvelles péripéties, ils témoignent d’une conception épique de l’unité narrative. A côté de ces larges passages épiques, on remarque de petites séquences délimitées de quelques dizaines de vers 37 . Ces plus petites unités peuvent également être comparées avec des procédés d’écriture épique cyclique : ceux des ligatures et des incidences.
Les incidences La réunion en recueil des chansons de geste au XIIIe siècle demande, qu’une séparation se fasse entre les textes par le biais de prologues ou de marques codicologiques formelles (rubriques, miniatures ou autre). La mise en cycle suppose une étape de plus dans la réuniication de ces textes ayant d’abord pour certains circulé de manière autonome et cherche à introduire des liens narratifs entre des chansons plus anciennes n’ayant parfois qu’un rapport très lointain. Ce procédé, les scribes du Moyen Age lui donnent un nom, celui des incidences. Maurice Delbouille, après observation de quelques manuscrits cycliques consacrés à la geste de Guillaume d’Orange 38 et celle de Garin de Monglane 39 , déinit la technique ainsi : Le procédé des incidences consiste à insérer au milieu d’une chanson, un autre poème racontant des faits supposés contemporains de ceux qu’elle rapporte 40 . Qu’en est-il de cette technique dans la geste de Bertrand ? Tout d’abord, comme nous l’avons précisé, la technique de l’entrelacement n’est que peu utilisée dans le poème, alors qu’elle l’est fréquemment dans de nombreuses chansons tardives 41 . On en trouve pourtant des réminiscences grâce 37. Voir par exemple dans le tableau récapitulatif la proximité des prologues des laisses 461 et 463, p. 311. 38. M. Delbouille, « Le système des ”incidences”, Observations sur les manuscrits du cycle épique de Guillaume d’Orange », Revue belge de philologie et d’histoire 6.3-4, 1927, p. 617–641, url : http://www.persee.fr/doc/rbph_0035-0818_1927_num_6_3_6461. 39. M. Delbouille, « Dans un atelier de copistes. En regardant de plus près les manuscrits B1 et B2 du cycle épique de Garin de Monglane », Cahiers de civilisation médiévale 3.9, 1960, p. 14–22, url : http://www.persee.fr/doc/ccmed_0007-9731_1960_num_3_9_1121. 40. Ainsi, Le Siège de Barbastre, placé à l’intérieur des Les Enfances Vivien dans le manuscrit Royal, 20. D. XI de la British Library, est appelé incidences par le copiste de ce manuscrit cyclique compilant les événements de la geste de Guillaume d’Orange, idem, « Le système des ”incidences”, Observations sur les manuscrits du cycle épique de Guillaume d’Orange », op. cit., p. 621. 41. Roussel, « L’automne de la chanson de geste », op. cit., § 12.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
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à des formules que J.P. Martin qualiie de « conjonction rhétorique » : Or vous vouldray laisser de lui et de Bertrant vous diray verité, selon mon essïant, comme delivré fu du prince combatant et comment il reala en Espaigne la grant, ou il desconit Pietres qui ne valoit noiant. (v. 13269-73) Or est temps c’on vous die du noble Bertrant, qui par son grant malice ala tant cheminant, lui .ve. sans plus, comme dit le romans. Il fu dit au bon roy qui tant fu avenant que encontre Bertrant alast tost envoient Bureau de la Riviere, son chambellain plaisant. (v. 17352-57) Ces formules qui permettent de passer d’un événement narratif à un autre sont déjà présentes dans les plus anciennes chansons de geste 42 . Cependant, elle n’ont pas dans le texte fonction de retourner vers un personnage déjà évoqué. Elles sont employées pour permettre de revenir à Bertrand après avoir introduit des événements annexes montrant Paris devant le péril anglais (laisses 582 à 588). Les incursions sont nombreuses au sein du poème, même si elles ne s’attachent pas à décrire des épisodes simultanés. Prenons pour exemple la transition entre la partie du texte consacrée aux enfances de Bertrand et celle dédiée à la guerre de Bretagne. La jonction se fait à partir de la laisse 21 et se poursuit jusqu’au début de la laisse 24. Le passage d’une partie à une autre se fait par l’introduction de nouveaux personnages : Ainsi regna Bertrant comme vous avéz ouÿ. Les joustes, les tournois voluntiers poursuy, hayraux et menestriers ama et enrichy, dont le duc de Bertaigne la nouvelle en ouÿ. Car un duc y avoit au temps que je vous dy qui estoit bon Françoys et fu tant qu’il vesqui et le bon roy de France avoit tousjours servy, Philippe de Valloys, le noble roy hardy, qui adonc guerroioit contre son annemy 42. Voir par exemple les vers 1654-56 de la Prise d’Orange « Ci vos lerrons des Sarrazins ester ;/ De Gilebert devons huimés chanter,/ Le messagier qui le Rosne a passer. », C. Lachet, La prise d’Orange : chanson de geste (in XIIe-début XIIIe siècle), Champion Classiques série ” Moyen Âge ”, H. Champion, 2010, p. 202.
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De la chanson au cycle Edouart d’Engleterre et les Angloys aussi et avoit pluseurs foys le roiaume assailly. (528-538)
La rupture se fait par la répétition du mot duc et surtout par le passage du passé simple à l’imparfait avec l’expression impersonnelle y avoit au vers 532, rappelant le « il était une fois » initial des contes de fées. Le rapport entre le texte inséré et le texte général est une concomitance temporelle. Le narrateur utilise l’expression au temps que je vous dy au vers 532 pour faire le lien entre la narration centrée autour du futur connétable et celle qui s’annonce : les origines du conlit breton de l’époque. Les laisses 22, 23 et 24 se concentrent sur les raisons de l’afrontement entre Charles de Blois et Edouart d’Angleterre pour le contrôle de la partie Ouest du territoire français sur pratiquement une centaine de vers (531-628). Le retour à la narration principale s’opère en deux temps. D’abord, dans une perspective toujours méta-discursive, le narrateur indique clairement le retour à l’histoire de Bertrand : Ceste matiere si vous voys ramentevant pour revenir au fait du noble Bertrant et dire les proesces de quoy le ber it tant, oncques autant n’en irent Olivier ne Rollant. (587-90) Ensuite, le copiste utilise une marque indiquant le début d’une partie dans un manuscrit : Cy commainça la guerre et le pesant estriz dont mains chevaliers furent afoléz et octis. (614-15) Le cy commainça renvoie à la syntaxe des rubriques présentes dans les codex ain d’aider le lecteur à se repérer dans la masse textuelle et peut être l’indice pour un lecteur/récitant du passage d’un événement à un autre. Les origines du conlit breton sont donc bien une matiere diférente de celle qui façonne l’œuvre générale. On a bien ici pleinement afaire à une incidence, un texte inséré dans le texte principal traitant d’un sujet diférent, avec comme justiication une chronologie identique à la principale. Cependant, on peut remarquer que la simultanéité n’est possible qu’à travers le prisme du narrateur. En efet, le temps qui unit les deux épisodes est, si l’on en croit la proposition relative accompagnant le substantif au vers 532, non pas le temps de la diégèse mais le temps de l’énonciation. L’expression le temps que je vous dy réunit les épisodes sous la bannière de l’époque de la Guerre de Cent Ans mais également surtout sous celle de la diégèse. Le temps commun aux deux passages reste celui du
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moment de l’énonciation qui fait exister les deux événements en concomitance, au-delà de la période historique potentielle. Le procédé d’incidence a cependant dans le texte une autre visée que celle de l’entrelacement. Les vers 587-90 laissent clairement entrevoir l’objectif particulier de ces insertions. Le narrateur explique sa digression par deux raisons : la première pour revenir au fait et la seconde pour dire. Le narrateur indique donc que cette digression est inévitable si il veut conter pleinement les exploits de Bertrand en Bretagne. Il est efectivement fort utile de rappeler les événements ayant mené à la guerre de succession en Bretagne ain de comprendre les agissements de Bertrand au cœur de ce conlit. La volonté d’utilisation d’une incidence dans ce texte s’aiche donc comme didactique et non comme simplement narrative. Les éléments qui n’ont pas de rapport direct avec Bertrand sont introduits ain de permettre la compréhension des épisodes de la vie de Bertrand. On peut citer dans la même perpective les laisses 249 à 264 précédant le départ en Espagne qui exposent les raisons du conlit entre Pietres et Henri ou bien toutes les justiications concernant la naissance légitime de ce dernier. Le procédé d’écriture cyclique des incidences est donc bien repris dans le poème dédié au connétable. Il n’est pas simplement employé dans une perspective de compilation générale de tous les événements ayant touché Bertrand et ses proches. Les épisodes insérés ont ainsi pour but d’instruire le public sur des faits externes à la geste mais qui ont une répercussion directe sur les actions du héros. On trouve donc dans le texte de Cuvelier de nombreux traits d’écriture caractéristiques de l’écriture cyclique épique. Cependant, les épisodes d’un cycle sont liés autrement que par des procédés d’écriture types. Des thèmes et des motifs littéraires sont communs aux diférentes chansons d’un ensemble cyclique, renforçant l’unité du manuscrit.
Thèmes et motifs du cycle de Bertrand L’étude des cycles permet d’isoler des thèmes et des motifs faisant des apparitions successives dans les chansons d’un cycle. Colère et rire des héros dans la geste des Narbonnais, diatribes contre les plus anciens dans le cycle des Lorrains, voilà autant de motifs qui favorisent, au-delà des procédés d’écriture et d’une narration centrée sur un personnage ou un lignage, l’unité du cycle épique. En plus de techniques littéraires permettant un enchaînement luide des chansons, l’unité structurelle d’un cycle « se fonde aussi sur un tissu serré d’allusions et
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De la chanson au cycle
Evénement Prise de Forgeray Prise de Mante Visite d’Henri à Bertrand Mise à Rançon de Bertrand Visite de la Dame de Monsussanc à Henri Bertrand à Paris Mort de Chando
Laisses 31-36 138-144 441-453
Déguisement bûcheron vigneron pèlerin
Initiateur Bertrand Guillaume de Lonnoy Henri
466
cote de gris
Bertrand
534
pèlerin
Dame de Monssussanc
581 637
Bertrand Aymeris
Prise de Nyort
718
cote de gris retournement du jacques vêtements anglais
soldats français
Tableau des scènes de déguisements
d’échos 43 ». Quelles sont les liaisons dans le cycle du connétable ? Les épisodes s’enchaînent-ils sans jamais se répondre ? Ruse et déguisement S’il est un motif qui revient dans la geste du connétable, c’est bien celui du déguisement 44 . Que se soit en bûcheron, en vigneron, ou même en pèlerin, Bertrand et ses hommes trouvent toujours un camoulage approprié ain de tromper l’ennemi. Lors de la prise de Frogeray, accompagné de quelques hommes, Bertrand se déguise pour la première fois en se travestissant en bûcheron pour tromper la 43. B. Guidot, « Constitution des cycles épiques : quelques jalons », Sommes et cycles (XIIe-XIVe siècles), actes des colloques de Lyon, 31 mars 1998 et 5-6 mars 1999, Les Cahiers de l’Institut catholique de Lyon 30, 2000, sous la dir. de M. E. Bély, J. R. Valette et J. C. Vallecalle, p. 25–48, p. 33. 44. Pour une étude du motif du déguisement dans la littérature médiévale voir G. Tanase, Jeux de masques, jeux de ruses dans la littérature française médiévale (XIIe-XVe siècles), Honoré Champion, 2010 ; F. Suard, « Le motif du déguisement dans quelques chansons du Cycle de Guillaume d’Orange », Olifant 7, 1980, p. 343–358.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
261
vigilance des gardiens et pénétrer dans la forteresse. Puis l’idée est reprise par d’autres à mesure de l’avancé du texte. La technique de combat appliquée à Forgeray est d’abord copiée point par point par Guillaume de Lonnoy lors de la prise de Mante, en variant seulement le costume. Puis diférents personnages comme Henri ou la châtelaine de Monssussanc adoptent à leur tour un costume ain de pouvoir voyager en toute tranquilité. Enin, la technique devient une véritable caractéristique de l’armée française. En efet, la laisse 718 expose la soudaine idée commune à tous les soldats français présents à Niort de se vêtir des armes anglaises ain de faire irruption dans le camp ennemi et surprendre les adversaires. Bertrand s’avère un modèle charismatique et inluence les comportements de son entourage. Ruse et humour Le motif de déguisement lève le voile sur un thème qui innerve également l’œuvre de Cuvelier : celui de la ruse. En efet, les victoires des Français sont souvent remportées par des tours joués aux ennemis. Plus largement, les épisodes de combat du cycle sont reliés par une même façon peu chevaleresque d’aborder la bataille, où seul le résultat compte, peu importe les moyens employés. Creuser des mines pour faire tomber la forteresse ennemie, voler les vivres destinés à l’armée anglaise ou tromper les gardes par des déguisements sont autant de techniques qui divergent d’un idéal de combat mais qui sont pourtant célébrées comme de véritables coups de génie. Bertrand trouve dès sa plus tendre enfance des moyens pour braver les interdits posés par ses parents. Son arme de prédilection est la hache 45 , qui deviendra celle de Charles de Blois ou d’Olivier de Clisson 46 . Les actions de Bertrand trouvent leur écho dans les actions des autres personnages rencontrés au gré de ses pérégrinations. Tout ce jeu autour de ruses ou de combats peu nobles donne alors un ton particulier à l’ensemble de l’œuvre, placée sous l’emblème de l’humour. Ce ton est en décalage avec le style épique qui se veut être un style haut. Si on trouvait déjà dans la geste de Guillaume des scènes destinées à faire rire l’auditoire, ce trait se trouve exacerbé dans le poème consacré au connétable. L’humour présent dans diférentes séquences, comme la capture des porcs de l’armée anglaise par le Tort-Boyteux, l’enivrement d’un héraut anglais provoqué par Bertrand ain qu’il n’aille pas porter son message, la diatribe de Mahieu de Gournay contre les musiciens du roi à la cour du Portugal ou l’arrivée des Anglais complètement 45. Voir par exemple vers 680 ou 17138. 46. Nous renvoyons au vers 6021 pour Charles de Blois et 20824 pour Clisson.
262
De la chanson au cycle
ivres à Chisec après la découverte d’une charrette remplie de tonneaux de vin, vient donner une couleur analogue à des scènes pourtant très diverses. Les quelques jeux d’échos analysés 47 montrent bien que l’unité du cycle de Bertrand ne se fait pas simplement en plaçant des épisodes reprenant les grandes lignes de la vie du connétable les uns à la suite des autres. Ils témoignent d’une volonté de construction orchestrée en amont de la rédaction et d’une vision littéraire de l’ensemble, en accord avec les codes contemporains.
4.1.4
|
La construction d’un manuscrit cyclique
L’unité formelle et stylistique du texte, la mention d’un auteur ainsi que la rapidité de composition semble exclure la possibilité de circulation de chansons autonomes se concentrant sur diférentes actions de Bertrand. Cependant, le découpage entre incidences et chansons peut illustrer une certaine dynamique de composition encore proche de celle des anciens manuscrits cycliques. Ces manuscrits présentent un noyau de chansons qui est dit primitif et autour duquel sont venus au il du temps se grefer divers épisodes pour inir par construire une biographie des personnages et du lignage tout entier. Ce découpage peut témoigner d’une vision toujours rhizomatique du texte, que G. Deleuze déinit ainsi : Il n’est pas fait d’unités, mais de dimensions, ou plutôt de directions mouvantes. Il n’a pas de commencement ni de in, mais toujours un milieu, par lequel il pousse et déborde 48 . La coupe en séquence induite par les prologues internes est peut-être l’indice d’un cahier des charges à tenir par le poète : les épisodes importants de la guerre de Bretagne tels que les batailles de Cocherel ou d’Alroy, le départ de la Grande Compagnie, l’épisode de la rançon, la prise de Sainte-Sévère ou encore la mort du héros peuvent être autant de scènes attendues pour un public désireux de lire la biographie du chevalier breton comme pour le commanditaire d’un manuscrit traitant de la vie du connétable. 47. Nous avons privilégié dans cette analyse les grands traits qui peuvent se répéter tout au long du texte. Il est évident que d’autres épisodes sont liés par des jeux d’échos. On peut citer par exemple la chevauchée de nuit de Pietres éclairé par sa table magique et la chevauchée nocturne de Bertrand ou encore les épisodes mettant en scène des faux et des vrais pèlerins, entre autres. 48. G. Deleuze et F. Guattari, Mille plateaux : Capitalisme et schizophrénie, 2, Minuit, 2013, p. 31.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
263
Alors certes, le choix de Cuvelier pour composer la biographie épique du connétable s’est porté vers une organisation cyclique. Mais pourquoi ce choix particulier ? Dans un article traitant de l’esthétique des chansons de geste tardives, R. F. Cook nous donne des éléments de réponse : I think the distinction between cycles and independent unitary poems may have been blurred for contemporaries starting from the time the chansons de geste became available in compiled cyclical form. What the late redactors have in mind to imitate is not what we think of as the epic unit — a 1900-line Prise or a 1500-line Charroi or even a 9000-line Roman de Roncevaux. They are, instead, composing epics as they knew them — long, episodic sequences whose parts may have a recognizable beginning , middle, and end, but which are themselves characterized by the sort of tumbling movement that we think of as cyclical and that we dissociate from the act of epic composition itself 49 . En efet, si nous étudions la production épique qui reste à notre disposition, nous remarquons que la plupart des textes sont contenus dans des compilations manuscrites cycliques ofrant un panorama de la vie du héros et quelquefois de son lignage. Après la grande période de compilation des textes qu’a été le XIIIe siècle, le manuscrit cyclique s’érige comme un tout dans les mentalités des auteurs et copistes du XIVe et du XVe siècle. Le choix d’une écriture cyclique s’impose alors à Cuvelier désireux de composer un poème épique à la gloire du connétable. L’intérêt de ce texte réside dans la volonté aichée de composition d’un cycle épique, rélexion qui vient en amont de la création et non en aval comme pour les recueils de chansons de geste du XIIIe siècle. Les textes épiques tardifs peuvent être considérés comme l’aboutissement de cette rélexion des scribes sur les plus anciennes chansons, qui s’inscrivent désormais en cette in de Moyen Age dans un assemblage plus large. Il n’existe pratiquement plus à la in du XIVe siècle 49. « Je pense que la distinction entre les cycles et les poèmes autonomes a dû s’atténuer pour les contemporains à partir du moment où les chansons de geste ont été disponibles dans des compilations cycliques. Ce que les rédacteurs tardifs ont en tête comme modèle n’est pas ce que nous considérons comme une unité épique — la Prise en 1900 vers, le Charroi en 1500 vers ou encore le Roman de Ronceveaux en 9000 vers. Au contraire, ils composent des poésies épiques telles qu’ils les connaissent — de longues séquences épisodiques dont les parties peuvent avoir un début, un milieu et une in identiiables, et qui sont elles-mêmes caractérisées par une sorte de mouvement de rotation que nous considérons comme cyclique et que nous dissocions de l’acte de composition épique. » Cook, « Unity and Esthetics of the Late Chansons de geste », op. cit., p. 110.
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Le manuscrit A, un cycle ?
de textes épiques autonomes. Les manuscrits cycliques sont la matière que le copiste a sous la main ain de créer la geste de Bertrand. Et c’est bien l’esthétique cyclique qu’il adopte. Il faut alors prendre en considération ce choix d’écriture ain de pouvoir appréhender l’œuvre consacrée à la légende du connétable de France, mais également la plupart des textes épiques tardifs. Si les poèmes plus récents n’ont pas le goût des anciennes chansons de geste, c’est tout simplement parce qu’ils n’en sont pas. En revanche, ils en contiennent des dizaines. Les événements narrés ne sont plus considérés comme ayant une autonomie propre mais comme faisant partie d’une geste, entretenant des rapports étroits les uns avec les autres et s’inscrivant dans une chronologie propre à la vie du héros éponyme. Si cette période peut être considérée comme l’automne de la chanson de geste 50 , elle est sans conteste le printemps du cycle épique. L’écriture épique à la in du Moyen Age donne donc naissance à des textes considérablement augmentés, traitant de la globalité d’un sujet, et parfois de tous les personnages qui fréquentent le héros de près ou de loin. Pourquoi alors, dans le manuscrit A, après avoir conté tous les événements de la vie du connétable, vouloir encore ajouter des poèmes à la in de l’œuvre, même s’ils traitent de Bertrand ? Tout n’a-t-il pas déjà été exposé au lecteur ?
4.2 | Le manuscrit A, un cycle ? En plus d’ofrir au lecteur toute la geste du chevalier breton, le manuscrit A comporte sept poèmes célébrant la vaillance du connétable copiés en in de volume. Ces mêmes poèmes se trouvent également à la in des manuscrit P et Pn. La multiplicité des témoins adoptant cette composition particulière poussent à s’interroger sur ce désir des copistes d’unir ces diférentes pièces. Il ne peut s’agir de manuscrits à modèle commun ou copiés les uns sur les autres. En efet, alors que les versions de La Chanson de Bertrand du Guesclin sont proches dans A et P, la version copiée dans le manuscrit Pn présentent d’importantes variantes 51 . Les impératifs de copie étant écartés, outre la igure de Bertrand, quelles sont les raisons qui ont poussé à l’union de ces pièces diverses ? 50. Roussel, « L’automne de la chanson de geste », op. cit. 51. Le manuscrit Pn constitue le manuscrit de base de l’édition de J.C. Faucon, Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier, op. cit.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
4.2.1
|
265
A la recherche du lyrisme perdu
L’intérêt premier de la présence des sept poèmes lyriques à la suite du texte épique est certainement celui qu’on attend le moins, puisqu’il s’agit d’un intérêt narratif. Toutes ces pièces parlent du connétable au passé, signe qu’elles ont été rédigées après la mort de celui-ci. C’est donc en toute logique chronologique qu’elles viennent se positionner dans le manuscrit après l’épisode narrant la mort de Bertrand, clôture du texte de Cuvelier. Elles peuvent être interprétées comme des prolongements narratifs du poème épique, racontant des faits se déroulant après le décès du chevalier et dont Cuvelier n’avait peut-être pas connaissance au moment de la rédaction de son œuvre. Ils ajoutent ainsi un témoignage de plus à la longue liste de ceux présentés par l’auteur de la biographie du connétable, comme d’autres manuscrits de la tradition présentent des copies de chartes signées par le connétable en in de volume 52 . L’ajout de ces poèmes en in de volume peut également avoir été motivé par une autre nécessité littéraire. Nous avons remarqué plus haut que les laisses épiques deviennent pleinement narratives sous la plume de Cuvelier, prolongeant une tendance déjà observée dans les plus anciennes chansons. La présence de ces pièces permettrait ainsi une réintroduction du lyrisme originel au moment où il est certainement le plus attendu par les lecteurs : le moment de la mort du héros. Une des clés de compréhension du lien qui unit les diférents textes du manuscrit se trouve peut-être dans l’épisode de la mort de Bertrand. En efet, le passage de la mort du héros correspond parfaitement aux codes du genre (intériorisation, repentir, dernières volontés...), sauf sur un point : la présence de planctus 53 . Après que Bertrand a rendu son dernier soule, aucun de ces compagnons d’arme présents ne prend la parole ain d’exprimer sa douleur, élément pourtant très fréquent dans la topique de la mort du héros épique. De plus, l’épisode inal décrivant les derniers instant du connétable indique qu’aucune cérémonie n’est organisée pour les funérailles du chevalier 54 . Le silence assourdissant du texte à cet égard a donc pu faire naître le besoin d’ajout des ces pièces lyriques en in de volume. De plus, ces poèmes répondent à d’autres nécessités omises dans le texte 52. C’est le cas du manuscrit Pa dont les derniers folios sont des copies de documents oiciels dans lesquels Du Guesclin est mentionné. 53. L’étude de l’épisode de la mort de Bertrand a été développée plus longuement dans une de nos communications intitulée La poétique de la mort de Bertrand du Guesclin donnée à Strasbourg en 2011 l’occasion du colloque « Le Héros et la mort dans les traditions épiques », dont les actes devraient paraître bientôt. 54. Voir les vers 21741-50.
266
Le manuscrit A, un cycle ?
épique. Elles permettent d’abord de répondre aux appels à la prière exprimés par le défunt au moment de sa mort 55 en présentant plusieurs prières posthumes. Ils permettent à Bertrand d’être célébré par toutes les strates de la société de l’époque, du berger au poète en passant par les chevaliers, alors même que le texte épique leur refuse toute parole. L’ajout de ces pièces lyriques au cycle peut enin s’analyser comme la volonté d’illustrer le trepassement. Le verbe trepasser contient l’idée du dépassement, d’un passage vers un au-delà du monde. Le texte dépeint cette traversée : il met en scène d’abord une mort, puis un silence et enin une renaissance de la parole. L’impulsion donnée à la chanson par l’ajout des poèmes mime la renaissance de l’âme après la mort du héros. Le mouvement imposé est une illustration littéraire du trépas. Le héros est propulsé dans un au-delà du texte, il en dépasse les limites, accompagné par le poète. Cet élan permet à Bertrand de rejoindre le panthéon des héros épiques. Plus largement, il devient ainsi un héros littéraire par excellence dont le nom est célébré à travers de multiples formes poétiques. Ainsi, le trépas de Bertrand se confond avec le trépas de l’œuvre, tous deux dépassant ensemble les limites du silence et de la mort.
4.2.2
|
Le cycle Du Guesclin
Les enjeux littéraires soulevés par la présence des pièces lyriques en in de manuscrit soulignent que la réunion de ces diférents objets littéraires est bien le fruit d’une volonté motivée par d’autres raisons que la simple thématique commune. Comment peut-on alors qualiier l’ensemble constitué par le manuscrit A? La forme cyclique adoptée par le poème épique appelle à l’adjonction de matière nouvelle. Comme le remarque M.-E. Bely : l’aspiration à une totalité uniiée engendre des expressions multiformes, comme si le « cycle » de la vie racontée était un chantier toujours ouvert, comme s’il ne pouvait se clore sur lui-même 56 . L’ajout d’autres poèmes à la suite du texte de Cuvelier peut être justiié par la forme même du cycle qui, alors qu’elle raconte une vie de la naissance à la mort du héros, appelle perpétuellement à des prolongements au-delà des limites que 55. « Et prié touz pour moy, car mon temps est alé. », (vers 21730). 56. M. E. Bély, J. R. Valette et J. C. Vallecalle, éds., Sommes et cycles (XIIe-XIVe siècles), actes des colloques de Lyon, 31 mars 1998 et 5-6 mars 1999, Les Cahiers de l’Institut catholique de Lyon 30, Lyon : Université catholique de Lyon, 2000, « Avant-propos », p. 8.
Chapitre 4 . Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question
267
peuvent constituer les bornes de l’existence. Cette particularité du cycle a été relevée par N. Andrieux : Si la présence de ces échappées narratives vers les collatéraux peut se justiier par la seule visée biographique - leur temps de référence s’inscrit dans la continuité de vie que mène Guillaume vers la in de ses jours - la matière de ces mêmes échappées semble révéler une matière toute autre qui, sans l’occulter jamais ni même toujours la dominer, se surimpose à la première : une visée encyclopédique tendant à rassembler tout ce qui, de près ou de loin, est susceptible de s’intégrer à l’histoire de Guillaume 57 . Ce que le cycle de Guillaume inspire à N. Andrieux-Reix s’applique, mutatis mutandis, à Bertrand du Guesclin. Ainsi, les pièces lyriques peuvent constituer une partie du cycle de Bertrand, donnant des informations sur les suites du décès du connétable. L’œuvre polymorphe que constitue le manuscrit A, organisée autour de la igure de Bertrand du Guesclin, peut alors être légitimement considérée dans son intégralité comme un manuscrit cyclique.
57. Andrieux-Reix, « Autour du cycle », op. cit., p. 17.
Conclusion L’analyse du manuscrit A et des textes qu’il contient montre que cet objet fonctionne bien comme un tout dans les mentalités du XIVe et XVe siècle. Cette remarque invite à s’interroger sur la production épique médiévale française en général et sur la perception que nous avons de ces textes depuis les études du XIXe siècle. Que connaissons-nous des chansons de geste aujourd’hui ? Comment les abordons-nous dans nos études ? Les diférentes éditions modernes de poèmes épiques français privilégient un découpage en chansons. Il est impossible à l’heure actuelle de trouver une édition donnant à lire un cycle tel qu’un lecteur médiéval aurait pu le connaître, alors que c’est bien la réalité cyclique qu’un copiste du Moyen Age tend à considérer et non celle d’une chanson. Le découpage des chansons contenues dans les manuscrits cycliques peut d’ailleurs très vite s’avérer artiiciel. Par exemple, des débats ont agité la critique autour de la coupure du noyau primitif de la geste des Lorrains. En efet, la séparation entre les chansons de Garin et de Gerbert n’est pas signalée dans les manuscrits par un prologue. Cette diiculté conduit les diférents éditeurs de la chanson Garin le Loherenc à être en désaccord quant à l’endroit où prend in le texte concernant Garin et où débute celui concernant Gerbert, la limite entre les deux textes pouvant être repoussée de plus de 2500 vers selon les critiques 58 . De plus, les bornes des chansons ont bien souvent été refaites par les copistes ain de les faire entrer dans le moule du cycle, comme le remarque par exemple M. Ott pour la Mort Aymeri de Narbonne : La dernière laisse de la Mort Aymeri de Narbonne ne paraît pouvoir s’expliquer que par l’intervention d’un remanieur lors de la constitution du Cycle, parce qu’elle est en contradiction avec l’esprit de toute 58. Voir par exemple les diférences entre les éditions de E. Vallerie et de A. Iker-Gittleman J. E. Vallerie, éd., Garin le Loheren according to manuscript A, Bibliothèque de l’Arsenal 2983, with text, introduction, and linguistic study, New-York, 1947 ; A. Iker-Gittleman, éd., Garin le Loherenc, t. 3, Les classiques français du Moyen Âge, Paris : Champion, 1996-1997.
269
270 la chanson, où Guibert joue un rôle essentiel 59 . Ainsi, la plupart des textes épiques que nous connaissons aujourd’hui sont édités en unité alors même qu’ils ont été conçu pour fonctionner en cycle. Pour prolonger la rélexion sur l’objet manuscrit, même la sacro-sainte version de La Chanson de Roland conservée dans le manuscrit d’Oxford Digby 23 fait partie d’un recueil. Elle est en efet précédée de la traduction latine faite par Calcidius du Timée de Platon et des liens évidents existent entre les deux textes 60 . Ces considérations incitent à réléchir à de nouveaux modes d’édition des textes médiévaux. Les études antérieures sur les composantes des cycles épiques ont permis de grandes avancées pour comprendre la réalité manuscrite épique avant les compilations cycliques. Des noyaux anciens ont été mis au jour permettant de faire la part entre textes originels et les ajouts postérieurs 61 . Cependant, la matérialité du codex a souvent été négligée par les éditeurs de textes épiques, alors qu’elle est d’une importance cruciale pour la compréhension de la vision médiévale sur la production littéraire de l’époque. La constitution d’un manuscrit hétérogène découle bien souvent d’un choix motivé par une problématique que le Moyen Age considère comme commune aux textes reliés ensemble. Ce sont bien ces compilations cycliques qui constituent le canon des textes épiques pour les copistes des XIVe et XVe siècles et non la chanson, comme nous avons trop tendance à le croire. Regarder les longs poèmes de la in du Moyen Age au prisme des codes de la chanson n’a donc pas vraiment de sens. Il est cependant diicile d’avancer autrement, aucune édition d’un manuscrit cyclique épique n’ayant été réalisée à ce jour. Si les impératifs de la publication papier ont certainement freiné les ardeurs éditoriales, l’ère du numérique permet de s’afranchir des contraintes matérielles et ravive ainsi de larges projets d’édition qu’on pensait éteints 62 . Dans ces conditions, les limites ne sont plus celles ixées par les maisons d’éditions mais celles que l’éditeur se ixe à lui-même. La publication en ligne de cycles entiers s’avère désormais possible. L’édition de manuscrits cycliques plus que de textes permet59. M. Ott, « Les songes d’Aymeri dans la Mort Aymeri de Narbonne », Mélanges de langue et de littérature françaises du Moyen Age oferts à Pierre Demarolle, 1998, p. 241–262. 60. Pour une étude des rapports entre les deux textes du recueil, voir K. Murray, « La mise en recueil comme glose ? Le thème de la translatio studii dans le ms. Digby 23 de la Bibliothèque Bodléienne à Oxford », Babel [En ligne] 16, 2007, url : http://babel.revues.org/716. 61. Voir par exemple l’étude du cycle de Guillaume par M. Tyssens, M. Tyssens, La geste De Guillaume d’Orange dans les manuscrits cycliques, Les Belles lettres, 1967. 62. Voir par exemple le projet The online Froissart, édition en ligne des Chroniques de Jean Froissart, à l’adresse suivante : http://www.hrionline.ac.uk/onlinefroissart/
271 tra certainement une meilleure compréhension de la mentalité médiévale et nous permettra de pénétrer un peu plus dans ce monde littéraire fait de chair, de poil, mais avant tout d’idées.
Annexes
273
Mentions du nom Cuvelier dans les archives
A
A.1 | Archives départementales du Nord Toutes ces documents sont extraits du répertoire des Archives départementales du Nord consutable sur internet 1 .
A.1.1
|
Mention de Jean
1. 11 G 55. Mentions de Jacques Fuellet (1383) et Jean de Givry (1393, 1398), doyens du chapitre ; Jean Le Cuvelier, prévôt (1352 à 1398) 2. 11 G 23. Mentions de Amauri (1248) et Jean Crespin (1330, 1335), doyens du chapitre ; de Jean Le Cuvelier, prévôt (1344, 1360) 3. 11 G 24. Donations et fondations (1317-1365). Pièces 174 à 195 bis. — Actes de Pierre, évêque de Cambrai (1365) (...) Mentions de Jean Le Cuvelier, prévôt de Notre-Dame de la Salle (1351, 1352, 1360, 1361)
A.1.2
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Mention de Jacques
1. 16 G 467*. Cartulaire de la confrérie Saint-Jean Evangéliste (XVe s., avec additions des XVIe et XVIIe s.). (...) des baillis du prévôt de Saint-Pierre de Lille Jacques Le Cuvelier 1367 (fol. 32), 1374 (fol. 60v°), Robert Petitpas 1419 (fol. 28 v°), Michel Ravary 1451 (fol. 75) ; des jugeurs du chapitre 1319 (fol. 126 v°), 1343 (fol. 127 v°), du sergent du chapitre Gauvain de Langlée 1343 (fol. 204). 2. 16 G 162. Actes passés devant les bailli, juges rentiers et échevins du chapitre (1319-1643). Pièces 1591 à 1607. — Actes des baillis du chapitre Girard Du Castel (1469), Walleran de Beaufremez (1546), Pierre de Moncheaux (1629), Jean-Baptiste de Hennin, seigneur de Callebreucq (1643) et juges rentiers ; Louis Abrassart, bailli et hommes de lef (1586) ; des baillis Jacques Le 1. http://www.archivesdepartementales.lenord.fr, consulté le 05/10/2015.
275
276
Archive de la Collégiale de Saint-Pierre de Lille Cuvelier (1367, 1374), Guillaume de Vendeville (1577) et juges rentiers ou cotiers de la prévôté de Saint-Pierre. 3. 16 G 259. Biens et droits. Lille (1350-1400). Pièces 2169 à 2196. — (...) Mentions des chanoines (...) Le Blanc dit Le Fevre, maréchal (1392), Le Craissier, Le Cuvelier (Jacques), bailli du prévôt de Saint-Pierre (1373), Le Grange (de), Le Maistre, Le Moy, Le Toillier, Li Brikiere, Loustorgne (Pierre), bourgeois de Lule (1361, 1367), Mulot, Pol, Ravache (Guillaume), barbier (1366), Ravari, Santés (Jean de), tanneur (1384), Voisin (Aliaume), receveur de Lille (1361).
A.1.3
|
Mention de Gilles
Compte des justices de Lille, par maître Herbert et Blancfossé (1306). (...) 1. 16 G 1531. — Idem. — par Jean As Croches et Gilles de Keynoit alias Cuparii, chanoines (1385). 2. 16 G 1532. — Idem. — par Gilles Cuvelier et Jean de Monchy, chanoines (1386).
A.2 | Archive de la Collégiale de Saint-Pierre de Lille Ces archives mentionnent uniquement Jacques le Cuvelier. 1. MCIV. 4 mars 1366. — « Jaquemes Li Guvellers, baillieus à religieuses et honnerables mes dames abbesse et couvent de le abbeye de Marquette... Pardevant my et pardevant juges à mes dites dames, de leur tenure et signourie que elles ont à Wadringhehera, en le parrosche de le Magdelaine, descendant des frans alloes de Cysoing, » [...] — Che fu fait en l’an de grasce mil trois cens soissante chincq, le quart jour dou mois de marc. Vidimus de l’abbé et du couvent de Loos 2 . 2. MCXIX. 21 mai 1367. — « Jaquemes Li Cuveliers, baillius à révérend père en Dieu monssigneur le cardinal de Pamplune, prevost de l’église 2. E. Hautcoeur, Cartulaire de l’église collégiale de Saint-Pierre de Lille, L. Quarré, 1894, p. 762.
Chapitre A . Mentions du nom Cuvelier dans les archives
277
Saint-Piere de Lille... [...] — Ce fu fait et cognut le XXI* jour dou mois de may, l’an de grâce mil CGC soixante sept 3 . 3. MCXXII. 15 décembre 1367. — « Jaquemes Li Cuveliers, baillieu à révérend père en Dieu monsigneur le cardinal de Pampelune et prevost del église Saint-Piere de Lille... [...] — Che fu fait le XV” jour de décembre, Van de grâce M CCG LX et VIL Lib. cal., n* 717. Orig., quatre sceaux, dont trois brisés 4 . 4. MCXLIII. 11 juillet 1373. — Par-devant notaire et témoins comparurent Pierre de Bourgogne, chanoine de Saint-Pierre, procureur du cardinal de Pampelune, prévôt, et Jacques Le Tunelier, bailli du même 5 , d’une part ; Pierre Boudet et Jacques de Langlée, échevins de Lille pour l’année présente, Pierre Le Maistre, Pierre de Fierrières, Jean Hanguwart, ils aîné de feu Jean, Jean de Brueilenth, et Jacques Destallleurs, échevins de l’année passée, avec Jacques de le Cambe (de Gamba), leur sergent, d’autre part [...] 6 5. 30 juillet 1374. — Jaques Li Cuveliers, baillius pour le temps à révérend père en Diu meii très ciller signeur monsigneur le cardinal de Pampelune, prevost del église Saint-Piere de Lille, de se tenure, justice et signourie que il a et tient à cause de se dite prevosté en le ville et chastellenie de Lille 7 .
3. Ibid., p. 764. 4. Ibid., p. 765. 5. Cet item donne une variante notable du nom de famille qui nous importe : Tunelier. Il faut bien entendu émettre quelques réserves face à cette inscription : elle peut venir du manuscrit d’origine comme de l’éditeur qui aurait mal lu le nom du représentant du cardinal. Il s’agit sans aucun doute du bailli du cardinal de Pampelune, comme l’indique son titre donné dans le document. Cette diiculté de lecture fait écho à celle que l’on trouve dans les manuscrits de Berlin et du Mans contenant la biographie du connétable. Les premiers feuillets de ces deux codex ont été recopiés entre le XVIIe et le XVIIIe siècle et donnent tout deux Trueller comme nom du faiseur de rimes. 6. Hautcoeur, Cartulaire de l’église collégiale de Saint-Pierre de Lille, op. cit., p. 777. 7. Ibid., p. 783.
Poèmes d’Eustache Deschamps
B
Ballade 222 : Grant joie avint a la mainson de France Grant joie avint a la mainson de France Quant Dieu tramist Charle, ainsné ilz de Roy, Ou bien duquel doit avoir esperance Tout le regne pour son gentil arroy. Feste devons tuit faire de l’envoy : Le dimenche des Advens, Droit a Saint Pol nasquit l’an mil trois cens .lx. et huit, en ce temps precieux Que Jhesu Crist vint sauver toutes gens, Si en devons estre trestuit joieux. Depuis qu’il vint cesser notre soufrance, Nostre ennemi furent en petit ploy. Par son naistre nous ist dieu demonstrance Que la victoire venoit avec soy. Resjouy fut le peuple en bonne foy, Car adonc furent perdens En pluseurs lieus Anglois [et] leurs aidens, Bertran de Guesclin li bons victorieus Connestables, les fut persecutens, Si en devons estre trestuit joieux. Trois ans aprés ceste noble naissance, Nasquit Loys dont trestous biens diray. En lui sera toute honour et vaillance, Et de Valoys pieça conte le voy, L’ainsné daulphin. Et tient on que cil doy Seront d’armes si puissans, Et tant ara en eulx prouesce et sens Qu’Engleterre yert destructe par l’un d’eulx. Estre doivent merveilleus conquerans : 279
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280 Si en devons estre trestuit joieux 1 .
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Chant royal 362 : S’Alixandre, le puissant roy paien S’Alixandre, le puissant roy paien, Julles Cesar, Hector et leur efors, David, Josué, Judas Machabeyen, Artus, Charles et Godefroy li fors, Qui tant d’armes irent tuit de leurs corps Que preux sont par tout tenuz, Estoient tuit au monde revenuz, Pour faire bien, pris, honeur et vaillance Seront entr’eulx bien améz et venuz B. du Guesclin, connestable de France. Car, a son temps et par son bon moien, Du royaume mena les Anglés hors. Espaingne en in conquesta et li sien, Enz ou pais combatit deux foiz lors. L’une fut prins et, quant il fut ressors Et de se prinson yssus, Se ralia et remist ses genz sus, Le roy Pietre desconist par puissance, Henry ist roy et regner par vertus B. du Guesclin, connestable de France. Canole donc, Granson et Albien Vindrent courir en France, lui dehors, Tout gastoient. Mais, quant il le sceust bien Aprés ala de France li confors, Li bons Bertrans les a tous prins ou mors Et leurs chasteaulx combatus, Qu’ilz tenoient, prins et abatus. Aux Normans ist des Anglois delivrance. Celle saison les rent mas et confus 1. Edition disponible en ligne : http://www.diachronie.be/deschamps/ballades/ ballade_0220.html
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B. du Guesclin, connstable de France. Encor n’est ce de tous ces fais cy rien : Que pot il prendre en Guienne de fors Bien emparéz de pierre et de merrien Et quelz assaulx livroit il par defors ! Rien ne duroit, mais telz fu ses depors Que toudis en prenoit plus. Il ist estre vaillans les malostrus. Son cry donnoit aux ennemis doubtance. Poitou conquist et nous mist au dessus B. du Guesclin, connestable de France. Onques telz fais ne irent Troien. Royaumes a conquis, villes et pors. En Arragon fu vaillant crestien. Les montaignes passa de Piéz de Pors. De batailles soixante est ses tresors, Rencontres ot plus que nulz, En gaige s’est vaillamment maintenus Et combatus jusques a droite oultrance, A cinquante ans a tous ses fais conclus, B. du Guesclin, connestable de France. L’envoy
Princes, je dy que chevaliers esluz, Qui en pou d’ans a fait tant de vertus Pour son seigneur et a son pays, bien Doit o les preux lieu avoir ancien Et estre améz de tous et chier tenus 2 .
Ballade 239 : Que nul ne doit mesdire des anciens Qui est cellui, a parler proprement, Qui [ce] puet bien par raison soustenir, Que vaillance n’ait anciennement 2. Edition disponible en ligne : http://www.diachronie.be/deschamps/chancons_ royaulx/chancon_royal_047.html
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282 Es vaillans cuers esté, ne maintenir Que les hommes du jour d’ui Sont plus vaillans ? Le dire est grant ennui, Et de prouver le contraire suis prest : Par les acteurs et livres que je lui : Chascun deust congnoistre quelz il est. Que ist Sanson ? Voy le ou vielz Testament. Et de Jason te doit bien souvenir, Du roy David, d’Ercules ensement, D’Alixandre qui tout voult conquerir. De Cesar esbahis suy Et des Romains qui regnerent, ce trui, Quant du monde irent tout le conquest, Des presens gens tel n’en congnois nullui : Chascuns deust congnoistre quelz il est. Artus, Charles, Godefroy le vaillant, Maccaheus, Hestor, d’armes martir , De conquerre ne furent onques lent, De combattre, de chasteaulx assaillir. Helas ! et ou est cellui Du temps present qui ait conquis autrui, Qui puist montrer un royaume d’acquest ? Je ne le sçay. Fors Guesclin n’en congnuy : Chascuns deust congnoistre quelz il est. L’envoy
Princes, je dy qu’il mesprant durement Qui ne congnoist la paine et le tourment Des anciens. car qui sçauroit que c’est Et qu’ilz irent pour nostre enseignement, Telz les blasme qui diroit autrement : Chascun deust congnoistre quelz il est 3 .
3. Edition disponible en ligne : http://www.diachronie.be/deschamps/ballades/ ballade_0236.html.
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Ballade 206 : Estoc d’oneur et arbres de vaillance Estoc d’oneur et arbres de vaillance Cuer de lyon esprins de hardement, La lour des preux et la gloire de France, Victorieux et hardi combatant, Saige en voz fais et bien entreprenant, Souverain homme de guerre, Vainqueur de gens et conquereur de terre, Le plus vaillant qui onques fust en vie, Chascun pour vous doit noir vestir et querre : Plouréz, plouréz lour de chevalerie. O Bretaigne, ploure ton esperance, Normandie, fay son entierement, Guyenne aussi, et Auvergne or t’avence, Et Languedoc, quier lui son mouvement. Picardie, Champaigne et Occident Doivent pour plourer acquerre Tragediens, Arethusa requerre Qui en eaue fut par plour convertie, Ain qu’a touz de sa mort les cuers serre : Plouréz, plouréz leur de chevalerie. Hé ! gens d’armes, aiéz en remembrance Vostre pere, vous estiéz si enfant. Le bon Bertran, qui tant ot de puissance, Qui vous amoit si amoureusement. Guesclin crioit. Priéz devotement Qu’il puist paradis conquerre. Qui dueil n’en fait et qui ne prie il erre, Car du monde est la lumiere faillie : De tout honeur estoit la droicte serre : Plouréz, plouréz lour de chevalerie.
Ballade 207 : Tuit li vaillant et prodoms de jadis Tuit li vaillant et prodoms de jadis,
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284 Tuit ly present et toute creature, Cesar, Hector, Alixandre et Davis, Artus, Charles, Godefroy, moy, Nature, Josué et Machabee, Et tout homme qui a haulte honneur bee Devons de plours faire riviere et unde, Car par la mort est la terre troublee Du plus vaillant qui fust en tout le monde. Comment sera ses nobles corps assis, Ne qui fera se riche sepulture ! Entre les Dieux devroit estre ravis Corporelment et en toute escripture Soit sa prouesce louee Ain que tuit saichent sa renommee Qui dessus touz en faiz d’armes habonde, Tant que la mort soit en tous lieux ploiree Du plus vaillant qui fust en tout le monde. De trestous ceuls que je formay et is Estoit la leur et la droicte eslicture, Qui en po d’ans a plus de faiz fenis Et qui mieulx a cerchié toute aventure, Et par qui acheminee Estoit d’armes la tresdouce contree, Qui pour sa mort en grant dolour redunde. Las ! au jour d’ui est France desnuee Du plus vaillant qui fust en tout le monde.
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Rondeaux 652 : Tuit chevallier qui aléz par le monde Tuit chevallier qui aléz par le monde, Et qui suiéz le mestier honorable, Plouréz la mort du vaillant connestable. Son grant renom par tout le ciecle habunde. C’estoit Claquin, le puissant combatable, Tuit chevallier qui aléz par le monde,
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Et qui suiéz le mestier honorable. Oncques n’[y] ot tel a la Table Ronde, Car tous ses faiz sont grans et merveillable. Et quant il sont plus que d’omme louable, Tuit chevalier qui aléz par le monde, Et qui suiéz le mestier honorable, Plouréz la mort du vaillant connestable.
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Lai 313 : Le lay du tres bon connestable B. du Guesclin Lasse, de fort heure nee, Fortunee Et mal menee, Esgaree, Triste, dolente, esplouree, Plaine de dolour, De tristour Et de plour, Dame de toute langour, Que n’est ma vie inee ! Quant jadis fu assenee, Honouree Et bien amee, Fort doubtee De plus vaillant cuer qu’Enee, Qui en toute honnour, En valour, Sanz faulx tour De prouesse et de baudour Surmontoit toute contree. Car en largesce passoit Alixandre et surmontoit En sa prouesce Achillés, Plus doulz que Paris estoit, Et en mer se gouvernoit
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286 Mieulx qu’onques Dyonidés. Ce fut Cesar en ses fes, Qui tant ist de beaus conquests. A Josué ressembloit. Terre devant lui trembloit Tant fut chevaliers parfés. Pour son seignour conqueroit. Les cuers des bons attraioit, Mainte terre mist en pes, Des couars hardis faisoit, Tout le monde le suivoit En criant : « Tenons de prés Le plus vaillant de jamés, Qui conquiert pais adés Et ce qui perdu estoit. » Car esbahis est qui oit Ce qu’il dist et ist aprés. Que ist il ? Des sa jeunesce, Sanz paresce, Hardiesce Fut en l’aigle d’Occident. Certes mainte grant prouesce Que je lesse Pour la presse De dire que mes cuers sent. Il portoit l’escu d’argent A la noire aigle plaisant Qui a deux testes se dresse A un baston qui s’adresse De gueules en traversant. Il ne doubta onques presse. Sa noblesce, Sa haultesce Et ce qu’il faut diligent Fist prandre mainte fortresce,
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Chapitre B . Poèmes d’Eustache Deschamps Car l’adresce De largesce Fut certes sur tout gent [ ] . ... Il servit premierement D’Orleans duc et duchesse. La Roche ot de leur richesse, Tesson heritablement. La terre et tout lui donna Le Duc et habandonna Pour ce que bien l’ot servi. Et li prodoms s’avança, Qui a Meleun commença, A l’assault forment s’ofrit, Et tant de paine y soufrit Que d’illec l’en apporta Comme mort. La se monstra Et la fut son premier cry. Depuis gens d’armes mena, Pluseurs grans fais acheva, Par tout fut son nom chieri. Les Anglois fort dommaga Et de leur orgueil vanga Les François, je vous afy. Maintefois les desconfy En bataille et surmonta, Et le Captal conquesta En Normandie autressi. Aprés fut il en Bretaigne Contre Montfort, soubz l’enseigne Du saint prodomme de Bloys. A la bataille grevaingne Prinsonnier. Puis en Espaingne Mena Gascons et Anglois, Du royaume a celle fois
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288 Getta les gens de compaingne : Ce fut le droit capitaine De tous, tant estoit adrois. Querre ist dure et haultaine Au roy Pietre et son demaine Pour Henrry, qui fut destrois D’une mort laide et villaine, Dont Pietre ot puis malestraine. Mais le prince des Galoys Pour Pietre o les Guiennoys Vint et o ceuls d’Acquitaine, Qui ist bataille en la plaine Et desconist les François. Mais a la desconiture Qui fut dure Dolente, male et obscure Fut li prodoms prinsonniers, Pour qui tant de mal endure, Car trop dure Ot lardure Pour ses gens. Mais tout premiers Demoura. De leurs deniers Au raensonner mist sa cure, Sanz refuser creature, Puis yssit de leurs dangiers. Arrier prinst son adventure. Tant procure Qu’en Espaingne o grant froidure Ramena ses souldoiers, Et conquist jusqu’a Esture : Rien ne dure, Ne n’endure Ses gens, ne leurs assaulx iers, Pietre print li bons guerriers, Et Henrris li queurt dessure,
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Qui l’occist a demesure. Roy le ist li chevaliers. La fut Espaingne conquise, Castelle et Galice mise En sugeccion nouvelle. En Arragon ist s’emprinse Ou mainte fortresce a prinse. Partout court de lui nouvelle. Navarre ne se revelle, En brief temps l’avoir soubmise. Les mons passa sanz faintise : La son pouoir renouvelle. Du pais ot grosse mise. Un messaigier lui divise Que France a secours l’appelle, Et que les Anglois pourprinse Ont la terre et la pourprinse. Lors delaissa sa querelle. Adonc ses gens amoncelle. N’i quist autre convoitise, Au Roy vint faire service, Lors fut sa venue belle. Par Guienne o ses efors Aida a prandre mains fors Le souverain combatable, Mais li Roys Charles pour lors Le manda et de son corps Voult faire son connestable. Moult fut a tous agreable : A Paris dedenz et hors Venoit chascuns, droiz et tors, Conjoir l’omme honourable. Car c’estoit tout leur confors : Gransson, Canole defors Estoient moult redoubtable.
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290 Par villes, chasteauls et pors Les chaça comme on fait pors, Et c’est chose veritable Qu’en bataille trespenable Furent desconis et mors. Et par ce furent ressors Normans de paine grevable. Or recommença la guerre Des François et d’Angleterre En Guyenne et en Gascongne. Engouslesme ala conquerre, Poitou, Xantonge, et requerre Es pays mainte besongne. Ne prisoit une escaloingne Fort, ville, chasteau ne terre. Tout d’assault prant ou aterre, Se n’est qui de gre lui doingne. En Bourdelois voult conquerre [ ] ... N’est nulz qui ne le ressaingne, Aux portes de Bourdeaulx erre, Tout raençonne. Clef ne serre Ne le tient jusqu’a Baionne : L’un se rent, l’autre se donne, L’un fait prinson, l’autre enserre, L’un combat et l’autre enferre, L’un met hors et l’autre essoingne. Ainsis conqueroit pais. Chacuns estoit esbahis Du grant fait de sa conqueste : Lors fut d’Envie envahis Et devers la court trahis (Envie est trop male beste). Telz clignoit vers lui sa teste Duquel il estoit hais, Qui se faingnoit ses amis
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Par faintise deshonneste. Si fut par longtemps remis, Dont li regnes fut mal mis Quant il delaissa sa queste. Lyéz furent ses ennemis. De son conquest ont conquis, Dont ilz faiss[o]ient grant feste. Helas ! Ce fut grant tempeste Pour toutes les leurs de lis ! Trop fut faulx, vains et faillis Qui esmut si grant moleste. Toute desolacion, Guerre et tribulacion Fut ou regne a sa venue, Mais sa consolacion Mist par provision Le peuple et la gent menue. La guerre leur a tollue Et gardé d’oppression, Dont toute leur orison Estoit par lui espandue. Que ist il une saison En Normandie ? Raison Est qu’elle soit entendue. Quans fors a sugeccion, Dont le Roy possession Ot devers lui retenue, Mist il ? La chose est sceue Par toute la region. D’Evreux la dominion Fut au Roy Charles rendue. En munde, en terre et en mer Fist tant qu’om le doit clamer Des chevaliers pere et preux. Partout ist son nom nommer,
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292 Si le doit chascun amer, Qu’a son dessus fut piteux, A ses ennemis crueux, Et voult la guerre mener Pour son seigneur, et iner Comme fors et courageux. En Languedoc voult aler Ou l’en veoit tout gaster Par les ennemis doubteux Sanz nul remede trouver. Par Auvergne acheminer Se voult le cuers vertueux. Fors se rendent deux et deux Trop le porent redoubter. Mais mort qui veut tout dompter Le prinst : la mourut touz seulx. La ina Honeurs sa vie, La mourut Chevalerie, La fut Vaillance perie, La fut Foys ensevelie, L’an mil .ccc. quatre vins. La fut notable sa ins. La fut sa parole oye, La disoit a sa maisgnie : « Servéz le Roy, je vous prie, Le peuple n’oubliéz mie. Je seray tantost estins, Je m’en vois de pechié tins, De grans miseres ains. Or soit Dieux en mes chemins Et la mere aux orphenins, La douce Vierge Marie, La dame que je supplie. Trop en ce monde me tins Ou il n’a que larrecins. Dame, trop y ay mesprins.
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Merci vous crie Guesclins Qui en saincte foy desvie. » Lors fu je toute esbahie, Qui cent foiz le jour le crie. Mors l’a moins tué qu’Envie. La fausse garce haïe L’espioit par les chemins. Par elle fut de Mort prins L’esleu sur toute lignie, Qui mainte terre a cerchie Et la mer a reverchie, Dont il convient que je die. Par tout couroit comme uns lins Du monde li pelerins, Li plus vaillant des Latins Que mon chevalier retins Et en prouesce maintins, Qui toute guerre a fournie, Bertrans, que renoms escrire, Grant departeur de lopins. En .lx. et dix hutins Mortelz, sanz gaiges comprins, A esté li vrais cuers ins, Pour quoy j’ai chiere palie. Nature en suis forsenee, Acouree, Tourmentee, Chetive et descoulouree. C’estoit le meillour, En amour, En douçour Sanz cremour, En puissance et en vigour Qui peust venir en armee. Pour ce maudiray l’annee,
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294 La journee Destinee Qu’Envie et Mort fut trouvee, Qui par leur rigour M’ont en plour Par faulx tour, Sanz retour, Mis, et a mon dernier jour, Sanz joie avoir recouvree.
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Cy ine le Lay du tresbon connestable Bertran du Guesclin 4 .
Ballade 1125 : Je veuil cesser mon livre de mémoire Je vueil cesser mon livre de memoire Ou j’ay escript depuis .xxxii. ans Du saige roy Charle le quint l’istoire, Les prouesces que ist li bons Bertrans, Connestable de Guesclin, qui engrans Fut de garder l’utilité publique, Et qui maintint si sa guerre punique Sur les Anglois, que France reformee En fut et est par mainte belle armee Faitte a son temps, et mourut en la guerre De son segnour. Moult fut sa mort plouree : Noble chose est de bon renom acquerre ! Car quant sa mort fut au bon roy notoire, Moult fut ses duelz et sa complainte grans D’avoir perdu le prince de victoire. Pour son peuple et pais fut dolens. Lors en souspirs et en larmes plourans, Dieu mercia, et service authentique Fist pour la mort du bon prodomme, si que A Saint Denis fut la tombe ordonnee, 4. Edition disponible en ligne http://www.diachronie.be/deschamps/lays/lay_09. html.
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Parfaicte non, mainte aumosne donnee Pour son salut par devers Dieu acquerre. Des trois mestiers fut l’ofrande portee : Noble chose est de bon renom acquerre ! Brief temps aprés, de ceste vie en gloire Passa ly rois qui laissa deux enfans, Charle et Loys, mais nulz ne pourroit croire Les grans meschiéz qu’eurent les mendres d’ans, Rebellions de leur peuple et contens, En bail cheirent, le temps fut lors inique. Charles regna, a Reins prist sa laurique. La chose fut asséz bien gouvernee. Puis son sacre me fut paine donnee Estans o eulx, d’encerchier et enquerre Et d’escripre leurs faiz par la contree : Noble chose est de bon renom acquerre 5 !
5. Edition disponible sur http://www.diachronie.be/deschamps/balades/balade_ 0752.html.
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Textes anonymes à la suite de la Chanson
C
Les textes suivants sont édités selon la version donnée par le manuscrit A.
Ballade A : Bien doit plourer chevalerie Bien doit plourer chevalerie Puis que mort est cellui qui tant l’ama, Le plus proudons, Bertrant qui en sa vie Les grans faiz d’armes tousjours continua, Et qui partout 1 ses ennemis mata Ou il fu chief, ceste verité prouvé, En mer, en mine, en champ combatu a, Et par son fait Espaigne conquestee. Ha, Chevaliers, escuiers qui envie Avéz d’onneurs querre qui vous menra ? Qui fera mais a pouvre gent aÿe, Ne qui chevaux ne harnois leur donra ? Qui dira bien des bons qui le dira ? Puis que la char est en terre boutee Du preux 2 Bertrant qui France recouvra Et par son fait Espaigne conquestee. Ha, doulce France, que dure departie Du vaillant homme qui tant vous honnoura Et qui gardé vous a vostre seignorie. Dés que l’a prist et que tenue l’a S’Envie ne fut, qui jamais ne morra, d’Alebien l’ordre fausse couvee Vous eust vengé, qui l’aigle noir porta Et par son fait Espaigne conquestee. Prince, je pri a Dieu qui tout crea 1. q. partout touz chevaliers ses e., touz chevaliers cancellé. 2. d. preux p B., p cancellé.
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Ballade B : L’escu d’argent a un aigle de sable L’escu d’argent a un aigle de sable A .ii. téz et a un roge baston Portoit le preux et vaillent connoistable, Le bon Bertrant du Guesclin en surnom. De Bertaigne fu né le bon baron, Fier et ardi, courageux comme un tor, Qui tant ama de loial cuer et bon L’escu d’azur a trois leurs de lis d’or. A lui n’estoit chevalier comparable De prouesce son vivant, se scet on, Ne qui tant fust en armes convenable Pour vaincre gens a baniere ou penon. Or est il mort, Dieu lui face pardon. C’or pleust a Dieu qu’il vesquist encor Pour defendre de ce leipart felon L’escu d’azur a .iii. leurs de lis d’or. Pour ses grans faiz soit escript en la table Machabeus et des preux le renon, de Josué, David le raisonnable, d’Alixandre, d’Ector et Cezaron, Artus, Charles, Godefroy de Billon, et soit nommé le dixesme des or Bertrant le preux qui servi con proudon l’escu d’azur a trois leurs de lis d’or.
Pastourelle C : En l’en de l’Incarnacion En l’en de l’Incarnacion Mil trois cens quatre vingts ans
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Chapitre C . Textes anonymes à la suite de la Chanson Six, en grande confusion, Mardi, asséz prés de 3 Conlans, Pastureaux dont les plus dolans Disoit aus autres haultement : « Plourons honneur et hardement, Foy, loiauté et courtoisie, Et eur de chevalerie, L’amour, l’amant sans point d’amer, Le bon, le large pour donner, Qui desconit mains grans assault. Plouréz, menestriers et heraut, cellui qui largement donnoit et qui de loial cuer amoit tout honneur et toute vaillance. Toutes ces vertuz cy avoit le bon connoistable de France. » De Gadifer, de Handion : « Est il mort le noble Bertrant, Cil du Guesclin, cuer de lïon, Qui tant amoit le roy des Francs, Qui si estoit entreprenans Qu’il ne doubtoit pluye ne vent, Qui travailloit songneusement, Qui ne redoubtoit mort ne vie, Assault, bataille ne envaÿe Faicte sur terre ne sur mer, Qui tant faisoit a redoubter, Qui tousjours avoit le cuer baut D’assaillir, ardant et si chault, Que les couars hardiz faisoit. Nulz homs ne savoit que c’estoit de son bien et de sa puissance. Mais je ne croy point que mors soit Le bon connoistable de France. » « Si est, se dit Ammarion. 3. corr. d’après P : a. prés des C.
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Ballade D : Plouréz princes, ducs et barons Plouréz princes, ducs et barons, Touz chevaliers, escuiers et bourjois. Plouréz Normans et Bertons La mort du preux connoistable françoys, Le bon Bertrant du Guesclin. Plourons, soions tretouz a Dieu enclin Pour son ame prier, c’est bien raison, Car loiaument defendi de cuer in Les leurs de lis du leupart felon. Hardy estoit et ier comme lÿon Le valereux chevalier et courtoys. Sa banere et ses nobles penons
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Chapitre C . Textes anonymes à la suite de la Chanson Trés ierement demoustroit sur Englois. Il les mectoit a declin Par sa valeur. Or lui soit Dieu a in, Et nous octroit avoir tel champïon Qui garder puist par prouesce et engin Les leurs de lis du leupart felon. Soit enterré entre les roiaux bons Son vaillant corps par honneur, c’est bien drois, Car puis le temps des neufs preux, plus proudons En fait d’armes ne fu, si comme je croy. Tousdiz vray et enterin A son seigneur estoit le palazin. Bien y appert a ses faiz de renon. Or veille Dieu garder, le trés begnin, Les leurs de lis du lieupart felon.
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Tableau des vers d’introduction Type
Sous-Type Pers.+estre Pers.+vb.
Actoriel
Descriptif
Pers.+ø Expansion Moult+estre Attr.+estre impers. Vass’en Or
Ainsi Rappel
Laisses 17-135-206-258-271-305(rcp)-309-310(rcp)-336354-383-387-400-401-455-681 27-34-40-41-51-57-58-59-62-64-65-72-89-95-96103-114-116-120-129-130-149-150-154-165-171173-175-187-198-208-222-233-235-241-243-250252-253(rcp)-255-262-263-266-276-277-278-280290(rcp)-291(rcp)-295-296-312-320-325-349350(rcp)-351(rcp)-360(rcp)-362-366(rcp)-367376(rcp)-386-395-405-413-417-426-431(rcp)-433443-447-448-450-454-459-465-472-473-481-484491-501(rcp)-518-531-535(rcp)-555-561-563-566568-570-572-576-579-581-582-589-590-595-598602-603-605-606-609-610-611-614-623-630-632635-651(rcp)-653-658-660-669-688-697-712-725 18-34-155-184-194-248-275-321-378-436-498 172-221-260-331-496-507-663-671 43-76-105-106-205-232-236-237-297-302(rcp)-392412-546(?)-548-637-647-649-689-695 21-48-101-118-153-179-203-228-234-239-298-345365-384-399-444-471-510-530(rcp)-544-549-551552-597-619-650-655-679-694-716 30-128-131-210 327-420-520-522 28-52-70-93-109-121-140-142-156-174-189-197207-224-230-268-314-326-393-394-434-445-458513-515-517-528-532-539-545-547-553(rcp)-554558-562-569-584-586-588-596-607-608-616-624625-626-628-629-631-646-678-691-696-702-703-713 9-33-45-47-69-71-79-80-97-108-146-163-188-204211-215-220-238-264-306-317-346-372(rcp)-375381(rcp)-388-396-424-437-453-457-475(rcp)-476516-542-543-557-574-583-604-613-615-617-618636-638-645-656-666-674-680-693-698-706-710-727 303
304 Type
C.C.
Sous-Type Ensuyment Ensuyvent Bien Dont/Adont En ce point Tant Lieu
Temps
Autre compl.
Laisses 53-112 55-132 183 83-261 652-715 664-692 16-35-49-54-87-102-117-137-145-147-148-151-162195-209-216-217-227-229-254-265-288(rcp)-292293-301(+jongl.)-303-307(rcp)-313-323(rcp)-339342-352-364-377-385-421-428-451-456-460-478480-483-489-497-500-508-514-529-537-538-559587-599-627-639-642-644-675-682-687-711-721-722 • Quant : 36-37-38-50-60-61-66-67-73-74-81-8488-91-94-113-119-144-161-164-166-176-180-181186-202-212-272-283-287-322-324-329-333-340343-347(rcp)-348-363(rcp)-373-379-380(rcp)-382408-416-418-419-430(rcp)-432-441-449-452(rcp)464-467-469-485-490-494-504-505-506-509(rcp)511-519-533-578-592-612(rcp)-633-634(rcp)-641643-648-668-676-677-684-705-708-709-724 • Ensement (que, comme) : 42-110-414-474-502 • Lors : 63-85-115-133-134-279(+pers)-318 • Aussi tost que : 75-425-567-622-707 • Si comme : 78-177-226-374-429-488 • Après : 92-104-127-190-199-225-341-409-427439-534-699-704-720 • En ce temps : 107-369 • Ains : 124-193 • Date : 152-192-274-406 • Ainsi (que) : 158 • Ainçoys que : 159 • Depuis : 246 • Puis : 334-620 • A+evénement : 398-410-499-521-701 • En tant que : 415 185-273-332-466-512-654-673
Chapitre D . Tableau des vers d’introduction Type Discours
Sous-Type Vb. parole
Disc. dir.
Disc. Nar. Jongleur
Métadiscursif
Noir L’istoire
305
Laisses 139-170-201-213-214-218-219-240-281-285308(rcp)-315(rcp)-337-353(rcp)-355-356-358359-402-404-423-435-442-446-486-536-556-564565-601-672 90-111-122-123-126-167-191-196-200-242-256(rcp)257(rcp)-267-269-270-282-284-289(rcp)-316(rcp)338-344(rcp)-368-371(rcp)-389-397(rcp)-407-438468-470-477-482-492-503-524-525-527-540-550575-577-580-591-593-594-600-657-659-661-662665-667-670-685-700 311(rcp) 1-2–3-4-5-8-12-20-22-23-24-25-29-38-68-77-8698-100-125-136-157-160-168-178-182-223-244245-247-249-251-294-299-300-301(+lieu.)-304328(rcp)-330-335-357-361-370-390-391-403-411422-440-461-462-463-479-487-493-495-526-560571-573-585-683-686-690-714-717-718-719-723726-727 168-259-319 26-99-621-640
Tableau des vers de conclusion Type
Sous -Type Adont (Et) Quant Ja Sans adv.
Vers narratifs
Pourtant Et Pers.
Bien Aussi Tost (Et) Puis Or Ensement Lors Ainsi Mais (quant) La (Et) Après Ains que
E
Laisses 22 -47 -99 -105 -123 -185 -242 -260 309(rls) -340 -348 -365 26 -63 -102 -194 -238 -314(rls) -379(rsl) -451(rls) -473 -508 -611(rls) -633(rls) 693 33 34 -70 -75 -78 -92 -100 -127 -128 -140 -162 -164 -177 -182 -184 -187 -191 -200 -203 -206 - -209 -233 -274 -291 -313 -333 -351 -365 -364 -371(rls) -375 (rls) -378 -395 -409 -422 -481 -497 -509 -533 -564 -626 -634 -663 -694 (+jongl ?) 36 -109 -156 37 -40 -68 -77 -98 -101 -103 -140 -146 -150 -226 -230 -236 -243 -248 -286 -368 -458 -595 -652 -710 -724 53 -59 -244 -252 -259 -272 -289(+jongl.) -292 -342 -349 -350(rls) -359 -360 430(rls) -435 -444 -482 -483 -498 -501 -506 -507 -512 -519 -520 -575 -650(rls) -659 69 83 85 -718 -726 88 104 120 -222(+jongl) -680 322 -380(rls) -391 -419 398 -414 -438 189 -410 -411 -445 -538 -546 -550 453 -514(+discours) 493 307
308 Type
1 vers narr.
Discours
Sous -Type Ind. temporelle Lieu Car Par ce point Et quant Et Sans adv. (Tout) Ainsi Ains Dont Lors Adont Lieu Chascun Par ce point/En ce point Ensement Quant Si Mais Moult fu La Pers. Et pourtant Direct 1 vers ou -
Laisses 201 -298 -405 240 -323 -568 587 636 32 -80 -94 -146 -362(rls) -504 42 -144 -227 -339 -566 -573 45 -118 -197 -224 -290 -338 -393 -430 48 -461 -474(rls) -681 58 143 -719 171 -386 -450 -554 -618 -641 10 -180 -195 -345 -446 -585 216 -287 56 -233 305 -334 341 346 -429(rls) 389 8 -433 -439 -630 479 499 -548 -657 -714 -715 500(rls) -503 -586 511 -530 6 -49 -50 -52 -60 -72 -91 -107 -119 -155 -212 -217 -231 -239 -268 -279 -310(rls) -317 -324 -337 -373 -400 -417 -423 -434 -443 -455 -485 -502 -539 -545 -653 -666
-134 -295 -412 -510
Chapitre E . Tableau des vers de conclusion Type
Sous -Type Direct + d’un vers
309
Laisses 3 -7 -12(+prov.) -13 -14(+prov.) -18 20 -25 -27 -28 -30 -31(+prov) -35 -38 -41 -43 -46 -54 -55(+jong.) -57 -61 -62 -64 -65 -66 -67 -73 -79 -81 -82 -84 -86 -87(+prov) -89 -90 -94 -95 -96 -106 -108 -110 -111 -112 -113 -114 -117 -122 -124 -125 -126 -130 -131 -132 -133 -135 -138 -149 -165 -168 -169(+prov) -170(+prov) -175 -176 -181 -186 -188(+prov) -190 196 -198 -199 -202 -205 -207 -211 -213 -214 -215 -218 -219 -220 -221 -223 -229 -234 -235 -237 -241 -254 -255 -256 -257 -258 -262 -263 -264 -266 -269 -271 -275 -278 -280 -281 -282 -283 -284 -288 -294 -295 -297 -307 -308 -311 -315 -316 -318 -319 -328 -329 -332 -335 -343 -344 -352 -353(+prov.) -354 -355 -357 -358 -366 -367 -370 -372 -376 -377(+prov) -381 382 -385 -387 -388 -394 -396 -397 -399 -401 -402 -403 -404 -406 -407 -408 -413 -415(+prov) -416 -418 -424 -425 -426 427 -431 -432 -436 -437 -440 -441 -442 -447 -449 -452 -454 -455 -458 -463 -464 -466 -467 -468 -469 -470 -471 -472 -475 -476 -477 -478 -481 -484 -487 -488 -489 -490 -491 -494 -495 -513 -515 -516 -518 -523 -524 -526 -532 -535 -541 -544 549 -552(rls) -555 -556 -557 -560 -561 -562 -563 -567 -569 -570 -572 -574 576 -577 -579 -580 -589 -591 -592 -593 -594 -596 -598 -599 -601 -603 -605 -606 -608 -610 -612 -614 -617 -620 -622 -628 -631 -632 -635 -640 -643 -652 -655 -656 -658 -660 -661 -662 -664 -665 -667 -669 -670 -671 -672 -673 -675 -676 -677 -678 -683 -684 -685 -686 -692 -695 -699 -703 -706(+prov.) -723 -725
310 Type
Sous -Type Rapporté / narrativisé
Prov. ou expr.
Interv. narr.
Interv. jongl.
Véz vous Or oiéz
Laisses 9(rire) -29 -74 -121 -143 -148 -152 -158 -163 -173 -174 -208 -225 -248 -270 -302 -303 -312 -361 -383 -505 -527 -540 -543 -559 -578 -590 -602 -604 -613 -616 -621 -639 -644 -649 -687(pleurs) -688 (pleurs) -689 ? -697 -704 -716 -717 12(+discours) -14(+prov.) -19 31(+discours) -39 -71 -87(+discours) -141 -169(+discours) -170(+discours) -178 -179(?) -188(+discours) -192 -210 -249 -250 -253 -261 -276 -286 -353(+discours.) -377(+discours) 415(+discours) -420 -421 -448 -638 -668 -679 -696 -702 -705 -706(+dicours) -707 -708 -711 -712 -713 -714 1 -2 -23 -157 -160 -245 -246 -251 -264 -267 -273 -277 -289(+pers) -293 -299 300(subj.) -320 -321 -325 -326 -327 -330 -331 -336 -347 -356 -369 -374(subj) 384 -390 -392(subj) -428 -459 -460 -462 -465(subj) -486 -492 -521(subj.) -525 528 -531 -536 -537 -542 -551(subj) -553 -571 -581 -582(subj) -583(subj) -584 588 -597 -607 -609(subj) -619(subj) -623 -624 -625 -627 -629 -642 -645(+expr.) -646(subj) -647 -648 -654(subj) -682 691(rls) -691 -698 -700 -701 -709(rls) 721 -722 161 -534 -565 -674 166 -600
Tableau récapitulatif des prologues laisse(s) 77
Situation début
127
centre
160
début
223
début
244
début
249
début
F
Evénement Citation Siège de Seigneurs or faictes paiz pour Dieu de Dinant paradis,/ si orréz du meilleur qui fu a mon devis ; /de la mort du vassal en valu France pis /car il ne scet qu’il pert qui pert ses bons amis. (v. 2014-77) Début Seigneurs, or escoutéz, que Dieu vous beguerre de nye,/ en ce temps ot respit de chascune Bretagne partie/ en Bretaigne la grant, une terre jolye. (v. 3429-31) Bataille de Seigneurs, ores escoutéz, franche gent Cocherel honnouree,/ une bonne chansson de bien enluminee./ Ains de plus veritable ne fu nulle rimee. (v. 4219-21) Bataille Seigneurs, or escoutéz, pour Dieu le droid’Alroy turier./ La bataille d’Alroy vous vouldray commaincer, / ou il advint ennuy et mortel emcombrer. (v. 5804-06) Paix entre Seigneurs, ores escoutéz, si orréz bonne les oppo- chansson./ Le riche roy de France, que sants l’on appelle Charlon,/ volu actorder de Bertaigne et cesser la tenson/ du conte de Monfort, .i. moult noble baron. (v. 6380-83) Début épi- Seigneurs, or escoutéz, franche gent honsode espa- nouree,/ et vous orréz chanson de magnol tiere prouvee / qu’il advint dedens le temps et la saison louhee / que cellui Bertrant regna qui tant ot renomee, / et comment il ala o grans gens assemblee / pour destruyre paiens, la male gent dervee. (v. 6513-18)
311
312 laisse(s) 294
Situation début
Evénement Départ Grande Compagnie
328
début
357
début
Armée d’Henri à Burs Départ pour Lessebonne
391
début
Arrivée du Prince de Galles en Espagne
460
in
Siège de Toulecte
461
début
463
début
Siège de toulecte Libération de Bertrand
492
in
493
début
Paiement de la rançon Paiement de la rançon
Citation Seigneurs, ores escoutéz, chevaliers et barons / et je vous chanteray une bonne chansson, / de Bertrant du Guesclin vous feray mencïon, / de la Blanche Compaignie, touz furent compaignons. (v. 792024) Seigneurs, or entendéz, les petis et les grans. A Burs fu roy Henry o le conte Bertrant. (v. 8911-12) Seigneurs, or entendéz, pour Dieu de paradis./ A Sebile la grant estoit le roy Henry,/ et Bertrant du Guesclin qui bien fu son ami (v. 9808-10) Seigneurs, or escoutéz, franche gent honnouree. / Et je vous conteray d’une iere assemblee, / qui orgueilleuse fu et moult desmesuree ; / puis le temps Alixandre ne fu telle assemblee. (v. 10936-39) Seigneurs, or escoutéz, par la Virge honnouree./ Si orréz hystoire qui doit estre escoutee, / faicte de verité, sans bourde massonnee. (v. 13210-12) Seigneurs, or faictes paix, pour Dieu qui tout forma. (v. 13213) Seigneurs, or faictes paix, laissé la noise ester/ et vous orréz beaux motz, se vouléz escouter. (v. 13274-75) Seigneurs, il se dit voir, ainsi c’on vous dira./ Or commaince chançon, ou de beaux motz y a. (v. 14202-03) Seigneurs, or entendéz, que Dieu vous benye./ De Bertrant vous diray, ou tant ot baronnie,/ qui par Bertaigne va, une terre jolye. (v. 14204-06)
Chapitre F . Tableau récapitulatif des prologues laisse(s) 526
Situation début
645
in
646
début
681
in
718
début
719
début
723
début
313
Evénement Citation Retour en Seigneurs, or faictes paix pour Dieu de Espagne paradis,/ une vraye hystoire rimee de beaux diz,/ de Bretrant du Guesclin qui tant fu seignoris. (v. 15112-14) Prise de Or commaince chanson de grant noSaintebleté,/ de prises, de chasteaux et de Sevère maint cité,/ de batailles, d’estours en plains champs arresté./ Tout d’armes et d’amours vous auray recordé./ Et de Sainte Severe vous auray devisé,/ le plus joly assault c’onques fu ordonné,/ la prise de Poictiers et du chatel senné./ Tout quant que avéz oÿ ne vault un ail pelé/ envers ce que diray qui m’ara escouté. (v.19153-61) Prise de Or escoutéz, seigneurs, pour Dieu de paSainteradis./ Istoire vous diray qui est de noble Sevère pris. (v. 19162-63) Prise de La Or escoutéz, pour Dieu le roy amant,/ Rochelle comment de la Rochelle les bourjois soufisant/ sagement, soutilement s’alerent acordent/ a François devenir en ce temps dont je chant. 20305 Ainsi ne irent pas comme it le meschant. (v. 20301-05) Bataille de Seigneurs, oiéz, pour Dieu, dont François Nyort s’aviserent. (v. 21461) Départ Seigneurs, or escoutéz, pour Dieu le ilz pour le Marie. (v. 21490) Perregort Mort de Oiéz, seigneurs, pour Dieu qui soufry Bertrand passïon./ Se de Bertrant disoie sa grant regnacïon, / touz les faiz ou il fu par sa poccessïon,/ et nommer les chasteaux et les villes de nom/ que ja conquist Bertrant, ce seroit ravison. (v. 21594-98)
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332
Table des matières
I
Description des témoins de la chanson
1 Le manuscrit A d’Aix-en-Provence 1.1 Description matérielle . . . . . . 1.2 Contenu . . . . . . . . . . . . . 1.3 Images du manuscrit . . . . . . . 1.4 Remarques . . . . . . . . . . . . 1.5 Composition particulière . . . . . 1.6 Anciens possesseurs . . . . . . . 1.7 Étude des iligranes . . . . . . . 2 Description des autres témoins 2.1 Le manuscrit Br de Berlin . . 2.1.1 Description matérielle 2.1.2 Contenu . . . . . . . 2.1.3 Remarques . . . . . . 2.2 Le manuscrit L de Londres . 2.2.1 Description matérielle 2.2.2 Histoire . . . . . . . 2.2.3 Images du manuscrit . 2.2.4 Remarques . . . . . . 2.3 Le manuscrit Mn du Mans . . 2.3.1 Description matérielle 2.3.2 Contenu . . . . . . . 2.3.3 Images du manuscrit . 2.3.4 Remarques . . . . . .
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9 9 12 13 16 16 17 20
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23 23 23 24 24 25 25 26 27 27 28 28 30 30 30
2.4
2.5
2.6
2.7
2.8
2.3.5 Partie médiévale . . . . . . . . . . . . . 2.3.6 Marques du XVIe/XVIIe siècle . . . . . Les manuscrits Mp et Pn de Montpellier et Paris 2.4.1 Description matérielle . . . . . . . . . . 2.4.2 Contenu . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.4.3 Anciens possesseurs du manuscrit Pn . . Le manuscrit Nh de New Haven . . . . . . . . . 2.5.1 Description matérielle . . . . . . . . . . 2.5.2 Contenu . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.5.3 Remarques . . . . . . . . . . . . . . . . 2.5.4 Anciens possesseurs . . . . . . . . . . . 2.5.5 Images du manuscrit . . . . . . . . . . . Le manuscrit Nd de Notre Dame . . . . . . . . 2.6.1 Description matérielle . . . . . . . . . . 2.6.2 Contenu . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.6.3 Images du manuscrit . . . . . . . . . . . 2.6.4 Remarques . . . . . . . . . . . . . . . . Le manuscrit P de Paris . . . . . . . . . . . . . 2.7.1 Description matérielle . . . . . . . . . . 2.7.2 Contenu . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.7.3 Remarques . . . . . . . . . . . . . . . . 2.7.4 Images du manuscrit . . . . . . . . . . . Le manuscrit Pa de Paris . . . . . . . . . . . . 2.8.1 Contenu . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.8.2 Remarques . . . . . . . . . . . . . . . . 2.8.3 Images du manuscrit . . . . . . . . . . .
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3 Principes d’édition 3.1 Choix du manuscrit de base . . . . . . . . . . . . . . . . 3.1.1 Editions réalisées . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.1.2 Choix du manuscrit A . . . . . . . . . . . . . . . 3.2 Etablissement du texte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.2.1 Principes généraux . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.2.2 Règles de transcription adoptées . . . . . . . . . 3.2.3 Présentation générale . . . . . . . . . . . . . . . 3.3 Toilette du texte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.3.1 Résolutions des diicultés graphiques du manuscrit 3.3.2 Résolution des abréviations . . . . . . . . . . . . 334
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30 32 33 34 36 37 40 40 42 42 42 43 45 45 45 46 46 48 48 50 51 51 52 56 57 59
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61 61 61 61 63 63 63 64 65 65 66
3.4
II
3.3.3 Transcription des poèmes . . . . . . . . . . . . . . . . . 68 Une édition LATEX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
Etude de la langue du manuscrit A
71
1 Phonétique et graphie 1.1 Traits de l’Ouest . . . . . . . . . . . . . . 1.1.1 -Ariu et -Aria . . . . . . . . . . . 1.1.2 Voyelles . . . . . . . . . . . . . . 1.1.3 Voyelles nasales . . . . . . . . . . 1.1.4 Consonnes . . . . . . . . . . . . . 1.1.5 Graphies . . . . . . . . . . . . . . 1.1.6 Evolutions phonétiques particulières 1.1.7 Localisation du manuscrit . . . . . 1.2 Autres traits phonétiques dialectaux . . . . 1.2.1 Emploi des féminins picards . . . . 1.3 Traits phonétiques du moyen français . . . 1.3.1 Hiatus . . . . . . . . . . . . . . . 1.4 Consonnes . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.4.1 Métathèse du -r . . . . . . . . . . 1.4.2 R inorganique . . . . . . . . . . . 1.5 Systèmes graphiques particuliers . . . . . . 1.5.1 ou/au . . . . . . . . . . . . . . . 1.5.2 H . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.5.3 NG . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.5.4 Alternance de consonnes . . . . . 1.5.5 Double consonne . . . . . . . . . 1.5.6 Graphies latinisantes . . . . . . . . 1.5.7 Consonnes superfétatives . . . . .
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75 75 75 76 81 82 84 85 87 88 88 89 89 97 97 97 98 98 98 100 100 104 104 105
2 Le système morphologique du manuscrit 2.1 Morphologie dialectale . . . . . . . . . 2.1.1 Possessifs . . . . . . . . . . . 2.1.2 Démonstratifs . . . . . . . . . 2.1.3 Pronoms personnels . . . . . . 2.2 Morphologie du moyen français . . . . 2.2.1 La déclinaison des masculins .
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107 107 107 108 109 114 114
335
A . . . . . . . . . . . .
2.3
2.2.2 Les adjectifs épicènes . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.3 L’article déini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.4 Les possessifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.5 Les démonstratifs . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.6 Particularités morphologiques des pronoms sujets . Le système verbal du manuscrit A . . . . . . . . . . . . . 2.3.1 Inluences poitevines . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.2 Radicaux palatalisés . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.3 Evolution des désinences . . . . . . . . . . . . . 2.3.4 Désinences et chute des consonnes inales . . . . 2.3.5 Passé simple : renouvellement de formes anciennes 2.3.6 Futur de l’indicatif . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.7 Tableaux des formes verbales . . . . . . . . . . .
3 Syntaxe du manuscrit A 3.1 Syntaxe du groupe nominal . . . . 3.1.1 Cas régime absolu . . . . . 3.1.2 Pronoms personnels . . . . 3.2 Conjonctions et adverbes de phrase 3.2.1 Si . . . . . . . . . . . . . 3.2.2 Car . . . . . . . . . . . . . 3.2.3 Mais . . . . . . . . . . . . 3.2.4 Que causal . . . . . . . . . 3.2.5 Que temporel . . . . . . . 3.2.6 Quant causal . . . . . . . 3.3 Syntaxe de la zone verbale . . . . . 3.3.1 Double objet . . . . . . . . 3.3.2 Auxiliaire . . . . . . . . . . 3.3.3 Valeur, temps et mode . . 3.3.4 Accords verbeaux . . . . . 3.3.5 Faire, Avoir et Estre . . . . 3.4 Anacoluthes . . . . . . . . . . . .
III
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Analyse littéraire : De Glay Aquin à Guesclin
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116 116 118 119 124 124 124 127 127 128 129 130 133
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149 . 149 . 149 . 150 . 151 . 151 . 151 . 152 . 152 . 152 . 153 . 153 . 153 . 153 . 154 . 155 . 155 . 157
161
1 Bertrand et la Guerre de Cent Ans 167 1.1 La Guerre de Cent Ans : repères historiques . . . . . . . . . . . . 168 336
1.2 1.3 1.4 1.5 1.6
Le conlit breton, premiers faits d’armes de Bertrand . . . . . . Tribulations en Espagne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le connétable à la reconquête du territoire français (1370-1380) Derniers combats et mort du connétable (1379-1380) . . . . . Bertrand en nature, Bertrand en peinture . . . . . . . . . . . .
2 Les clés médiévales de la renommée 2.1 Une renommée entretenue du vivant . . . . . . . 2.1.1 Bertrand et ses scribes . . . . . . . . . . 2.1.2 Eustache Deschamps et le milieu orléanais 2.2 La question Cuvelier . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.1 Sur la piste de Jaques . . . . . . . . . . . 2.2.2 Alias Cuvelier . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.3 Dans le giron des frères . . . . . . . . . .
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3 Un homme, des styles 3.1 Du guesclin, objet lyrique . . . . . . . . . . . . . . 3.1.1 Eustache Deschamps, chantre du connétable 3.1.2 Textes Anonymes . . . . . . . . . . . . . . 3.2 Du Guesclin, objet épique . . . . . . . . . . . . . . 3.2.1 L’organisation de la laisse . . . . . . . . . . 3.2.2 Enchaînements et reprises de laisses . . . . .
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169 173 178 179 181
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185 . 185 . 185 . 187 . 189 . 190 . 194 . 196
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199 . 199 . 199 . 205 . 211 . 212 . 230
4 Le cycle de Bertrand du Guesclin : l’unité en question 4.1 De la chanson au cycle . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1.1 Un projet aiché : le prologue . . . . . . . . . . 4.1.2 Le découpage en unités . . . . . . . . . . . . . 4.1.3 La narration cyclique des événements . . . . . . 4.1.4 La construction d’un manuscrit cyclique . . . . 4.2 Le manuscrit A, un cycle ? . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.1 A la recherche du lyrisme perdu . . . . . . . . . 4.2.2 Le cycle Du Guesclin . . . . . . . . . . . . . .
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Annexes
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239 240 241 246 250 262 264 265 266
273
A Mentions du nom Cuvelier dans les archives 275 A.1 Archives départementales du Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . 275 337
A.1.1 Mention de Jean . . . . . . . . . . . . A.1.2 Mention de Jacques . . . . . . . . . . A.1.3 Mention de Gilles . . . . . . . . . . . A.2 Archive de la Collégiale de Saint-Pierre de Lille
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275 275 276 276
B Poèmes d’Eustache Deschamps Ballade 222 : Grant joie avint a la mainson de France . Chant royal 362 : S’Alixandre, le puissant roy paien . . Ballade 239 : Que nul ne doit mesdire des anciens . . . Ballade 206 : Estoc d’oneur et arbres de vaillance . . . Ballade 207 : Tuit li vaillant et prodoms de jadis . . . . Rondeaux 652 : Tuit chevallier qui aléz par le monde . . Lai 313 : Le lay du tres bon connestable B. du Guesclin Ballade 1125 : Je veuil cesser mon livre de mémoire . .
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279 279 280 281 283 283 284 285 294
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297 . 297 . 298 . 298 . 300
C Textes anonymes à la suite de la Chanson Ballade A : Bien doit plourer chevalerie . . . . Ballade B : L’escu d’argent a un aigle de sable Pastourelle C : En l’en de l’Incarnacion . . . . Ballade D : Plouréz princes, ducs et barons . .
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D Tableau des vers d’introduction
303
E Tableau des vers de conclusion
307
F Tableau récapitulatif des prologues
311
Bibliographie
315
338
Delphine Demelas
Sur un air épique, sur un air lyrique : célébrer le bon connétable Edition critique et commentaires du manuscrit 428/(306) de la bibliothèque municipale d’Aix-en-Provence contenant La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier suivie de pièces lyriques. Volume II : Textes
Thèse présentée en vue de l’obtention du titre de Docteur Université d’Aix-Marseille 24 juin 2016
La Chanson de Bertrand du Guesclin
3
1 [1r]
Seigneurs, or escoutéz, pour Dieu le roy divin. Que nostre sire Dieu qui de l’eaue it vin le jour qu’il fu aux nopces de saint Archedeclin vous veille touz garder et donner bonne in. Ores me veilléz oÿr chevaliers et meschin bourjoises et bourjois, prestres, clers, jacobin, et je vous chanteray commencement et in de la vie vaillant Bertrand du Guesclin, connoistable de France, le vaillant pelerin qui tant fu redoubté jusques a l’ayve du Rin,* en France, en Auvergne et dedens Limosin. Oncques depuis le temps le roy Alixandrin ne puis le roy Artus ne le bon roy Pepin ne du temps Godefroy ne de Salehadin ne regna oncques tel pour maintenir hutin, que croniques en sont, ne doubtéz qu’adevin.
1 3 5 7 9 11 13 15
2 Seigneurs, ores faictes paiz et a moy entendéz. Vous qui vouléz raison et qui honneur gardéz ores vous traiéz vers moy ; je croy que vous orréz d’un livre souisant qui nouvel est riméz. Cellui qui le mist en rime fu Cuveliers nomméz ; et pour l’amour du prince qui de Dieu fu sauvéz, ain que on n’eüst pas les faiz oubliéz du vaillant prince qui tant fu redoubtéz, en a fait les beaux vers noblement ordonnéz.*
17 19 21 23 25
3 Seigneurs, cellui connoistable fu Bertrant appellé. Tant que fu june hons, c’est bien la verité, pouvre chevalier fu et pouvrement renté. Mais ainsois qu’il eüst touz ses liains passéz fu sire pocesseur de deux nobles contéz*, et en Espaigne fu duc et conte nommé. 5
27 29 31
6
- Enfances De Moulines fu duc, une noble duché, roy Henrry lui donna, se dit l’auctorité. Et le roy des Françoys lui donna terres assez : donna lui Longueville, Laguisart, se croiéz. Et tant fu ce Bertrand par Fortune monté que connoistable fu, du roy fu bien amé plus que on ne vous dirroit et tant fu redoubté que chacun se tenoit desconiz et maté aussi tost que en assault estoit son cry geté. Les ennemis du roy a moult vituperéz. Juïfs et Sarrazins et puis crestïennéz redoubtoient Bertrand en toute heritéz. En mains lieux disoit on que enfans nouveaux néz : « Taiséz vous ou ja le comparréz. Bertrand du Guesclin est deça arrivé. »
33 35 37 39 41 43 45
4 Tout au commamcement de mon bon romant vous diray la vennue du noble Bertrant. De Bretaigne fu né, ce savent les auquant, a six lieues de Resnes, une cité vaillant, de la Mothe de Bron ou il a chastel grant. Regnaut du Guesclin fu le pere a l’enfant, d’une moult gentise dame et de moult bel semblant. Mais l’enfant dont je dy et dont je voys parlant, je croy qu’il n’eut si lait de Resnes jusques a Disnant : camus estoit et noyr, maloustru et meschant.* Le pere et la mere si le haÿent tant que souvent en leurs cuers aloient desirant que fust mort ou noyé en une eaue courant ; garson, nisse et coquart l’aloient appellant. Tant estoit debouté a loy de meschant que conte n’en tenoient escuiers ne sergent. Mais on a bien veü en ce siecle apparant
47 49 51 53 55 57 59 61 63
32
u. noble cité duché, cité exponctué.
44
corr. d’après P : d. on on que e., on supprimé.
[1v]
- La converse que les plus deboutéz estoient les plus grant. Aussi en advint il, de ce n’aléz doubtant, car puis ot plus d’onneur, de ce soiéz creant, que oncques n’eu chevalier puis le temps de Rollant, car le roy qui regnoit pour le temps que je chant, le baysa maintefoiz come son loial amant, pour tant que pour s’amour s’aloit avanturant, sans redoubter la mort aloit tousjours devant. De la mort du vassal gentilz et conquerant seront et ont esté mains cuers tristes et dolant.
7
65 67 69 71 73
5
[2r]
Ainsi que dit vous ay devant en la chanson fu le enfant gentilz qui tant ot de renon, appellé bien souvent et tenu a garson, jusques atant qu’il ot cincq ans ou environ. Advint a un hault jour, comme seroit l’Ascension,* que la mere Bertrant, dont j’ay fait mention, estoit en une chambre qui fu en sa maison. La estoient ses ilz, deléz lui environ. Nonpourquant, cellui Bertrant seoit sur un lizon* et estoit a par lui, n’avoit nul compaignon, les autres deux estoient en hault establisson. Non pourquant fust amé Bertrant, si le dit on, mais compte n’en tint on ne en plus que d’un mouton.* Ainsi que la disnoient en ceste mansion, une converse y vint, que sage tenoit on – la dame l’a mandee pour avoir garison d’aucune maladie ou d’aucune frisson – juise avoit esté en sa renacion. A la dame s’en vint a sa commandison, la dame l’a receu et l’appella par nom : « Bien veignéz vous, dit elle, a Dieu beneïsson. » La converse lui it moult belle aliction, puis prist a regarder entour lié environ et a veü Bertrant, le jeune valeton.* Lors s’adreça vers lui et lui dist a hault ton : « Enfant, cellui te benoye qui soufrit passion. »
75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99
8
- Enfances Et quant Bertrant la vit, si dreça le menton, une chiere lié it a guise de lïon, ierement respondy d’une aulte raison.*
101
6 Quant la converse vit Bertrant qui hault parla, et en lié responnant les yeulx lié esleva, elle parceu sa chiere et ses mains, regarda la maniere de lui et trés bien l’avisa, et la phizonomie moult bien considera.* Je ne say qu’elle y vit ne qu’elle en devisa, mais tout ce qu’elle en dit et qu’elle en proposa advint depuis ce dy et depuis ce fait là. Suyvent devers la mere qui a table disna, a ses deux autres freres un pou se delita, « Dame, dist la converse, ne me celéz ja. N’est mis vostre ilz cellui enfant par dela ? – Si est, se dist la dame, le mien corps le porta, mais onques vrayment mout ne l’ama car ja plus ennuyeux de lui ne naistra, Rudes, malgracieux jamais plus ne sera. Il bat, il iert, il rue les enfans de deça. Nul ne veult deporter ja si grant ne sera, que quant on lui dit riens, en l’eure le ferra. Et est nisse et lourt, sen ne maniere n’a, pleust a Dieu que fust mort, desiré l’ay pieça. » Et Bertrant qui l’oÿt sur ses piéz se esleva : « Dame, vous avéz tort, Bertrant respondu a, qui souhaitéz ma mort ; encore m’en souviendra. La volunté de Dieu acomplie en sera. mais quant je seray grant et le temps enterra je auray tel cheval que chier vous coustera. Se je trouve du vostre, bien paié en sera, encores grant honneur de par moy vous viendra et a touz mes amis, touz quant qu’il en y a. » Et la dame respont : « Je croy qu’il se esmeut ja. »
103 105 107 109 111 113 115 117 119 121 123 125 127 129 131 133
119
Trois lettres illisibles sont cancellées entre il et rue.
[2v]
- La converse -
9
7
[3r]
La converse s’en vint a la dame briefment « Dame, dist elle, oiéz mon jugement. je vous jure sur Dieu et sur mon sacrement que cest enfant ycy, que la voy a present, que vous tenéz ainsi maleureusement, si sera tant heureux et de tel hardement que oncques si grant honneur ne eurent touz ses parent, car je voy desur lui un tel avenement que je oblige mon corps, se je vi longuement : que on me face ardoir en un feu justement si cellui enfant ne vient a honneur grandement. Il n’aura son pareil en tout le irmament et le plus honnouré et prisé grandement* de touz ceulx du royaume de France vrayment. » « A quoy le savéz vous ? », dist la dame errament. Et celle lui a dit : « Je le sçay vraiment. Et s’il ne advient ainsi, je me oufre plainement que me facéz ardoir en feu vilainement. » Lors s’apaisa la dame a cestui parlement et depuis tint l’enfant plus honnourablement. Mais quant il eu huit ans ou .ix. entierement, une coustume prist, je vous diray comment. Il s’en aloit jouher aux champs dru et souvent, et assembloit d’enfans .xl. ou demy cent, et les faisoit partir comme en tornoiement : combatre les faisoit si fermement que l’un l’autre cheoir faisoient laidement. Et quant Bertrant voit devant lui a present verser ses compaignons bien doleureusement, il les aloit aider a lever eranment et puis si leur disoit : « Aléz legierement de cellui la vous vengéz bien et hardement. » La renforçoit l’estour et le tornoiement et Bertrant se boutoit en eux appertement, tout aussi comme le chien assault le loup o les dens, faisoit les grans verser et blecier bien forment.
135 137 139 141 143 145 147 149 151 153 155 157 159 161 163 165 167 169
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- Enfances Et on le reassailloit par un tel convenant qu’il avoit touz ses draps dessiréz et sanglant avoit le corps de lui et vous ay en convent quant sang de lui yssoit, n’en acontoit nyent, ains crioit « Guesclin. » a sa voix haultment, et faisoit la bataille durer si longuement que on ne savoit lequel avoit amandement. Et quant chacun avoit trés bien son paiement, la bataille faisoit par son commandement cesser, puis leur disoit a sa voix doulcement : « Avant mes compaignons, alons priveement boyre tretouz ensemble, bien et paisiblement. Je paieray pour vous, tant comme je auray argent. Cellui qui n’aura dequoy faire son paiement je demorray pour lui bien et courtoisement. Se a aucun je le preste et il ne le me rent, jamais ne l’ameray en trestout mon juvent. Tele houste me croit paié sera briesment*. Se a l’oustel je devoie prandre un henap d’argent ou aler vendre a Resnes une bonne jument, encores en ineroit monseigneur plus de cent. – Dieu, dient les enfans de leur droit sentement,* comment Bertrant sera de grant entendement. Dieu lui doint bonne in, a qui le mons apent, de venir a honneur a bon commaincement. »* 8
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Seigneurs, on dit souvent, raison le certiie, que on voit volunters quant poindre doit l’ortie que nouvellement point on le voit a l’oÿe.* Quant Bertrant revenoit de celle compaignie navré et dessiré, en faisant chiere lie, sa mere lui disoit, doulante et corroucie : « Certes, chetif garson, vous menéz layde vie. Mal semble que venéz de cy noble lignie. Vous vous faictes gaber, si en avons vilonnie. Regardéz comment il a sa vesture souillie.
- Prison Le visage sanglant a en mainte partie. Se en ce point revenéz encores un autre ie, vous en repentiréz touz les jours de vostre vie. Ne vous souvent il donc pas de la convertie qui vous dist hault honneur, mais je ne le croy mie. Bertrant, ores vous gardéz, ou par sainte Marie, je vous courrouceray, ce vous jure et aie. » Mais Bertrant faisoit pis lendemain la moitie.
[3v]
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9 Si faitement Bertrant sa vie maintenoit. Quintaines it drecier et joustes y faisoit et donnoit un beau priz a cellui qui meulx joustoit. Et puis ses compaignons en tournois ordonnoit encontre les plus grans et si leur commandoit que on ne le deportast quant on assembleroit neenplus que le plus mendre qui ou champ soit.* Tant maintint ceste feste que a sa mere ennuyoit, dessiré et navré a l’oustel revenoit. Quant son pere Regnalt la vérité savoit, dont il estoit venu et qui ce lui faisoit, adont it commander bien fort y bien destroit que on ne laissast enfant ou païs la endroit qui suïst le sien ilz et cellui qui le suyvroit le pere une amande de cent sols paieroit. Lors furent les enfans si doulans et si quoy qu’il fuioient Bertrant quant il les aprochoit. Et quant Bertrant sceu que chacun le fuyoit, il venoit aux enfans et si les assailloit, a la luyte souvent tout mal gré eulx luytoit. Quant le pere oÿ chascun qui s’en plagnoit, celle qui le porta souvent en maudisoit. Et la mere souvent tendrement en pluroit et dist a son seigneur que ja n’en joÿroit si le sien ilz Bertrant en prison ne metoit. On le mist en prison la ou on lui donnoit 219
ne enplus q. (voir note)
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- Enfances a boyre et mangier et ce qui lui failloit. Bien quatre foiz y fut, mais bien pou s’en esmaioit. Et une chambriere a disner lui portoit, la prison lui ouvry la ou Bertrant estoit. La chambriere prist et les clefs lui ostoit et l’enferma dedens et puis se departoit. Mais Bertrant s’en fouy, tellement se mussoit que on ne le peut trouver par tout ou le querroit. A un matin s’en vint que point ne s’arrestoit et vint en my un champ que trés bien cognoissoit ; trouva un hanier qui la terre hannoit. Deux jumens de son pere le hanier menoit. Bertrant monta sur l’une et puis s’en departoit. Cellui se prist a crier entreulx qu’il s’en alloit, «A, Bertrant, dist il, vous faictes mal esploit. Or n’ozeroie aler ou vostre pere seroit, rendéz moy la jument ou nom de saint Benoit. » Et Bertrant se prinst a rire que pou y acomptoit.
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10 Bertrand du Guesclin s’en va de randonnee par dessus la jument qui estoit desferee. Quant son pere le sceut, si en eu la teste iree, bien voussist que neé fust en la mer sallee. Et Bertrant chevaucha qui n’acompta riens nee et a son oncle vint a Resnes l’onnouree. Icellui oncle avoit la soue ante epousee, une moult riche dame et d’avoir bien pensee. Quant son ante le vit, si fu moult tormentee et lui a dit : « Bertrant, vous avéz renommee telle que vostre mere est au cuer tormentee et vostre pere aussi, qu’i ait bonne duree. C’est grant folie a vous, par la virge honnouree. Une vie menéz si que toute desvee, mal ressembléz les gens dont vostre geste est nee. » « Dame, dist son mary, vous estez rassotee.
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q. lui faisoit failloit, faisoit exponctué.
[4r]
- Tournoi de Resnes Il convient et c’est droit, que jeunesse soit passee* car il fault, comment que soit, getee. Il est jeunes assez, par la virge honnouree, pour avoir assez sen et honneur aduree. Il ne fait a nul mal ne chose desreiglee. Nous avons de bon vin et de la char sallee dont il aura assez tant qu’il aura duree. » « Oncle, se dist Bertrant, a bonne destinee. » La demourra Bertrant ou païs une annee, tant que la paix son pere si lui fu acordee. Adont changea Bertrant en une autre pensee.
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11 Tout partout ou Bertrant en Bretaigne savoit ne joustes ne tournois et c’on s’i assembloit, sur la meilleur jument de son pere montoit et prenoit des joiaux là ou il en trouvoit. Quant il venoit au lieu, leement les menoit. S’il savoit un disner comme on le faisoit, Bertrant prenoit du vin y puis leur envoioit en l’oustel proprement ou escuiers savoit. Par Bertrant du Guesclin le vin on presentoit, chascun lui faisoit joye, chascun festoioit. Il n’avoit que .xiii. ans quant ainsi se menoit. Cognoistre se it bien et chascun l’onnouroit. Et demandoit souvent se jouster il porroit, et on lui responnoit que trop jeunes il estoit. Et quant a l’oustel de son pere venoit, l’estat et le maintien des seigneurs racontoit, les armes et les honneurs, tout lui ramentevoit et qu’il lui faisoit bon et que bel lui sembloit. Si honnourablement des seigneurs racontoit qu’il lui faisoit bon preu de ce que ainsi parloit.* Encores plus Bertrant, quant un pouvre veoit qui pour l’amour de Dieu l’aumosne demandoit, en l’eure incontinent sa robbe desvitoit
[4v]
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corr. d’après P : b. si s.
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- Enfances et puis aux pouvres gens doulcement les donnoit* ; c’est le fait par quoy son pere plus l’amoit et pensoit bien que ainsi a honneur il viendroit. 12
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Seigneurs, ainsi faisoit le bers gentilz. Les joustes, les tornois et ses charnelz amis visitoit tout adés comme preux et hardiz. A Resnes repayra o son ante de pris. Or avoit a ce temps, ce nous dit l’escript, une feste criee de joustes de hault pris, de nobles chevaliers et d’escuiers hardiz. Et Bertrant avoit bien .xvi. ans touz acompliz, il estoit grant et fort et si estoit bien fourny et desirans des armes de faire les desliz. Quant vint a la jornee que on ot lé ostéz priz, mains nobles chevaliers et escuiers de priz i sont a ceste foy pres de cent ou six vings.* La feste fu nommee un jour qui fu mardys. Bertrant estoit monté, pouvre fu son ronssin, nulz homs ne l’achatast quatre lorins petis ; au harnois de son pere l’avoit le enfant pris : il en estoit honteux et forment esbahy. Le mardy au matin tant qu’il fu mydy chevaucha par les ruhes Bertrant le gentis ; voit ces nobles bourjoises blanches comme lour de lis, bourjoises souisans et ces dames de pris que on menoit par ces ruhes par escuiers faitis. « Hé Dieu, ce dist Bertrant le noble pasteïz, jamais je ne seray amé ne cogneïs, ainçois seray des dames tousjours escondis car je sçay bien que je suis lait et mal faytiz. Mais puis que je suis lait, estre veil bien hardy et larges et courtoys, de donner bien apris ; hayraux et menestreus veil avoir revesty par quoy auctorisé je soie par leurs criz, car la grace d’onneur veil aquerre touz diz
[5r]
- Tournoi de Resnes -
15
car larges et courtoys acquiert de bons amis. » 13 Ainsi disoit Bertrant qui tant i a priser. Par la noble cité se it moult regracier. Ce qu’il fu malmonté le it moult despriser. L’un a l’autre disoit : « Filz est de chevalier et si va chevauchant le cheval d’un mosnier. » Et l’autre disoit : « Ce ressemble un bouher qu’il ne* seoit de veoir jouster ne tornoyer. Digne est d’estre queulx pour la souppe mangier. » Et l’autre disoit : « Veilléz vous ratoyser, car j’ay oÿ telle chose de lui retraiter, de toute courtoisie et d’onneur essaucer, que se le duc breton qui nous doit justicier cognoissoit cest enfant dont je vous oÿ parler, de Bertaigne sa terre le feroit pannetier, car on ne trouveroit meilleur aumosnier : il scet moult bien le sien donner ou emploier. Et si sera hardy et trés bon guerrier quant il aura dequoy sans avoir a dangier. Deléz lui ne lerroit nul homme pouvrier pour itant que bien voys qu’il ne scet esparigner car il n’a riens au sien, donne trop de legier. »
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14 Ensement disoit on de Bertrant le vassal, l’un en disoit bien et l’autre grant mal. Sur le marchié de Resnes voit dames a estal, bien vestues de soye, de targe, de cendal, et voit ces chevaliers bien armés de camail. « Hé Dieu, se dist Bertrant, que n’ay je bon cheval et que ne suys je armé a guise d’amiral. Par la foy que je doys a Dieu l’espiritual, je en feroie ains la nuyt verser encontre val ou blecier me feroie en la place roial,
[5v]
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corr. d’après P : i. ne soit d.
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- Enfances a touz les meulx monté iroie faire assal. Mon pere a grant tort, de moy se porte mal, il ne me maintient pas comme son ilz loial. Mais se vivre puis tant que le voye mortal*, je lui despendray trestout son herital ou je acquerray honneur ou grace general, plus que Rollant qui fu iné en Ronceval ne que ne it Gauvaign, Artus ne Perceval. Il me convient sousfrir pouvrement cy aval car a pouvre mercier convient petil estal. » 15
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Bertrant fu moult dolant y moult irascus quant voit les chevaliers arméz et fors vestuz pour la jouxte monté sur chevaux grenuz et tous bons escuiers de jouxtes pourveüz, et il voit qu’il estoit mal monté et tout nuz. « Hé Dieu, se dist Bertrant, vray pere de lassus, l’avoir enfouy est laidement perduz, et aussi est le sen, voyre, qui est repeuz. Mon pere est si riche y je suis de refuz que je ne puis avoir de lui quatre festuz. Pourquoy met il sur moy ensuyment ses arguz et si dit a chascun que je suys un bobuz ? Et je scens mon cuer d’onneur si esmeüz que se je avoie autant comme ot le roy Artuz, oncques si beau disner, se croy, ne fu veü que je feroie ennuyt des grans et des menuz ; icellui qui de Bretaigne est seigneur, prince et duc ne it oncques si bel par les sains de lessus. Or n’ay je point d’argent, je en seray de refuz, dont je suys moult forment en mon cuer tristes y meu. » Ensement dit Bertrant le preux et le menbruz ; oyt ces trompes sonner les joustes et les jeux, voit ces lances porter et ces doréz escuz : doulant est qu’il se voit si pouvre et si nuz.
- Tournoi de Resnes -
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[6r]
En plain marchié de Resnes fu grande l’assemblee, de trompes y de cors fu la noise montee. Joustent ces chevaliers de grande randonnee, et cellui bon escuier de Bertaigne la lee. De Bertons bertonnans fu grande la levee. Le sires du Guesclin tint la lance avalee, de ceulx de dedens fu c’est bien chose averee de joustes se preuva moult bien a la jornee : maintes lances le jour y fu par lui brisee et maintes testes aussi y ot deshëaumees.* Bertrant vint a l’oustel qui oÿ la huee. La ot un escuier qui i la retornee, jousté avoit le jour de maniere souee. Quant Bertrant le choisi, si lui it enclinee : « A, dist il, cousin, pour la vertuz louhee, je vous pri ou nom de la virge honnouree prestéz moy vostre harnoiz, si vous plaist et agree, pour trois lances courir, car j’ay ma pensee – et j’ay Dieu en convent et ma foy creantee – que la chose vous sera encores guesredonnee, mais ne l’oublieray tant comme j’auray duree. » Et dist l’escuier a la chiere menbree : « Certes, Bertrant, cousin, ne vous sera devéee et si vous armeray sans plus d’arrestee. » Et quant Bertrant l’oÿ, bien lui plaist et agree, ains ne fu si léz en jour de sa duree.
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17 Bertrant fu moult liéz quant cellui escouta. Adont ce i armer, car cellui bien lui aida. Et quant il fu armé, sur le cheval monta. Et quant il fu monté, son hëaume prins a et le mist en son chief ; la lance demanda, il la mist a son col, a Dieu se commanda. Il est venu aus jeux et les bailles passa. Quant il fut sur les jeux, d’autre part regarda :
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- Enfances il vit un chevalier qui jouxtes lui signa. Bertrant prinst a brocher et le cheval hurta, contre le chevalier moult ierement ala que droit en la visere le fer lui atacha : le hëaume tout jus de son chef lui ousta ; cheval et chevalier contre terre versa par telle maniere que le cheval creva.* Et le bon chevalier tellement se pasma que on disoit « il est mort » et chascun le cuida. Bertrant maintint son corps et puis se retorna, aval encontre terre la lance jus gicta. Heraux crient a lui « bon escuiers cy a », mais ne savoient pas comment on l’appella.
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18 Le chevalier qui fu a la terre versé fu moult hastement des autres relevé. Le chevalier fu moult prisé et honnouré du cop qu’il ot reçeu dont bien s’est deporté. « Dieu, dist le chevalier, a qui suis je assené ? Oncques ne fu si bien d’une lance atouché. Aléz a l’escuier et si lui demandéz comment il a nom et le lieu ou fu né. »* Un escuier revint qui y estoit alé, et dist l’escuier : « Sire, ja ne sauréz* qui est l’escuier s’il n’est deshëaumé ou de vous ou d’autruy et adont le verréz. » Et dist le chevalier : « Bien tost me remontéz. Jamais ne seray ayse, c’est ine verité, si saray je par qui ensement suys torné. Je ne sçay qu’il est ne de quelle parenté mais il est gentilz homs de bon sang engenrré. »
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19 Moult fu iere la jouste et y ot moult de gens. 460 469
corr. d’après P : b. d’un l. corr. d’après P : s. j’aray j.
[6v]
- -
[7r]
Touz les bons chevaliers tenent leur parlement de cellui qui jousté avoit si vaillemment ; ne savent qui il est ne son nom nullement. Bertrant a son droit tour se remist justement. Son pere fu la qui la feste desfent, car il fu defendant, avecques hardie gent, de Bertrant qui avoit abatu laidement le chevalier qui fu de son estorement ; avoit moult grant desir de faire assemblement.* Sa lance demanda, un escuier lui tent. Il broche le cheval qui n’aloit mie lent* et se mist sur les rens et Bertrant ensement contre son pere vint moult estonneement. Mais quant il avisa les armes clerement, sa lance gicta jus tost et appartement et revint a son tour moult gracieusement ; cuida* qu’il le ist pour espaontement.* Un autre chevalier s’avança plainement et Bertrant contre lui se mist hardiement, et de corps et de pis et de bon cuer leement s’en vint au chevalier et sa lance lui tent. Le hëaume lui mist l’acié par tel convent* que du chef lui ousta, voyres, si vaillemment que dessus lui le mist .xii. piéz largement. Et crioient hayraux a la voix clerement a cel aventureux venu nouvellement. Se Bertrant fu léz, ne demandéz comment,* n’en volist pas tenir tout son pesant d’argent. 20 Seigneurs, a ce jour fu la feste moult prisee* pour l’amour de Bertrant qui ainsi se esbanie. Trestout les chevaliers par leur droite estudie laisserent le jouster pour veoir sa maistrie tant que Bertrant eüst parfaitte par atie ;* quinze lances jousta dont mainte en fu brisie. Puis vint un chevalier qui fu de Normandie, qui jousta a Bertrant aussi que par envie
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- Guerre de Bretagne et le deshëauma voiant la baronnie. Et la fu recogneu de ceulx de sa lignie et des autres aussi, dont chascun le festie. Quant son pere le sceu, si en ot la chiere lie, venu est a Bertrant, hautement lui escrie : « Certes, beau ilz, dist il, je vous acertisie. Jamais ne vous feray si grand villonnie comme j’ay fait envers vous touz les jours de ma vie. Je vous donneray chevaux du tout a vostre baillie : de l’or et de l’argent ne vous en faudray mie pour aller tout partout pour acquerre vaillandie se ma terre en devoit long temps estre engagie puis que aujourduy m’avéz fait telle courtoisie. » 21
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Léz sont pour Bertrant ses proysmes et ses amis. La feste fort jousta, l’onneur en vint a lui : si faitement adonc ceste feste failli. O son pere s’en ala Bertrant quant se party, son parent l’escuier l’ama et conjoÿ, et si lui rendy bien la grace puis ce dy. Ainsi regna Bertrant comme vous avéz ouÿ. Les joustes, les tournois voluntiers poursuÿ, hayraux et menestriers ama et enrichy, dont le duc de Bertaigne la nouvelle en ouÿ. Car un duc y avoit au temps que je vous dy qui estoit bon Françoys et fu tant qu’il vesqui et le bon roy de France avoit tousjours servy, Philippe de Valloys, le noble roy hardy, qui adonc guerroioit contre son annemy Edouart d’Engleterre et les Angloys aussi et avoit pluseurs foys le roiaume assailly. 22
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Seigneurs, cellui Edouart qui France guerroya it moult de maulx en France pour le temps qu’il regna ; contre le roy Philippe l’onnour en chalenja,
[7v]
- Origines du conlit -
[8r]
la cité de Tournay environ asserra avec main haultz barons a qui il s’alÿa,* et les Flamens aussi qui avec lui mena, Hannuers, Braibençons, chascun si l’onnoura, Alemans et Guerloiz, de quoy le roy s’ayda. Et le roy contre lui a Bouvines ala a quatre cens milles hommes, que le roy assembla, le bon duc de Bertaigne avec lui ala. Ducs, contes, chevaliers, sachéz, lui envoia une vaillant contesse qui en Haynaut regna : abbasse estoit devenue et le monde laissa, a Fontenelles fu, l’abbaye qui est la. Seur fu au roy Philippe, Charles les engendra qui fu dit de Vallois, a ce que on me conta. Et pourtant ceste dame la paix moult desira de son frere le roy qui France gouverna et Edouart aussi, car cellui roy espousa la ille de la dame, en ses lans la porta : une moult vaillant dame et qui moult desira la paix de son seigneur et du roy de deça, l’un fu son seigneur et l’autre oncle appella. La dame de Haynaut tellement se pena que trieves furent prises que chascun acorda. Le roy revint en France, ses gens guerredonna, et le duc de Bretaigne forment remercia du secour qu’il lui i, quar quant il le manda prochain estoit du roy, pres de lui se loga. Adonc le gentilz duc en son païs reala, en Bertaigne revint ou chascun l’onnoura. Mais en l’autre an aprés itel mal l’apressa dequoy le gentilz duc du siecle trepassa.
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23 Seigneurs, aprés la mort de ce bon duc puissant chalengerent la terre de Bertaigne la grant deux hiers qui se disoient estre les mieulx parent : une dame y avoit qui l’aloit chalengent,
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- Guerre de Bretagne femme Charles de Bloiz c’on va saint appellant, le conte de Monfort vouloit aller devant.* Ou palais a Paris plaidoient, jusques atant que le quens de Monfort s’aloit forment doubtant qu’il n’eüst contre lui au procés deinant ; de Paris se parti a une aube apparent sans le congié du roy qui le cuer ot doulant. En Bertaigne s’en vint ierement chevauchant : les uns le recevoient en grant honneur faisant et les autres lui vont les grans portes clouant. Ceste matiere si vous voys ramentevant pour revenir au fait du noble Bertrant et dire les proesces de quoy le ber it tant, oncques autant n’en irent Olivier ne Rollant.
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24 Il est bien venté que le conte gentilz* s’en ala et i tant pour avoir le païs de Bertaigne, ou il fu et ou il volu estre servy du duc de Normendie qui y estoit commis de par le roy son pere qui tant fu hardy. Depuis qu’il fu arrieres ramené au païs retorna en Bertaigne, tant fu de grant empris* et garny de chasteaux, ne sçay ou .ix. ou .x.. Et passa oultre mer, si nous dit l’escript, aus Engloys s’alia et fu a eulx amis, pour la cité de Vannes ou il estoit haÿ et pour Resnes aussi ou il fu escondy. Adonc le roy englois qui tant fu seignoris, dist au duc de Lencloistre qui tant fu poestiz, que en Bertaigne venist avec ses amis. Le conte confortast et en faiz et en diz encontre les Bertons dont il estoit haÿ, contre le povoir de France aïde lui it, et le duc si lui jure les sains de paradis qu’il le conforteroit a son povoir tousdiz.
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q. le roy cuer o., roy cancellé.
[8v]
- Engagement de Bertrant Et sur ce point ce sont d’Engleterre partiz. Gens d’armes et archiers, du tout a son devist, en Bertaigne amena comme prince de pris. Cy commainça la guerre et le pesant estriz dont mains chevaliers furent afoléz et octis. Seigneurs, a ce temps dont icy vous devis fu le noble Bertrant regnant en ce païs, qui estoit en son cuer joieux et esbaudy de ce que les Angloys venoient ou pourpriz pour guerre demener qu’il desiroit touz diz.
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25 Seigneurs, en ce temps que Edouart assembla les os et les gens d’armes pour venir par deça, le conte de Monfort par my Bertaigne ala, les villes, les cités comme droit hoirs demanda. Le bon Charles de Bloyz d’autre lés chevaucha : l’une ville se rent, l’autre le laissa.* Ainsi ces deux seigneurs furent en ce temps la demandans le païs, chascun le convoita. Charles de par sa femme la terre chalenga, le conte de Monfort se vante qu’il l’aura. Mais le jeune Bertrant oÿ et escouta que duc Charles de Bloys plus grant droit y monstra ou païs de Bertaigne et pour ce commainça a querir compaignie a qui il s’alÿa pour nuyre les Engloys la ou il les saura. .lx. compaignons avec lui amena, par boys et par fourests nuyt et jour les guya et jura Jhesucrist, en qui il se fya, que duc Charles de Bloys de bon cuer servira et cellluy de Monfort a son povoir nuyra : ainsi de la partie des Françoys s’adreça. Adonc prist a courrir et adonc commainça a emprandre proesce qui toujours lui dura. De jour fu es forests et par nuyt chevaucha* et de nuyt et de jour planté d’Engloys greva.
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- Guerre de Bretagne Et a ses compaignons que avec lui mena a le sien departy et planté leur donna, a l’un donna armeures et l’autre bien monta ; quant argent lui failloit et petit d’argent a, en la chambre sa mere priveement entra, une huche rompi ou un escrin trouva ou les joyaux sa mere, sachéz, estoient la, et argent et or in que la dame garda ; Bertrant mist tout a in, a ses gens en donna. Et quant la dame sceu comment Bertrant ouvra, a guesmenter se prist, son argent regreta : « He Dieu, se dist, la malvait enfant cy a. La converse me dist ou temps quy passa que par Bertrant mon ilz grant honneur me viendra, mais vrayment petit comaincement cy a. Je ne sçay quelle in Jhesu y mectra » Dist une damoiselle : « Ne vous corrousséz ja. Bertrant a un bon change vostre argent mectra : avant le bout de l’an a moitie doublera. » 26
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L’istoire tesmoigne que Bertrant au corps gent prist les joiaux sa mere et or in et argent, a ses gens en donna assez et largement, et bien jure et aie que bien prochainement pour un tout seul denier lié en rendra cent. De ce ne menty mie : ores escoutéz comment Jhesucrist lui tramist un noble present.* Il advint que Bertrant a l’aduré talent chevauchoit lui .iie . sans plus mener de gent : menoit .i. compaignon grant et fort ensement, bien estoient armés a leur commandement. Et s’en aloit Bertrant es forests droitement pour ses gens visiter qu’il amoit loiaument. Bertrant s’estoit monté dessus une jument qui estoit grant et fort et couroit roydement. Une hache a son col portoit le bon Bertrant,
[9r]
- Adoubement merveilleux -
[9v]
son espee avoit au léz qui tranchoit roydement, et une grant taloche qui au cousté lui pent. Aprés Bertrant couroit son vallet vrayment. « Sire, dist le vallet, sachéz certainement : je ne iray mie a pié, se je puis, longuement. Se je n’ay un cheval ou mulet ou jument, de vous me partiray assez legierement. – Tay toy, ce dist Bertrant, je te jure loiaument je te monteray bien se je ne mur briesment. » Bertrant se retorna a destre justement et vit un chevalier armé moult noblement, monté sur un destrier quy valloit grant argent. Si avoit lance et escu dont l’ouvrage resplent, le bacinet ou chief ou le camail se prent, de toutes pieces fu armé a son talent ; o lui un escuier de noble estorement, bien armé et monté a son commandement et un vallet de malle bien troussé a talent.* Ainsi furent ceulx .iii. en leur assemblement, et vouloient aller, ou l’istoire ment, tout droit a Forgeray, le chastel qui resplent, la ou d’Angloiz avoit .iiiixx . et un cent. Et quant le bers Bertrant apparceu clerement l’estat du chevalier et le contenement, bien voit qu’il est engloys a son armement. Adont lui dist Bertrant moult estonneement : « Sire qui estez vous, ne me celéz noient : vous me sembléz englois a vostre ordonnement. Estez vous donc venuz en cestuy tenement Charles de Bloys grever, mon seigneur reverent ? » Et lui dist l’engloys : « Par le mien serement et pour ce que seigneurs l’as nommé tellement, a mort te mectray assez prochainement. » Lors avala la lance qui trancha soveement, envers Bertrant s’en vint courant moult rudement. Bertrant leva la hache a cellui approchement, sur la lance feri au gré de sapient : en deux tronsons la mist, ne lui mesit neent.
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- Guerre de Bretagne Puis rehaussa la hache qui trenchoit soveement et iert le chevalier si esforceement dessus le bacinet qui reluit et resplent. Et du corps et de brasz le feri tellement et tant fu grant le cop et pesant durement que a terre l’abbaty sur l’erbe verdoyant ; la ne se relevast pour or ne pour argent. Et quant Bertrant le voit, de sa jument descent, envers le chevalier sa droite voye prent.
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27 Bertrant est descendu, ne volu pas detrier pour occir et tuer cellui angloys chevalier. Au devant de Bertrant s’en vint son escuier : « A, Villain, dist il, vous le comparréz chier. Encontre vous vouldray mon bon seigneur revenger. » Adonc sacqua l’espee qui fu de bon acier, bien en cuida Bertrant tout le corps trespercier : mais Bertrant si ala sa hache desglicier* tellement qu’il lui va le destre braf tranchier, a l’autre cop fery la teste du destrier, a la terre abaty le maistre et le courcier. La volu a l’escuier la teste jus trenchier et puis s’en vint au maistre qui gesoit sur l’erbier : tant estoit estourdy ne se peu redrecier. Bertrant lui soubleva les riches pens d’acier, dedens le corps lui mist son espee de legier ; ainsi mist il a mort le maistre et l’escuier. Son vallet se combat de cuer et entier au vallet qui avoit a conduyre le sommier. Quant son maistre vit mort, le sommier va brochier par dedens la forest ; la se va dedens embuscher. Et quant Bertrant le vit de ce champ esloigner, sur le destrier monta qui fu au chevalier, aprés le sommier court aussi tost que levrier. La atint le vallet de jouste un olivier.
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corr. d’après P : B. si haussa sa h.
[10r]
- Adoubement merveilleux Bertrant de sa grant hache lui va un tel cop paier le chief lui pourfendy et tout le hannepier, a terre l’abbaty, ce fu sans redrecier. Envers le champ revint ou fu le chevalier, son vallet retrouva Bertrant o le corps chier qui se penoit moult fort des deux corps depoiller et de trouver aussi l’argent fort et l’or mier. Et quant Bertrant le vit, si lui prist a crier : « Hommes d’armes seréz, amis, par saint Richier : je vous retiens des miens, vous seréz chevalier. »
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28 Or fu le chevalier ainsi a la mort mis, l’escuier et le vallet et le sommier comquis qui tant portoit d’argent et de in or massis que ne le vous diroit nul homme qui soit vif, car toute la inance du chevalier de pris menoit avecques lui, si comme dit l’escript. A garent le vouloit mener, se m’est advis, par dedens Forgeray, un chastel bien assis, mais Bertrant du Guesclin si en est revestiz, les mors ont denué et les armeures prins. A loy de chevalier s’adouba le marchiz, chaussa les esperons qui sont d’or in macis et toutes les armeures du chevalier faytis vest le bers Bertrant, que delay n’y fu mis ; la croiz vermeille ousta comme François gentilz et mist la blanche ou nom de lour de lis, et son vallet aussi s’arma a son devis. Envers Guesclin s’en vont, au chemin se sont mis,* si enmenent la jument et nous dit l’escript que Bertrant la remist ou lieu ou il la prist. Et tant ala Bertrant et son vallet Orriz que sa mere trouva par dedens son pourpriz. Du cheval descendy et a genoilz se mist,
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corr. d’après P : b. qui d. corr. d’après P : n. de four de l.
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- Guerre de Bretagne et dist : « Cellui Dame Dieu qui maint en paradis, veille garder ma dame de mal et de peril et si lui doint vouloir, conscience et advis de me pardonner ce que envers elle ay mespris. Je emportay l’autre jour voz bons joiaux de priz : ores les vous rendray, se Dieu plaist et se je vif. – Bertrant, ce dist la dame, vous estez moult joliz. Estez vous chevalier devenu puis mardy ? – Nenny, se dist Bertrant. Mais ains l’an acomply, chevalier deviendray, je y ay mon entente mis, car qui hante les bons a honneur vient touz diz et qui les chetifz suyt tantost si est chetifs. » 29
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Ne sçay que vous diroie : la chose tant ala que Bertrant le gentilz a sa mere donna pour .i. denier vingt sols a ce qu’il emprunta. Toute son adventure lui dist et racorda et la prie pour Dieu ne le maudie ja ainçoys prie pour lui : de la se partira et par devers ses gens dedens les fourest ira et leur donrra le sien et les enrichira. « Hé Dieu, se dist la dame, comme fait Bertrant cy a ; bien me dist la converse que a trés grant bien viendra. Que benoiste soit l’eure que mon corps le porta. » Deux jours avec sa mere Bertrant se reposa et au tiers se departy, a Dieu la commanda, les esperons d’orz a garder lui bailla et mains autres joiaux, dequoy on se tayra. Quant vint au departir, sa mere le baysa. Atant se departy et Bertrant s’en ala. Dedens est ou boys entré la ou ses gens laissa, il scet bien le logers ou il les trouvera. Quant il les ot trouvé, chascun le festïa et Bertrant le gentilz beaux dons si leur donna et de ses adventures assez leur recorda, du noble chevalier leur dist et divisa.
[11r]
- Prise de Forgeray Ainsi fu longuement Bertrant o ses gens la et tant que dire oÿ et que on lui recorda qu’il avoit un chastel moult fort pres de la, en Bertaigne galot roy Artus le fonda :* Forgeray ot nom, ainsi on l’appella. Le conte de Monfort y mist et ordonna .i. chevalier angloiz qui grant renon ot ja, cappitaine le it de ce chastel la : Robert Branborc ot nom qui forment desira a essaucer le conte car durement l’ama, et si lui i serement et bien lui fïança que, s’il puet exploitter, Charles lui rendra.
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[11v]
Car dedens Forgeray avoit d’Englois plenté et des gens au conte de Monfort la conté.* Robert de Branborc en fu cappitaine redoubté. Et Bertrant du Guesclin avoit grant volunté de essaucier nuyt et jour et maint et vespré le nom Charles de Bloiz, ou moult ot d’onnesté. Lors en jura Bertrant la sainte trinité que du chastel avoir il se vouldra penner. Le chasteau que je dy ot le boys d’un cousté pour happer les Engloys quant de la sont sevré* tant que un vallet lui dist dedens le boys ramé : « Sire, vouléz oïr la pure verité de ceulx de Forgeray qui ce sont tous arméz : vers l’ost Charles de Bloy se sont acheminéz. Robert Branborc y vit richement adoubbé,* armé de toutes armes et richement monté. Le chastel ont laissé, je l’ay bien avisé, bien sçay que ou chastel n’a point demeuré planté de gens pour garder si noble fermecté. » Et quant Bertrant l’oÿ, si a haultement parlé, dist a ses compaignons qui la sont aünéz : « A Dieu le veu, dist il, ne soions esfraé, le chasteaux est a nous et a nostre volunté. »
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« Seigneur, se dist Bertrant, entendéz ma raison. Nous sommes cy endroit .lx. compaignons fors et trés bien arméz, soions fers comme lyons et soions touz a paix sans nulle traÿson. Et n’y aura cellui de ceulx de nostre parson qui ne puisse bien chausser le doré esperon. Se croyre me vouléz, n’en aiéz souspeçon, touz riches vous feray a bien courte saison, touz serons chevaliers de la main de Charlon qui riche nous fera et donrra beau don. Mais je veil aujourduy conquerre une maison, ennuyt vouldray soupper en cellui maistre danjon, et si vous y donrray a soupper gras mouton. » Et ceulx ont respondu : « Comment l’aroit on ? – Comment, se dist Bertrant, pour quoy le demand’on ? Je n’en prendroie pas mains un tout seul bouton. »* 32
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« Seigneurs, se dist Bertrant, j’ay visé maintenant comment nous enterrons en ce chastel vaillant. Prenons de ceste busche dont en ce boys a tant et mectons sur noz couls, si covrant devant nous armëures toutes que l’on ne voye parcevant* que nous aions sur nous espee ne taillent. La busche porterons en faisant le samblent que pour ceulx du chasteau nous alons travaillant. Et quant ceulx du chastel nous iront parcevant, de la busche ont mestier, si viendront costoiant, encontre nous iront le pont jus avalant. A la porte irons, la viendrons deschargans et crieréz « Guesclin. », car je le vous commant, chascun son espee trayte a loy d’omme vaillent et nous lansons en eulx grant noyse demenant. Je octroie que on me aille a chevaulx detirant se le chastel n’avons ains le souleil couchant : je l’ay ainsi songié emmy en mon dormant. »
[12r]
- Prise de Forgeray -
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Et quant ilz l’ont ouÿ, si s’en vont soubzriant. 33 Tout ainsi comme Bertrant ot dicté sa pensee se sont ceulx accordé sans pointe d’arrestee. Lors a chascun mussié armeüre et espee, a loy de boquillon ont chargé leur ramee. Bien trente se sont mis tout a une assemblee et pluseurs se sont boutéz en la valee, en quatre pars ont fait et leurs choses acordé.* Bertrant devant portoit une grant espaulee, bien sembla bosquillon qui le vist la jornee ; pour venir au chastel faisoit grant engembee. Ceulx du chastel lassus ont gicté leur visee , la gueste qui la fu a sa trompe sonnee. Les compaignons de Bertrant ont oÿ la levee ; tel y ot qui voussist estre a la mer salee, mais ilz voient Bertrant qui sa voie a hastee : il sembloit c’on alast de fy sans demouree. Ja lui estoit advis en sa droite pensee qu’il sist ou chastel dedens la chambre paree et qu’il faisoit char roustir a la cheminee.
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34 Les compaignons Bertrant, ceulx de devant et de derrier* qui sur eulx vont portant la busche et le ramier, pour l’amour de Bertrant qu’ilz voyent approchier n’osoient retorner ne de lui esloigner. « Seigneurs, se dist Bertrant, veilléz vous travailler. Je vous donrray ennuyt ou chastel a mangier et vous donrray du vin du meilleur du celler. » Tel y ot qui disoit : « Dieu, veilléz nous aider. Je croy que on nous vouldra ce vin vendre bien chier. » La gueste qui cornoit les faisoit esmaier ; Bertrant prinst a chanter et a lui rehaitier.
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corr. d’après P : s. voix. h. corr. d’après P : m. de c.
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- Guerre de Bretagne Ceulx du chastel se vont ensemble conseillier : « Il nous convient, font il, celle busche ceans laisser* et ouvrir le chastel, nous en avons mestier. Ce sont les boquillons qui nous venent aider et leur femme aussi qui venent du moustier. Blanches vesteures ont, alons les desveroillier : ce ne sont mie gens qui sachent guerroier, grant folie seroit de nous en esmaier. » Adonc ont commandé vistement au porter la porte vait ouvrir et le pont abrisser ; lui .iiiie . y ala sans point de targier, la porte desferma, les chaynes vait abaisser. Atant véz vous Bertrant qui entra le premier, a la porte s’en vint la busche deschargier, droit encontre les gens voit la busche approcher* tant que l’on ne peust o les mains l’entree empescher, puis dist : « Filz a putain, vous l’achateréz chier. Le bain vous chauferay, ce sera pour vostre baignier, mais ce sera de sang que vous feray seigner. » Lors a traicte l’espee dont bon fu l’acier et feru le portier, ne se volu esparigner, a moitie lui fendy cervelle et haneppier, puis si cria « Guesclin. » a la loy de beruier. « Or avant mes amis, laisséz le charrier, getéz tout sur les champs, si me venéz aidier : il a ceans bon vin, il ne fault que savoir. »* Dient les compaignons : « C’est un droit varroquier. » Lors passerent le pont comme bon chevalier, la porte ont conquestee et poignent d’emchasser. Angloiz venent aval, n’y ot que couroussier, bien estoient un cent, que queulz que bouteiller. Qui veïst sur Bertrant venir et costïer et gecter grans chaillotz pour l’empirer. Bien se sont desfendu de traire et de lancer, dont Bertrant et les siens furent en grant dangier.
- Prise de Forgeray -
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35 Par dedens Forgeray fu grande l’envaÿe. Si vont crient « Guesclin ! » trestouz a une fye. La veïsséz Angloys plains de grant felonnie : a defense se sont mis faisant chiere enragie et crioient moult fort « Dieu de Bertaigne, aïe ! » Un escuier angloiz tenoit une coignie, un compaignon Bertrant en fery sur l’oÿe, tellement l’endormy sur la grande chaussie que oncques puis ne se leva pour chose que on lui dye. Lors vint Bertrant a lui qui ne se faigny mye, un estoc lui lansa d’une espee fourbie tant qu’il lui entama le pomon et le fye. Mort l’abbaty Bertrant, sa cunie a saisye, il ne la rendist pas pour tout l’or de Pavye. Il escrie « Guesclin, nostre jornee est gaignye. » Les Angloiz enchassa en une bergerie. La fu Bertrant encloux en chascune partie de queux, de boutiller et de penneterie,* de valletz de chevaux et d’autre maignye ; l’un tenoit un pal, l’autre une perche agusye ; de hastiers, de petaux ont mainte entortillie,* mais touz ses compaignons lui irent bonne aÿe. La fussent mal venuz et de corps et de vie quant devant le chastel vint une chevauchie qui vindrent au chastel pour la grant crierie. Et ceulx de la grant porte qui l’avoient gaytie* sont venuz devers eulx, chascun hault brait et crye : « Si vous estez françoys, si ne vous failléz mye. » Et ceulx ont dit : « Ouÿ, par la virge Marie. » Lors entrerent dedens que nul ne se detrie. Et quant Bertrant l’oÿ, si en ot la chere lye : en tel point fu trouvé contre adverse partie qu’il n’avoit armeüre qui ne soit deppecie,
[13r]
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de quel queux d., quel cancellé.
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corr. d’après P : m. estortillie.
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- Guerre de Bretagne par la bouche lui sault le sang qui l’avoglie, et il crioit « Guesclin. Mere Dieu, vostre aÿe. » Ceulx le cogneurent bien pour sa haulte lignie, l’un a l’autre dist : « Véz ça enragerie : oncques tel escuier ne fu ou monde en vie. » 36
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Quant ceulx virent Bertrant qui ainsi se desfendoit, l’un a l’autre dist : « Alons a lui tout droit : faulte seroit a nous se un tel vassal mouroit. » Bertrant fu en tel point que nul ne le diroit : sa cugnie ot perdue, de ses deux mains s’aydoit. .i. chevalier a lui vint qui bien le cognoissoit, la presse derompit et l’espee tenoit, un parc it entour lui et un si grant esploit* que a Bertrant venu est et hault lui escrioit : « Escuier, levéz ça et me suivéz tout droit. » Bertrant ot tant de sang que goute ne veoit, menéz fu a un lieu ou chascun le remyroit. Il ne vouloit sousfrir le bien que on lui faisoit.* Mais quant le secours vint qui la venuz estoit, touz ceulx du chastel y furent mort tout droit.* Le chastel fu comquis et quant qu’il y avoit a Bertrant fu rendu, car chascun si disoit que c’estoit le plus preux qui en ce monde soit et que le bien de lui ramenteüx seroit. Les portes ont fermees en le pont la endroit ; il ont mandé le vin et tant comme on bevoit on a dit a Branborc comment la chose aloit. Icelluy Robert Branbort au chastel repayroit, bien y cuida entrer, cappitaine en estoit. On vint dire a Bertrant que Branbrort retornoit, qui dedens le chastel moult bien entrer cuidoit. Adonc jura Bertrant que contre lui iroit : il monta a cheval, assez en y avoit. Lors yssirent noz gens a moult noble conroy contre Robert Branborc qui au chastel acouroit,
[13v]
- Siège de Resnes -
[14r]
mais les gens du duc Charles derreres le suyvoit. La morurent Engloys que pié n’en eschappoit. La nuyt a Forgeray noz gens se logeoit, la demoura Bertrant et ceulx qu’il amenoit. Au conte de Monfort forment en desplaisoit, de Bertrant du Guesclin durement se pleignoit. La ot un tel renon que chascun en parloit, jusques a Charles de Bloiz la nouvelle en aloit, et disoit a ses gens voluntiers le verroit, si le povoit tenir, grant bien il lui feroit. Mais nouvelle lui vint qui moult lui desplaisoit : c’est du duc de Lencloistre qui a rive se mectoit avec ceulx d’Engleterre que le roy lui livroit. Treves avoit en France jurees et de fait. Mais pour tant que Edouart d’Engleterre pensoit a guerroier le roy quant le terme seroit, it guerroier Bertaigne pour tant qu’il cuidoit ce conte de Monfort aider, fust tort ou droit, pour tant que le secours des Bertons desiroit.
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37 Quant Charles de Bloys sceu que le duc de renon fu venu deça la mer a force et a bandon, aus villes qu’il avoit it mectre garnison ; Le Tort Boyteux tramist a Resnes, ce dit on : de Pennehort aussi porta cellui le sournon. De soudoiers avoit avec lui grande foison, de la ville garder lui donna le bandon. Pour abregier le fait de nostre chanson, vous diray briesment et sans narracïon que le duc de Lencloistre, dont j’ay fait mencïon, a Resnes se logea et mist son paveillon. Avec lui ot Engloiz et mains Breton qui tenoient le conté en sa possession : Canoles y estoit, que Robert appelle on, celllui de Pennebrot, un conte de grant nom, et Jehan de Chando qui sceu d’onneur foyson,
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- Guerre de Bretagne et Jasme Dandelee, que on appelle Oron,* et mains bons chevalier que nomer ne savon. Et la jura le duc clerement a hault son que jamais la cité ne monsterroit talon* jusques atant qu’il auroit mis dedens son penon. 38
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Seigneurs, par devant Resnes qui est bonne cité, fu le duc de Lencloistre qui moult fut redoubté ; d’Engloys et de Bertons ot avec lui assez. La ville fu encloise environ de touz léz, mais Bertrant du Guesclin se fu es boys bouté : a temps n’y peu venir pour y estre entré,* dont Bertrant fu doulans, c’est pure verité, car il avoit leens de ses amis privéz. Non pour quant se tenoit dedens les boys raméz et venoit bien souvent aus loges et aus tréz et entour de l’ost espier de touz léz. Dont le duc demanda qui estoit cellui malféz qui les avoit ainsi bien souvent tribouléz. Un chevalier berton qui le cogneu assez lui dist : « Mon doulx seigneur, par Dieu de majesté, c’est un jeune vassau qui Bertrant est nommé : c’est de ceulx du Guesclin, une moult grant parenté,* n’a pas .xviii. ans que le sien corps fu né. Mais en plus de besoignes c’est ja aventuré que touz les chevaliers qui sont en ce regné : il a prins Forgeray qui estoit fort assez. Il estoit en un boys, gens avoit assembléz, touz pouvres escuiers et si les a montéz. Par un matin s’en vint, ainsi comme vous orréz, de busche a son col bien faisoit le chargié,* ainsi que boquillon les avoit atorné. Ceulx ouvrerent la porte pour estre bien chauféz ; mais Bertrant dont je vous di les a si enchantéz qu’ilz se deurent tenir touz pour exchaudéz ;* oncques n’en demoura pié qui ne fust tué.
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- Siège de Resnes Le chastel est a lui, sire en est appellé. » Dist le duc de Lencloistre : « S’il en porte les clefz, il a bien deservi. Qu’il lui soit sien quicté car oncques plus hardy fait ne me fu recordé. Je vouldroie qu’il fust bien ailleurs amassé tant que seroit de moy comquise la cité. »
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39 Quant le duc a oÿ de Bertrant la maniere, grandement le prisa et de moult belle chiere, assez le desira demourer en sa baniere. Donc commanda le duc a faire une minere car il avoit juré sur le corps de saint Pere, Jhesucrist et sa mere la virge trezoriere, qu’il ne s’en partiroit ne ne trayroit arriere si avroit mis son penon sur les creneaux de piere.* La mine commainça qui fu grant et plenere, tant que touz les jours y estoit la luniere. Et Bertrant du Guesclin estoit sur la costiere pour oÿr et veoir a la in qu’il s’i iere en tel lieu ou il peust bien monstrer sa maniere, ainsi que aprés midy a heure de prangiere apparceu un chevaucheur dessus une gaschiere. Bertrant bien le choysi en my une tourbere, la voye lui coppa tenant sa lance iere, et puis cria : « Guesclin. » d’une voix moult legiere. Cellui fu aussi prins que une brebiz portiere* quant celle voit le loux qui lié tient la gorgere.
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Bertrant si vint a lui et avala sa lance ja lui eüst lancé ou corps parmi la pence quant il lui dist : « Mercy, ne me faictes nuysance. » Adonc lui dist Bertrant sans nulle demourance : « Amis, que fait l’ost ny en quel demourance ? – Sire, dist le vallet, j’en diray la tenance. A la minere sont qui durement s’avance,
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- Guerre de Bretagne pour faire a la cité prochenement grevance. La cité vrayment est de perdre en balance. » Et quant Bertrant l’oÿ, lors n’y it arrestance : a un arbre s’en vint ou il ot mainte branche, le vallet y lya par tel acomtenance qu’il ne s’en fust party pour tout l’avoir de France. Puis chevaucha en l’ost o sa maingnie franche* ; boute le feu en l’ost et le mist en tel doubtance que chascun cuida bien morir a grant vitance. Bertrant crioit moult fort, du cheminer s’avance, bien cuidoient Engloys qu’il fust de leur aydance : quatre chevaliers prinst a celle decevrance et en prinst au dehors l’ost et foy et iance.* Et ceulx de l’ost s’estoient rengéz en ordonnance : ilz cudoient avoir entour eulx l’ost de France. 41
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Bertrant et touz les siens retornent sauvement, dedens un fourest se bouta fermement, – bien savoit les destrois environneement, mains jours avoit esté en ce destornement – par dedens un ravain se mist priveement. Et le duc de Lencloistre et toutes ses gens estoient devant Resnes rengéz hardiement. La vint le gait du jour en disant aultement : « Realéz vous en en voz tréz et en voz logement car riens n’y avons veu avironneement. » Dist le duc de Lencloistre : « Je croy, le mien escient, c’est Bertrant du Guesclin qui vient si faytement. Les deables le font tenir a ce parent : c’est ainsi que le loux qui hors du boys descent, il nous tient a brebiz, il nous monstre la dent. Je cuiday par ma foy que ce ist proprement le duc Charles de Bloys qui amenast sa gent. » Et véz vous .i. chevalier sans nul arrestement que Bertrant renvoia bien et hastivement ; 1139
et prinst au d., en suscrit.
- Siège de Resnes -
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il est venu au duc et luy dist clerement : « Noble duc, je vous di tout veritablement que Bertrant du Guesclin vous a fait ce present. Et vous renvoiera, ce dit, l’equippolent se vous ne lui donnéz respit tant seulement qu’il peust entrer en Resnes bien et paisiblement, ou vous gardéz de luy et tout vostre gent. » Dist le duc de Lencloistre : « Par le mien serement, ja treves ne donneray a .i. tel garniment. »
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42 Ensement fu le duc plain de grant marrisson, miner it la cité a force et a bandon : la furent les mineurs et Engloys et Bertons. Touz ceulx de la cité avoient souspeçon, ne seurent auquel lieu la mine faisoit on. La i le Tort Boyteux commander a hault ton que chascun pendist .i. bacin en sa maison. Ceulx qui pres des creneaux avoient mansion et par iceulx bassins entendirent le son la ou la mine estoit et par ce le sceut on. Adont irent miner tout droit a se couron la mine contre mine a force de bandon ; et furent cy d’acort en celle establisson que ceulx de la cité, par chemin de raison, trouverent les mineurs, si comme dit la chanson. La ot dedens la mine si grant octision que touz y furent mors a grant destruction. Et si fondy la mine, ne valu .i. bouton.
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43 Moult fu dolant le duc, en lui n’ot que aÿrer, quant il sceu que l’on eu fait touz ses mineurs tuer. Plus que devant aprés le grant siege a juré. Il y it assaillir et ses engins giter et it villainement ceulx dedens afamer 1191
corr. d’après P : Il lui it a.
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- Guerre de Bretagne dont ilz se commaincerent moult a espaonter car le duc les faisoit espier et garder si que nul n’en yssoit ny ne pouoit entrer. Et pour tant que le duc oÿ bien recorder qu’ilz avoient bien pou de char a lour disner, it bien .iiii. milles pors venir et assembler ; es préz prés de fousséz les it tretouz aller, pour tant qu’il cuida ceulx de dedens atrapper et pour faire yssir hors et a la mort livrer. Dont ceulx de la cité s’alerent adviser qu’ilz ystroient hors pour porceaux conquester ; mais le bon cappitaine leur dist : « Laisséz ester. Je auray de leurs porceaux sans riens de nous grever. » 44
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« Ha, dist le Tort Boyteux, le cappitaine vaillent. Seigneurs, tenéz vous quoy, les petiz et les grans. Je auray de leurs porceaux tost et incontinent tant qu’ilz en auront bien pou de demeurant. » Et on lui amena a la porte devant une truye que mandé avoit par avant. Les piéz lié it lier a une corde errant, la porte it ouvrir du tout a son commant et le pont avaler qui a une chayne pent. La truye it crier sur le pont en tyrant : lors commainça a brayre et ruyre en compleignant. Et quant touz les porceaux alerent escoutant la truye qui aloit honteusement brayent, oncques n’y eu porcel qui ne s’en venist courant a la porte tout droit, telle vie menant que l’on n’y oïst tonner le Pere tout puissant. Et quant les Angloiz ont veü le convenant, a la porte acoururent a force chevauchant. Et quant ilz les apparceurent qu’ilz furent approchant,* la porte ont fermee et le pont vont tirant, puis viennent aus crenaux haultement huant que touz les ont oÿ, chevaliers et sergent. Orez ne demandéz pas s’ilz furent bien doulant.
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- Siège de Resnes -
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Ainsi furent les pors par une truye prins ; le duc de Lencloistre en fu au cuer moult marry. Ores ont en de la char les grans et les petiz, mais vivre leur estoit vilainement faylli. Lors dist le Tors Boyteux a .i. homme de priz : « Seigneurs, prenons conseil et .i. certain advis qui seroit en point si bon et si hardy que nous peussons grever noz mortelz ennemis. Le duc et les Angloys nous ont longtemps assis : si ont le siege juré et ensemble promis qu’ilz ne s’en partiroit tant qu’ilz nous aient pris. Nous n’avons nul secour pour estre regreïs :* a Nantes est Charlon, le noble pasteïz. Bien savons qu’il a droit de garder ce païs, mais droit a bien mestier qu’il soit aidé tousdiz.* Ainçoys que nous rendons Resnes ne le païs, a lui nous fault mander comment nous sommes prins. Or ne sçay je comment aurons message quis. » Dont parla .i. bourgeoys courageux et hardy qui en la ville avoit troys illes et troys ilz ; n’avoient que mangier, le pain leur estoit failly. Le conseil appella, si qu’il fu bien ouÿ.
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46 « Seigneur, dist le bourjois, droit en l’ost me iray, au fort duc de Lencloistre de vous me plaindray* et que banny m’avéz et tollu ce que j’ay. Et leur diray comme jurer pourray, car du roy des Françoys je leur recorderay qu’il nous vient secourir, dont ilz auront esmay, et que secours nous vient ; bien dire leur saray le chemin et le lieu, tretout leur monstreray. Se je puis eschapper, a Nantes m’en iray et a Charles de Bloy vostre message feray. Penséz de mes enfans et je m’aventuray. Dieu volu morir pour moy et je pour lui morray,
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- Guerre de Bretagne ou je iray au secour au meulx que je pourray. » Dont eurent grant pitié et les clerz et les lays. Le cappitaine dist « Et la porte ouvreray. Sur les Angloiz irons pour faire aucun abay, et vous vous partiréz et je retourneray. Si prie celluy Dieu qui it la rose en may, qu’il vous laisse retorner et en convent vous ay que vous enfans auront de telz biens comme j’aray. » 47
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Ainsi fu le conseil comme je vous voys comptant. Le Tort Boyteux s’arma et o lui ses sergens. Quant ilz furent arméz, la porte vont ouvrant et puis s’en sont issus envers l’ost chevauchant. Quant furent yssuz hors, ainsi comme je vous chant, le bourjois s’en torna, a pié s’en vait courant, et les Anglois s’en vont ierement esmaient. La y ot un estour sur le pré verdoyant mais ceulx de la cité s’alerent reculent, en la cité entrerent, les portes vont fermant. Mais prins fu le bourjois et le vont arrestant,* et si leur dist : « Seigneur, ne m’aléz atouchant, ains me faictes parler au bon duc maintenant : nouvelles lui diray dont vous feray joyant. » Et ilz lui ont respondu : « Vous aléz bien parlant. » Les Anglois l’ont mené vers le duc a garent ; dedens son pavaillon le trouverent errant. Et le bourjois se va tantost agenoillant, oncques, se croy, nul homme ne it si le doulant. « A, sire, entendéz moy, pour Dieu le roy amant, a peine que ne voys mon corps desesperant. Ceulx de Resnes m’ont fait un meschief trop doulant : par eulx sont exilléz touz les petiz enfans ain que l’on ne voie leur estat appercevant ; sept enfans m’ont octis les gloutons mescreans qui sont touz mors de fain en prison languissant. Or m’en fuys cy a vous ma doleur compleignant : se venger m’en vouléz, je vous diray bien quant
[17r]
- Siège de Resnes demain devent venir .iiii. milles Alemant de vitailles chargés, oncques homme ne vit tant. Je le vous dy pour bien ; mectéz vous au devant, vous les encontreréz, je le vous acreant. Et viennent en .ii. lieux en vostre ost espiant. – Amis, ce dist le duc, je vous tiens a vaillent. » Adonc lui it donner de cuer baut et joyant a boyre et a manger de tout a son commant.
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Sage fu le bourjois et moult bien enparlé ; quant il ot bien beü, bourdes disoit assez. Le duc a ses conroiz rengéz et ordonnéz et dist a ses barons : « Envers moy entendéz : sur vespres nous en irons que le chaut sera passé. » Adonc furent touz prests, ainsi que oÿ avéz. Et quant le bourjois vit que l’ost fu assoté, hors de l’ost s’en yssi, qu’il ne fust avisé, a la voie se mist, a Dieu c’est commandé ; bien savoit les chemins, car du païs fu né. Et le duc a ses gens semons et assemblé et leur a dit : « Seigneurs, je suys asseüré que vous auréz l’assault se vous ne vous gardéz, car Charles de Bloy vient a .v. milles adoubé – de hardiz Alemans et ierement arméz – que le roy des François qui Jehan est nommé lui envoie de France dont il est couronné. Ennuyt chevaucherons bellement et souëf, et les courours seront devant pour savoir leurs secretz. »* Puis ont dit les coureurs : « Sire, bien dit avéz. » Tout ainsi qu’il fu dit fu le fait acordé.
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49 A bataille rengee, souëf et coiëment, issirent les Angloiz hors de l’ost leement ; pour les loges garder y demeura pou de gens. 1325
e. les so courours s., so cancellé.
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- Guerre de Bretagne Tout avoient chargié : pain, vin et froment et toutes garnisons dont ilz ont grandement, a la in, si le fait fust alé malvaisement,* qu’ilz se fussent partiz bien et hastivement, car ilz cuidoient bien et tout certainement que le secours venist a grant eforcement, car ceulx de la cité font grant esbatement et faisoient sonner la mains instrument. Et si avoient grans fain trestouz entierement : n’avoient que mangier, ny avoine ny froment, car les riches bourjois, dont il y ot forment, avoient touz leurs biens celéz couvertement ; celluy qui avoit a vivre le gardoit fermement si que homme ne le savoit en la ville neent. Or diray du bourjois qui s’en va leement. A un hostel s’en vint droit sur l’avesprement ou il ne trouva homme ne femme nullement ; illec se reposa jusques a l’ajornement. Mais quant partir se deu, je vous ay en convent, que Bertrant du Guesclin le trouva en present armé et adoubé entre luy et ses gens qui venoit espïer l’ost des engleschez gens. Quant il vit le bourjois, lui dist haultement : « Fausse espie, dist il, le corps Dieu vous acravent. La teste perdréz assez prochenement ou vous me diréz voir, par le mien serement. » Et le bourjois lui dist : « Beau sire, je me rent. » 50
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Quant le bourjois oÿ Bertrant ainsi parler, lors lui cria mercy, paour ot de iner. Adont lui dist Bertrant : « Qui vous fait cy hanter ? C’est pour moy espier et aux Angloiz livrer. – Sire, dist le bourjois, ne me veilléz celer comment est vostre nom, veilléz le moy compter. » Adont lui dist Bertrant : « Tantost le me orras compter* : Bertrant du Guesclin me fait on appeler.
- Siège de Resnes -
[18r]
– Sire, dist le bourjois, Dieu vous veille sauver. C’est a vous vrayment a qui il me convient parler : nouvelles vous diray sans point d’arrestier dont vous porréz honneur et avoir conquester. » Adont ala Bertrant tout dire et recorder, comment il a fait tout l’ost partir et scevrer et s’en vont sur les champs pour les François trouver. Si comme aloit la chose lui dist sans fausser : « A Dieu, se dist Bertrant, puisse tu vray compter. – Ouÿ, se dist cellui, se Dieu me pusse sauver, pour vostre amour avoir avec vous vouldray retourner. Et se je vous en mens, faictes moy decryer. » Et Bertrant lui a dit : « Autre chose ne veil demander. » Il a dit a ses gens : « Veilléz vous apprester et veilléz voz chevaux fermement ressangler, mectre voz bacinetz et voz pennons lever, les lances en vos poins et vous bien armer. Je vous feray a touz grant honneur conquester. Ja bien tost me verréz dedens Resnes entrer Et toute la vitaille que je porray trouver menerons avec nous pour noz gens conforter. » Et ceulx ont respondu : « Il est temps d’aler. »
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51 Bertrant ot bonne gent, courageuse et hardie, ce que Bertrant vouloit ne le refusent mie. Ilz brochent les chevaux tretouz par compaignie droit a souleil levant, aprés l’aube esclarsie, que la gent de l’ost fu aussi comme endormie et le gait repairoit, chascun a chiere lie ; et le duc qui avoit chevauchié la nuytie, et tenoit en un champ sa bataille rengie en atendant Françoys qui ce ne savent mie. Devant avoient mis coureurs et mainte espie qui ne trouvoient riens toute nuyt anuytie. Si n’oserent parler ne faire crierie, de quoy le duc disoit : « Est cecy moquerie.
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- Guerre de Bretagne Or avons nous nostre ost toute nuyt laissie : se Bertrant du Guesclin, a la chiere hardie, les venoit assaillir avec sa compaignie, on nous auroit jouhé d’une grant tromperie. » Je croy que sa parole en sera acomplie, car Bertrant fu en l’ost avec sa maignie ou abbatu avoit mainte tente drecie et maintez loges aussi avoit arséz et bruye. Et ceulx qui en l’ost furent irent chiere marrie. L’un s’en va crient et l’autre s’escrie : « Traÿ. Trahÿ. Seigneur, vostre gent est perie. » La cuidoient pour vray, ne le tenéz a folie, que ce fussent François .xx. milles a une fye. 52
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Or fu Bertrant en l’ost entre lui et ses gens, quant qu’ilz vont encontrent trebuchent laidement. En une rue sont venuz moult ierement, de charretes y ot chargés plus de cent de bonne char sallee de vin et de froment et a chascune avoit chevaux et jument, et s’estoient torné pour fouÿr plainement. Et Bertrant du Guesclin leur it .i. tel torment de batre, de navrer et de ferir villainement, et leur it malgré eulx tost et isnellement mener tout le charroys et quant qu’il y appent a Resnes la cité, le chemin droitement ; en alant les frappoit et bleçoit tellement que contre lui n’oserent reveler nullement, ainçoiz tout le plus hardy lui disoit : « Je me rens. » 53
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Ensuyment it Bertrant .i. jour par .i. matin, par devers la cité it aller le charrin qu’il avoit assez pain, char, bléz et vin. Les charretons batoit en menant le chemin 1424
corr. d’après P : y ippent.
[18v]
- Siège de Resnes tout aussi comme s’ilz fussent esclave sarrazin, et leur disoit : « Vilain, hastéz vostre train ou pendre vous feray a guise de matin. » Oncques n’y ot en l’ost Breton ny Limosin, ne Engloys, ne archier, ne homme de leur lin qui saillissent avant pour aider au commun ;* ains aloient fuyant tout aussi comme poussin. Bertrant s’en est venuz aus bailles de sappin, a crier commainça la haultement « Guesclin. Ouvréz, dist il, ouvréz, véz cy vostre cousin. » Ceulx l’ont recogneu qui furent ses voysin. Le Tort Boyteux y vint monté sur son ronssin, la porte lui ouvry de loial cuer et in et acolla Bertrant le vaillent pelerin.
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A Resnes est Bertrant qui le corps ot vaillent, contre lui sont venuz les bourgois sousisans, les bourjoises aussi et les petis enfans. Et Bertrant du Guesclin aloient enclinant ainsi comme on eust fait Jhesu le roy amant. A son houstel le vont leement conduisant, a l’houstel de son ante, une dame vaillent. Bertrant it le charoys tout venir avant et devant son houstel arrengier maintenant, puis dist au charretons : « Aléz moy escoutant : vous n’y auréz ja mal, ne vous y aléz doubtant. Si les biens sont vostre, ne le me aléz celent. – Ouy, se dient, sire, par Dieu le roy amant, sachéz de verité que nous sommes marchant qui pour l’ost gouverner qui est par cy devant, avons touz ses biens cy amenéz maintenant. – Seigneurs, se dist Bertrant, ores oiéz mon semblant du vostre n’y perdréz .i. denier vaillent, 1463
o. oiéz no mon s., no cancellé.
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corr. d’après P : i. fussent enclave s.
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- Guerre de Bretagne ne cheval ne jument n’y perdéz neent ; delivrer vous feray l’avoir qui vault comptant. Et vous en iréz en l’ost, car je le vous commant, et au duc de Lencloistre me iréz recommandant et dictes que ceans me suis mis a garent et que ceans des vivres avons jusques atant que secours nous viendra, au Jhesucrist commant. Et vous desfens aussi a trestouz, en oyant, qu’en l’ost ne revenéz jamais en vostre vivant ; se je vous y retrouve, foy que je doy saint Amant, vous me rendréz bien ce que vous iréz emportant ou la vie y lerréz a loy de recreant. » Et ilz ont respondu : « Ne vous en aléz doubtant. Jamais n’y revendrons en tout nostre vivant, pleust a Dieu que vous eusséz tretout le demourant. » 55
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Ensuyvent it Bertrant a icelle jornee. Or vous diray de l’ost qui si estoit troublee. Au duc de Lencloistre est la nouvelle comptee. Et quant au duc en fu la nouvelle notee, vous povéz bien savoir que la chere ot iree. « Par mon chief, dist le duc, véz ci chose faee. Le villain nous en a une belle donnee qui nous a fait venir et garder la bee. Pleüst a Jhesucrist qui it ciel et rousee, que je le truisse ores en ma tente levee : jamais ne mangeroit en jour de sa duree. » Devent Resnes revint, si a ouy la huee de sa gent qui estoit malement tormentee. De Bertrant du Guesclin fu la vie contee, comment il se maintint a celle matinee et mena garnison a la cité louee, la ou la gent estoit bien mate et afamee. De charretes en a mené maintes charretee, et de chevaux chargéz et mainte brouetee. Et véz vous venir les charretons par my la pree :* vindrent devant le duc et devant l’assemblee.
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- Siège de Resnes Le duc leur demanda sans plus de l’arrestee « Seigneurs, se dist le duc, ne me faictes celee : que font icelles gent en la cité louee ? » Et dist .i. charreton a moult haulte alenee : « Sire, par celluy Dieu qui sa char ot penee, malgré nous leur avons la cité confortee car Bertrant du Guesclin qui tant a renommee, nous y a fait aller ainsi qu’il lui agree ; mais tant l’avons trouvé de maniere souee que tousjours en sera bonne chanson chantee. »
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Dient les charretons l’un qui hault parla : « Oncques itel Guesclin ne fu ny ne sera, car sachéz pour certain, quant nous venismes la, boyre nous it assez et puis nombra tout ce que avoions, que riens il ne laissa, et le nous it paier et l’argent nous compta, et chevaux et harnoiz tout nous delivra. A vous soy recommande et a ceulx de par deça et dit c’est vostre voysin qui veoir vous vendra, car vivres ont assez et quant il vous plaira des vins de la cité aporter vous fera et du boschet aussi, car assez en y a, pour radoussir vostre cuer vous en tremectra. » Et quant le duc l’oÿ, forment se merveilla : « Par ma foy, dist le duc, a grant honneur viendra. Il est gentilz de cuer, se lui prouitera, car oncques large cuer malvaisement ina. S’il dure longuement faisant ce que fait a, touz les chevaliers du monde passera ; mais oncques ne le vy, par Dieu qui me crea. » Le quenx de Pennebrot isnellement parla : « Sire, duc de Lencloistre qui croyre me vouldra, Bertrant ferons venir, sire, quant nous plaira et par un sauf conduit que vostre corps lui donra. Je suis certain et si n’en doubtéz ja,
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- Guerre de Bretagne que se vous le mandéz ja ne vous fauldra. – Par mon chef, dist le duc et on vous en croyra. » Adonc isnellement un hayraut appella et puis .i. sauf conduit tantost lui cella pour bailler a Bertrant et moult lui supplia que a lui veille venir et bon gré lui en saura, et veigne lui .iiiie . telles gens qu’il vouldra. Le heraux se parti et le cheval brocha, les armes du seigneur droit a son col porta. A bailles est venuz quant on le regarda, nul homme ne trait a lui ny ne lansa. Adont le Tort Boyteux qui la ville garda, s’en vint sur les creneaux, le heraut avisa. Si lui a demandé pour quoy il venoit la et le hayraut lui dist qui la si l’envoia. Se dist le cappitaine : « Heraux, vous viendréz ça. De nous vins boyréz des quelx qu’il vous playra. » A icelle parolle a ses gens commanda : la porte fu ouverte, le hayraut y entra. Chascun vait contre lui, forment l’onnoura. 57
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Le hayraut est entré en la cité antie, le cappitaine vit avec sa compaignie. Le hayraut regarda a chascune partie, puis a dit haultement : « Seigneurs, je ne voys mie celluy pour qui je viens en la cité garnie. » Se dist le cappitaine : « Or ne me celéz mie : que demandéz vous, pour Dieu le ilz Marie ? – Je demande, dist il, Bertrant a la chiere hardie ; c’est celluy du Guesclin qui nostre gent cuvrie et la nostre vitaille a amené et chargie et nous a matin nostre gent esveillie. » Se dist le cappitaine : « Hayraut, je vous afye. Véz le ça venir par my celle chaussie a celluy jacques noir comme une crameillie avec .vi. escuiers qui sont de sa maignie
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- Siège de Resnes et qui porte a son col celle grande cugnie. – Par foy, dist le hayraut qui vit la compaignie, bien ressemble brigant qui les marchans espie. » Se dist le cappitaine : « Heraut, je vous en prie, or ne lui dites pas, fors que grant courtoisie,* car si vous avoiéz dit une villonnie, tost vous auroit assés la hache sur l’oÿe. – Sire, dist le hayrault qui la chose ot oÿe, Dieu m’en veille garder et la virge Marie. »
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58 Le cappitaine vit Bertrant le chevalier, tost et isnellement le it lors appeler. Et Bertrant est venu sans point de l’arrestier. Adonc lui dist le Tort, que ne lui volu celer : « Bertrant, venéz avant a ce hayraut parler. – Or avant, dist Bertrant, que veult il sermonner ? » Lors s’ala le hayraut devant lui encliner, mais Bertrant l’en a fait en l’eure relever et dist : « Gentilz hayraut, Dieu vous veille garder. Quelles nouvelles vous plaist a moy recorder ? – Sire, dist le hayraut, je ne le doys celer. Le bon duc de Lencloistre qui moult fait a doubter, vous fait par sauf conduit de par moy deviser que vous venéz a lui sans point de l’arrester. Sauf alant et venant il a fait seller : voluntiers vous verroit et lui et touz ses per, pour tant que maintes foys l’avéz fait tormenter et venu en son ost faire ses gens armer. Or y veilléz venir, ne devéz refuser. » Et Bertrant lui a dit « Tout suys prest d’y aller. » Le sauf conduit a prins, si le fait recorder car lyre ne savoit ne escrire ne compter ; ains maistre ne trouva, ce sachéz sans doubter, de qui le bers Bertrant se laissast doctriner, ainçoys vouloit son maistre ferir et frapper.
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Bertrant est descendu aus tentes et aus trefz. Engloys viennent entour lui .iiii. milles passéz pour veoir le vassal qui tant fu renommé. L’un a l’autre dist : « Il est bien appresté pour murtrir marchans, mains en a derobéz. Regardéz comme il est fort, comment les poins a carréz ; il est fort et puissant et moult noyr et halléz. » Et Bertrant du Guesclin s’en est oultre passé. Il est venu au duc, a genoilz c’est gicté. « Or sus, se dist le duc. Bertrant, or vous levéz. » Il le prinst par la main comme bien endoctriné et lui a dit : « Bertrant, vous soiéz bien trouvé. Je vous sçay moult bon gré, ja ne vous en doubtéz, que a moy este venu quant vous ay mandé. – Sire, si a dit Bertrant, je suis tout appresté de faire tout ce que me commanderéz, fors de faire la paix tant que vous la seréz encontre le seigneur qui est mon advohé. – Et qui est vostre seigneur ? dist le duc honnouré. – Sire, se dist Bertrant, vous le savéz assez : c’est duc Charles de Bloiz qui des roiaux est né, et ma dame sa femme, pleine de grant bonté, que de Bertaigne doit tenir les heritéz. » Et le duc respondy : « Bertrant, vous ne savéz, ainçois en y aura cent milles homméz tuéz. – Je veil, se dist Bertrant, que on en octye assez* : au moins auront l’avoir ceulx qui seront sauvéz. – Par ma foy, dist le duc, Bertrant, c’est verité. » A rire commainça, si a les sourcilz levéz, Bertrant le regarda comme lÿon creté. 60
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Quant le duc vit Bertrant qui point ne s’esbahy, a rire commainça, puis lui dist sans detry : « Bertrant, se demourer vouléz avec my, bien vous porréz vanter, que certain le vous dy,
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[21v]
que en moy auréz trouvé .i. bon loial ami. Chevalier vous feray et vous donray aussi terre et grant avoir de tout a vostre otry. – Sire, se dist Bertrant, foy que doys saint Remy, se tout premierement vous avoie servi, se m’aïst Dieu de gloyre qui tout a estably, tenir me devroiéz vostre mortel ennemi d’un autre seigneur prandre ne le servir ; je vous auroie voir villainement trahy. Ja il ne plaise a Dieu que je le face ainsi ; mais si entre voz, seigneurs qui estez ennemy de guerroyer l’un autre, ainsi comme j’ay oÿ, se bonne paix estoit, je vous acertify je feroie vostre gré voluntiers sans detry, mais que a mon dit seigneur fusséz de paix amy. – Par ma foy, dist le duc, il ne puet estre ainsi. »
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61 Quant le duc oÿ parler Bertrant si sagement, en son cuer le prisa le duc moult grandement. Le vin a fait mander et espices granment. La ot .i. chevalier plain de grant ardement : Guillaume de Bramborc l’appelloient sa gent a Robert de Brambort estoit prochain parent qui ja tint Forgeray, .i. chastel bel et gent, que Bertrant avoit prins a son commaincement. Celluy a dit a Bertrant devant le duc present : « Bertran, dit il a lui, or oiéz mon talent. Je vous requiers, dit il, par le mien serement, que de troys cops de glayve armé sousisanment vous ne me failléz pas, si vous vient a talent. Et le duc de Lencloistre vous aura en convent que se vous m’eschappéz a ce tournoiement que aller vous en lerra a Resnes sauvement. » Et quant Bertrant l’oÿ, sans nul detriement s’en vint au chevalier et par la main le prent, 1645
La barre d’abréviation manque sur vostre
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- Guerre de Bretagne et puis lui dist Bertrant a sa voix clerement : « Beau sire, grant mercy, car par mon sacrement je ne vous en fauldray, sachéz le vrayment. Vous en demandéz troys et j’ay Dieu en convent, que vous en auréz .vi., se besoign vous sousprent. » Et quant le duc l’oÿ parler si faytement, aus chevaliers a dit tost et isnellement : « Véz cy un ier vassal et parlant apprement. Il a dedens son ventre un droit cuer de serpent. » 62
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Le duc ot grant merveille de Bertrant le guerrier comment il respondi ainsi au chevalier. Il a dit a Bertrant qui tant ot le cuer ier : « Puis que a vous .ii. plaist bien de ce fait octroier, je vous en donne jour de venir champpier a demain au matin sans point de targier. » Et le hayraut s’en vint tantost agenoiller, devant le noble duc s’en vint regracier de Bertrant le courtois qui lui it envoier l’argent et mains beaux dons, dont moult le vait priser le duc quant il lui oÿ cestui fait declarer. A Bertrant it le duc presenter .i. coursier bel, riche et puissant qui valait maint denier. Et quant Bertrant choysi que on lui venoit bailler :* « Sire, dist il au duc, Dieu vous gart d’emcombrer. Oncques mais ne trouvay duc, conte ne princer qui me donnast du sien la montance d’un denier se je ne le conquestasse a l’espee d’acier. Se je povoie faire chose a vostre desirer ne service ne riens dont vous eusséz mestier voire – sauve mon honneur – sans mon prince abesser, je le vous rendroye, voyres, sans varïer car le cheval est bel qui sauroit chevaucher. Je ne sçay s’il est bon a l’esperon brochier mais demain le voudray devant vous assaier. » 1692
q. il y lui o., y cancellé.
[22r]
- Siège de Resnes -
55
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[22v]
Lors se parti Bertrant, congié prinst leement. A Resnes repayra, si vous ay en convent que le riche cheval qui moult valoit d’argent lui mena le hayraut bien et souisament ; en la cité entra tost et isnellement. Le cappitaine lui vint devant lui en present, l’estat lui demanda et Bertrant lui reprent et lui a recordé tretout le parlement, et comment au matin, aprés l’ajornement, il doit aller jouster .iii. lances seulement. Lors dit le Tort Boyteux : « Je en ay cuer dolant car les Engloys envis tenent leur serement. » Et Bertrant respondi : « Ne vous doubtéz neent. Le duc ne me fauldroit jamais de convenant. » Lors sont aléz soupper ensemble leement jusques a lendemain que Bertrant et ses gens furent tretouz levéz aprés l’ajornement. Bertrant a fait chanter sa messe haultement. Et quant il ot oÿ messe et le sacrement, tout droit au cappitaine ala appertement et la le it armer bien et souisament.
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64 Chevaliers et barons se sont touz apréstéz pour l’onneur de Bertrant et si l’ont bien armé tellement qu’il afert a vassal redoubté. Et lui ont son cheval en la place amené, de ce qui lui failli l’ont trés bien adoubbé. Et quant il fu armé bien a sa volunté, il monta a cheval de lie volunté, a Dieu se commanda, le roy de majesté. Bertrant avoit une ante qui moult en a plouré. Le bers dist a son ante : « Penséz a vostre santé. Je reviendray bien tost, s’il vient a Dieu en gré, – faictes que vous aiéz le digner appresté – ainçoys que aiéz prins le feu ne alumé,
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- Guerre de Bretagne mais que je ay tout prest mon champion trouvé car j’ay en nuyt songé qu’il s’en estoit alé. » 65
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Le noble Bertrant est de Resnes yssu et les chevaliers sont par la ville esmeü ; montoient sur les creneaux les grans et les menuz et regardent Bertrant qui s’estoit esmeü qui s’en va vers les tréz parmy les préz herbuz ou le chevalier fu moult justement venu. Mais un commandement it lors faire le duc : qu’il ne soit homme vivant, soit armé ou nu, qui aprochent les .ii. de .xx. glayves ou plus* ; et si le chevalier est ou champ abatu, ne qu’il y soit navré ne mort ne confondu, que pour lui aidier homme n’en soit ja esmeü. Et qui passe comment, il veult qu’il soit pendu. Lors n’y eu si hardiz qui ne fust triste et mut. Le chevaliers s’estoit du cheval descendu, tint le glayve en la main, dont le fer fu agu, a l’arson de sa celle lui pendoit l’escu. Et Bertrant du Guesclin s’en est a lui venu ; au chevalier ne it mie courtois salut, ains lui dist ierement comme vassal esleu : « Estez vous cy ? dist il. Moult tempre estez venuz. Se n’est mie bon signe d’estre ainsi acouru : meulx vaussist que fusséz couchié en vostre lit jus ; se croyre me vouloiéz, nous n’en feroions huy plus. Il est temps de monter, or tost levéz vous sus. Par ma foy, se je puis, tost seréz abatu. » 66
1769
Quant le chevalier oÿ Bertrant qui ainsi parla il ne dist oil ne non ne parler ne digna. 1747
t. parmy les C préz, C cancellé.
1745
corr. d’après P : montoit s.
[23r]
- Siège de Resnes Il vint a son cheval et dessus tost monta, le glayve prinst au mains et l’escu acola ; et Bertrant d’autre part es estriers s’aicha. Mis se sont en conrroy, chascun bien s’ordonna. Et le duc de Lencloistre sur les piéz demoura, cellui de Pennebrot et autres y mena. Et veoient Bertrant comment il se porta., l’un a l’autre dist : « Quel deable est cela. Il ne redoubte riens, véz comment il va. » Et Bertrant atendoit et a son fait pensa. Le chevalier lui vint, que petit le prisa, a l’aprochier qu’ilz font l’un l’autre assena. Bertrant le chevalier fery et assena sur l’escu de son col, oultre le trepassa et le aubert aussi et l’oqueton creva mais adonc nullement la char point ne entama. Le chevalier fery Bertrant, que poy ama, dessus le bacinet, le glayve s’atacha et petit s’en failli que tout oultre n’ala ; mais oncques de cheval Bertrant ne remua tant aussi comme une tour es estriers s’aicha ; revint au tour françoys, son glayve rapporta, si grant duel ot au cuer que un seul mot ne sonna. Puis revindrent ensemble, chascun bien se porta : trois glayves ont couru que nul ne se blessa. Adont le bers Bertrant haultement dit ly a : « En vouléz vous encores, or ne me celéz ja. Je vous ay en convent sur Dieu qui me crea je vous ay deporté pour le duc qui est la et pourtant que je suys venu au léz de ça ; mais se plus m’atendéz, le deable y sera. »*
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67 Quant le chevalier ot de Bertrant la raison, il ne le prisa pas vaillent .i. bouton ; ains a dit a Bertrant : « Nous recommencerons. – Je le veulx, dist Bertrant, j’en feray vostre bon. »
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- Guerre de Bretagne Or oiéz de Bertrant qui cuer ot de lÿon, comment Dieu lui aida a icelle saison. A la .iiiie . lance, dont je foys mencion, a rassené son glayve tout droit soubz le blason ou il avoit feru le premier horion ; par fortune et heur, dont il avoit le don, lui mist le fer du glayve parmy le aubregeon et assena aussi au cop de l’oqueton * et tout parmy le corps le fery a bandon, prés qu’il ne lui persa le foye et le pomon ; du cheval tout navré l’abbati ou sablon puis saisi le cheval qui estoit bel et bon. Et dist au chevalier clerement a hault ton : « Vous en avéz assez pour vostre livreson. Se ne fust pour le duc qui tant a de renon, je vous donnasse ja une autre livreson. » Par le frain a saisi le bon destrier gascon et puis a dit au duc a moult haulte raison : « Sire, a Dieu vous commans et a vostre bon non ; a deux chevaux m’en voys leenz en ma maison. » Et le heraux lui dit clerement de hault ton : « Sire, le duc vous mande que n’aiéz suspeçon : bien en povéz aler a vostre division, bien acompli avéz la vostre entencion. – Amis, se dist Bertrant, Dieu lui face pardon. Ce cheval ay conquis contre mon compaignon mais pour l’amour de toy je le te donne en don. » 68
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Seigneur, de cecy moult it Bertrant a loer qui le cheval conquis volu a l’ayraut donner.* A Resnes repayra, si prinst Dieu a louher. Touz les chevaliers le vindrent honnourer et Bertrant du Guesclin vont ou chastel mener puis lui ont fait ensemble un moult riche digner. Et les Angloys dehors s’alerent ordonner et irent assaillir, si que sus la vespree
[23v]
- Siège de Resnes -
[24r]
un grant belfroy de boys eurent fait charpenter et le irent adont a Resnes amener ; jusques prés des fousséz le irent traÿner. Le belfroy fu moult hault quant le irent lever : grande plenté de gens y povoit bien entrer. Mais Bertrant du Guesclin qui tant fait a louher, a l’heure comme il voit partout l’aube crever issi avec ses gens et les it adouber. A toutes les gens d’armes s’alerent ordonner et si vont feu gregoys avec eulx aporter. Cincq cens arbalestriers y it on apprester. On ot fait le belfroy toute la nuyt garder, pourtant que lendemain y vouloient ouvrer et faire un grant assault por la ville grever. Mais Bertrant et les siens et mains bons chevaliers avec le cappitaine, que l’on ne doit oublier, alerent aus Angloys tellement assembler qu’i les irent tretouz dedens l’ost reculer. Adonc on commaince a brayre et a crier et Angloys et Bertons s’alerent tous armer. Et le duc de Lencloistre n’y volu mie arrestier, mais ainsoys qu’ilz peüssent venir pour les* conforter a fait ou belfroy Bertrant le feu bouter tellement que l’on le vit de tout l’ost lamber.
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69 Ainsi fu le befroy tout art et deppecié Atant et les Engloys, ordonnéz et rengéz, François ont afaibli et les ont enchasséz ; reculer les convint, tout de vray le sachéz, ou on les eust bactuz, octis et maïgnéz. Le cappitaine est a Resnes reppayré et Bertrant du Guesclin qui tant fait a priser ; et ramena ses gens bautz, joyeux et léz. Ensement fu adoncques a Resnes le meschef : pou y avoit vitaille, de certain le sachéz. Et le duc de Lencloistre estoit moult travaillé
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- Guerre de Bretagne et les Anglois aussi avoient moult de griefz. C’estoit le temps d’yver qui estoit trop mouillé. Bien voluntiers se fust parti et esloigné et le siege laissé car trop fu desnoyé, mais il avoit juré, dont il fu corroussié, qu’il ne se partiroit pour estre maïgné tant que son pennon fust sur les creneaux haussé. 70
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Or advint, en ce temps dont je vous voys parlant, que Bertrant et Angloys irent parlement tant. Et tant furent d’acord les chevaliers vaillant que ceulx de la cité alerent devisant que pour les serement que le duc ot fait grant qu’il ne s’en partiroit jamais en son vivant si auroit mis son pennon sur les creneaux vaillant. Pourtant furent d’acort, si comme trouve lisant, que le duc enterroit du tout a son commant lui .xe . sans plus, sans vestir jazerant, et iront son pennon sur la porte posant, a la in que dela s’aillassent esloignant. Quant tout fu actordé, si comme je vous chant, les gens d’armes s’alerent ensemble conseillant et a leur bon conseil appellerent Bertrant. Puis eurent a conseil les chevaliers vaillant qu’ilz feroient crier par la cité vaillant que touz ceulx de la ville, touz bourjois et manant, fussent au lendemain aprés l’aube crevant tout ainsi ordonnéz et si apparent comme si l’on deust issir de la cité vaillent ; et avec tout ce on ala ordonnant que on mist a estal et alast on monstrant aus fenestres, aus huys, ou sur estal seant tout char, pain et poisson et ce que on va mangent ; et si personne y a qui le aille forcelant et qu’il ne monstre tout sans aller riens mussant qui la vaille .vi. deniers, derere ne devant,
[24v]
- Siège de Resnes il aura tout perdu ; et seront les sergent commis a regarder, commission portant de prandre et d’arrestier le corps et le vaillent. Liéz furent aucuns et l’autre dolant car des vivres avoient plus que l’on n’aloit pensant.
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[25r]
Ainsi fu l’ordennance par la ville ordonnee que droit au lendemain fu ainsi demonstree. Et le duc de Lencloistre avoit prins la jornee d’entrer en la cité a heure divisee que, son serement et sa foy creantee, il ne s’en partiroit tant qu’il eust duree se l’enseigne du roy d’Engleterre la lee n’estoit sur les creneaux tout contremont montee. Mais un conseil lui vint en la propre vespree qu’il n’y entreroit ja, tant qu’il eust duree, tant que du tout auroit la ville conquestee car chascun lui disoit qu’elle estoit afamee ; et se tindrent tout coy en celant leur pensee comme chascun retient souvent en sa visee deux cordes en son art, ainsi qu’il lui agree. Fu dedens la cité la vitaille monstree, tant pain comme de vin, de blef, de char salee, a chascune maison estoit mise et posee ; je vous ay en convent que droit a la jornee assez en y avoit pour vivre une annee, de vins et de bochetz y avoit grant meslee dont la commune fu forment reconfortee. Tel* en vendoit .ii. sols qui en faisoit denree.
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72 Ceulx de Resnes avoient acordé leur respit encontre les Engloys .iii. jors touz acompliz. Mais le duc qui vouloit user a son advis, volu de Resnes voir touz les ediiz et y vint chevauchant o lui chevaliers dix,
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- Guerre de Bretagne non pas sur le droit fait qui la estoit comprins mais pour savoir comment ilz estoient prés priz. Touz ceulx de la cité, les chevaliers gentilz, vindrent contre le duc qui tant fu poestiz ; moult hault fu l’onneur et les faiz et les diz, menéz fu par la ville avec ses soubgiz, le cappitaine o lui qui moult estoit hardy. Et Bertrant du Guesclin n’y estoit pas failly. Et quant le duc parceu les houstelz bien garniz et dessus les treteaux les vivres bien assis, a soy mesmes dist qu’il ne fust pas oÿ : « Je tiendray le marché que j’avoie promis. » 73
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Quant le duc a veü la grande garnison et en la boucherie a veü la foison, char de beuf, vous, aigneaux avec gras mouton et le pain et le blé et mains riches bacon, aus chevaliers a dit a moult haulte raison : « Je envoieray querir le mien pennon » Lors respondy Bertrant qui cuer ot de lÿon : « Sire, si vous estoiéz la hors sur le sablon jamais ne rentreréz en ceste mansïon tant qu’il y auroit ceens a manger .i. oignon, car Charles de Bloys est arrivé a Avignon.* Je croy que vous venoiéz savoir nostre porcion. Vous penséz a tenir le serement Mahon. » 74
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Quant le duc a veü comment la ville va, il dit entierement son convenant tiendra. Un heraut a tramis qui va aus léz dela, le pennon d’Engleterre avec lui apporta ; quant en la cité vint, au duc le presenta et quant le duc le tint, sur la porte monta, aus creneaux par devant la baniere posa. Et au descendre aval le cappitaine ala et pluseurs chevaliers avec lui amena ;
[25v]
- Siège de Resnes et Bertrant du Guesclin le vin lui presenta. Le duc en a beü et congié demanda : « Sire, se dist Bertrant, or ne me celéz ja. Dictes moy si vous plaist ou la guerre se va car j’ay bien en pensee que mon corps vous suyvra. Partout vouldray aller ou la guerre sera. » Et quant le duc l’oÿ, tost respondu lui a et a dit a Bertrant que tantost le saura.
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75 Aussi tost que le duc se fu dela scevré et que aus bailles s’en vint, qu’il fu dela passé, et les dix chevaliers qu’il avoit amené, le pennon qui estoit sur la porte posé lui fu encontre terre droit a ses piéz gicté en huant tellement qu’il fu tout ahonté. Il a dit a ses gens : « Je suis bien atrappé. Que mal dicte soit l’eure que me suis acordé. Non pourquant il me falt tenir mes loiautés. » Aprés it desloger ses tentes et ses tréz et fu aussi le feu par les loges bouté ; et s’en vint a Arroy qui estoit bien fermé, un chastel grant et fort noblement ordonné, et par le temps d’iver c’est illec arrivé. Et Charles de Bloy vint, quant cellui temps fu passé, a Resnes la cité et chevaliers assé ; la ouÿ de Bertrant toutes les verités et comment il s’estoit si vaillemment porté. la Roche Dorïant, .i. chastel bien fermé lui a donné le duc et de l’avoir assez, et le retint o luy et fu moult son privé. Or advint a ce temps, se dit l’auctorité, planté de grandes guerres et de mortalités. En Bertaigne il advint assez d’aversité du conte de Monfort, dont vous oÿ avéz, et de Charles de Bloy qui tant fu honnouré. Ses deux seigneurs avoient villes, chasteaux, cités et s’appelloient ducz de ses grans heritéz :
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- Guerre de Bretagne chascun en vouloit estre duc et sire clamé dont le païs en fu laydement demené. 76
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En Bertaigne fu moult la guerre grandement car le roy d’Angleterre envoia moult de gens pour celluy de Monfort conforter ierement contre Charles de Bloy, au ier contenement, qui de par sa moillier chalengoit proprement la duché de Bertaigne environneëment ; et tant la chalenga et mena tellement que depuis en moru a dueil et a torment devant chastel d’Elroy qui en Bertaigne s’estent, ainsi comme vous orréz assez prochenement. Et en ces guerres cy devant, si faytement advint par dedens France un grant encombrement car le bon roy Jehan qui regna loiaument, qui les Engloys avoit guerrié longuement, si fu prins a Poitiers, ou l’istoire ment, et mené a Bourdeaux, ou Gironde s’estent, par le prince de Gales qui regna puissanment que depuis le mena a Londres proprement. Dont le sien ilz Charlon fu de France regent qui duc de Normendie estoit entierement. Oncques n’ot roy en France, ou tout honneur apent, qui tant eüst a faire a son commaincement comme il ot contre Angloys tout premierement et eu a faire aussi par un grant maltalent que le roy de Navarre ot a lui longuement. Dont dommage fu grant quant ses prochains parent avoient tel discort ensemble mortellement car France en ot a faire tant et si grandement que le duc des Normans, Charles au fer jouvent, ne savoit auquel lieu aller paisiblement, car le plus beau jardin qui fust au irmement et que Dieu ama plus et aime fermement estoit si encombré environneement
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- Siège de Dinant -
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de ronces et d’espines, d’orties ensement que oncques mais ne fu, cecy scet on vrayment. Mais Bertrant le gentilz qui tant ot d’ardement, les aida a copper et ouster laydement ainsi comme vous oréz, si vous vient a talent. Or commaince chansson de noble sentement. De Bertrant le vaillant vous diray bien comment il vint a Cocherel combatre noblement, prandre le Castal, des autres grandement et comment il mena une malvaise gent hors du noble roiaume trés bien et sagement, comment du roy Henry it le couronnement, comment a Nadres fu prins eforceement et mené a Bourdeaux, ou il fu longuement, et fu prins delivré pour or et pour argent et remena Henry bien et deüement : Espaigne lui rendy par son eforcement dont roy Pietres moru qui regna folement, car malvaise in vient de mal commencement. Tant regna cellui Bertrant et si hardiement que en .i. bataille fu arresteement et prinst mile chasteaux a son commandement ; connoistable de France regna suisamment. D’un tel chevaliers qui regna tellement doit on bien escouster les faitz veritablement.
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77 Seigneurs or faictes paiz pour Dieu de paradis, si orréz du meilleur qui fu a mon devis ; de la mort du vassal en valu France pis car il ne scet qu’il pert qui pert ses bons amis. En Bertaigne regna Bertrant le poesteiz tant pour Charles de Bloy a qui il fu subgit qu’i le it chevalier, se nous dit l’escript. Mais ceste guerre ala contre Charlon au pis car ainsi le vouloit le roy de paradis. Charles de Bloys si fu proudons et bien apris mais il fu en ses faiz infortuné toudiz ;
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- Guerre de Bretagne et je croy que ce ist deables ou ennemis qui vouloit que l’omme fust hors de son bien mis car il estoit tousjours de la hayre vestiz comme vray crestïen et de bien faire apris ; et il y paru bien, selon le mien advis, car on dit et croyt on qu’il est de vray saintyz. Or advint en ses guerres dont icy vous devis que les gens de Dynant, une ville de pris, manderent a Charlon qui bien fu leur amys, que leur ville si fust de souldoyers garny. Et Charles y tramist dé chevaliers de pris pour tant que on cuidoit a Dinant estre bien assis. A Dinant fu envoié Bertrant et tramis et d’autres souldoiers, ne sçay .vc . ou .vi. . Et avec Bertrant qui tant estoit hardy, fu Olivier son frère qui de nouvel s’i estoit mis* aus armes poursüir, bien s’en faisoit joly ; puis fu a Chierebourc devant le chastel de pris et avec les Angloys dela la mer tramis. 78
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Si comme les soldoiers alerent a Dinant advint en la saison, ne sçay a dire quant, que le duc de Lencloistre, au courage puissant, vint asseger la ville a mains bons combatant : le conte de Monfort et ses hommes vaillant, cellui de Pennebrot et mains archers traiant. La estoient Angloys et Bertons bertonnant, et mistrent la un siege du tout a son commant. Charles de Bloiz aloit autrement combatant, a Brest et a Henbon aloit le pas gardant. Et Bertrant du Guesclin estoit droit a Dinant ; le Tort Boyteux y fu, un chevalier vaillent, et autres chevaliers hardiz et combatant qui contre les Angloys aloient paletant. Et se Bertrant avoit esté doubté, encores l’aloit on assez plus redoubtant.
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- Siège de Dinant Et tant furent Angloys cellui siege tenant que vitaille aloit forment amantissent ; et les engins aussi y estoient si grant que ne le vous diroit homme en son vivant. Et tant que les Françoys qui Charles servoient, si eurent a conseil et furent conscentant que a Lencloistre le duc iroient envoiant a la in, s’il se vouloit acorder atant quinze jours de respit, sauf alant et venant de l’un lieu de l’autre par serement jurant, que au chef des .xv. jours iroient delivrant* la ville de Dinant qu’ilz aloient gardant ; voyres, si en cellui jour qu’ilz aloient nommant n’avoient le secours de tout a leur commant de Charles leur seigneur, s’il ne venoit avant, la ville rendroient toust et incontinent au conte de Monfort qui l’aloit chalengent. A ce respit ycy si furent acordent et les it on crier par droit acort faisant.*
[27v]
79 Ainsi furent les treves que vous oÿ avéz.* Et povoient Anglois et Bertons encretéz aler de l’un a l’autre faire leurs voluntés et venir en la ville et puis a l’autre lieu.* Or advint en ce temps que respit fu crié que le frere Bertrant, Olivier appellé, issi hors de Dinant moult richemont monté ; esbanoier s’aloit seulement sur les préz ainsi comme jeune homs qui fait ses voluntés et comme cellui qui cuidoit bien estre asseuré. Mais Olivier si fu sur les champs encontré d’un chevalier angloiz qui Thomas fu nommé, de Cantorbie fu, se dit l’auctorité ; moult ourgueilleux estoit et moult desmesuré. Cellui trouva Olivier qui estoit tout seuléz.* Il est venu a lui ierement emparlé, par le giron le prinst le chevalier doubté.
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- Guerre de Bretagne « Qui estez vous, dist il qui ainsi aléz ? » Et Olivier lui dist : « Quant savoir le vouléz, on m’appelle Olivier, du Guesclin suis nommé et suys frere Bertrant, je suis de lui mainsné. – Par saint Thomas, dist il, vous ne m’eschapperéz. Vous estez mon prisonnier, avec moy viendréz. La teste vous trencheray se tost ne vous rendéz. En despit de Bertrant, tout maintenent morréz que ja pour le sien nom deporté ne seréz, pour tant qu’il a tousjours noz bons amis grevéz. Les deables ont bien fait qu’il est si hault monté : on playdoie plus de lui et de ses cruautés que l’on ne fait de touz ceulx de ses heritéz. – Sire, dist Olivier, moult grant tort en avéz. Pouvre chevalier est et pouvrement renté. Se pour richesses avoir et pour estre honnouré c’est un pou avancé, blasmer ne le devéz. » Ce dist le chevalier : « Ja deport n’en auréz. A mort vous mectray si tost ne vous rendéz. » Il a trayte l’espee et a lui est alé. Quant Olivier le voit, le sang lui est mué.* Merveilles ne fu pas : il estoit desarmé et si estoit tout seul et Thomas le ousé avoit quatre escuiers dont il fu conforté. Lors lui dist : « Je me rens, puis que vous le vouléz ; mais je croy vrayment que vous me rendréz que ja n’auréz du mien deux deners monnoiéz. » Se dist le chevalier : « Ainsois me rendréz mille lorins comptans ou ja n’en partiréz. Se n’est gueres d’argent, Bertrant en a assez. » 80
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Ainsi fu Olivier le bers mis a ranson. Le chevalier angloiz le mist en sa prison, en son tref le mena ou sont ses compaignons. La fu apparceu d’un chevalier berton qui moult bien recogneu Olivier, ce dit on.
[28r]
- Siège de Dinant Cellui s’en vint a Dinant, au léz de Pontorson, jusques atant qu’il vist Bertrant ne it d’arritezon ; ou marché le trouva, si comme dit la chanson, et regardoit le jeu de la paume a bandon.* L’escuier lui dist bellement a bas son : « A monseigneur, dist il, ne vous feray celoison. Je reviens devers l’ost mais, par saint Symeon, j’ay veü vostre frere Olivier le baron que un chevalier angloiz menoit en sa prison. » Et quant Bertrant l’oÿ, si rougy comme charbon.
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[28v]
Quant Bertrant a oÿ l’escuier qui parla, tout en fu esbahy, assez lui demanda se bien le cognoissoit et se bien l’avisa, le nom du chevalier aussi lui demanda. L’escuier lui dist et bien l’endoctrina. « Par saint Yves, dist il, il le me rendra. Jamais si mal prisonier nul jour ne prandra. » Toust et isnellement son cheval demanda et il y est monté quant on lui amena, a la porte est venu et oultre la passa ; a pointe d’esperon vers les tentes ala. Il est entré en l’ost, que point ne s’arresta, chascun qui le cogneu moult bien le festïa. Lors au duc volu aler et on lui enseigna. Le duc fu en son tref qui aus eschatz joua o Jehan de Chando qui noblement regna ; le conte de Monfort qui le jeu regarda ; si fu Robert Canoles, a ce c’on me compta, et cellui de Pennebrot qui les François greva, et d’autres chevaliers assez s’i assembla*. Et véz cy Bertrant, a qui moult ennuya, du cheval descendi, ou pavaillon entra, 2194
j. de la pl paume, pl cancellé.
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corr. selon P. : f. d’arrritezon
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- Guerre de Bretagne devant les barons vint et puis les salua, devant le noble duc humblement se enclina et touz les seigneurs moult forment honnoura. Quant le duc vit Bertrant, tantost l’avisa : « Bien veignéz vous, Bertrant» Lencloistre dit ly a. Il a laissé le jeu, la main lui demanda et le it relever quant il s’agenoilla. Et Jehan de Chando doulcement dit ly a : « Bers, Bertran du Guesclin, bien soiéz venuz ça de mon vin boyres ains que vous en aléz ja. – Sire, se dist Bertrant, je n’en boyray ja jusques atant que droit fait ne sera. » 82
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Dist Jehan de Chando, .i. chevalier vaillent : « Beau sire, si en nostre ost a chevalier si grant qui vous face nul tort qui nous soit apparent, a mandé vous sera tost et incontinent. –Ouïl, a Dieu le veu, seigneur, se dist Bertrant. Un chevalier avéz que je n’ayme noyent : Thomas de Cantorbie le va on appelant qui m’a fait sans raison corroussé et doulant. Beaux seigneurs, vous savéz que par vostre commant avons treves eües par droit jour acordant. – C’est voir, dient touz les chevaliers vaillant. Et si les vous tiendrons, ja n’en aléz doubtant. – Sire, se dist Bertrant, vous aléz bien parlant. Et icellui chevalier que j’ay nommé devant a trouvé un mien frere qui n’est encores qu’un enfant ;* a matin s’en yssi au dehors de Dinant, sur son cheval estoit venu tout esbatant. Cellui chevalier l’a prins sur ces préz la devant et le tient en prison en guyse de meschant. Si vous pri, monseigneur, par loiauté faisant que mon frere Olivier on me aille delivrant. Je feroie, seigneurs, pour vous bien plus que tant. »* 2234
d. fait me sera, un jambage cancellé corrigeant me en ne.
- Siège de Dinant Dist Jehan de Chando : « N’en parléz point plus avant. Delivré vous sera toust et incontinent et vous sera mandé tout a vostre commant. – Beaux seigneurs, grant mercy, so leur a dit Bertrant. Or nous faictes venir ce chevalier avant, se sarons qu’il aloit a mon frere demandant. » [29r]
83 Dont demanderent le vin les barons et lé per.* Quant ilz eurent beü, si le font a Bertrant livrer. Le chevalier ont fait isnellement mander, cellui qui en prison tenoit le bachelier, et il est venu tantost sans arrester. Et le duc de Lencloistre le it a lui aller et lui dist par son nom, ainsi comme il le deust nommer : « Véz cy, se dist, Bertrant qui vous vient actuser que, sur nostre bon respit que avons fait acorder, vous avéz huy volu vostre force monstrer sur son frere germain et fait emprisonner, et comme vostre prisonner le vouléz ransonner. Se n’est mie bien fait qui le porroit preuver. » Le chevalier fu orgueilleux, plain d’aver,* et dist au noble duc quant il oÿ parler : « Sire, véz cy Bertrant que je voy cy ester. Mais s’il vouloit sur moy riens diviner que j’aye chose faite dont je face a blasmer ne que bon chevalier ne peüst excercer, véz cy mon gage prest que pour lui approuver en un champ de bataille, corps a corps, per a per. » Aussi tost que Bertrant oÿ ce mot sonner, sans dire un tout seul mot le gage va happer.
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84 Quant Bertrant a oÿ le mot que dit vous ay, il le prist par la main en disant sans delay : « Faulx chevalier, dist il, vostre gage prendray et devant les barons je vous combatray, et ainçoys qu’il soit nuyt je vous appprocheray.
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- Guerre de Bretagne Faulx chevalier, traÿtre appeler vous feray devant touz les seigneurs, ou a honte mourray. » Se dist le chevalier : « Ja ne vous en faudray ne jamais en nul jour en lit ne dormiray decy jusques atant que combatu seray. » Dist Bertrant le gentilz : « Jamais ne mangeray que troys souppez en vin, ou nom de Dieu le vray et du saint Esperit en qui ma iance ay, du ilz en verité ou je croy et croyray. Mais que je soye armé, ceste raison tendray. » Dist Jehan de Chando : « Bien armer vous feray et .i. riche destrier, tout le meilleur que j’ay, car je veil de vous .ii. tantost veoir l’assay. » 85
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Lors fu ceste nouvelle ouÿe et escoutee. Dedens la fermeté est la nouvelle alee que Bertrant doit avoir o .i. Engloys meslee. Adont s’en est la ville moult durement troublee et prient pour Bertrant, a la chiere membree, que a joye le ramaint et a bonne duree. Bourjoises et bourjois en sont grant assemblee. La y ot une dame, de chevalier fut nee : Thiphaine fu la dame par son nom appellee et fut de haultes gens estraite et engendree ; vingt et quatre ans avoit, ne fu point mariee, mais s’estoit la plus sage et la meulx doctrinee qui fust ou païs ny en toute la contree : du sen d’astronomie estoit bien escolee et de philizophie estoit sage esprouvee ; encores disoit on que c’estoit destinee, et le bon sen dequoy elle estoit si fondee lié venoit proprement de parolle de feee ; mais, a dire raison, elle estoit inspiree de la grace de Dieu parfaitement fondee. Puis ot elle Bertrant et fu son espousee malgré mains chevaliers dont elle fu amee.
[29v]
- Siège de Dinant -
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[30r]
Seigneurs, icelle dame fu nee a Dynant estraite de haulx hommes et de lignage grant. Quant elle oÿ parler l’aventure Bertrant et les gens qui de lui s’aloient esmaiant pour ce que a .i. angloiz devoit faire le champ et prioient pour lui les petiz et les grans, mais la dame leur dit doulcement en oyant* et disoit tout en hault : « Ne vous aléz doubtant. Et si soiéz touz asseuré de Bertrant que vous le reverréz avant la nuyt saillant, sain et sauf et en vie reviendra a garent et si desconira son ennemi ou champ. Si vous ne le voiéz si comme je voys comptant, je veil perdre a tousjours ce que j’ay vaillent. » De ce se vont les gens forment esjoÿssant. Parmi la ville va la nouvelle comptant. Les pluseurs si s’en vont moult bien asseürant, mais les pluseurs s’en vont touz ensemble acordant que la bataille soit faite dedens Dinant ; et la porroit venir les Angloiz suisant – contes, princes, ducs et chevaliers vaillant – jusques a cent, sans plus en y aura entrant. Tout ainsi fu il comme je vous voys comptant.* En Dinant sont entréz les chevaliers vaillant ; les communs et les gros en furent moult joyant et aussi fut le duc et tout le demeurant ; les iens ont respandu, le champ vont ordonnant.* A Bertrant est venu .i. chevalier vaillant, et quant il l’a veü, si le va saluant et lui dist : « Monseigneur, pour Dieu le roy amant, que je puisse parler a vous incontinent. – Que veulx tu, beau amis ? Ne me vien destornant. Je desire que j’aye abatu le bobant de ce faulx chevalier qui me va appellant. »
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Tout droit dedens Dinant, celle ville de pris, font le champ ordonner les bourjois seignoris qui furent moult lïéz et au cuer rejoÿs que le champ se fera en la ville gentilz. Diray de l’escuier qui ot nom Amaurriz. « Sire Bertrant, dist il, ores oiéz mon advis. Il y a une dame qui moult est de hault pris – celle de Ranguenel, une dame au cler vis – mais elle dit pour vray aus grans et aus petis que par vous sera huy l’Angloys desconfy et que vous demourréz tout sain et sauf et vif ; et celle le tesmoigne et aferme ses ditz. Et pour tant le vous dy : ne soiéz esbahy. – Va, fol, Bertrant lui dist, or es tu bien chayty. Qui en femme se ie n’est mie soubtilz : en femme n’a de sen ny en plus que en la brebis. » 88
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Quand Bertrant a oy tel escuier parler, de ce qu’il a dit ne se fait que ruser. Tres bien se it Bertrant richement adouber a loy de chevalier qui doit en champ entrer : de plates et de greves se it bien atourner ; espee et coutel et glayve pour jouster et riche bacinet lui it on apporter, gans a broche de fer qui sont a redoubter. Son cheval lui it on en la place amener ; quant il vit son cheval, lors y ala monter, es estriers s’aicha, bien se it regarder, prist le glayve en sa main et si ce it mener ou marché ou le champ on ot fait ordonner. La ont fait les Angloys le chevalier entrer ; vous pouéz bien savoir, c’est legier a prouver, bien fu appareillé pour son champ achever. Conte, duc, baron se volurent apprester et pour veoir le champ, desconire et mater.
[30v]
- Siège de Dinant Le noble cappitaine qui Dinant deu garder, pour bien garder le champ a fait gens ordonner et tantost par la frete a bien fait tantost crier qu’il ne soit homme vivans qui tant face a loer, qui se mesle du champ lui ne l’autre grever sur peine de perdre son honneur et la teste copper, et le duc de Lencloistre volu cecy acorder. Et quant chascun oÿ ainsi ce cry crier, il n’y a si hardy qui s’en osast mesler. Le chevalier engloiz qui tant it a doubter, se commainça forment a espaonter car au besoign cuidoit de ses amis trouver. Or se vont en Dinant enclorre et enfermer ; bien voussist que a Bertrant se peüst acorder et son frere Olivier lui deüst delivrer.
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89 Le chevalier angloiz qui Thomas avoit nom, voussist bien faire paix avec Bertrant le baron. Parlamenter en i sans venir de son nom.* Robert que on dit Canoles et de chevaliers foyson* s’en vindrent a Bertrant qui cuer ot de lÿon, et dist Robert Canole par moult doulce raison : « Sire Bertrant, dist il, oiéz mon entencion. Regardé ont au fait les chevaliers et baron et ne vouldroient pas par nulle entencion que mal vous avenist pour ceste achoison, car, combien que soiéz en vostre norrisson et avec voz amis de vostre estraction, si avéz vous prins estour contre un fort champion. Meulx vauldroit bonne paix que malvaise ranson. Se croyre nous voléz et acorder nostre bon, nous mectrons a paix ceste discensïon et ferons vostre frere quicter sa ranson. – Comment ? ce dist Bertrant, il ne doit .i. bouton. 2411
corr. d’après Nh : s. venir de son, nom ajouté
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- Guerre de Bretagne Et il est, ce m’est advis, coutume et bien raison que si un homme est a tort mis en prison il en doit purement avoir delivroison. » 90
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« Seigneurs, se dist Bertrant, voléz vous que je vous dye : en bon duc de Lencloistre a tant de seignorie, en Jehan de Chando plain de grant vaillandie, en quenlx de Pennebrot qui tant a seignorie et si tient tant de bien et de l’autre baronnie, et du bon cappitaine de Dinant la garnie, et en ses hommes touz et en la bourjoisie qu’il ne me feront ja de mon droit vilennie. Et j’ay Dieu en convent et la virge Marie que le faulx chevalier qui m’a fait tricherie ne eschappera jamais, ce vous acertiie, si lui auray monstré ma force et ma maistrie ; ou je le destruiray ou y layrray la vie se rendre ne me veult devant la compaignie son espee en ma main par la pointe agusie en disant « Je me rens a vostre commandie. ». » Se dist Robert Canole : « Il ne le fera mie. – Certes, se dist Bertrant, ce sera grant folie car on doit plus doubter la mort que villennie. » 91
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Quant les Angloys oÿrent ce que dit ot Bertrant chascun se merveilla comment il fu pensant ; l’un a l’autre dist : « Or est cellui homme bien grant. – Par foy, se dist l’autre, si est aussi comme Rollant. » A l’autre champïon qui moult se fu doubtant, sont venuz chevaliers et Angloiz ne sçay quant et puis lui ont dit : « Sire, si soiéz pensant de vostre vie sauver, je croy qu’il en soit temps. Nul accort ne respit ne parolle plaisant nous ne pouons trouver que ne soit fait le champ 2427
et est c., il suscrit.
[31r]
- Siège de Dinant si a deshonneur n’estoiéz a Bertrant acordant. Oncques mais ne vy homme qui fust si desirant de faire la bataille, tousjors est grant.* – Il m’y convient aller, or me soit Dieu aidant, mais se puis esploitier, il en sera doulant. Or vous pri, beaux seigneurs, que soiéz regardant que au desevrement me soiéz aidant par quoy tuer le puisse, car j’en suis desirant ; mais se je suis au pis, soiéz moy secourant pour savoir si la paix vouldroit estre acordant. » Et il lui ont respondu : « Ja n’en soiéz doubtant. »
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[31v]
Aprés ce parlement, chascun se departi. Et les deux champïons se sont bien agrami : l’un regarde l’autre si comme son anemi, les glayves en leurs mains se sont fort aati sans dire nul mot que nul oÿ* ; brocherent les chevaux comme preux et hardi. Ensemble sont venuz acourant par estri, les glayves ont lessees, dont l’acier fu fourbi, si se sont entraprochéz les vassalz gentilz. Par dessus les escuz furent les fers poly, les glayves ont fruissees et le feu en est sailly mais l’un ne l’autre s’en clina ny ne cheÿ, oultre s’en sont passé, point ne sont endormy. Chascun a son retour a trait l’espee forby puis se sont assembléz de cuer fel et hardy.
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93 Or sont les champïons arméz dedens Dinant. Bourjoises et bourjois, chevaliers et sergent estoient aux crenaux et aus bailles devant ; entour les champïons, il avoit de gens tant que touz estoient encloux et derrere et devant. Bertrant tenoit l’espee qui l’acier ot trenchant, 2461
l. bataille tousjos e., r suscrit
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- Guerre de Bretagne et s’en vient a l’Engloys fermement estoquant, en l’aubert lui bouta ierement en poussant et furent ensemble longuement pestilant. Mais Bertrant du Guesclin lui va si encauchant que par le bacinet le va forment traiant et aussi it l’engloys qui le corps ot puissant, et par les hastereaux se vont fort pestilant ; bien estoient arméz de fer de jazerant ou fust trop bien alé une lueur courant ainçois que de leurs corps issist goute de sang ; puis s’en vont aus espoix l’un l’autre entracontant, a force et a vertu s’en vont esperonnant. L’Angloiz fu moult fort, bien se tint a Bertrant, et tant que l’Engloys qui le corps ot puissant, lessa cheoir l’espee sur le pré verdoyant. Et quant Bertrant le vit, si en ot le cuer joyant. 94 Quant Bertrant vit l’espoie qui lui estoit cheü,* il brocha le cheval des esperons aguz et sambloit qu’il fouist et se rendist vaincu. Mais quant il fu un pou de l’Englois derrere ensus,* le pié a mis a terre et si descendi jus, toust et isnellement est a l’espee venu ; illec prist l’espoie a sa main qui estoit nus, tout en l’aer la gicta qu’il ne s’en aidast plus et entre les gens est le bon espoie cheü. Or est le chevalier dolant et irascu, a son coutel de plates est a l’eure venu et Bertrant lui a dit : « A, Dolant malotru. Se vous ne descendéz, vostre cheval est vendu. » 95
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Bertrant tenoit l’espee qui bien fu ailé. Il a dit a l’Engloys : « Traÿtre, descendéz ou vostre cheval sera tout en l’eure tué. » Mais l’Engloys füyt, qu’il n’est point arresté, sans approchier Bertrant estoit entour alé.
[32r]
- Siège de Dinant Bertrant ne peu courir, les genoilz ot armé. A terre s’est assis et si s’est deslané, ses chausses avala, ses genoilz a monstré ; adont fu plus legier ; en estant c’est levé car cellui lui venoit de combatre appresté. Si peüst, son cheval fust dessus lui passé, mais Bertrant lui bouta l’espoie par les coustéz. Quant le cheval senti qu’il estoit fort menéz, dessoubz le chevalier a si fort regibé que le chevalier est a la terre versé. Et Bertrant sault a lui comme lÿon creté, dessus le chevalier s’est ierement gicté, le bacinet saisi qui estoit fort assez, et puis de son espee le feri sur le néz tellement que le sang lui est fort decouléz ; de sa broche de fer lui a .iii. cops donnéz, parmy le hasterel lui est le sang ilé ; du sang qui lui couloit fu si fort aveuglé qu’il ne sceu ou il fut, en estant s’est levé. Il ne vit point Bertrant, mais il le scent assez. Et véz vous .x. chevaliers, touz d’Engleterre néz,* et dix autres qui sont en Dinant amasséz ; et de Dinant y fu le cappitaine louhé. Ilz ont dit en ce point : « Bertrant, ne vous mouvéz. Vous en avéz honneur, fait en avéz assez. »
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[32v]
Venuz sont a Bertrant les nobles chevaliers entre deux se sont mis pour le champ delaisser, mais il leur a dit sans point de targier : « Beaux seigneurs, laisséz moy ma bataille appointer car par la foy que doy a Dieu le droiturer ou il se rendra comme mon prisonner, ensement qu’il a fait mon frere Olivier, ou il sera tout mort en my ce sablonnier. » Se dit Robert Canoles : « Bertrant, je vous requier que vous veilléz au duc vostre champïon bailler,
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- Guerre de Bretagne bon gré vous en saura, faictes le sans tarser. Ceste chose saurons moult trés bien appointier. Fait en avéz assez, il est en nostre dangier. – Je l’octroy, dist Bertrant, tout a vostre desirer. » L’Anglois font mediciner et bien appareiller. Bertrant devant le duc s’ala agenoiller et lui dist : « Noble duc, je vous pri et requier, sire, ne me veilléz haÿr ne blasengier se je me suys penné d’octir ce murtrier ; se ne fust pour vostre amour, octis fust a l’acier. – Il ne vault gueres meulx, dist le duc au corps ier. De tant que en avéz fait, on vous doit bien priser. Hors de prison auréz vostre frere Olivier. Et si aura mille livres pour soy harnachier et vous auréz les armes du felon chevalier et son cheval aussi qui vault mieulx que destrier ; ne jamais a ma court ne porra repairer. Sire n’ay de traÿtres ne de nul murtrier* ne qui a traÿson se sachent appliquer ; point ne l’avons aprins dedens nostre heritier. » 97
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Ainsi juga le duc bien et souisaument. Bertran et Olivier furent en parlement. Au duc ont prins congié moult gracïeusement, et lor donna a boyre adonc moult leement. Vers les trefs s’en revont moult honnourablement. Et Bertrant demoura en Dinant proprement, qu’il fu festïé et honnouré grandement car touz ceulx de la ville s’esjoïssent forment pour l ’avoir de Bertrant, ou tout honneur comprent. De Thiphaine ont tenu grant compte pluseurs gens pourtant qu’elle ot senti tout veritablement et que Bertrant auroit vittoire plainement. Le cappitaine it un soupper noblement et toutes les bourjoises vindrent generalement et les bourjois aussi y furent a present,
- Siège de Dinant carolent main a main et chantant haultement. Grant y fu l’esbat, si dura longuement. Pourtant que l’on ne scet pas le temps certainement que ceste chose fu, je vous diray comment vous le porréz savoir assez legierement.
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98 [33r]
Seigneurs, en icellui temps et en icelle saison que en Bertaigne estoit celle perdicïon et guerres merveilleuses et grande destruction du conte de Monfort a l’encontre Charlon, cellui que on dit de Bloy, de haulte estraction, estoit le roy Jehan qui fu ilz Philippon que l’on nomma de Valoy qui tant ot de renon. Le noble roy Jehan, dont je foys mencïon, estoit en Engleterre Edouart en prison. Et furent les .ii. roys touz d’une estractïon* ; ne peuvent avoir paix par nulle octasion car deable regna en sa poccessïon en conseillant le mal et destourner le bon, car le roy d’Engleterre qui Edouart ot nom, vouloit trop estriver encontre l’aguillon* car il se disoit roy de France le royon. Et riens plus comme on porroit monter sans eschalon* lassus en paradis a sa division, il ne povoit venir a son entencion. Et si avoit montré forte et poccessïon et eü le secours de mains nobles baron. Flammens et Hennoiers et touz les Brebençon et touz les Alemans et touz les Frison ne lui peurent aidier a son trés grant besoign fors que de perdre gens mectre a excecucion* ; nonpourquant soustenoit tousdiz son oppinion. La ou le roy Jehan, a qui Dieu face pardon, estoit en Engleterre, la terre de renon, se cuida Edouart acomplir tout son bon. Dont une armee it, ains celle ne vit on,
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- Guerre de Bretagne et s’en vint devant Rains en la morte saison. Et por itant manda, si comme dit la chanson, touz ceulx qui estoient en Bertaigne por son nom. Et furent les seigneurs, dont j’ay fait mencïon, que par devant Dynant eurent leur pavillon. Et fu le noble duc que Lencloistre appell’on, celluy de Pennebrot et Jehan le baron que l’on appeloit Chando, .i. homme de grant renon : pour venir en l’armee de Edouart le baron repasserent la mer a Brest deléz Herbon. 99
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Pour iceulx avantures que vous oÿ avéz eu par devant Dinant le grant siege levé et fait un parlement d’evesques et d’abbéz que un trayté seroit fait et ordonné et par les chevaliers de Bertaigne acordé, que un respit seroit fait et trés bien sellé du conte de Monfort qui tant fu redoubté, car de Charlon de Bloiz qui tant fu renommé que volunters se fust en touz biens ordonné car bien voussist avoir mains que raison assez et se fust a sa paix sans estre plus armé, ainsi fu l’actort fait et conirmé. Les Angloys se partirent, on les avoit mandé, en Angleterre vindrent, la ou estoit appresté la maniere du roy qui Edouart fu nommé. Je ne sçay par quel tour tellement fu amé car de France cuida bien estre couronné et fu jusques a Rains, ou bonne est la cité. Et fu en un yver que failly esté. En ce païs soufry assez de pouvreté, de fain et de mesaise ; il en moru assez car le grain qui estoit en la terre gicté desfouoient de terre, c’est ine verité. Le duc fu a Paris, ou des gens ot assez* ; 2644
p. les chevaliers chevaliers, chevaliers supprimé.
[33v]
- Prise de Bescherel adonc confondy Dieu ses anemis mortelz et touz sans cop ferir eurent des maulx assez.
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[34r]
Seigneurs, a icellui temps que je vous voys comptant que le roy d’Engleterre aloit France serchant, une tempeste vint sur leur ost descendent* de perres qui aloient en leur ost reversant si grandes, si horribles, si riches, si pesant que par ces perres cy, dont je vous voys comptant, estoient les pluseurs navréz et touz sanglant et s’aloient par tout mussant et cachant. Telle miracle it Jhesu le roy amant que touz les Engloys s’aloient esmaiant et disoient en l’ost chevaliers et sergens que Jhesu leur faisoit aucun signe apparent. Et en celle saison dont je vous voys parlant fut trayté la paix par .i. tel convenent que le roy d’Engleterre, Edouart dit devant, s’en devoit repayrer oultre la mer bruyant ou le bon roys Jehan avoit sejornement pour le plus loial roy et le plus suisant dequoy on peust parler en livre ne romant. Lors alerent Angloys arrieres repayrant. De cest estat ycy me tayray maintenent jusques une autrefoiz que je iray retornant, car ainçois que la paix fust faicte tant ne quant ot moult le duc a faire, se trouvons nous lisant, et mains contraires aussi qui lui furent nuysans, mais delivré en fu par le noble Bretrant avec mains chevaliers qui luy furent aidant. Vous avéz bien oÿ comment fu a Dynant et comment les Angloys s’alerent departent au mandement du roy qui les aloit mandant pour faire le voyage ou ne comquist neent. Et avec tout ce estoit tout apparent que le duc de Lencloistre, a l’ardi convenant,
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- Guerre de Bretagne ot une maladie moult vilaine et puant car le visage avoit d’un moult hydeux semblant, tout mesel et defait, dont le cuer ot dolant ; et pour ce s’en ala retournant. Le conte de Monfort et ses appartenans, contre Charles de Bloys fu la guerre menent et contre lui aloit fort Charles guerroient, mais adonc n’avoit pas la puissance si grant que l’autre avoit, se ce ne fust Bertrant qui en Bertaigne prinst mains chastelz fors et grant, ainsi comme vous oréz recorder si avant. Bertrant fu en Bertaigne la guerre gouvernant et le quens de Monfort l’aloit fort chalengent. Un chastel y avoit assez prés de Dynant : Bescherel ot nom, la l’estoient gardant pour cellui de Monfort mains Bertons bertonnant et mains Angloiz aussi qui moult furent nuysant au duc Charles de Bloys et au noble Bertrant. Et dela Bescherel avoit mains chastel grant : Pestiens y estoit, .i. chastel hault estant ; puis estoit Turgot qui prés fu de Dynant pluseurs en y avoit environ apparent de par Rogier David, .i. chevalier vaillant qui espousé avoit longtemps par avant une dame qui fu de lignage vaillent : mere fu au viconte de Rouhen possessant ; contre Charles de Bloiz estoit fort guerroiant.* 101
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Grant fu ceste guerre et moult empoestie car de deux seigneurs fu la terre chalengie. Bescherel en Bertaigne fu adonc assegie, un chastel fort et grant, de grant ancesserie. Le conte de Monfort y ot grant compaignie, le chastel chalengoit et la grant tour antie. 2717 2726
Trois lettres illisibles cancellées entre mains et chastel. m. essx empoestie, essx cancellé.
[34v]
- Prise de Bescherel Un chastellain y ot qui la chiere ot hardie, de par Charles de Bloys le gardoit par maistrie. Et le quens de Monfort y vint a grant maisnie, a mains bons chevaliers et de haute lignie : d’Engleterre y avoit mainte chevalierie, planté d’archers y ot d’Engleterre l’antye. Et Jehan de Chando, ou tant ot baronnie, bon chevalier estoit et plain de courtoisie de par le roy engloiz fu en celle partie. Le lieutenant du roy faisoit la chevauchie. Robert Canole y it mainte envaÿe qui moult greva François touz les jours de sa vie. Et Harpedenne y fu, ou moult ot de felonnie, si fu Gaultier Huet a la chiere estourdie.
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102 Au siege a Bescherel monde si grant avoit pour cellui de Monfort qui Bertaigne grevoit. Jehan de Beaumanoir qui point ne lui faloit au gentilz chastellain qui le chastel gardoit ont tenuz parlement es bailles tant droit. Le conte de Monfort durement lui prioit de rendre le chastel ; et si ainsi le faisoit, de faire courtoisie forment lui promectoit. Et dist le chastellain : « Vous savéz que j’ay droit car la terre est a moy et bien estre le doit. » Le chastellain lui dit de ce riens ne savoit, mais tant dist en la in, por ce qu’il les doubtoit, que a Charlon de Bloy la chose manderoit et se Charlon son seigneur bon secour n’amenoit le chastel fort et grant il lui delivreroit. Ainsi furent d’acort, chascun s’en departoit. Par devant le chastel cest ost demouroit. Et le bon chastellain un message prenoit, a Charlon l’envoia qui a Dinant estoit. Tant s’esploita qu’il vint a Charlon tout droit, 2750
Une séquence illisible de plusieurs lettres est cancellée entre tenuzet parlement.
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- Guerre de Bretagne de Dieu le salua qui tout scet et voit ; la lectre lui bailla et Charlon la lisoit. Quant il oÿ comment son chastellain mandoit, il en fu moult doulant, car il vit, s’il perdoit la tour de Bescherel qui trop perdre pouoit. Il jura fermement Jhesucrist qu’il creoit que s’il devoit mourir que secourir l’iroit. 103
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Le duc Charlon de Bloy ne se volu arrester. Il a fait chevaliers et soudoiers mander ; Olivier de Clisson ne volu mie oblier. Le vicomte de Rouhen y vint sans arrester, le seigneur de Laval volu avec lui aler, et Bertrant du Guesclin ne doit on oublier. Planté de chevaliers que je ne sçay nommer a Bescherel les volu Charlon de Bloy mener ; et tant mena ses gens et les it assembler qu’il n’avoit seulement que une eave a trepasser que l’on ne peüst moult bien la bataille livrer. Sur la rivere vont les pluseurs palestier.*. Et la vint une evesque pour la paix acorder, de l’un a l’autre aloit souvent parlamanter, et tant it les barons de l’un a l’autre aler qu’ilz furent a acort sans bataille ordonner que de ces deux seigneurs qui volent demander a tenir la duché et non de duc porter que l’on feroit le païs par acort descevrer et a chascun des deux tant de villes donner que chascun s’en porroit au departir louher et que chascun aussi se porroit duc nommer. Ainsi fu l’acort si comme je oÿ compter et de ce devoit on bons houstages livrer. Ce fu le bers Bertrant qui tant fait a louher, que fu plege du duc et lui it on aler et quatre chevaliers que avec lui vouloit mener. 2791
corr. : f. la paix p.
[35r]
- Bertrant otage des Anglais Et les Engloys dela, por le fait abreger, ainsi se departirent sans bataille donner. Et y ot certain jour qu’ilz irent deviser pour la paix acorder et les villes nommer.
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[35v]
Et aprés que tretouz furent departiz et chascun en son lieu arreres reverti, toute ceste ordonnance telle comme je vous dy ne fu tenue en riens, la jornee failli. Mais Bretan du Guesclin ot moult le cuer marry de ce qu’il ne s’armoit, c’on le tenoit ainsi. Le conte de Monfort l’avoit moult enhaÿ pour tant que maintefoiz lui avoit nuysy. Un chevalier angloys qu’il tenoit a ami avoit baillé Bretran et le tenoit o lui : Guillaume avoit nom, de Felicon norry. Cellui Guillaume tenoit Bertrant dont je vous dy non pas en sa prison ne en fermeure aussi, ains aloit a l’esbat de tout a son plaisir. Ensement fu longtemps que hauberc ne vesty dont moult se douloit et estoit moult marry le jour que a cecy fait son corps s’ensenty.*
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105 Moult fu dolant Bertrant et moult lui ennuya. Guillaume le sien maistre un jour en appella : « Sire, se dist Bretant, oiéz comme vous diray* : a quoy tient que je suis si longuement deça ? Or est passé le jour que chascun attorda de la paix ordonner, que chascun afya ; je croy que c’est une paix qui point ne se tiendra. Je vous prie pour Dieu qui le monde crea, que au conte de Monfort qui a vous me livra, vous lui veilléz mander si on me delivrera ou prendre a renson ou qu’il en adviendra. Plus ne veil demourer, trop fort ennuyé m’a.
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- Guerre de Bretagne S’il veult de mon argent, volunters en aura, mais je ne doys monnoie qui raison me fera. S’il en prent ranson, par Dieu qui me forma, ou l’un ou l’autre bien le me rendra ou j’aray tel chastel qui assez me vauldra. – Bretant, se dist Guillaume, or ne menasséz ja. Vous porréz bien tant dire que vostre chose empirra. – Sire, se dist Bretant, se Dieu plaist, non fera. Le conte de Monfort qui a vous me bailla, est, se croy, si loiaus que mon droit me tiendra. » Et Guillaume lui dist qu’il lui en parlera et pour l’amour Bertrant bien fort se penera tant qu’il se partira au païs tost qu’il porra, puis demoura un mois que riens n’en ordonna. Et aprés cellui temps Guillaume s’en ala pour delivrer Bertrant et la cause monstra. Le conte de Monfort qui Bertrant moult doubta, Guillaume Felicon en secret appella et lui dist que Bertrant jamais n’en partira, ainçois en Engleterre l’envoiera ou il aura en convent et jurer lui fera que jamais contre lui nul jour ne s’armera. Adont revint Guillaume, a Bretant le compta, et quant Bertrant l’oÿ, formant lui ennuya. 106
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Moult fu doulant Bretant quant la novelle entent. Guillaume en appella et lui dist sagement : « Sire, vous savéz bien et tout certainement que l’on me fait vilain tort ; vous savéz bien comment je me suis plege livré, par droit acordement, pour la paix bien tenir, voyre, par .i. convent, que on devoit avoir fait tout le demenement. Or est le jour passé et si n’ont fait neent et c’est tout failli sans nul alongement. Ce n’est mie par moy, on le scet vrayment, et voz pleges dela qui furent de voz gent
[36r]
- Retour à Guinguamp en sont touz aléz a vostre comandement. Je vous monstre mon droit bien veritablement – C’est bon, se dist Guillaume, mais par mon serement ne le puis amender ainsi ne autrement. Si me poyse pour vous, ce sachéz certainement ; mais vous atendréz, s’il vous vient a talent, et je croy que bien tost arons acordement bonne nouvelle aréz assez prochainement. – Voyre, se dist Bretant, se Jhesu s’i assent, je vouldroye bien qu’il venist certainement. »
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[36v]
En ce temps que Bertrant tenoit ainsi prison avec cellui Guillaume que l’on nomoit Felliton, il n’en pouoit issir ne venir a coron pour bellement parler, pour mectre a renson. Lors s’avisa Bertrant qui cuer ot de lÿon, qu’il s’en departiroit, voyre, voussist ou non. Un escuier avoit qui l’amoit de cuer bon, mener it deux chevaux en celle region, touz les meulx encelléz que trouver pouoit on, et puis les it mener a sa division si que l’on ne le savoit par nulle avisïon. Lors se leva Bretant et appella par nom un jeune enfant qui fu dedens la mansïon et lequel estoit ilz Guillaume Felleton. A cellui dist Bertrant coiement a bas son : « Alons, dist il, esbatre aus champs sur le sablon. Je en digneray trop meulx quant il sera saison. » Et l’enfant lui dist : « A Dieu beneïsson. »
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108 Ainsi issut Bertrant hors du chastel plenier avec le jeune enfant et le sien escuier et n’estoient que troys, comme j’oÿ noncier ; delays un vert boucquet s’aloient esbanier. et fu ou mois d’avril que l’on a passé l’iver
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- Guerre de Bretagne que les doulx oisillons font leur chant renforcier. Bertrant se deduysoit qui le cuer ot legier ; jusques a ses chevaux ne se vouloit detrier, cellui qui les ot mené lui sceu bien enseigner. Bertrant monta sur le cheval qu’il ama et tint chier* et puis dist a l’enfant : « Penséz du repayrer. Saluéz moy Guillaume, vostre pere le guerrier. Dictes lui que je voys en France guerroier. Le duc de Normendie m’en veil aler aider. J’ay esté sans raison un an et un yver sans nulle armeüre vestir ne encharger : je porroie moult bien oublier le mestier. » Quant l’enfant l’oÿ, si se prinst a lermoyer « A, Sire, dist il, vous me feréz tenser. – Beaux ilz, se dist Bertrant, ne vous chault d’esmaier. Se vostre pere vous fait ennuy ne destourber, et revenéz vers moy et penséz d’approcher : je vous donrray assez a boyre et a manger et armes et chevaux por vous bien festïer. » Dist a son escuier : « Or pensons de brocher. Alons nous en a Guimgamp, la me veil herbergier. » 109
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Or chevauche Bretrant, le preux, le hardy, si faitement s’en fu de prison departi dont Guillaume fu moult courroussé et marry et le quens de Monfort n’en fu pas rejoÿ. Tant chevaucha Bertrant, dont icy vous devis, que a Guimgamp est venu, en la ville s’est mis et la fu des bourjois moult forment conjoÿ. « A, Sire Bretrant, vous soiéz benys.* Nous avons bien mestier de vous, se m’est advis, car il y a chasteau des Angloys bien remplys qui touz les soirs s’en venent jusques a noz courtils ; a peines ousons nous issir de ce pourpris. Ilz nous vont ravissant vaches, moutons, brebis. 2920
trait de plume cancellé entre de et brocher.
[37r]
- Retour à Guinguamp Chastel de Pestien, c’est cellui qui nous fait pis. » Dolant en fu Bertrant quant il les a oÿ mais il avoit talent de partir du païs : devocion avoit d’aler droit a Paris pourtant que le duc, de roy de France ilz*, estoit des Navarroys et des Angloys haÿ : guerre forte et pesant a touz les antepris. Pourtant vouloit Bertrant qui tant fu poestiz, venir par dedens France por veoir les estripz.
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110 Ensement que Bertrant a Guimgamp sejorna harnoix it achapter et moult bien se monta. Il manda son avoir en Dinant par deça, pour aler en la guerre suisament s’arma. Mais je vous dy por tant, ne le mescreéz ja, aussi tost que Bretant sur son cheval monta et ses gens avec lui que mener en cuida, on lui ferma les portes et pons en leva. Et quant Bertrant le sceut, tout le sang lui mua. « Bonnes gens, se dist Bertrant, por Dieu, comment vous va ? Que vous ay je mesfait ? Lequel se plaindra ? Se je doys nulle riens, ce que on demanda, pour .i. tout seul denier .ii. on en baildra. Maudit soit il de Dieu, que le monde estora,* se je doy qui tantost ne le demandera. » Et ilz lui ont repondu : « A ce point ne tiendra : s’il vous fault de l’argent, on vous en baildra. Soixante mille livres tantost on vous quera. »
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111 « Sire, font les bourjois, ne vous esmaiéz mie : nous avons de l’argent a vostre commandie. Mais pour Dieu vous prions et la virge Marie que faire nous veilléz encontre les Angloys aÿe. Alons a Pestien, por Dieu, on vous en prie, assaillir le chastel qui ainsi nous cuvrie.
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- Guerre de Bretagne Aÿ, Homme de Dieu, or ne nous failléz mie. Chascun de nous du bon du cuer vous supplie tant se ient en vous et en vostre seignorie et en l’ehur de vous et de vostre maistrie que si vous y venéz en nostre compaignie que les Angloys seront mis a grant aatie. » Quant Bertrant les oÿ, le cuer lui commaince a rire.* Homme de Dieu fu la nommé plus d’une fye, Et tant le va prisant toute la compaignie que Bertrant s’en revint a son harbergerie. Dedens fu toute pleine la rue et la chaussie, l’un a l’autre dit : « Doulce virge Marie, Bertrant est demouré, Dieu lui doint bonne vie. » 112
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Ensuyvant est Bertrant a Guimgamp demouré et a dit aus bourjois : « Soiéz asseüréz que avec vous demouray, puis que vous le vouléz. Faictes appariller voz tentes et vos trefz et bons arbalestriers, ce que vous en auréz, et vitailles, char, pain et bons bacons saléz et cervoise et vins et vous en delivréz. A qui est le chasteau que vous me demandéz ? Qui est le chastellain qui tant est desiré ? – Sire, font les bourjois, c’est un larron privé, de par Rogier David y est cellui demouré, un des faulx chevaliers de toute roiautés* : a une dame c’est par force marié, la vicontesse, voir, de Rohen la freté ; mais le sire est mort, si est un iz demouré, viconte de Rouhen est de chascun nommé. Or a ycy troys chasteaux cellui chevalier doubté, contre Charlon de Bloiz les tient clos et ferméz ; Bestien le premier qui moult nous a grevé, et puis y est Turgot, un chasteau hault levé : la est un chastellain qui d’Angleterre est né,
[37v]
- Prise de Pestien le plus faulx crestien qui oncques fu crestienné car il ne croit en Dieu ne en toutes ses bontés neant plus que un Sarrazin ou un juif desreé ; hommes, femmes et enfans quant il les a trouvé, puis qu’ilz sont a Charlon qui est nostre advohé, il leur trenche les poins, les piéz et le nés. – Ha, Dieu, se dist Bertrant, qu’est ce que dit avéz ? Par la foy que je doy a Dieu qui fu penné, il sera, se je puis, pendu et traÿné. »
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113 [38r]
Quant Bertrant oÿ les bourjois de Guimgamp, il leur a dit : « Seigneurs, aléz vous apprestant. Je vous delivreray d’icelles gens tyrant. » Lors se vont les bourjois de tout apparillant ; quant furent appresté de tout a leur commant, de Guimgamp sont yssuz a la trompe sonnant et furent bien six milles bonnes gens combatans, a cheval et a pié, arbalestriers devant, la menant le charroys, bien le vont convoiant. La peüst on veoir maint escuz luisant et maintes fortes lances dont les fers trenchant ; sonnerent trompes haultement et olifant, vers Pestien s’en vont de le prendre desirant. Quant ceulx de Pestïen ont sceü l’apparant, aus armes sont couruz les petiz et les grans. Le chastellain va bien sa besoigne ordennant, il ne redoubte assault .i. denier vaillant. Une espie s’en vint droit au chastel courant, au chastellain s’en vint et lui dist en oyant : « Sire, dist l’espie, véz cy ceulx de Guimgamp. Ilz amenent avec eulx ce deable Bertrant ; c’est cellui du Guesclin qui du pouoir a tant. » Oÿ le chastellain, si en ot le cuer doulant. Il a dit a l’espie : « Me va tu vray comptant ? – Oïl, dist le vallet, par Dieu le tout puissant. » 3002
p. faulx p crestien q., p cancellé.
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- Guerre de Bretagne Et le chastellain dist : « Ço est il apparant que nous aurons assault horrible, fort et grant oncques en nostre vie ne en tout nostre vivant n’eüsmes aussi ier ne si fort ressongnant. » 114
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Le chastellain fu moult dolant et courroussé quant il sceu que Bertrant qui tant fu redoubté, avoit ceulx de Guimgamp et qu’il en estoit chief. Un mercredi matin, tout de vray le sachéz, fu le chasteau assis et prés approchiéz. Bertrant s’en vint aus baillez, la s’est adrecé, haultement s’escria le chevalier prisé : « Ou est vostre chastellain, s’est il point descouchié ? » Se dist le chastellain qui la fu appoyé : « Sire Bertrant, dist il, par ma foy, bien veignéz. Sire, s’il vous plaisoit, ou chastel entreroiéz ; si bevroyéz des vins de nouveaux et des vieulx. –Chastellain, dist Bertrant, bien le vouldroiéz, je croy que se je en bevoye et si vous me tenoiéz que mon escot seroit suisamment paié. » Se dist le chastellain : « Je en seroie bien lié. – Or toust, se dist Bertrant, ceste maison vuidéz, mectéz en la main Charles, tenir en doit les iefz. Je le vous dy pour vray, tout asseur en soiéz que vous en seréz dolans si vous n’y obeisséz. Se par force vous prens et je soie logié, vous en seréz pendu, fait en est le marchié. » Se dist le chastellain : « Je croy ne dignerréz. A, sire Bertrant, je suys tout esmayé. Vous semble il que ce lieu qui est si enforcé soit de rendre et livrer si tost appareillé ? Jamais je ne seroie amé ne prisé quant esté y auréz tout un an logié, si ne seroit il pas de vous rendre appointié. Penséz de la saillir, sur voz gardes soiéz ou trayre vous feray, si vous ne vous retraiéz.
[38v]
- Prise de Pestien Onques en mon vivant ne fu cy adveillé. Et aléz a Guimgamp, si vous y remusséz. Ne croiéz ces villains qui vous ont congiéz. – Chastellain, dist Bertrant, vous seréz deslogié ains que passe trois jours, tout mal gré qu’en aiéz. »
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[39r]
Lors Bertrant du Guesclin est arrere retorné. La nuyt se mist devant le vassal repposé. Et fu au lendemain le grant assault cryé. Quant il vint au matin que le souleil fu levé, les trompectes sonnerent, dont il y ot assez ; aus armes vont courant et laisserent leurs tréz et les arbalestriers sont moult bien ordonnéz, d’escu et de pavoys sont moult bien aornéz. Un bocquet y ot la qui fu grant et ramé, plus de mille varlés et cent chers acteléz y amena Bertrant qui preux fu et sené. Grant fu le charpentiz que on faisoit a touz lieux* : charretes, charriotz, mains en y ot trousséz. Et les arbalestriers furent prés des fousséz. Dont commainça le trait qui bien fu adoubé, eschelles de Guimgamp amenerent assez ; de tout ce pouoit estre le chastel grevé it amener Bertrant qui tant fu honnouré, que riens n’en oublia, il en savoit assez. Et le chastellain fu sur les creneaux monté. Or vous diray comment il estoit ordonné.
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116 Ceulx du chastel avoient mis dessus les crenaux en vingt lieux environ cuves et tonneaux, l’une plaine de terre et l’autre de chaillotz, et avoient aussi dessus mis des rateaux et en petis possons estoit la vive chaux. Droit a l’eure de prime commainça l’aussault, de trayre et de gitter fu moult aspre et chault
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- Guerre de Bretagne et dedens et dehors eurent moult de travailz. Les archers qui traoient par dessus les murailz irent aus gens Bertrant a ce jour moult de maulx. Bertrant fu bien armé, aussi bien fu son cheval, et vait de renc en renc regarder les vassaulx, va haultement crient aux assaillans loiaux : « Or avant, bonnes gens, soiéz iers et esmaux. Assailléz ierement et sera vostre houstau, en nuyt y logeray, ains que conge le jour. » Jusques aus bailles vint Bertrant le naturau d’une cugnie iert sus les bailles roiaux et lé it detrenchier et aporter marteaux. Onques, se croy, ne fu veü si grant assault. 117
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Tout droit a Pestïen fu l’assault mortel ; moult y fu maintenu car bien furent osé celles gens de Guimguamp et moult desmesuré, moult mectoient grant peine de remplir les fosséz. Et ceulx qui sont lassus defendent a touz lieux : testes y ot navrees, jambes et brasz casséz, car bien s’i desfendirent les Angloiz dont oiéz. Les assaillans crioient « Guesclin. » en touz lieux et les autres « Monfort. » , de defendre apprestéz. D’arbres et de boys et de buissons raméz ont les fers assaillans remplis les grans fosséz : en deux lieux ou en plus est des mejour rasé. A la porte est venu Bertrant l’alosé et crioit hault « Guesclin. Or toust lassus montéz. Il convient que je soie la dedens houstelé. » Eschielles ont dreciez comme iers et oséz. La veïsséz monter celles gens bateléz et porter sur leurs chiefz grans huys pendéz*, fenestres et escuz qui estoient nervéz* pour la doubte des perres qu’ilz gictent a tout léz. Ceulx qui furent dedens furent espaontéz, aus creneaux ne se ousoient mostrer, se croiéz,
[39v]
- Prise de Pestien pour le trait qui venoit qui doit estre doubté. Le chastellain estoit en un danjon monté et regarde assaillir ces bourjois aloséz qui d’assaillir estoient tellement exchauféz qu’ilz ne doubtoient la mort la montance de .ii. dex. « Dieu, dist le chastellain, véz nous cy atrappé. Puis que Bertrant est cy, je suis deshonnouré. Il a donné tel cuer a ces villains malfaiz qu’ils entreront ceens et s’en aie mal gré. Certes, se je suis prins de ces vilains lardéz, pour or ne pour argent ne seroie respité que je ne soie tost aus fourches ataché. Bien doys haïr Bertrant du Guesclin nommé quant il a ces vilains par deça amenéz. »
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118 L’assault fu moult grant et forte l’envaÿe, mains abatu y ot, maintes testes froissies : La porte par devant fu arse et deppecie, la barbequanne estoit tout aval abaissie ; ceulx du chastel bien veoient aler sur la chaussie. Bertrant y it venir, qu’il ne se tarda mie, bien .xx. arbalestriers touz a une fye tant que ceulx de dedens qui la chere ont marrie, n’osoient approcher a nostre chevalerie. Et la furent maintes eschielles encontremont drecee, bien cincquante vallés monterent par maistrie. La ot un escuiers qui fu de Normendie, a Bertrant le vassal moult haultement escrie : « Sire, vostre penon, pour Dieu, je vous en prie, je le mectray ja en si bonne establie que l’on le porra veoir, se Deu me doint vie. » Je vous ay en convent que cellui n’en failly mye car Bertrant lui bailla et lui tint compaignie. Malgré ceulx de dedens et tout leur aÿe fu dessus les creneaux son enseigne drecye. 3141
corr. d’après P : et regarder a.
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- Guerre de Bretagne La monterent noz gens et font telle estourmie que touz vont criant « Forteresse gaignie. » La barbequanne fu encontremont sachie. 119
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Quant ceulx du chastel virent que la porte devant estoient noz gens ierement assaillant et que la barbequanne qui fu de fer poysant, estoit levee amont, lors viennent acourant. Le chastellain vint une lance tenent, vint a un escuier qui estoit o Bertrant et la le vint ferir tellement en boutant que a la terre cheü jouxte la porte gisant. Et Bertrant lui crie haultement en oyant : « Chastellain, vostre in va de prés approchant. » Mais le chastellain ot le cuer si desirant de garder le chastel en son corps defendant que d’une lance va noz gens assaillant ; un en a abatu tellement en presant que sa lance brisa, dont le cuer ot doulant ; trait une espie de guerre ague fu et trenchant, et vint a un bourjois qui estoit de Guimgamp : tellement lui bouta par le ventre en pressant que tout oultre le corps lui va le fer passant ; puis se retrait dedens et se va avisant que une charrete avoit entré .i. po avant ; il la print a deux mains ainsi que en charriant et la mist au travers de la porte estandant que ceulx de par deça ne fussent trepassent. Un souldoier lui dist haultement en oyant : « Chastellain, venéz ça et parléz a Bertrant. Il vous mande que a lui parléz incontinent. » Se dist le chastellain : « Je le voys desirant. » 120
3205
Le chastellain s’en vint que point ne se destrie. Et Bertrant commanda que on cesse l’escremie
[40r]
- Prise de Pestien -
[40v]
tant qu’il ait sa volunté au chastellain dicte. Et on lui acorda, que nul ne le destrie. « Chastellain, dist Bertrant, beau seigneur, je vous prie que le chastel rendéz, ains que vous octie, car j’ay Dieu en convent et a sainte Marie, se par force vous prens et toute vostre maignie qu’il n’y aura cellui qui n’ait la teste trenchie ; touz y morréz tantost, je le vous signe, fors femmes et enfans, prestres et la clergie ; eschapper n’en pouéz, vostre mort est jugie. – Se, dist le chastellain, faire je m’y octroie par tel convenant que soit sauve ma vie. » Tantost fussent d’acort, comme l’istoire crie, mais les gentilz bourjois touz d’une compaignie sont venuz a Bertrant qui la chiere ot hardie. « Sire, font les bourjois, tout Guimgamp vous prie que cellui faulx chastellain, ou tant a de tricherie, soit mort de male mort a grande villennie car tant nous a grevé, n’est nul qui le vous dye ; tant de maisons nous a le traïtre exillie, raviz beufz, moutons et maintes brebiz mangie, a l’un coppe le pié ou la teste ot trenchie : on ne leur porroit pas faire de la moitie ce qu’ilz ont deservi en icelle partie. – Seigneurs, se dist Bertrant, ma volunté s’octroye qu’il n’aie garde de mort, telle est nostre estudie car c’est un homme d’armes plain de grant courtoisie ; pitié seroit par Dieu d’une char si hardie si elle mouroit villement et fust a dueil exillie. » Et quant le chastellain a la parolle oÿe, volunters leur eüst leur parolle merie. Et Bertrant lui a dit par bonne compaignie : « Chastellain, tenéz vous terre ne seignorie du conte de Monfort ne de sa baronnie ? – Nenny, sire, dist il, je n’en tiens une alye. – Vassal, se dist Bertrant et je vous certiie 3234
e. mouroit d villement e., d cancellée.
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- Guerre de Bretagne -
que vous tiendréz de moy et mon corps vous en prie. Et plus ne soiéz de la vostre partie, de terres vous donrray, assez je vous afye. » Se dist le chastellain : « Par la virge saintie, jamais encontre vous ne sera mon espee sachie, ainçoys vous serviray a l’espee fourbie tant que vous vivréz et que j’aye la vie. » Lors lui tendy les clefz et se mist en sa baillie et Bertrant entra dedens et o lui sa baronnie. 121
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Or est prins le chastel qui si trés fort estoit. Bertrant y vint logier et ceulx qu’il vouloit, la nuyt y sejorna, bonne vie menoit. Une espie s’en va a Turgot tout droit. Un chastellain y ot qui d’Engleterre estoit, bien sceu de Pestien comment on l’assailloit. Et l’espie lui dist aussi tost qu’il le voit de l’assault qui fu fait, tout lui recordoit, du chastel qui fu prins, tout lui devisoit. Quant Thomelin l’oÿ, a poy ne soy enragoit ; or sceu de verité que son chastel perdroit. Quinze ans l’avoit gardé que nul ne le grevoit. Mais ou livre de Brut, la ou souvent lysoit, qui fu des fais Merlin, des sors qu’il sortissoit, avoit trouvé pieça et forment si fyoit, mais trouvé avoit es sors que un chevalier viendroit qui dedens son escu un aigle porteroit et qui de la petite Bertaigne naistroit ; de la doit venir cellui qui redoubté seroit en toutes fortes places la ou se mectroit. Encores dit Merlin, ou temps qu’il sortissoit, que ce chevalier si ierement regneroit en toutes les parties ou il habiteroit et que de la nature d’un oysel porteroit que l’on appelle estournel, que l’on prent o un ret.
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- Prise de Pestien -
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[41v]
« Seigneurs, dist Thomelin, le chastellain puissant, né est l’estornel o naturé portans ; ce me donne a entendre que c’est le bers Bertrant car quant l’estourneau qui est oyseau volant, est avec les oyseaux dont joliz est le chant sur arbres et boyssons telz qu’ilz sont sur les champs, aussi tost qu’il s’esmeut et qu’il est esbatant touz les autres oyseaux, jeunes, rouges et blans si s’en vont aprés lui, nul n’y est arrestant. Ainsi est Bertrant qui tant est souisant, aussi tost qu’il assault, chascun est assaillant, aussi tost qu’il chemine, chascun est acordant. Encores est estornel autrement naturant : quant en un columbier veult estre repayrant, aussi tost qu’il y entre, nul n’y est demourant, n’y demeure coulon qui ne s’en aille volant, le columbier lui est tout seul demourant. Aussi est de Guesclin, le chevalier vaillant, aussi tost qu’il assault .i. chastel souisant tantost lui est livré, ains qu’il soit departant. Ains n’assailli chastel il a passé sept ans qu’il n’y fust par dedens a son vouloir logent. Or vient l’estourneau dont je suys recordant querir mon chastel que j’ay gardé long temps. »
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123 « Ha, dist le chastellain, or vient l’estourneau qui doit estre de preux conte, frans et loiau ; ou il se mectra sera tousjours aigneau et portera la leur sur touz autre oyseaux et encores est sorty sur lui mains faiz roiaux. Or faictes que garny soit le nostre chasteau et portéz grosses peres et empléz tonneaux, parfondir les fousséz et apporter chaillotz, arbalestres refaire et enserrer carreaux. Si ne y demourons pas jusques au caresmau. »
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- Guerre de Bretagne -
Adont it esbahir veillars et juvenceaux et de ceste raison fu parlement entreulx. 124
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Ains ne demoura guesres, ce sachéz sans cuider, que Bertrant et ses gens se vindrent touz loger par devant le chastel et leurs tentes drecier. Thomelin fu lassus et o lui mains archiers, regarde l’ost Bertrant et mains arbalestriers, son chastel regreta qu’il lui fauldra laisser. Un message envoia a son seigneur Rogier. Rogier Davoit ot nom et avoit a moiller la mere du viconte qui Rouhen doit jugier. Cellui manda a Thommelin son chastel guerroier, qu’il tenist le chastel a loy de chevalier et qu’il iroit au conte de Monfort exploittier et dire que Bertrant lui fait tel destourbier. Encores le cuidoit le conte avoir a prisonner avec Felleton a qui il l’ot fait bailler ; mais quant il sceu qu’il fu yssu de son dangier, il en fu moult doulant, n’y ot que corrousser. A Felleton dist .i. veillain reprouver qu’il en avoit receu mains denier a un cousin Canole que l’on appeloit Gaultier, le sournom de Huet, l’ay oÿ tesmoigner. Icellui Galtier Huet, un trés bon chevalier, haoit Guillaume moult fort et le vouloit despriser et l’acusa au conte, a qui il fu souldoyer, et qu’il avoit Bertrant fait de lui deslogier, dont Guillaume fu prins comme traïte lanier et lui vouloit le duc faire le chef trenchier. On le dist a Bertrant, le noble guerroier, mais Bertrant envoia au duc un messagier ; et fu le chastellain qui tant ot le cuer ier, qui rendi Pestien, le fort chastel plenier ; et a dit qu’il ira le message nuncier 3331
corr. d’après P : et un cousin c.
[42r]
- Mariage de Bertrant et Thiphaine pour cellui delivrer qui en avoit mestier. Et dist au chastellain : « Il vous fault chevauchier au conte le fel Huet, que l’on appeloit Gaultier. Mon gage lui vouldray par devant lui bailler et si le prouveray a l’espee d’acier que je m’en suys parti comme loial chevalier et sans ayde donner et sans moy convoier, comme cellui que on tenoit a grant tort a dangier. » Se dist le chastellain : « Or n’en veilléz songier, car je lui sauray bien vostre message nuncier. »
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[42v]
Seigneurs, cellui chastellain droit a Brest s’en ala ; le conte de Monfort qui adont duc s’appella, et autres chevaliers a plenté y trouva. Guillaume Felleton estoit delivre ja car bien avoit prouvé comme Bertrant s’en ala. Adont le chastellain les barons appella, le mandement Bertrant leur dist et devisa ; le conte de Monfort adonc en appella : « Amis, vous me diréz a Bertrant par dela qu’il est mon prisonnier partout ou il sera. » Guillaume Felleton en estant se leva et dist au chevalier si tost qu’il l’escouta : « Vous diréz a Bertrant que vers moy mespris a car il m’avoit promis et si le m’afya, qu’il ne partiroit ja de nous au lieu deça fors que par mon congié, ainsi le me jura ; mais ja encontre moy ne s’en combatra, ou palays a Paris droiture m’en fera et l’appelleray quant le point en sera. » Et le chevalier faulx : « Ou il s’en defendra. » Adont s’en departy, a Bertrant retourna au siege du chastel, ou il appareilla pour faire un grant assault, car moult le desira. Pour aler a Paris ou il ne fu pieça, Guillaume Felleton dit qu’il appellera
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- Guerre de Bretagne -
car il fu moult doulant de ce qu’il l’approcha pour le sien serement, ainsi lui reprocha. A ceulx de Guimgamp dist : « Beaux seigneurs, venéz ça. Véz cy un four chastel et fort lieu grant antour a il nous convient viser comment on l’avra. » 126
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« Seigneurs, se dist Bertrant le gentilz et le bel,* véz cy un fort chastel, il nous convient viser comment nous le puissons avoir et conquester. Je voys que ceulx de dedens le vouldront bien garder. » Et ilz ont respondu : « Il nous en fault pener. » Dont irent tout partout venir et assembler engins, arbalestriers, ce que on pouoit trouver, et furent bien .xx. milles qui les en sceu compter. Et tant y fu Bertrant, ce sachiéz sans doubter, que par force le prist et volu dedens entrer. Et quant le chastellain vit qu’il ne peu tenser, le rendy a Bertrant et lui dist hault et cler : « Sire, Bertrant, dist il, veilléz moy escouter. Bien et hardiement pouéz par tout aler car je sçay bien comment vostre corps doit reigner et le sçay par Merlin qui de vous sceu parler car nul plus heureux ne porroit on trouver. – Amis, se dist Bertrant, nul ne s’i doit fyer car il est au dessus qui tout puet amander. » 127
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Aprés ce que Bertrant, o la chiere hardie, ot conquis le chastel dont je vous signiie, s’en vint par devers Charles, que Jhesu benye, cellui que on dit de Bloiz, dont l’ame est saintie, qui lui it grant honneur et grande courtoisie : a Dinant lui donna une dame jolye, la plus sage qui fust en France la garnie et fu dame gentise et de noble lignie ; et celle print Bertrant pour la grant seignorie que avenir lui devoit touz les temps de sa vie.
- Mariage de Bertrant et Thiphaine -
[43r]
Et elle avoit trouvé par droite astronomie que Bertrant passeroit leur de chevalerie. Et ne fu pas huyt jour dedens sa compaignie quant elle lui compta sa force et sa maistrie « Monseigneur, savéz vous, se lui dist, dequoy vous prie ? Que mon conseil croiéz, ou vous feréz folie. » La lui aprint comment en bataille adrecie, il se combatroit a l’espee fourbie et les jours heureux lui dist et certiie. Et dit : « Tant que feréz ce que je signiie, vous ne seréz vaincu ne vostre gent desconie. » Mais Bertrant le tenoit tout a truferie et depuis en trouva la besoigne averie quant par devant Alroy furent sa gent desconie car adont i fu prins, comme l’histoire crye, parce qu’il ne it pas le sen de sa partie. Seigneurs, or escoutéz, que Dieu vous benye, en ce temps ot respit de chascune partie en Bretaigne la grant, une terre jolye. Mais une guerre avoit en France commencie par l’ennemy d’enfer qui se mesle a la fye* entre les haulz barons qui sont d’une lignie. A icellui temps avoit par devers Normendie une guerre mortelle, pleine de grant envie, qui greva France, moult en fu adommagie car le roy navarroys, comme l’istoyre crie, avoit moult de chasteaux en la sienne baillie. En Normendie, droit je vous acertiie, il y avoit Evreux, une cité garnie, et fort chastel qui fu de veille encesserie, et Chier Bourc aussi qui sur mer est bastie, et Bretueil ensuyvent, que lui faisoit aÿe, si fu Ponteau de Mer qui ne lui failly mie.
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128 En Normendie avoit mains chasteaux souisant. Icellui roy de Navarre, dont je vous voys contant,
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- Guerre de Bretagne -
de guerre fu au roy, ou temps que je vous chant, et si grande haÿne et meschief apparent que mains riches chasteaux bien fors et bien sceant en furent abatuz a la terre gisant car si chastel estoient en France martissant. Et adonc guerrioit le pere son enfant, aussi faisoient freres et les appartenant. Environ Rouhen aloit on fort pillant ; D’une partie et d’autre y avoit d’Angloys tant, avec les Navarroys dont j’ay parlé devant, que l’on n’osoit yssir qui n’avoit sauf alant . A Mante et a Meulent estoient repayrant Engloys et Navarroys au temps que vous chant. Et Bertrant si aloit de Paris approuchant, la ou en parlement ala entreprenant un plait contre Guillaume de Felleton le grant, car Guillaume aloit sur a Bretrant mectant* que tort et fausement ala prison brisant. Bertrant disoit que non, bien s’en va excusant ; excuser se vouloit sur la forme d’un champ et disoit que Guillaume iroit en champ prouvant car onques chose ne it dont il s’alast parjurant ne dequoy envers lui il alast mesprenant. Mais Guillaume aloit trop Bertrant redoubtant, ne se y combatist pour d’or in son pesant, ainçoys en parlement va un procés levant. Et en ce temps, seigneurs, dont je vous voys comptant, Charles, le ilz du roy, duc du païs normant, oÿ unes nouvelles qui poy lui vont desplaisant : et ce fu de Melun qui sur Senne est sceant, la ou Navarroys ot et Angloys ensuyvant, qui gastent le païs et derere et devant ; et si aloient touz les pas de Saine si gardent qu’ilz aloient Paris malement guerroient. 129 Le duc de Normendie manda de ses amis
[43v]
- Prise de Meulun -
[44r]
pour aler a Melun ou il estoit haÿ. A grant foison de gens yssi hors de Paris ; arbalestriers y ot, ne sçay .vc. ou six, et d’autre chevaliers et escuiers gentilz, mais Bertrant du Guesclin n’y est mie failly. Et tant ala le duc avec ses subgitz qu’il vint droit a Melun avec ses amis. En la premiere ville s’est le noble duc mis ; mais l’autre cité, ou il avoit murs bis, fu moult contraire au duc, dont ilz valoient pis. Le baron de Mareuil qui tant estoit hardy ot moult de souldoiers en compaignie ; et la reigne Blanche, une dame gentilz, si creoit son conseil et ses faiz et ses diz et it mander au duc que dela fu party car elle garderoit le bon chastel de pris car a sien le tenoit et ot tenu tousdiz. Mais le conseil au duc eurent adont advis* qu’il ne s’en partiroit tant qu’il y seroit mis et lui it mander le fors duc poestiz que lendemain matin les auroit assailly. Le baron de n’en donnast deux espis Mareuil* car le lieu estoit fort et si estoit bien garny et si avoit bonnes gens et d’armes bien apris. De cest assault, seigneurs, dont a dire ay pris, ce n’est tant seulement, pour vray je le vous dy, pour ravoir et dire par advis les places et les lieux ou Bertrant le hardy monstra sa grant prouesce, dont il estoit emply, ainsi comme vous orréz, si longuement suys vy.
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130 Le duc de Normendie it lors appareiller pour livrer a Melun un grant assault pleinier a ceulx de Saint Maclo pour les faire essillier ou le lieu estoit fort de devant et derrier*. 3509
p. ravoir ta et d., ta cancellé.
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- Guerre de Bretagne -
Le lendemain se sont rengiéz en my le sablonnier : par devant furent mis les bons arbalestrier et si avoient pavoix dont ilz se vont targier. Et ceulx de par dedens s’aloient appointier. La commainça assault merveilleux et plenier. Le bascon de Marueil et touz ses souldoyer estoient sur les murs sans point de resongnier ; pierres gictent aval pour noz gens mehaigner et ilz traient carreaux comme bons arbalestriers : plus dru volent carreaux que la pluye en yver. Le bascon de Marueil n’y volu riens espargnier ; pierres gictoient aval a loy de bon ouvrier, n’est homme s’il le voit qu’il ne face esmaier. et Bertrant du Guesclin apparceu le chevalier : « A, Dieu, se dist Bertrant, beau pere droiturer, oncques n’eu tel talent de boyre ne mangier que j’ay au cur desir de cellui approchier ; voulenters lui feroie de ma dague essaier. » 131
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A Melun ot assault qui fort fut maintenu de tirer fermement, de gister pierres jus. Es fosséz vont entrent bien .iiii. milles ou plus ; eschielles vont portant pour appouer aus murs, mais tel y va montant qui en fu irascuz. Le bascon de Marueil, ou grant fu la vertuz, disoit : « Traiéz en la, ou vous estez perduz. » Mais l’assault fu grant et moult bien maintenu. Droit a une fenestre appouhé fu le duc* et la foy complaignoit au vray Dieu de lassus : « Or est bien le roiaume de France confunduz. Or est le roy mon pere, le noble, le cremus, par dedens Engleterre prisonnier retenu ou servage du roy qui nous est maloustru, qui deüst par raison bien estre a nous tenu. Batre le deüssons et il nous a batu, et avec ce a noz chasteaux toluz
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- Prise de Meulun et y tint ses Anglois, dont je suis bien confus. Et ceulx qui me deüssent estre amis esleuz a l’encontre de moy sont si fort esmeüz que ne sçay ou aler ; pleüst au roy Jhesus que j’en fusse vengé et venu au dessus, et mon pere le roy fust deça revenu, et je fusse au gré Dieu hors de ce monde yssu. »
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132 Ensuyvent dist le duc, ou il n’ot qu’aïrer. Assaillir voit ses gens, mehaigner et tuer, et Françoys tout autour lancer, trayre et berter. Moult volunters alassent prés des murs massonner mais les pierres d’en hault les irent reculer. Et Bertrant du Guesclin les prinst a regarder, au mur ala seoir, bien le cuide empirer, mais ce fu pour nyent, on n’y pourroit miner. le bascon de Mareuil a prins a regarder, qui faisoit noz gens forment espaonter. « A, Dieu, se dist Bertrant, te pourray je trouver ? Par la foy que je doy a Jhesucrist porter, ou je feray mon corps tellement atourner que mires n’y pourra aider ne conforter, ou je iray aus creneaux teste a teste parler. »
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133 Lors Bertrant du Guesclin .i. pou se retorna, une eschielle choysi, a sa main la dreça, tost et isnellement sur son col la posa et se it tant aider et si fort se penna qu’il est venu au mur ou l’eschielle adjousta et a prins un escu dont il se couvoyta.* Et quant le duc le vit, a ses gens demanda : « Qui est, ce dist le duc qui ainsi monte la ? » Un chevalier lui dist : « Oÿ avéz pieça de Bertant de Guesclin, ou tant de prouesce a, 3583
de tant de G., ber suscrit.
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- Guerre de Bretagne -
qui es faiz de Bretaigne tant de peine endura pour vostre cousin Charles qui demeure dela ? – Est il ce, dist le duc, pour Dieu qui tout crea ? – Ouyl, sire. Par Dieu, oncques tel ne regna. – Par mon chief, dist le duc, bon chevalier y a. » 134
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Lors Bertrant du Guesclin ne s’i est arresté, sur l’eschielle monta, n’en fu espaonté,. Le bascon de Mareul s’en est garde donné, il a dit a ses gens, dont il avoit assez : « Beaux seigneurs, faictes tost et ne vous arrestéz : une piere pesant si endroit me apportéz, toute la plus poysant que trouver porréz. » Et ilz ont respondu : « Assez bresment l’auréz. » Adonc lui apporterent, ainsi comme vous orréz. Le bascon de Mareuil la prinst en .ii. lieux : un homme fust de la porter a merveilles lasser. A l’endroit de Bertrant s’en est tantost alé qui prés des creneaux fu par sa force monté mais dessus son escu fu le cop avalé par tel convenant que dire me orréz que l’escu lui fu a la terre porté et sur le bacinet lui est le cop alé, dont il fu tellement a celle heure estonné qu’il a a cheoir les eschelons forscontéz. Oncques ne s’arresta, si s’est jus trouvé ; une main ot en l’eave qui descent des fosséz, et la teste mesmes si en estoit bien prés ; tout ainsi comme un mort ne s’est remué. L’un le tient a mort, l’autre s’est escrié : « Aléz tost relever ce noble chevalier. » Lors s’en va vers Bertrant .i. escuier senné, hors de l’eave le trait, bien voit qu’il est pasmé et qu’il n’estoit pas mort, ains estoit estonné. « Pour Dieu, mes bonnes gens, disoit il, ça venéz et ce bon homme d’armes aujourduy secouréz
[45r]
- Prise de Meulun car, certes, s’il est mort, ce sera grant pitié. » Le duc de Normendie si en est moult guesmenté « A, Dieu, dist le duc, mon homme me sauvéz. »
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[45v]
Bertrant fu a la terre qui nul mot ne sonna, il ne sceu ou il fu n’y n’oÿ ne ne parla. Adont fu apporté, bien y fu qui lui aida, et par dedens un iens illec on le bouta,* tout couvert fu de iens et illec demoura. Et l’assault si fu grant jusques a ce qu’il ina. Et quant il fu iné, lors Bertrant se leva et quant il fu levé, entour lui regarda et aus gens d’armes dist : « Beaux seigneurs, comment va ? Avéz vous prins le fort ? L’ont rendu ceulx dela ? – Nenny, dient les Françoys, mal ait qui le porta ! On a mandé au duc que l’on lui delivrera mais qu’il s’en soit alé a Paris par dela. – Par foy, se dist Bertrant, je croy que non fera. Bon seroit d’assaillir, mal ait qui s’en ira. »
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136 Seigneurs, a icellui temps dont je foys mencion s’en revint a Paris le duc celle saison. Et la reÿne Blanche par l’actort au bascon rendi Melun au duc, comme dit la chanson, et le mist en sa main, il y ot bien raison. Le duc it moult grant joye a Bertrant, se dit on. Cappitaine le it adonc de Pontorson pourtant que en Normendie y avoit a foison de ennemis au duc qui Charles ot non, car le Castal de Buc, un moult hardy baron, avec Jehan Jouel, Saquanville Pieron et d’autre chevaliers y ot a grant foyson qui furent a Evreux et ailleurs environ. Angloiz et Navarroys assez y trouvast on a Roleboyse, a Mante et a Meulent en son
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- Guerre de Bretagne -
qui encontre le duc eurent discencïon et tenoient le pas de cy jusques a Vernon ; le païs y estoit en grant pardicion. En tout Beau Voysin Engloys y trouvast on, aussi a Creil, tout droit qui sur Oyse dit on. Le duc de Normendie qui Charles ot non, mandoit par les cités de France le royon que on lui voussist aider, car il en a beson a Tournay, a Arras, a Myeulx et a Noyon. Par devers Malconseil, un chastel fort et bon, alerent ceulx Pictars a force et a bandon. Et les Normans aussi a un autre coron, vindrent a Roleboyse sans point d’arresteson, et vers Mante ensuyvent et Moulent environ. Se dire vous vouloye toute la chose en son, les assaulx merveilleux et la contencïon, je y mectroie trop ; mais nous recorderon les lieux la ou Bertrant se trouva proudon. 137
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De Rouhen la cité yssi moult bonnes gens et furent bien dix milles selon mon escient ; par devant Roleboyse vindrent suisamment, en bateaux sur l’ayve irent leur logement, car la tour fu assise sur l’ayve droitement. La ot un chastellain de ier contenement que les Normans aloit despitant laidement ; la ot mains paletis sur l’ayve plainement. Et ainsi comme le siege estoit si faytement, vint Bertrant du Guesclin, o hardy convenent, et d’autres chevaliers ot avec lui grandement qui pour l’amour du duc venoient asprement pour le royaume aider avironneement. Par devant Roleboyse pristrent leur logement pour la tour assaillir se suyrent grandement. Mais le ier chastellain, dont j’ay fait parlement, defendoit celle tour moult ourgueilleusement ;
[46r]
- Prise de Mante rendre ne le vouloit ainsi ny autrement. En ce point, beaux seigneurs, dont je foys parlement, avoit un chevalier en cellui assemblement : Guillaume de Lonnoy l’appelloient ses gens. Cellui avisa un jour par quel enginement porroit entrer a Mante qui prés dela s’estent. Ville y ot bonne y fort, fermé richement ; Françoyse n’estoit pas, je vous ay en convent, ains heoient Françoys adont couvertement pour l’amour des seigneurs ou il ot maltalent.
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[46v]
Guillaume de Lonnoy, un chevalier gentilz, et Bertrant du Guesclin qui tant fu hardy, et pluseurs chevaliers de hardement garnyz pour Mante conquester, une ville de priz, se mistrent au conseil ; lors fu Bertrant ouÿ : « Je ne sçay, dist Bertrant, ny en fayz ni en diz, comment on le peust avoir qui n’iroit bien garny d’engins, d’arbalestriers et de vallets faytiz. Nous irons, si vous plaist, lors que nous arons priz ce chastel cy endroit et touz noz anemis, ainçoys que je revoye dont me suys party. N’y demourra chastel environ de Paris qui soit nuysant au duc qui tant est seignoriz qui ne soit conquesté et a la terre mis. » Guillaume de Lonnoy qui estoit bien soultilz, leur a dit : « Beaux seigneurs, j’ay gicté mon advis comment Mante aurons ains deux jours acompliz. » Ores escoutéz comment le fait en fu bastiz. Un jour prist de ses gens du tout a son devisz et si les a moult bien la vespree garniz : a loy de vignerons en a trente vestiz, ainsi comme vignerons se tenent ou païs quant ilz devoient aler es vignes du pourpriz ; en tel point proprement les a Guillaume mis : 3696
corr. d’après P : ou il maltalent.
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- Guerre de Bretagne -
jacques et haubergons ont dessoubz leurs abiz et les riches couteaux et les bons brans fourbiz et leur a dit : « Seigneurs, entendéz a mes diz. Ainçoys que soit demain le droit jour esclarsy, je me iray embuscher si pourveü d’amis que je ne seray ja de mil homme sourpriz. » 139
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Si a dit le chevalier : « Seigneurs, ne vous doubtéz. A Mante de matin appareilléz seréz a loy de vigneron, ainsi comme vous veéz. Je seray en l’aguet richement ordonnéz. A la porte de Mante deux a deux vous iréz. A l’ouvrie de la porte, si tost que vous verréz la proye de la ville qui s’en va sur les préz, bien et hardiement la porte prendréz et encontre les gardes fort vous combatréz. Et se ainsi vous le faictes comme ouÿ avéz, nous entrerons dedens de combatre apprestéz, encores ne sera pas le commun tout levé la ville conquerrons, nostre est la fermeté, et Bertrant du Guesclin nous sera prés assez. » Et ilz ont respondu : « Ainsi comme vous commandéz, tout ainsi sera fait que devisé l’avéz. » La nuyt ont bien fait leurs habiz et retornéz. Aprés la mynuyt c’est Guillaume levé, il s’est avec ses gens isnellement armé ; pour la noyse des chevaulx n’en y eu nul mené, ains s’en vont touz a pié, les escuz colléz.* La nuyt estoit brune, grande fu l’oscurté, encores veoient pou quant souleil fu levé. 140
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Or sont les vignerons sur la maistre chaussie, bien semblent a leur abit pouvre maignie leurs oustilz en leur mains dont la vigne est taillie. Droit a l’aube crevant, ains que fust esclarssie,
[47r]
- Prise de Mante ont touz les compaignons bien Mante approchie. Ores avoient coustume en la ville jolye que a droit souleil levant la gueste s’esbanye et puis quatre bourjois par droite compaignie venoient a la porte qui estoit verrollie. Et la estoit la proie toute appareillie : vaches, brebiz, pourceaux et autre besterie* et les mectoit on hors de la porte abaissie, aler les faisoit on en une praerie. Et puis estoit la porte refremee et drecie et n’y ot que un guischet ouvert a une fye et la baille tendue jusques a la moitie.
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[47v]
Droit a souleil levant a celle matinee sont venuz les bourjois a la porte fermee, ouverte l’ont bresment et la baille tiree. L’un a regardé par my une valee et vit de celles gens venir a la volee, dist a ses commpaignons : « Gictéz vostre visee. Quelles gens venent cy qui leur voye ont hastee ? » Et l’autre a dit, qui oÿ sa pensee, : « Se sont les vignerons de la nostre contree qui se venent louher pour gaigner leur jornee. Se ne sont mie gens de male renomee, a leur vesture appert qu’ilz n’ont cousteaux ny espee. – Ce veoir, se dist l’autre, n’aiéz chiere esfraee » Lors se vont apayser, si ont laissé leur visee, dedens leur garde vont sans point d’arrestee pour mectre l’armeüre qu’ilz eurent apportee et les bestes s’en vont pour paistre en la pree. Et véz cy quatre des nostres qui ont fait leur entree et puis s’en revint six sur la porte combree ; chascun isnellement a traite son espee, en pou de temps y vint toute l’assemblee. Un cornet y avoit d’une euvre manovree qui turelure ot non en maintes contrees.*
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- Guerre de Bretagne -
Icelle turelure fu haultement sonnee et Guillaume en a bien la voix escoutee. Lors se sont mis a chemin courant de randonnee et les vignerons ont commaincé la meslee ; aux bourjois ont donné maintes dures colees dont ilz ont prins a crier comme gens desfaee et crioient : « Traÿ ! Est la ville estonnee. » Mais encores ne fu pas commune levee. Guillaume de Lannay et toute son armee entrerent dedens Mante, si ont la ville estonnee ; la irent toutes les gens tellement esgaree que chascun s’en fuyoit comme beste desruee ; par dedens une eglise qui estoit bien muree aloient a garent, c’est verité prouvee, – de Nostre Dame fu celle eglise fondee. Pour avoir bon garent faisoient la leur entree, car meulx vault reculer une grant emjambee pour sa vie sauver quant l’eure est ordonnee que querrir le debat pour mourir a l’espee, car, quant l’omme est mort, on n’y conte riens nee.* 142
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Or furent en la ville entré touz les premiers. Bertrant fu en l’aguet par dessus maint noier. Un message lui dist : « Temps est de gaigner. » A Mante s’en est alé pour noz Françoys aider. Adont monta Bertrant sur un moult grant destrier. Le conte de Saussourre et autres chevaliers chevauchent envers Mante en moult grant desirer. Ceulx de la ville vont entrer ou fort moustier car on commaince l’eglise a enforcer, qui estoit grant et noble et moult it a priser. Guillaume commainça fort « Lonnoy. » a hucher ; la huchoient « Lonnoy. » touz ses souldoiers et la ville s’esmut et devant et derrier. Vous pouéz bien savoir que en eulx n’ot qu’aïrer ; l’un porte un pestel , l’autre un mortier
[48r]
- Prise de Mante et gictoient aval pour leur honte venger et crioient « Traÿ » pour leur gens esveiller. Femmes veïsséz la leurs enfans enbracier et plurer et crier, hydeusement noyser. Et ceulx qui s’en pouoient hors de Mante voyder vont criant par les champs : « Dieu, veilléz nous ayder. » . Bertrant vint au secours o mains arbalestriers. A force de chevaux, aus esperons brochier entrerent en la ville de Françoys un millier et conquisterent la ville tout a leur desirer. Les aucuns commaincerent durement a piller. Et Bertrant assailli tellement le moustier que ceulx qui dedens estoient monterent ou clochier ; crioient touz : « Faictes l’assault cesser. » Dont cesserent noz gens sans prisonné blecier.
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[48v]
Ainsi fu prise Mante, comme dit ay proprement. Et Bertrant du Guesclin qui tant ot hardement, ont mandé les bourjois toust et appertement, et ilz y sont venuz touz asseürement : « Seigneurs, se dist Bertrant, or me dictes briesment : vous rendréz vous au duc ou Normendie appent ? Vouléz vous faire a lui hommage et serement ? Se vous ne le vouléz faire bien loiaument, je vous donneray congié tout a vostre talent de partir de la ville, si en portéz vostre argent pour aler tout partout a vostre commandement, que vous n’y auréz ja mal ne encombrement et femmes et enfans auréz a vostre talent. » Mais les riches bourjois qui la furent present, pour leur heritages dont ilz avoient forment, se sont lors acordé a jurer plainement a la in que Françoys mistrent en leur convent qu’ilz n’en feroient riens, si on n’aloit atemprement assaillir et conquerre bien et esforciement la ville de Meulent et la tour ensuyvent.
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Quant Mante fu rendue au duc de Normendie, Bertrant du Guesclin et l’autre baronnie revont a Roleboyse qui estoit assegie. Le chastellain ot moult la teste corroussie quant Mante fu ainsi conquise et gaignie et crioit aus Françoys : « Faulce gent enragie. Vous avéz faulcement Mante prins et traÿe. » Bertrant du Guesclin leur it une envaïe : de trayre et de lancer fu grande l’envaÿe. Le chastellain estoit dessus la tour antye et gictoit contreval sur nostre chevalerie pierres et grans chaillotz dont noz gens cuvrie. Et dura l’assault jusques a complie. 145
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A Roleboyse y ot un grant assault plenier, mais ilz n’y ont conquis la montance d’un denier. Ilz ont mandé engins et les font charryer. Et quant le chastellain les vit appareiller, il manda a Bertrant et le it aprocher, que par un sauf conduit il peust a lui parler. Et croy que a ce conseil se alerent appointier de rendre le chastel et de la tour vuyder, voyre, parmy argent que on en devoit bailler. Le chastel fu rendu sans point de targier et ensuyvent ont fait sergent et escuier : chascun a prins le sien, dont il avoit mestier. Et Bertrant s’en ala dedens la tour loger ; celle nuyt y donna un moult riche mangier et commanda la tour abatre et deppecier a la in que jamais il n’y eust que guerroier. 146
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Ainsi fut le chastel abatu et brisé et la tour fu minee et gictee es foussés. Bertrant en appella les chevaliers senéz
- Prise de Mante -
[49r]
et leur a dit : « Seigneurs, se bien faire vouléz, nous irons a Meulent et avec moy viendréz. Meulent est un fort lieu et sur Senne fondé et a ceulx de Paris a fait des maulx assez. Il le nous fault avoir ains que l’on soit aresté. Nous avons des mineurs que nous avons mandé : la tour ferons miner si que tantost auréz. » Et ilz ont respondu : « Si soit comme vous vouldréz. » Cinq cens arbalestriers ont avec eulx menéz et le conte d’Aussoure y fu tout appresté. A Mante sont venuz – la estoit demeuré un gentilz escuier qui en gardoit les clefz, tantost fu chevalier et chastellain nommé – mais pour plus l’enforcer fu tantost garité et entour le moustier it on faire fosséz tant que en la in le lieu si fu forment fondé et trés puissamment garny et ordonné que de pires chasteaux trouveroit on assez.* A Mante font chargier les harnoys et les tréz, arbalestres, harnoys et fors escuz bendéz. Droit a Meulent s’en est un message alé. Quant il vint en la ville, si s’est ault escrié et a dit a ses gens : « Vostre ville gardéz, car véz cy les François, fers vestiz et arméz, pour assaillir Meulent en point les verréz. Et Bertrant du Guesclin y est tout ordonné et le conte d’Aussoure et d’autres gens assez. » Et quant ilz l’ont oÿ, si en ont les cuers iréz.
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147 A Meulent furent moult courrousséz et doulant. Quant la nouvelle oÿrent que des Françoys venoit tant de Mante qui fu prise, leur va moult ennuyant ; tout entour de la ville alerent enforsant et portoient chaillotz hommes, femmes et enfans, pour defendre la ville se vont appareillant. Le chastellain estoit en sa tour demeurant :
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- Guerre de Bretagne -
si fort estoit la tour qu’il n’aloit riens doubtant. Bien pourveü furent dedens ou temps de devant, de pain, de char salee et de bon vin friant pour vivre .xv. mois ou plus en un tenant. Avoit bien pourveü la tour a son commant. Et si avoient bateaux dont la tour vont gardant mais dedens Meulent les mist on a garent. Or venent les Françoys et les hardiz Normant qui maintes nefz aloient parmy l’ayve amenant de bonnes provisions qui leur sont proitant. Les arbalestriers venant qui furent bon sergent, et gens d’armes aprés qui les vont conduysant, bien sont appareilléz pour faire assault pesant. Tant alerent noz gens et tant vont cheminant qu’ilz ont veü la tour qui fu haulte apparent ; aus léz devers Paris vont leur gens conduysant, sur Senne se sont mis, dont l’ayve va courant, illec se sont logéz sur le pré verdoyant. Ceulx de la ville vont aus crenaux demonstrant, pourveüz de defendre si on les vait assaillent. Lendemain au matin, jusques a prime sonnant, assaillirent la ville que Meulent vont nommant. Les arbalestriers sont en conroy mis devant et ceulx qui sont a pié vont la ville approchant. La veïsséz assault aus bailles par devant ; plus dru volent quarreaux que la nef n’est courent ; a picques et a houhes, a mains martelz pesant, a haches, a espees ilz assaillirent tant que les bailles copperent et vont oultre passant. Tant furent ceulx de dedens lasséz et recreant que en la tour la dedens s’en alerent fuyant ; en la tour se sont mis et femmes et enfant, ilz y avoient mis tout leur vaillent ; garnie fu la tour pour un an ensuyvant. Si avoit un grant pont sur Senne seant la ou assez de gens s’alerent retrayant, car de jours et de nuyt on l’aloit enforsant.
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- Prise de Mante -
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En la tour de Meulent s’alerent enfermer et sur le pont aussi, que l’on faisoit gariter. La Bertrant du Guesclin s’est alé housteller en la ville et ses gens s’i vont bien amasser ; et encontre la tour, que l’on ne les peust grever, ont fait arbalestriers et souldoier aler pour la tour de Meulent, que l’on ne les puet grever. Bertrant s’en est alé au chastellain parler et lui requist qu’il lui veille la tour livrer et qu’il la rende au duc qui tant fait a louer ; « Tout sauvement, dist il, je vous laisseray aler. » Se dist le chastellain : « Foy que doys saint Omer, ainçoys que en ceste tour vous puisséz housteler vous conviendra, je croy, aprendre a hault voler. » Et il jura la foy qu’il doit a Dieu porter jamais ne le verra deux lieues reculer tant qu’il aura la tour ; ne lui puet eschapper.
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149 Bertrant du Guesclin it fort la tour assaillir mais l’assault ne les it de riens esbahir : bien furent pourveüz pour longuement tenir. Adont it une mine et les mineurs fouÿr et les faisoit garder que l’on ne les puet honnir ; et les mineurs penserent de la mine fournir, la terre font porter et la mine tenir tant que ceulx de la tour ne les peurent veoir ; tant minerent adonc, ce sachiéz sans faillir, que par dessus les murs pouoient bien avenir ; dessoubz les fondement font la terre ravir, a fors eschantillons la irent soustenir, grans baucs fors et pesans y ont fait establir. Dont vindrent les mineurs sans point mentir et distrent a Bertrant : « Quant vous auréz desir, sire, nous vous ferons ceste tour a terre gesir. – Or tost, se dist Bertrant, il me vient a plaisir,
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car, puis que ceulx de dedens ne voulent obeÿr, il est de raison que l’on les face mourir. » 150
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Les mineurs ont bouté a force et a bandon le feu dedens la mine a leur divisïon. le boys fu trés bien oingt de gresse de bacon. En l’eure qu’il fu art, comme dit la chansson, cheu la haulte tour ainsi que a .i. coron. Et quant ceulx de dedens perceurent la choyson, aus creneaux sont venuz demander rançon, a Bertrant se rendirent et furent ses prison, le chastellain fu prins et touz ses compaignons. Ainsi conquist Bertrant la ville et la danjon et mist dessus la tour vistement son puis it la ville abatre, la fermeure environ et la tour aussi toute jus tout environ ; ceulx du pont se rendirent sans nulle arrestison. Bertrant y ordonna moult bonne garnison, le pont it enforcer et gariter en son. Adont se departirent les chevaliers de nom, ceulx de Rouhen s’en vont chascun en sa maison et les bons chevalier, dont il y ot foyson. Et Bertrant s’en alla par devers Ponttorson, la se tint a sejour pour la morte saison et fu o sa moillier o la clere facon ; depuis fu adjorné encontre Felleton ou Bertrant s’escusa par droit et par raison. Et en ce temps, seigneurs, estoit hors de prison le riche roy Jehan, a qui Dieu face pardon. Encontre lui it on maintes processïon. 151
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En France retourna le riche roy Jehan parmy sa ranson, dont l’avoir fu grant : la duché de Guienne, villes et chasteaux puissans donna a Edouart qui moult lui fu nuysant.
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- Prise de Mante Et dura ceste paix, ce ne fu pas longtemps. Par devers Normendie estoit tousjours Bertrant, encontre les Angloiz tenoit adés les champs ; l’archeprestre fu o lui son confortans, le bon conte d’Asseurre qui tant fu souisant, le bers Carenlouet qui fu aventurans, et autres chevaliers et escuiers, ne vous sçay dire quant car tant ot ennemis ou roiaume des Frans que ne le vous diroit homme vivans. Et le Castal de Beuf estoit moult cuvriant le royaume de France ; et le greva longtemps Pierre de Saqueinville, un chevalier normant ; si fu Jehan Joyel, ou grant fut le bonbans. Et Bertrant du Guesclin, le noble combatant, leur ousta leur ourgueil et si les it meschant, ainsi comme vous orréz quant il sera temps.
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En l’an mil et .iiic . et puis .lxiii. trepassa droit a Londres de France le bon roy Jehan qui estoit ilz Philippe de Valoys ; en Engleterre fu repassé celle foy pour verité tenir, car en lui estoit foy, largesse, hardement, force, puissance et droit, preude hons fu et loiaux a touz hommes courtoys. De sa mort furent moult corroussé les Angloys. Si en furent moult doulans Normans et Bourdeloys, Pictars et Limosins et touz les Françoys. Adont se esmeurent fort Engloyz et Navarroys a l’encontre du duc qui devoit estre roys* ; en la cité de Evreuz se assembla leur conroys. En ce pays avoit chasteaux telz .xxiii. que ne prisoient point le duc .i. seul tournoys, ains faisoient ensemble alience et exploiz ; et Bertrant le gentilz n’estoit pas a leur choys, ne le bon quenx d’Asseurre qui tant fu iers et roys, ne l’archeprestre aussi, ce tesmoigne la foy,
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- Guerre de Bretagne -
le viconte de Beaumont, un chevalier courtoys. Le duc de Normendie avoit en cellui moys a Bertrant du Guesclin qui oncques ne se tint coy, donné de Normendie les dons et les octroys que marechal seroit pour lui a celle foy. Dont il en jura Dieu qui fu mis en la croy, que les Engloys feroit courrousséz et destroys ou par dedens bataille seroit octis tout froyt. 153 Proude homme fu Bertrant, o la chiere hardie.* Gens d’armes it venir de celle Normendie. Si comme il estoit la vint a lui une espie et a dit a Bertrant : « Sire, je vous afye que je viens droit d’Evreux, celle cité jolie. La vy le Castal, o la chiere hardye, et si a avec lui moult belle compaignie, chevaliers, escuiers, bonne chevalerie et fait venir de dehors moult de male masnie. Et iront vers Paris, celle cité antie. » Et quant Bertrant l’oÿ, si a la chiere drecie ; adonc manda secours et a touz chevaliers prie que a lui veillent venir baniere desploÿe. Le viscoins de Beaumont y vint, a la chiere lie, Godefroy d’Anequin qui fu de Pictardie, des arbalestriers ot de haulte seignorie. Maistre en fu nommé, car je vous certiie que bon chevalier fu et de bonne lignie. 154
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Bertrant du Guesclin it moult belle assemblee pour trouver les Engloys qui mistrent leur pensee du royaume grever, une terre honnouree. Le bon conte d’Aucerre fu en celle assemblee et l’archeprestre aussi qui ot grant renommé, le bers Carenlouet qui bien fery d’une espee, 4079
et si avec l., a suscrit.
- Bataille de Cocherel -
[51v]
et les bers chevaliers qui moult ont grant huee, Loÿs de Hanequerque, de Flandres la peuplee, Jehan de Senarpont n’y it pas arrestee, Thierry de Bournonville, a qui son ame soit sauvee, qui fu fait chevalier a la bonne jornee, qui fu a Cocherel la ou il ot sa vie inee, et Jehan de Quaïn o la brasse quarree, et Guillaume Trenchant, de Grantville nommee chevaliers et escuiers et gens bien esprouvee. Ne sçay que la chansson vous en fut demenee, mais c’estoit une gent qui doit estre honnouree et dont bonne chansson doit estre bien chantee.
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155 Toute gent de grant bien, hardie et combatant avoit en sa compaignie le noble Bertrant ; de acquerir grant honneur estoient desirant. Godefroy d’Annequin les va araisonnent « Seigneur, dist Godefroy, ores aléz aprenant auquel lieu les Angloys et noz malveillant pourront estre trouvéz, moult le voys desirant. En guerre fault advis et force en combatant* ; avis est d’assembler science, y convient grant, et sen ; de l’assaillir viser comment et quant. » Le viconte lui dist doulcement en ryant : « Maistre, vous dictes bien selon mon escient. Il convient les coureurs doncques aler devant et diront auquel lieu ilz nous iront trouvant. – Vous avéz moult bien dit, Sire » , se dist Bertrant.
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156 Or sont les chevaliers touz ensemble aüné disant comment seront en ce fait ordonné. La furent dix coureurs par actort deviséz pour espïer Angloiz ou ilz seront trouvéz ; dist cellui de Beaumont : « Oéz ma volunté. Je vous diray ung pas ou nous serons trouvéz.
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- Guerre de Bretagne -
Il a Cocherel une vigne et maint pré et si est l’eave dure ou bien serons passé ; et si seront bien noz chevaulx abreuvéz et si nous avons soif nous buyrons a plenté ; si y est aussi le mons que l’on monte sans degré* par ou noz annemis seront bien advisé ; tant qu’ilz soient ou mont dont je vous parle* il ne pouent par nous en riens estre grevé ; s’ilz descendent aval, ilz sont mors et mathé. » Et ilz lui ont respondu : « Vous avéz bien parlé. » Lors se sont esmeüz quant ilz virent avesprer car le temps estoit chaut, sachéz de verité. Droit a la Penthecouste que l’on appelle en esté, le duc de Normendie qui tant ot poesté, devoit porter courrune droit a la Trinité et s’en aloit a Riens prendre sa roiaulté* ; la estoient barons, ducz et contes a planté. Pour le feste du roy et la sollempnité estoient mains seigneurs venuz et arresté ; et pour tant les Engloys avoient bien visé de entrer dedens ou royaume tout a leur volunté pour faire au jeune roy villennie et vilté car il ne savoit pas qu’ilz avoient pensé. 157
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Seigneurs, a icelluy temps que vous avéz oÿ fu le Castal de Beuf qui le cuer ot hardy, a noble compaignie qui furent bien garny : Jehan Joyel estoit tousjours avec luy, Pierre de Saquainville qui puis s’en reppenti, et d’autres chevaliers et escuiers aussi. Et s’estoient touz ensemble departy et faisoient grant paix sans noyse et sans cry pour l’amour de Bertrant, qu’ilz redoubtoient cy ; ainsi vont chevauchant que nul ne les choysi et prenoient les boys et le chemin toly. 4152
corr. d’après P. : qu’il avoit pensé
[52r]
- Bataille de Cocherel Et Bertrant et les siens, comme vous avéz oÿ, venoient ierement a loy d’omme hardy. N’y ot trompe sonnee ne autre cor bondy, ne nulle chalemelle ne bombarde aussi. Godefroy d’Annequin, un chevalier joly, ses bons arbalestriers mena avec lui, le bon conte d’Ausseure ses gens y conduyssy, le viscoins de Beaumont mie ne leur failly et Bertrant du Guesclin, a qui Dieu face mercy, mena l’arriere garde, ainsi que avéz ouÿ. Tant se sont exploitié, pour vray le vous afy, qu’ilz virent Cocherel, dont furent resjoÿ. Par dela l’ayve dure, pour certain le vous dy, sont venuz les Françoys arméz et iers vesty ; si se sont descenduz enmy le pré lory.
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[52v]
Ainsi que noz gens, dont je vous seigniie, furent a Cocherel en une praerie par de deça le mont, tretouz par compaignie, pour eulx refreschir car le chaut les agrie, a tant véz cy les coureurs touz .x. a une fye et ont dit haultement a la chevalerie : « Seigneurs, esté avons en plus d’une partie escouté et visé en maniere d’espie, mais nous n’avons veü homme qui soit en vie, chevalier ny escuier pour chassier envaÿe. – Par ma foy, dist Bertrant, je ne sçay que j’en dye ; mais ne me partiray, si aray nouvelle oÿe car véz cy le chemin de l’averse partie. » A ce mot s’actorda toute sa baronnie.
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159 Ainçoys que nous gens veïssent apparent le Castal et ses gens qui lé vont approchant, it ordonner ses gens le noble Bertrant. Le viscoins de Beaumont, au courage vaillant,
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- Guerre de Bretagne -
et les autres barons la vont leur gens nombrant ; et furent .xic . toutes gens combatant, le mendre au besoign y valu Rollant. Bien confessé estoient chevalier et sergent tout droit au Pont de l’Arche ou ilz furent passant. Touz prestz furent, adont je le vous acreant, pour vivre et morir, par Jhesu le commant. N’y a cellui qui n’aille bataille desirant et estoient trestouz courrousséz et dolant que leurs fors ennemis ne vont plus tost trouvant. L’archeprestre dist haultement en oyant : « Seigneurs, s’il vous plaist et l’aléz acordant je meneray de mes gens dela ce derubent pour savoir si viendront les Angloiz apparent. Et se besoign me croist, je le iray bien mandant. » Et ilz ont respondu : « Vous aléz bien parlant. Si nous avons besoign, se nous faictes garant. » L’archeprestre dist : « Je le vous acreant. » Ainsi se departi, comme je vous voys comptant, dont il ot le sien cuer courroussié et dolant car il revint a tart a l’onneur qui fu grant, ainsi comme vous orréz recorder ou rommant. 160
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Seigneurs, ores escoutéz, franche gent honnouree, une bonne chansson de bien enluminee. Ains de plus veritable ne fu nulle rimee. Touz les nobles barons, dont j’ay fait devisee, furent touz descenduz a pié celle jornee et la se sont touz refreschiz sur la pree. Atant véz cy ung hayraut criant a la volee qui descendi aval de la montaigne lee et a dit a noz gens a moult haulte alenee : « Beaux seigneurs, tenéz bien vostre gent ordonnee car véz cy les Angloys a baniere levee. Ja bien toust les verréz, s’il vous plaist et agree. » Et quant Bertrant l’oÿ, si a la teste levee
[53r]
- Bataille de Cocherel et a dit a ses gens parolle bien notee : « Beaux seigneurs, ne facéz nulle chiere. Nous arons, se Dieu plaist, une noble jornee ; huy verra l’on les bons pour avoir renommee ; aujourduy verra l’on qui tiendra bien son espee et qui tiendra l’escu et la lance avalee, qui amera honneur et proesce aduree ; a tousjours lui en sera la grace reprouvee. » A icelle raison que je vous ay compter ont veü du Castal la baniere levee lassus en la montaigne, bien prés de la ramee.
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161 Quant Bertrant la baniere choysi du Castal lassus contre le mont, hault levee en estal, il en a Dieu louhé, le pere esperital. Le viscoins de Beaumont a dit en general : « Sire, Bertrant, dist il, tenons nous en ce val et regardons Angloiz et l’estat communal. De monter contremont nous pourroit venir mal et amonrir forment l’estat du sang roial. – Nous n’y monterons ja, dist Bertrant l’amiral, ains les atendrons a pié et sans cheval et ferons touz a noz ennemis mortal. Je donne au jeune roy le noble Castal : se sera son estrayne a son estal royal. » Atant véz cy les Engloys a pennon de cendal et regardant Françoys qui estoient aval ; ne les prisoient pas la monte d’un estal.
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162 Ou mont de Cocherel sont venuz les Angloys, les banieres monstroient par dessus aus Françoys, enseignes, escuz et glayves les fers droiz ; moult ordonneement se tindrent jouxte les boys. Et noz gens les regardent qui furent es maroys. 4248
corr. d’après P : a. et l’estal c.
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- Guerre de Bretagne -
Par delay une haye ou grant fu le destroit estoient ordonnéz et tenent bien leurs pléz* et jurent Jhesucrist qui fu mis en la croiz, que Engloys actendront arméz en leurs harnoys. 163
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Ainsi furent Françoys ça jus en la valee et Angloiz sur le mont qui menoient grant huee, et se tenent touz coys la baniere levee.* Le Castal parla et dist sans demouree : « Que ferons nous, seigneurs ? Dictéz en voz pensees. Véz la noz ennemis qui font chiere doubtee. Ja bataille n’aurons, c’est bien chose averee, si aval ne descendons contre eulx de rendonnee car pas ne viendront cy, la montaigne leur vee. » Piere de Saquainville a la raison monstree et dist au Castal sans point de l’arrestee : « Se la jus descendons, nostre gens sera lassee ; le pire contre deux y auroions ceste jornee.* Mais nous actendrons, si vous plaist et agree, que en une autre place soit l’aventure trouvee. » Se dist Jehan Joiel : « Telle est bien ma pensee. » Ceste parolle fu de chascun accordee et furent en ce point jusques a la vespree. 164
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Quant ce vint sur la nuyt, jusques a souleil couchant, Bertrant du Guesclin ne si va arrestant ; les chevaliers de l’ost va trestouz assemblant : le bon conte d’Ausseure va premier appelant, le viscoins de Beaumont appella ensement, le Besque de Villaines, le noble combatant, Godefroy d’Annequin, un chevalier vaillant, Olivier de Manny, un chevalier playsant, Robert de Villequiers ne va mie oubliant cellui y va moult bien Bertrant araisonnant, de Fronteboys aussi le vassal suisant
[53v]
- Bataille de Cocherel -
[54r]
et Cressonnelle aussi qui bien va tourneant et mains bons combatans, dont je me tays atant. « Seigneurs, se dist Bertrant, oiéz mon escïent. Ceulx Engloys de lassus nous iront afamant. Bien voys que contre nous n’yront point desfendant et se nous y montons nous en serons doulant ; ainsi perdrons nous nostre temps maintenent. Mais je leur manderay, se vous l’aléz accordant, place leur livrerons, du tout a leur commant, demain par droit accort, aprés bien souleil levant. » Et ilz ont respondu : « Vous aléz bien parlent. » Ilz ont prins un hayraut et lui vont commandant qu’il aille au Castal la nouvelle comptant et il a respondu : « Je feray vostre commant. » Et puis monta tantost sur son cheval courant, le grant chemin ferré s’en va esperonnant. Les Engloys ont veü l’ayraut chevauchant, des nouvelles oÿr vont forment desirant.
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165 Tant ala le hayraut, dont j’ay fait mencïon, que aus Engloys est venu, dont il y ot foyson ; le Castal demande haultement a cler son et quant il l’a veü, si l’a mis a raison : « Sire, dist le hayraut, oiéz mon entencion. Bertrant du Guesclin qui tant a de renon, le bon conte d’Aucerre et touz les compaignons vont mandant de par moy, n’en feray celoyson, se vous vouléz avoir a eulx bataille ou non. Car si vous la vouléz, il leur vient bien a bon. et demain au matin, sans point d’arrestison, place vous livrerront a force et a bandon oultre celle riviere, troys trefz d’arc d’un longon ; la ou il vous plaira le vous livrera on. Et se vous ne vouléz, encores vous mandons : aléz encontre lui, au col vostre blason, – ou Pierre dit Joiel ou Saquainville en son –
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- Guerre de Bretagne -
pour courir voz troys cops de glayve de randon. Qui sera abatu devant sur le sablon la place livrera a sa divisïon ; ou il retournera, lui et ses compaignons, et la place lerra, si yra en sa maison. » 166
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Quant le Castal oÿ le heraut qui parla, le Castal lui dist qui point ne s’arresta : « Gentilz heraut, dist il, ne vous celeray ja. Je cognois bien Bertrant et le vouloir qu’il a ; mes de tant vous en dy que, quant le jour viendra, que bataille de nous et de ses gens sera. Je assembleray a lui, par Dieu qui tout crea, et descendray aussi quant me playra ; mais il n’est mie temps, car ainsois me viendra un secours que j’atens qui point ne me fauldra. – A, Dieu, dist le heraut, puisque ainsi va, tout ce que m’avéz dit bien tost il le sara mais de tant vous en dy, ne vous en vantéz ja : ce n’est mie par nous que bataille n’y a car monseigneur Bertrant moult desiré l’a. » Adont est descendu et le mont avala et revint aus Françoys et puis leur recorda ce que le Castal lui dist et ce qu’il leur manda. Ainsi toute la nuyt la chose demoura. Bertrant c’est advisé comment se maintiendra et commant aus Engloys la bataille aura. Il it gayter le soir tant que l’aube creva ; deus jours avec deux nuytz tout ainsi furent la. Or oiéz de Bertrant de quoy il s’avisa : le conseil a mandé et chascun y ala pour oÿr de Bertrant ce que dire vouldra. 167
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« Seigneurs, se dist Bertrant, oiéz que nous dirons. Je me suys avisé comment nous le ferons :
[54v]
- Bataille de Cocherel nous serons touz d’acort que sur noz chevaux monterons et tout nostre harnoys et ce que nous avons ferons passer ceste ayve, que n’y arresterons, et ferons touz semblant que nous nous en fuyons. Et les Engloys lessus qui verront nostre façon, cuideront plainement que nous nous en fuyons et que de grant paour de cy nous departons ; aval descendront ainsi que nous cuidons ; s’ilz descendent aval tant que nous le voyons, a force de cheval a eulx retournerons, baneres desploiees et les doréz esperons. Et soions touz prestz et mie n’y faillons et que l’on le die en l’eure a touz les compaignons, a touz les chevaliers et a touz les garçons. Et j’ay Dieu en convent que, si ainsi le fasons, que je croy fermement que nous les desconireons ; a l’archeprestre aussi ce fait si manderons. » Et ilz ont respondu : « Ce conseil si est bon. Tout ainsi sera fait et touz l’octroyons. » Dont on fait assavoir a chascun ses façons tout ainsi que l’on apprent aus enfans leur lesson ; ainsi fu a chascun faicte divisïon.
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[55r]
Qui vist a celle heure les chevaliers monter et prandre leurs harnoiz et les varlés trousser, il cudast proprement que ce fust pour aler et que jamais dela n’en deüst pié tourner.* Au Castal sont alé les Angloys recorder : « Sire, Françoys s’en vont, n’osent plus demourer. – S’en vont, dist le Castal, oncques n’oÿ compter que Bertrant se dignast de place distorner. – Si fait, dist l’Engloys, c’on nous voit arriver. Bien les porrons de cy veoir et regarder. » Dont vindrent les Angloiz sur la roche monter et veoient les Françoys oultre l’eave passer. 4372
corr. d’après P : a. descendrons a.
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- Guerre de Bretagne -
Lors dist le Castal : « Il nous fault avaler et Bertrant du Guesclin nous convient revider. Aujourduy le verray du tout deshonnourer et mectre en tel parti, se je puys assener, que mais ne se ousera devant prince monstrer. » 169
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Le Castal et ses gens furent bauz et léz quant ilz virent passé Bertrant et eslongié.* Pierre de Saquainville fu au cuer courroussé de ce que l’on s’en aloit et que l’on avoit laissé le mont ou ilz estoient seürement logié. Mancïon de Brambort, un breton afaitié, dist a Jehan Joyel qu’a .i. léz ot sachié : « Jamais ne me creéz se Bertrant l’enragé ne retorne tantost, que serons approché. » Se dist Jehan Joyel : « Trop avéz folïé qui parléz ensement. Ne faictes l’esmayé : se de lui vous doubtéz, si n’y mectéz le pié ; cellui qui n’a point d’argent n’a que faire au marché. » 170
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Ce dit Jehan Joyel, o la chiere hardye : « Convient il pour un homme plain d’oultrecuiderie perdre sen et honneur et sa grant seignorie ? Telz ne doubtent Bretant qui ne le cognoissent mie. Et la guere si est aventure et folie : l’un y prent santé et l’autre maladie, le second y fait sen et l’autre folie ; tel desconit au soir son adverse partie qui aujourduy perdra les membres et la vie ; une heure est de gaigner et l’autre ne l’est mie. Et en droite aventure, je vous acertiie, met on les eufz couher, je le dy a la fye. » 171
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Mencïon de Bramborc a ce cop se taisoit.
- Bataille de Cocherel -
[55v]
Il se taysi adont, mais plus pensoit, et nonpourquant Bertrant si durement haoit que trés bien le voulsist avoir octis tout froit, car deux de ses cousins, a qui prés attenoit, lui ot octis Bertrant en Bertaigne tout droit. Or se sont avaléz les Anglois du destroit* et disoient touz que Bertrant s’en fuyoit. Mais Bertrant fu liéz quant avaler les voit, dist a Tibaut du Pont qui deléz lui estoit, un moult bon escuier que Bertrant amoit : « Tiebaut, se dist Bretant, nous tendons a l’arrest. Véz cy les oyseaux prins, ilz avolent tout droit. » Aussi tost qu’il fu temps et que l’eure venoit, la trompecte Bertrant si haultement sonnoit* que touz les plus lontains bien oÿr le pouoit ; lors se sont retornéz a force et a esploit.
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172 La trompecte Bertrant fu haultement sonnee, lors se sont retornéz trestouz chiere levee. Mainte trompecte y fu oÿe et escoutee et se sont retournéz en faisant grant huee. Adonc quant les Angloys virent la retournee, lors furent esbahiz plus que beste esgaree. Pierre de Saquainville a dit sans demouree : « Bertrant nous a donné lart avec nostre porree. » Ne fu mie merveille se Pierre s’en esfree, car a Rohen en ot la teste tronsonnee. Doulent fu le Castal et ceulx de l’assemblee, moult volunters eüst la montaigne montee, mais n’avoient lesir, la chose est trop hastee.*
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173 Le Castal parla et a dit en oyant : « Beaux seigneurs, se dist il, ne nous alons doubtant. monstrons a noz ennemys aujourduy ier sembant car j’ay espoir que huy ilz vont leur meschance sachant.
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- Guerre de Bretagne -
Nous sommes plus de cent, soions bien abatans* ; prenons la souppe en vin, car nous ne savons quant nous berons ensamble, mais je vous acreant que je iray, se je puis, ma vie chalengent ; pas ne me prendront comme levre en fuyant. » Si dist Jehan Joyel : « Je vous en dy bien tant. » Ainsi comme les Angloiz vont leur bon vin bevant venoient ceuls deça l’ayve dure courant, qui court a Coucherel, ce savent les auquant. Femmes qu’il y avoit qui furent leur suyant furent moult les Françoys de boyre confortant. « Or avant mes illectes. se leur disoit Bertrant, la plus pouvre de vous aura assez vaillant. » Godefroy d’Annequin a dit tout en oyant : « Je me merveille, dist il, par le corps saint Amant, par quoy l’archeprestre nous va si eslongent. »* Mais le bon Godefroy lui disoit pour nÿent, car on ot recordé l’archeprestre devant que desconfyz estoient noz gens suisant pour ce que la rivere furent passé devant ; et ce fu ce pour quoy il s’en revint avant mes pluseurs de ses gens alerent retornant. 174
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Or furent les deux os dessus les préz herbuz. Chascun fu du cheval a terre descendu, les lances en leurs poins et les escuz aus coulz et si avoient cuignies a grans maces dessus. Et le Castal avoit bien les Engloys mis sus et bevoient bon vin qui venoit de lassus, car bien eurent par qui ilz furent pourveüz. Mais le Castal voyt moult ses gens moult esperduz : nul talent de combatre n’en avoient les plus pour la haulte montaigne, car c’estoit leur arguz ne pourroient fouhir se besoign leur estoit venu. « Seigneurs, dist Castal, foy que je doys Jhesus, a Bertrant manderay amitié et salut
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- Bataille de Cocherel et que arriere s’en aille sans estre combatu. » Et ilz ont respondu : « Cellui conseil est creü. » Un hayraut qui estoit d’une tunique vestu appella le Castal qui bien fu entendu.
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Le Castal appella le bon hayraut legier et puis si lui ala son message chargier ; car le Castal qui sceu bien les faiz appointier, atendoit le secours d’un gentilz escuier qui venoit ierement pour le Castal ayder et avoit avec lui mains hardyz escuier qui bien furent arméz, si avoient mains archiers. Et le heraut s’en vint son message noncier. Et quant les barons l’ont lors approchier, lors se sont assemblé pour oÿr son trayter. « Seigneurs, dist le hayraut, je vous dy sans cuider que le Castal de Beuf m’a cy fait envoier, le bascon de Mareuil qui moult fait a priser, Jehan Joyel aussi et touz les chevaliers, que par trés bonne amour, sans nul mal pourchasser, vous donrront de leurs vins tout a vostre desirer. Cy n’avéz pas grandement a boyre ny a menger, Et d’autre part aussi vous n’avéz nul mestier de bataille livrer ne de vous mehaigner. Si vous plaist par despit de retourner arrier voulenters vous lerront aler et repayrer en une autre contree ou meulx porréz gaigner ; et ilz s’en retourneront sans vous empirer. Beaux seigneurs, veilléz vous sur ce fait conseiller car ycy bien pouéz plus perdre que gaigner. » Et quant Bertrant l’oÿ, va la teste drecier : « Gentilz heraut, dist il, moult bien savéz preschier. Pour ces nouvelles si vous donray .i. courcier et cent lorins que j’ay, que plus n’en veil mucier. Et diréz par dela a vostre repairier que nous irons a eulx s’ilz ne venent premier,
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- Guerre de Bretagne -
car je croy, se Dieu plaist, se je puis exploiter, que du Castal de Beuf mangeray un quarter ne je ne pense ennuyt autre char manger. » 176
4537 4539 4541 4543 4545 4547 4549 4551 4553 4555
Quant le heraut oÿ de Guesclin touz les diz, il en fu durement a son cuer esbahy. Du don qu’il lui donna lui dist : « Vostre merciz. » , vers Castal de Beuf s’en est a retour mis. Et devers les barons et chevaliers gentilz de Bertrant leur compta les motz qu’il a ouÿ. « Or toust, dist le Castal, nul ne soit esbahy. Mectons nous en conroy car trop y avons mis. » Et en celle heure la commainça un estry de valletz et de pages qui gardent leurs ronsins ; d’une partie et d’autre y fu le debat mis et vindrent main a main de combatre aatiz ; de dagues, de couteaux et de bastons faytiz batirent tant lui l’autre dessus les préz loriz que le sang leur illoit et par la bouche et par le vis. Les valletz aus Engloys furent la desconiz, navréz et abatuz et les chevaux conquis. Et quant Bertrant le sceu, adont en ot grant ris ; aus chevaliers a dit : « Seigneurs, par saint Denis, véz cy un signe dont Dieu en soit benists. La jornee est nostre, le fait en est sorty. » 177
4557 4559 4561 4563
Si comme les deux batailles estoient sur les champs, un chevalier angloiz pour monstrer ses bonbans fu yssu hors des rens comme bien entreprenans ; une glayve portoit, dont le fer fu trenchant, mais un bon escuier qui fu nommé Rollant, – nommé estoit du Boys et de gens souisans – cellui assena l’Engloys un cop qui fu poysant, car navré laydement l’abbaty sur les champs.
[57r]
- Bataille de Cocherel Lors se sont appointéz pour estre combatans* ; droit au Castal de Beuf s’est assemblé Bertrant et ferirent grans cops comme chevaliers vaillans. Le Bascon de Mareuil n’y fu mie faillans car cellui y feroit grans cops comme admirans, si it Jehan Joyel qui en ourgueil fu regnans, Pierre de Saquainville y fu moult bien portans, chevaliers, souldoiers, escuiers advenans. D’une partie et d’autre le it comme vaillans. A loy de champion hardiz et suisans sonnoient ses trompectes et ses cors bontissans. Et Bertrant du Guesclin, dont le renon fu grans, en hault criant « Guesclin. » et monstra ier semblant ; l’autre crioit « Beaumont » qui bien y fu portans. Et si fu d’Anequin, .i. chevalier puissant ; chascun crie son enseigne sans estre recreant ; ains decy pou de gens assembléz sur les champs ne fu telle bataille, se dit le romans ; l’un l’autre ne prisoient la montance d’un gant.
139 4565 4567 4569 4571 4573 4575 4577 4579 4581 4583
178
[57v]
Seigneurs, a Cocherel droit en my la valee fu grande la bataille et iere la meslee ; ains de si po de gens ne fu telle assemblee. La ot mains corps nasfréz, maint teste esfrondee. Le bers Tibaut du Pont a .ii. mains d’une espee feroit sur les Engloys a chiere desfaee ; et Bertrant du Guesclin y iert a la volee. « Or avant mes amis. Nostre est la jornee. Souveigne vous, pour Dieu, huy en ceste jornee avons un nouveau roy en France honnouree ; faisons que sa couronne lui soit bien estrivee. » Lors fu toute nostre gent a l’adont revigouree ; par force, par vertu, par honneur esprouvee se bouterent noz gens de cuer et de pensee. Le jour it Castal prouesce evigouree, 4565
corr. d’après P : p. estre combatuz
4585 4587 4589 4591 4593 4595 4597
140 4599 4601
- Guerre de Bretagne -
car bon chevalier fu et maistre de l’espee ; en ceste place fu sa force redoubtee, cellui qui lui eschappa entra en bonne annee. 179
4603 4605 4607 4609 4611 4613 4615 4617 4619
Hardy fu le Castal, homme de grant vaillance. Se bien eüst amé le roiaume de France, de la chevalerie fust la leur et la branche mais pour l’amour des Angloiz moru il a viltance dedens une prison ou pou ot de plaisance ; a Cocherel porta moult vaillemment sa lance, des Françoys abaty grandement la bombance. Le viscoins de Beaumont fu homme d’atrempance, hardy y fu le jour et de bonne ordonnance, la ou il s’embati it aus Engloys destourbance. Godefroy d’Annequin fu homme d’onnourance, hardy chevalier fu et de bonne creance, ce jour y monstra bien sa force et sa puissance. Robert de Bournonville qui moult eu honnourance, y fu fait chevalier pour sa grande vaillance : si avant si bouta pour monstrer sa puissance que abatu fu ou champ, ou de glayve ou de lance, la endroit fu octis, a dueil et a pesance ; Dieu lui face pardon, ou les bons ont fïance. 180
4621 4623 4625 4627 4629 4631
Quant cellui de Bournonville fu octis et tué, dont veïsséz noz gens de combatre eschauféz. Jehan de Senarpont y fu avant navré et Jehan de Caien y fu mal encontré ; et Pierre de l’Espine, un escuier senné, et Guillaume Trenchant, bon escuier nommé et d’autres escuiers y ot octis assez. La veïst on Angloiz ierement demenéz. Le bascon de Mareuil qui tant fu redoubté, crioit parmy l’estour comme tout forcenné a Bertrant du Guesclin : « Ou estez vous alé ?
- Bataille de Cocherel -
[58r]
Vous cuidoiéz bien a matin poulles avoir trouvé. Meulx vaussist que vous fusséz envers moy alosé. » Et quant Bertrant l’oÿ, si est a lui alé et assembla a lui comme lÿon creté. Et la fu le bascon tellement atourné que abatu fu ou champ et tellement navré, de glayves, de couteaux fu feru et navré et demoura ou champ, oncques puis n’en fu levé. Adont fu l’orgueil des Angloys avalé.
141
4633 4635 4637 4639
181 Qant le bascon fu mort, grande fu la bondye. Engloys furent doulans et leur chevalerie ; se bouterent en eulx par force et par maistrie. L’un crioit : « Beaumont. » , l’autre contre crie. Le bon conte d’Aucerre qui tant ot seignorie, se porta vaillemment, comme l’istoyre crye ; le bon Carenlouet, a qui Dieu face haÿe, et cellui d’Anequin qui arbalestriers guye ; chascun se porta bien de chacune partie. Et fu ceste bataille cy forte commaincee que l’on ne savoit lequel y avoit couardie, car le Castal tenoit tellement l’envaÿe que l’on ne l’ouse approcher pour paour de sa vie ; on le it assaillir ce jour plus d’une fye mais il se defendoit de volunté hardye : place fait devant lui, comme l’istoire crye, comme cellui qui va jouant sur la chaussie. « Or Dieu, se dist Bertrant, ce Castal m’agrie. Veilléz nous conforter doulce virge Marie. Et quant le jeune roy, ou tant a courtoisie, a son avenement de sa terre jolye puisse avoir oy de nous toute bonne nouvelle oÿe. »
4641 4643 4645 4647 4649 4651 4653 4655 4657 4659 4661
182 Seigneurs, a Cocherel, se nous dit le rommans, fu grande la bataille et le meschief pesant.
4663
142 4665 4667 4669 4671 4673 4675 4677 4679 4681 4683 4685
- Guerre de Bretagne -
Et ot forment a faire le noble Bertrant ainçois que sa besoigne lui bien fust prouitant, car avant y perdy deux barons souisans : le viscoins de Beaumont qui estoit si vaillans, Godefroy d’Anequin, un nolbe combatans ; ceulx y furent octiz, or leur soit Dieu garans. Lors refu l’assault et l’estour pesant. Jehan que l’on dit Joiel s’i fu fort defendans. Es Françoys se fery, tant fut fort, fut ajouté. ses bonbans* que de deux glayves fu lancé parmy les lans. Et la fu si navré de bons couteaux trenchans que l’on cuida qu’il fust mort et cheü sur les champs. Lors enforça bataille et l’estour pesant. Atant véz cy les bons valletz vaillans* qui disoient : « Seigneurs, ne vous aléz doubtant, car il nous vient secours et un arriere banc. » Ceste nouvelle it noz gens moult joyant que le cuer leur revint a merveilles puissant. Mais ce estoit pour neent – ce n’estoit pas des Frans – que ces gens venoient, dont je vous voys comptant, car c’estoient Engloys que l’on veoit sur les champs qui venoient aider les Engloys a ce temps. 183
4687 4689 4691 4693 4695
Bien cuidoient Engloys vrayment sans mentir que ce fussent Françoys qui les venissent veoir ; mais c’estoient Engloys pour Castal servir. Non pourquant les Françoys s’alerent esbaudir et trompectes aussi prinstrent fort a bondir ; lors alerent Engloys ierement assaillir. Qui la vist Bertrant bouter et envaïr et faisoit ces Engloys ierement ressortir. Robert du Sart ont mort, ce sachéz sans mentir, un chevalier engloiz qui moult it a cremir ; 4673 4678 4683
corr. d’après Nh : t. fort ses bobans corr. (voir note) : atant et véz c. et supprimé. corr. d’après P : c. estoient Anglois pour n., Anglois supprimé.
[58v]
- Bataille de Cocherel Glainsement l’alemant y ont fait mort gesir et Josequin aussi irent a dueil fenir ; o lui furent Engloys que on ot la fait venir. Se voulu un chevalier de nostre gent partir a deux cens bonnes lances que avec lui it venir ; Hentache ot non cellui dont pouéz oÿr, de la Hussoie fu, qu’il avoit a tenir ; cellui it la bataille par son sen desconire ainsi comme je diray, mais que l’on me veille oÿr.
143 4697 4699 4701 4703 4705
184
[59r]
Cellui de la Hussoye qui Entache ot non se parti de l’estour pour trop bonne façon : deux cens lances avoit, je croy, ou environ ; par devers se mist – o lui ses compaignons qui moult bien se porterent , se nous dit la chansson – par derere une haye ou grant fu le buisson, approchant la montaigne par dessus le sablon. Et tant irent noz gens, dont je foys mencion, que la haye percerent a force et a bandon. Derere les Engloys dont il y ot foyson se mistrent les Françoys, par telle avisïon que de touz les Engloys voient le talon. lors se mistrent entre eulx en criant a hault ton et « Guesclin ! » et « Auçoyrre ! » et cellui de « Beaumont ! » Entreulx se sont feru par tel divisïon que derere levoient hauberc et auqueton et puis de leurs espees et de glayves foyson leurs boutoient tout dedens en guise de bacon. Plus dru les abatoient que le loup le mouton. Par ce vint aus Engloys telle perdicïon que touz en furent mors a grant destruction.
4707 4709 4711 4713 4715 4717 4719 4721 4723 4725
185 Par le conseil Hentache et de sa bonne gent 4699
o. la f fait v., f cancellé.
4716
corr. d’après P : et mistrent les F.
4727
144
4729 4731 4733 4735 4737 4739 4741 4743 4745 4747 4749 4751 4753 4755 4757 4759 4761 4763
- Guerre de Bretagne -
qui vindrent par les hayes touz priveement furent mors les Engloys a dueil et a torment, car ilz ont prins le mont du tout a leur comment. On leur levoit derere les armes plainement car ilz avoient les dos devant eulx en present et Bertrant fu devant entre lui et ses gens. Les Engloys par derere avoient malement l’aventureinattendu pour eulx, je vous diray comment. Si fort les servoit on de pointes tellement que jusques au cuer leur aloient formant. La crioient Engloys courrousséz et doulant, et versoient a terre navréz villainement. Castal fu devant qui vit l’emcombrement,* ne s’ose retorner car Bertrant lui defent. Et véz cy Tiebaut du Pont qui tant ot hardement. Perceü le Castal que l’on assailloit forment, a lui s’en est venu moult eforceement, a deux brasz l’ehardy toust et hastivement et du riche haubert le queveustre lui prent ; et les autres Françoys l’apressoient forment. Le Castal d’une dague noblement se defent et iert tout entour lui si estonneement qu’il ressemble un deable d’enfer tout proprement ; mais cellui Tibaut de Pont le tenoit tellement qu’il ne lui peu eschapper, ainsi ne autrement ; la receu tant de cops et si villainement qu’il fu si bien batu qu’il ne voyt ne n’entent. Lors lui a dit Tibaut a sa voix clerement : « A, Sire, rendéz vous. Le besoign vous en prent deportéz tantost, s’il vous vient a talent. Certes, vous estez mort si vous arrestéz longuement. » Atant véz vous Bertrant qui lui dist haultement : « Castal, rendéz vous ou mort seréz briesment. » Lors lui tendi sa main du cuer triste et doulant, adont le it a Tibaut laisser isnellement ; Pierre de Saquainville qui le vit ensuyvant, 4746
corr. d’après P : l. queveutre le prent
[59v]
- Bataille de Cocherel a tendue la main en disant qu’il se rent ; et Bertrant le gentilz prins des autres grandement. Ne sçay comme vous feroit nul long devisement ; touz furent desconiz, voyres, par tel convent qu’ilz furent mors ou prins touz communeement. Lors cuidoient Françoys avoir reposement mais de Nonnencourt vint une armee de gent et un noble escuier armé moult cointement qui venoit au secours de Castal ierement. Atant véz cy une espie qui vint hastement ; a Bertrant du Guesclin est venu doulcement, au bon conte d’Aucerre qui tant ot hardement, au Besgue de Villennes qui la fu en present, a Guillaume Boytel et aus autres breisment et leur a dit : « Seigneurs, gardéz vous sauvement car une embusche aréz assez prochainement. » Adont sont esmeüz touz entierement.
145
4765 4767 4769 4771 4773 4775 4777 4779
186 Quant la bataille fu desconite et matee, une gent leur vint, bien nouvelle ordonnee, et estoient deux cens a baniere levee ; de Nonnencourt venoient, deléz Passe fondee. Ceulx cuidoient trouver Castal et l’armee, mais ilz furent trouvéz par male destinee, car Bertrant et les siens, dont j’ay fait devisee, les encloÿrent touz menant grande criee ; et la fu ceste gent desconite et matee. Et Bertrant du Guesclin leur dist a la volee : « Aléz vous en, dist il, fole gent esgaree. Deables vous ont mis en ceste contree. Mauldit soit qui en a fait celle assemblee. Bien est France par vous d’ennemis encombree. Oncques n’ot roy en France, puis qu’elle fu crestiennee, [qui trouvast son royaume ni sa terre peuplee]* de cy malvaises gens comment il y a en ceste annee. 4796
corr. d’après P : ajout du vers entre crochets.
4781 4783 4785 4787 4789 4791 4793 4795 4797
146
- Guerre de Bretagne -
Mais se vif longtemps, elle en sera delivree. » 187 4799 4801 4803 4805 4807 4809 4811 4813 4815 4817
L’escuier qui adonc ce secours amena, il fu si desconi que pié n’en demoura. A force de cheval cellui jour eschappa ; il y vint noblement, mais pouvre s’en ala. Tout palleté d’argent, n’en doubtéz ja,* a un village vint, ses pailles jus gicta. Tant it qu’il ot un sac, a son col le gicta. Quant vint a Nonnencourt, son chastellain trouve et quant il l’a veü, sa gent lui demanda. « Sire, dist l’escuier, trop malement nous va, car le Castal est prins a Cocherel dela. Jehan Joyel navré prochenement moura, le bascon de Mareuil jamais ne vivra, Pierre de Saquainville le sien corps delivra. Touz sont octis ou prins, quant qu’il en y a. » Oÿ ce le chastellain, tout le sang lui mua, croyre ne le pouoit de ce qu’il lui compta ; ja l’eüst fait mourir, quant un autre vint la qui le fait de cellui acertiia. 188
4819 4821 4823 4825 4827 4829
Ainsi fu la bataille a Cocherel inee. La bataille ont chercé tout contreval la pree. Joiel gisoit navré, a qui de riens ne agree ; on l’avoit ja tenu a mort celle jornee, guesres ne s’en failloit qu’il n’a la vie inee. Mais l’alayne lui fu un petit relevee : il ne dist un mot pour tout l’or d’une contree. Dessus une charrecte fu mis sans arrestee et lui a on la bouche un petit arousee. Touz les bons chevaliers mors a celle jornee chargerent les barons de France l’onnouree. Le Castal ont monté qui la chiere ot iree, 4820
Joiel gisoit gisoit n., premier gisoit cancellé.
[60r]
- Bataille de Cocherel et Bertrant du Guesclin qui tant ot renommee, lui a dit : « Monseigneur, n’aiéz chiere esfraee. Cellui n’est mie mort qui tient prison fermee. »
147
4831
189
[60v]
Or furent les prisonners touz ensemble aüné. Guillaume de Grantville n’y ont mie oublié, Guillaume le Baveuz l’eu prins et atrappé, a ranson le mist on, se dist l’auctorité. A dix milles lorins il l’avoit ransonné, de quoy le roy de France ot moult le cuer iré, car le roy l’eüst en prison enfermé, avec Saquainville l’eüst tost delivré. Je croy que por nul avoir ne l’eüst deporté car au roy des Françoys avoit fait maint greveté. Si it Jehan David, a ce que l’on m’a compté, qui sans raison avoit le royaume grevé. Touz autres prisonners, dont il y avoit plenté, ont les nobles Françoys bien pris et ordonné, aussi le Castal qui tant ot de ierté ; mais a cellui ont fait honneur et amité car chevalier estoit de haulte auctorité. Puis lui it nostre roy mainte grande bonté : sa ranson qu’il ot lui quicta tout de gré et puis servy le roy tout a sa volunté ; mais a la in s’en party par grant horribleté et fu contre le roy par mainte foys armé pour le prince de Galles qu’il avoit enamé ; puis ce dy fut prins et en France ramené, pour Pierre d’Anviller fu en champ attrapé, de quoy pour ce fait fu du noble roy amé. Et le Castal de Beuf fu en prison mené et moru en prison a dueil et a vilté. Or s’en vont noz barons qui tant ont conquesté, noblement sont parti, moult furent afamé ; au Pont de l’Arche sont venuz et housteléz. Ainsi que la devoient noz gens estre entré
4833 4835 4837 4839 4841 4843 4845 4847 4849 4851 4853 4855 4857 4859 4861 4863
148 4865 4867
- Guerre de Bretagne -
moru Jehan Joiel, que l’on avoit amené. La ont le corps de lui en la terre bouté et puis s’en sont alé a Rohen la cité. 190
4869 4871 4873 4875 4877 4879 4881 4883 4885 4887 4889
Aprés ceste bataille dont je vous voys comptant alerent unes lectres noz genz devisant et manderent au roy tost et incontinent la besoigne ensement que avéz oÿ devant. Le roy estoit a Rayns, la cité souisant ; pour son couronnement y ot barnage grant de contes et de ducs nobles et vaillans, de barons, de chevaliers dont je ne sçay noyent. Il y ot grant plenté qui le roy vont suyant. Droit a la Trinité, une feste joyant, devoit on couronner le roy dont je vous chant. Et a lui vint on dire nouvelles de Bertrant et des bons chevaliers qui furent souisans, qui prins ont le Castal, ou d’ourgueil avoit tant ; Pierre de Saquainville n’y vont mie oubliant et de ceulx qui sont mors a Cocherel devant. Et quant le roy l’oÿ, si va Dieu gracïent et dist : « Beau sire Dieu, grace je vous rent qui ceste courtoisie m’avéz fait si grant. A mon couronnement qui me vint maintenant m’avéz fait grant honneur, bien m’en voys parcevant. Dieu me veille sauver barnage si vaillant qui noblement se vont pour moy aventurant. » 191
4891 4893
« Dieu, dist Charlez le roy, vous en soiéz loué quant au commaincement que je suys roy sacré m’avéz fait tel honneur, vous en soiéz louhé quant je suys aujourduy tellement estrenné. 4874
de contes les et d., les cancellé.
4884
s. va Dieu Dieu g., Dieu supprimé.
[61r]
- Couronnement de Charles V Ha, Bertrant du Guesclin, tout ce brassé m’avéz. Tant vivre me laisse Dieu qui en croix fu penné* que le fait vous en soit encores guesredonné. Aÿ, Castal de Buef, tant suys par vous grevé. Engloys et Navarroys avéz vers moy porté mais jamais contre moy vous ne leur aideréz ; Je vous tiendray en prison tant que vivre porréz, tant que touz les chasteaux que contre moy tenéz m’auréz touz renduz et touz delivré. Pierre de Saquainville, pour certain vous morréz. Et vous Jehan David, jamais m’eschapperéz. Chascun de vous deux est de nostre royaume né et si avéz esté contre moy tousjours armé. » Unes lectres it faire le noble roy senné et manda vistement aus chevaliers loéz que l’on teigne fermement ses ennemis mortelz ; ou chastel de Roen furent emprisonnéz.
149 4895 4897 4899 4901 4903 4905 4907 4909 4911
192
[61v]
Au sacrement du roy ot noble baronnie en l’Incarnacion du digne fruit de vie mil .iiic . soixante et quatre a une ie fu a Rains de France bonne la jolye.* Le mydy devant, ne tenéz a folie, fu devant Cocherel la bataille fornie. A Rains la cité fu la noble baronnie : l’archeprestre y fu qui fu de grande lignie,* et fu de ceulx de Craon, de gens bien resongnee, le duc de Breban fu a la feste agencie : oncles estoit au roy qui les Françoys maistrie ; si fu le duc Haubert de Haynaut la garnye, et le duc de Bourbon, cellui n’y failly mye : le roy avoit sa seur a femme et a amie. Pour la bonne nouvelle qui estoit adrecye fu trop plus que devant la feste renforcie. Et distrent que le roy tiendroit sa seignorie 4896
t. vivre q me l., q cancellée vivre et me.
4913 4915 4917 4919 4921 4923 4925 4927
150 4929 4931 4933 4935 4937 4939 4941 4943 4945 4947
- Guerre de Bretagne -
a joye et a honneur, chascun lui signiie. Et aprés celle feste, qu’elle fu departie, vint le roy a Paris,, celle cité antie ; la lui it on honneur plus que ne porroie dire que chascun desiroit de faire courtoisie. Guesres ne demoura le roy a celle fye que a Roen s’en ala qui est en Normendie. Et la trouva le roy noble chevalerie, la lui faisoit chascun honneur plus que ne porroit dire. Ilz se penoient touz de faire courtoisie. Et commanda le roy ainsoys sa departie que l’on eüst vistement la teste detrenchie Pierre de Saquainville, pour ce qu’il n’avoit mie obeÿ au bon roy, dequoy il it folie, car bon fait obeÿr la ou raison l’octroie. Qui laisse son seigneur et a autre s’octroie c’est raison que en la in recouvre villennie, car Dieu hayst traÿson, droiture s’i octrye, car par traÿson fu la char de lui traÿe. 193
4949 4951 4953 4955 4957 4959 4961 4963
Ains que le roy se fust de Rohen departy festïa les barons, bien les a conjoÿs, qui devant Cocherel s’estoient pour lui mis. Le service it faire des chevaliers octis. A Bertrant du Guesclin qui tant estoit hardy, donna une conté qui fu en ce païs : Longueville a nom, se nous dit l’escript. Dont quant Bertrant y vint, il y fu escondys mais puis lui fu rendu du tout a son devis ; la fu fait mareschal Bertrant le poestiz. La le laissa le roy quant rala a Paris. Bien y avoit mestier Bertrant le gentis et ou païs avoit grant plenté d’ennemis. En Coustantin avoit des chasteaux bien assis. Il y estoit Valongues qui grevoit le païs : nul ne povoit aler qu’il ne fust mort ou pris.
[62r]
- Siège de Valongues Et quant Bertrant oÿ les plaintes et les criz, Jhesucrist en jura, le roy de paradis, que en Coustantin iroit, y n’en seroit partiz jusques atant qu’il auroit les Engloys desconiz. Lors assembla Bertrant bons chevaliers eslis et vaillans souldoiers et escuiers gentilz.
151
4965 4967 4969
194 Bertrant de Guesclin, avec plenté de gent, se party de Roen bien et hardiement ; touz ceulx qui a Cocherel furent ou chapplement mena avec lui bien et hastivement. Guillaume Boistel fu tretout premierement : l’avant garde mena bien et suisamment. Ainsi qu’il approcha Valongues proprement trouva les ennemis en un embuschement. Et la fu assailly Guillaume ierement mais si bien s’i porta et les siens ensuyvant, que les Engloys adonc desconit laydement ; le demourant s’en fouyt tost et hastivement ; bien .vixx . en octist a son commaincement. Ceulx qui sont eschappéz si s’en vont moult dolent ; quant vindrent a Valongues, dont je foys parlement, haultement vont criant et moult hydeusement, et disoient : « Ferméz les portes vistement car véz cy ce deable qui cuer a de serpent. C’est Bertrant du Guesclin qui ranson ne prent. » Et quant ceulx de la ville l’oÿrent clerement, pluseurs s’en sont fouÿz es boys a sauvement et les autres ou chastel entrerent erramment ; aus creneaux vont courant touz hastivement, tant doubtoient Bertrant que le cuer leur dement.
4971 4973 4975 4977 4979 4981 4983 4985 4987 4989 4991 4993
195 En Valongue ont päour ceulx de la fermeté ; pas n’estoit fort la ville, se dit l’auctorité, mais bon chastel y ot et noblement fondé.
4995
152 4997 4999 5001 5003 5005 5007 5009 5011
- Guerre de Bretagne -
Une tour encïenne y eüst on trouvé qui fu faicte du temps Clovis le coronné. Aus creneaux vont montant armé et non armé et a Saint Sauveur ont tout ce fait mandé ; et droit a Charenton sont les messages alé. Et Bertrant chevaucha par vive poesté. Et ceulx qui avec lui estoient assemblé en Valongues se sont a leur voloir entré et prinstrent les houstelz touz a leur volunté. Et Bertrant du Guesclin qui tant fu alosé regarde le chastel qui bien fu garité ; sauf alant demanda que l’on n’a trait ne gicté : si aura au chastellain ditte sa volunté. Le chastellain lui a tout son bon actordé. Adont parla Bertrant a guise d’amité. 196
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« Chastellain, dist Bertrant, oiéz mon entencion. Rendéz moy le chastel et le riche donjon et si mectéz briesment vostre corps a garison, car se par force prens la forte mancïon, je vous feray mourir a guise de larron. » Se dist le chastellain : « Vous prise un bouton, car ja n’y mectréz le pié ne le talon, ne de vous ne donne la monte d’un oignon. Le chastel garderay comme bon champïon ; ja jour vous n’y auréz la dominacïon se par force n’avéz conquis la mencïon. – Chastellain, dist Bertrant, j’oÿ bien vostre raison mais j’aray le chastel, veilléz vous ou non. Et quant conquis l’aray a ma divisïon, la teste vous trencheray par dessoubz le menton et seront decolé touz voz compaignon si que n’aréz mestier de mectre chapperon. » 197
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Or est dedens Valongue Bertrant et son armee.
[62v]
- Siège de Valongues -
[63r]
Regarde le chastel, la gicte sa visee comment le puist avoir et par quelle destinee, car la tour estoit fort et moult bien gartee : cent souldoiers y ot, chascun bien la teste armee. Le chastellain estoit d’Engleterre la lee : fel fut et oultrageux, de malvaise renommee, moult haÿ les Françoys en fait et en pensee. N’y avoit sale amont qui ne fust bien semee. De iens y ot on mis mainte grande charretee* par quoy pierres d’engin qui liens sont gictees* ne mesfacent leans une pomme pelee, car Bertrant ot mandé par toute la contree pluseurs engins qu’il it venir en celle annee ; de Saint Lo en y vint, celle ville alosee. Bertrant les it lever sans point de l’arrestee. Par devant le chastel, dont je foys devisee, ont drecié six engins gictans de rendonnee. Mais en son de la tour qui fu haulte levee, il avoit une garde toute jour ajornee qui sonnoit un bacin quant la pierre estoit levee ; et quant la pierre estoit au chastel assenee, d’une blanche touaille qui lui fu presentee aloit froter les murs, faisant grande risee. De ce avoit Bertrant forment la chiere iree.
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198 Bertrant fait fort gicter au chastel fort et grant d’engins qui haultz drecéz estoient en estant. Et la guecte qui fu en la tour au devant aloit d’une touaille toujours les murs frotant. Dont vindrent les mineurs une mine ordonnant ; pour miner le chastel s’alerent apprestant mais on n’y peu miner derere ne devant car le chastel estoit dessus roche seant. Lors Bertrant du Guesclin assembla a itant les chevaliers de l’ost qui lui furent aidant : le bon conte d’Auçoyre, un chevalier vaillent,
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- Guerre de Bretagne -
Olivier de Manny, a l’aduré semblant et Guillaume Boytel n’y va mie oubliant ; le viscoins de Roen qui moult fu souisant, cellui de Beaumont, ou l’on s’aloit moult fyant et les autres aussi et leur dist en oyant : « Seigneurs, que ferons nous de ce chastel puissant ? Il est a prendre fort, on le voit apparant. Et j’ay oÿ nouvelles, dont j’ay le cuer dolant, du conte de Monfort qui a fait maintenant assegier le chastel d’Elroy fort et puissant ;* si est Jehan Chando qui a doubter fait tant, Robert Canole aussi, que ne ame neent. Et se Charles de Bloiz va ce chastel perdant, perdu aura un fort qui lui est bien seant. » Et ilz ont respondu tost et incontinent : « Quant le duc Charles de Bloiz nous ira commandant que nous aillons a lui, nous ferons son commant. Nous sommes ses amis de par le duc normant. Et véz cy un chastel qui lui nuyst maintenant : si pensons qu’il soit prins et puis irons avant. » 199
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Aprés cestui conseil irent leurs gens armer et devant le chastel renger et ordonner, et irent un assault pour les Anglois grever. Et tant furent illec qu’ilz oÿrent compter* que touz les chevaliers avoient fait jurer le siege de Valongues et de tant demourer qu’ilz auront le chastel ainçoys le descevrer et que a ceulx de dens feront les chiefz copper ou pendre par les coulz aprés le traÿner. Touz s’alerent dedens conseiller et parler, tant qu’ilz furent d’actort du fort chastel livrer. Aus creneaux est venu pour noz gens appeller le chastellain qui hault moult va crier, tant que Bertrant ala sur son cheval monter 5091
corr. d’après P : c. ainçoys que le d.
[63v]
- Siège de Valongues et vint vers les fousséz a cellui qu’il vit crier, puis lui dist : « Que vous plaist prest suys de l’escouter. » Se dist le chastellain : « Vouléz vous marchander ? Se vous vouléz de moy le chastel achapter, je le vous vendray et a demain livrer : trente milles lorins vous en fauldra donner. » Et Bertrant lui a dit quant il l’oÿ parler : « Par ma foy, chastellain, on ne doit pas ruser. Se je devoie cy o mes gens demourer un an tout acompli et ycy nous geler, si n’en porréz vous ja ung denier enbourcer. Nous avons bons houstelz pour nous housteler ; je les feray pourveoir de pain et de vin cler, de bonne char aussi que nous ferons saler et de la busche aussi pour cest yver chaufer. Et si feray la ville foussoier et fermer. Et puis au temps d’esté, se l’on vous puet atrapper, touz pendre vous feray, bon fera essuer. »
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[64r]
« Chastellain, dist Bertrant, par la virge Marie, je n’ay que six engins ycy en ma baillie, mais je en auray deux tant ains .xve . faillie :* ne demourra engin jusques en Normendie que ne face venir en ceste partie. Si vous ne vous rendéz tout a ma commandie entre cy et troys jours, je vous acertiie jamais ne vous feray amour ne courtoisie. » Se dist le chastellain « Je n’actendray mie. Mais que je aye parlé cy a ma compaingnie, je vous diray le fait, se Dieu me benye. » Lors s’avala aval, que point ne se destrie, et parla a ses gens et monstra la follie de tenir le chastel contre celle partie. Aucun l’actorda, a l’autre ne plaist mie, mais pluseurs sont d’actort, comme l’istoire crie. Puis revint a Bertrant qui tant ot seignorie,
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- Guerre de Bretagne -
qui la repponce atend et ja sera oÿe. 201 5135 5137 5139 5141 5143 5145 5147 5149 5151 5153 5155
Le chastellain a dit : « Sire, Bertrant gentilz, nous avons ou chastel convenance et promis de rendre le chastel du tout haytié et tout vif et nous biens ensuyvant que nous avons acquis. » et Bertrant lui a dit : « Bien me plaist, beaux amis. Et je vous tiens a sage foy que je doy saint Denis. Or vous appareilléz que fait n’en soit estry. » Adonc revint a l’ost Bertrant le poestys et dist aus chevaliers « Ores soiéz resjoÿs. Le chastel est rendu, nostre est le prouit. » Ceulx en furent léz quant le parler fu dit. Et ceulx du chastel ont touz leurs estas bastis et divisent comment ilz seront departys : l’un dit qu’il ira o ses enfans petis tout droit a Chierebourc qui sur mer est assis ; l’autre a Saint Sauveur ou ilz ont des amis. Adonc ont fait trousser et les vers et les gris et les riches joyaux dont ilz furent garniz. Le lendemain au matin, quant le jour fu esclarsy, aprés souleil levant, si comme dit l’escript, fu ouverte la porte et le pont aval mis. 202
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Quant ceulx du chastel virent que soleil fu levé, ilz ont la porte ouverte et les pons avaléz ; ceulx de devant se sont mis bien chargéz et trousséz et s’en ysserent hors aus champs sur les préz. Et quant François les ont veüz et regardéz et que ceulx du chastel apporterent les cléz et qu’ilz s’en vont d’illec, adonc les ont huéz tellement que tounerre n’y fust mie escoutéz. Adonc en y ot .viii. escuiers touz arméz qui furent moult doulans dont on les a ahontéz. L’un a l’autre dist : « On nous a bien gabéz.
[64v]
- Siège de Valongues A toujours nous sera ce fait cy repreuvé ; j’ay plus chier que je soye octis ou afolé que cellui chastel leur soit ensuyvant delivré ; encores y a vivres jusques a dix moys passé, nous le garderons bien, se croyre me vouléz. » Et ilz ont respondu : « Si comme vous commandéz. » Ou chastel sont entréz et la furent ferméz. Et Bertrant qui venoit bien richement armé avec les chevaliers et escuiers senéz, aus bailles est venu Bertrant l’adduré et puis dist haultement : « Ouvréz la porte. Ouvréz. Par quelx mil deables estez vous retournéz. Emportéz tout le vostre si oublié riens avéz ; de l’emporter avec vous bon congié avéz. » Ceulx vindrent aus creneaux, si les ont regardéz et ont dit a Bertrant : « Sire, ores vous en aléz. Trop trompéz nous avéz, moquéz et degabéz. jamais en vostre vivant le chastel n’auréz et nous avons ceans des vivres a grans plentéz ; de riens ne nous servoient ceulx qui s’en sont aléz fors de la garnison essillier en touz lieux. Pour le chastel defendre, par foy, sommez assez. Ains sera aoust passé que soions afaméz ; tant que a manger aurons, ça dedens n’enterréz. » et Bertrant leur a dit : « Certes, gars, Vous mentéz. Je y soupperay au soir et vous y juneréz. »
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[65r]
Dolans furent adont trestouz les chevaliers. Lors ont cryé l’assault sans point de targier. Atant y sont venuz touz les arbalestriers et les valletz a pié et touz les souldoiers leurs trompectéz ont fait sonner et greillier ; il n’y ot si vaillent ne si grant chevalier que ne venist a l’assault de bon cuer et entier. Et mesmes Bertrant aloit les rens serchier et disoit : « Assailléz. Penséz de travailler.
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- Guerre de Bretagne -
Je vous feray l’avoir partir et octroier. » Les arbalestriers vont vers le pont chalenger et trayent aussi dru que la pluye en yver, mais ilz furent trop pou, ce les it esmaier, car on les approchoit et devant et derrier : ne savent auquel lieu ilz se puissent aider. Eschielles vont dressant chevalier, escuier, et montoient amont comme chat en grenier et de marteaux de fer vont le mur deppecier. A picques et a hoes ierent les souldoyer mais tant furent espéz que n’y pouent dommegier. Non pourquant irent tant les aucuns souldoiers que dessus les creneaux ilz s’alerent lancer et irent leurs pennons sur les creneaux drecier. Dont se rendirent ceulx, en eulx n’eu que corrousser, et furent amenéz aussi comme prisonnier. Par devant le chastel, enmy le sablonnier, a eulx huyt it on les testes detrenchier, que jamais n’auront de chapperons mestier. 204
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Ainsi prist on Valongues, le chastel seignory. Les chevaliers françoys l’ont richement garny. Et en celle sepmaine, seigneurs, que je vous dy, s’en vint a Charenton Olivier de Manny, trés bonne fermecté, mais elle se rendy. Et puis au Pont de Douve alerent sans detry : forte ville y avoit et bien fermé aussi ; si avoit une eglise la ou on avoit basty fosséz tout environ qui sont grans et fourny, et bonne fermecté qui bien se desfendy. Quand Bertrant fu la, si jura saint Remy qu’il entreroit dedens a force et a estry ; les engins it gitter et s’estoient o luy mains gentilz chevaliers qui moult furent hardy. En celle fermecté, ainsi comme je vous dy, y avoit un Engloiz d’Engleterre norry :
- Siège du Pont de Douve -
[65v]
Huon de Carelay qui bien se defendy. Et si avoit Normans qui furent esbahy car touz estoient, par voir le vous afy, encontre le roiaume, si en furent honny. Noz gens assaillerent mais riens ne leur vailly car bien fu desfendu que nul riens n’y perdy. Dont y ot une mine bien faicte par tel sy que dessoubz le moustier et les fosséz aussi fu la ville minee qui depuis en fondy.
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205 Moult fu grande la mine et longuement dura ; et si priveement adont on la mina que l’on ne sceu pas leens comment la chose ala : elle fu bien gardee de ceulx aus lieux dela. Aus lieux vers le moustier icelle mine ala. Ceulx qui furent leens, ainsi que on me compta, dignoient en un lieu, quant le mydy sonna ; plenté de compaignons chascun y apporta, ce qu’il vouloit mangier et ce qu’il desira. Mais sur une fenestre l’un son pot plenta : c’estoit droit sur la mine, la ou mains ouvrier a. Mais il avint atant que le verre trembla, le vin s’esbandy que chascun l’avisa. Adont a dit l’un : « Or ne me creéz ja se on ne mine la jus. Aviser nous fauldra ou bien prochainement morir nous conviendra. »
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206 Ceulx de la ville furent esbahyz durement quant ilz virent le verre qui trembla tellement que le vin s’espandy par devant en present. Dont se sont assembléz et tindrent parlement. Huon de Carelay parla premierement et leur a dit : « Seigneurs, je vous ay en convenant que l’on mine a ce lieu, cy je le say clerement. Or y faisons miner a l’encontre noz gent. »
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- Guerre de Bretagne -
et ceulx ont respondu : « Vous parléz sagement. » Adonc irent miner bien esforceement. Et par nuyt et par jour par tel convenant et tant irent adonc, ce sachéz vrayment, que les mineurs s’alerent encontrer vistement. Dont laisserent l’ouvrer tost et incontinent pour venir aus barons compter l’avancement : « Seigneurs, se dist l’un, avancéz vous briesment, que nous savons de vray et tout certainement que ceulx de la ville ont emprins un minement qui vient encontre nous et viendra temprement si que l’on pourra entrer a son commandement par dedens le moustier qui aura hardement. – Seigneurs se dist Bertrant, vous parléz sagement. » Adont se it armer Bertrant isnellement ; et en sa compagnie furent jusques a cent, touz appareilléz a leur commandement. Les mineurs vont devant tost et apertement ; dix en y ot arméz trestouz premierement qui en la mine sont entré hasteement. La mine ont trespercé tout a leur commandement, dedens le fort moustier se mistrent tellement que les mineurs engloiz octirent a torment en criant fort : « Guesclin. » a leur voyz haultement ; la furent si sourprins avirronneement qu’ilz se rendirent prins trestouz entierement en la main de Bertrant a faire son talent. 207
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Or fu la vile prinse et toute desfermee. Nos gens y sont entréz ainsi qu’il leur agree, par dessus les creneaux fu l’enseigne posée. Lors furent les prisonniers de la ville loee amenéz vistement en une salle lee. Huon de Carualay fu en celle assemblee, o lui pluseurs Englois qui furent de son armee. Dont fu prins le conseil de l’arrestee
[66r]
- Bataille d’Alroy -
[66v]
lequel seroit sauvé de mort a celle jornee. Huon de Carualay eu la vie sauvee, et les Engloys aussi, ce fu chose averee ; mais ceulx de Normendie, celle terre loee, qui furent Navarroys eurent la mort juree : chascun sur le marché eu la teste coppee. Puis alerent digner jusques a la vespree qu’ilz partirent l’avoir, ainsi comme leur argree. Puis eurent a conseil, c’est verité prouvee, que a Saint Sauveur iront qui sur mer est fondee. Mais une autre nouvelle leur vint celle jornee que l’on tremist a Bertrant par lectre seellee et a touz les chevaliers de bonne renommee ; de par Charles de Bloiz fu la lectre dictee. Et quant Bertrant l’oÿ et qu’il l’ot escoutee, se dist aus chevaliers : « Venue est l’annee que nous aurons honneur, s’il plaist a Dieu et agree, car la bataille aurons en Bretaigne la lee droit au chastel d’Alroy, dont forte est l’entree. La sera la bataille et fere la meslee des deux seigneurs qui sont chalengent la contree ; Le conte de Monfort l’a du tout acordee, contre Charles de Bloiz point ne l’a refusee, pour la bataille avoir a puissance mander. Et nous y fault aler sans point de l’arrestee. » Et ilz ont respondu : « N’y faisons demeuree. Jamais ne inera, se ce n’est par l’espee. »
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208 Contre Charles de Bloiz qui mandoit ses amis, s’en vont mains chevaliers de leurs armes garniz car le chastel d’Alroy estoit adont assis du conte de Monfort qui tant fu poestiz. Cellui conte dont je dy si avoit esté ilz du conte de Monfort qui commainça jadis ceste guerre en Bretaigne, dont yssi vous devis, 5333
corr. d’après P : v. maintes chevaliers d.
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- Guerre de Bretagne -
que le duc de Lencloistre amena ou païs au grant siege de Resnes ou grant fu l’estris ; aprés la mort du pere fu le ilz moult hardyz. Et s’estoit marié le conte dont je vous dy a une noble dame qui fu de moult grans amis ; nee fu d’Engleterre, de ce soiéz touz iz. Cellui conte ot grans gens et d’armes bien garniz car Jehan de Chando fu venu ou païs et Canoles aussi, un chevalier hardy, et d’Engleterre archiers ne sçay .ixc . ou .x. Le siege fu moult grant et de gens poestiz. La ville d’environ avoient Englois prins : la se furent logéz et juré et promis qu’ilz ne s’en partiront, se seront desconiz, tant que le bon chastel auront a leur devis. 209
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Devant le chastel d’Elroy qui fu noble et grant, fu le conte de Monfort qui estoit chalengent la duché de Bretaigne qui tant est souisant, si comme son pere avoit fait plus de .xx. ans. Ceste guerre, seigneurs, avoit duré longtemps dont le païs fu moult corroussé et dolans. Et si n’estoit prelatz ne sages clers lisans qui pense estre de la paix riens actordans, que chascun se disoit que son droit fu si grant que l’on ne povoit avoir actort qui fust durant. Ceulx du chastel d’Alroy dont je suys recordant estoient a Charlon qui furent desirant de garder le chastel et estre desfendant ; mais vivre leur failli et pour ce a ce temps mandoient a Charlon qui leur fust secourans. Tout droit a une ville qui nommee est Guimguant fu faicte la semonce des hardiz combatans. Quans ils furent venuz, ja n’en soiéz doubtans, des chevaliers y ot, hardiz et combatans, et de bons escuiers bataille desirans.
[67r]
- Bataille d’Alroy En ceste compaignie, dont je suis devisant, fu le conte d’Auçoyrre et avec lui Bertrant, et Charles de Dynant n’y fut mie faïllant, le viscoins de Roen lui estoit confortant, cellui de Beaumanoir, un chevalier puissant, cellui de la Hussoye Hentache le sachant, Olivier de Manny qui fu bon combactant et Yvon de Manny qui lui fu actenant, de Villaines y fu le Begues suisant, Karenloet qui fu bon aussi a son temps.
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Avec Charles de Bloiz ot noble baronnie : Guillaume de Lannoy y fu a celle fye et Guillaume Boytel qui ny s’i faigny mie, et Guillaume de Bron qui fu de sa partie. Et de Jugon y vint moult noble escuierie : le moyne de Betune qui ot bonne maisnie, et le vert chevalier o la chiere hardie. Et de Calon y vint Loÿs lance dressie, Phelippe de Beaugien fu en celle partie et Louys de Beaugien fu en sa compaignie, Garnier de Fontigny, de Bourgoigne l’antie, Henry de Pierrefort fu en celle envaïe, Aymar de Poictiers qui son enseigne ot drecie. Et d’autres chevaliers, gens d’armes ressongnie, qui furent bien arméz, meulx que ne sauroie dire, furent avec Charlon qui fu de grant lignie. Touz jurerent Jhesu, le ilz saincte Marie, que point ne lui fauldront en bataille rengie ou il aura Bretaigne du tout en sa partie, ou dedens la bataille perdront corps et vie. Et quant Charles le sceu, Jhesucrist en mercie. Mais il dist maintes foiz, de ce ne doubter mie, tout seul et avec gent et entre compaignie : « Ha, Vray Dieu, disoit il, doulce virge Marie. Si vray que je croy bien Jhesu, le fruit de vie,
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- Guerre de Bretagne -
et que sa char en croix si fu cruxiie et dedens le sepulcre morte et ensevelie, et qu’il resuscita et sauva sa maisnie, si me veilléz aider, sire, je vous en prie, ainsi bien comme je croy de vraye entente onnye que je cuide avoir droit de ceste seignorie et que pour ma moullier, que j’aime sans vilennie, en doys le nom porter sans nulle tricherie. » Ainsi disoit Charlon, a la chiere agentie, qui pour sienne tenoit Bretaigne la garnie. Mais on dit, il est vray et le sage l’afye, que le droit a la foy a bien mestier d’aÿde. 211 Ainsi Charles de Bloiz pour son droit dernier* assembla avec lui mains hardiz chevalier, moult de bonnes gens d’armes et mains bon escuier. Au chastel Jousselin, ou il a lieu plenier, conduyssi ces grans osts et les it exploitier. La peüsséz veoir mains escuz de quartier et maintes grosses lances, dont le fer fu d’acier, banieres et pennons contre le vent balier, maintes haches pesans, glayves pour estoquier. Si peüst on veoir mains bons arbalestrier et mains riches chevaulx et mains courant destrier. Baniere desploiee s’en vont les souldoiers ; au chastel Jousselin se sont aléz logier. Droit au chastel d’Alroy les on alé noncier au conte de Monfort qui tant ot le corps ier : « Sire, dist une espie, je vous viens espïer l’ost a Charles de Bloiz qui vous vient approchier. Mais je vous dy pour vray, sans estre mensongier, qu’il vient a bel conroy pour estour commancier. Faictes seürement voz gens enforcïer car la bataille auréz, je le sçay sans cuidier, car oncques ne vi gens en si grant desirer. » Dist le quenx de Monfort : « Si m’en doit ennuyer quant pour nous deux fauldra avoir tel destourber
[68r]
- Bataille d’Alroy -
[68v]
et morir et navrer, abatre et mehaigner tant de bonnes personnes et tant bons escuier. Et tant ont cousté a vestir et chaufer, a nourir, a fornir, a donner a mangier. Certes, se me poyse, se Dieu me veille aider. Et se Charles vouloit contre moy apaisier a in qu’il me voussist de Bretaigne laisser la moitie seulement tout a mon desirer, et se Dieu me prenoit sans hoirs de ma molier que tout lui demorast et a son heritier ? » Se dist Jehan Chando : « Véz cy un bon traité. Cest oufre cy endroit lui fauldra envoier. Et si ne le vouloit leement octroier, trop plus hardement et de cuer plus legier irons nous sur eulx vostre droit chalenger et nous combatrons a lui sans point de detrier. » Le conte de Monfort s’i ala octroier. Ilz ont fait un hayraut par deça envoier que Charles veille faire son conseil appointier et par bon sauf conduit une place bailler pour savoir si on pourroit ceste chose appointer. Le hayraut se parti, ne se volu detrier. Il vint a Josselin les barons saluer et a Charles de Bloiz s’est venu presenter et lui dist : « Monseigneur, je ne vous doys celer. Monseigneur qui se fait de Bertaigne appeller – duc et seigneur par droit se veult il proposer – et tout le conseil, par qui il doit user, vous mandent que veilléz une place livrer ou ilz puissent avec vous un pou parlamenter. » et Charles de Bloiz dist : « J’en voldray demander. » Les chevaliers manda et les it avuer, et leur a dit le fait, que riens n’en veult celer. Et quant ceulx l’ont oÿ, si l’ont prins a gaber. La y ot tel qui dit, si comme il l’oÿ bien cler : 5453 5469
s. oyr de m., oyr cancellé et hoirs suscrit. Une abréviation illisible est cancellée entre je et ne.
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- Guerre de Bretagne -
« Sire, duc de Bertaigne, laisséz ce fait ester. Ilz se doubtent de nous, c’est legier a preuver. Se croyre nous vouléz, par Dieu qui it la mer, toute Bretaigne auréz bien tost a gouverner et touz voz ennemis verrés a vous tourner. Laisséz aler avant, trop seroiéz a blasmer se ce qui est vostre vouloiéz lesser aler. » 212
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Quant Charles a ouÿ l’attort de ses barons, « Or, beaux seigneurs, dist il, bien oÿ vous avons. Mais il me desplaist moult dont nous combatons et que si bonnes gens que devant nous voyons vouldroit pour moy morir ; le pechié redoubtons. – Sire, quant droit avéz et que bien le voyons ja n’y aurez pechié se pour vous y mourons. Cellui qui aura tort comparra les façons. Vez cy touz voz amis et touz voz champïons : voz souldoiers sommes et vostre argent gaignons. Si ne vous devons dire conseil qui ne soit bon et il n’y a cellui qui ne vous soit preudons. – Seigneurs, se dist Bretant et nous vous en dirons. Se c’est vostre vouloir, au conte manderons qu’il se parte d’Alroy, le chastel qui est bon, – c’est l’eritage Charles – et, se nous lui trouvons, que dedens quatre jours nous le combatrons. Il s’en vait a Monfort car c’est sa regïon : il le tint le sien pere, aussi it ses taions. » Et ilz ont respondu : « Tout ainsi le voulons. » 213
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Le heraut appellerent haultement en oyant et lui ont dit : « Heraut, alez vous retornant. Au conte de Monfort vous irez recordant que le duc de Bretaigne que l’on va Charles nommant lui mande qu’il s’en vait de sa terre partant et s’en vait a Monfort tost et incontinent.
- Bataille d’Alroy -
[69r]
Et se nous le trouvons en Bertaigne seant, nous le combatrons et irons assaillent. » Se dist Charles de Bloiz : « Heraut, venez avant. Sur quel estat veult il que l’on aille parlementant ? – Sire, dist le heraut, de ce say je bien tant que le duc vouldroit bien et touz ses confortans, pour la guerre iner qui est dure et pesant, que la duché qui est cause de ce debatant fust partie a moitie, par tel convenant que chascun en fust duc nommé a son vivant. Et si le duc mon sire n’avoit nulz hieres vivant, que toute la duché venist a voz enfans. » Charles de Bloiz l’eüst actordé maintenant et en honneur de Dieu, le pere tout puissant, et pour guerre cesser qui tant aloit constant, mais de par sa moillier, ce trouvons nous lisant, lui fut dit clerement a une part trayant : « Sire, que voulez vous faire, pour Dieu le roy amant ? Vous n’avéz pas le cuer de chevalier vaillant, qui le droit heritage de vostre moiller plaisant voulez ainsi donner a loy de recreant. Terre ne doit tenir chevalier tant ne quant qui ne la veult defendre a l’espee trenchant. Et Chaton qui fu sage nous le monstre ou rommant*. » 214 Se dist le chevalier qui moult it a doubter :* « Se du conseil Chaton vous plaisoit user, dont ne lerriez vous pas vostre heritage aler. Vous devez estre duc, c’est legier a preuver, et vous estez bien si grant que l’on vous doit bien loer. Et quant mendre de vous vous veult suspediter, il ne nous en doit point plaire ne agréer. Faictes ainsi comme duc que l’on vous doit appeler en force et en vertu pour vous avaluer. Prince de tel lignage ne se doit esfraer. 5517
corr. d’après P : c. jay j.
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- Guerre de Bretagne -
Et le quenlx de Monfort vous veult desheriter et si a fait les Engloys venir deça la mer pour France guerroier et pour vous fort grever. Si a ces poins cy endroit vous vouléz arguer, vous ne le lerréz pas du païs poccesser. » Se dist Charles de Bloiz : « Se Dieu me puit sauver, je croiray le conseil que me voléz donner. Mais un songe me fait a ceste payx penser, car en dormant me vint un songe abuser. Car il m’estoit advis que voyoie voler* un faulcon pelerin qui venoit d’oultre mer avec mains espreviers avec lui arriver ; et d’autre part ung aigle voyoie hault monter avec autres oiseaux, ce me puet il sembler. Mais le faulcon veoie approcher au voler a l’aigle qui vers lui se venoit assembler. L’aigle s’en aloit pour lui reposer. Et puis vy le faulcon sur l’aigle voler, aux ongles et au bec l’ala si devorer que l’aygle s’ala en la terre encliner. Et le faulcon soubz lui ne le laissa ester tant qu’il lui it au bec la cervelle espautrer. Ainsi it le faulcon cel aigle a mort livrer. – Sire, dist le vassal, tout ce laisséz ester. Vous estez le faulcon de tout honneur passer. Nul plus gentil oysel ne pourroit on trouver et aussi estez vous, ja n’en est a doubter, que plus gentilz homs estez deça et dela la mer que le vostre ennemi qui vous veult formener. Et pour tant le vous dy et pour reconforter que au dessus vous viendréz, or y veilléz penser. » 215 Ainsi par son conseil Charles de Bloiz usa. 5566
que la l’aygle s., la cancellé.
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corr. d’après P : v. ne lerréz p.
[69v]
- Bataille d’Alroy -
[70r]
Il a dist a l’ayraut qu’il retourne par dela au conte de Monfort et si lui contera que dedens quatre jours il se combatra, s’il le trouve a Arroy, ou riche chastel a. Et le heraut revint qui le fait recorda au conte de Monfort, que rien ne lui cela. Dist Jehan de Chando qui la chose escouta : « Par la foy que je doys a Dieu qui tout crea et au prince de Galles qui cy envoié m’a, et au roy d’Engleterre qui le prince engendra, jamais par ma raison accordé n’en sera. Ordonnons noz gens et, s’ilz venent par deça, ilz seront receüz qui croyre me vouldra. Or verra on Monfort qui son droit requerra. Or verra on proesce et en qui celle maindra. De Dieu soit il mauldit le premier qui fauldra. » Se dist Robert Canole : « Aujourd’huy me verra Bertrant du Guesclin qui est au lieu dela, et le conte d’Auçoyre, ou bon chevalier a*. Mais bonté sur bonté adonc s’assemblera, la verra on l’ehur sur qui il retrayra. Mais le cuer me dit bien et le m’a dit pieça : la duché de Bertaigne, je croy, nous demorra. »
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216 En la ville d’Alroy estoient les Engloys et dedens le chastel estoient les Françoys qui avoient esté assis plus de .iii. moys. Vivres estoient failliz, ce tesmoigne le voir, car trop avoit leens souldoiers et bourjois, et femmes et enfans, pourtant fu le destroit.* Forment vont regretant le duc Charles de Bloiz et disoient touz la dedens d’une voiz : « Aÿ, Charles de Bloiz, preudons doulz et courtoys. Secouréz vostre chastel et voz gens demanoys qui pour vous soufrent tant de maulx et d’ennoys. Nous n’avons que mangier, pain, feuves ne poys,
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- Guerre de Bretagne -
failli nous est le vin, le blé et les tramoys : il nous convient mangier chevaux et palefroys. » Ainsi dedens le chastel estoit grant le destroit. Par nuyt monstroient feu tout autour des murailz signifïant l’angoisse et la fain et la soif. Au chastel Jousselin estoient les Françoys. 217
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Au chastel Jousselin qui fu prés de Jugon estoit Charles de Bloiz, a la clere façon. Des signes du chastel lui it on mencion, qu’ilz monstroient le feu sur le maistre danjon en dix lieux ou en plus ardant escouvillon. « Dieu, dist Charles de Bloiz,. amis et compaignon, se je pers le chastel qui tant a de renon, bel joiel perdray en ceste regïon. S’ilz savoient de nous et de nostre façon encores se tiendroient en telle establisson. » Un arbalestrier fu qui estoit de Digon ; a Charles de Bloiz dist clerement a hault ton : « Se je puis exploicter, foy que doy saint Simon, les nouvelles sauront a bien breve façon. – Comment le saront il ? » , dist Charles le baron. Se dist l’arbalestrier : « Et nous vous le dirons. » 218
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Dist l’arbalestrier qui fust preux et senné : « Je sçay bien le chemin environ de touz lieux. Je m’en iray ennuyt, quant il sera avespré, de cy jusques au chastel qui est Alroy nommé et je trayray carreaux largement et assez. De cy jusques au jour que vous y mectréz tendront le bon chastel, ainsi leur manderéz par briesves bien escripz qui seront seelléz. Je les trayray leens, de ce ne vous doubtéz. » Se dist Charles de Bloiz : « Moult sagement parléz. » Lors l’arbalestrier s’est la nuyt sevré,
[70v]
- Bataille d’Alroy -
[71r]
sur un cheval estoit seürement monté, l’arbalestre a son col s’en est bien toust alé. Oncques ne s’arresta, si est venu a un guef ou ot les chevaulx moult souvent abrevéz. Il parceu le chastel qui estoit alumé, c’est assavoir qui est esclairé a touz lieux pour la doubte de ce qu’il ne fust eschalé. Cestui arbalestrier qui tant estoit osé parceu bien les brandons que l’on avoit hault levé. L’arbalestre tendi dont il fu bien doctriné, mist en coche un quarrel qui bien fu enpenné, a trayre commainça, si bien c’est avisé que le feu estanny ; le quarrez fu trouvé et fu au lendemain au chastellain monstré. Quant le chastellain sceust du bref touz les secréz, les souldoiers manda, qu’il ne s’est arresté. Se dist le chastellain : « Il est bien verité que Charles de Bloiz vient et si nous a mandé que tenons le chastel qui tout est afamé, jusques au jour saint Michel qui est prochain assez. Et s’il ne s’est a ce jour aus Engloys monstré, si faisons du chastel toutes noz voluntés. » Dont dist un chevalier : « Beaux seigneurs, c’est assez. Mais je me suis icy d’un tour bien avisé. Au conte de Monfort vous vous accorderéz et oustages aussi vous leur envoieréz. Par tel convenant vous leur aie que lendemain du jour qui vous est cy mandé rendrez le chastel quant souleil sera levé, mais que de sa vitaille nous soions conforté. » Se dist le chastellain : « Sire, bien dist avéz. Tout ainsi le feray puis que vous le vouléz. » A la porte est venu le chastellain membré signiie que l’on veigne a lui sur les fousséz. Robert Canole sceut que on les avoit mandé. Il mesmes y vint, si n’y s’est arresté, aus baillez est venu, en hault s’est escrié : « Seigneurs, que vouléz vous faire ? Si vous hastéz. »
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- Guerre de Bretagne -
Se dist le chastellain : « Je vous cognois assez, chevalier suisant : Robert estez clamé. Canole, gentilz homs, envers moy entendéz. » 219
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Se dist le chastellain : « Oiéz que nous dirons. Une chose loial nous nous actorderons. Le bon chastel d’Alroy nous vous delivrerons par tel convenant que nous recorderons que le jour saint Michel, que troys jour n’y comptons. Ce chastel cy endroit contre vous garderons. Et aprés le chastel lendemain livrerons, droit a souleil levant nous le vous baildrons, par tel convenant que de vous nous avons vitaille de vostre oust, se mestier en avons, de pain, de char, de vin, de ce que nous vouldrons, combien que nous aions de bonnes garnisons plus que pour quatre mois tenir, se nous voulons, mais bien plus prendroions de recreacions. Et de ce bons oustages et certains livrerons. » Se dist Robert Canole : « Cappitaine, nous voions que vous savéz de vray que bataille attendons et que Charles de Bloiz vient cy o ses larons. Nonpourquant de ce fait au duc en parlerons. Vous estez bonnes gens, dont ce seroit raison que de ce fait icy vous eusséz bon respon. » 220
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Ainsi comme je vous dy leur fut donné respit et le plege livré, bon chevalier gentilz. Et ilz eurent des vins et du pain blanc et bis. Et en ce temps, seigneurs, que icy vous devis, venoit Charles de Bloiz, le prince seignoris, a bien .iiii. mil hommes, se nous dit l’escript. Chevaliers, escuiers et souldoiers gentilz a cheval et a pié s’en vont sur les larrys 5709
v. dy leur v fut d., v exponctuée.
- Bataille d’Alroy [71v]
de cy jusques a Louvaux, une abbaÿe de pris. Assez prés du chastel se sont les Françoys mis. Et quant ceulx du chastel ont les Françoys choisy, touz les menestrers ont sur les crenaux mis et la cornent, musent et trompent par estris. De l’ost Charles de Bloiz en fu le son oÿ. « Par ma foy, dist Bretant, véz la gens bien apris. Se victoire nous donne le roy de paradis, nous leurs donnerons beaux dons a touz les plus petiz. »
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221 L’ost Charles de Bloiz s’est si bien exploictie que jusques au chastel furent celle gent choisie. L’ost au quenx de Monfort et la chevalerie sont venuz sur les champs, si ont la ville laissee, et regardent François qui font bele establie. Olivier de Gliçon qui tant ot baronnie, a ce temps dont je dy estoit de sa partie du conte de Monfort, comme l’istoire crye ; voyt l’ost Charles de Bloiz qui s’est appareillee, qui se aprestoit moult fort dessus la praerie pour entrer en un parc qui fu préz l’abbaÿe. Assis emprés grans boys fu la place jolye, fermee tout autour et d’erbes bien jolye ; la se aloient logent si comme sur la nuytie. Pour eulx a refrechir comme gens travaillie, entre le grant chastel dont je vous signiie et le parc dont je dy, ou grant fut la veslie, si n’y avoit que un ruyssel et un pré qui verdye. En ce parc sont Françoys baniere desploie. Pour lendemain avoir bataille commaincee se sont appareillé chascun de sa partie ; a trompes et a cors chascun se esbanie. Et les autres de dela menent chiere jolye. Le conte de Monfort a haulte voix s’escrie : et dist aus chevaliers : « Beaux seigneurs, je vous prie que nous alons a eulx pour faire l’envaÿe.
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- Guerre de Bretagne -
Je voys mon ennemy qui ainsi me desfye : je lui veil courir sus a l’espee fourbye. Ou je aray la duché du tout en ma baillie et seray duc nommé, ou je lerray la vie. » 222
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Le conte de Monfort ot moult le cuer doulant que ses gens ne vouloient croyre le sien commant, que en lui ot talent et le cuer moult eu grant de commancer l’assault sur le souleil couchant, mais les pluseurs lui vont ce fait desconseillant. « Sire, dist Olivier, ne vous aléz hastant : l’homme qui ne mesure se va desmesurant. Vous avéz bien ouvré dedens ou temps cy devant. Au primes vient le fort, je le vous acreant. Nous avons bel parlé comme gens bien sachant, or nous convient de fait ouvrer en combatant. Noz ennemis si sont en ce parc a garant : a l’entrer par dedens y auroit meschief grant, mais atendre nous fault qu’ilz s’en aillent partant. Et d’autre part y sont venuz tout maintenant : se nous les assaillons, touz nous iront disant que nous les auroions prins lasséz et recreant. » Se dist Robert Canole : « Vous aléz bien parlant. S’ilz fussent hors du parc, je alasse bien loant qu’ilz fussent assailliz, car je voys apparant qu’ilz sont bien deux contre un, selon mon escïent. – Par Dieu, dist Olivier, je n’en donne un besant. J’ay oÿ deviser et lyre en rommant que les plus a la foy vont victoire perdant. Meulx vault un pou de gens qui se vont ordonnant quant ilz ament de foy comme loial amant que font tant de gens qui se vont assemblant. Oncques ne furent d’actort quant il en y a tant. L’un se met derrere et l’autre devant. Je vouldroie par Dieu, le pere tout puissant, 5767
corr. d’après P :n. ennemis se sont e., se supprimé.
[72r]
- Bataille d’Alroy -
[72v]
qu’ilz fussent encores deux milles combatant, si eüssons deça nostre ennemy Bertrant. » A ce conseil se vont les barons actordant. Et les François s’en vont ou parc appareillant aussi que a mynuyt, un bien pou par devant, cuiderent les Françoys que on les aille assaillant et alerent touz adont alarme criant comme gens esfraéz qui s’aloient doubtant. Et alerent touz adont alarme criant, serges, brandons aloient toute nuyt alumant et furent ordonnéz a loy de combatant. La vint Charles de Bloiz, au courage vaillant, et Bertrant du Guesclin va o lui chevauchant. Et regardent François qui furent actendant, ordonnéz et rengéz comme gens suisant. A demain au matin faictes nous en autant. La verrons les quelx se viendront mectre avant. Lors vont en leur retrait les petiz et les grans.
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223 Seigneurs, or escoutéz, pour Dieu le droiturier. La bataille d’Alroy vous vouldray commaincer, ou il advint ennuy et mortel emcombrer. Cellui jour y eu mort mains gentilz chevalier et mains bons hommes d’armes et bons escuiers. Celle nuyt font Françoys leur ost escheguester. Guillaume de Lannoy qui moult it a priser, fu le guet de la nuyt jusques a l’esclayrer. En sa compaignie furent mains bons arbalestrier et yssoient du parc pour Engloys espïer. Par dela la riviere ilz vindrent chevaucher, a fallos, a brandons le ruissel [costier]* jusques au lendemain qu’ilz virent esclairer. La oÿsséz trompes et cornes graillier, vestir et endosser mains bons haubers doublier et saindre maintes espees, mains bacinés lacier. 5815
corr. d’après Nh : b. le ruissel, costier ajouté (voir note).
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- Guerre de Bretagne -
De pié en cap s’armoient a loy de souldoyer : oncques nulz homs ne vit gens meulx apparailler. Les coureurs sont venuz pour l’eave gaigner mais ceulx dela y venent batailler. Mais ceulx deça y sont alez pour gaigner et irent reculer a force mains archers. Mais Jehan de Chando qui tant fait a priser, it commander tantost, sur la teste a trencher, que nul n’alast le pas véer ne chalenger. Au conte de Monfort est venu sans targer et luy dist : « Monseigneur, je vous prie et requier laissez vous assaillir et François commaincer. Et tenons noz conroys sans nous a desfoquier, car on voit bien souvent, je le dy sans cuider, qu’il n’eschiet a cellui qui assault le premier » 224
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Or se sont les Engloys arméz suisanment.* Le conte de Monfort avoit un sien parent qui ses armes porta d’ermines proprement. Olivier de Glisson qui tant ot d’ardement, it lever sa baniere et la baille au vent.* En sa route ot Cliçon moult bonne gent et aussi ot Chando, au ier contenement, et Canoles aussi qui hardi fu forment. Les archiers d’Engleterre mist on premierement, qui de traire se sont appointéz ierement. Les hayraux crioient clerement sur les champs : « Aujourduy verra on proesce et hardement. » Trompent, cornent et musent avironneement que l’on n’y oïst tonner tonnerre nullement. Gens d’armes ont leur glayves qui trenchent durement et regardent François venir moult ierement. Charles de Bloiz venoit combatre fermement. De jouxte lui ot Bertrant au cler contenement, et le conte d’Auçoyrre y estoit ensuyment, 5847
corr. d’après P : t. cornet e.
[73r]
- Bataille d’Alroy un hardy chevalier et plain de son jouvent, et le Besgues gentilz de Villaines present, et Jehan de Vienne qui regna loiaument, le bers Carenlouet a l’aduré talent. Le viscoins de Roen y fu certainement, et Charles de Dignant, ou moult ot d’escïent, cellui de la Hussoie Hentache au corps gent. De la partie Charles y avoit bonne gent.
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[73v]
Aprés ce que souleil fu ou ciel levé c’estoit Charles de Bloiz ierement adoubé. Olivier de Manny n’y doit mie estre oublyé et Yvon de Manny, son frere lui mainné. Guillaume de Lannoy n’y fu mie oublié et Guillaume Boytel qui fu preux et senné, et Guillaume de Bron richement asseuré, et le sire de Pars, un escuier louhé, – chevalier fut la fait, n’ot pas .xv. ans passé – et le vert chevalier qui tant fu aduré, et Loÿs de Chalon qui bien estoit monté, Phillippes de Beaugien et Loÿs le membré, Giraut de Fonteny qui en Bourgoigne fu né, Henry de Pierrefort, de Savoie deléz. Aÿmar de Poictiers y fu, c’est verité, et d’autres chevaliers et escuiers assez. Et venent sur les rens noblement apprestéz, ilz ont dedens leurs chiefz leurs bacinetz ferméz, leurs escuz a leurs colz, leurs haubers endosséz, bonnes plates d’acier et de glaives assez : de la teste jusques aus piéz les vist on arméz. Ilz ont l’ayve passee, petit estoit le gué, des chevaux descenderent, que nul n’y est demouré, touz se sont mis a pié, comme lÿon creté, et veoient devant eulx leurs ennemis mortelz. Et venent l’un vers l’autre ierement ordonnéz, les banieres devant et les penons doréz.
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A l’aprochier l’un l’autre, se dit l’auctorité, fu le son des trompectes bien sonné. Archiers, arbalestriers traient de touz coustéz mais ce fu pour neent : chascun fu bien arméz et se tenent ensemble sans estre dessevréz les glayves en leurs poins richement asseréz. Et puis boutent et ierent en ces escuz litéz, en plates, en haubers, en auquetons ouvréz. Le chevalier qui fu des hermines armé pour cellui de Monfort a qui il fu privé, cellui s’avança fort comme hardy et doubté, « Bertaigne. » va criant et si fu bien escouté. « Ha, Dieu, se dist Charlon, comme mon cuer est iré quant voys mon ennemy qui est si sourmonté, qui me cuide tollir a tort mes herités. A, Beaux sire Dieu, si vray comme vous savéz que la terre est a moy et doy estre clamé le droit duc de Bertaigne, car il est verité. » Tout ainsi disoit Charles qui saint est appellé. 226
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Si comme Charles de Bloiz et les siens ensuyvent tenoient leurs conroiz ensemble justement, Huet de Carualay, au ier contenement, vint a Jehan Chando et lui dist coyement : « Sire, dist il, je croy et aparçoys clerement que ceulx dela sont fors trop suisanment. Ilz nous vont assaillir par fait de hardement. Faictes tenir les champs et le champ fermement car je me partiray de vous certainement : parmy ceste valee qui grant est durement, menray une bataille ou je me ie forment, et puis m’en retorneray sans point d’arrestement et viendray par derrere eulx, voyre, par tel convent que vous en verréz bien ung grant encombrement. » Dist Jehan de Chando : « Vous parléz sagement. » Huon de Carualay n’y it arrestement,
[74r]
- Bataille d’Alroy deux cens hommes a prins a son commandement, chascun tint une hache qui trenchoit roydement. Et quant en la valee se fu mis ensement, leurs cuisseres ousterent touz communeement par quoy aler peussent trop plus legierement. Et la bataille en tant se tint moult ierement, d’abatuz et de mors en y ot largement.
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227 Devant le chastel d’Alroy fu grande la bataille. L’un y iert d’estoc et l’autre de taille. Et Bertrant du Guesclin les Engloys moult travaille. Haultement va crient : « Tuéz ceste merdaille. » Mais il y ot archiers qui sont de Cornuaille, qui tirent hastement que point n’y ot de faille. Plus fort volent saietes que en champ ne vole caille, la pouldre va levant plus tost que ne fait paille. Et le conte d’Auçoyre moult fort y iert et maille. 228 Grande* fut la bataille et forte la tenson. Ceulx du chastel d’Alroy estoient ou danjon et prioient a Dieu qui soufry passïon, que la vitoire donne a leur seigneur Charlon. A tant est venu Olivier de Clisson, une hache portoit dont l’acier fu bon. Entre ses ennemis se bouta a bandon ; un escuier feri qui estoit de Jugon, tellement l’assena sur le bacin en son que a terre l’abbati devant lui ou sablon. Dont y vindrent ses gens a guise de grifon, de glayves et d’espees, dont il y ot foison, lui fendirent ou corps cüer, foye et pomon. Mais Bertrant du Guesclin en ot grant marrisson, es Engloys se feri, si en abaty foyson. Et Guillaume Boytel estoit son compaignon, et le vert chevalier y fu bon champpïon, celluy de la Hussoie qui Hentache ot non,
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- Guerre de Bretagne -
Guillaume de Lonnay oublier ne doit on, et le conte d’Auçoyre y fery a bandon, le bers Carenlouet qui moult ama ranson, et le Besgues qui tint Vilaines en son nom, mains nobles combatans dont ne foys mencïon. Richement se porta la bataille Charlon. Si furent les Engloys, comme dit la chansson. La fu Robert Canole qui cuer ot de lÿon. Chascun se combatoit en bonne entencïon. 229
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Enmy ceste bataille qui forment s’esforça, fu le conte d’Auçoyre qui es Engloys entra, et fu bon chevalier et moult bien se porta. Un escuier y vint qui le conte lança d’une espee de Bourdeaux, que moult chier lui cousta ; tout parmy la visiere le bon conte assena, parmy le senestre oeil tout oultre lui bouta, tellement le fery que l’üeil lui creva. Le quenx a tout ce cop retorner s’en cuida, mais un Engloys y vint qui le conte frappa, et le sang lui couroit si fort qui l’aveugla. Un chevalier lui dist qui bien le ravisa : « Aÿ, Conte d’Auçoyre. Pour Dieu qui tout crea, ne vous laisséz octire, vendre vous conviendra. » Lors le conte d’Auçoyre son espee lui bailla, prisonnier se rendy et ainsi demoura. Au ber Charlon de Bloiz durement ennoia car bon chevalier fu et trés bien se porta ; chascun qui l’oÿ dire assez le regreta. Le conte de Monfort perceut et avisa la baniere Rohen, a ses gens commanda qu’il soit mené a lui, a touz ses gens qu’il a. Et Bertrant sa bataille mena a l’encontre Olivier et a lui assembla et de toute sa force durement le greva. 5989
e. Bertrant du bataille m., du cancellé et sa suscrit.
[74v]
- Bataille d’Alroy -
[75r]
Et Charles de Dinant, ou bon chevalier a, contre Robert Canolles sa bataille guya. Olivier de Manny une hache porta, a loy de chevalier moult bien se gouverna. Il escrie « Manny. » , par la bataille va. Et vous dy que le conte au premier se doubta mais Jehan de Chando bien le reconforta et lui dist « Sire, duc, ne vous esmaiéz ja car la victoire a nous aujourduy aviendra. Je sçay tout de certain comme la chose ira : Huon de Carelay touz les desconira. Ja bien tost verrez l’eure que aus autres mescherra. » Quant le conte l’oÿ, lors se reconforta. Mais son propre cousin qui ses armes porta, qui furent herminees, ainsi que l’on me compta, pour son seigneur aider par la bataille va moult ourguilleusement, c’est ce qui le greva. Par la bataille crie : « Charles de Bloiz, vien ça. Bertaigne te chalenge et tout quant qu’il y a. Aujourduy sera fait ce qui fait en sera. » Et quant Charles l’oÿ, forment se hontea : cuida que fust le duc qui la guerre mena et pourtant devers lui ferement s’adreça : chascun portoit telles armes que l’autre porta. « Dieu, dient les Françoys, comme noble duc véz la. L’un contre l’autre sont, or porrons veoir ja a qui le pris et le heeur Nostre Sire donrra. »
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230 Or furent assambléz les hardiz chevaliers, d’ermines sont arméz comme duc ou princer. Charles de Bloiz tenoit une hache d’acier. Un chevalier berton c’est venu approchier ; dessus le bacinet, qu’il avoit tout entier, lui fery a deux mains comme loial et ier. 6013
corr. d’après P : l. guerra m.
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- Guerre de Bretagne -
Tellement y a fait son grant [cop] emploier que la teste lui it contre terre ployer. Et puis Charles de Bloiz l’est alé embracier, a la luyte l’ala a la terre versier. Adonc monta sur lui a guyse de levrier et ses gens d’autre part lui sont venuz aider. Et Engloys sont dela, ou grant estour plenier, mais Jehan de Chando, Canole et Olivier sont venuz a Charlon, le noble princer, pour secourir cellui qui en avoit mestier, qui les armes portoit du conte qu’il ot chier. 231
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A la rescousse sont venuz de touz coustéz, de glayves et d’espees pourveuz et arméz. Mais Charles de Bloiz fu a force relevé et le chevalier mort et du siecle iné. Et quant Charles le voit, si s’est hault escrié : « Bertaigne a moy sera, je en suys duc appellé. Mort est cellui de Monfort par qui je suis grevé. » Et bien le cuida Charles, ainsi que oÿ avéz. Au conte de Monfort fu le fait compté : « Sire, vostre chevalier, vostre cousin charnel qui voz armes portoit, ainsi comme savéz, Charles de Bloiz l’a mort, sur le champ gist tuhé. A vous cuide avoir mort, c’est ine verité, et se vante a ses gens que vous este passé. » Et quant le duc l’oÿ, si est en l’ost entré contre Charles de Bloys qui tant fu naturé. Et quant il vit les armes dont le duc fu armé : « Ha, Dieu, se dist Charlon, il est ressucité. » 232
6055
Moult fu Charles doulant, c’est verité prouvee, quant il parceu le duc venir en la meslee. Lors fu de toutes pars bataille recouvree. 6025
corr. d’après P : f. son grant emploier, cop ajouté.
[75v]
- Bataille d’Alroy Le viscoins de Rohen n’ot pas chiere esgaree, cellui de Beaumanoir, a la chiere membree et Bertrant le gentilz renforce la meslee. Bonnes gens ot Charlon et trés bien ordonnee. Et croy que bien leur fust venu a la jornee se ne fust par un tour qui changa leur pensee. Huon de Carualay aloit par la contree, a .iic . dont chascun avoit lance ou espee. Et eurent si trés bien leur besoigne apprestee qu’ilz ont derrere Charles faicte la retornee et leur venent au dos comme gens forsenee. De haches a deux mains, comme gens iree, venent touz ensemble ferir a la volee que ceulx n’en sceurent riens a ceste matinee, ny en plus que ceulx qui sont oultre la mer salee. La veïsséz donner maintes grandes colees, mains brasz y ot rompu, maintes testes estonnees. Et Bertrant du Guesclin, a toute son armee, retorna encontre eulx que sa mort ont juree ; d’une hache a deux mains donna maintes colees. La ot telle bataille et si fort demenee que l’on ne vit oncques gens de si bonne pensee ne si bien maintenir par vertu esprouvee. L’un contre l’autre vont d’une chiere desruee, comme le chien assault le serf en meslee ou le lievre courant qui court de randonnee, tant que chascun avoit la char toute penee, de sang et de suour mouillee et arousee. Olivier de Clisson y it bien sa journee : tout ainsi comme boucher a sa beste assommee, getoit tout devant lui a chiere forcenee ; nul ne l’ose approchier qui n’entre en male annee. 6071 6081
e. plus que sont o., ceulx qui suscrit. c. assault le ch serf e., ch cancellé.
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corr. d’après P : q. sa mort ot juree corr. d’après P : s. teste a.
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- Guerre de Bretagne 233
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Olivier de Cliçon par la bataille va. Il tenoit ung martel, en ses .ii. mains le porta. Tout ainsi comme un bouchier abati et versa, ce qu’il ataingt a cop jamais ne levera ; regarde la bataille qui trop se dessembla et qui en pluseurs lieux toute se deppeça. A haulte voix dist, bien fut qui l’escouta : « La jornee est nostre, desconiz sont dela. » Robin Canolle aussi ierement s’i bouta et Jehan de Chando ierement s’ordonna. Et Charles d’autre part a l’armee qu’il a au conte de Monfort ierement assembla. Le viscoins de Rohen de jouxte lui s’en ala et Charles de Dinant qui Engloys point ne ama. Chascun a son pouoir loiaument s’i porta. 234
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Forte fu la bataille de chascune partie. Et le bers chevalier qui la chiere ot hardye,* s’i preuva vaillemment en icelle envaÿe : la baniere du conte de Monfort la garnie abati cellui jour enmy la praerie, mais par Robin Canole fu tantost redrecie. Huon de Caurelay y monstra sa maistrie : par lui et par ses gens espris de felonnie perdirent cellui jour mains bons barons la vie. Le bers Gaultier Huon, cellui ne s’i faigny mie. Et Jehan de Chando, par sa chevalerie, queroit parmy l’estour avec sa maistrie le noble Bertrant qui tant ot baronnie, qui estoit en l’estour comme beste enragie. Il ne fery oncques Engloys que mestier ot de vie :* ainsi, comme cellui qui tue les chiens sur la chaussie,* les abat devant lui et « Nostre Dame ! » crie ; de sang et de suour avoit la char moillie. « Ha, Dieu, se dist il, hardéz vostre partie.
[76r]
- Bataille d’Alroy Se je suys desconi, plus n’ay de seignorie *. »
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235
[76v]
Le noble Bretant fu ou chapple plenier ou il assault Engloys o un martel d’acier : tout ainsi les abat comme fait un bouchier le beuf quant il est temps de l’escorchier. Quant Jehan de Chando choysi le chevalier, il a dit a ses gens : « Je vous prie et requiers assailléz moy Guesclin, je en ay grant desirer. » Adont l’ont assailli et devant et derrier, de glayves et d’espees vont a lui estoquier, a terre l’abatirent par force de lancer. Mais cellui de Hussoie qui moult it a priser, et Charles de Dinant et le vert chevalier, le Begues de Villaines, Carenlouet le ier sont venuz a Bretrant et le font redrecier. Et par devant Chando abatirent Richier : de Cantorbie fu, sa seur ot a moillier un vaillant chevalier et qu’il amoit bien chier ; il n’avoit point .xxx. ans, ainsi l’oÿ jugier. Mais Charles de Dinant lui ala si paier que tout lui esfondra, bacin et haneppier : la servelle en espant, mort le it tresbuchier. Quant Chando l’a veü, n’y ot que courroucer. « Ha, mon sire, dist il, bien me doit ennuyer. Sans perdre ne pourray aujourduy gaigner. »
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236 Moult fu doulant Chando, en lui n’ot que irer. Il a dit a ses gens a sa voix hault et cler : « Se vengier ne me puis, bien me doys tormenter. » Et Bertrant du Guesclin ne daigna reculer, a Jehan de Chando c’est alé assembler avec Beaumanoir qui s’en ala chapplier contre Gaultier Huet, .i. chevalier moult ber. A glayves et a haches s’en vont a lui luyter,
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- Guerre de Bretagne -
a terre l’abbatirent, mains cops lui vont donner ; si Olivier de Cliçon qui tant it a priser, ne fust venu avant, ja le faillist iner. Mais Olivier y vint qui a prins a crier : « Beaumanoir. Beaumanoir. Vous ne pouéz durer. Vostre bataille est percee, ne poéz ressembler. Rendéz vous vistement, ne poéz contrester. Meulx vous vaulsist le duc aider et conforter qu’estre a Charles de Bloiz et voz amis grever. Vous et Rohen ferons aujourduy atrapper. » Quant Beaumanoir l’oÿ, il ne daigna parler mais d’autre part ala sa bataille mener. La font Gaultier Huet les Angloiz reculer, le moyne de Betune font a terre verser et Hue de Jugon la cervelle espautrer. La vist on forment ceulx deça decliner, la bataille eslongier et eulx desordonner, l’un perdre son espee et puis l’aultre afoler. La fu Charles de Bloiz ou il n’ot que aïrer. Le conte de Monfort ne le laissoit aler, ains le suyvoit de prés pour l’empirer et disoit que s’il le pouoit prendre et atrapper, que a trois jours pourroit bien du païs poctesser. Et Chando d’autre part ne faisoit que viser de Bertrant assaillir qui tant it a doubter ; par tout ou il le voyoit le faisoit appresser. Et Bertrant se defent comme hardy et ier, nul homme encontre lui ne pouoit le jour durer. 237
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Moult fu hardy Bertrant et de trés fort juvent ; regarde la bataille et perçoit que ses gens vont fort amenusant avironnement et que les plusers vont fuyant honteusement. Adont c’est avisé de sa moiller comment elle lui defendi de son droit sentement 6170
corr. d’après P : J. la cervelle espautier
[77r]
- Bataille d’Alroy -
[77v]
qu’il ne se combatist ainsi ne autrement fors au jour qui fu dit ; je ne vous sçay comment le jour avoit esté nommé certainement. Mais Bretrant s’avisa a ce jour proprement qu’il estoit deveéz contre lui durement. « Ha, Dieu, dist il, or pert il clerement que le sors de ma femme averist proprement. Nous serons desconfyz, je le sçay vrayment. A, Charles de Bloiz. Il te va malement. Aujourduy perdras Bertaigne entierement. » Et ainsi qu’il parloit si faitement estoit Charles de Bloiz assailli laidement de chevaliers bertons et engloys ensuyvent, et si environné et en sus de sa gent de glayve et de haches et en lieux plus de cent se trouva la nafré moult doleuresement et sa baniere a terre gictee laydement. Charles est trebuché et navré grandement et prins par le bacinet et tiré fermement. Et la ot un engloys qui ouvra faulcement : par la gorge lui mist sa dague tellement que d’autre part passa demi pié largement. Quant Charles ot ce cop, a la terre s’estent. Adont baty sa coulpe et a Jehan se rent en disant comme l’oÿ tout cler et plainement : « Vray Dieu, pardonnéz moy la mort de mes bonnes gens qui oy meurent par moy a dueil et a torment. J’ay guerrïé long temps oultre mon escïent. »
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238 Ainsi Charles de Bloiz fu en l’estour octis. On vint dire a Bertrant qui tant estoit hardy : « Ha, Sire, sauvéz vous pour Dieu de paradis. Mort est Charles de Bloiz qui tant estoit postiz.* – Hé, Dieu, se dist Bertrant, nous est le bon failli. Mort est le plus proudons qui fust ou siecle vifz. Malgré lui et a force a guerroyé touz diz.
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- Guerre de Bretagne -
Or me prise ma vie vaillant deux parisis : j’ay plus chiere morir que m’en fusse fouÿ. » Lors se mist sur les rens ainsi comme ennemy et tant se combati le chevalier gentilz qu’il n’ot hache, espee, ne fer qui fust fourby. Quant Jehan de Chando vit qu’il fut si sourprins, lors fu le chevalier de gens d’armes saisi et livré a Chando, ainsi comme je vous dy. 239
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Vaincue est la bataille, Bertrant est atrappé, aussi fu le viconte de Rohen appellé, cellui de Beaumanoir qui tant fu aduré et Charles de Dinant le chevalier louhé. Ne sçay a quoy long plait vous en seroit devisé : touz furent mors ou prins, se dit l’auctorité, fors que touz ceulx qui ont les bons chevaux trouvé. Les valletz et les pagres dont il y ot assez furent touz mors ou prins et les chevaux appéz. Adont fu ou chastel le grant duel demené, ilz voyent sur les champs les mors et les navréz. Le conte de Monfort est sur les champs demeuré et Jehan de Chando travaillé et pené, Olivier de Cliçon qui bien s’estoit porté, Canoles y estoit, bien sembloit afolé. Si fu Gaultier Huet et des autres assez en tant que la s’estoient un petit reposéz. Vit on touz les mors tellement desnuéz qu’il ne leur demoura de vesture .iii. déz : touz nuz sont sur les champs et touz leurs draps oustéz, armures, bacinés et juppons bien ouvréz. Le conte de Monfort s’est en hault escrié : « A, Seigneurs, dist-il, Dieu vous en sache gré. J’ay esté de vous aujourduy bien conforté. Si avéz aujourduy tuéz mes ennemis mortelx et si est Charles octis, de ce suis courroucé, car si en vie fust prins, je m’en fusse actordé.
[78r]
- Bataille d’Alroy Se ne fust mal conseil lequel lui fu donné, nous fussons d’actort et bons amis charnelz. Dolant suys de sa mort, puis qu’il est trepassé. » Dist Jehan de Chando : « Si le resuscitéz. »
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240 Dist Jehan de Chando : « Loons Dieu le tout puissant qui nous a envoié victoire si vaillent. Or ne vy oncques mais desconire Bertrant. Or est par devers moy, si en ay le cuer moult joyant. Il ne m’eschappera jamais en son vivant tant que la paix auréz du tout a vostre commant contre le roy de France Charles le suisant. » Dist l’escuier de Monfort : « Seigneurs, or aléz serchant le ber Charles de Bloiz qui est mort en ce champ, et puis le rendray au gentilz de Guimgamp. » Et ilz ont respondu : « Vous aléz bien parlant. » Adont y sont couruz chevaliers et sergent et vont touz les mors a part eulx regardant mais il n’y ot cellui qui aille Charles trouvant, qui son visage avoit tourné vers Orïent. Au conte de Monfort alerent retournant et vont disant comment ilz n’ont trouvé noyent le ber Charles de Bloiz qui aloit mort gisant. « Par ma foy, dist le conte, ja ne iray plus avant tant que trouvé l’aray, par le mien escïent. Oncques Charles ne vy que deux foiz mon vivant mais je iray par tout la bataille serchant. » Dont vint sur la champaigne ou les mors gisant. Charles de Bloiz trouva dessoubz .i. arbre grant, en l’eure qu’il le vit recogneu son semblant. « Véz le cy, dist le conte, par Dieu le tout puissant. » Lors prinst a souspirer tendrement en plourant. Et la fu il trouvé, je le vous acreant, que la hayre ot vestue et le corps depoignant. « Ha, Charles, dist le quenx, il est bien apparant que par malvait conseil m’avéz guerrié tant.
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- Guerre de Bretagne -
Jhesus le vous pardoint, le pere tout puissant. » Adonc le it porter tost et incontinent et couvrir d’un drap d’or a loy d’omme puissant. Dedens ou chastel d’Alroy en vont Charles portant, car le chastel d’Alroy, dont je vous voys parlant, se rendy a ce jour et y furent entrant le quenx et les barons qui lui furent aidant. 241
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Le conte de Monfort dedens Alroy entra et y it porter Charles, dont durement ploura. Et a ceulx de Guimgamp aprés le renvoia, la fu enseveli et illec demoura. Et Jehan de Chando a Nyort s’en ala et Bretrant du Guesclin a garder commanda. Et le conte d’Auçoyre, a qui l’ueil on creva, fu a Robin Canole qui puis le delivra. Au noble roy de France la nouvelle en ala de la bataille grande qui longuement dura. Dolant en fut le roy, forment luy ennuya. Charles le sien cousin doulcement regreta et Bretrant du Guesclin, que loiaument ama. « Ha, Dieu, se dist le roy, comme malement nous va. j’ay perdu mes amis en Bertaigne dela et si ay des ennemis aussi de deça : mon frere de Navarre qui moult courroucé m’a. » 242
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« Dieu, dist le roy de France, bien me doit ennuyer. Perdu ay mon cousin que je avoie si cher. Et si ay perdu Bertrant mon chevalier et mes autres amis qui de bon cuer entier me eüssent secouru pour mon nom essaucer. – Sire, font les barons, veilléz vous appaiser. Puis que la chose est faicte, on ne la puet changier. – C’est voyr, si dist le roy, je le croy de legier. Et si voys d’autre part malvaise chose approchier,
[78v]
- Négociations après la défaite car le roy d’Engleterre si me veult abaisser et a ce que je voys, il veilt la paix briser qu’il it au roy mon pere, a qui Dieu veille aider. Je ne voys loiauté nullement repairer. » En ce point fu le roy un temps a ung yver, tant qu’il avint que l’on it une paix pour traiter du conte de Monfort, lequel it envoier devers le roy de France et si lui it prier qu’il lui voussist laisser Bertaigne a justicer et il le serviroit et le viendroit baisier, hommage lui feroit de loail cuer entier. Adont y it le roy, pour la chose avancer, l’archevesque de Rains aler et envoier, .i. moult gentilz prelat qui moult fait a priser et fu de ceulx de Crahon, .i. lignage moult ier.
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243 [79r]
Le roy it l’archevesque dedens Bertaigne aler et le mist en sa main de la paix confermer et qu’il en tiendroit ce qu’il en vouldroit ordonner. Pourtant vouloit le roy ceste chose donner car a Bertons ne vouloit ceste guerre mener ne avoir ennemis qui les voussist grever, car le roy pensoit aler oultre la mer. Et en Navarre aussi bien se devoit doubter car le roy de Navarre, dont vous m’oiéz compter, avoit en Normendie chasteaux a gouverner – voyres, touz les meilleurs que l’on y pourroit trouver– car conte fu d’Evreux, si en devoit pottesser, et si avoit Saint Sauveur et Chierebourc sur mer et plus de .xx. chasteaux bien fors a conquester, que depuis it le roy abatre et reverser. Mais de ce me tayray, si vous vouldray compter de Bretrant du Guesclin qui tant it a louher, car le roy it depuis de prison delivrer, et vous diray comment, se le vouléz escouter. Puis vous diray aprés de Bertrant au corps ber
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- Guerre de Bretagne -
qui en Espaigne ala roy Henry couronner et it de son païs roy Dempietre bouter, pourtant qu’il vouloit contre la foy aler et qu’il it la roÿne sa femme a mort livrer. Pour la plus loiale dame c’on peüst point trouver, la dame a ce seigneur on la ist marïer – au roy Pietre, lequel it tant a doubter – pourtant que on le vouloit en hault lieu assener. Seur fu de la roÿne qui Dieu veille sauver, qui en France pouoit la couronne porter. Le conte de Savoie volu la terce espouser,* le conte de Harcourt eu la quarte a garder et la cinquiesme fu, ainsi comme je oÿ compter, au seigneur de l’Abret, on ne la puet celer. Et le duc de Bourbon, dont on doit bien parler, fu freres ces .v. dames, si en it plus a loer car du sang saint Loÿs les puet on bien nommer. 244
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Seigneurs, ores escoutéz, si orréz bonne chansson. Le riche roy de France, que l’on appelle Charlon, volu actorder de Bertaigne et cesser la tenson du conte de Monfort, .i. moult noble baron. L’archevesque de Rains, né du païs berton, assembla en Bertaigne les princes de renon et monstra a chascun par sen et par raison comment la paix viendroit de la discencïon et de la mouiller Charles, a qui Dieu face pardon, qui chalengoit Bertaigne et la grant regïon ou elle avoit perdu Charles le sien baron, pour qui Dieu it miracles en icelle saison, car cellui qui lui donna de mort l’orion issi hors de son sen et fu en arrageson* pour ce qu’il se vanta de la grant mesprison qu’il avoit octis Charles au champ sur le sablon devant chastel d’Alroy a la destructïon. Quant fu yssu de son sen a guise de gagnon,
[79v]
- Traité de paix entre Charles V et Charles de Navarre ses amis qui savoient de sa confessïon, lui irent aporter loié comme un larron. A Guimgamp droitement et en devocion l’oirent a la tumbe de Charles le baron. La i telle vertu, tout de voir le scet on, que le malade fu en sen et en raison, memoire, entendement et bonne avisïon. Cellui devant le saint se mist en oroison, en celle eglise usa sa vie, se dit on.
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[80r]
Seigneurs en cellui temps avint, c’est verité, que l’accort fu fait et trés bien confermé que la femme Charlon, qui de Bloiz fu nommé,* et ses enfans aussi qui en furent demouréz, qu’i estoient a Londres qui est bonne cité, par devers Edouart, d’Engleterre advohé, ostage a cellui temps que oÿ avéz. Se dist l’arcevesque qui dela fu alé par la volunté Charles de France couronné, par l’accort des barrons dont il y ot assez. D’une partie et d’autre fu le fait regardé ain que le païs et la noble duché peüst vivre en leur paix ; si en fu le dit tel que la dame tiendroit chasteaux, villes, citéz, en Bertaigne eu sa part ; et le conte louhé seroit duc de Bertaigne a sa vie nommé et lui feroit hommage et tiendroit loiaulté, tout ainsi que le fait estoit acoustumé, au riche roy de France et y seroit alé. Et ainsi fu il dit et fermement juré. Et receu des barons et foy et loiauté, et fu tout le mefait a chascun pardonné. Qui avoit prisonnier, il estoit delivré par ranson paier en bons deniers comptéz. Et Jehan de Chando, le chevalier louhé, 6409
corr. d’après Nh : et la femme C.
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- Guerre de Bretagne -
de Bertrant delivrer fu aussi appresté ; parmy la ranson fu de prison gicté. Et le conte d’Auçoyre, dont l’ueil lui fu crevé, fu délivré aussi, comme vous oiéz, et pluseurs chevaliers et escuiers louhéz ; touz furent delivréz que nul n’y est demeuré. Le conte de Monfort si fu duc appellé et s’en vint a Paris ou le roy fu trouvé, et it hommage au roy et lui it touz ses gréz. Mais depuis lui failli, se dit l’auttorité, dont il fu de ses gens chassé et debouté. plus que oncques n’ot esté en jour de son aé. Oncques homme ne fu, se croy je, si fortuné : en Engleterre fu prouvé et esgaré jusques de cy a ung temps que bien oïr porréz. 246
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Depuis ce dit avint que Bertrant le hardy fu du tout delivré et s’en vint a Paris. Et lui it bonne chiere le fort roy poestiz depuis le Castal qui avoit esté pris tout droit a Cocherel en bataille conquis. Le roy par bon actort lui it comme bon amy : le Castal it tant au noble roy de pris qu’il lui rendi chasteaux dont il estoit saisi, tant que sa ranson, se nous dit l’escript, lui quicta proprement le riche roy de pris et fu de son conseil et très bien son ami. Et traita de la paix par sen et par advis vers le roy de Navarre, ou il estoit subgit, que entre les roys vaillans ot trieves et respiz et jornee de paix, ne scay, neuf foys ou dix. Mais en ce temps regna si fort l’ennemy, que le roy d’Engleterre, Edouart le hardy, fu si trés mal d’actort vers le roy de Paris que la guerre esmeut moult fort, se m’est advis.
- Traité de paix entre Charles V et Charles de Navarre -
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[80v]
Seigneurs, a icellui temps et en icelle saison y ot mains parlement, comme dit la chansson, du fort roy Edouart et du fort roy Charlon et du prince de Gales qui cuer ot de lÿon, qui estoit a Bourdeaux en dominacïon. De Guïenne tenoit le païs environ, ou le païs tenoit en tel subjectïon conte ne chevalier ne prisoit un bouton, bourjoises ne bourjois ne nul homme de nom. Oncques roy Alixandre qui comquist mains royon ne se porta si ier ne de telle façon, car il ne prisoit homme du monde si lui non. Et se faisoit servir en sa regnacïon plus noblement assez en sa subjection que ne faisoit le roy de France le royon ne que l’emperere de Rome en Pré Noyron. En ce point si regna jusques a la saison dont cy aprés orréz le temps et la raison et comment de Guïenne, un païs bel et bon, perdy par son ourgueil la dominacïon. Puis ot du roy de France, comme dit la chanson, un parlement qui fu assigné a Vervon. Et la vint a actort, par certaine acoyson, le roy qui de Navarre tint le noble royon et vint devers le roy par tel condicïon que par trés bonne paix it inclinacïon. Et y ot de la paix recompensacion tant que bien lui souist et lui vint a bon. Et donna au roy Charles en grant alictïon un cuer qui fu d’or in, sans coyvre ne leton.
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248 La pays du roy de France et du roy navarroys si fu faicte a Nervon, ce tesmoigne le voir, devant mains nobles chevaliers et mains nobles bourjois. La fu le ber Bertrant avec mains Françoys
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- Episodes espagnols -
que le roy navarroys haÿ a celle foy. Mais cellui accort fu fait et juré sur la croyz a tenir a tousjours et plain de leurs foyz, dont Bertrant en jura Jhesucrist et sa loy se la paix n’est tenue, ainsi que c’estoit droit, oncques si male paix ne it prince ne roy. Et adont dist Bretrant le preux et le courtois qu’il iroit voluntiers prandre la sainte croiz et iroit dedens Chyppre, pour les Sarrasinoys, aider le roy de Chyppre qui fu crestien a droit. Bon, loial et hardy estoit en touz endroiz ; Alixandre avoit prins adont en cellui moys, une bonne cité ou il eu fait murailz. 249
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Seigneurs, or escoutéz, franche gent honnouree, et vous orréz chanson de matiere prouvee qu’il advint dedens le temps et la saison louhee que cellui Bertrant regna qui tant ot renomee, et comment il ala o grans gens assemblee pour destruyre paiens, la male gent dervee. De Grenade la grant, celle noble contee, disoit qu’il seroit roy ains sa vie inee. Mais pour une aventure qui fu desordonnee eu celle entreprise defaite et arrieree, car en ce temps dont j’ay ma chansson devisee avoit dedens Espaigne, une riche contree, un roy qui oncques bien ne it en sa duree. Roy Pietres ot nom, c’est chose averee : plus malvaise creature ne fu de mere nee. Se en receu en la in si malvaise duree : de malvaise euvre doit estre male souldee. 250
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Cellui roy Pietres d’Espaigne qui moult folement regna, avoit une moiller telle que l’on vous dira. Oncques meilleur d’elle ou royaume ne entra :
[81r]
- Enchantement de Pietres -
[81v]
seur au duc de Bourbon estoit, n’en doubtéz ja, et seur de la roÿne de France par deça. Or fu Dieu harengier quant il les assembla :* un bon et un malvait ensemble acompaigna car dam Pietre le roy sa vie mal regna et la bonne reïgne oncques mal ne pensa. Une dame y avoit, a ce que l’on me compta, qui dam Pietre le roy par amours ama, et celle par amours son cuer y atacha. La reïgne d’Espaigne qui la foy aoura, a toute leur amour petit y aconta. Mais la femme malvaise qui le roy atrappa, par herbes, par venin si fort l’envenima que le roy ne pooit durer ça ne la s’il ne voioit la folle qui ainsi l’afola, et ne pouoit veoir celle qu’il espousa, avec lui ne beust ny ne mangea ne coucha ; ainsi furent longtemps qui a mal leur tourna. Or avoit de coustume Pietre qui se ia es Juïfz de sa terre et trop plus les ama qu’il ne it Crestïens, car trop haÿz les a, ne de tout son conseil riens ne leur demanda, ce qu’il avoit a faire tout il leur cela. Et disoit aus Juïfz et de tout il les charga de ce qu’il ot a faire et deça et dela. Et si on dit un parlier deça et dela : de croyre mal conseil male in en sera. Dieu paie quant lui plaist, bien pouoir en a, s’il atend en la in, la jornee viendra. Tant va le pot a l’ayve que en la in brisera. Et l’omme qui mesure en lui ne mectra, mesure mal gré lui dedens lui entrerra, et se par force y entre, ja bien ne lui en venra.
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251 Beaux seigneurs, la malvaise heure atrait la in. Bon fait croyre sa loy et le vray Dieu divin
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- Episodes espagnols -
et comment le ilz Dieu vint ouster le venin par la mort qu’il soufry de la lance Longin. La loy qu’il nous donna et monstra de cuer in et le sacrement saint fait de pain et de vin doyvent croyre de cuer toutes gens enterin. Et ne it pas roy Pietre, ainsi comme je devin, il amoit meulx assez Juïfz et Sarrazins. Et en touz ses estaz lui estoient voysins et trop plus les croyoit que frere ne cousin. Pourtant lui envoia Dieu Bertrant du Guesclin, car il moru par lui a guise de matin et par le noble Begues de Villaines gentil, ainsi comme vous orréz avant que preigne in. 252
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Pietres, roy d’Espaigne, en haÿ la roÿne qui donné lui fu de sa loial orine, car seur estoit germaine de la noble roÿne de France, le païs ou tout honneur s’afye. Mais la dame de Castre, ou tout honneur s’acline, avoit souspris le roy par euvre serpentine que donné lui avoit, dont il prist en haÿne la meilleur, la plus belle qui estoit si benigne. Et bien voussist le roy qui fu de male convine, qu’elle fust trespassee et mise en feu d’espine : n’eüst cure comment elle fust mise a morine. Ainsi avoit beü de l’eave serpentine du venin du serpent qui les maulx envenime. Et tant estoit la dame en lui encline de monstrer bel samblant et de faire bel signe, mais tout ce ne valoit denier ne poitouïne, car il sentoit tousjours en son cuer la haÿne dont elle lui avoit donné la medicine. Si en fu le roy destruit de vie et des saisine et celle en eu en la in un grant feu d’espine. Les barons du païs qui sont de bonne orine, 6586
corr. d’après P : r. par envie serpentine
[82r]
- Enchantement de Pietres en blasmoient le roy qui a bien n’en s’encline. Un frere avoit le roy qui estoit en saisine d’une noble conté qui estoit bonne et ine. Henry avoit nom, jusques a Bel Morine, en Grenade ensuyvant, ou sont gent sarrazine, tint puis a son commant et fu Espaigne encline a ce conte Henry qui fu de grant orine, par Bertrant du Guesclin qui leur donna l’estryne.
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253 Cellui Henry dont je dy comme conte regna. Et Pietres le sien frere la couronne porta et si estoit le mainsné, mais on le couronna. Mais on ne savoit point comment la chose ala. Et Henry fu tenu bastart a ce jour la, mais depuis fu bien sceu, ainsi c’on vous dira, qu’il fu de loial lit, mais comme bastart regna. Et dam Pietres le roy bastart si l’appella ; aussi it le roiaume car chascun le cuida. Non pourquant cellui Henry point ne s’en hontoya car estre le cuidoit, bien s’en asseüra, en l’evesché aussi bastart on l’appella. Mais gentilz homs estoit et chascun l’onnoura, et la foy catholique loiaument il ama. Des grans et des petis tellement s’acointa et si bien que chascun l’onnoura et prisa. Et disoient les plus grans qu’il y a que c’estoit grant pitié dont Pietre tant regna et que Henry n’est roy, chascun le desira. Et on dit un parler et l’a on dit pieça la voix d’un commun peuple qui par le monde va que c’est la voix de Dieu qui le monde crea. Si comme par prophecie, quant on prophetiza la venue de Dieu qui en virge s’esconsa, avient la voix du peuple qui fu et qui sera. Pour la bonté Henry chascun le convoyta, son bien et son honneur ; et Pietres qui regna
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- Episodes espagnols -
en male oppinion, maint homme lui donna une si male grace que Dieu lui envoia, car ce qu’il deservy Jhesucrist lui paia. 254
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Une noble conté en Espaigne la lee qui Tristemare a nom, c’est bien chose averee, tenoit le bers Henry de par son espousee, une dame vaillent et de touz bien amee. Henry hantoit a Burs, la cité bien fermee, avec Pietres le roy, dont j’ay fait devisee, et avoient esté d’acort par mainte annee que oncques en eulx n’eü parole mal dictee. Mais les barons d’Espaigne, celle terre honnouree, prioient a Henry de cuer et de pensee que a son frere le roy qui tant ot renommee, blamast a son secret, coiement a celee, pour quoy aus Juïfs ot s’amort ainsi monstree et se enloigne de la gent crestiennee. Et la reÿne aussi lui dist mainte jornee : « Mon frere, se dist elle, s’il vous plaist et agrée que blasméz monseigneur de sa folle pensee de ce que ainsi me tient comme folle esgaree. Se suis je du droit sang saint Loÿs engendree, seur au duc de Bourbon, o la chiere membree. Et ma seur aussi est de France couronnee roÿne entierement qui pour moy est iree ; la dame de Savoie qui contesse est clamee, et celle de Halcourt, plus blanche que fee, et celle de l’Abret, ou la conté est lee, toutes sont mes serourges, c’est chose prouvee ; n’y a celle qui n’aye pour moy mainte pensee et qui n’ait cuer dolant dont ainsi suis assignee. Par une fole dame suis ainsi derraee, qui me tient ensement de sa grant esselee, qui me hayt tellement, c’est verité prouvee, que veoir ne me puet soir ne matinee.
[82v]
- Afrontement de Pietre et Henry à Burs -
[83r]
Certes, c’est grant pitié dont ainsi suis menee et la char monseigneur sousprise et abruvee du venin du serpent a qui son ame soit danpnee. – Dame, se dist Henry, par la virge sacree, je suis dolant pour vous en cuer et en pensee. Et je l’en ay blasmé en sa sale pavee et si le blasmeray ains qu’il soit la vespree s’il ne veult changier sa vie forcennee. Je me doubte que Dieu qui it ciel et rousee, lui donne en la in une male soudee car il se fait haÿr de haÿne aduree des meilleurs chevaliers d’Espaigne la louhee. Mais tant est foul le roy de maniere avilee que on ne lui puet blasmer l’euvre desordonnee qu’il maintient tout adés sans faire retournee. Nonpourquant lui diray, par la vertu sacree, se de sa court devoie partir en ceste annee et estre a tousjours mais banny de sa contree.»
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255 Henry est de la dame sevré et departy. Venu est au palais ou Pietres le hardy tenoit son parlement avec faulx Juïfz, que crestïen n’y fu apparceu ne choysi. Et quant Henry les voit, si fut tout esbahy. Avec les espaigneux chevaliers de grant prys se mist en parlement le bon vassal Henry. Quant il vit que temps fu, si c’est vers le roy mis, de Dieu le salua qui en la croix fu mis. « Bien veignéz » dist le roy qui tant estoit faytys. « Comment ! se dist Henry noblement seignory. Point ne vous maintenéz, selon le mien advis, ainsi que fait le roy de France gentilz et que nostre pere it qui fu si bien apris,* qui sur les Sarrazins mena guerre tousdiz et prenoit les chasteaux et les avoit assis. 6674
corr. d’après Nh : d. venin du serment a q.
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- Episodes espagnols -
De cy jusques en Grenade conquesta le païs,* Sabatayre conquist, Archala et Sampis. Le roy de Bel Marin fu par lui desconfy et si prinst en bataille nostre pere ses .ii. ilz. Et octist Sarrazins et les a a in mis et le roy de Grenade s’en fouÿ desconfy. Et vous ne faictes guerre ny ennuy ne despit contre les Sarrazins et les Dieu ennemis, ainçoys leur accordéz et treves et respiz pour l’argent et pour l’or qui vous en est promis. Garde ne vous donnéz d’un sort qui est soubtilz que un aigle doit venir bien tost en ce païs par qui un roy d’Espaigne doit estre desconfy. Ne le dy pas pour vous, noble roy poestiz, mais le pechié encombre homme dont il vault pis. » 256
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« Noble roy, dist Henry, je vous jure et afye qu’il a un sage clerc en la vostre patrie qui ou livre de Brut avise son estudie. Ce qui est advenu en tant de mainte partie a tout si bien monstré en sen d’astronomie qu’il a bien declaré maintes grandes prophecie et c’est des cordeliers d’Avignon averie. Mais ou livre de Brut trouve par sa clergie que un aigle naistra, s’il n’est en ceste vie, de Bertaigne petite viendra, je le t’afye, qui en Espaigne viendra o grant compaignie et trouvera un roy plain de grant felonnie, mescreant, ourgueilleux, oultrageux et plain d’envie, qui sera desconfy en bataille rengie et perdra cellui roy toute sa seignorie. Si comme l’estournel le nomme et aproprie, car quant l’estournel sur les champs s’esbanie et se assiet sur l’arbre ou sur la praerie, touz les oiseaux qui sont prés de lui a celle fye si tost comme l’estournel s’en vole par maistrie
[83v]
- Afrontement de Pietre et Henry à Burs touz les autres oyseaux lui tenent compaignie et s’en vont avec soy et chascun se humilie. Or regardéz que c’est, sire, je vous en pris. Vous estez sages homs et ne le monstréz mie. »
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[84r]
« Sire roy, dist Henry, soiéz bien advisé. Cellui oysel que je dy qui ainsi est nommé, quant ou columbier vient, ou oiseaux a assez, si tost que l’estounel est devant arresté touz les coulons s’en vont, riens n’y est demeuré. C’est a dire, beau sire, que cellui aigle senné partout ou il viendra, se dit l’auctorité, seront a lui rendans chasteaux et fermetéz et les colons de dedens lui rendront les clefz, touz oiseaux le suyvront la ou il sera volé. Sire, je le vous dy pour bien, se vous voléz, je seroie de vous courroucié et iré. Poy aréz d’onneur se le vostre perdréz car trop a layde face cellui qui n’a point néz. Regardéz en voz faiz et si vous adviséz et outéz ces Juïfs et sus de vous mectéz et croiéz voz barons et priséz et améz, quar de son païs n’est pas homme sire clamé quant il est de ses gens haÿ et despité. Et d’autre part aussi au pechié regardéz que vous faictes a ma dame, ou tant a de bontéz. C’est la plus loiale dame de .xv. roiaultéz, toute la plus gentile qui soit en .c. citéz, car du sang saint Loÿs est son corps engendré. Adviséz vous, beau sire, par Dieu qui fu penné, que l’aigle ne soit en Espaigne avolé pour le vostre pechié, si vous en confesséz car je vous di pour vray que l’aigle est né, ou roiaulme de France a esté advisé car il a le roiaume des malvaiz delivré. Je ne vous en dy plus, dit en ay assez.
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- Episodes espagnols -
– Hé, Bastart, dist le roy, faulx traïte prouvé. Je croy que vous vouldroiéz que fusse iné. Se j’estoie ja mort, octis ou tuéz cuideroiéz vous d’Espaigne estre sire clamé ? Ja il ne plaise Dieu que celle roiaulté peust avoir a seigneur bastart bien aprouvé. – Sire, se dist Henry, or ne vous aïréz. Ne vous en parleray jamais en mon aé. Et se bien vous en vient, pour Dieu si le prenéz. – Bastart, dist le roy Pietres, faictes et vous en aléz. Je vous banis d’Espaigne environ de touz lieux. Et decy en avant si vous y estez trouvé, destruyre vous feray comme traïtre prouvé. » La y ot un juïf qui Jacob fu nommé, il a dit a Henry : « Bien estez rassoté que le plus noble roy qui peust estre trouvé avéz si courroucié que veoir le pouéz. Aléz vous en decy, que ne le comparéz. » Et quant Henry l’oÿ, si s’en est courroussié. « A, Faulx Juïfz, dist il, vous l’avéz envenimé. Par vous et par les autres est le roy enchanté. Mais foy que doys a Dieu qui en croiz fu penné, par les felons Juïfz travailléz et cloéz, pour la mort Dieu vengier qui de vous est blasmé, aréz vostre paiement tel que avoir le pouéz. Jamais le roy mon frere ne forconseilleréz. » Il a trait un coutel qui fu bien ailé et se hardy a Jacob comme preux et ousé. Tout parmy la chevesse lui a les doys gitéz, le coutel lui bouta tout parmy les coustéz, le cuer lui a fendu et le foye deléz. A terre l’abbaty et puis s’est escrié : « S’il a homme seans dont je soye atouché, de ce coutel saura s’il est bien ailé. » Roy Pietre se leva courroucé et iré et tira un coutel comme tout forsenné. Ja fust encontre lui moult ierement alé quant un chevalier est vers le roy arresté
- Mort de la reine d’Espagne [84v]
et lui dist : « Monseigneur, pour Dieu, or vous soufréz. Pour un juïf felon vostre frere ne frappéz. » Or fussent touz les autres en ce point atornéz. Et Henry se parti et si s’est avalé et a dit a ses gens : « Mes chevaux enselléz. J’ay pis fait aujourduy que cellui qui jouhe aus déz. »
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258 Henry fu moult doulant et plain de marrisson. Car le cheval monta lui et ses compaignons. Et on tenoit le roy a guise de lÿon. « Ha ! Seigneurs, dist le roy vous me estez touz larrons, qui ne m’avéz laissé octire ce quoistron. » Dient les chevaliers : « Apaiséz la tençon. Si Henry s’est mesfait, si lui en donnéz pardon. Sire, c’est vostre frere et homme de renon. – Par ma foy, dist le roy, il a fait traÿson. Mais chier l’achatera, si ait m’ame pardon, car banyr le feray d’Espaigne le royon. » Puis le it il bannir a guise de garçon du roiaume d’Espaigne entour et environ. Pour ce ne s’amenda de riens le roy Peyron et it prendre cellui a guise de larron qui de son frere ot fait a lui defension. Ainsi regna le roy en son abusion. De la mort la roÿne avoit devocïon mais oncques ne la peu ainer par poison car elle s’en gardoit par bonne avisïon. Or vous diray comment la roÿne de nom moru et trespassa, Dieu lie face pardon. Le roy la it mourir a sa maleïçon par faulx Juïfz malvaiz, de malvaise nacïon, a qui il commanda qu’ilz feïssent son bon de la bonne roÿne du bon sang de Bourbon. Et les felons Juifs de faulce oppinion s’en vindrent a la chambre appeler a bas son que on les laissast entrer dedens sans arristoison.
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- Episodes espagnols -
Quant une chamberiere vit celle nacïon, a la roÿne vint qui ait beneïsson, « Dame, se sont Juïfz traïteurs et felon qui a vous voulent parler, je n’en sçay la choison. – Ha, Dieu, dist la roÿnne, inee est ma saison. Murdrir ilz me viennent, telle est mon entencïon Ha, Jhesucrist de gloire qui a l’Anoncïon descendi en la virge qui Marie a nom et a Jhesu son ilz qui soufry passïon, et qui ressucita en sa propre façon et monta es sains cieulx au jour de l’Ascension et a la Penthecouste a grant confusïon* conforta ses amis saint Jacques, saint Symon, saint Clement, saint Jehan et l’apoulstre Peyron, sa mere et les apostres a qui il donna pardon commans l’ame de moy, si que elle aie vray pardon. Et doint joye et honneur mon frere de Bourbon, et toutes mes seurs et le bon roy Charlon, et touz ceulx qui sont de mon estractïon. Et doint recognoissance roy Pietre mon baron qui me fait huy mourir a tort et sans raison. » 259
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Atant véz les Juïfz, a qui Dieu doint encombrier. Abrahan a parlé, .i. traïtreur lainer : « Dame, il vous fault morir sans point de delaier. le roy le veult ainsi, on ne le puet laisser. – Seigneurs, dist la roÿne, ne m’en fault point prier. La mort recevray de bon cuer et entier. Or me veille Jhesu, que l’on it en croiz drecier. Qu’il face pardon a Pietre le princier car il ne scet qu’il fait, si l’en doit on purgier : une fole lui a donné de son mestier. Et je prie a Jhesu, que l’on it en croiz drecier. » Dont prinstrent les Juïfz sans point d’arrestier la dame et puis la vont sur un lit couchier. Et puis gictent sur luy une coute a or mier,
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- Mort de la reine d’Espagne et puis vont les deux coutés d’une corde lier et a chascun coron pendirent un mourtier. Et puis s’en sont partiz et ont tout fait vuider. Adonc n’y avoit dame, chevalier ny escuier ; ainsi moru la dame, Dieu veille a l’ame aider. Le roy le it celer jusques a l’anuytier. Et dist on que l’avoit faicte communier. Au matin fu trouvé en sa main un saultier, toute morte en son lit sans nés .i. recouvrier. Ensevelie fu en un noble moustier. Pietre n’y acontoit la montance d’un denier : le deable ot au corps pour le faire enragier.
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De la mort la roÿne furent pluseurs dolans, dames et damoiselles et mains chevaliers francs. Mesmes vont les Juïfz Pietres le roy blasmant, ou derriere de lui l’appalloient tyrant. A Tristemare fu Henry au cuer dolant, Pietre l’ot fait bannir hors d’Espaigne la grant. Mais Henry assembla un peuple fort et grant qui contre le roy Pietre s’aloient aloant. Adonc ot un juïf riche et bien puissant. Aprés la mort la dame, de quoy j’ay dit devant, vint mains miracles beaux en ce temps apparans tant qu’il fu inspiré de Dieu le roy amant. Cellui se party de Burs, le roy ala laissant* et si l’avoit servy tousjours en son vivant, sa naissance savoit et tout le convenant, et si avoit veü son pere suisant. Cellui vint au ber Henry, le noble combatant, et lui it assembler mains chevaliers puissans, evesques, abbés et mains bons clers lisans. Quant ilz furent venuz, comme je voyz comptant, de ce fait furent pluseurs moult esmerveillant. « Seigneurs, dist le Juïfz, aléz moy escoutant. Merveilles vous diray, de quoy touz les plus grans
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- Episodes espagnols -
seront touz esbahiz, je le vous acreant. Et ain que chascun me aille mieulx creant. je me veulx baptizer, baptesme vous demant. » Et ilz ont respondu : « Vous l’auréz maintenant. » Adonc furent baptizé lui, sa femme et ses enfans, et prinstrent nostre loy qui est bonne et vaillant. 261
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Adont dist le juïf : « Seigneurs, entendéz ça. Chose vous veil monstrer qui dicté vous sera : comment Henry, mon sire, que veoir pouéz la, doit estre roy d’Espaigne, comment l’on vous dira. Je vy le roy son pere devant Arcala et le servy long temps par tout ou il regna.* Si vy la belle dame que le roy fïança et fu avec lui et par tout l’amena. Et le conte Henry en la dame engendra et troys illes qui sont ou païs par deça. Cellui qui fïance femme en la loy est pieça, que s’il habite a lui, jamais autre n’aura. De ce fait vint Henry et puis si trepassa icelle riche dame que le roy tant ama. Aprés le roy leur pere autre femme espousa. Qautre illes en ot, oncques ilz ne porta, de quoy le roy gentilz adont se courrouça. Sa moillier laidanga et sur Dieu lie jura se celle n’avoit .i. ilz quant elle gerra, que jamais en sa vie son corps ne l’amera Oiéz que le roy it : son espousee eslonga, une belle juisve maintenant acointa si trés secretement que nul n’en parla. En icelle juisve un bel ilz engendra. Quant celle juisve senti qu’elle esgrossa, de bon cuer et devost tantost se baptiza. La roÿne gentise des sains fons la leva et la retint o elle et forment l’en ama. 6930
corr. d’après P : l. servy long par tout o., temps ajouté.
[86r]
- Révélations des origines d’Henry Depuis que ensainte fu souvent lie demanda et celle dont je dy tout le fait lie cela et lie dist que un marchant avec elle se maria, ne scet ou il ala ne quant il reviendra. La dame le creüt, bien atant s’apaisa. Tout ensainte devint, dont moult lui ennuya, car un juïf lui dist que une ille sera et sa belle illeule qui se crestienna, ara, se dist, un ilz quant elle delivrera. Et ce fu verité, d’un bel ilz acoucha icelle convertie, dont on vous contera, et la noble roÿne une ille apporta. Touz en une jornee nasquirent ces .ii. la. Et pourtant la roÿne qui son mary doubta, it tant o sa illeule et si bel l’en pria que son ilz pour sa ille de cuer lie octroia. Dedens ou nom de la ille icellui ilz demeura. On it entendre au roy que trop bel ilz y a. Lors fu il baptizé et Pietres l’appella. Ou lieu du roy d’Espaigne Charlon le couronna* et Henry le droit hoirs point la couronne n’a. » Quant le peuple l’oÿ, forment s’esmerveilla. Les plusers s’alierent et jurerent droit la que mais ne lui fauldroient tant que couronne ara. Et quant Pietres l’oÿ, forment lui ennuya, mais encontre Henry la guerre commainça. Et contre ses aidans it tant et pourchassa par or et par beaux dons qu’il promist et donna que la plus grant partie devers lui retorna et encontre Henry ierement chevaucha. Mais Pietres ot plus gens, de ce ne doubtéz ja, car le plus riche homs tousjours plus deport a.
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262 Le bon conte Henry qui tant it a prisier, ot assez pou de gens pour son droit desrainier, tel l’ayme loiaument qui ne lui ouse aider.
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- Episodes espagnols -
Roy dam Pietre le it par ses gens dechasser tant qu’il convient Henry du roiaulme vuyder, sa femme et ses enfans il lui convient laisser. En Arragon ala vers le roy noble et ier qui lui it grant honneur car forment l’avoit chier. Henry le salua en son palaix plenier et lui dist : « Noble roy, aïde vous requier contre Pietre le fel qui me fait enchasser du roiaume vaillant que je doys justicer. Vous savéz que dam Pietre, que je n’ay mie chier, ne doit en toute Espaigne tenir un seul denier, car il ne fu pas né d’une loial moillier mais en une juisve qui se it baptizer. La l’engendra mon pere, mais on le it changer, un ilz contre une ille pour le roy apaiser. Bien va a sa nature, ne le puet eslongier, car les Juïfz a fait de sa court approchier : a autre gens ne veult son conseil declairer et de Juïfz se fait amer et conseiller. Si a fait murdrir aussi sa courtoise mouiller, telle que un chascun scet, sans vice repprocher. – C’est voir, dist le roy, je le croy de legier. Mais tant comme vous vouldréz avec moy herbergier, vostre estat vous donrray a loy de chevalier, mais contre le roy Pietre je ne puis guerroier. » Dist le conte Henry : « Je me cuide appointer a celles gens d’Espaigne tellement alïer que dam Pietre morir feray et essillier, car le droit que j’ay me pourra bien aider. » 263
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Henry en Arragon si fu moult bien longuement. Quant roy Pietre le sceu, si en ot le cuer dolant. Escripre it tantost lectres appertement ou il avoit escript moult felonnessement : « Nous, roy Pietre, dist il, d’Espaigne entierement, 7010
c. vous vous vouldréz a., vous supprimé.
[86v]
- Exil d’Henry -
[87r]
sire de Portiugal, de l’onneur qui y pent, et d’Arragon aussi avironneement, nous faisons assavoir qu’il nous desplaist forment et si avons mal gré et portons maltalent que le bastart Henry, que je hé durement et que j’ai fait banir d’Espaigne entierement comme faulx traïtreur qui enchante ma gent, qui se veult faire roy par un abusement d’un juïf qui me het et Dieu scet bien commant. Si vous foy assavoir et vous ay en convent que se vous le tenez en vostre tenement contre nostre vouloir et nostre mandement, que dedens Arragon nous verréz temprement. D’Espaigne vous meneray si grant assemblement que fouÿr vous feray tant que terre s’estent. » Le message party cheminant tellement qu’il vint a Palpigant, ou l’istoire ment. Et la trouva le roy et la dame ensuyvent et son ilz avec lui et sa illle au corps gent. Le messages it tant sans nul delayement que au roy a baillé ces lectres proprement. Lors un Arragonnoys lui lysy bellement. Quant la teneur choysi, si ot le cuer dolant. Il regarda Henry qui la estoit present. « Sire Henry, dist il, ores regardéz comment le roy Pietre me mande si rigoureusement que vous face partir hors de mon tenement , ou il me portera dommage grandement. » Dist le conte Henry : « Je le voys clerement. Dieu m’en veille vengier, voyres, si vrayment que pour verité dire et faire justement j’ay la haÿne a lui ainsi villainement. Ne veil pas que pour moy aiéz encombrement, je m’en departiray assez prochainement. »
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- Episodes espagnols 264
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Ainsi convint Henry departir d’Arragon et aler a garant en estrange royon. Or vous diray de lui quant il sera saison. Or advint en ce temps dont je foys mencïon que l’on porta les nouvelles en France le royon de la mort la roÿne qui Dieu face pardon. Tout par tout le roiaume de France le sceut on. Doulant en fut le roy et il ot bien raison, aussi fut la roÿne et le duc de Bourbon, et touz les chevaliers blasmerent roy Peyron qui la roÿne avoit morte par traÿson. Mais ou noble roiaume ot tel confusïon d’une grande compaignie et estoient foyson gens de maintes manieres, de male nacïon : l’un engloiz, l’autre escot, si avoit maint Breton, Hanuier et Normant y avoit a foyson. Par le païs aloient prendre leur mansïon et prenoient par tout les Engloys ranson. Vingt cincq cappitaines trouver y pouoit on, chevaliers, escuiers y avoit, se dit on, qui de France essillier eurent devocïon. il n’y demeuroit beuf, vache ne mouton, ne char, ne vin, ne pain, ne oye, ne chappon. Touz pillars, murtriers, traÿteurs et larron estoient en la route dont je foys mencïon. 265
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En la grande compaignie y avoit de gens tant que ne le vous diroit creature vivant, qui le païs de France aloient fort pillant. Le roy en avoit moult le cuer triste et dolant et mandoit son conseil et leur dist en oyant : « Que ferons, dist il, de celles gens tyrant, qui nostre peuple va ainsi destruisant ? Se ne sont que pillars et larrons et tirant. 7056
corr. d’après P : Ainsi comme Henry voulu partir d’A.
[87v]
- Bertrant recrute les grandes compagnies Se je met encontre eulx mon barnage vaillent et se je pers me barons qui sont noble et puissant, jamais joye n’aroye en jour de mon vivant. Qui les pouroit mener en Espaigne la grant contre le renoyé Pietre le mescreant, qui nostre seur a fait mourir comme tirant ? Je le vouldroye bien, quoy qu’il alast coustant. » Bertrant du Guesclin va bien le roy escoutant. « Noble roy, dist Bertrant, j’ay le cuer desirant de passer oultremer ou nom Dieu le puissant et combatre aus paiens a l’espee trenchant. Le roy de Chippre iroye voluntiers confortant. Alixandre a conquis ou paiens avoit tant. Et se de ces gens qui vous vont couroussant me pouoie approchier, je vous ay en convent que je en deliverroye le roiaume vaillant. – Je le vouldroye bien, dist le roy a Bertrant. » Et Bertrant lui a dit : « N’en parléz plus avant. Je saray leur vouloir, ne vous aléz doubtant. »
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[88r]
Bertrant du Guesclin ne s’i volu arrester. Son hayraut appella, si lui dist hault et cler : « Va t’en, dist il, bien tost et penséz de l’aler en la grant compaignie et si va demander touz les cappitaines et feras assembler. Un sauf conduit pour moy leur iras demander, car j’ay trop grant desir que a eulx puisse parler. » Cellui a respondu : « Ce fait a creanter. » Sur le cheval monta et pensa de l’aler. Vers Chalon sur la Sone ala ces gens trouver. Si le cogneurent bien a la tunicle porter, contre lui sont venuz sergens et bachelers. « Seigneurs, dist le hayraut, or me veilléz mener aus cappitaines droit, je veulx a eulx parler. » Et ilz ont respondu : « Bien les porréz trouver, 7110
va sons dist i., sons cancellée et ten suscrit.
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- Episodes espagnols -
enssamble maintenent assis sont au disner. » Et le heraut y va car il se it mener. En un moult riche houstel qui bien it a priser, trouva les cappitaines, comme je oÿ compter. L’oustel avoient prins et l’ouste fait aler et bevoient bon vin qu’ilz avoient a merveil. Le Chevalier Vert va haultment saluer, Huon de Caurelay, que l’on doit premier nommer, et Mayeu de Gournay, un Anglois d’oultre mer, Nicholas Esquabourne y fait bien a nommer, Robert Secot aussi qui fait gens atirer. Si fu Gaultier Huet, que l’on ne puet pas celer et Briquet, escuier qui se faisoit doubter. Si fu le Bourc de Laines qui ne pourroit amer le roiaume de France, ains le vouloir grever ; le Bourc de Perres aussi avec lui volu mener. Si fu Jehan de Brenes, navarroys sans doubter, et d’autres chevaliers que je ne sçay nommer. « Seigneurs, dist le hayraut, Dieu vous veille garder. Vous estez bonnes gens, on vous doit bien louher. Vous avéz bien a boyre et trés bien a riler et si ne vous fauldra ne paier ne compter. » 267
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« Seigneurs, dist le hayraut, Jhesu vous benye. Bertrant du Guesclin a vous tant mande et prie qu’il peust parler a vous touz par compaignie ; voluntiers vous verroit sans nulle villenie. » Huon de Caurelay qui les Engloys mestrie, respondy a l’ayraut sans penser a follie : « Par foy, gentilz hayraut, je vous acertiie que je verray Bertrant icy a chiere lye. S’es autres a actorts, en droit de ma partie je le veil voluntiers, se Dieu me benye. Et lui donray bon vin que j’ay en ma baillye ; je lui en puis bien donner, pour vray le vous afye, il ne me couste riens, denrrïé ne demie.»
- Bertrant recrute les grandes compagnies -
[88v]
Se dist Gaultier Huet : « Mon corps s’i octrie. » Dist le Vert Chevalier : « N’est droit que le desdye. » Chascun l’a actordé en droit de sa partie. La fu le sauf conduit de la chevalerie juré et octroié sans nulle tricherie. Lors parti l’ayraut qui ot chiere lie, revint a son seigneur que point ne se detrie. La nouvelle lui dit de celle compaignie. Adonc monta Bertrant et o luy sa maisnie, pour le païs de France it grande courtoisie ainsi comme vous orréz, se Dieu me donne vie.
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268 Or chevauche Bertrant que point ne s’arresta. Et atant chevauche et si bien esploita que la grande compaignie perceut et advisa. Il est venu en l’ost et puis les salua : « Dieu gart les compaignons, dist il, que je voys la. » Lors se sont enclinéz, chascun se humilia. « A Dieu le veu, dist il qui croyre me vouldra touz riches vous feray, guerres ne demourra. » Et ilz ont respondu : « Bien soiéz venu ça. Sire, voir, nous ferons tout quant qu’il vous plaira. – Car ja ne perira qui croyre me vouldra. »* Lors vit les chevaliers la ou on l’amena. Huon de Caurelay, quant Bretrant advisa, il est venu a lui et puis si l’accola, ami et compaignon doulcement l’appella. Et Bretrant lui a dit que nul compaignon n’a s’il ne veult faire ce dont il le priera. Dont lui dist Caurelay si tost qu’il l’escouta : « Bertrant, par cellui Dieu qui le monde crea, trés bonne compaignie le mien corps vous fera en toutes les manieres comment il appartiendra. Et iray tout par tout ou aler vous plaira guerroier tout le monde deça mer et dela, fors le prince de Gales, mais ja ne m’aviendra
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- Episodes espagnols -
que soie contre lui, car si tost qu’il vorra je iray avec lui, juré lui ay pieça. – Sire, se dist Bretrant, je veil trop bien cela. » Huon de Caurelay vistement commanda que l’on apporte le vin dont Bertrant boyra et il lui fu apporté du meilleur qu’il y a. Dont vint Gaultier Huet qui a Bertrant le livra mais Bertrant lui a dit que Huet boyra. Grant honneur lui ont fait ceulx qui furent dela : oncques boyre ne volu chevalier qui fust la jusques atant que Bertrant le premier assayé l’a. Et quant il ot beü, les autres regarda et a dit : « Beaux seigneurs, ne vous mentiray ja. Véz cy riche vin, ne sçay qu’il vous cousta. » Dit le Vert Chevalier qui bien escouté l’a : « Oncques nul homme vivant denier n’en demanda. » 269
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« Seigneurs, se dist Bertrant, veilléz moy escouter. Pourquoy je suis venu je vous veil recorder. Si vien de par le roy qui France doit garder, qui vouldroit voluntiers pour son peuple sauver faire tant devers vous, je le vous di au cler, que avec moy venisséz ou je vouldroie aler et bonne compaignie vous vouldroie porter. Et je vous ay en convent et le vous veil jurer que j’ay grant volunté de Sarrazins grever avec le roy de Chippre, que Dieu veille garder, ou aler en Grenade pour Sarrazins tuer. Par le païs d’Espaigne irons, trop le puis desirer. Et se le roy dam Pietre y pouoie trouver, voluntiers le feroie courroucier et irer, .i. villain murdrier de sa mouillier tuer. En Espaigne porrons largement prouiter car le païs est bon pour vitailles mener et si y a de bons vins qui sont frians et clers. Et y a de mes amis qui y voulent aler :
[89r]
- Bertrant recrute les grandes compagnies -
[89v]
le conte de la Marche, le gentilz et le ber, Olivier de Manny, que je doys bien amer, et ses freres aussi qui sont bons bachelers, et autres chevaliers qui se voulent exploiter pour trouver Sarrazins que Dieu veille grever. Et se vous me vouléz ce fait cy actorder, je vous feray bailler du roy et delivrer deux cens milles lorins et devant vous compter. En Avignons irons, ou je sçay bien aler, et absolucïon vous iray impectrer de touz voz pechiéz de tuer et embler. Et si aurons du trezor qu’il nous fauldra livrer et puis irons ensemble nostre voiage achever. Et je vous prie pour Dieu qui se laissa pener, que chascun aie vouloir de sa vie amender. Se nous voulons tretouz en nostre cuer penser, nous pourroions bien de vray en nous considerer que fait avons assez pour noz ames dampner. Quant nous arons tout fait, si nous fault il iner. Pour moy le dy, seigneurs, je le sçay bien au cler : je ne fy oncques bien dont il me doit peser, je n’ay fait que mal, gens octyre et tuer. Et se j’ay fait des maulx, bien vous pouéz compter d’estre mes compaignons encores de passer, d’avoir fait pis que moy bien vous en pouéz vanter. »
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270 « Seigneurs, se dist Bertrant, savéz que nous ferons ? Faisons a Dieu honneur et le deable laissons. A la vie visons, comment usé l’avons : eforcees les dames et arses les maisons, hommes, enfans octiz et touz mis a ranson ; comment mangé avons vaches, beufz et moutons, comment pillé avons oiez, poussins, chappons et beü les bons vins, fait les octisïons, eglises vïolees et les religïons. Nous avons fait trop pis que ne font les larrons.
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- Episodes espagnols -
Les larrons vont emblant, c’est pour leur norrisson ; telz y a qui le font pour norrir enfançons, tel y a qui ne trouve a gaigner deux boutons. Sachéz, cellui qui est de pouvreté semons a peine puet il estre en ce siecle proudons. Pis sommes que larrons car gens murdrissons. Pour Dieu, avisons nous sur les paiens alons. Je vous feray touz riches, se mon conseil creons, et aurons paradis aussi quant nous morrons. » Huon de Caurelay qui oÿ les motz bons, a dit au ber Bertrant et tel fu son respons : « Sire, Bertrant, dist il, se m’aïst saint Simon, je vous ay en convent que jamais ne vous fauldrons. Et compaignon de foy nous vous appellerons, ne jamais l’un de l’autre ne departirons, non si le roy de France, ou nul mal ne volons, ne prent guerre aus Engloys, car je suis lige homs au prince des Galois qui maintient les Gascons et Guïenne ensuyvant et les guéz et les bons. – Je le veil, dist Bretrant, nous le vous actordons. Demandéz, si vous plaist, a touz les compaignons, a touz les chevaliers et a touz les barons. Se vous estez d’accort, devers le roy irons et feray apprester l’or que nous promectrons. Et touz mes amis vouldray avoir semons pour faire le voiage que si fort desirons. » Se dist le chevalier : « Et nous le vous dirons. » Dont parla le vassal a touz les barons et a touz les Anglois et aussi aus Bretons et aus fors Navarroys et aussi aus Gascons. 271
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Huon de Caurelay fu chevalier vaillent, de la guerre aus deux roys fu maintefoiz dolans ; mais il convient servir maintefoiz les servans. La y en ot de liéz, si en ot aussi de dolans, car il y ot assez pillars et fors tyrans
[90r]
- Mort du roi de Chyppre qui n’avoient pitié de femmes ne d’enfans, ne des maisons ardoir en plus que mescreans. Si y avoit des bastars et des autres meschans qui redoubtoient moult et peine et hahans, les montaignes monter et les grans desrubens, car le païs de France est bel et deduisant, si a de bonnes viandes et de bons vins frians. L’un a l’autre disoient pluseurs et les auquans : « Que ferons nous a Romme, la cité qui est grant, quant nous avons trouvé saint Pierre sur les champs ? » Mais ce conseil icy actorderent les grans. Huon de Caurelay si fu bien conscentans, et Jehan d’Evreux, Navarroys suisant, et le Vert Chevalier qui fu bon combatant. Si fu Gaultier Huet, le noble combatant. Vingt et cincq cappitaines, se nous dit le romans, s’acorderent au fait de ce que dist Bertrant. Aprés si actorda tout le demourant et jurerent leurs foyz et seremens puissans. « Seigneurs, se dist Bertrant, soiéz moy escoutans. Je m’en iray parler au riche roy des Frans car bailler vous feray ces .iic . mille frans. Et si viendréz digner, tel est mon escïant, a Paris de jouxte moy, je le suis desirant, quant je le manderay et il en sera temps. Et vous verra le roy qui en sera joyans. Et ne serons en riens sur mal souspeçonnans car oncques je ne fu traÿson pourchassant. Si ne feray ja tant que soye cy vivans. » Dient les chevaliers et escuiers vaillans : « Oncques plus vaillent homme ne fu veü aus champs. Plus avons de creance et sommes afïans en ce que vous seroiéz en voz loiautés disans que en tretouz les prelaz ne les haultz clers lisans qui sont en Avignon ne en France habitans. »
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Quant Bertrant ot l’accort escript et seellé, aus chevaliers a dit : « Que je soie escouté. Vous viendréz a Paris quant je y aray esté et par devant le roy vous auray amonstré. Et puis nous en irons quant j’aray ordonné, et vous pri que les fors soient au roy livré. » Et ilz ont respondu : « A vostre volunté. » Bertrant vint a Paris ou le roy a trouvé. De la grant compaignie lui dit la verité : « Sire, dit il au roy, j’ay acompli voz gréz. Je vous mectray hors de vostre roiaulté touz les pires gens de tout vostre regné, mais je exploiteray tant qu’ilz seront touz sauvéz. – Bertrant, se dist le roy, la sainte Trinité veillet garder ton corps et le te laisse ramener, si que encores te voye a joye et a santé. – Noble roy, dist Bertrant ou tant ot loiauté, les cappitaines ont moult grande volunté de venir a Paris vostre bonne cité. – Je le veil, dist le roy et bien me vient a gré. Et se ilz venent au temple , la soient assemblé, car trop y a de gens et trop grande plenté : si en pourroient estre a merveilles esfraéz et je ne veil avoir a eulx fors amitié puis qu’ilz se sont envers nous actordéz. » Ne sçay que l’on vous eüst long plait devisé. Au mandement Bertrant, quant il ot tout le gré du noble roy de France, lors furent ceulx mandé, et vindrent a Paris par bonne seürté. Au temple droitement la furent ilz mené, bien furent festoiéz et noblement digné et receurent mains dons ; la fu tout seellé. Et touz les chevaliers qui eurent volunté d’aler avec Bertrant, le chevalier louhé, vindrent par devers eulx et irent amitié : Olivier de Manny, un chevalier louhé,
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- La Grande Compagnie à Avignon et Alain de Manny et Yvon le mainsné, et Guillaume de Lannoy n’y doit estre oublié. Si fu Carenlouet, un escuier sené, qui puis octist Chando, un chevalier doubté. le Besgues de Villaines c’est a eulx présenté, qui depuis en Espaigne ot tellement regné qu’il fu de Ribedieu depuis conte nommé.
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[91r]
Avec la compaignie du noble Bertrant ala cellui de Beaugien, un chevalier vaillant, le conte de la Marche, un chevalier puissant, et le bon marechal que l’on nomme d’Odrahan, chevaliers, escuiers qui touz furent jurant de faire le voiage dont je vous voys comptant. Et pour le roy dam Pietre, dont je vous ay parlé devant, y alerent pluseurs pour estre son nuysant. Mais Bertrant au corps gent, dont j’ay parlé devant, avoit en son propos et en son escïant d’aler en Grenade et encores plus avant, car en Cyppre cuidoit aler en confortant le noble roy de Chippre, le hardi conquerant, le meilleur roy qui fust par dela conversant. Cincq cens ans a passé, disent les auquans, que sur les Sarrazins n’eu oncques plus fort guerroient : Satalie conquist et octist le soudant, et si prinst Alixandre, dont les murs furent grans. Et avoit en pensee cellui roy en desirant de couronne porter en la cité puissant ou Jhesu soufry mort pour nous faire garant : c’est de Jherusalem, dont on parole tant. Mais son frere germain et ses appartenant tuerent cellui roy, comme dit le romant.* 274 En l’annee, seigneurs, que Bertrant se croiza 7375
corr. d’après P : i. fu Ribedieu depuis c., de ajouté.
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- Episodes espagnols -
pour aler guerrïer Sarrazins par dela avint une merveille, telle n’avint pieça. Car cellui bon roy de Chippre qui loiaument regna, ot un frere germain, deable l’engendra, car son frere le roy tua et devora* pourtant que Sarrazins haÿ et guerroya. A ceulx de Satalie proprement marchanda de son frere tuer qui noblement regna ; puis aprés l’octist, tua et aina. Si avoy le roy esté en France par deça au noble roy Jehan qui bien lui actorda qu’il iroit oultre mer et lui convenança. Mais le bon roy Jehan moru et trespassa a Londres la cité ou la mort l’appressa. Pour tenir verité en Engleterre ala. Or diray de Bertrant qui bien s’appareilla, a Chalon sur la Sone toutes ses gens mena. Par devers Avignon icellui ost s’arouta et furent foyson ; et ainsi delivra le roiaume de France de celles gens la, dont le peuple de France loiaument l’en ama, car meilleur chevalier ne fu trop long temps a.* 275
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Bertrant du Guesclin a grande compaignie s’en va vers Avignon, une cité jolye. Et tant ala adonc ceste chevalerie que au saint Pere fu dit qui moult ot seignorie : « Saint Pere, véz cy gent qui est moult ressoignie. Prouvence honnouroit, celle terre garnie : c’est la Grande Compaignie, de France est voidie. » Le saint Pere adonc ne s’i arresta mie, a un cardinal dist, moult sage de clergie : « Aléz, dist il, savoir a icelle maisnie pourquoy ilz sont venuz en icelle partie. De par moy leur diréz et de ce je vous prie que du pouoir de Dieu et de sainte Marie,
- La Grande Compagnie à Avignon [91v]
de saintes et de sains qui sont en tronisie et d’anges et d’archanges qui sont en gerarchie excommunieray toute la compaignie s’ilz ne s’en vont decy sans faire nul detrie. » Le cardinal lui dist : « Et je le vous octroie. Je iray a eulx parler, soit sen ou folie. » Dist a un chappellain qui fu de sa masnie : « Dolans suis dont l’on m’a mis en celle seignorie, car on m’envoie voir une gent enragie qui concïence n’ont heure ne demie. J’amasse mieulx par Dieu que n’y alasse mie. Pleüst a Jhesucrist qui de mort vint a vie, que le pappe y fust en sa chappe jolye. Je croy que l’on lui aroit tantost desvestie. »
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276 Le cardinal s’en va tost et astivement. Bien voussist qu’il eüst acompli son talent et qu’il fust revenu a son commandement ; meulx amast a chanter sa messe haultement. Oncques ne s’arresta, si vint a celle gent. Il demanda a qui il tiendra parlement de par le saint Pere pour qui la voye enprent. « Sire, dist un Engloys bien hastivement, vous sauréz bien a qui parler prochainement. Bien soiéz vous venu. Apportéz vous argent ? » Oÿ le cardinal, si en eu le cuer dolant. Atant véz vous Bertrant et Ernoul d’Odrahan, le mareschal de France qui regna loiaument. Le conte de la Marche y estoit en present, Huon de Caurelay, cellui n’y failli noyant. Si fu Jehan d’Evreux au ier contenement, o lui Gaultier Huet et si fu ensuyvant Olivier de Manny qui tant ot hardement. Si fu Robert Secot qui a l’argent s’atent, et le Vert Chevalier et des autres grandement qui se sont enclinéz assez benignement.
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- Episodes espagnols -
Encores en y avoit assez et largement qui voussissent avoir robbe sans vestement. 277
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Le cardinal fu moult haultement hounnouré. Se dist le cardinal quant il fu advisé : « Seigneurs, bons chevaliers vaillans et naturéz, le saint Pere m’envoie a vous, c’est verité, car voluntiers saroit toutes voz volontés, pourquoy vous estez et pour quoy vous y venéz. » Le mareschal parla qui fu bien doctriné, car moult fu sage homs et moult amoderé. Du roy de France fu moult prisé et louhé, car pour le plus prodomme qui peust estre trouvé lui fu l’orislamble baillé et delivré depuis qu’il fu venu d’Espaigne et retourné. Et Bertrant fu aussi connoistable nommé, pour un bon chevalier et qui fu moult doubté, ainsi comme vous orréz, si plaist la Trinité. 278
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Le gentilz marechal d’Audrahan le vaillant a dit au cardinal qui fu bon clerc lisant : « Sire, nous vous dirons nostre fait tout apparent. Véz cy une gent qui ont esté tirans et en trés malvaise voye il a passé longtemps.* Ou roiaume de France ont fait des maulx dix tants* que nul ne vous pourroit pas estre recordant. Or se sont actordéz, tel est leur escïent, d’aler en Grenade dessus les mescreants. En Chippre le roiaume qui est si souisant cuidasmes nous aler, ja n’en soiéz doubtans, mais nous avons oÿ nouvelles trop pesans, car le bon roy de Chippre qui estoit suisans, a esté murdri, dont nous sommes dolans. Or nous convient aler contre les mescreans et le roy de Grenade et touz ses confortans
[92r]
- La Grande Compagnie à Avignon pour mener ces gens que serons conduisans ain que dedens France n’en soit nul conversant. Tout au commaincement chascun est suppliant de l’absolucïon avoir, il en est temps. Et diréz au saint Pere, dont le pouoir est grant, qu’il nous veille absouldre et n’en soit refusant, de l’absolucïon dont il est bien puissant par la grace de Dieu, dont il est lieutenant, et de coulpe et de peine, des maulx griefz et pesans que nous avons touz faiz puis que fusmes enfans. Et avec tout ce nous sera presentant pour faire nostre voiage .iic. mille besans. » Oÿ le cardinal, si lui mua le sang. Il leur a dit : « Seigneurs, le nombre est trop grant. Vous seréz bien assoubz, de ce ne suis doubtant, mais de l’argent bailler ne suis point respondant. »
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[92v]
Lors Bertrant du Guesclin parla isnellement : « Sire, il convient avoir tout ce entierement que le mareschal a demandé en present, car je vous dy pour vray qu’il en y a gramment qui d’absolucïon ne parolent noyent : ilz ameroient mieulx a avoir argent. Nous les faisons prodommes malgré eulx vrayment, nous les menons touz en droit essillement ain que mal ne facent sur crestïenement. Dictes a l’apostole ce fait entierement, car nous ne les pourroions enmener autrement. Encores quant ilz aront de l’avoir largement se tiendront ilz envys de mal faire souvent. » Se dist le cardinal : « Je vous dirray briesment la responce du pape et son commmandement. – Sire, se dist Bertrant, faictes hastivement car quant plus y demourrons, plus en seréz dolans. A Villeneusve irons prandre herbergement. S’il y a pain ne vin, nous en arons a talent,
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- Episodes espagnols -
ou nous demonsterrons sur eulx nostre maltalent » Se dist le cardinal : « Je vous prie bonnement que vous ne consentéz ainsi ne autrement que on face en ce païs nul mal demenement. – Sire, se dist Bertrant, je n’ay mie en convent que je les puisse touz tenir paisiblement, mais certes je en feray mon pouoir plainement. » Adont le cardinal s’en parti vistement, jusques en Avignon n’y it arrestement. Des nouvelles oÿr desiroient les gens. Et tenoit on partout fermé bien fermement et estoient arméz bien et suisamment, aus portes et aus murs gardent bonnement. Se dist le cardinal a aucuns en present : « Nous arons bonne paix se nous baillons argent. » 280
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Le cardinal entra ou palays d’Avignon. Le saint Pere trouva dedens sa mansion. « Pere saint, j’ay parlé et monstré voz raisons a Bertrant du Guesclin, un chevalier de nom, au conte de la Marche, de haulte estractïon, au marechal de France qui Ernoul a nom et a pluseurs Engloys et a mains fors Bretons. En ceste compaignie a de gens a foyson et s’en vont en Grenade desus les gens Mahon pour leurs ames sauver : c’est leur entencïon. Ilz ont fait ou roiaume maintes excecucïons. Je vous viens apporter leur confessïon : ilz ont ars mains moustiers, maintes belles maisons, octis femmes, enfans a grant destructïon, pucelles vïolees et dames de grant nom, robé vaches, chevaux et pillé mains chappons, et beu vin sans paier et robé mains moutons, et emblé mains joiaux a tort et sans raison, galices de moustiers, argent, cuyvre, lecton, dictéz maintes paroles pleins de malicïon,
[93r]
- La Grande Compagnie à Avignon touz les maulx que l’on puet faire plains de malefaçon plus que l’on ne pourroit dire en livre ny en chansson, ne oncques en leurs vies ne irent se mal non. Engloys et Navarroys et d’autres a foyson, si en crient mercy et de Dieu le pardon, et de vous ensuyvent vraye absolucïon. – Ilz l’aront, dist le pappe, il me vient bien a bon, mais qu’ilz veillent vuider pour tant la regïon. » Si dist le cardinal : « N’en viendréz a coron se deux cens milles frans ne leur donnéz en don. » Adonc dist le saint Pere une bonne raison : « On nous donne, dist il, de l’argent et mains dons pour absouldre les gens en la cité d’Avignon, et il nous les fault absouldre a leur division, et si nous fault donner, c’est bien contre raison. »
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281 Se dist l’apostole : « Franc cardinal gentilz, ou sera tel avoir si prochenement prins ? » Se dist le cardinal : « J’en diray mon advis. Il a en la cité des bourjois poestiz, riches et souisans d’avoir et d’amis. Il conviendra parler aus grans et aus petis, parquoy le trezor Dieu n’en soit point amendry. » Dont furent les bourjois touz a un conseil mis pour trouver cel avoir, mais il fu ennemy. Les deux cens milles frans ont a moitie partiz. Si l’actorda Bretrant le preux et le gentilz et les bons chevaliers de France le païs. A Villeneusve vindrent logier, se m’est advis, de son palays les voit le pappe beneïs et si les voit aler fourrer en ce païs. A Villeneusve vindrent logier, se m’est advis, et amenoient en leur ost vaches, moutons, brebis,* oiez, poussins, chappons et le pain blanc et pain bis, les viandes, les vins qu’ilz ont trouvé et quis. « Ha, Dieu, se dist le pappe, vray roy de paradis.
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- Episodes espagnols -
Que ces gens se pennent et font de pis en pis pour aler en enfer avec les ennemis. » 282
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« Ha, Dieu, dist l’apostole en son palays pavé, que ces gens ycy ont de peine planté. Pour aler en enfer se sont forment pené. » Et le conseil du pappe ont l’avoir assemblé. Ceulx de la ville en furent tailléz et mal menéz, car chascun en paioit selon sa quantité. A Bertrant du Guesclin l’a on dit et compté comment les nobles gens de la noble cité paioient cellui avoir en grant pouvreté. Et quant Bretant le sceu, si en ot le cuer iré. « A, Dieu, se dist Bertrant, or voys je crestienté plaine de convoitise et de desloiauté. Avarice et ourgueil et toute vanité demeure en sainte Eglise et toute cruauté. Ceulx qui doyvent garder sainte crestïenté et donner de leurs biens pour Dieu de majesté, ce sont ceulx qui le tenent enclos et enfermé et prenent tout partout et ont tout demandé, et n’ont neant vaillant de leur propre herité. Par la foy que je doys la sainte Trinité, pour l’amour Jhesucrist qui tout a creé, et pour ces gens mectre a pure seürté, mais ja n’en prendray un denier monnoié de ce que pouvres gens y auront ordonné, se le pappe du sien ne le m’a delivré. » 283
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Quant l’avoir fu prest pour celle compaignie faire partir d’illec et laisser la follie, le prevost d’Avignon, comme l’istoire crie, vint droit a Villeneusve ou la chevalerie de Bertrant et des siens estoit adont logie. Il a dit a Bertrant, que point ne se destrie :
[93v]
- La Grande Compagnie à Avignon « Sire, l’avoir est prest, je vous en acertiie, et l’absolucion seellee et fournie, comme Jhesu donna, le ilz sainte Marie, a Marie Magdalene qui fu Jhesu amie. » Et Bertrant lui a dit : « Beau sire, je vous prie dont vient icellui avoir ? Ne le me celéz mie : l’a prins l’apostole en sa trezorerie ? – Nenny, sire, dist il, mais la debte est paiee du commun d’Avignon, a chascun sa partie. » Dist Bretrant du Guesclin : « Prevost, je vous afye, ja n’en arons denier en jour de nostre vie se ce n’est de l’avoir venant de la clergie. Et volons que touz ceulx qui la taille ont paiee aient tout leur argent sans prendre une maillie. » – Sire, dist le prevost, Dieu vous doint bonne vie. Les pouvres gens auréz forment esjoye. »
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284 [94r]
« Amis, se dist Bertrant, au pappe me diréz que son grant tresort soit ouvert et desfermé, a ceulx qui l’ont paié il leur soit restitué. Et dictes que jamais n’en soit nul reculé, car se je le savoie, ja ne vous en doubtéz, et fusse je oultre mer passé et bien alé, je seroie ainçois par deça retourné que le pappe ne fust couroucié et iré. » Ensement fu Bertrant paié et delivré de l’avoir l’apostole et des clers couronnéz, et fu du tout absoubz et trés bien confermé, lui et toutes ses gens qu’il avoit amené. Adont fu l’arnoys chargié et troussé pour aler a Toulouse, ou bonne est la cité. La fu le duc d’Angeou qui les a honnouréz et donna mains beaux dons aus chevaliers doubtéz. Puis appella Bretrant en son conseil secret :* « Bertrant, se dist le duc, entendéz mes secréz. 7666
corr. d’après P :f. Bertrant paié paié et d., paié supprimé.
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- Episodes espagnols -
Aléz en Arragon, car vous y trouveréz dam Pietre, roy d’Espaigne qui dedens est entré, qui du roy d’Arragon gaste les herités, et pour Henry son frere que vous y trouveréz, qui doit estre droit roy, nous en savons assez, car cellui dam Pietre est traïtre forsenné. Il ne croit nostre loy neant plus que un juïf. Si a fait mourir sa femme, ou tant ot de bonté, la plus loiale dame qui fu en cent citéz ; elle fu nostre cousine, c’est bien la verité. Or faictes en vengence, se de riens vous m’améz. – Sire, ce dist Bertrant, puisque le commandéz, je en feray tant que en la in vous en apercevréz. » 285
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Dist Bertrant du Guesclin : « Par Dieu le droiturier, a dam Pietre le roy ferons grant destourbier. – Voyres, se dist le duc, car il veult pourchasser heritage sur nous et sur nous gaigner, et au roy d’Arragon fait sa terre essillier. – Sire, se dist Bertrant, ne veilléz plus plaidoier. Le chien qui dort a fait laidement reveiller. » Dont prinst Bertrant congié et touz les chevaliers. Adonc se sont partiz sergens et escuiers, a la voie se sont mis les chiers et les sommiers* et se sont penéz, selon le mien cuidier, que devers Arragon ont prins a approchier. dam Pietre estoit venu et les Espaigneux iers, et boutoient les feuz et font tout essillier. Son frere it soufrir mains destourbier. Et le roy d’Arragon qui tant it a priser, estoit a Palpegan en son chastel plenier : son mandement faisoit que l’on lui venist aider. 286
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En tant que le roy Pietres aloit vers Palpigant 7690
corr. d’après P : r. ferons grant grant d., grant supprimé
[94v]
- La Grande Compagnie en Arragon avoit en Arragon, le roiaume puissant, conquis villes et chasteaux qui furent fors et grant. Si estoit le roy Henry tout droit au Chastel Blanc qui de son heritage lui fu appartenant ; sa moulier y estoit et touz ses enfans. La se tenoit Henry, illec s’aloit gardant o lui mains Espaigneux qui lui furent aidant contre Pietre son frere qui s’aloit roy nommant. Quant il oÿ nouvelles du noble Bertrant et des bons chevaliers qu’il aloit amenant,* encontre lui ala et manda sauf alant. Et Bertrant lui manda qu’il aloit desirant. Adont s’en vint Henry qui le cuer ot joyant. La venue Bertrant aloit moult desirant. A l’aprochier l’un l’autre s’aloient enclinant. Touz les chevaliers et les hommes vaillans enclinerent Henry et le vont honnourant, car de son fait savoient l’aventure pesant, et comment le roy Pietres ala si mal regnant et Sarrazins aussi aloit il soustenant, et de sa femme aussi qui de bonté ot tant, qu’il y a fait mourir ; or lui viendra devant. Moult haÿ l’en avoient les petis et les grans.
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287 Quant Bretrant vit Henry le noble guerrier, lors l’ala vistement tout par amours baisier et lui a dit : « Beau sire, aléz vous apaiser, car, par la foy que doys a Dieu le droiturer, jamais nul homme vivans, selon le mien cuidier, ne me verra aler en France ne repairer tant que d’Espaigne auréz la terre a justicier. Et la couronne ou chief vous y feray drecier, si Dieu plaist et je vy, je le cuide exploictier, car vous devéz avoir la terre et estre heritier. Et si a fait mourir sa courtoise mouiller. 7717
corr. (voir note) : c. qui l’aloit a.
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- Episodes espagnols -
Cy aval suis venu, c’est pour le chastier. A, Certes lui feray Jhesucrist renoyer. – Sire, se dist Henry, Dieu vous en veille aider ainsi trés vraiment comme je en ay mestier. » Tout droit au Chastel Blanc a fait Bertrant logier. 288
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A l’entrer d’Arragon, au lieu par de deça, tout droit au Chastel Blanc Bertrant se logea. Et touz les bons seigneurs que avec lui mena, qui ne peu estre ou chastel en la ville logea. Tout droit a Palpegant la nouvelle en ala au fort roy d’Arragon qui illec demoura. Quant il oÿ compter que Bertrant arriva et la compaignie, forment aussi s’en esjoya. Quatre bons chevaliers a Bertrant envoia qu’il venist devers lui avec les gens qu’il a et que trés grant honneur et prouit lui fera. Et quant Bertrant l’oÿ, celle part s’en ala. Et touz les chevaliers en qui il se ia vindrent a Palpegant, que nul n’y arresta. Au roy s’en sont venuz qui moult les honnoura. Au digner les assist qui moult les festïa. Quant vint aprés digner, en sa chambre les a menéz et convoiéz et puis les appella : « Beaux seigneurs, dist le roy, vous estez venuz ça pour aler en Grenade, on le m’a dit pieça. Mais je vous jure sur Dieu qui le monde crea, que le meilleur voyage qui jamais fait sera c’est de destruyre Pietre qui courroucé tant m’a, car il est desloiaux, en lui point de foy n’a : Sarrazins et Juïfz ame at amera. Ne oncques pire homme ne beu ne ne mangea : il it tuer sa femme qui si bonne espousa, son frere a fait banir pour le bien qu’il lui monstra. Et si savons de vray, de ce ne doubtéz ja, qu’il doit meulx estre roy d’Espaigne par dela
[95r]
- La Grande Compagnie en Arragon que ne fait cellui traÿtre qui oncques bien ne pensa, car de la riche dame qui le roys tant ama fu Henry engendré, car le roy le gaigna et troys illes de roy, véz cy que on vous dira. Et que Pietre ot fait quant Henry enchassa ? Il prinst ses troys serours et les emprisonna. »
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[95v]
« Seigneurs, or entendéz, dist le roy d’Arragon.* De Pietre vous diray les malvaises façons. Il saisi ses serours et mist en ses prisons pourtant que Henry qui estoit noble homs, se disoit noble roy de noble estractïon, et que la riche dame qui belle ot la façon estoit plevie au roy qui avoit nom Alfon, et que s’estoit de droit ces droiturers barons, et que un juïf convert avoit dit les achisons pour esprouver le fait de ses quesïions dont tout partout en coururent les communes raisons, it aprés mectre ses troys seurs entre les lÿons. Et fu leur delivrance et leur salvacïon, car il n’y ot lÿon qui iers sont comme grisfon, qui entre ces .iii. dames, dont compté vous avons, qui ne se tenist coy comme un gentilz mouton ; que ce soit verité nous le vous approuvons. – Noble roy souisant, a Henry aiderons, de tout nostre pouoir nous le conforterons et, s’il plaist a Jhesucrist, nous le couronnerons. Et le riche roy Pietre au cuer courrousserons, du roiaume d’Espaigne nous le dechasserons. Et la reïgne bonne, se Dieu plaist, vengerons. » Dist le quenx de la Marche : « Et nous vous en prions car ce estoit nostre ante et le sang de Bourbon doit estre si loial que nous qui en venons devons estre loial et ce seroit raison. » 7778 7787
corr. d’après P : l. roys tant qu’il regna corr. d’après P : et disoit noble r.
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- Episodes espagnols -
Dist le roy d’Arragon : « Nous vous abandonnons tout a vostre vouloir de ce que nous avons. A ce commaincement nous vous delivrerons cent mille lorins ; dont present vous ferrons bléz, vins, avoynes, assez vous livrerons beufz, vaches, brebiz, veaux et moutons. » Dient les chevaliers : « Et nous vous en trouverons dessus les Espaignolz, ou le debat arons. La irons nous pillier et nostre argent garderons. » Or est fait le conseil de ceulx dont nous parlons. Mais lendemain le sceut, si comme dit la chansson, Pietre roy d’Espaigne, de quoy nous parlerons. Une espie s’en va a pointe d’esperons, le roy Pietre trouva et o lui ses larrons. 290
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L’espie s’en va qui point ne s’arresta, et a tant exploitié que dam Pietre trouva. Et quant il l’a veü, bien tost s’agenoilla « Sire, dist l’espie, oiéz que l’on vous dira une malvaise nouvelle qui point ne vous plaira. – Comment ? se dist le roy. Dictes comment nous va. – Sire, c’est une gent qui venue est deça. C’est une compaignie qui blanche s’appella, chascun la blanche croiz dessus son espaule a. Et venent des parties de France par dela. – Et qui les a conduit ? le roy lui demanda. – C’est Bertrant du Guesclin. » chascun lui divisa. Et quant le roy l’oÿ, tout le sang lui mua. Il a estraint les dens, les yeulx esroilléz a, de grant ireur qu’il ot sa barbe detira. « Sire, dist Abrahan, un juïf qui fu la, qu’avéz vous ? Dictes nous comment vous va. – Abrahan, dist le roy, si grant mal m’aviendra, 7816
n. vous en delivrerons, delivrerons exponctué et trouverons suscrit.
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corr. d’après P : l. irons nostre p.
[96r]
- Pietres renforce ses possessions que d’Espaigne la grant fouÿr me conviendra. L’aigle est venu qui me deschassera : c’est Bertrant du Guesclin qui me desconira, qui mon frere Henry a Burs couronnera. D’Espaigne sera roy et mon païs tiendra. » De la doleur qu’il ot a terre se gicta.
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[96v]
Dam Pietre fu dolant et la chiere ot iree. « Helas, dist le roy, comme male destinee les Anglois sont venuz en ceste contree, par qui je perdray honneur et renommee. Mon frere le me dist il a bien une annee. A tort l’ay enchassé et par fole pensee. – Sire, dist le juïf, n’aiéz la chiere iree. Ja ne sera veü en la vostre duree que victoire perdéz, il n’en sera riens nee ainçois qu’ilz aient Burs ne Tollecte la lee, ne Sebile la grant qui si bien est fermee, ne Tudelle ensuyvent qui bien est trectellee,* porront avoir du pis ce vient a l’asemblee. » Se dist Pietre le roy : « J’ay chiere efraee. Puis ne demourray cy, faire veil retournee. Bertrant n’atendroie pour l’or d’une contree. » Et lors a fait mander en icelle vespree que lendemain matin au point de la journee soient toutes leurs gens pour aler aprestee,* vers la cité de Burs voisent sans demouree. Chose n’y demoura la nuyt qui ne soit troussee. Et lendemain matin c’est l’ost acheminee et Arragon laisserent, qu’il avoient fustee. A Mangulon s’en vint Pietres sans demouree, de son roiaulme estoit a ce lieu l’entree. Il y ot bon chastel et ville bien fermee. La laissa garnison ain que on leur deveé a l’encontre Bretrant s’il chalenge l’entree. 7843
corr. d’après P : L’Angloiz est v.
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- Episodes espagnols -
En la cité de Bourges, une riche contree, qui Bourges en Espaigne est par nom appellee, la venu est dam Pietres qui ses gens a sevree. Il garny le païs ainsi comme il lui agree car de Bertrant doubtoit malement la meslee. 292
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A Bourges en Espaigne – ensuyment l’appelle on – est dam Pietre venu qui fu en marrisson. Un chastellain y mist et laissa garnisson. Et commanda a ses gens et leur dist a hault ton : « Seigneurs, dist il a eulx, ores oiéz ma raison. Je atens en mon païs grande destructïon : ça Bretrant du Guesclin m’amayne mains larrons, felons oultrageux et plains de traÿson. Si venent cy endroit les traïteurs felon : veilléz faire contre eulx bonne desfensïon. » Et ilz ont respondu : « N’en aiéz marrisson. Nous ne doubtons Bertrant ne Henry le felon, ne toute leur puissance vaillent un bouton. Nous avons bonne ville et si sont le gens bon, par cy ne entreront ja en vostre regïon. » Et dam Pietre leur dist : « Ha, Dieu beneïsson. » Aussi a pourveü Bourges et Mangulon, et mains riches chateaux qui furent environ. Et puis a Saint Donyn ala le roy Peyron et dela a Bervesque, une ville de nom, qui fermee fu fort, la mist on garnison. Sarrazins et Juïz y avoit a foyson qui avoient leur fort chascun en sa parçon. 293
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De Bervesque parti Pietres dont je vous chant. Droit a Burs s’en ala, une cité vaillent, la ou l’on va le roy d’Espaigne couronnant : nobles sont les bourjois, riches et bien manans, 7881
corr. d’après P : B. en Espaigne ensuyvent l’.
- La Blanche Compagnie prend Mangulon -
[97r]
les bourjoises y sont de moult noble semblant. Juïfs et Sarrazins y furent habitans, qui le roy Pietres vont de ses faiz conseillant dont les Crestïens furent courrousséz et dolans et moult haÿrent Pietres, comme nous trouvont lisant. La cité it garnir du tout a son commant et la it conforter et derriere et devant, les fousséz parfondir ; les murs rehaussent.* Moult durement doubtoient la venue Bretrant et des autres barons qui a doubter font tant : c’estoient bonnes gens et touz bons conquerant. Et il y paru bien en Espaigne la grant, ainsi comme vous orréz recorder ou rommant.
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294 Seigneurs, ores escoutéz, chevaliers et barons et je vous chanteray une bonne chansson, de Bertrant du Guesclin vous feray mencïon, de la Blanche Compaignie, touz furent compaignons. Il n’y avoit en l’ost chevalier ne garson qui ne portast la croiz blanche comme coton et pourtant la Blanche Compaignie l’appelloit on. Quant Bertrant et les siens partirent d’Arragon, bien furent pourveüz a leur divisïon, de vitailles planté en leur ost menoit on a chers et a somiers les maynent a bandon. Bertrant en appella Henry son compaignon : « Sire, se dist Bertrant, par ou en iroit on en Espaigne plus tost pour trouver dam Pieron, qui s’en fuyt devant nous comme le loup mouton ou que le cerf encontre au boys le chien bon ? » Se dist le roy Henry : « Bien sçay la région. Il nous convient entrer premier a Mangulon : la nous convient entrer a force et a bandon. – Or y alons briesment, dist Bretrant le baron. Et si alons conquerre, car il en est saison. »
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- Episodes espagnols 295
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La Blanche Compaignie se va bel retournant. Et ont tant cheminé les chevaliers vaillant qu’ilz virent Mangulon, le chastel puissant ; dela jusques a la ville ne se vont arrestant. Par devant celle ville se va Bertrant logent. Henry vint droit aus bailles, si les va assenant. Et si vint a luy, bien le va ravisant « Sire de Triste Mare, maistre du Chastel Blanc, que faictes vous icy, que alez vous demandant ? – Cappitaine, dist il, la ville vous demant comme droit roy d’Espaigne et la voys chalengent. » Celluy a respondu : « Aléz vous repayrent et vous partéz de cy tost et incontinent. Ou roiaume n’avéz un denier vaillent ne a vous ne serons en riens obeissans. – Par ma foy, dist Henry, vous en serréz dolant. De cy ne partirons en tout nostre vivant tant que destruys seront femmes et enfans. Juïfs ne Sarrazins n’y seront habitant. Vostre mort vous apporte en ce païs Bertrant. » Et ilz ont respondu : « N’y acontons nÿent. » 296
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Henry est retourné et revint aus barons, et de ceulx de la ville leur a dit les respons. Dist Bertrant du Guesclin :« Et nous les assauldrons. Par devant ceste ville nous nous reposerons et pour eulx assaillir nous nous appareillerons. » Et ainsi fu il fait comme nous le devisons. Pour la ville assaillir ordonnerent canons pour les arbalestriers et archiers bons. Et taillerent es boys et arbres et buissons et puis par dedens l’ost amenoient par mons.* Qui vist a ce jour touz les compaignons trés bien appareilléz a loy de champïons 7948
Et ce si v., ce exponctué.
[97v]
- La Blanche Compagnie prend Mangulon et lever contre mont banieres et pennons, ordonnéz les Engloys et rengéz les Bretons. La fu le mareschal d’Audrohan le proudons, Huon de Caurelay qui fu chevalier bon. Espaigneulx se defendent ierement comme lÿons. Ceulx dedens vont gictent vive chau en possons, bourjoises, bourjois, valletz et garsons. « Or, se dist Bertrant, par Dieu nous les aurons. Juïfz et Sarrazins la dedens trouverons. Que ferrions nous a Romme, quant saint Pere trouvons. »
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297
[98r]
Moult fu grant l’assault dont vous me oiéz parler. Sergens, escuiers et jeunes bachelers aloient es foussés bans et huches gicter tant que jusques aus murs font les fosséz raser et font trayre aus creneaux pour Espaignolz grever si dru qu’ilz n’osoient la teste hors bouter. De Guillaume Boytel doit on ycy parler car sa bataille it jusques aus murs aler. A picques et a hoes y it assault livrer, tellement que le jour il it le mur percer et entrerent dedens pour Espaignolz grever. Et les Espagnols sont venuz pour estoupper mais noz gens les font a la terre verser. La veïsséz bataille qui it a redoubter, testes, piés, brafz et cervelles espautrer. A eschielles de cordes qu’ilz irent agrapper montoient noz gens comme cinges va ramper. Et Bertrant du Guesclin ne se y volu resposer. La sont les Espaignolz tellement efraéz que dedens le chastel les irent rebouter. Lors alerent partout celle ville fuster. Ne sçay a quoy l’on vous va demener. La ville conquesterent au point de l’avesprer et on fait les Juïfs touz emprisonnier et touz les Sarrazins qu’ilz y peurent trouver.
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- Episodes espagnols -
Cappitaine y laisserent pour la ville garder. Et la volurent noz gens loger et sejorner, ne sçay deux jours ou trois, pour la ville garder. Et puis aprés de la volurent decevrer. A deux lieues dela, si comme j’oÿ compter, trouverent une ville qui moult it a loer : c’est Bourges en Espaigne, que l’on it si bien fermer, de Mangulon deux lieues y pourroit on trouver. La vindrent les barons sans point d’arrester et irent par devant leurs loges ordonner. Et Henry s’en ala sur son cheval monter. Il est venu aus bailles et a prins a parler : « Faictes venir icy a moy parlamenter le vostre cappitaine pour moi adviser. » Le cappitaine y vint, ne le volu refuser. « Vassal, se dist Henry, veilléz moy escouter. Veilléz moy, s’il vous plaist, ceste ville livrer. Je suis Henry vostre sire qui s’i va couronner. » Se dist le cappitaine : « Vous n’y pouéz entrer. Roy Pietres vostre frere, que deüsséz amer, le nous a defendu sur les membres copper. Vous savéz que c’est un roy que l’on doit bien redoubter et qui touz nous feroit mourir et deiner. – Seigneurs, si dist Henry, bien vous saray garder, car j’ay les gens de France sa hors a gouverner. Decy ne partirons, quoy qu’il doyë couster. Si aurons prise la ville et vous feray iner, comme ceulx de Mangullon vous feray atourner. » Se dist le chastellain : « Laisséz le sermonner, car vous n’y entreréz tant que puissons durer. » 298
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Henry fu moult dolant quant cellui escouta. A Bertrant du Guesclin la nouvelle compta et a touz ses barons aussi la recorda. Chascun en jura Dieu qui le monde crea, que la ville de Bourges assaillie sera.
[98v]
- Prise de Bourges Lors se sont ordonnéz, chascun bien s’avisa pour assaillir la ville et deça et dela ; n’y ot petit ne grant qui ne s’apareilla. A un mardi matin l’assault commainça, voyres, par tel convent que jusques a la nuyt dura.
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299 Seigneurs, a icellui jour y ot assault moult grant a la ville de Bourges en Espaigne seant. La sont arbalestriers et archiers trayant. La furent les valletz les foussés remplissant. La furent ceulx de dedens la ville defendant. Pierres et chaillotz vont sur noz gens gictant. Et noz gens aloient es fousséz avalant. A picques et a houes et mains leviers pesans aloient noz gens les grans murs deppeçant. Les eschielles de cordes vont aus murs atachant et montoient amont vaillemment les auquant. Un chastel y avoit en la ville seant. La estoient Juïfs felons et mescreant qui de ayve chaude vont noz gens mehaynent et de feu ensuyvent qu’ilz aloient gictant. Mais je vous dy pour vray que noz gens furent tant qu’ilz monterent amont ; et la ot un Normant qui sur le mur passa la baniere Bertrant. A haulte voix s’escrie : « Barons, venéz avant. La ville sera prise tost et incontinent. A la porte de la vont Espaigneux fuyant. Or avant bonnes gens, soiéz leur au devant. » Adont va l’assault si fort recommençant que ne le vous diroit nul clerc lisant.
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300 Seigneurs, cellui assault it moult a priser. Sur le mur vont montant sergent et escuier, par force y sont entréz voyans arbalestriers, sur une porte ouverte le pont font abaisser.
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- Episodes espagnols -
Dont vindrent Espaigneux et prindrent a hucher : « Seigneurs, tout vous rendons a vostre desirer. » Lors s’alerent les dames toutes agenouiller. Et Henry les reçoipt quant les oÿ parler. Adont vont assailir le bon chastel plenier et irent les Juïfs a male mort jugier et plusers Sarrazins octire et detrenchier, mais Crestiens ne volurent ferir ne atouchier. Tout leur fu pardonné par Henry le princer. La ville et la conté qui tant it a priser, a donné a Bertrant le vaillent chevalier. La se sont sejornéz les nobles guerroiers, ceulx qui furent navré irent appareiller. A Bervesques alerent pour la ville asseger, une moult forte ville, si ay oÿ tesmoigner, de deux payres de murs qui furent grans et ier. Nul ne cuidast jamais que l’on peüst gaigner ceste ville ycy en un yver entier. Roy Pietre ne cuidast que en un an tout entier noz gens se peüssent en la ville loger. 301
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A Bervesque, seigneurs, sont venuz noz gens, une moult grosse ville et bonne durement. Espaignolz y avoit plains de grant hardement qui amoient dam Pietre et doubtoient forment. Quant Henry vint a eulx tenir son parlement, ilz ne irent de lui compte en plus que du vent. « Seigneurs, se dist Henry, vous estez fole gens qui ne me recevéz a seigneur leement. Vous savéz que mon frere vit si malvaisement. Certes, je lui torray tout son tenement, non pas sien mais le mien doit estre clerement. Mon pere fïança ma mere doulcement et vesqui avec lui et it engendrement de moy, pourtant je dy et preuve clerment que espouser ne pooit autre en son vivant.
[99r]
- Prise de Bervesque -
[99v]
Ne it il jusques atant qu’elle prinst inement. Aprés sa mort prinst une dame au corps gent qui n’apportoit que illes a son enfentement : changa une illecte qu’elle avoit eu en present encontre un valleton, on le scet vraiment. Et it acroyre au roy a l’aduré talent qu’il lui avoit engendré ce valleton present. Et fu Pietres nommé a son baptisement. Juise fu la mere a son commaincement, depuis se baptiza par convertissement. Encores a sa nature le roy Pietre se prent : il ame meulx Juïfz que crestïenne gent. Je vous monstre mon droit devant touz en present. Veilléz moy recevoir car raison s’i assent. Je vous jure et sur Dieu je vous ay en convent franchise vous donneray a vostre commaincement. » Mais ilz ont respondu : « Nous n’en ferons noyant. » Moult fu doulant Henry quant la parolle entent.
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302 Moult fu doulant Henry et moult lui desagree que Bervesque lui fu tellement devéé. Bonne ville y avoit et bonnement fermee dont fut tout environ assise et enserree. Et quant nostre gent fu un petit sejornee, dont irent adouber noz gens redoutee. La premiere bataille a Bertrant gouvernee. Pour devant une porte qui bien estoit serree fu la baniere hault et de ses gens monstree. Et le bon mareschal n’y a fait arrestee. A l’assault est venu la teste trés bien armée le Besgues de Villennes qui tant ot renommee, le bers Carenlouet qui bien fery d’espee. Huet de Caurelay y vint sans arrestee, Olivier de Manny, a qui prouesce est donnee. Si vint Gaultier Huet demenant grant huee, 8114
a. sa dame mort p., dame exponctué.
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- Episodes espagnols -
o lui Jehan de Brenes qui fu en l’assemblee. Et Engloyz et Bretons n’y ont fait demouree. La ot maintes trompetes haultement sonnee. Pour livrer grant assault se sont ceste gent penee. Et ceulx de dedens vindrent a ceste armee aus murs et aus crenaux pour defendre l’entrée et voyent noz gens rengee et ordonnee. De Jhesucrist de gloire qui it ciel et rousee, les vont fort maldisant de cuer et de pensee, et qui les amena en icelle contree. 303
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A Bervesque la ville qui fu bien breteschie furent les gens par dedens bien appareillie. Juïfs a l’un des lieux de la ville jolye estoient ordonné par devers leur partie, car en un fort avoit chascun sa manandie. Droit au lieu des Juïfs de la juïfzerie fu cogneu Caurelay et toute sa maisnie. Et fu un vendredi, comme l’istoire crie, que sur les champs estoit nostre chevalerie. A touz lieux assaillent ceste ville garnie. Oncques ville ne fu tellement assaillie. Chascun n’y redoubtoit ce jour mort ne vie. Et Bertrant du Guesclin qui prouesce mestrie, qu’a bailles assailloit a tout une coignie et disoit : « Or avant, doulce virge Marie. Assaillons aujourduy ceste gens renye. » Touz ceulx qui furent la, je vous acertiie, chevaliers, escuiers plains de grant baronie, qui avoient esté en terre de Jurie pour devant Alixandre et devant Satalie, recorderent depuis en mainte compaignie que oncques en tel assault ne furent en leur vie. 304
8179
Seigneurs, c’est verité : cellui assault fu si grant
[100r]
- Prise de Bervesque et si bien maintenu, comme dient li auquans tesmoigner tout pour vray que l’on ne fu pas cuidans que la ville deüst estre prise en .ii. ans, si ne fust par famine ou par engins gictans. Mais noz gens avoient les curs si desirans de prandre celle ville, dont je vous suis contens, que l’on ne vit oncques gens d’assaillir si desirans. A la porte devant fu le vassal Bertrant, Olivier de Manny qui fu son atenans, et ses freres aussi n’y furent pas faillans. Et Guillaume de Lonnoy y estoit moult engrans, Alain de la Hussoie qui estoit conquerans. Si fu Carenlouet, un chevalier sachans, et le Chevalier Vert n’y fu mie oublians. Le seigneur de Beaugien si fu bien esploitant, le Besgues de Villaines et Auciaux le Normant, le conte de la Marche et si fu d’Odrahan et Mahyen de Gournay, un Engloys souisant, Nycholas Scambourne qui bien y fu seant. Si fu Robin Secot qui bien greva les Frans. Si fu Gaultier Huet et de Brenes Jehan, Briquet le Bourdelaines y furent a ce temps et plusers chevalier y escuiers vaillans. Et cellui de la Hussoie y soufry moult d’ahan car il fu renvoié es fousséz trebuschant ; bien ot les brafz rompuz, dont il fu moult pesant.
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305 L’assault fu pesant et forment demenéz. Valletz et escuiers emplirent les fosséz. Mais de marriens pesans sur les creneaux poséz* avoit on noz gens laidement ravaléz et de tonneaux aussi, de chaillotz bien raséz : cellui qui estoit ataint estoit mort ou nafré. 8208
m. pess marriens p., pess cancellé.
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corr. d’après Nh : mais marriens p., de ajouté.
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- Episodes espagnols -
Huon de Caurelay s’i est bien esprouvé. Vers la juïfzerie avoit ses gens menéz, les Juïfs assailloit, s’estoit droite beauté. Et venoient aus murs o marteux asseréz et frappoient aus murs que les murs ont trouéz. Par faultes de Juïfz et par leur lacheté entrerent dedens les murs, se dit l’auctorité, et prinstrent les creneaux qu’ilz avoient gardé. Lors furent mors Juïfz, c’est ine verité. Un Berton bertonnant est sur les murs monté, prist le pennon Bertrant qui lui fu delivré. La montoient noz gens sur les murs a touz lieux ainsi comme cinge sault et chat exchaudé ; a eschielles de cordes aus chaillotz agrappéz rampoient contremont, huant comme mauféz. L’un escrie « Guesclin. » qui bien fu escouté, l’autre « Caurelay. » qui oÿ fu assez. « La Marche. » et « Audrehan. » crient a l’autre lieu, disans aus Espaignolz : « Traïtres. Vous mourréz. » Oncques, se croy, puis l’eure que Jhesucrist fu né ne fu assault veü, si fort ne doubtéz, et fu en la sepmaine que Jhesu fu pené. Et pour ce que en la ville avoit Juïfz assez fu plus grant l’assault et la mortalité. Et prinstrent plus de peine noz chevaliers assés et crioient en hault : « Espaignolz forcenéz. Rendéz nous les Juïfs, ou vous le comparréz. » Dont y fu un traité et respit donné pour rendre les Juïfz a noz gens naturéz. Et it on rapporter aus loges et aus tréz les navrés et les autres que l’on avoit afolé. Et Espaignolz disoient : « Amis, or vous soufréz. Vous auréz les Juïfs, puisque vous les vouléz. » En la juïfzerie se sont acheminéz, mais les Juïfs avoient leurs lieux si bien ferméz qu’ilz ne peurent entrer environ de touz lieux. 8216
corr. d’après P : l. murs ont touvéz
[100v]
- Prise de Bervesque -
[101r]
Les Crestïens disoient : « Juïfz, or vous rendéz. » Et les Juïfs disoient : « Pour neant en parléz. Bien voions que aus Françoys rendre vous nous vouléz. Vous nous vouléz traÿr pour estre depportéz. » Ainsi disoient Juifs qui sont espaontéz. Aus Espaignolz defendent qu’ilz n’y soient entréz. Par ce point cy fu prise la bonne fermeté.
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306 Tout ainsi que les Espaignolz assailloient les Juïfz qui furent en leur fort bien mille iervestiz et qui se defendoient comme iers et hardiz, au lieu devers la ville, ou le fort fu assis, Huon de Caurelay qui tant fu seignoris, assailloit par deriere, si avoit les creneaux pris. Et le murs deppecerent en .v. lieux ou en .vi. et entrerent dedens ; si ont les Juïfz choisiz qui vers les Espaignolz avoient assault prins. Lors leur couroient sus et si les ont sourprins. Lors oÿsséz crier laydement les Juïfs, et juïzes aussi et les enfans petiz. Et quant les Espaignolz en oÿrent les criz, lors laisserent l’assault, au retour se sont mis et vindrent aus crenaux ou noz gens ont choysiz puis les ont assenéz, dont Bertrant le gentilz, s’en venent aus fossés et d’autres gens esliz. Le cappitaine dist : « Seigneur, ou est Henry ? Et Bertrant du Guesclin qui tant est poestiz ? – Seigneurs, je sui Bertrant, pour certain le vous dy. » Se dist le cappitaine : « Frans chevaliers hardiz, la ville rendray sans plus estre assailly sauf tout le nostre honneur et avoir et que soions vifz. – Je l’octroy, dist Bretrant, du tout a vostre devis. » Le pennon de Henry fu sur les creneaux mis et puis ont defermé et portes et postiz. Huet de Cayrelay a prins touz les Juïfz. 8274
corr. d’après P : S, se dist B.
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- Episodes espagnols -
La furent mis a mort, decoléz et feniz, mais bien cent et .l. y en ot convertiz. Et l’avoir des autres fu si bien departy que autant en emporta le grant que le petit. 307
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Bervesque fu conquise bien et souisanment. Hespaignolz se rendirent a Henry plainement. Leens se sont logéz les nostres moult noblement. La y ot deux bourjois qui moult furent dolans qui de la ville sont issuz hastivement par devers Burs s’en vont chevauchier apprement et ont tant exploittié qu’ilz vindrent droitement a la cité de Burs qui grant est durement. Ou palais ont trouvé dam Pietre proprement, o lui Ferrant de Castre, qu’il ama loiaument, car il tenoit sa seur trés amiablement. Atant vés les bourjois tost et incontinent. Roy Pietre ont salué et tout courtoisement. « Seigneurs, bien veignés vous, dist Pietres haultement. Que fait on a Bervesques ? Que fait ma bonne gent ? » Dist l’un des bourjois : « On y fait malvaisement, car Bertrant du Guesclin qui tant ot d’ardement, et vostre frere Henry et les autres ensuyvant nous ont livré assault, voyres, par tel convent que l’on ne vit oncques tel, ce sachiéz vrayment, ne ne sera veü jusques au jugement. François nous ont livré un assault laidement et si ont conquis noz murs, voyres, si ierement, que ainsi comme un cinge rampe hideusement si ont rampé contremont avironneement. Prise ont la vostre ville a leur commandement et tuéz les Juïfs et paiens ensuyvent et octiz de noz hommes assez et largement. » Se dist Pietres le roy : « Vous mentéz faussement. Vous avéz de ma ville receu or et argent comme faulx traïteurs qui ne vailléz noient.
[101v]
- Pendaison des bourgeois à Burs Si en seréz penduz et penéz au vent. »
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[102r]
Dist dam Pietre le roy qui la chiere ot iree : « Faulz traicteurs, enfans de putain prouvee. Comment pouroit estre prise Bervesque ne happee par force d’assault et pour une jornee ? Il ne puet avenir, c’est verité prouvee, car a Henry l’avéz vendue et delivree, et a Bertrant le fol qui ma mort a juree. » Dist l’autre bourjois : « Par la virge honnouree. Oncques n’y ot traÿson faicte ne devisee, ne receü argent ne monnoie doree,* mais par force d’assault et de forte meslee, et de hardie gent et de forte assemblee, d’arbalestriers, d’archiers traians a la volee sans la ville esparigner ne doubter char navree, ne saignie de sang, ne suour de goutee, nous ont a l’assaillir nostre ville conquestee. Il n’est ville si fort ne cité bien fermee qui soit ou monde jusques la mer salee qui durast encontre eulx la jornee passee. Ce ne sont mie gent de nature creee, ançois sont ennemis de fait et de pensee qui sont venuz de fait en ceste contree. Et si voulent ainsi ouvrer a la duree, n’avéz nulle cité qui ne soit conquestee et prise par assault ains que passe l’annee, ne chastel ensuyvent, ne tour hault encroee. » Et quant Pietres l’oÿ, si a la chiere levee et dist : « Fel traïteur. Filz de pute prouvee. Vous mentéz faussement comme gent esprouvee. Ceste parolle cy que m’avéz rapportee pour or et pour argent la m’avéz devinee. Si en ara chascun de vous la char traynie et puis seréz penduz, s’est la vostre soudee. »
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- Episodes espagnols 309
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Pietres le roy moult fu dolant et irascu quant il a des bourjois les parlers entenduz. Dist a Ferrant de Castre qui estoit bien son dru : « Par Dieu, Ferrant, dist il, or suis je bien perdu par ce deable Bretrant qui deça est venu pour le sen acomplir qui a esté cogneu, que un estournel viendroit de Bertaigne la jus qui feroit esmouvoir les oiseaux bons et druz, qui les chasteaux aroit et les coulons esmeuz. Bertrant du Guesclin qui cy est descendu, a fait de France yssir deables dissoluz. Or pour moy destruyre en Espaigne est venu, pour Henry le bastart aider a mectre sus. Je ne sçay vraiment que soie devenu mais je veulx par ma foy que l’on aye ses .ii. penduz, car il m’ont courrousséz par leurs parlers venuz. »* Adont les it livrer, qu’il n’y est a refus, aus sergens qui les ont menéz aus boys touz nuz. La endroit les it pendre dam Pietre le cremuz, puis ne demoura gueres qu’il en fu irascuz, car des autres bourjois en y ot revenuz qui tout ont confermé et les faiz espanduz. Quant Pietres sceu au vray des chevaliers membruz de l’assault qu’ilz ont fait et ses gens debatuz, adont fu plus dolant que tout quoy s’est tenuz, il ne dist un mot pour le trezor Artus. 310
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Le roy Pietre fu moult courroussé et dolant quant de Bervesque sceu les grans assaulz pesans et comment assailli l’avoit le bers Bertrant, et son frere Henry qui lui fu pourchassant* de tolir son roiaume qui fu bon et grant. Moult le reconforta de Castre dan Ferrant : c’estoit un chevalier sage et souisant. Et d’autre part avoit Jacob le mescreant
[102v]
- Fuite de Pietres à Toulecte et son frere Judas et si fu Abrahan, et conseilloient le roy qui les estoit creans.* « Barons, se dist le roy, je vous tiens a savans. Veilléz moy conseiller car il en est bien temps. – Sire, dist Manacrier, .i. juïf soudans, verité vous diray, ja n’en seray celant. Mais a ce que je voys et que suis concevant, en la cité de Burs, que vous estez tenans, n’estez pas asseür, ja n’en seray celans. Si bien comme vous seréz a Toulecte seans, bien vous y garderiéz, le chastel est puissant et si est la ville fort de tous murs haulz et grans. Dictes a voz bourjois et a voz gens manans que a Toulecte vous en iréz pour les bourjois vaillans qui sont l’un contre l’autre desobeïssans. » Se dist Pietre le roy : « J’en suis actordans. »
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311 Le roy Pietres manda ses bourjois naturelz. Et ilz y sont venuz quant il les a mandéz. « Seigneurs, se dist le roy, envers moy entendéz. J’ay esté a Toulecte de mes bourjois mandéz car il y a discort, dont je suis aïré. A paix les mectray, telle est ma volunté, et aussi leur feray tenir a sauvecté tout ce qui me plaira, telle est ma volunté. Si y ara plenté de chiefs coppéz. Si me garderéz Burs qui est bonne cité. Si les Françoys y venent, si ne vous en doubtéz : secours vous envoieray, mais ce sera assez, de Sebille et d’ailleurs aray mes gens mandéz. – Sire, dist un bourjois qui bien fu avisé, avis m’est que pour voz gens petit conseil croiéz. Véz cy vostre roial ville ou vous fustez sacré, et vous et touz les roys .vc. ans a passéz. Depuis que Silmans qui tant fu honnouré, vint conquerre en Espaigne villes, chasteaux, citéz
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- Episodes espagnols -
et que le roy Ensers fu par lui couronné, aprés ce que Rollant qui tant fu redoubté, et Olivier son compaignon naturé, furent en Ronceveaux octis, mors et inéz, ont esté touz les roys Crestïens appelléz couronnéz en la ville que laisser vouléz. Et vous laisséz venir voz ennemis mortelz assegier ceste ville aus tentes et aus trez. Je me doubte forment, se ne la secouréz, que le cité de Burs temprement perdréz. – Comment ? se dist le roy, ne suis je roy nommé d’Espaigne et de l’onneur sire couronné ? Ne puis je pas bien faire toutes mes voluntés et parler a mes gens et dire mes secréz ? Poy s’en fault que maintenent la teste ne perdéz. – Sire, dist le bourjois, bien faire le pouéz. Mais ce que vous di n’est que loiauté et pour le vostre honneur, dont je vouldroie assez. – Grant mercy, dist le roy qui se fu ravisé. Je vous foys mon viguier et le mien lieu tenéz, et veil que vous facéz toutes voz voluntés. – Sire, dist l’Espaignol qui fu puissant assez, et je feray pour vous tant que vous en louheréz. » Puis a dit coyement , qu’il ne fust escouté : « Se Henry vient deça et Bertrant le louhé, de la ville de Burs lui rendray clefz. » 312
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Le roy dam Pietre aprés se parti et sevra avec ses amis et ou plus se ia ; Ferrant de Castre y fu qui sa seur enmena,* Abrahan et Judas, Manecier y ala ; droitement le chemin de Toulecte s’en va.* Tant chevaucha le roy et si bien exploita que a Toulecte s’en vint et dedens il entra. La fu bien receü, chascun le festoya. Un espie de Burs se parti et sevra,
[103r]
- Fuite de Pietres à Toulecte -
[103v]
et s’en vint a Bervesque, la ou Henry trouva. Il vint a son hostel et le demanda. Il fu mené a lui et s’agenoilla. Une lectre qu’il ot vistement lui monstra. Et le conte les leu et dedans regarda.* et quant il ot sceü tout ce qu’il avisa, il it mander Bertrant et grant joye mena. « Sire, Bretrant, dist il, oiéz que l’on vous dira. Pietres le mescreans, que je n’ameray ja, s’en departi de Burs, ou bonne cité a. A Toulecte est alé et illec demourra. Aler nous fault a Burs ; je sçay bien qu’il y a un bon conseil pour moy qui nous resjoÿra. » Et Bertrant du Guesclin lui a dit qu’il lui menra et que tout droit a Burs il le couronnera.
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313 A Bervesque la ville it on adonc crier que chascun s’apprestast pour lendemain aler en la cité de Burs sans point de l’arrester. La vist on partout le bon harnoyz drecier, lances et armeüres a charrectes porter, arbalestres, quarreaux, saiectes pour blecier, tentes, pavaillons et torches pour alumer, chaudieres, chauderons pour cuyre le digner, de tout ce qu’il convient pour tel ost gouverner. A chers et a sommiers les faisoit on mener, et le pain et le vin et la char pour saler, banieres et penons et dars que l’on it lever. Lendemain au matin s’alerent ordonner. En l’avant garde font icellui jour aler le mareschal que l’on doit d’Audrahan appeller, Olivier de Manny, le gentilz et le ber, et ses freres aussi qui irent a louher. Huet de Caurelay n’y doit on oublier, Nichole Scamborne qui fu d’oultre la mer. Si fu Gaultier Huet, le gentilz et le ber.
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- Episodes espagnols -
Et en l’arriere garde pour les premiers garder fu Bertrant du Guesclin, que Dieu veille sauver, le conte de la Marche, que on doit bien honnourer, et Guillaume Boytel qui bien s’i volu porter, Guillaume de Lonnoy, Henry de Saint Omer, et mains bons chevaliers que Dieu veille sauver. Suisanment s’en vont le païs conquester et dam Pietre le roy du roiaume bouter, et le bon roy Henry droit a Burs coronner. 314
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Or chevauche l’ost et la chevalerie, vers la cité de Burs ont leur voye acueillie. En la ville de Burs fu la nouvelle oÿe que Henry et Bretrant et l’autre baronie s’en venoient a Burs banieres desploye. La ville ont bien fermé et bien edeiee. Et fu la barbequanne contreval trebuchee et fu la grande cloche sonné et hault bondie. La sont les Espaignolz venuz sur la chaussie, et des Juïfz aussi une grant compaignie. Si y eu de gens paienne plus que ne saroie dire. Et l’evesque de Burs qui bien sceu de clergie, fu mandé au conseil dont je vous signiie. Quant furent assembléz en la place jolye, l’evesque commainça, bien fu sa voix oÿe. 315
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L’evesque parla et dist bien sagement : « Vous veéz la doleur, le grant encombrement que nous actendons cy assez prochainement. Le roy Pietre s’en va qui voit l’empeschement. » Un Espaignol parla bien et souisanment : « Seigneurs, véz cy estat qui aiert malvaisement, car cy sont .iii. estaz, .iii. loys indiferent, qui ne doyvent mie playre a bonne gent. Faictes Juïfs aler d’une part vistement
[104r]
- Négociations à Burs et Sarrazins aussi faire leur parlement. Et chascun se tiendra a ce point tellement qu’ilz rapporteront touz bien veritablement ce que bon l’on semblera du fait present. » Et ilz ont respondu : « Vous parler sagement. » Chascun se trait a part bien et secretement, et disoient leur bon et leur divisement. L’evesque de Burs a prins leur serement dé plus vaillans de touz qui plus ont d’escïent. Et si les it jurer sur le saint Sacrement et sur les envangiles de Dieu suisanment a tenir bien secret ce fait entierement. Quant ilz eurent juré bien et deüement, « Seigneurs, dist l’evesque, par le grant serement que nous avons tretouz juré parfectement, Pietres n’est mie digne, ainsi ne autrement, de tenir le roiaume et le grant chassement, car il est mescreans et incrediblement, et reigné eu la foy il a ja longuement. Et n’a de concïence en plus que un chien pullent de mectre gens a mort et pendre laidement, de justicier proudomme sans faire jugement. Et it morir sa femme, murdrir faussement. Et si nous vauldroit mieulx, j’ay Dieu en convent, d’avoir un chevalier de bon gouvernement, qu’il tenist le roiaume d’Espaigne quictement, qui ist droit et loy bien raisonnablement, que obeir a tel roy qui vers Dieu se mesprent. »
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316 [104v]
« Seigneurs, dist l’evesque, par la virge Marie, Pietres ne vaut noyent, il est de fausse vie. Et si fu engendré en fait de bastardie ou corps d’une juïfve qui puis fu baptisie. Sy le leva de fons la roÿnne jolye qui d’une ille estoit a ce temps acouchie. Tant it celle reÿne a celle convertie
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- Episodes espagnols -
que son ilz lie donna pour sa ille jolye. Dela vint le roy Pietres, a amer ne fait mie. Et le conte Henry vint en ceste partie qui fu ilz du bon roy qui tant ot seignorie, qui tint la riche dame en bonne compaignie ; celle estoit belle et bonne et si estoit s’amie ; et l’avoit par amours de sa foy iancie et sur ce lui promist et ot sa compaignie. Et nous trouvons escript en la sainte clergie que puis que un homme a une femme plevie et gist avec elle et fait sa druerie, le pappe n’en pourroit faire la deppartie* non s’il ne le faisoit par fait de druerie.* Henry est noble homs, s’a maniere hardie. Se nous le refusons et chascun s’i octroie,* nous le ferons jurer touz a une ie que l’usage tenra en Espaigne l’antie, ainsi que Olivier tint loiaument a sa vie, le ilz Lÿon de Bourges qui tint la seignorie. Ens ou temps qu’il reigna fu Espaigne afranchie qui laydement a esté depuis asservie. Or dictes vostre fait, j’ay dit ma partie. » 317
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Ainsi furent d’actort lé Espaignols vaillent. Aprés furent mandé les Sarrazins devant. L’evesque leur a dit : « Or vous aléz comptant vostre division et vostre fait devant. » Se dist un Sarrazin bien sage et avenant : « Seigneurs, véz cy nostre fait, ja ne l’irons celant. Toute vostre volunté et vostre commant volons faire touz comme vray obeissans pour aider de noz corps et de nostre vaillant. » Dient les Crestïens : « Vous aléz bien parlant. a Henry nous tenons et au vassal Bertrant. – Véz cy riche conseil », dient les mescreans. 8578
corr. d’après P : a e. depuis afranchie
- Négociations à Burs -
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318
[105r]
Lors furent les Juïfs isnellement mandé. L’esvesque leur a leur estat demandé « Seigneurs, dist un juïf a qui on ot donné audïence de dire ce qu’ilz eurent visé, nous ne dirons neent de ce que avons pensé se vous ne nous avéz bien promis et juré dessus la vostre loy et vostre loiauté, se nous ne sommes touz d’actort en unité et que de vostre conseil soions discordé, que partir nous lerréz de la bonne cité et que tout nostre avoir aurons a sauveté pour departir decy en vie et en santé et aler demourer ou nous serons sauvé, par dedens Portiugal s’il nous venoit a gré ou dedens Arragon, pour la estre amassé. Et sur ce nous dirons ce que avons actordé. » Dient les Espaignolz : « Il vous sera juré de nous entierement et trés bien confermé. – Par ma loy, beaux seigneurs, je ne l’aray celé. Nous disons et d’actort pour fait de verité que un crestien ne vault riens et n’a bonté puisqu’il fausse sa loy et qu’il a mesherré. Oncques bon crestïen ne it manifesté ne ne it en sa loy nulle desloiauté. Plus ne vous en dirons, or y advisé, car se un juïf avoit prisé crestïenté ne qu’il amast crestien ne monstrast amité, nous n’y tiendroions nul bien ne loiauté. »
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319 Véz cy une raison faicte par les Juïfz. Touz Espaignolz priserent adont bien leurs diz. L’un a l’autre dist : « Cellui mot est bien assis. Pour Pietre nostre roy a esté cellui faulx dit. Or fault qu’il soit debouté et tenu ennemi. » 8610
s. je l n., l cancellé.
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- Episodes espagnols -
A icelle parolle a deux cordeliers prins. A Henriz ont mandé par brefz et par escriptz veigne hardiement, il sera recueilly. Les cordeliers s’en vont par plains et par larriz jusques a l’ost Bertrant qui tant estoit hardy. Et les bons chevaliers et escuiers de priz a un riche manoir estoient touz assis, a douze lieues prés de Burs, se m’est advis. Et si tost que Bertrant a les .ii. clers choysiz, il a dit a Henry qui tant fu seignory : « Véz cy deux cordeliers que on a a vous tramis. C’est un signe de paix ou de querre respit. – Sire, se dist Henry, Jhesu nous gart de pis. » 320
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L’un des cordeliers qui estoit moult proudons, salua haultement chevaliers et barons et leur a dit : « Seigneurs, louhé en soit le nom du roy de paradis qui estora le mons, gart la cité de Burs, gros, grailles, longs, Sarrazins et Juïfz, escuiers et garçons, bourjoises et bourjois et les grans nacïons. L’evesque, les chenoynes et les religïons, vous mandent touz saluz et la conclusïon. C’est telle, beaux seigneurs, que nous vous livrerons les clefz de la cité et entrer vous lerrons et au bon roy Henry aussi nous rendrons et l’appellerons roy et le couronnerons par tel convent que, se convent tenons, Espaigne maintiendra aussi comme loial homs, si comme roy Olivier qui fu ilz a Lÿon. Ainsi est actordé et ensuyvant l’avons. » Se dist le bers Henry : « Nous vous en mercïons. Et si plaist a Jhesu, loiauté maintiendrons. » Dont fu grande la joye de touz les barons. Aus cordeliers en fu promis mains riches dons. Se dist le roy Henry : « Savéz que nous dirons :
[105v]
- Couronnement d’Henry à Burs vous nous salueréz les nobles et les bons. Je suis tout prest d’aler et d’acomplir raison. Demain, se plaist a Dieu, decy nous partirons. » Adont beurent des vins, grande en fu la foyson. A Burs se sont retraiz ; or nous dit la chanson que les nobles Espaignolz irent establisson d’issir de la cité faisans alictïons, portans contre Henry et croiz et confanons le clergié revestu en disant oroisons.
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[106r]
Les bourjois de la ville et l’evesque vaillent o le noble clergié s’alerent departant, et issirent de Burs comme a souleil levant, en telle maniere que vous iray comptant. L’evesque de la ville et le clergié vaillent alerent a ce jour en eulx humiliant et croiz et confanons aloient hault portant, Te Deum laudamus aloient hault chantant et aprés les bourjois les plus suisans. Huit bourjois y avoit, c’estoient .viii. sergent, qui portoient huit lances tout droit en leur estant la ou les clefs avoient qui aloient pendans, pour l’amour des huyt portes, comme on trouve lisant, qui estoient a Burs derriere et devant. Les bourjoises de Burs estoient demourant si noblement parees et de cy doubz semblant que se chascune fust la femme d’un soudant ou d’un bon roy de France, le roiaulme vaillant. En ce point dont je dy estoient atendant Henry le nouvel roy et le conte Bertrant, qui fu conte de Bourges en Espaigne seant. Ainsi vont les bourjois dont je vous champ, quatre lieues ou plus alerent cheminant ains que eüssent trouvé Henry le combatant.
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Quant le conte gentilz a la chiere hardie a veü approchier icelle compaignie, adont leva ses mains et son cuer s’a saignie et a dit : « Sire, Dieu qui tout as en baillie, qui pour nous te nombras en la virge Marie et qui moruz en croiz pour humaine lignie, et qui resuscitas par miracle essaucie, et a l’Ascensïon, une feste jolye, montas es sains cieulx a belle compaignie, que Adam, Abraham, Jacob et Ysaïe, et touz ceulx qui de toy irent la prophecie, et a la Penthecoste qui doit estre prisie, en samblance de feu confortas ta maisnie, sire, comme c’est vray et comme je me y aie, si veiléz ceulx garder de toute villennie qui me font aujourdui si grande compaignie, et a Bertrant donnéz sainte et bonne vie, donnéz joye et honneur a la chevalerie qui sont aus lieux deça venuz en mon aÿe. » Lors s’en vint a Bertrant, la main lui a baillie. « A, Bertrant, dist-il, Jhesu te benye, car aujourduy pour toy ma char est essaucie. » Dist le conte Bertrant : « Je ne vous fauldray mie tant que toute Espaigne aréz en vostre baillie. Ja le faulx mescreant si n’en tiendra demie, qui it morir la dame de si noble lignie. » Lors se sont les chevaliers mis en une partie et les chevaliers plusers ou prouesce s’alie,* – le plus couhart valoit Richart de Normendie – aussi tost que approchiéz furent de la clergie descendirent a pié touz a une ie. A l’evesque s’en vont qui touz les benye. La vint le roy Henry qui l’evesque festie. Et l’evesque dist oyant la bourjoisie : « Seigneurs, nous vous tiendrons roy en ceste partie 8720
corr. d’après Nh : en prouesce s.
[106v]
- Couronnement d’Henry à Burs que tenir nous veilléz par manière afranchie, si comme roy Olivier tint nostre ancesserie, qui fu ilz a Lÿon de Bourges la garnye. » Et le conte Henry volunters leur octroie. Lors montent les barons, si ont leur voye acueillie et s’en vont droit a Burs demenant bonne vie. Ainsi entra Henry, a la chiere hardie, en la cité de Burs ou chascun le festie.
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323 En la cité de Burs qui bien estoit fermee entra le bers Henry et sa gent hounnouree. N’y ot cloche en moustier qui n’y soit hault sonnee ne dame ne pucelle qui ne fust bien paree. Noz gens es faulx bours furent la nuit houstolee. Henry fu ou palaix, sa chambre y fu paree. La fu fait le soupper de viandes ordonnee. Plusieur dames y ot de bonne renommee et d’autres bonnes gens qui furent de l’armee ; si furent bien serviz, n’y aiéz ja pensee. En consolacïon furent celle vespree et lendemain aussi toute jour ajornee. Et puis manda Henry sa courtoise espousee, qui dedens un chastel se tenoit enfermee, pour son seigneur Henry couroussé et iree qui estoit enchassié d’Espaigne louhee. Mais quant la dame sceu la verité prouvee comment elle seroit roÿne couronnee, oncques dame ne fu si bien reconfortee. Avec les seurs Henry s’en est acheminee – belle, bonne, plaisant et bien endoctrinee estoit icelle dame dont je foys divisee – dessus .i. noble char moult trés bien ordonnee. Mais quant elle approcha celle cité louhee, sur une belle mule fu la dame montee, de quoy la celle estoit si noble et si doree, de pierres pricïeuses entour environnee,
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et le chanfrains estoit de telle euvre estoree. Quant elle fu choysie, forment fu regardee. On va dire a Bertrant coiement a cellee : « Sire, véz cy la dame a Henry espousee. » Et quant Bertrant l’oÿ, n’y a fait arrestee, sur la mule monta que on lui avoit donnee. Huet de Caurelay qui foy lui ot donnee, Olivier de Manny a la chiere louhee, Si fu Jehan de Brenes, a la chiere senee, avec Gaultier Huet et ceulx de sa contree et mains princes, dequoy ne foyz devisee. Hors de Burs sont yssuz, comme demie leue encontrerent la dame, blanche comme une fee. 324
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Quant la dame choisi les chevaliers venir, de la mule plaisant sans point de l’alentir descendi vistement, n’y actendi lesir. Et quant les chevaliers vont la dame choysir, chascun mist pié a terre pour la dame servir. Bertrant s’en vint a elle et si l’ala saisir, et lui dist doulcement : « A pié ne pourroiéz venir. Il vous fault remonter sans point de l’alentir. – Non feray, sire. Voir, je ne vous quier mentir, car je doys bien a pié encontre ceulx venir qui me font ainsi honnourer et servir. J’estoie pouvre dame, fait m’avéz enrichir, n’avoie que donner ne a autruy riens partir ; j’estoie toute nue, vous m’avéz fait vestir ; je vivoie en tenebres, fait m’avéz esclarsir. Je prie cellui Dieu qui pour nous volu morir en l’arbre de la croiz pour les siens garentir, que l’onneur que me faictes il vous face merir,* car je ne le puis rendre a vous ne deservir. » A touz les chevaliers ala la dame oufrir tant de si beaux parlers en gictant mains souppirs que touz les chevaliers qui les peurent veïr
[107r]
- Couronnement d’Henry à Burs disoient l’un a l’autre pour amoureux desir : « Ceste dame est bien digne de roiaulme tenir. »
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[107v]
Les chevaliers ont fait la dame remonter et les seurs Henry que avec lui volu mener. Et les chevaliers montent sans point d’arrestier. Les seurs Henry si vont moult Bertrant regarder. Dist l’une : « Je voys cy merveilles a penser de ce Bertrant de quoy j’ay tant oÿ parler. Si est merveilles lait qui veult regarder. Et je l’ay tant oÿ priser et honnourer. » Et la seconde dist : « Dieu le veille sauver. On doit mieulx la bonté que la beauté amer. C’est tout le plus vaillent qui soit deça la mer, le plus avantureux de bataille iner et le plus eureux de chasteaux conquester c’on pourroit, se dit on, en ce siecle trouver. » Et la terce dist : « Or veillons bien viser, car il a bon corps d’omme et chiere de sangler, les poins gros et quarréz pour l’espee porter, les jambes et les cuisses pour grant peine endurer. Je prie cellui Dieu qui se laissa pener en l’arbre de la croix pour nous rachapter, qu’il le face a honneur de ce siecle iner. » Par Dieu aussi it il, ja n’en devéz doubter,* car on ne vit, se croy, duc, conte ne per a si trés grant honneur du siecle trepasser, ainsi comme vous porréz oÿr et escouter.
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326 Or enmainent la dame les chevaliers gentilz par dedens la cité en joye et en deliz. Les bourjoises de Burs, blanches comme liz, vont encontre la dame de riches draps vestiz. La ont fait grant feste de parler et de ris. Et disoient adonc les bourjoises de pris :
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« Dame, bien veignéz vous, vostre corps soit benys. Vous estez nostre dame et nostre reigne a tousdiz. » Et elle leur disoit : « Dames, trés grant merciz. Bonne me trouveréz en faiz et en diz. » Ou palais est montee qui fu de marbre joliz, noblement paree de chevaliers hardiz. Pour le couronnement fu le palais pourpriz. Le jour de Pasques, que Dieu fu surrexis, fu couronné a joye le noble roy Henry ou moustier Nostre Dame, la mere Jhesucrist. La fu le noble roy sacré et benysts, et receu la couronne par devant les martirs. De l’evesque de Burs fu le service dit. Le roy fu couronné et la dame gentilz remenee ou palais qui estoit moult jolis. A joye et a honneur fu le roy recueilly. Noble fu le digner, de touz biens remply : de gelines, de grues et de chappons roustyz, et du touz riches vins des meilleurs du païs. Mains sons de menestriers y fu ce jour oÿs. Menestriers et hayraux y furent bien partis : chascun receu beaux dons et fu bien revestiz. La feste fu moult grant, chascun c’est resjoÿ. Et le mardi aprés que je vous devis, pour l’ame la roÿne dont le corps fut murdry, a l’eglise ou son corps estoit ensevely it le conte de la Marche qui fu des leurs de lis, chanter pour la roÿne .ix. messes ou .x. Et en ce temps, seigneurs, que je cy vous devis, s’en fu un Espaignol decevré et parti. Vers Toulecte s’en ala, si c’est au chemin mis. Telz nouvelles dira, j’en suis certain et is, dont dam Pietres sera courroussé et marry. 327
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Vass’en l’Espaignol a pointe d’esperon, droit dela a Toulecte n’y i arrestison.
[108r]
- Libérer Grenade ou tuer le tyran ? -
[108v]
Le roy Pietres trouva sus ou chastel de nom, avec lui avoit Jacob et Salmon, et Danferant de Castre qui blanc ot le grenon, et d’autres chevaliers assez et a foyson. L’Espaignol lui dist tenant a genoillon : « Sire, de ceulx de Burs vous feray mencïon. – Comment, dist le roy, ne me di se bien non. » – Sire, voir vous diray sans nulle mesprison. Ceulx de Burs vous ont fait malvaise traïson : vostre cité ont rendue par fausse avisïon. Sans recevoir assault, bataille ne tençon l’ont rendu a Henry vostre frere le quoystron et a Bertrant aussi, le traïtreur felon. La Blanche Compaignie si est en poctession de la cité de Burs qui doit estre en vostre nom. Henry ont couronné en grant afectïon. Et ont touz juré chevaliers et barons que de tout vostre roiaume entour et environ mectront vostre frere en dominacïon en dominacïon et vous chasseront hors a guise de garson. » Quant roy Pietre l’oÿ, si clina le menton. « A, Las, dist le roy, véz cy male actoison. Ma terre perdray par Bertrant le felon. Il ne me demourra cité ne mancion. – Sire, se dist Ferrant, véz cy male façon. – Voyres. » , dist un juïf qui David ot nom, qui d’astronomie savoit bien la façon. Si a dit : « Sire, roy, n’en feray celoyson. Mais j’ay estudié ou livre de Jason, et ou signe d’estoir et en la visïon des signes merveilleux sur les sors Pharaon, du peuple Israel la grant confusïon qui furent en Egipte en grant confusïon Mais le sort est sur vous en declinacïon, que vous seréz un temps en la regnacïon Nabugodonosor qui perdi son renon. Et vous le perdréz, s’en foys probacïon. Mais non pas en aiéz marrisson,
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- Episodes espagnols -
car encores reviendréz en dominacïon en dominacïon et de voz ennemis prendréz vengezon. Et l’aigle sera mis en une prison et mis en une cage par le vol d’un faulcon qui pour vous volera pour relever vostre nom. » Seigneurs, il se dit voir le faulx juïf felon, et ainsi comme vous orréz en celle saison. 328
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Seigneurs, or entendéz, les petis et les grans. A Burs fu roy Henry o le conte Bertrant. La eurent a conseil les chevaliers vaillans qu’ilz departiront tost et incontinent et iront en Grenade qui est trop plus avant. Et quant Henry l’oÿ, si en eu le cuer dolant. Les chevaliers manda qui furent suisans. Quant il les a veü, si dist en souspirant : « Seigneurs, si dist le roy, par Dieu le tout puissant si vous me laisséz cy, je n’ay riens vaillent. Pietres reviendra a peuple si trés grant qu’il ne me lerra voir femme ny enfans. Seigneurs, ou iréz vous faire aumosne plus grant que de conquerre Espaigne, la païs avenant ? Assez y trouvera Juïfs, faulx recreans, et Sarrazins aussi qui sont ycy regnant. Occïéz les Juïfs et Sarrazins vaillans et entre nous icy tuerons le remanant. J’abandonne a voz gens ce qu’il trouveront : je ne veulx de l’avoir un denier vaillant. Departéz a voz gens ce qu’il vont conquerant, tant que Pietres s’en aille a guise de servant. » Dont y vint la reïgne moult trendrement plourant : « Ha, Seigneurs, dist la dame, pour Dieu, venéz avant. Je vous donray bons gages, du tout a vostre commant : or, argent, joiaux et ce que j’ay vaillent, ne je n’auray sainture ne tant ne quant que je ne donne tout, ja n’en aléz doubtant,
- Libérer Grenade ou tuer le tyran ? se je devoie boyre au verre mon vivant ne avoir que une robe qui fust de bouquerant. Si veil je tout donner sans avoir remanant, ainçois que je ne soie delivré du tirant. Beaux seigneurs, Espaignolz sont si variens qu’ilz nous lerront tout coy si Pietres vient avant. »
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329 [109r]
Quant les chevaliers oyent la reigne compter toutes ses raisons, cy ont prins a penser. le Besgues de Villaines commainça a parler. Si a dit le chevalier : « Ja ne vous quiers celer. J’ay tout adés oÿ dire et recorder qui sert et ne parsert, il ne puet prouiter.* Aussi bien pouons nous cy noz ames sauver que d’aler en Grenade le païs conquester. Juïfz et Sarrazins poons bien cy trouver et le droit de Henry aider et conforter. Qui croyre me vouldra, nous irons sans cesser a Toulecte briesment pour Pietres gravanter. » Quant la reïgne l’oÿ, si le va acoler. « A, Chevalier, dist elle, Dieu te veille sauver. » Dist Bertrant du Guesclin : « Il nous fault demorer pour ce faulx mescreant octire et afoler. » Dist Arnoul d’Odrahan : « Ce fait a creanter. La reïgne est vaillent et si fait a loer. Et le roy nous fera noz souldees donner tant que chascun le veille servir et honnourer. Car je de moy ne veil la monte d’un sollier et si suis un homme veil, plus ne veil assembler. J’ay assez pour ma vie avoir et despenser. » Huon de Caurelay dist : « Je veil demourer. » Se dist Gaultier Huet qui fut d’oultre la mer : « Et je ne vous fauldray tant que pourray durer. – Par foy, dist Scamborne, ne m’en doys deporter. Jamais en Engleterre je ne veil retourner 8955
corr. d’après P : q. croyra me v.
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- Episodes espagnols -
se les .ii. roys ne font guerre renouveller. » 330
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Seigneurs, a icellui jour furent les chevaliers d’actort entierement du roy Henry aider et de Pietre le roy hors d’Espaigne chasser. Le harnoys font trousser et bien appareiller, a mules, a harnoys et a chars charrier tout ce dequoy on puet avoir en l’ost mestier. Vers Toulecte s’en vont les vaillans chevaliers. Au roy Pietre s’en va une espie crier : « Sire, dist une espie, veilléz vous conseiller, car Bertrant du Guesclin pense de chevaucher et le bastart vostre frere si amaine sa moillier. Ilz ont juré vostre mort, sergent et escuier. » Adont le roy Pieron se prinst a esmaier : « Ha, Fortune, dist il, tu me veulx essiller. » Lors a fait son conseil tout appareiller et leur a dit : « Seigneurs, je veil de cy vuider. » Lors it a ses bourjois vistement envoier qu’ilz venissent a lui parler et conseiller. Touz les nobles bourjois y vindrent sans tarser. « Seigneurs, se dist le roy, je vous di sans cuider : Fortune me court sus qui me fait trebucher. Je croy bien que Fortune ne fait que tournoier pour moy faire cheoir ou plus profont celier. Vous avéz ville fort, si sont les murs plenier, si sont les fousséz fors et les murs hault dreciéz. Bien vous porréz tenir un an tout entier car vous avéz assez a boyre et a mangier. Bien sçay mes ennemys vous venent assegier : c’est mon frere bastart, que je n’ay mie chier, qu’ilz ont couronné, je ne le puis noyer. Si vous pri, beaux seigneurs et le vous requier que vous me veilléz touz comme seigneur droiturer aider et conforter, car je en ay bon mestier. 9001
b. sçay vo mes e., vo cancellé.
[109v]
- La table de Pietres A Sebile m’en iray le secours pourchasser, car, ains que je ne puisse ceste honte venger, a roy de Bel Marine m’en iray alier et au roy de Grenade, qu’il me veille aider. Il me convient de vous partir et esloigner. Pryvemment me fault aler et chevauchier. » Et ilz ont respondu : « Ce fait a octroier. Or penséz de secours avoir et avancer. La ville garderons de bon cuer et entier. » Adont it son trezor le roy Pietre trousser. Tant d’or et d’avoir et de mains joyaux chier .i. charriot a .v. chevaux en it charger. La fu la table d’or, que l’on ne pooit priser. De nulle telle table roy ne duc ne princer ne oÿrent nullement parler ne declarer, ne je ne vous saroie parler ne diviser l’avoir qu’elle valoit, je vous dy sans cuider. Touz ceulx qui d’argorisme savent le droit mestier ne le sauroient pas eslire ne priser.
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[110r]
La table du roy Pietre, dont je vous voys comptant, ne saroit nombrer nul clerc lisant, car toute estoit d’or, en croix aloit ploiant a charnieres d’or in qui bien furent seant et qui moult justement vont gentement fermant. De pierres pricïeuses, de pierres d’Orïant estoit environnee et de maint dÿamant. D’asur et de sinople y ot euvre plaisant, ou ymages taillees y avoit de Rolant, de touz les douze piers, d’Olivier le puissant, comment furent vendu a Marsille tant et dedens Ronceveaux octis en combatant. Et enmy celle table, dont je suis contant, estoit une escharboucle si clere et puissant qu’elle rendoit clarté par jour a nuyt faillent, ainsi comme le souleil va a midi luisant.
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- Episodes espagnols -
Et deléz l’escharboucle qui valoit mains besant, si y avoit une table qui de vertu ot tant que nul homme ne pooit, ne roy ne amirant, aporter nul venin qui tant fust mal faisant que si on lui apportoit la table en servant que pierre n’alast en l’eure changent noyre comme charbon, si changoit en semblant. Puis la donna dam Pietre, comme treuve lisant, au prince des Galois, ou tant ot de bonbant, tout droit en Angoresmes, si comme orréz avant recorder, si vous plaist, en un noble romant. 332
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A tout son grant tresor roy Pietres s’en ala a Cordonnes tout droit, a .xv. lieues dela ; ens ou temps de jadis Cordes on l’appela. Parmy une forest Pietres si s’en ala : quinze lieues avoit deléz, n’en doubtéz ja, et cent lieues de long qui bien les mesura. Or vous larray de lui tant que point en sera. Du roy Henry diray, comment il s’avança, qui Bertrant du Guesclin avec lui mena et les bons chevaliers en qui il se fya. Tant alerent errant et tant l’ost s’approcha que Toulecte ont choisie, ou riche chastel a, ou les escoles furent en ou temps qui passa, en qui le roy d’enfer touz les ans envoia un ennemy d’enfer qui les clers doctrina. Mais il est defendu, si que plus n’y viendra pour amour de Virgiles qui a celle escole ala, qui l’ingromance aprinst, de son juvant usa, dont la ille du roy laidement l’ahonta. Le myrouer de Romme fu fait par cel art la et si en i une teste qui en in lui cousta. 9042 9069 9072
corr. d’après P : e. de l’escharboucle q. corr. d’après P : a c. escole a corr. d’après P : p. cel art a
- Reddition de Toulecte [110v]
Or diray de Henry comment il esploita. Assez prés de la ville ses loges estora et couru le païs et la proye leva. Le peuple des villages durement s’esmaia. A Toullectes s’en vont, la chascun y amena son corps et son avoir que riens n’y demoura. Aprés le roy Henry a la cité manda que l’on veigne a lui parler, sauf conduit leur donna. L’evesque de Toulectes la commune manda et les plus grans bourjois avec lui assembla. Quant ilz furent venuz, moul sagement parla. « Seigneurs, vous savéz bien que roy Pietres s’en va, son tresor avec lui, que riens laissé ne nous a. Et ce signiie que plus ne reviendra. C’est un mescreant roy et si lui mesaviendra, ains proudomme ne creut qui Jhesucrist n’ama. Et se nous actendons, le peuple perdra. Or soiéz adviséz, car ces gens dela qui sont avec Henry savéz vous qu’il y a. Se par force nous ont, riens ne nous demourra. »
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333 Quant les bourjois oÿrent l’evesque ainsi parler que Pietres avoit fait son tresor emporter, ilz ont dit : « Rendons nous, laissons dam Pietres aler. C’est un roys sans pitié qui ne fait a doubter. » Adont a fait l’evesque au roy Henry aler et les clefz de la ville font l’evesque donner ain que au roy Henry les aille presenter. L’evesque s’en party qui n’y volu arrester, avec quatre bourjois qui bien savent parler. Le roy Henry trouverent, avec Bertrant le ber et les bons chevaliers qui moult sont a loer. A l’encontre l’evesque a fait le roy aler et fy si leement devant lui amener. L’esvesque ala roy Henry saluer et lui dist : « Noble roy, Dieu vous veille garder.
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- Episodes espagnols -
Véz cy ceulx de Toulecte qui vous venent livrer les clefz de la cité et la font desfermer contre vostre venue et hommage jurer, ainsi comme ceulx de Burs vous ont fait acorder. » Se dist le roy Henry : « Bien le veil confermer. » Adont y it le roy les barons housteler et dehors es faulx bours les plusers demorer. La it on a Henry mains joiaux presenter et le roy les receut sans point les refuser. Et puis les it partir sans point d’arrester et les it vistement aus chevaliers porter. Selon leur quantité a fait tout delivrer, oncques il n’en retint denier pour alouer. 334
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Puis sceu le roy Henry ou dam Pietre estoit, qui a Cordonne fu ainsi que l’on lui disoit ; au temps que Marcilles le roy en Espaigne regnoit estoit Cordes nommee adont de son droit. A l’evesque demande quel chemin avoit. Et l’evesque lui dist que entrer lui convenoit dedens une fourest que longue trouveroit ; quinze lieues de largeur celle forest avoit. Et bien lui dist aussi qu’il y trouveroit maintes bestes sauvages car le lieu le devoit : ours, lÿons et serpens assez y conversoit. Adont fu actordé que chascun chargeroit vitaille, pain et vin et ce qu’il lui fauldroit. Il saisi le chastel et chastellain y mectoit. Et la reigne aussi ou chastel demouroit. Et quant il ot tout fait, de Toulecte partoit, et la chevalerie en qui il se fyoit. La fourest approchent qui si longue estoit. Tant de bestes trouverent en ce lieu la endroit que la chevalerie forment s’esmerveilloit. La nuyt qui s’i logerent, le gait on ordonnoit pour les bestes sauvages que chascun y veoit.
[111r]
- La Grande Compagnie à Cordonne Il estoit demeuré qui tout devant aloit, aussi estoit perdu qui derere se tenoit. En ce point la passerent, chascun prés s’esgardoit.
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[111v]
Seigneurs, ceste fourest dont je foys mencïon fu moult grant et horrible, hault y sont les boutons. Cordonnes siet emprés une lieue environ. La se tenoit dam Pietres, comme dit la chansson. Mais quant il sceu de vray qu’il en fu mencïon et que on l’aloit suyvant a pointe d’esperon et qu’il avoit perdu Toullecte le donjon, « A, Las, dist le roy, Véz cy grant traÿson. Or me faillent touz chevaliers et baron, bourjoises et bourjois, gens de religïon. Aÿ, gens de Toulecte, ne valéz .i. bouton. Le roiaume d’Espaigne, noble regnon, perdray je de vous la dominacïon. A, Bertrant du Guesclin, ilz a putain, larron. Car je tenisse ja en ma possessïon comment je te feroie donner ton guerredon. Oncques justice ne fu faicte par traÿson si grant, si horrible ne de telle façon que soufrir te feroie a telle destructïon que tu renoiëréz Belgebus et Noyron. De mïel te feroie oindre tout environ et puis a une estache fort lier ta façon, et des mouches manger assez prés d’Arragon, ou on en trouve assez en la morte saison. »
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336 Le roy Pietres fu moult dolant et aïré. Il a dit a ses gens : « Je suis deshonnouré. Par Bertrant du Guesclin serray desherité. Ilz me suyvront partout, par chasteaux, par citéz. » Se dist Ferrant de Castre : « Savéz que vous feréz. A Bertrant et Henry, si vous plaist, manderéz
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- Episodes espagnols -
que vous soiéz de paix et vous acoderéz que d’Espaigne tiendra si a vous est actordé Toulecte et Sebile, ceste ville deléz. Jusques en Portuigal tout lui quicteréz. Et il vous rende Burs qui est bonne cité, et d’Espaigne soiéz roy et sire nommé. Et .x. cens milles livres a Bertrant rendréz pour departir a touz ceulx qu’il a amenéz, car si vous les avéz partiz et decevréz jamais ne les verréz ensemble assembléz. Qui les pourroit avoir de cy endroit tournéz ? Espaigne seroit vostre ains un an passé et si seroit Henry en vostre prison gicté. – Par foy, se dist le roy, c’est ine verité. Tout ainsi sera fait comme vous le deviséz. Qui fera le message ? Qui en est appresté ? – Sire, se dist Ferrant, .ii. bourjois prendréz, de ceste ville touz les meulx adviséz. » Adont manda le roy les bourjois naturéz. Ne sçay a quoy long plait vous en soit devisé. Partir it deux bourjois que bien ot escoléz. Et ceulx sont venuz aus barons naturéz qui yssient des bois qu’ilz y avoient passéz. Dessus une riviere, dont bon estoit le gué, s’estoient refrechiz sur l’eave et sur les préz. La vindrent les bourjois ainsi que oÿ avéz. 337
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Les bourjois demanderent roy Henry et Bertrant et ilz furent mené sur une eave courant. La furent chevaliers ensemble repousant : Olivier de Manny, au courage vaillant, le Besgues de Villaines ne va pas oubliant, Huon de Caurelay, d’Angleterre vivant, et Mahieu de Gournay le sien appartenant. Cincquante chevaliers touz ensemble esbabtant estoient. 9187
c. endroit trouvez tournez, trouvez exponctué.
[112r]
- Négociations entre Pietres et Henry Les bourjois sont venuz devant eulx enclinant L’un parla premier, c’on tenoit a savant. « Seigneurs, barons, dist il, or m’aléz escoutant. Le roy Pietres vous mande, ainsi que en suppliant, que vous mectéz la paix a Henry le puissant et de lui ensuyvant, par tel convenant qui larra a Henry Toulecte la devant et quant qu’il a conquis puis Arragon passant, et ceste ville aussi et Sebille la grant. Et roy Pietres tiendra tout le demeurant et si demourra roy tousjours en son vivant. Et .xc . milles livres vous donrra maintenant a faire vostre vouloir et tout vostre commant. Et si vous plaist d’aler vostre voiage faisant vers le roy de Grenade, le felon mescreant, et dedens Bel Marin, un roiaume puissant, trente milles Espaignolz vous iray promectant, sans or et sans argent .iii. mois en un tenant. »* Quant Henry l’a oÿ, si mua son semblant. Et les barons le vont forment regardant. « Que avéz vous en pensé ? se lui a dit Bertrant. Véz cy belle promesse, selon mon escïent. – Or queréz qui le teigne », dist Henry maintenant.
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338 « Ha, dist le roy a la chiere hardye, pleüst a Jhesucrist, le ilz sainte Marie, que ceste paix ycy fust faicte et adrecie et que jamais ne fust la guerre commaincie. Mais je sçay vraiment que c’est chose traitie a la in que de vous soit faicte departie. Si outages veult livrer tout a ma commandie si m’y actorderay, se Dieu me benye. Une ille qu’il a qui est belle et jolye, me face delivrer et mectre en ma baillie aussi Ferrant de Castre, en qui Pietres se ie, et .l. bourjois de souisant lignie ;
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je m’y actorderay sans nulle tricherie. » Et quant les .ii. bourjois ont la parolle oÿe, ont dit au roy Henry touz deux par compaignie : « Sire, dit le bourjois, or ne vous prenéz mie, car n’y entrerons ja en ceste plegerie. – Et encores, dist Henry, je voldray qu’il m’octroie Daviot et Turquant qui sont de sa maisnie, de son maistre conseil et la ou plus se fye, car par ses .ii. Juïfz fu la dame murdrie, la roÿne gentise de roial lignie. Ces deux feray ardoir tantost par compaignie car ilz sont traitreurs et de fausse lignie. Et de tant vous suppli, seigneurs, par compaignie, que si Pietres s’en fuit avec sa baronie, que vous me retenéz ces deux, je vous en prie, car ilz sont faulx Juïfz et de fausse lignie. » Se dient les bourjois : « Et on le vous octroie. » A icelle raison ont fait la departie. 339
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A Cordonne s’en sont les bourjois retourné. Au roy Pietre ont compté tout ce qu’ilz ont trouvé : la response Henry et Bertrant l’aduré, de sa ille ensuyvant qui tant ot de beauté, que Henry pour houtage avoit lors demandé. Lors n’avoit que .xii. ans la belle au corps molé. Engendree l’avoit Pietre le parjuré en sa moillier premiere qu’il ot ja expousé.* Si en demeura la ille dont je vous ay compté, qui puis fu mariee en grant nobileté au duc qui de Lencloistre tint la duché, ilz au roy d’Engleterre Edouart le doubté, qui a moulier la prinst par trés grant amitié pour chalenger d’Espaigne la roiaulté. Et quant Ferrant oÿ c’on l’avoit demandé pour estre demeurant de ce fait devisé, il a dit coiement et en a moult juré
[112v]
- Fuite de Pietres et prise de Cordonne qu’il n’y demourroit ja en jour de son aé. La nuit s’appareilla et cellui de s’amité, sans prendre nul congié a Pietre l’aduré de partir de la ville, coiement a secret. Vers Composterne ala, ou il ot herité. Ainsi Pietre demoura la endroit essillé. Et dan Ferrant s’en va le grant chemin ferré.
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[113r]
Quant Pietre a veü que chascun lui failloit, a droit fu esbahy et il avoit bien droit. Aus bourjois prinst congié, a Dieu les commandoit. Heliot et Turquant, ou le roy se fyoit, envoia tout avant, que oÿ dire avoit que les deux faulx Juïfz on lui demanderoit. Pourtant se sont partiz, si ont prins leur chemin droit pour aler a Sebile, ou le roy aler doit. Et de ces .ii. Juïfz un grant debat montoit, mais ilz orent d’actort, ainsi que on disoit, qu’ilz feroient leur paix, chascun s’i actordoit, et de Pietre livrer a Henry qu’il haoit. Si en jurerent leur loy que delivré seroit au roy Henry d’Espaigne qui moult le desiroit. Adont sont actoisé, chascun en lui pensoit d’acomplir ce fait, chascun le desiroit.
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341 Aprés ce que roy Pietres a bourjois supplia de garder celle ville et dist qu’il s’en ira a Sebille la grant et qu’il assemblera bonnes gens pour combatre a Henry qui vient la, de Cordonne party, son tresor enmena et la table d’or in mie n’y oublia. A ce qu’il ot de gens vers Sebile s’en va. Quant en la cité vint, chascun le festÿa. Et le bon roy Henry, avec les gens qu’il a, 9304
corr. d’après P :P. a Bourges s.
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- Episodes espagnols -
et vint en la cité, les clefz en demanda. Aussi tost qu’il y vint chascun lui actorda, les portes lui ouvrirent et le roy y entra, et les bons chevaliers, dont chascun se logea et par dehors la ville assez en demoura. Huit jours y sejournerent, a ce c’on me compta. Lors sceurent que roy Pietres a Sebile s’en ala. Lors se sont esmeüz que nul n’y arresta, vers Sebile s’en vont, ou Pietres demoura. Quant il oÿ compter que Henry l’approcha, il en fu moult dolant, forment lui ennuya. Seigneurs, a icelle ville troys fermectés y a, l’une des Crestïens et l’autre par deça : la furent les Juïfz que dam Pietres ama. Et en l’autre partie qui moult bien se ferma, la furent Sarrazins, mal ait qui les porta. Ensement ceste ville en troys pars s’ordonna. 342
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En Sebile la grant, la cité bien fermee, estoient Sarrazins et la gent crestiennee, et Juïfz ensuyvent, une gens desfaee. La fu le roy Pietres qui la chiere ot iree, pour ce qu’il perdroit Espaigne l’honnouree. Heliot et Turquant, dont j’ay fait devisee, estoient jouxte le roy, a qui mie n’agree : « Seigneurs, se dist le roy, par male destinee ay creu vostre conseil il a plus d’une annee. Par vous et vostre fait, c’est verité prouvee, a esté ma moulier murdrie et tuee. Que maldicte soit l’eure et la male jornee que je vous ay creü, ma loy en ay faussee. Car c’est par mon pechié, c’est bien chose averee, que je suis enchassié et ma terre gastee. De ma court vous banys, n’y faictes demeuree et gardéz que jamais en la vostre duree vous n’entréz en ma court ny en ma salle pavee.
[113v]
- Négociations de Daviot et Turquant à Sebille Issiéz de la cité, n’y faictes demeuree. » Ainsi les bany, c’est bien chose esprouvee et partirent de la coiement a celer. Mais par une aventure qui leur fu destinee, ilz furent encontré par une matinee d’un chevalier qui fu d’Angleterre la lee, qui s’en aloit fourrant en icelle contree : c’est Mahieu de Gournay qui bien fert de l’espee. Cellui trouva les Juïfz ou fons d’une valee qui devers Portiugal aloient la jornee.
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343 Quant Mahieu de Gournay, o la chiere hardie, trouva les deux Juïfz, trait l’espee fourbye. Turquant et Daviot eurent paour de leur vie, touz deux se sont renduz, chascun mercy lui crie. Dist Mahieu de Gournay : « Or ne me celéz mie estez vous Sarrazins ou de juÏserie ? – Sire, se dist Turquant, pour certain vous afye que nous sommes Juïfz de grant ancesserie. Le roy nous a bany par sa grant tricherie. Mais veilléz nous sauver, pour Dieu, je vous en prie. En convent vous arons, chascun le vous afye, que Sebille vous sera rendue et octroiee, et le vous livrerons ains qu’il soit nuytie. – Comment, se dist Mahieu, ne par quelle maistrie ? Se faire le pouéz, par Dieu le ilz Marie, je vous feray honneur et grant seignorie. »
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344 [114r]
« Sire, se dist Turquant, je vous diray comment vous auréz la cité a vostre commandement. Il y a des Juïfz assés et largement. Leur ville ont par eulx fermee fermement et une porte aussi par eulx proprement, et leur yssue aussi a leur commandement. 9365
q. nous Juïfz, sommessuscrit.
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- Episodes espagnols -
Et je iray aus Juïfz tenir mon parlement. Il y en a assez qui m’ont en convenant qu’ilz rendront la ville ain que sauvement y puissent demourer assez paisiblement. » Dist Mahieu de Gournay : « Il me plaist ensement. Lequel me demourra en plege plainement ? – Sire, dist Davïot, a vostre commandement. » Adont les deux Juïfz touz d’un consentement furent d’un actort et par leur serement de faire le marchié et tenir loiaument. Turquant it le message, s’i croiéz fermement. Mahieu enmena l’autre en l’ost isnellement. A Henry le mena et lui a dit comment il aura la cité assez prochainement. Et quant Henry l’oÿ, si se esjoÿ forment et a dit : « Sire, Dieu a qui le mons appent, se j’avoie Sebile a mon commandement, je auroie tout Espaigne avironneement. » 345
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Liéz fu le roy quant il oÿ compter qu’il auroit Sebile sans assault delivrer. Or diray de Turquant, comment il pot ouvrer. A la fausse posterne s’en vint sans arrester et choysi les Juïfz dessus les murs ester. Il leur a dit : « Segneurs, laisséz moi entrer. On m’appelle Turquant, je ne le quiers celer. Vous me cognoisséz bien, ne vous veilléz doubter. » Et ilz ont respondu : « Ce fait a creanter. » A celle raison que vous me oiéz compter alerent le guischet ouvrir et desfermer. Et Turquant y entra qui n’y volu arrester. Chascun le festÿa quant vint a l’avesprer. Les maistres de la loy ont fait Turquant mander et il y est venu, si les va saluer. « Seigneurs, se dist Turquant, je viens a vous parler. Vous avéz bien mestier de voz vies sauver,
- Trahison de la juive -
[114v]
car dam Pietres le roy vous fera tous iner et ardoir et brouÿr et aus fourches mener. Et ne larra Juïfz ou roiaume arrester pour ce que l’on a fait trop malement parler. Et si nous a bany sur les membres copper. Or prenéz bon conseil sans point d’arrester. » Et quant ilz ont oÿ, le sang leur va muer. « Turquant, dient Juïfz, or nous veilléz donner conseil, se il vous plaist, comment puissons ouvrer. – Par foy, se dist Turquant, je viens de procurer comment vous et voz biens porréz trés bien garder. Je viens du roy Henry pour vous parlamenter. Davïot ay laissé oustage demourer. Si au roy Henry vouléz la porte desfermer, ses gens fera par cy venir et arriver et dedens vostre fort les fera ousteler. Puis iront en la ville tout ardoir et tuer et si feront dam Pietres a martire livrer. » Et ilz ont respondu : « Ce fait a creanter. » La vont les grans Juïfz ceste chose jurer. Et le droit jour aussi l’alerent deviser : ce jour fu vendredi, sur le point de digner, pourtant que au semadi se voulent reposer. Par le jour du sabbat alerent ordonner que au dimanche devoient ceste besoigne ouvrer. Turquant s’en departi et le vint recorder a Mahieu de Gournay, qu’il sceu bien demander. Et lui dist tout le fait, que riens ne volu celer. Adont it les Juïfz touz deux au roy parler.
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346 Ainsi fu ceste chose bastie et ordonnee que les Juïfz devoient livrer une vespree leur place qui estoit suisament fermee. Une juïve avoit en icelle assemblee avec qui Pietres ot couchié une vespree, la plus belle juïfve qui oncques mais fu nee.
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- Episodes espagnols -
Roy Pietres l’amoit plus, c’est verité prouvee, que dame nulle au monde qui tant fust sa privee, et celle si l’amoit de toute sa pensee. Et quant elle entendi celle chose notee et que par les Juïfz devoit estre livree la partie ou elle est enclose et fermee, lors en fu en son cuer courroucee et iree. Et it tant celle nuyt que elle s’en fu alee hors de sa forteresse que nul ne lui desveé car souisant estoit en la loy de Judee. Vers le palays au roy a sa voye tournee. Quant le roy l’a choisi, doulcement lui agree. Tantost la it aler en sa chambre paree. Quant la juisve fu o le roy en celee, doulcement lui a dit et a basse alenee « Monseigneur, gardéz vous, vostre mort est juree. Les Juïfz ont leur ville a vostre frere actordee, a lui seront renduz dedens la terce jornee. » Quant le roy l’entendi, si ot la chiere esfraee. 347
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Quant dam Pietre le roy va la chose escoutant, a la juïsve a dit : « Aléz vous voir disant que les Juïfz iront leur ville delivrant a mon frere Henry et au baron Bertrant ? – Ouÿ, dist la juïsve, par la loy Dieu le grant. Pourtant suis je venue envers vous acourant. – Comment ? se dist le roy, ne le m’aléz celant. – Sire, dist la juïsve, Davïot et Turquant, que vous avéz bany de vostre court vaillant, ceulx sont en l’ost Henry, par tel convenant que Daviot reigne o Henry le puissant et Turquant est venu aus Juïfz faire tant qu’ilz livreront la ville du tout a son commant. Et d’autre part vous dy : aléz vous bien gardant, que les Crestiens si sont contre vous arrogant. De la cité en sont d’actort les plus puissant
[115r]
- Trahison de la juive -
[115v]
de recevoir Henry qui est vostre nuysant. » Et quant Pietres l’oÿ, si mua son semblant. La juïsve acola et lui dist en oyant : « Belle, .vc . merciz quant vous m’en dictes tant. » Son conseil a mandé qui vint a lui errant, et leur a dit : « Seigneurs, aléz vous apprestant et faictes charger tout ce que j’ay vaillent, car partir me vouldray devant souleil levant. » Et ilz ont respondu : « Tout a vostre commandement. » En icelle maniere que je voys recordant s’en departi dam Pietres et en lui departant prist congié aus bourgois et leur aloit priant que la ville gardassent sans estre delivrant. Et dist : « Seigneurs, barons, ne vous aléz doubtant. En Grenade m’en vois le païs avenant. et au roy de Grenade me iray si alïant. Et dedens Bel Marine je pense a faire tant que je auray un secours si fort et si puissant que touz mes ennemis en seront recreant. Pendre feray Henry qui de mal me fait tant, et Bretrant du Guesclin et tout le demourant. Et Arnoul d’Odrahan feray pendre devant et le Besgues ensuyvant, de Villaines tenant. » Et ilz ont respondu : « Vous aléz bien parlant. Or penséz d’exploitier et n’aléz arrestant. Au roy de Portuigal vous fault aler devant, a Lessebonne est, la vous fera garant.* – Je iray, dist dam Pietre, a Dieu vous commant. » Il a prins .xx. bourjois dont il s’aloit doubtant que la belle juïsve ot actusé devant. « Seigneurs, se dist le roy, ne m’aléz pas faillant : veilléz moy convoier, je vous prie et commant, car plus me fye en vous que en nul homme vivant. » Et ilz ont respondu : « Nous sommes voz servant. » 9495
et o lui d., o exponctué et en suscrit.
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corr. d’après Nh : et Lessebonne e.
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- Episodes espagnols -
Pour Pietres convoier se vont appareillant. Mais grant folye irent les bourjois dont je chant car Pietres les it pendre, n’ala gueres avant. 348
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Quant Pietres se party, la juïsve baisa et lie ot en convent que au revenir par deça que bien et grant honneur encores lie fera. Pietres s’en departy et elle demoura, en la juïfverie vistement repayra. Les Juïfz qui savoient que dam Pietres l’ama lui demanderent bien quant elle retourna que roy Pietres faisoit et elle leur compta comme a Lessebonne le roy Pietres ala. Dont puis vint le dimanche, le semadi passa, que l’on vint dire a Henry que roy Pietres s’en va. Et se fu verité, alé s’en fu pieça et vous diray qu’il it quant aux champs se trouva. Les .xx. bourjois it pendre, .i. seul n’en exchappa. Il estoit prés de nuyt quant penduz lé laissa. Quant ilz furent penduz, lors le temps se changa : telle brume it a celle heure droit la* ne savent ou ilz vont, deça ne dela ne voye ne chemin, homme nul n’avisa. Adont Pietres le roy durement s’esmaia. A Dieu et au deable cent foyz se commanda, ainsi que tout desvé il se demenoit la. « Sire, font les barons, pour Dieu qui tout crea, aiéz vostre cuer a Dieu et il vous aidera, et a la mere Dieu, elle vous secourra. – Je ne sçay, dist le roy qui me confortera. Je me tiens a cellui qui plus de puissance a, soit deable ou Dieu, l’un en veigne ça. » Adont vint .i. tonnerre qui tellement tonna que tout le plus hardy de paour trembla, mais dam Pietres le roy oncques ne s’en seigna.
[116r]
- Prise de Sebille par la Grande Compagnie -
285
349 Dam Pietre ot le cuer coroucé et dolant. Ses hommes lui disoient : « Sire, aléz vous seignant. – Taiséz vous, dist le roy, ne m’aléz plus parlant. Car je ne croy pas Dieu, ne le tiens a si puissant, que aider il me peüst jamais en mon vivant. J’ay bany de ma court Davïot et Turquant, les deux meilleurs amis et de conseil vaillant que eüsse en ma court, si en ay le cuer dolant ne je n’auray jamais mon cuer baut ne joyant. » Et le tonnerre va durement enforçant et faisoit si trés noir, se trouvons nous lisant, ne savent ou ilz vont, trop se vont esmaiant. Lors se va le roy Pietres a celle heure avisant que sa table d’or in feroit mectre devant, ou il ot escharboucle si noble et souisant. Lors it mectre la table sur une mule emblant. Quant elle fu ouverte, je vous jure et creant que par celle escharboucle qui valoit maint besant, voyent aussi cler comme une torche ardant. Ainssi toute nuyt jusques a l’aube esclairant s’en ala dam Pietres o ses gens cheminant. Il en avoit mestier car on l’aloit suyvant. Les bourjois de la ville qui estoient dolant que les bourjois estoient ainsi ou plait pendant, s’ilz eüssent tenuz Pietres le mescreant, ilz l’eüssent octis a loy de soudoyant. Lendemain au matin, comme j’ay dit devant, vindrent a la cité Davïot et Turquant et trouverent Juïfz a la porte devant. Par dedens la cité va la cloche sonnant. Sarrazins, Crestïens se vont appareillant, pour defendre Sebile aloient acourant, aus portes et aus tours s’en aloient courant. 350 Les bourjois de la ville se sont aus crenaux mis.
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- Episodes espagnols -
Mais a la fermeté que tenent les Juïfz s’en est venu Bertrant et les bourjois Henry, et Arnoul d’Odrahan, le mareschal gentilz. Et Mahieu de Gournay s’i c’est tout devant mis. Turquant et Davïot qui les curs ont faintis irent la porte illec ouvrir a leur devis. Les Juïfz y estoient de leur fait bien apris, car ilz ont les Crestïens gentisement recueillis. Prins ont la forteresse, ainsi comme vous devis. Et quant les Crestïens se sont veuz traïz, au fort des Juïfz vont et les ont assailliz. Si ont les Sarrazins de combatre entrepris. Crestïens et paiens se sont ensemble mis. 351
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Crestïens et paiens vont Juïfz assaillant. Mais les Juïfs avoient avec eulx Bertrant et le bon roy Henry et Arnoul d’Odrahan, de Villaines aussi le Besgues souisant, le bers Carenlouet, un escuier puissant, Huon de Caurelay qui le corps ot vaillent, et Mahieu de Gournay d’Engleterre la grant. Si fu Gaultier Huet qui le corps ot puissant, et le noble Bretrant, que point n’yray nommant. Crestïens et paiens vont moult fort assaillant. Et Bertrant du Guesclin va ses gens appellant : « Seigneurs, se dist Bertrant, par le mien escïent nous sommes trop de gens a ce lieu assaillent. Je louhe que la moitie s’en voye fors saillant et voysent assaillir a la porte devant en tant que si endroit les irons assaillant. Et quant ilz le saront, tost iront departant, car s’ilz entrent icy, peril y aura grant. » Et il ont respondu : « Vous aléz bien parlant. » Lors Bretrant du Guesclin en appelle Turquant et lui a dit : « Juïf, or tost venéz avant. 9600
corr. d’après P : cresprestiens et p.
[116v]
- Prise de Sebille par la Grande Compagnie -
[117r]
Vous savéz de la ville tout le convenant, car vous avéz esté et derriere et devant. Menéz de noz gens et aléz conduisant ou lieu ou l’assaut nous sera plus prouitant. » Et le juïf lui dist : « Je feray vostre commant. » Au lieu ou Sarrazins estoient habitans les mena le juïf tost et incontinent. Et Sarrazins estoient ferement combatant avecques les Crestiens, comme j’ay dit devant. Avec les Juïfz dont je vous voys parlant ala Gaultier Huet et Arnoul d’Odrehan, et Mahieu de Gournay qui a doubter it tant. Huon de Caurelay y ala chevauchant. Si fu Gaultier Huet, un escuier vaillant, avec Jehan de Brenes qui l’aloit conduisant, le Besgues de Villaines et d’autres vassaulz tant que bien furent .x. milles qui bien se vont apprestant d’assaillir a la porte par l’actort de Turquant. La ne trouverent riens qui les aille assaillent. Les bailles ont trenchees et les vont abatant. Les bourjois de Sebile vont ce fait regardant et vont a un conseil ensemble devisant, pour ce que le roy Pietres avoit fait par avant pendre de leurs bourjois .xx. en .i. arbre grant. Si alerent adviser touz les plus souisant qu’ilz rendront la ville a Henry le vaillent. Adont se sont retrait et vont l’assault laissant. Et vont au roy Henry isnellement mandant qu’ilz rendront les clefz du tout a son commant. Adont les Espaignolz se vont touz octroiant le palais rendront et la ville plaisant. Et ilz eurent en convent par la bonté de Bertrant qu’ilz ne feroient mal a femme ny a enfant. A Henry ont fait hommage petis et grant. La furent les Juïfz, ainsi comme devant, et sauvé de la mort, ainsi comme je vous chant. Le roy Henry retint Davïot et Turquant : touz maistres furent des Juïfz a leur commant.
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- Episodes espagnols -
En Sebile logerent et furent demourant. La prindrent les barons actort incontinent auquel lieu ilz iront pour Pietre le tirant qui devers Lessebonne s’en aloit chevauchant : le roy de Portiugal aloit la sejornant. 352
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A Lessebonne fu le roy et ses barons. Et Pietres vint a lui a force et a bandon, venu est ou palais ou de gens ot foison. Ou palais a trouvé le riche roy Fagon, de Dieu le salua et it aliction. Le roy s’ala lever, mist main au chapperon : son droit sire estoit d’aucune regïon. « Ha, Roy de Portiugal, se dist le roy Pieron, faussement suis mené par dedens mon royon par le bastart mon frere, le traïtreur larron. Ne me lerra durer en ville ny en donjon. Il a Burs conquestee, la cité de renon, et Toulecte ensement et Cordonne environ. Sebile s’est rendue au traïtreur quoistron. Or vous pri, gentilz roy, pour Dieu, par son nom, qui moru en la croiz pour nostre redempcïon et qui ressucita et it Ascencïon, que me veilléz aider encontre ce larron et Bertrant du Guesclin qui ait maleïsson, et la chevalerie dont il y a foison. Ja avons nous esté amis et compaignons et guerroié Grenade, Pharise et Rubïon. »* Quant le roy l’entendi, se dreça le menton et lui dist : « Gentilz roy, je entens bien vostre raison. Je vous respondray selon mon entencïon. » 353
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Le roy de Portiugal respondi haultement : « Roy d’Espaigne, dist il, je vous jure loialment je suis un petit roy, on le scet clerement,
[117v]
- Pietres à Lessebonne -
[118r]
j’ay un petit royaume en mon gouvernement. Je n’ay mie mestier d’avoir guerriement ne de faire mourir ne exillier ma gent. Henry ne les Françoys qui sont a son talent si ne m’ont riens mesfait .i. denier seulement. Se vous avéz perdu, je en ay le cuer dolant. Voz hommes vous heent avironneement : sires qui est haÿ en la in s’en reppent. Ne sçay pour quoy vous ont haÿ tellement. Je ne vous puis aider, par le mien serement, mes de tant vous feray trés amiablement se demourer vouléz avec moy doulcement. Jamais ne vous fauldray, par le Dieu qui ne ment, que n’aiéz vostre estat bien et suisament. Et seréz avec moy demourant vrayment ainsi qu’il vous playra, ne vous fauldra noyent, mais en tant que de guerre, je n’en ay nul talent. Mais tout ce que j’ay dit vous feray leement, villes chasteaux auréz a vostre gouvernement. « Ha Dieu, se dist le roy, il me va malement. Or n’ay en tout le monde ami ne parent. Qu’est ce de fortune, quant au torner se prent. Cellui n’est sages qui se ie forment. »
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354 Dam Pietres fu dolans quant il oÿ parler le roy de Portiugal qui le volu refuser ny aider ne lui vouloit pour sa guerre mener. Dist dam Pietres le roy : « Ou pourray je aler, la ou je peüsse mais de secours recouvrer ? Je iray Dieu renoier ainçois oultre la mer que je laisse ensement mon roiaume gaster. Se je m’en voys en France au roy Charles parler et devenir son homme et hommage jurer, il ne me aydera ja, je le sçay bien au cler, pourtant c’on lui a dit et volu afermer que j’ay fait ma moullier de ce siecle iner.
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- Episodes espagnols -
Je l’ay trop courroucé, ne me pourroit amer. Si sont aussi ses gens qui me venent grever et qui ont fait Henry droit a Burs couronner. Si en Engleterre voys, je ne puis meulx aler, car le roy Edouart si fait moult a louher et si se vouldroit bien, se croy je, pour moy mesler pour avoir alïence pour France destourbier. Combien qu’ilz aient paix, j’ay bien oÿ compter qu’ilz ont haÿne entre eulx qui ne pourra iner, quar encores verra on guerre renouveller. » Le roy de Portiugal lui dist sans demeurer : « Roy d’Espaigne, dist il, conseil vous veil donner. D’aler en Engleterre ne vous convient mesler, mais aléz a Bourdeaux au prince recorder. C’est le prince de monde qui plus fait a louer et le plus orgueilleux de quoy on puisse parler. Si cellui vous veult aider et secours amener, vostre roiaume verréz tout a vous retourner. » 355
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Dist cellui de Portiugal : « Je vous veil conseiller que en Guienne ailléz, le bon païs plenier, et au prince de Galles vous veilléz allïer et lui veilléz beaux dons donner et octroier. Je lui donneroie d’Espaigne ainsois .i. quartier, ou toute la moitie lui en feroie bailler ainçois que ne feïsse ceste honte vengier. Le prince est si grant et si ier chevalier qu’il ne doubte nul homme, duc, conte ne princer, roy ne empereur ou il puisse chevaucher. Je vous ay en convent, sur Dieu le droiturer, se je avoie vostre fait et le vostre encombrier, au prince de Galoys m’en iroie acointer. De devenir son homme auroie desirier, car en tout le monde n’y a prince se ier ne si trés bien taillé de la terre gaigner. La bonté ne la ierté ne scet on esprouver. »
[118v]
- Pietres à Lessebonne Se dist le roy dam Pietre : « Foy que on doy saint Richer, je croiray vostre conseil, bien m’y veil apaier. »
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356 Dist dam Pietre le roy qui la chiere ot iree : « Véz cy riche conseil, bien me plaist et agree. A Bourdeaux m’en iray, la cité bien fermee, ou dedens Angoulesme, celle ville honnouree. Le prince trouveray en icelle contree. De lui m’acointeray, par telle destinee que pour l’amour de moy amenera telle armee que Henry le bastart n’aura nulle duree, ne Bertrant du Guesclin qui tant ot de ponee, cellui de Caurelay, Huon brasse quarree, ne Arnoul d’Odrehan qui ait de male jornee. Et Mahieu de Gournay aura la teste oustee, et le Besgues aussi, ou tant a de ponee, qui de Villaines a surnon en sa duree.* Assez m’ont fait d’ennuy et tolu ma contree. Mal sont icy venuz en ma contree lee pour moy guerroier, c’est folie prouvee. » Le roy de Portiugal n’y a fait demouree : roy Pietre it seoir a sa table litee. Et a guise de roy fu servi la jornee, mais ne pouoit mangier, ne riens ne lui agree tant estoit courroucié en cuer et en pensee. Puis fu dedens la mer une nef apprestee pour aler a Bourdeaux, richement ordonnee. Quant preste fu la nef, le roy y it entree. Vingt et cinq chevaliers mena en son armee et .i. escuiers d’Espaigne l’onnouree, sans les autres Juïfz ou s’amour ot donnee. Porter it en la nef tout a sa devisee aus vaillans chevaliers de Guienne la lee moult nobles joyaux pour faire la donnee. Et la table d’or in y fu aussi posee, 9781
f. dune demouree, dune cancellé.
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- Episodes espagnols -
qui au prince de Gales fu depuis presentee, ainsi comme vous orréz s’il vous plaist et agrée. Or commaince chanson qui doit estre louhee, faicte de vérité, n’est pas adevinee. De roy Pietres layray, feray retornee a Bertrant du Guesclin, a qui son ame soit sauvee, le meilleur chevalier qui oncques portast espee pour sa chevalerie qui fu bien esprouvee. Lui fu aprés sa mort une grace donnee qui a tousjours pourra bien estre renomee, car avec les .ix. preux est sa grace nombree : le dixieme appelle par sentence donnee. 357
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Seigneurs, or entendéz, pour Dieu de paradis. A Sebile la grant estoit le roy Henry, et Bertrant du Guesclin qui bien fu son ami, et le bon mareschal d’Odrahan le eslis, de Villaines aussi le Besgues seignoris, Huon de Caurelay qui moult estoit hardy, le sires de Beaugien qui bien estoit hardy, et Mahieu de Gournay qui ne fu pas fainty, et d’autres chevalier et escuiers faytis. La furent a sejour et prenoient advis comment se maintiendront en cellui païs. Le roy Henry parla, qu’il fu bien oÿ : « Seigneurs, se dist Henry, or est mon ennemy aléz a Lessebonne, j’en suis certain et is. Je ne sçay vrayment s’il y aura amis au roy de Portiugal qui tant est seignoris. S’il le vouloit aider, il auroit trop mespris. Voulenters le sauroie, pour certain le vous dy. » Dist Bertrant du Guesclin : « Foy que je doys saint Denis, il le nous fault savoir sans estre departis pour savoir s’il vouldra estre vostre ennemy. S’il le veult soustenir et l’aye avec lui mis, en Portiugal irons ensemble par avis
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- Mahieu de Gournay à Lessebonne -
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et lui gasterons sa terre et son païs qui en lui demourra vaillant .i. parysy. Du royaume serons roy et suppellatifz. Puis irons en Grenade sur paiens maleïs et dedens Bel Marine dessus les Turs mauldiz, et en Jherusalem, ou Dieu fu mort et vifz. Tout ce que Godefroy de Billon le hardy conquesta en son temps sera par moy repris, s’il avient que Dieu veille que je ne soie pris, navré ou afolé ou en bataille octis. Ainsi l’ay en pensé et tiendray mon advis, mais que le roy de France, a qui je suis subgit, n’ait la guerre aus Englois. Je en seroie marry, car trop plus volunters je me seroie pris dessus les Sarrazins pour leur faire despit que sur les Crestïens, ce seroit mon prouit. »
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358 Dist Bretrant du Guesclin : « Il nous convient viser pourquoy on puisse savoir de certain et au cler au roy de Portiugal qui bien fait a doubter, s’il veult Pietres le roy aider et conforter. » Lors Mahieu de Gournay commainça a parler et dist au roy Henry et a Bertrant le ber : « Beaux seigneurs, je vous pri sans point de contrester que me donne congié, pourquoy je puisse aler a Lessebonne droit qui siet sur la mer, au roy de Portiugal, moult le doys desirer. Car volunters iroie la ville regarder et l’estat de ce roy iroie visiter. Du roy Pietres saray ainçois mon retourner. Puisque je vous en prie, ne devéz refuser. » Et ilz ont respondu : « Penséz de vous haster. » Lors Mahieu de Gournay it ses gens apprester, lui .xe . s’en va, plus ni volu gens mener. Ne sçay c’on vous voussist longuement demener. A Lessebonne vint un jour avant digner,
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- Episodes espagnols -
a son hostel ala, si se it parer, a loy de chevalier vestir et couroner. Son houste appella et lui dist ault et cler : « Est le roy ou palais, lui pourray je trouver ? Roy dam Pietre d’Espaigne, en saroiéz vous parler ? – Ouÿ, se dist l’ouste et verité compter. Le roy Pietre s’en va parmy la haulte mer et s’en va a Bourdeaux, ce sachiéz sans doubter, pour le prince de Gales s’en va parlementer. Et s’il puet cestui prince par deça amener, il a bien esperance de Henry fort grever et tout son roiaume ravoir et poctesser. » Dist Mahieu de Gournay : « Je puis bien afïer que si le prince veult et se veille ordonner, que bien pourra avoir Espaigne a conquester. Mais ja ne plaise Dieu qui tout volu estorer, que le prince de Gales se veille ja mesler, car il me conviendroit avec lui retorner, et mains bons chevaliers qui moult font a priser. Huon de Caurelay ne pourroit demourer, ne touz les Englois qui tant font a doubter, qui le roy Henry ont aidé a couronner. » 359
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L’ouste qui oÿ parler le chevalier lui a dit : « Monseigneur, veilléz vous avancer. Le roy de Portiugal ira tost manger. Noble feste verréz faire et commaincer. Car il y aura feste qui sera a priser d’unes nopces qui sont, je vous di sans cuider, d’un noble chevalier, que le roy a moult chier. Et la dame puissant qu’il prent a mouiller est cousine de roy, si qu’il fait essaucier la feste tellement que sans riens esparigner. Et demain verréz vous jouster et tournoier. » Dist Mahieu de Gournay : « Je m’y veil assaier. » Vers le palais s’en va a loy d’omme guerrier.
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- Noces et tournoi à la cour du Portiugal -
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Moult noblement se it vestir bien et chaussier, de la jusques au palais ne s’i volu arrester. La trouva belle feste et estat bien plenier. Menestriers du païs faisoient leur mestier. Quant ou palais entra, trouva .i. escuier qui bien cogneu Mahieu, le noble chevalier : avec lui avoit esté droit a Poittiers quant la bataille y fu qui it a redoubter. A cellui temps estoit au prince soudoier. Quant il parceu l’Englois, il le va enbracier. Et Mahieu le cogneu, tantost l’ala baiser. « Sire, dist l’escuier, je vous iray noncier au roy de Portiugal et de vous enseigner. Grant honneur vous fera et vous ara bien chier. » Lors vint devant le roy et se prinst a agenoiller : « Sire, dist l’escuier, se Dieu me puet aider, véz cy .i. chevalier qui moult fait a priser. Il est né d’Engleterre, le trés noble heritier, homme au prince de Gales, que l’on doit auttoriser pour le plus prince qui monte sur destrier. Il est venu a vous parler et desrainier. Faictes lui bonne chiere, bien fait a festïer. » Le roy de Portuigal it a lui envoier touz ses maistres d’outel ou il se volu ier. Ceulx vindrent a l’Englois, bien le vont festïer.
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360 Le roy de Portiugal fu en sa chambre assis. En estant se leva quant il ot les motz oÿs. Et Mahieu de Gournay s’est a .i. genoil mis et salua le roy comme homme bien apris. Le roy le releva et par la main l’a pris. « Bien veignéz vous, dist il, en nostre païs. Et de corps et d’avoir suys le vostre amis. Que font dela Bertrant, le Besgues et Henry, et Arnoul d’Odrahan, le chevalier gentilz, et touz les chevaliers puissans et de grant pris ?
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- Episodes espagnols -
Vous avéz bien trouvé Espaigne bon païs, Bertrant du Guesclin le fait a son devis. Se ce fust sur le droit, vous avéz bien conquis. Mais selon verité et selon mon advis, a tort est le roy Pietres ainsi deconis. – Non est, sire, dist il, bien en avons apris. Le roy Pietres d’Espaigne si vault pis que un juïf, et vous le savéz bien, selon mon advis. Et pourtant suis je cy par devers vous tramis du roy Henry d’Espaigne et de touz ses subgiz, que vous me veilléz dire et vous seréz oÿ si Pietre est par vous tensé ne garenti et que vous lui veilléz bien et a touz ses subgiz, conforter ny aider en fait ny en diz. Car si savoir pouons qu’il soit vostre ami, tost seroie de vous sevré et departi. » Et le roy lui a dit : « Chevalier seignoris. Chevalier, dist le roy, j’en dois estre esconduit, car je lui ay bien dit voiant touz mes marchys que pour lui ne seray en nulle guerre mis, ne ne m’en mesleray tant que je soie vif. » Dist Mahieu de Gournay : « Vous n’en auréz ja pis. » Ainsi fu le conseil bien acordé et pris. Le roy fu a la table honnouré et servi. Cellui Mahieu de Gournay fu a sa table assis, point ne faut demander s’il fu bien servi. 361
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Seigneurs, a cellui jour que je vous voys comptant ot grant feste ou palais, bel se vont deduisant. Menestriers s’i esbatent bien et vont joye menant, par devant l’espousee menent joye grant. Et Mahieu de Gournay les va bien escoutant. Au roy de Portiugal a dit en sourriant : « Les nostre menestriers en nostre païs avant, en France, en Engleterre ne sont pas si joiant. » Et le roy lui a dit tost et incontinent :
[121r]
- Noces et tournoi à la cour du Portiugal « Deux menestriers avons qui sont en nostre commant. Il n’en y a nulz telz jusques en Orïant. Le roy de Bel Marine me va bien souvent mandant que envoier les lui veille, mais c’est pour neant : ne m’en delivreroie pour nulle riens vivant. » Adont les it mander, qu’il n’y va arrestant. Et ilz sont venuz par tel convenant que Mahieu de Gournay, dont je vous voys parlant, ne vit oncques si nobles devant roy apparant. Et si avoit chascun d’eulx aprés lui .i. sergent qui une cyphonie va a son col portant. Et les .ii. menestriers se vont appareillant, devant le roy s’en vont touz deux chinfoniant. Quant Mahieu de Gournay les va apparcevant et les cimphonïeurs a ouÿ priser tant, a son cuer s’en aloit moult durement gabant. Et le roy lui a dit aprés le jeu laissant : « Que vous semble ? dist il. Sont ilz bien souisant ? » Dist Mahieu de Gournay : « Ne vous iray celant. Dedens ou païs de France et ou païs normant ne vont telz instrument fors que adveugles portant. Ainsi font les adveugles et les pouvres truant de ce fait d’instrument les bourjois entonnant. On l’appelle dela un instrument truant. » Et quant le roy l’oÿ, si ot le cuer dolant. Il jura Jhesucrist, le pere tout puissant, qu’ilz ne le serviront jamais en leur vivant.
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362 Le roy de Portiugal qui moult se courrouça, aus .ii. cimphonïeurs adont congié donna. Moult fu grant la feste et tout le jour dura. Et lendemain matin chascun s’appareilla pour joustes commaincer, le roy les ordonna. Chevaliers, escuiers, chacun armer s’en va. Le roy de Portiugal les Anglois appella : 9971
corr. d’après P : q. sont en vostre c.
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- Episodes espagnols -
« Chevaliers, dist le roy, j’ay oÿ dire pieça que de trés bon jousteurs en vostre païs a et que moult souvent dient ces Englois par dela que de chevalerie nul homme ne sera s’il n’a en Engleterre esté ou s’il n’y va. Voulenters je verroie, par Dieu qui tout forma, comment Englois le font, car long temps dit on a que ce sont bonnes gens la ou nul pouoir n’a et que on les doubte moult, ne sçay comment il va. Mais entre vous Englois nul homs ne vous passa, de la guerre mener nul homs ne vous greva. Je ne sçay point, par Dieu qui vous donna le heur ne la fortune, ne qui le devina. Moult de maulx avéz fait en France par dela. Je ne sçay se Merlin le vous prophetiza, mais vostre nacïon, depuis que on baptiza par dedens Engleterre ou saint Thomas prescha, avéz assez regné contre ce qu’il monstra. Et toujours en bataille le meilleur vous viendra. » Et quant Mahieu l’oÿ, tout le sang lui mua. 363
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Quant Mahieu oÿ le roy qui des Englois parloit, si lui a respondu adonc qu’il ne savoit chevalier si vaillent ou il ne jousteroit. Et se vanta adont que en France esté avoit contre le roy Philippe quant il se combatoit, et a terre et en mer et a Poictiers tout droit ; du roy Jhean fu prins qui Philippe engendré avoit, et que oncques abatu esté nul jour n’avoit. Et quant le roy l’oÿ, duremant le prisoit et par dedens son cuer a hardi le tenoit. Si dist au chevalier que voluntiers verroit les faiz d’armes de lui qui en jouxte apartenoit. Et ordonna .i. priz et a dit qu’il tiendroit une mule vaillent qui bien .c. mars vailloit parmi les ordonnances que la mule auroit,
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- Joute contre Labaire de la selle d’iveure qui par dessus estoit et d’un chanfrain a or, le plus bel qu’il pourroit. Et quant Mahieu l’oÿ, joians en devenoit. Au roy de Portiugal moult bon gré en savoit. Lors it le roy mener la mule la endroit. Par devant le palais belle place y avoit. Les dames et les pucelles tost on y amenoit ou plus noble abit que dire on pourroit.
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Par devant Lissebonne fu la feste essaucie pour l’amour de l’Engloys qui ensement s’aie vers les Portiugaloiz de monstrer sa maistrie. La place je vous dy avoit esté bastie pour le mariement qui fu de grant lignie. N’y ot femme a chevalier, femme de grant lignie qu’il ne fust a ce jour semblablement vestie que dame pourroit estre en France la garnie. Cinq cens dames y ot en celle compaignie, dessus les bans seans ou en chambre jolye ou dedens le palais qui reluist et lambie. La vienent chevaliers a baniere drecie. Cellui jour ne jousta fors chevalerie. Le roy estoit assis avec sa baronie pour la jouste veoir de chascune partie. La jouxte commainça aprés l’aube esclairie, droit a souleil levant pour le chault qui agrie car le païs est chault, nature s’i octroie. La jouste commainça qui moult fu eforcie ; .Lx. chevaliers, touz de haulte lignie, estoient apprestéz touz a une fye ; a deux paires de rens fu faictes et establie.
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365 Telle fu celle feste et iere l’assemblee. La ot a cellui jour mainte lance brisee,
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- Episodes espagnols -
mains escuz derompuz par la boucle noee, de maintes testes aussi la visere oustee, et mains chevaulx cheüz souvent goule baee. Mais l’istoire dit, dont je foys devisee, que Mahieu de Gournay, d’Engleterre la lee, fu si bon chevalier a icelle jornee qu’il ne jouxta nul cop bien .xx. de randonnee que maistre et cheval n’abatist en la pree. Le roy de Portiugal ot la chiere iree. « A, Dieu, dist il, Virge honnouree, s’en ira cellui Englois ainsi de ma contree. Or se vantera il dela la mer salee que les Portiugalois ne valent chose nee. » Et l’Anglois avoit si trés grant honnouree que tout l’onneur lui estoit presentee. Le roy de Portiugal avoit en celle annee un Berton avec lui de grande renommee. Labaire avoit nom, c’est verité prouvee, en Bertaigne et ailleurs et en mainte contree. « Auroiez tu la char si hardie et ousee d’aler jouster a lui ? Or me di s’il t’agree. » Et Labarre respont : « Par la virge honnouree, s’il me devoit octire d’une lance ailee, je iray jouster a lui, s’il vous plaist et agree. » – Ouÿ, se dist le roy, par la virge honnouree. » Adont le it armer d’armeüre ordonnee et monter a cheval, lance lui fu livree. Il s’en va sur les rens, armé, teste levee. 366
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Le Berton s’en parti qui sur les rens ala. Il a veü l’Englois qui estoit par dela, qui .xii. chevaliers a ce jour renversa. Quant Labarre choisi qui si bien s’afaita, je vous dy que l’Engloys a cellui jour cuida qu’il fust Portiugaloiz, pour tel on lui bailla. 10072
corr. d’après P : mais escuz d.
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- Joute contre Labaire Mais il estoit breton, le roy lui envoia pour .i. Portugalois, pour tel on lui livra. Labarre vit l’Englois qui tel ourgueil mena, force et hardement prinst et haïr l’enlemba. En lui mesmes dist que force mectra de vivre ou de mourir ou honneur conquerra. Vers l’englois chevalier le bon cheval brocha, et l’Englois vers lui qui bien se cointoya. Chascun lance sur feustre es estriers s’aicha et l’escu de son coul estraint et acola. Labarre de Bertaigne si trés bien l’avisa, qui parmy le heaume la lance lui icha. Par la visiere adont tellement l’avisa qu’au debout de l’acier de son chief lui ousta et de corps et de pis tellement l’encontra que lui et son cheval a terre tresbucha. Par tel convenant a terre gicté l’a que tout fu estonné et un braf lui brisa. Tellement est cheü qu’il n’oÿ ne parla ny ne sceu ou il fu, d’angoisse se pasma. Et quant le roy le sceu, si grant joye mena que ses paulmes batoit, de joye larmoya. « Ores s’en aille, dist le roy, l’Anglois par dela. Je lui donne la mule, car bien deservi l’a. »
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Le chevalier engloiz qui fu en pameson, quant il revint a lui, il n’ot se douleur non. On lui banda le braf et lya environ. Et les Portiugalois, dont il y ot foyson, l’ont mené ou palais en grant aliction. « Seigneurs, dist l’Englois, j’en ay bien ma parçon. Oncques mais ne receu si grant horion. Cellui qui m’assena n’a pas cuer de bricon, oncques en mon vivant je ne trouvay si bon. » Le roy de Portiugal lui a dit a hault son : « Chevalier, dictes moy, n’en faictes celoison :
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- Episodes espagnols -
sont bons les chevaliers de nostre nacïon ? – Sire, dist l’Englois, foy que doys saint Symon, de vous me doys loer, j’en porteray beau don. » Le roy lui it donner pour un bon champïon la mule qui estoit en jolie façon. A l’issir de la ville, que congié lui it on, lui dist un escuier coiement a bas son comment en avoit afaire a .i. Berton que l’on appelle Labarre en celle regïon. Quant l’Engloys le sceu, si en ot grant marrisson. Et puis manda le roy, que l’on appeloit Oton, que vers lui avoit fait mortelle traÿson quant livré lui avoit pour berger .i. faucon. A tout son braf lié s’en revint le frans homs tout droit a Sebile, la ou sont les barons. Devant le roy Henry est venu a bandon. De lui orent merveilles les princes d’environ. Si lui ont demandé les chevaliers de nom ou il estoit cheü de son destrier gascon. Et il leur a compté toute la façon. Quant Bretrant a oÿ recorder du Breton que ainsi l’avoit paié, forment lui vint a bon. Se dist le roy Henry : « Ou est dam Pieron ? – Sire, dist l’Englois, bien en sçay la façon, car le roy le m’a dit dedens sa nacïon. » 368
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« Seigneurs, dist l’Anglois, dam Pietre soit maldit car par lui suis ainsi de mon braf entrepris. Il s’en va par la mer aus vens et es esclis, et s’en va a Bourdeaux, le traïteur failly, vers le prince de Gales qui tant est poesty. Et fera tant s’il puet, pour certain le vous dy, que le prince amenra par dedens ce païs. Or aiéz sur ce fait conseil et bon advis, car si le prince vient en son noble arrois mis, je me doubte forment que vous aréz du pis,
- Joute contre Labaire -
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car s’il vient cy aval, j’en suis certain et fys, qu’il viendra si fort et de gens bien garnys que je me doubte bien que ne soiéz honny. » Se dist le roy Henry : « Je le voldroie envis. Ja il ne place Dieu, le roy de paradis, que le roy en puisse prendre conseil ne advis. » Dist Hue de Caurelay : « Vous estez mon amy. Mais de tant vous di bien et de tant l’ay apris que si le prince vient, a qui je suis subgict, il convient que de vous me soie departiz, car mon droit sires est le prince seignoris : contre lui ne seray armé ne fervesty. » Si dist Gaultier Huet : « Ainsi lui ay promis. » Se dist Jehan de Brenes : « Je suis en ses escripz. » Dient les Englois touz : « Nous sommes touz amis. » Se dist le roy Henry « Frans chevaliers gentilz, vous le m’avéz bien dit il a des mois bien six. Mais demouréz o moy, pour Dieu de paradis, tant que on sara comme le plait sera bastys. » Et ilz ont respondu : « Tout a vostre devis. Avec vous demourrons et en cestui pourpris jusques a tant que l’on saura si seréz assailli. » Sur ce point sont demouréz, se nous dit l’escript. Et le roy les mena dessus ses ennemis conquerre les chasteaux, que trouverent garnis.
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369 En ce temps droit que vous oÿ avéz, que le barnage fu la endroit demouré pour savoir se le prince se seroit actordé a dam Pietre le roy qui la estoit alé, en icelle saison que vous oÿ avéz avoit en ce païs des chasteaux bien ferméz dont paiens et Juïfz en gardoient les clefz. Le trezor qu’ilz avoient leur fu abandonné a touz ceulx de par qui il seroit conquesté. La aloient des noz pluseurs bien ordonnéz.
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- Episodes espagnols -
Mais a Sebile fu le roy Henry demouré, et Bertrant du Guesclin qui lui fu moult privé, et le bon mareschal d’Odrehan le doubté. Le Besgues de Vilaines n’y fu pas oublié, le ber Carenlouet, l’escuier senné, Huon de Caurelay, un chevalier doubté, la responce actendant de ce que oÿ avéz. Mais a ce temps advint, se dit l’auctorité, une grande merveilles, laquelle vous orréz, oncques telle ne oÿstez puis que fustes néz. Bel fu le miracle, se dit l’auctorité. Ce fu de deux Juïfz que vous ay nommé, Turquant et Davïot, .ii. Juïfz forsenéz. Avec les Juïfz les avoit on livré, qui furent la par treü demouréz ces .ii. Juïfz ycy, par leur desloiautéz, que le roy Henry ot aus Juïfz commandéz pour recevoir les rentes et les treux ordonnéz. Mais ces .ii. Juïfz, cy faulx traitres prouvéz, avoient les Juïfz autres suppeditéz. Si leur en mescheÿ, ainsi comme vous orréz. 370
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Seigneurs, par Daviot et cellui Turquant estoient les Juïfz si fort a leur commant qu’ilz prenoient du leur de tout leur vaillent plus que on ne leur aloit de Henry demandant. Sur les Juïfz aloient grandement demandant, tant qu’ilz furent haÿz et que l’on fu recordant que ces felons Juïfz, dont je vous voys parlant, au temps que servi eurent roy Pietres par avant avoient fait mourir la roÿne plaisant et estaindre en sa chambre a loy de soudoiant. Touz les autres Juïfz les furent accusant et s’i en irent partie ainsi comme en tesmoignant. Et quant Henry le sceu, si les manda errant. Quant ilz furent venuz, si leur dist en oyant :
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- Combat entre Daviot et Turquant « Seigneurs, larrons, dist il, ne savoie noient que vous eüsséz fait ma dame au corps vaillant mourir et fait estaindre dedens son lit couchant. Ardoir vous en feray en un feu maintenant. Dictes moy verité et ne m’aléz celant. – Sires, dist Davïot, demandéz a Turquant, car il it tout le fait et le murdre puant. Il est bien verité, ja ne l’iray celant. Pietres m’y envoia et si m’en it sergent. Jusques a la chambre alay et n’alay plus avant. Et bien lui dys adonc qu’il s’alast advisant et qu’il vauldroit trop mieulx qu’il s’en alast fuyant. Je l’en priay adonc .c. foys en un tenant. » Et quant Turquant l’oÿ, si sailly en estant et lui dist : « Sire, roy, je voys bien apparant qu’il me convient morir ; ne m’aléz gignant car sans faire distresse je diray en oyant tost ce qu’il en advint, tost et incontinent.»
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« Sire, se dist Turquant, ne vous celeray mie. Par le Dieu que je croy qui tout a en baillie, moy et Davïot sommes touz d’une confrarie et a esté par nous la dame murdrie, et cincq autres Juïfz qui cy droit ne sont mie. – Turquant, dist Davïot, vous parléz de folie. Oncques je n’y entray en la chambre garnie. Et le vous defendi et dis plus d’une ie que la franche roÿne estoit a tort jugié et que Pietres le roy en auroit vilonnie, car la dame venoit de trés noble lignie. – A, Larron, dist Turquant, que tu sçays de voydie. » La furent longuement en celle plaidoierie. Dist Bertrant du Guesclin : « Je vous acertiie que le vray en sarons ains l’eure de complie. Par la foy que je doys a la virge Marie, s’il plaist au roy Henry et a la baronnie,
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- Episodes espagnols -
de vous deux en sera bataille commaincee. » Se dist le roy Henry :« Et je le vous octroie, car par bataille en sera la verité oÿe. » La fu des deux Juïfz la bataille jugie et la jornee propre sans faire departie. 372
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Ainsi fu des Juïfz ordonné le droit champ. La bataille juga le bon vassal Bertrant, qui estoit esveillé et liéz et joyant qui les veoit touz deux combatre sur les champs. Les chevaliers monterent sur chevaux courans. Le bon Henry y fu et le mareschal franc Huon de Caurelay qui moult estoit puissant, des bourjois de la ville touz les plus vaillans. Aus creneaux et aus portes fu le peuple montans, pour veoir les Juïfz y vont petis et grans. Grande fu l’assemblee au temps que je vous champ. Les chevaliers ont prins les Juïfz mescreans. Chascun estoit vestu d’auquetons bien pesans, et chascun une coife qui estoit bien puissant et si avoient coustelles qui bien estoient trenchans, et bon escu au col qui fu large et poisant, chascun un gravelot fu en sa main tenant. Bertrans du Guesclin les estoit ordonnans et disoit a Turquant qui estoit fort et grant : « Or pense de bien faire, ne soiez doubtans.* Se l’autre juïf est par toy recreans, grace te empetreray, ne t’en soiez fuyans, car Davïot estoit de si hideux semblant qu’il sembloit assez mieulx murdrier que marchant. » 373 Quant les deux Juïfz furent sur les champs ordonnéz, 10304
f. et puis grant, puis cancellé.
10304
corr. d’après P : q. estoit fu et g.
[125r]
- Combat entre Daviot et Turquant on leur a fait un parc part environ de touz léz des chevaux ou noz gens estoient bien montéz, et devant les chevaux avoit .i. grant foussé. Dist Bertrant du Guesclin : « Vous estez bien arméz. Aléz ferir ensemble, ne soiéz depportéz. » Lors se sont eslongiéz les Juïfz forsenéz, Davïot et Turquant ferement regardéz. Il tient son gavelot trenchant et ailé et Turquant tient le sien dedens son poign fermé et tenoit a son col son escu acolé. Puis sont venuz ensemble par si grande ierté qui parmy les escuz sont les deux fers passé. Chascun lança .ii. cops ains que fussent iné. Puis traient les coustelles par vive poesté. Amont parmy le chief en ont grant cop orné, des coustelles se sont mains cops entredonné. Turquant gicta un cop fort et desmesuré tant qu’il a Davïot sur les brafz assené l’auqueton lui perça si l’a ou brafz navré et le sang en sailla aval dessus le pié. Turquant dist : « Davïot, je vous ay bien tasté Traïtre desloial, comment te es tu parjuré, que tu as juré Dieu, ou nous sommes fondé, le grant Dieu qui fait croistre le vin et le blé et qui bailla la loy Moÿse le sené. Il te doit mescheoir quant tu l’as parjuré. – Tay toy, dist Davïot, fel traïtre prouvé. Tu tuas la roÿne par ta desloiauté. » Adonc a son escu contre terre gicté et Turquant a le sien tout en l’eure ousté. Puis ierent des coustelles par telle volunté qu’il n’y avoit cellui qui n’ot ensanglanté le visage forment et de sang arousé. Puis se sont mis a la luyte a loy de forsené. Dist le roy a Bertrant et a l’autre barné « Véz la fors champïons, ilz se sont bien porté. » 10311
deb on leur a, deb cancellé.
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Si comme les .ii. Juïfz s’aloient combatant et a deux brafz aussi l’un a l’autre luytant, advint que Davïot si gicta jus Turquant. Or escoutéz pour Dieu le roy amant, une grande merveille, oncques ne oÿstez si grant. En tant que les Juïfz estoient sur les champs et que aus brafs qui sont fors s’aloient travaillant, s’en vint une nuee droit ou ciel apparant, reluisant aussi cler que le souleil luisant. Il n’y ot si hardy qui ne s’alast esmaiant. Lors y vint .i. tonnerre et une fouldre si grant, qui sur les deux Juïfz va du ciel descendant, que aussi bien que le feu va la busche alumant furent espris et ars les faulx Juïfz tirant et ne i nul meschief a tout le remanant. La furent si espris de tonnerre bruyant c’on ne y trouva nulz oux que tout ne fu ardant. Il n’y ot si hardy qui ne s’en alast fuyant et reclamoient Dieu et s’aloient feignant. 375
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Ainsi les deux Juïfz qui furent champïon furent ars de tonnerre comme feu de charbon. Touz les haultz seigneurs et les nobles barons furent si esbaïz, ne distrent o ne non. Ce signe monstra Dieu qui soufry passïon, pour l’amour de la roÿne a la clere façon. Les cloches du moustier sonnerent a cler son. Bien .xvic . Juïfz d’icelle nacïon s’en irent baptizer et de Sarrazins foison. Adont se sont retraiz chascun en sa maison. Or lerray de Henry qui tant ot de renon, et de Bertrant aussi qui cuer ot de lÿon, des autres Crestïens qui par la regïon conqueroient chasteaux a force et a bandon, ou il avoit Juïfz et Sarrazins foyson.
[125v]
- Arrivée de Pietres à Bordeaux -
[126r]
De telles gens fu lors grande confusïon. Du roy Pietres diray qui fu en son danjon et ala tant par mer, se nous dit la chançon, que de Bourdeaux choysi les murs environ. Le roy est arrivé au port sur le sablon. Des fourriers envoia pour prendre maison et il monta au port a sa division. Son trezor it charger, oncques tel ne vit hom. La table d’or in sans coyvre et sans leton et la ou l’escharboucle seoit en ou moillon, qui par nuyt va luisant aussi cler que brandon, faisoit porter le roy, de quoy nous vous disons, couverte noblement d’un drap de pharaon, tout aussi reluisant comme plume de paon. Si comme le roy estoit sur le mul arragon, chevauchant a Bourdeaux et o lui ses baron, it demander du prince s’il y estoit ou non. Et on lui a dit : « Sire, le prince de roion est droit a Engolesme en noble establisson. » Lors entre a Bordeaux le roy c’on dit Peron. Dolans fu que le prince ne fu en sa maison. Ses forriers envoia pour faire livroison, qui vont a Engoslesme prendre habitacion.
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376 Les forriers vont devant pour roy Pietre logier. Au prince des Galois l’est on alé noncier que Pietres est venu, c’on a fait enchassier d’Espaigne son païs c’on lui a fait vuider. « Seigneurs, se dist le prince, trop me puis merveiller. Qui fait au roy d’Espaigne si mortel encombrier ? » Dist Jehan de Chando, son maistre conseiller : « C’est Bertrant du Guesclin qui tant fait a prisier, et d’Engleterre aussi voz meilleur chevalier. Aléz sont en Espaigne long temps a guerroier. Ilz devoient aler Sarrazins empirer, en Grenade la grant Sarrazins exiller,
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- Episodes espagnols -
villez, chasteaux, citéz avoir et assegier. Or se sont arrestéz et mains bons chevalier, pour dam Pietre le roy de sa terre chassier, tellement qu’il n’a ville ou il se puisse logier ne homme qui lui doint a boyre ne a menger. – Par ma foy, dist le prince, on s’en doit merveiller. Ou c’est par son pechié, ou par Dieu courroucier, ou Fortune le fait ensement aviller. » 377
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En Angolesme fu le prince et ses gens, qui de Pietres le roy se merveilla forment qui de son honneur estoit decheu si laidement. Guerres ne demoura puis ce di que briesment vint la Pietres le roy, dont je foys parlement, qui prins ot ses houstelz illec noblement. Le prince y tremist Chando premierement, qui le vint visiter a l’oustel leement. Et quant le roy d’Espaigne le choisi en present, contre lui est alé tost et incontinent. A deux brafz l’acola et lui dist clerement : « A, Chando, dist le roy, il me va malement. Mon frere le bastart m’a deceu laydement car il a prins d’Espaigne nostre couronnement et toutes mes cités a son commandement par Bertrant du Guesclin qui le corps Dieu cravent, et par le mareschal que on nomme d’Odrehan. Huon de Caurelay m’a grevé moult forment, et Mahieu de Gournay, que je ne ame noyent, Thomas cellui d’Angosme et Cresselle ensement. Si est Robin Cecot, que je hé durement, Gaultier que on dit Huet m’a grevé grandement, qui d’Engleterre sont, le noble tenement. Touz ceulx m’ont plus grevé, par le mien serement, par leur eforcement que tout le demourant. Certes, Chando, amis, il me va malement. Se le prince de Gales n’y met amandement,
[126v]
- Accord entre Pietres et le prince de Galles dont ne sçay je que faire, par le mien serement, car ne sçay ou aler pour avoir vengement, ne pour prince trouver qui eüst hardement de venir en Espaigne pour mon avancement. » Dist Jehan de Chando : « Par le mien serement, se le prince de Gales en avoit le talent, il n’a roy ne seigneur en tout le fermement qui vous y peüst nuyre, je le sçay vraiment, car il est heureux et cremuz grandement. Et si entreprent un fait si trés hardiement qu’il en vient a heur et a grace souvent. Et on dit un parler – le sage proprement – que bien doit avenir par bon comaincement. »
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[127r]
Entre le roy d’Espaigne et Chando le gentilz y ot maintes paroles sans soulaz et sans ris. Et quant le roy Pietres ot tout ses adoubs pris, a la court le mena Chando le gentilz. Se fu sur le prime temps qui entre en avril que Pietres vint au prince qui tant estoit hardy. En ses chambres estoit moult noblement assis. Atant véz vous Chando qui tant fu bien apris, et dam Pietres le roy, que par la main ot pris. Au prince le mena qui tant fu poestiz. Quant le prince le vit, si s’est en piéz sailliz. Et quant le roy le vit, son chappel a jus mis, qui fu noble et beaux, a vray perles massis. Le prince a encliné, voyres, par tel advis* et telle alictïon et en faiz et en diz qu’il ne l’eüst pas fait a Dieu de paradis.
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379 Quant Pietres vit le prince en sa chambre jolye, son chapperon ousta qui ou chief lui lambye, et si s’est encliné et moult fort s’umilie. Plus amiablement le it, je vous aie,
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- Episodes espagnols -
que par devant l’image de la virge Marie. Et si le salua de voix doulce et serie en disant doulcement : « Cellui Dieu vous benye, qui pour les pecheurs revint de mort a vie. Sire, je viens a vous a chiere courroucie et me dueil et me plains de l’outrecuderie du bastart oultrageux qui par enragerie, a tort et sans raison a ma terre saisie, et si c’est couronné voyant ma baronie au roiaume d’Espaigne qui vient de ma partie.* Sire, vous savéz bien, ne fault que je le dye, comment la terre vient de nostre ancesserie, car mon pere fu roy sans nulle villonie. Or m’a le faulx bastart par son engignerie du roiaume chassé a tort et par envie. Oncques n’avint, se croy, se Dieu me benye, que oncques bastart fust roy, ne droit ne le veult mie. Sire, le vous dy sans nulle laterie, comme au plus suisant et de roial lignie qui soit ores regnant tant que ciel tournye. Quant je me plains a vous et le vous acertiie, je m’en plain a honneur, prouesce et courtoisie, je me plain a vertu, leur de chevalerie, a l’espee des preux ou chascun se ralie, a cellui qui de droit porte la seignorie, de touz les chevaliers la clef et la maistrie, prouesce, hardement, largesse et courtoisie. Sire, a vous je me plains de ceste villonnie pour cellui qui m’en puet le meulx faire aÿe la ou je doys avoir la droite seignorie, car desherité suis a tousjours sans folie, et mes hiers ensement de lignie en lignie, se vous ne me rendéz l’onneur c’on me detrie. » Quant le prince l’oÿ, le cuer lui engrossie. Hardement le assault et ourgueil le deie, et regarde le roy qui tendrement lermye. La chiere leva hault esprie de villonnie, d’ourgueil, de foul penser et d’outrecuderie.
[127v]
- Accord entre Pietres et le prince de Galles Lors dist au roy Pieron qui chiere ot couroucie : « Véz cy vostre chappel qui par vo courtoisie avéz ousté du chief ; mais, par sainte Marie, le remet sur vostre chief. Le vous acertiie : je vous remectray, soit ou sen ou follie, la couronne d’Espaigne qui vous est eslongie dessus le vostre chief, se je ne pers la vie, s’il me devoit ouster quant que j’ay en baillie et mourir en bataille ordonnee et rengie. Et feray le bastart foüyr chiere esbahye, et touz ceulx qui viendront en sa compaignie. Oncques bastart ne i si grande desruerie que chier ne l’amandast a l’espee fourbie. » Quant dam Pietres le roy a la nouvelle oÿe, de la joye qu’il ot doulcement le mercie.
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380 Quant dam Pietres le roy ot le prince escouté qui le jure et afye et l’a a Dieu louhé, qu’il le remectra dedens sa roiaulté, adont lui dist le roy, voiant tout le barné : « Sire, je vous en foys hommage et feaulté et le tiendray tousjours de vous en mon aé et mes hiers ensement de degré en degré. » Dont apportent le vin les chevaliers loé car le prince estoit de telle auctorité que nul ne le servoit de vin ne de claré ne d’espices aussi ne de biens a plenté s’il n’estoit chevalier a esperon doré. Tant estoit ourgueilleux et de grant ierté qu’il ne doubtoit homme tant y ot de ierté. Tant l’avoit orgueil espris et alumé le plus grant se tenoit de toute crestienté. Il ne donnoit du roy de France .i. ail pelé ne du franc duc d’Anjou .i. denier monnoié. 10536 10553
corr. d’après P : d. la joye qu’il doulcement l., ot ajouté. corr. d’après P : d. roy du France.
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- Episodes espagnols -
Des autres leurs de lis n’avoit riens acompté et par son grant ourgueil qui l’avoit enchanté perdy vie, honneur et sa noble duché, ains comme vous orréz mais que on les vous aye compté. Ainsi comme les faulx angelz furent du ciel versé par l’ourgueil et par le vice ou ilz furent entré, ainsi chëu le prince dont je vous ay compté. 381
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Ainsi que en parlement estoient les barons, le prince des Galoys et le faulx roy Pieron, et Chando ensuyvent et des autres foyson, et véz vous .iiii. Espaignolz de grant nom, au roy d’Espaigne vindrent, ce nous dit la chansson. Ceulx chevaliers faisoient apporter un bel don pour presenter au prince, dont je foye mencïon. Se fu la table d’or, plus noble ne vit on, que toute estoit d’or in sans coyvre ne leton. Si fu l’escharboucle assise ens ou moillon qui reluisoit par nuyt aussi cler que brandon. La vint le roy d’Espaigne faisant alictïon. La table qui fu d’or et de noble façon a presenté au prince et lui dist a hault son : « Sire, cestui joiel, je le vous donne en don, qui me vint par exchange de mon pere Alfon.* Et sachiéz que jadis la conquist mon tayon au roy qui de Grenade maintenoit le royon. Car il le tint jadis et mist en sa prison, et ce riche joiel il en ot a raençon. – Par ma foy, dist le prince, véz cy .i. joiel bon. » Au roy d’Espaigne dist : « Ja n’aye je pardon se je ne vous en rens bien tost le guesredon. D’Espaigne vous rendray la noble regïon et en feray fouÿr le fol bastart quoistron qui le vous a tolu par mortel traÿson. Mais ne lui demourra vaillent un bouton, ville, cité, chastel ne pouvre mencïon
[128r]
- Accord entre Pietres et le prince de Galles ou il puisse demourer une seule saison. Car a ce fait icy doyvent princes et baron avoir certain conseil et bonne avisïon, car autant leur en pent au nés ou au menton. »
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[128v]
Quant le prince de Gales parceu et advisa la table qui fu belle, durement la prisa. Par devers la princesse vistement l’envoia, la plus trés noble dame qui au siecle regna. Elle fu en sa chambre, la ou on lié recorda comment le roy d’Espaigne Pietres fu venu la. Et lié dist on comment le prince afÿa que le noble roiaume d’Espaigne par dela c’on lui avoit tolu, le prince lui jura que en sa poccessïon on le remectra et que le roy Henry en desheritera. Quant la princesse l’oÿ, forment lé ennuya.* A ses dames a dit que le prince tort a d’aider un murtrier qui estoit venu la, qui sa femme la bonne murdri et aina. Bien dit que oncques roy Pietres a bien n’avisa ne oncques en sa vie la foy de Dieu ne ama. « A, Dieu, dist la princesse, que mal vous adviendra. Mal dicte soit l’eure qu’il est venu deça. » De l’ennuy qu’elle en ot a plourer commainça. La fu son jeune ilz qui bien la rapaisa. Puis fu roy d’Engleterre, seigneurs, cel enfant la, car par le fait d’Espaigne ou le prince ala print une maladie qui a mort le mena.* Atant véz vous la table c’on lie apporta. Et un bel chevalier qui bel s’agenoilla, de par le roy d’Espaigne la table presenta. Quant la dame la vit, si dist : « Mectéz la la. Véz cy un bel present, mais il nous coustera. »
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- Episodes espagnols 383
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La princesse de Gales fu sage et vaillent. La table prisa poy qui tant fu souisant, ains mauldissoit le roy qui la fu presentant. Quant le prince revit les chevaliers vaillans qui presenté avoient le don qui fu si grant, « Seigneurs, se dist le prince, ne me soiéz celant. Que a dit la princesse quant fustez departant ? » Se dist le chevalier : « Se m’aïst saint Jehan, elle n’en it nul comte, ains est son cuer dolant de la venue au roy qui est cy habitans. » Et le prince a dit : « Bien m’en suis parcevans. Elle vouldroit adés que fusse demourans et par decouste lé en ses chambres manans.* Ce ne feray je pas, il n’est appartenans. Qui veult avoir le nom des bons et des vaillans il doit aler souvent a la pluye et au vent et estre en bataille ainsi que fu Rollant et le ber Olivier et Ogier le puissant, les quatres ilz Aymon, Charlemaine le grant, le duc bon de Bourges et Guion de Tournant,* Perceval le Galois, Lancelot et Tristant, Alixandre et Artus, Godefroy le savant, dequoy ces maistres font de nobles romans. Par saint George, dist il, en qui je suis creant, je tiendray Espaigne et touz les appendans a cellui qui doit estre le lieutenant.* Ja bastart n’en tiendra la monte de deux gans. Ainsi porroit on faire a touz autres enfans. Remede y mectray ains que passe l’an. » Lors it ces briefs escripre par bons clers lisans. Tantost furent signéz et ses seelz pendans. Et puis a fait monter chevaucheurs bien courans. En Guïennes manda a touz ses confortans, chevaliers, escuiers et soudoiers puissans, que chacun veigne a lui sans estre sejournans. 10652
corr. d’après P : c. briefs escripres p.
[129r]
- Semonce de l’armée anglaise à Bordeaux Et manda tout partout Engloys et Alemans, et archiers grant foyson, touz les meulx trayans. En armes, en chevaux, hardiz et conquerans, de Guïenne manda les nobles combatans.
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384 Grande fu l’assemblee qui fu a celle ie ordonnee a Bourdeaux, celle cité antie : le conte d’Ernimac, a la barbe lorie, le sire de l’Abret a belle compaignie. Cellui de Partenay si lui vint faire aÿe, et Jehan de Chando, ou le prince se ie. Le sire de Pommiers y vint lance drecie, Emerïons ot nom, comme l’istoire crie. De Felleton y vint Guillaume sans envie, senechal de Poictou, noble seneschaucie, et cellui de Bourdeaux qui les Bourdeloys guye. Jehan de Felleton vint en sa compaignie, cellui de Pennebrot qui la conté maistrie. Si vint le Castal aussi lance drecie. Et le duc de Lencloistre vint par mer a navie, o lui ot tant d’archiers, n’est nul qui le vous dye.
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385 A Bourdeaux it le prince une assemblee grant et la plus riche armee, se trouvons nous lisant, c’on vist oncques mais seigneur, roy ne amirant. On a bien peu veoir plus grant peuple apparant, gens d’armes et commun, arbalestiers trayant, mais les gens que ce prince ala la assemblant c’estoient toutes gens d’estofe souisant, qui esprouvé avoient esté en combatant ; c’estoient touz couvers d’armeure suisant, touz noblement vestu, ou dos le jaserant. La peüst on veoir maintes lances trenchant, courir mains bons chevaux que on aloit assoiant. Le prince it mander par dedens l’ost Bertrant
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- Episodes espagnols -
touz chevaliers engloiz tost et incontinent. Et laisserent Henry et Bertrant le vaillent, sur a perdre tout ce qu’ilz avoient vaillent* et sur estre banyz d’Engleterre la grant, et la foy et hommage qui lui furent jurant. Les chevaucheurs s’en vont en Espaigne la grant. Droit a Burs ont trouvé Henry le roy vaillent et Bertrant du Guesclin, ou de prouesce ot tant, et cellui de Villaines, le Besgues souisant, et cellui d’Odrehan le noble combatant, Huon de Caurelay au hardy convenant, et Mahieu de Gournay, au hardy convenant,* Gaultier Huet aussi et Guischart le Normant, avec Jehan de Viennes qui la fu en estant, et mains bons chevaliers, d’Angleterre tenant. Le chevaucheur s’en va ses lectres apportant et salua le roy haultement en oyant. « Sire, dist le message, or faictes lire errant. Véz cy de par le prince qui vous va defïant. » Le roy Henry les it lisre toust maintenant. En la teneur y ot, selon mon escïant : « Nous, le prince de Gales oultre la mer seant, aisné ilz de Edouart, Engleterre tenant, et de Guïenne aussi, le païs souisant, de Poictou, de Limoges, jusques la mer bruyant, vous faisons assavoir et en signifïant comme nostre ennemi a tousjours malveillant, ens ou nom dam Pietre, le nostre appartenant, vous commandons de fait que sans estre arrestant vous partéz hors d’Espaigne, le païs avenant. Et sachiéz que nous sommes pourveüz et en grant de vous faire mourir a loy de recreant, et courir dessus vous a un efort si grant que pour vous destruyre et touz voz confortans mandons et commandons que sans estre arrestans Huon de Caurelay qu’il ne soit demourans 10698
corr. d’après P : o. de prousce ot t.
[129v]
- Semonce de l’armée anglaise à Bordeaux -
[130r]
pour vous conforter de ce jour en avant, et touz ceulx qui sont a nous appartenant ; et qu’ilz veignent a nous sans estre defaillant, ou ilz seront a nous touz desobeissans et comme traïtreurs les irons repprochans, et les notre ennemis, a tousjours malveillans, et perdront leurs terres et tout leur vaillant, et en seront destruiz et touz leur appartenant. Et de ce qu’ilz ont fait, nous en sommes doulant, car ilz ne l’ont pas fait par le nostre commant. » Ainsi disoit la lectre dont je vous voys comptant. Et quant le roy l’oÿ, si mua son semblant qui moult bien l’apparceu le noble Bertrant. Dont dist au roy Henry aultement en oyant : « Sire, j’ay bien oÿ ce mandement pesant. Se le prince va de Bourdeaux menaçant, pour ce n’est il pas cy, ains qu’il soit cy avant pourroit il bien avoir encontre si pesant que trop meulx lui vaussist qu’il fu en Orïant. Homme qui est menacé de fort et de puissant, s’il pleure par menace, il ressemble l’enfant. S’il est fort et nous fort, nous irons au devant. Et le Dieu de bataille qui voist lui defendant et Fortune et Heur qui sont l’omme garant, se estre veult pour nous et estre fortunant, ainsi porrons avoir honneur au remanant. On voit a chief de foyz .i. riche homme puissant, quant Ourgueil lui fait faire son gré en ourgueillant, a la foy l’ont perdu les riches oultrecuidans. La ou le cheval chiet l’on le va escorchant. Mauldit soit il de Dieu qui s’en va esmaient. Si sont avec lui .c. mille combatant et nous sommes .xx. mille devant eulx en estant, se Dieu nous veult aider et bon droit tout avant, ja pié ne s’en ira d’Espaigne departant. Soions preux et hardiz, alons nous confortant, 10762
corr. d’après P : soient preux et h.
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- Episodes espagnols -
car qui a bon harnoiz touz jours va il avant. » 386
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Yvon de Caurelay, quant il oÿ la raison que le prince de Gales manda les compaignons, venu est a Bretrant qui estoit hardi homs. « A ! Sire ! dist il, fault il que departons. Par bonne compaignie ensemble esté avons et loiaument regné aussi comme proudons. Du vostre a nostre voloir tousjours en avons, c’oncques en touz noz faiz n’avons eu tensons. Et si avons conquesté des avoirs et des dons. Oncques n’en fu demandé par vous parsons, ne pour avoir conquis, ne pour prandre prisons, pour donner souldoiers, pour partir ranson. Et je sçay bien de vray et ainsi le pensons, que j’ay plus receü que nous ne cuidons. Or est le temps venu que nous departirons. Si vous pri, beaux doulx sire, que ensemble nous comptons et s’a sorre vous ay, nous le vous rendons, ou sus nostre signet le vous assignerons. – Sire, se dist Bertrant, ce n’est cy que un sermons, car oncques ne pensay a ces questions. Je ne sçay que ce monte, bien visé n’y avons, ne sçay se me devéz ou se nous vous devons. Or soit tout quicte, puis que nous departons. Mais si decy endroit l’un a l’autre acreons, de ces nouvelles debtes adoncques escriprons. N’y a que du bien faire et si le veult raison que vous servéz vostre maistre, ce doit faire proudoms. Bonne amour it l’accort et la deparçon sera tout par amour et ainsi le voulons. Mais j’en suis moult dolant, c’est la conclusïon. Mais puis que estre le fault, a Dieu le commandons. » Lors se baise au partir et touz les compaignons.
[130v]
- Les Anglais quittent la Grande Compagnie -
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[131r]
La departie fu hideuse au desevrer. Le roy Henry a prins doulcement a parler : « A ! Beaux seigneurs, dist il, il vous en fault aler pour le prince de Gales aider et conforter a l’encontre de moy, dont il me doit peser. Qu’il est encontre moy ne le puis amander. Vous m’avéz bien servi, dont je vous doys amer. Et je vous paieray trés bien au decevrer. » Or, joiaux et argent leur a fait presenter. Huon de Caurelay laissa tout ester et lui dist : « Noble roy, sur Dieu vous veil jurer, pour amour de Bertrant, dont bien me doys loer, un seul denier n’aray qui me puisse prouiter. Et se j’ayme Bertrant, droit le veult actorder. Vous le savéz de vray, ne pouons contrester. Et le jour que je deu o Bertrant demourer, je luy dys et lui promis et lui volu creanter que bonne compaignie pourroit en moy trouver tant que le gentilz prince n’auroit guerre a mener. Or lui plaist ceste guerre, si nous fault decevrer. Pour tant di au partir : or vous veilléz garder a l’encontre de nous et sans vous afïer, car nous ne vous pouons garentir ne tencer car ce seroit du tout pour nous deshonnourer. » Se dist le roy Henry : « Dieu qui it ciel et mer est bien fort et puissant pour nostre droit garder o la peine que je y vouldray adjouster. Puis que je voys Bertrant avec moy demourer il ne me semble pas que l’on me puisse grever. »
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388 Ainsi se departi celle chevalerie. Espaigne ont par actort a cellui jour laissie, vers Bourdeaux s’en alerent, une terre garnie. Et Henry demoura avec sa compaignie : c’est Bertrant du Guesclin, la ou forment se ie,
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- Episodes espagnols -
le Besgues de Vilaines qui fu de bonne vie, et le bon mareschal, o la chiere hardie, Olivier de Manny, cellui ne failli mie, et ses freres ensement lui tindrent compaignie. Si fu le conte d’Aisnes, d’Arragonne l’antie. Et Guillaume Boytel y fu a celle ie, Guillaume de Lonnoy, Guischart de Normendie, et d’autre Espaignolz et bonne gent hardie. Se dist le roy Henry : « Beaux seigneurs, je vous prie que vous me conseilléz, quar j’ay mestier d’aÿe. Le prince des Galois ierement me deie. Oncques telle assemblee ne meulx apparaillie n’entra dedens Espaigne puis qu’elle fu gaignie par le roy Charlemayne, dont l’ame soit saintie, qui en Espaigne vint a si grande maistrie que Dieu y it miracles pour lui a sa vie. Or nous soit Dieu aidant et la virge Marie. Aussi trés vrayment le mien cuer lui supplie, que je suis menacé d’ourgueilleuse partie. Le roy Pietres premier a nostre loy guerpie, et sa bonne mouiller fu par lui murdrie. Et le prince de Galles qui pour lui me deie, est le plus ourgueilleux qui aujourduy soit en vie et qui plus a grevé la noble seignorie du noble roy de France, lequel Dieu benye. » Dist Bertrant du Guesclin : « Je vous acertiie que si les Espaignolz qui sont de vostre partie vous vouloient aider sans nulle tricherie, et aussi bien que Françoys, la ou mon corps se ie, ne donneroie du prince qui fait grant aatie, se bien trés petit non, selon mon estudie. Mais je vous pri pour Dieu qui tout a en baillie, ne vous iéz pas trop en la vostre ost bennye, car je me doubte trop qu’il y aie couardie. » Se dist le roy Henry : « Par la virge Marie, je ne puis pas savoir leur sen ne leur folie, car ce qui est ou cuer, l’omme ne le dit mie. »
[131v]
- Semonce à Sebille de l’armée d’Henry -
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389 « Ha, dist le roy Henry, par Dieu, seigneurs baron. On ne cognoist les faulx par leur faulse raison. La fausseté de l’omme a l’eure cognoist on car le bel parler dit a la foy ne sont bon. De tel marrien qu’ai me fault faire maison. – C’est vray, se dist Bertrant. Or faictes a bandon. Et viegnent avec nous entour et environ, a pié et a cheval, toutes gens de façon, arbalestriers, archiers et sans arrestison, veignent touz aprés nous contre roy Peyron. » Adont y sont venuz en noble establisson. De Sebile la grant et dela environ sont venuz .xxx. milles, touz legiers champpïon, aus dars et aus escuz, iers comme lÿons. De la cité de Burs .x. milles en amene on. N’y demeure Espaignol jusques en Arragon, de Sarragoce aussi et de Toulecte en son. A pié et a cheval, a targe et a blason, a baniere drecie, a lance et a furent .lx. milles et plus celle saison. Nobles sont les charroys, grant est la garnison. A tentes et a tréz et a mains paveillons, et a belle ordonnance et iers comme lÿon vindrent les Espaignolz dont je foys mencïon, en monstrant bonne chiere a guise de grifon pour secourir Henry contre le roy Peyron, qui touz lui faillirent quant il en ot besoign. Grande fu l’assemblee en celle regïon : le Besgues de Villaines, .i. chevalier de non pour la bonté de lui, comme dit la chansson, et pourtant l’avangarde de ce jour lui bailla on.* Le mareschal d’Espaigne qui cuer ot de lÿon, la .iie . bataille mena en sa parson. Si fu le conte d’Aisnes qui cuer ot de lÿon. 10871
faire maison maison, première occurrence de maison cancellée.
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Seigneurs, en l’assemblee y ot moult iere gent. Bien furent Espaignolz .xx. mille certainement et .xx. mille Genevois qui lancent roydement, et .xxx. milles a pié, arméz moult ierement pour le prince de Gales qui venoit ierement, qui .xxi. mille hommes amenoit proprement, a chevaux bien arméz assez deüement. De la clarté des armes, le souleil en resplent et sembloient touz angelz venant du fermement. Oncques nul homme vit plus noble assemblement ne mena en son ost plus noble estorement que le prince mena, on le scet vrayment, car le duc de Lencloistre, ou tant ot hardement, et le Castal de Beuf y estoit ensement, le conte d’Ermignac ou tant ot d’escïent, et Jehan de Chando, cellui n’y failli noyent, le sire de Pommiers, Aymerïon la gent. De Felleton y fu Guillaume proprement, l’avangarde menoit en son gouvernement. Le prince chevauchoit moult ourgueilleusement, et dam Pietres rex luy qui s’esjoÿ forment* du secours qu’il menoit o lui si largement. A soy mesmes dist : « Se je puis nullement tenir le faulx bastart, j’ay a Dieu en convent traÿner le feray et encroyer au vent, et Bertrant du Guesclin et Arnoul d’Odrehan, le Besgues de Villaines qui m’a grevé forment, Olivier de Manny, que je hé durement, et ses freres aussi qui me monstrent la dent. Et les bourjois aussi recevront torment, qui se sont assenti a son couronnement. Et toulz ceulx de Sebile auront leur paiement et leur feray soufrir du meschief largement. » Ainsi disoit dam Pietres, il dit vray bonnement, ainsi comme vous orréz assez prochainement.
[132r]
- Arrivée de l’armée anglaise en Espagne -
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[132v]
Seigneurs, or escoutéz, franche gent honnouree. Et je vous conteray d’une iere assemblee, qui orgueilleuse fu et moult desmesuree ; puis le temps Alixandre ne fu telle assemblee : .XVIII. mille furent, c’est verité prouvee, voires touz a cheval, de gens bien adoubee, cincq cens hommes de pié, de gens bien estofee, archiers, arbalestriers et gens de renommee. Ceulx qui eurent cheval et trés bonne montee de fer furent couvert decy jusques la pree. N’y ot cellui qui n’ot bonne lance aceree, et l’escu a son col et au costé l’espee. Oncques on ne vit gent si trés bien ordonnee. Tante baniere y ot de soye bien ouvree, et tant riches pennons toutes lances drecie, le charrois qui venoit aus champ dessus la pree, les chers et les sommiers par mont et par vallee : de trois leues et plus avoit l’ost duree. Et le prince de Gales qui la chiere ot menbree, envoia par devant en Navarre la lee a cellui de Navarre prier sans demouree que la voye lui fust par son païs livree pour aler en Espaigne commaincer la meslee. Et le roy de Navarre ot la chose actordee. De Navarre leur it abandonner l’entree. Et commanda ses gens a icelle jornee que l’ost qui venoit ne fust point empiree et que pour leur argent ne fust chose véee. Mais je vous dy pour vray que ceulx de la contree eurent si la vitaille mucie et defermee et jusques ens es forests mucie et depportee es boys, es forests et en mainte ramee. Et ne trouvoit adonc farine buletee, ne de vin, ne de pain, char fresche ne salee, 10942 10945
corr. d’après P : cincq gens hommes d. corr. d’après P : j. la pee
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- Episodes espagnols -
tant que l’ost du prince en fu moult afamee. Ainsi par le païs est ceste gent passee, a si grande puissance venue et atraynie que ne le vous diroit personne qui soit nee. 392
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Moult fu grande l’ost au prince des Galoys. Trompes, chalemies et cors sarrazinois y peüst on oÿr, grant y fu l’efroy. Belle y fu la compaignie de ceulx des Gennevois, et de ceulx d’Arminac et du conte de Foy, Poitevins et Gascoins avec les Engloys. La peüst on voir banieres a orfroys, enseignes et pennons, mules et palefroys, et les chevaux couvers jusques au sablonnoys. Xviii milles furent armés sur leur conrroys, sans les arbalestriers que furent Gennevois et sans les bons archiers Engloys et Escossois, qui bien furent cincq milles, ce tesmoigne la voix. Chargé sont les sommiers, aussi sont les harnoys. A chars et a charrectes amenent a explois, tentes et paveillons et riches ars turquoix, bonbardes, ars a tour, espoiees et espois . Tel conroys ne mena Alixandre le roy, Charlemaine, Artus, ne le duc Godefroy, non pour faire bataille et bohours et tournois, toutes gens d’eslite, sans sergens ne bourjois. Se n’estoient pas gens pour eulx tenir tous coys mais pour tenir bataille tous temps sans estre froys. N’y a cellui ne sache de bataille l’esploix. La famine les prist ou païs navarrois. Par les terres s’en vont cuillant feves et poys. Qui du noble Bertrant eüst creü la voix, il n’en fu ja tourné pié en Bourdeloys. 393 Or chevauche l’ost, Espaigne approchant.
[133r]
- Arrivée de l’armée anglaise en Espagne -
[133v]
Guillaume Felleton s’en aloit tout devant, o lui .vc. Engloys, hardiz et combatant. La pree ont eslevee, le païs vont fustant. le roy Henry d’Espaigne aloit fort aprochant. Soixante milles Espaignolz et plus va menant, vingt milles Gennevoix qui vont de dars lanssant, six milles chevaliers, escuiers et sergens, dont chacun ot cheval couvert de jazerant, leurs escuz a leurs colz qui vont resplendissant, et les lances es poins, dont les fers trenchant. Les banieres aloient contre le vent ventelant, et les riches pennons qui vont amont montant. Ilz estoient bien gens, s’ilz fussent suisant pour conquerre le monde jusques en Orïant. Le besgues de Vilaines en appella Bertrant : « Sire, dist il, véz cy une gent suisant. Ja le prince de Gales n’aura a nous garant. – Sire, se dist Bertrant, je vous jure et creant que le cuer de mon ventre me va signiiant que aussi tost qu’ilz verront la baniere levant de dam Pietre le roy et du prince vaillant, vous verréz avenir qu’ilz s’en iront fuyant. Je ne me ie en eulx plus que en oysel volant. Et si vous jure Dieu, le pere roy amant, que je ameroie mieulx, je le vous acreant, que en la bataille fusse prins tout maintenant que le roy fust prins que l’on va Henry nommant, car s’il y estoit prins, je sçay a essïant, que Pietres le feroit mourir incontinent comme le plus fol traitre et le plus recreant qui oncques fust au monde deriere ne devant. Et se je estoie prins, j’aroie aucun garant par or et par argent que l’on me iroit actordant. » A icelle parolle que je vous voys comptant, véz vous un chevaucheur qui venoit chevauchant. Venu est a Bertrant et au Besgues vaillant, et au bon mareschal et a Guy le Normant, a Guillaume Boytel, un chevalier puissant,
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- Episodes espagnols -
et a pluseurs Françoys qui furent la estant. « Seigneurs, se dist le vallet, je vous jure et creant je vien de l’ost au prince depuis souleil levant. Mais je vous jure Dieu, le pere tout puissant, c’on ne vit si ieres gens ne de si iers semblant, ne si bien ordonné ne si bien combatant. Mais ilz n’ont que mangier et jeunent les auquans, car par tout Navarre ilz n’ont trouvé noyant. – Et qui fait l’avangarde, amis, se dist Bertrant ? – Il la fait Felleton qui vient tout devant. Ne sont que cincq cens lances, le païs vont fustant. – Or va, se dist Bertrant et n’arreste noyant. Et me sachéz a dire, pour Dieu le te demant, ou ilz iront demain ne seront chevauchant. Car tu nous trouveras a Nadres cy devant. » Et il a respondu : « Je feray vostre commant. » Des Françoys se deppart et si les va laissant. Et l’ost, celle nuyt dont je vous suys parlant, s’en sont venuz a Nadres, la se vont arrestant et dedens et dehors s’alerent touz logent. La vont les Espaignolz maintes loges estorant, tentes et paveillons sont sur les champs dreçant. Tant y avoit de gens, par le mien essïent, couvert en sont touz les mont et les pendant ; vingt milles Genevois, sur Genes chevauchant, qui portoient les dars, dequoy on va lançant. N’est homme s’il les vist, comment se vont portant, qui n’eüst d’eulx paour a veoir le semblant. Bien sembloit qu’ilz deüssent confondre le soudant et les troys loys a une adjouster par bobant. Ilz prenent la païs et vont avironnant. le Besgues de Villaines s’i loga tout devant avec l’amiral et Guischart le Normant, et le bon mareschal que l’on nomme d’Odrehan. La nuyt gaisterent l’ost a mains brandons ardant, decy jusques au matin, aprés l’aube esclairant. Et le prince de Gales, a son peuple puissant, venoit moult ierement banière ventilant.
[134r]
- Rencontre des deux armés à Nadres Cellui de Feleton Guillaume le vaillant aloit moult ierement l’avangarde menant. Pour acueillir la pree va le païs courant. Poy de vitaille avoient en l’ost touz les plus grant. 394 Or furent en Espaigne les .iii. os dont je dy,* l’un bien prés de l’autre, a guise d’ennemy. Pour la vitaille querir sont Engloys departy et vont par la contree comme loups esbaÿ. Guillaume Feleton, un chevalier hardy, a .vc . hommes d’armes, arméz et fervesty, va la pree acueillant, vaches, brebiz aussi, mais le païs trouva malement desgarny. A Bertrant du Guesclin le compta et gehy un chevaucheur qui ot son afaire choisy. Et quant Bretrant le sceu que celui courroit ainsi, il en fu moult joyant, car forment l’en haÿ. De mortel traÿson a Paris le suyvy mais Bretrant a ce temps moult bien se defendi. Quant la venue sceu et ou il s’embati, le mareschal de France appella sans detry avec le conte d’Aisne et puis leur dist ainsi : « Seigneurs, se dist Bretrant, venéz avec my. Au plus priveement soions touz departy que faire le porrons, ainsi je le vous pry. Aler veil assaillir mon mortel ennemy qui mayne l’avangarde, ainsi comme j’ay oÿ. Le païs va forrant, aler veil contre luy. les Engloys ont grant fain, ilz seront desconfy. » Dist Arnoul d’Odrehan : « Le pain leur est failly. Se nostre conseil veult croyre le roy Henry, touz y mourront Engloys et sans estre assailly. »
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395 Bertrant du Guesclin ne si volu arrester. Sa bataille conduit, qu’il sceut moult bien mener. Banieres et pennons it a terre cliner,
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- Episodes espagnols -
lances, glaives et dars it a terre porter. Selon .i. boys a fait toute ses gens aler ain que l’on ne le peust cognoistre ne adviser. Et a fait ses coureurs chevaucher et aler pour savoir en quel lieu on peust Engloys trouver. Veü ont une ville c’on fait Reze nomer, la ou ilz ont veü moult de feuz alumer pour cuyre les viandes et le pain ordonner. Et virent sur les champs les Engloys traverser et la ville approchier et charectes mener, chevaux, sommiers, mules pour viandes porter. D’une montaigne virent banieres avaler. L’un des chevaucheurs qui Englois savoit parler, se bouta dedens l’ost et oÿ deviser que c’estoit Felleton qui venoit de forrer et qui faisoit vers l’ost la vitaille amener, vaches, brebiz, pourceaux qu’il ot fait assembler, plus de .iiim . bestes pour Englois conforter. Dont vint le chevaucheur et laissa l’ost ester. Tout parmy l’ost s’en vint et prinst a trepasser. Dedens une valee ala Bertrant trouver. Et quant il l’a veü, si lui dist ault et cler : « Sire, dist il a lui, penséz de vous haster. Venéz avec moy et je vous feray trouver Guillaume Feleton et a lui assembler. » Et Bertrant lui a dit : « Ce fait a creanter. » Sans trompectes bondir, sans justement sonner se volu le bers Bertrant partir et decevrer. Par devant un boquet it ses gens arrouster et les mist en troys lieux pour les premiers monstrer. 396
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Ainsi a mis Bertrant en .iii. lieux toutes sa gent. Guillaume Feleton et trestoute sa gent fourroient le païs avironneement. Ses coureurs lui ont dit sans nul arrestement : « Sire, font les coureurs, chevauchons leement.
[134v]
- Embuscade de Bertrant à Reze Véz cy une bataille d’Espaignolz vrayment, qui venent chevauchant sur les champs simplement. – Seigneurs, dist Feleton, sont ilz forment ? – Ilz ont autant que nous, selon mon essïant. » Et Guillaume lui dist : « Je ne fuiray noyent. Se ce sont Espaignolz d’Espaigne droitement, je ne les doubte riens, po ont de hardement. Mais si ce sont François, ce seroit autrement, car Bertrant y seroit qui tant ot hardement. De moy ne prendroit ne or in ne argent, car a mort me haït il a ja longuement. »
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[135r]
« Vassaulx, dist Felleton, chevauchéz a bandon et me sachiéz a dire sans point d’arrestison si se sont Espaignolz Françoys ou Bourgoignon. Et si Bertrant y est, demandéz de son nom, et s’ilz voulent avoir bataille ou tenson. » Cellui a respondu : « A vostre division. » Il brocha le cheval a pointe d’esperon et s’en vint chevauchant dreçant son esperon. Jusques a noz gens est venu de randon. Le conte d’Aisnes vit venir le compaignon, issu est de la route en brochant l’arragon. Au chevaucheur s’en vint et lui dist a hault son : « Sire qui estez vous ? Dieu vous doint pardon. » Et cellui a respondu : « Guillaume Feleton et son frere Jehan et les autres baron m’envoient devers vous pour savoir vostre nom. » Et il a respondu :« N’en feray celoison. Je suis conte d’Aisnes qui siet en Arragon, et ce sont Espaignolz qui sont mes compaigon. – Or dictes, dist cellui, si vous semble bon, si Bertrant du Guesclin qui cuer a de lÿon, est cy avec vous, n’en faictes celoison. – Nenny, dist le conte, je n’y compte .i. oignon. 11150
d. Felleton dist il sont i., dist il cancellé.
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- Episodes espagnols -
Ne sauroit on sans lui octroier une tençon ? Nous sommes Espaignolz, pour vray le vous dison, qui querons la tenson ; se Dieu plaist, nous l’aurons encontre les Engloys a force et a bandon. – Et vous l’auréz, dist il, a bien courte raison. Je vous voys amener Guillaume Feleton. » 398
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A icelle parolle c’est cellui dessevréz. Et Bertrant du Guesclin, avecques ses privéz, se tenoit embusché et o lui gens assez. Un escuier lui vient qui estoit bien monté. « Sire, Bertrant, dist il, tout coy cy vous tenéz, car véz cy Felleton qui vient tout ordonné. Le conte d’Aisnes c’est moult trés bien avisé. Son chevaucheur a dit que estez demoréz avec le roy Henry qui tant est naturé. Il cuide estre de vous moult bien asseüré. » Dist Bertrant du Guesclin : « Par Dieu qui fu pené, je lui vouldray monstrer comment je suis nommé. » A icelle parole que vous oÿ avéz, atant véz cy Guillaume qui bien fu appresté. A cincq cens lances vint comme chevalier louhé, les escuz a leurs colz et les penons levéz, et les lances es poins, a bons dars asseréz. En conroy chevauchoient noblement adoubéz. Quant vint a l’aprochier et véz les vous desmontéz. A pié sont descenduz, les escuz accoléz, Espaignolz comme lÿons cretéz. Les trompectes sonnerent, leurs ost se sont levéz. A l’aprocher se ierent comme gens desruéz, des lancez qui sont droites se sont grans cops donnez. Mais de chascune partie se tenoient si serréz que l’un ne puet estre par dedens l’autre entré. 11195 11212
q. estez est demoréz, est cancellé. mais chascune partie, de suscrit.
[135v]
- Embuscade de Bertrant à Reze -
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[136r]
Fiere fu l’envaÿe a ce commaincement. Des lances et des glaives se lancent ierement, les escuz ont fausséz et perséz ierement. Mais tant se tenent cloux avironneement qu’ilz ne pouent entrer ne rompre nullement. Mais véz cy qui les it derompre laidement, car Bertrant du Guesclin et le mareschal gent leur vindrent de cousté chevauchant ierement. Jusques en la bataille n’y it arrestement. Et « Guesclin. » vont criant en leur voix haultement. Entre Engloys se sont feruz par tel convent qu’ilz les ont depeciéz et rompuz tellement que sur les champs se sont mis a fuyte briesment. Mais Bertrant du Guesclin, quant moult sagement a trouvé Felleton, si lui dist haultement : « A, Guillaume, dist il, tu mourras vrayment. » De sa lance le vint hurter si ierement que a terre l’abbati sur l’erbe verdoient. Ceulx qui estoient a pié y vindrent en present, d’espees et d’espois ont de plaies bien cent. Quatre vingts chevaliers arméz souisanment y ot ce jour octis a ce commaincement, et tous mors ou navréz ou prisons ensuyvent. Les pasgres et les chevaulx s’en fuyent asprement, jusques a l’ost du prince n’y font arrestement. Ilz ont esté menéz jusques a son logement, ou le duc de Lencloistre estoit du cuer dolant, et cellui d’Ermignac, ou tant ot d’escïent, et Jehan de Chando, au ier contenement, et le Castal de Beuf, ou tant ot hardement, Huon de Caurelay et des autres granment. Si a dit un escuier : « Il nous va malement, car Bertrant du Guesclin qui le corps Dieu gravent, si nous a espïé a cest adjornement, nostre pree arrestee et tué noz gent. Felleton est octis et touz ses parens,
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- Episodes espagnols -
ne nous est demouré ne vache ne jument. » Quant le prince l’oÿ, si en ot le cuer dolant. Et dam Pietres le roy s’esmaia grandement. « A, Bertrant, dist il, le corps Dieu te gravent. Par ton fait ay perdu le mien couronnement et si m’as estriné aujourduy pouvrement. » 400
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Le prince fu dolans, si ot la chere moult iree. « Que ferons nous, dist il, franche gent honnouree ? » Dist le quenx d’Ermignac : « Je diray ma pensee. Sire, prince, dist il, oiéz bien ma pensee. Nous avons cy endroit si grant ost amenee, telle ne fu pieça veue ne esgardee. Mais de tant vous va mal, elle est toute afamee. C’est la terre d’entour de touz biens essillee si que homme n’y puet trouver une pomme paree. Si nous demourons cy, par la virge honnouree, touz y mourrons de fain ains la terce jornee. Ou il nous fault avoir de bataille jornee ou mourir de fain, c’est chose esprouvee. Faisons que noz gens soions toutes armees. Et si nous combatons comme gens desraee, car le vault meulx assez de morir a l’espee qui ainsi mourir de fain comme beste desruee. » Dist Jehan de Chando : « C’est verité prouvee. – Par foy, dist le Castal, bien me plaist et agree. » La fu des haulz seigneurs la besoigne acordee. Or diray de Bertrant, o la chiere senee, qui a Nadres repayra, ou l’ost fust sejornee. La proye qu’il avoit gaignie et conquestee et les prisons aussi qu’ilz prindrent la jornee ramenerent en l’ost ainsi qu’il leur agree. « A, dist le roy Henry, véz cy bonne jornee. » 11267
n. fault aler avoir d., aler cancellé.
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corr. d’après P : s. grant amenee, ost ajouté
- Embuscade de Bertrant à Reze -
335
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[136v]
Joieux fu le roy, le preux et le senéz, quant les Engloys choisi tellement estrinéz. Ilz ont a leur prisons leur estaz demandéz de l’ost au riche prince qui tout estoit louhé. Et ilz leur ont compté toutes la verité et comme le peupple est tellement afamé que touz meurent de fain, failli est pain et blé. Et le vin ensement failli est de touz léz, ne trouvent que manger, le païs est gasté. Adont parla Bertrant qui bien fu avisé.* « Par Dieu, franc roy d’Espaigne, se croyre me vouléz, vous vendréz a honneur et si desconiréz sans batre ne ferir voz ennemis mortels, car je sçay tout de vray et que c’est verité que le plus grant y est de famine apresté. Faisons devant nostre ost faire de bons fosséz et tout le charroy soit devant nous mené. Je octroie que je soie de traÿson retéz se le prince ne s’est en fuyant retourné. Et quant nous le verrons tout desbarreté, adont leur courrons sus sur les chevaux monté. Il n’y demourra pié qui n’y soit atrappé. »
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402 Dist Bertrant du Guesclin : « J’ay a Dieu en convent qu’ilz sont touz afaméz, je le sçay vraiment. Et s’ilz nous courent sus comme desruee gent, ne pouent plus durer, car chascun a long dent. Par rage de famine qui si fort les sourprent, vouldroit livrer bataille tost et incontinent Et qui vouldroit atendre .iii. jours tant seulement, ilz s’en fuyront touz sans nul arrestement. » Se dist le conte d’Aisnes : « Or voy certainement que l’on vous tient a hardy, mais c’est pour neent. Car vous avéz paour, je le voix clerement, ou vous améz du roy bien pou l’avancement.
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- Episodes espagnols -
Ja avons nous eu l’estreine franchement, dequoy les autres sont esbaïz durement. Qui croyre me vouldra, je en diray mon talent : bataille liverrons bien et hardiement. » Dist Bertrant du Guesclin : « Par le mien serement. Se demain combatons, je vous dy vrayment, nous serons desconfyz touz entierement. Et seray mort ou pris, par Dieu omnipotent. Grant meschief en viendra sur le roy et sa gent. Mais pour tant que parlé en avéz ensement et ainsi reproché m’avéz villainement, foy que je doys a Dieu qui it le sacrement, demain leur livrerons bataille ierement. Et si aray la bataille a mon commandement, la porra on veoir de moy le bon talent, ne se je suis traïtre ne couart ensement. » Se dist le roy Henry : « Je feray vostre talent. » Dist Bertrant du Guesclin : « Ne puet estre ensement. Puis que je en ay juré, je tiendray mon convent. » 403
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Seigneurs, c’est vérité, de ce ne doubtéz ja, qui lors eüst creü Bertrant qui bien parla, touz eüssent conquis ceulx qui estoient là, ne le prince ne fust mais retorné deça. Celle nuyt en son ost chascun eschegueta, jusques au lendemain que l’aube creva, que parmy l’ost du prince chascun armer s’ala ; si que fu delivré, la fain lui approcha.* Maintes trompectes adont contreval l’ost sonna, chascun pour lui combatre moult bien s’appareilla. La premiere bataille le prince ordonna et au duc de Lencloistre, son frere, le bailla. Quatre milles hommes d’armes il lui abandonna, a chevaux touz couvers tout ainsi lui livra : decy jusques aus piéz la couverture va. Il n’est lance ne dart qui riens y greve ja.
[137r]
- Bataille de Nadres -
[137v]
Sur les champs devers Nadres le duc les envoia, dessus cousté les mist et moult bien les renga. Et ot .vc . archers d’Engleterre dela, de trayre ferement chascun bien s’aicha. Chacun tenoit la lance et l’escu acola. .I. chevalier engloys, ou le duc se ia, cellui porta la baniere qui bien ault l’esleva. Par dessus une mule sa baniere posa. Hue de Caurelay avec le duc ala, d’Obecicourt Huitasse y fu, n’en doubtéz ja : il estoit d’Ahynaut, mais il se marïa par le roy d’Engleterre qui femme lui donna. Si fu Gaultier Huet, que le duc moult ama, avec Jehan de Brenes, que point ne failli la, Thomas, cellui d’Ambonne qui moult bien s’i porta et Secot et Cresselle, chascun s’i amonstra. Noble fu la bataille que le noble duc a, de la clarté des armes chascun estincella : plus bel ost que ce fust ne vit nulz home pieça. Chascun les Espaignolz en son cuer menaça. S’ilz eüssent beü du vin de par dela, poy eüssent doubté Espaignolz par deça.* Le duc leur dist : « Seigneurs, savéz comme il va. Cellui qui au disner ja boyre et mangier vouldra, il fault qu’il le gaigne, ou que disner n’aura. Bouteliers, pennetiers demeurent par dela. Or y parra comment chascun s’i mectra, car blasme ou honneur aujourduy nous viendra. »
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404 Le prince appella le Castal par son nom : « Beau cousin, dist le prince, oiéz mon entencion. La .iie . bataille auréz en vostre parçon quatre milles hommes d’armes en vostre establiçon. Et garderéz une elle par par devers Arragon pour combatre Espaignolz qui sont grans a foison. Or avant, beau cousin. Aujourduy verra on
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- Episodes espagnols -
la prouesce de vous et de vostre bon nom. Ja avéz vous esté en mainte regïon, batailles desconites a loy de champïon. De prouesce, de d’onneur, de grace et de renon pouéz bien ressambler Rollant, le nepveu Charlon, Olivier de Vïenne ou Ogier ou Naymon, c’est huy pour mon honneur en dominacïon en dominacïon. Touz les biens que j’ay fait en ma regnacïon ne vauldra aujourduy la monte d’un bouton se ne me confortéz a loy de champïon. – Sire, dist le Castal, n’en aiéz souppeccon. Je ne doubte Espaignolz vaillent un esperon. Plus desire l’assault et d’armes de bon nom que estre servi de vin de pain et de poisson. J’ay le cuer desirant d’accomplir vostre bon. – Grant mercy » , dist le prince qui cuer ot de lÿon. Lors parti Castal, n’y it arrestison, a .iiiim . chevaux couvers jusques au talon. Ains ne fu si bel ost puis le temps Pharaon, qui d’Egipte chassa l’israël nacïon. La peüsséz veoir moult noble establisson, banieres ventelans et mains doréz pennons, les lances en leurs poings et aval le blason, les heaumes ou chief plus luisant que leton, et tenent leurs conroys aussi fort que grifon. Le Castal ot o lui mains hardiz compaignon : cellui de Pommiers y fu, c’on nomme Aymerïon, et le bon senechal de Bourdeaux, se dit on, et Garnier d’Amberoche avec son frere Oton, et le conte vaillent c’on dit de Molleton, et le conte de l’Isle avec lui maint baron, et le seigneur des Pons et Sandras d’Oridon, cellui de Mucidant, c’on appelloit Pieron, et cellui d’Aristac, c’on appeloit Faucon, et d’autres chevaliers et escuiers foison. La baniere du Castal fu levee en façon de l’ost le roy Henry voit on l’establisson. Il a dit : « Ha, Bertrant. Nostre ennemi felon
[138r]
- Bataille de Nadres se mectent en conroy a guise de baron. – Sire, se dist Bertrant, a Dieu beneïsson. Jhesucrist est lassus qui bien cognoist raison : nul ne nous puet aider ne grever se lui nom. »
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[138v]
Engloys et Guïennois s’ordonnent ierement. Le prince appella Chando isnellement : « Chando, se dist le prince, je me ie forment en vous, car c’est raison, par le mien serement, car vous avéz servi mon pere loiaument ens es guerres de France et ailleurs ensement, et aussi avéz nous bien et souisanment. La tierce des batailles vous octroy leement, car en vous a assez sen et entendement. Et menréz la bataille bien eforceement. Quatre milles en auréz en vostre demenement au derere des autres, par tel convenant que s’il y a personne avironneement qui recule des nous petit tant seulement, si lui faictes trencher la teste vistement. » Dist Jehan de Chando : « Je en foy serement. » Du prince se parti et sa bataille prent. Cellui de Partenay enmena ierement et .iic . chevaliers a esperons d’argent. Couvers sont les chevaux jusques au pié justement. La peüsséz veoir un ier assemblement, tant riche baniere qui balioit au vent, et tant riche penon qui reluit clerement, et tant de grosses lances, dequoy le fer resplent. Les escuz actoléz chevauchent ierement, la baniere Chando drecerent en present. « Seigneurs, se dist Chando, je vous ay en convent que aujourduy nous convient labourer fermement pour avoir a manger et a boyre ensement. Nous avons touz disnee a cel adjornement, conquerre nous convient de l’autre vistement
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- Episodes espagnols -
ou nous irons couchier sans soupper nullement. » La dist l’un a l’autre : « Pleüst au sacrement que je eüsse un henap de vin tant seulement et troys morseaux sans plus de bon pain de froment et il m’eüst cousté .c. mars de bon argent. » De telz en y avoit .x. milles en ce convent que de telz souhais faire avoient grant talent, car ilz n’estoient pas en païs plainement pour trouver riens de vert avironneement. Ce fu le semadi de Pasques proprement que devant Nadres fu le merveilleux content. 406
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D’icelle jornee que je vous signiie, la veille de Pasques, que on appelle lorie, fu le prince de Gales avec sa baronnie, devant Nadres es préz, a belle compaignie. La .iiiie . bataille a la jornee guye le conte d’Ermignac a la barbe lorie et son nepveu de l’Abret fu en sa compaignie, le quenx de Pennebrot, a la chere hardie. Et y furent .vc . a icelle envaïe, a chevaux touz couvers d’acier qui reslambie et d’une maille onnice meulx que ne saroie dire. La baniere du prince estoit en hault drecie, de France et d’Engleterre la portoit l’enseigne. Le prince des Galois ne s’i arresta mie, ains va de renc en renc et ses gens remercie. Et leur dist : « Bonnes gens, savéz que je vous dye, en l’onneur de Jhesu qui tout a en baillie, que vous recouvréz cuer et maniere adrecie. Et me veilléz aider sans point de tricherie. Vous avéz huy pour moy grande peine enchargie, mais c’elle pouoit estre aujourduy envaÿe, a touzjours en seroie en haulte seignorie plus que nul homme qui soit en ceste mortelle vie. 11487
corr. d’après P : Et vous recouvréz c.
- Bataille de Nadres -
[139r]
Et si vous pri touz, par bonne druerie, que aus Espaignolz ne soit ranson baillie, tant soit fort ne puissant ne si forte lignie, mais prenéz les François s’ilz vous venent envie. Et Bertrant du Guesclin, pour Dieu, n’ocïéz mie, car il est vaillant homs et plain de baronnie, ne le bon mareschal, quoy que vers vous follie : c’est Arnoul d’Odrehan, a la barbe lorie. Il a esté trés bon tous les jours de sa vie, vers son maistre loial sans penser vilennie : cellui qui son maistre sert sans penser a folie on le doit meulx amer que amans ne fait s’amie. »
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407 « Seigneurs, se dist le prince, vostre fain oubliéz. La vïande est a Nadre dequoy vous soupperéz. Véz cy Pietres le roy qui vous donnera assez or, argent, joiaux et ce que vous vouldréz. » Adonc se resjoÿ tout le riche barné. « Je ne sçay, dist Chando le chevalier louhé. Encores ne voys dela Espaignolz ordonné. Je ne sçay que ce doit qu’ilz ne sont arrousté. Espoir que voulent atendre que souleil soit torné ? » Son heraut appella qui Chando fu nommé.* « Va t’en, dist il, dela, ne soiez arresté.* Et dy a Bertrant et aus autres delay s’ilz ne venent deça o penonceaux levéz, ainsi qu’il appartient dessus les champs arméz, que nous leur courrons sus environ de touz léz. » Et le heraut respont : « Si comme vous commandéz. » Il broche le cheval qui bien estoit ferré. Oultre la maladrie est le heraut passé, au lieu par devers Nadres est le heraut alé. Il a trouvé Henry, d’Espaigne couronné, avec le conte d’Aisnes, d’Arragonne fu né, et Bertrant du Guesclin qui bien fu advisé, 11504
corr. d’après P : l. doit meulx que a., amer ajouté.
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- Episodes espagnols -
et le bon mareschal d’Odrehan n’y fu oublié, et Guillaume Boytel qui la estoit demeuré, et cellui de Lannoy qui la fu appellé, le mareschal d’Espaigne qui tant fu redoubté. Adont a le heraut les barons appelléz et leurs a dit : « Franc roy, envers moy entendéz, et vous nobles barons, dont je voys cy assez, et vous sire, Bertrant. Je suis cy arivé pour vous dire d’eux qui tantost seront nomméz. Les seigneurs par dela ont les corps adviséz pour la bataille livrer rengéz et ordonnéz. Je vous foy assavoir que si vous ne venéz ainsi qu’il appartient et que vous le savéz, que tost vous courront sus sans point estre arrestéz. Je vous prie, seigneurs, que vous nous delivréz, car d’estre en ce païs suis vraiment lassé. – Heraut, se dist Bertrant, je croy que fain avéz. Qui bien m’eüst creü vous fusséz afaméz, car je vous foys convent que l’on eüst fait fosséz dont chascun de vous fust par dela demouré. Mais certes, c’est a tart, le jour en est passé. Vous n’avéz que mangier, c’est ine vérité : advis m’est que pour vous en garderons assez. – Sire, dist le heraut qui bien fu advisé, n’y a cellui en nostre ost, ja ne vous en doubtéz, qui ja bien tost n’eüst mangé .ii. eux peléz. » 408
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Quant Bertrant a oÿ le heraut qui parla, de ce qu’il lui ot dit a rire commainça. Le vin it apporter, a boyre lui donna, et le heraut beu, bellement il l’avala. « Amis, se dist Bertrant, or ne me celéz ja. Que vauldroit bien ce vin en ost par dela ? – Sire dist le heraut, par Dieu qui tout crea, pour la cause du jour de Pasques qui sera demain au matin quant il adjornera,
[139v]
- Bataille de Nadres -
[140r]
ne boyt on point de vin en nostre ost par dela. Mais demain on boyra qui avoir en porra et qui n’en aura point si s’en depportera. Vous n’avéz point eu en, ou temps qui passa, tout a vostre desirer, a Cocherel dela ou la bataille fu, grant fain vous appressa ? Adont de nous gaber vostre corps se deporta. – Hé, Dieu, se dist Bertrant, cestui bien paié m’a. – Sire, dist le heraut, oiéz que on vous dira. Or vous appareilléz, il en est temps pieça. Chando si le vous mande qui a vous m’envoia. – Heraut, se dist Bertrant, par Dieu qui tout crea, la bataille aréz qui chier leur coustera. – Or tost, dist le heraut, ou noz gens venront ça. » A icelle parole le heraut s’en rala. Et Bertrant du Guesclin ses gens bien ordonna. Bien .xm . Espaignolz des meilleurs qu’il y a mist en une bataille et bien les arrouta une rivere au dos qui couroit par dela. La ot si belles gens qui bien les regarda que ce fust pour conquerre de la mer et deça. A Arnoul d’Odrehan Bertrant les demonstra. « Sire, se dist Bertrant, par Dieu qui me forma, véz cy trés belles gens et plenté en y a. Et sera grant dommage quant elle s’en fuyra. »
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409 Aprés les Espaignolz, dont je vous voys comptant, en prist Bertrant .xm . de noble convenant. A senestre les mist ainsi que en coustiant les .xm . premiers, dont je vous dy devant. Ainsi furent .xxm . et auques d’un semblant.* Puis vindrent Genevoix sur les genels seant, et furent bien .xxm ., se nous dit le rommant, qui lançoient des dars tout ainsi que geant, tout ensement que on trait a .i. oisel volant. 11583
corr. d’après P : Arnoul d’Odrehan b., a ajouté.
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- Episodes espagnols -
Ceulx furent ordonnéz ainsi que en un pendant. La vint le roy Henry, que l’on ala rehaytant. Et leur dist : « Bonne gent, ne soiéz recreant. Véz la Pietre ce fol en ce pré verdoiant, qui nous a amené un peuple combatant. Je vous ay en convent sur Dieu le tout puissant que se vous estez prins, mathéz et recreant, touz pendre vous feray, ja n’y aréz garant. Chacun sera pendu a loy de recreant, il ne vous demourra ne femme ne enfant. » Ceulx se sont esmeüz bonne chiere faisant. Et Bertrant du Guesclin ne se va arrestant, le Besgues de Villaines en va arraisonnant et Arnoul d’Odrehan, un chevalier puissant, et touz les Françoys ala arraisonnant : ne sont que .xiic ., que Bretons que Normant. « Seigneurs, se dist Bertrant, aléz moy escoutant. Tenons nous touz ensemble et n’alons deportant. Avec ces Espaignolz ne vous aléz boutant, ilz ne sont mie gent ou me voise iant. » Et ilz ont respondu : « Vous aléz bien parlant. » Seigneurs, a icel jour jusques prime sonnant furent touz apprestéz chevaliers et sergens.* Adont vont a touz lieux trompectes bondissans. Bertrant du Guesclin ot sa trompecte devant, qui moult hardiement s’ala devant boutant, qui prinst si a sonner et d’une voix si grant qu’il n’y avoit si sourt qui ne l’oÿ clerement. L’assemblee cornerent haultement en oyant, ainsi que a demie lieue, selon mon escïant, descendirent a pié les petis et les grans, hors mis ceulx qui estoient par moult ier convenant sur les chevaux montéz, couvers a leur commant. 410
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A l’assemblee faicte de chascune partie 11611
corr. d’après P : q. Bertrant que N.
[140v]
- Bataille de Nadres descendirent a pié, comme l’istoire crie, fors ceulx qui les chevaux ont couvers celle ie. Car le prince de Gales et sa bachelerie ne roy Pietre ensement, ceulx descendent mie. Les archers vont devant, .vm . a une ie, ars et saiectes ont chascun une poignie. Contre les Espaignolz traioient a une ie plus dru volent saiectes que ne fait noys negie. Chascun la lance ou poign et la targe embracie, les penons en leurs mains, la baniere drecie, venent aus Espaignolz par grande druerie. Aus Espaignolz a pié commainça l’aremie. La fu de toutes pars mainte enseigne huchie. Oncques puis que Jhesu ot sa char deplaïe ne fu telle bataille en ce jour commaincie. La it le roy Henry une telle envaÿe c’onques prince ne it aventurant sa vie, tellement que a ce jour monstra sa felonnie.
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[141r]
Seigneurs, par devant Nadres l’estour commainça, descendirent a pié, comme l’istoyre cria. Je croy que tant de gens en un mont n’a ça d’Espaigne seulement que Henry amena : .lx. mille adont et plus on les nombra. Tant a pié que a cheval moult noble peuple ot la, voyres, touz combatans d’estofe on les nomma. Et .v. mille que archers que arbalestriers y a. Ainsi crespïenté a ce jour se pena de l’un l’autre essiller en ce païs dela. Si un tel peuple qui lors a ce jour assembla fust passé oultre mer sur les paiens dela pour Sarrazins destruire, ja mon corps ne croyra que paien fust demouré jusques en Archala, ne jusques en Babiloine, que roy Abel fonda. Mais ourgueil et péchié qui au monde régna, et regne touz les jours et encores regnera,
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- Episodes espagnols -
destourne a essaucier la loy que Dieu donna. Et entre les seigneurs tant de conseil y a, se l’un louhe le bien, l’autre le deslouhera. Es estas de ce monde tant de symonie y a, d’envie, d’avarice plus que l’on ne vous dira et tel y prent delit qui dampné en sera. Mais de ces estaz si le mien corps se taira et dira de l’estour comment il en ala. Engloys traioient fort, chascun moult se pena. La baniere au Castal ferement s’approcha et venoient a pié, nul cheval n’y mena hors mis chevaux couvers, si comme dit on vous a, qui a un lieu se tindrent, regardent que on fera, car les chevaux arméz qui estoient la, estoient ordonné ; la telle ne sera pour percer la bataille, quant temps il en sera, des nobles Espaignolz que Henry amena. De la gent au Castal le mien corps vous dira. Chascun tenoit la lance et l’escu embraça et venent pié a pié a ceulx de par deça. Et quant le roy Henry perceut et advisa que l’ost du Castal ainsi les approcha, il sist sur le cheval que ierement brocha, tint la lance en sa main, ierment l’abaissa. A pointe d’esperon, que rien ne redoubta, la primiere bataille le Castal mena, vint Henry assaillir et dedens se lança. Le premier de sa lance tellement assena que a terre l’abbati et le cuer lui perça. La second aprés lui a terre souvina et le terces et le quart et quant qu’il encontra ; dix en ot abatu quant la lance brisa. Puis a traite l’espee que un Sarrazin forga. Tant dedens la bataille a touz léz en frappa que a force de cheval tout oultre trepassa. La bataille au Castal « Espaigne. » hault cria, en disant : « Males gens, mal ait qui vous porta.* J’emploieray ma mort en trés que je suis ça. »
[142r]
- Bataille de Nadres Quant Bertrant du Guesclin roy Henry avisa, au Besgues de Villaines a dit : « Or y parra. Secourons nostre roy, je croy qu’il y morra. » Lors se sont esmeüz que nul n’y arresta. La commainça bataille qui durement cousta, ne se donnerent garde quant Henry retorna.
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412 Moult fu le roy Henry hardy et redoubté. De la voye qu’il it fu forment eschaufé. Mais Bertrant du Guesclin s’en est a lui alé. « A, Sire, dist il, estez vous assoté qui vouléz cy mourir. Un petit vous soufréz. » Se dist le roy : « Je en suis tout avisé. J’aime trop meulx morir que estre emprisonné. Bien sçay que je suis mort se je suis atrappé. Mais je me vengeray, telle est ma volunté. » Grande fu la bataille, esprise a touz coustéz. Huon de Caurelay s’i fu moult bien porté. Si fu Gaultier Huet, cellui en octist assez. Par devant l’estendart fu le prince demeuré, par delay le roy Pietres et d’autres assez. Aux Espaignolz ce jour fu Chando arresté. Trayre les fait Chando, moult les a fait fort versé. Atant véz vous Bertrant qui tant fu naturé, a .viic . combatans ou il s’estoit fïé. Vers le duc de Lencloistre s’est tellement meslé que des plus souisans ont a terre versé quant les lances saillirent, aus espois ailéz. Et ierent tellement, se dist l’auctorité, que l’on leur laisse le champ comme lÿon cretéz. En un conroy estoit tellement acouté que en eulx ne puet entrer nul homme de mere né. Le Castal les vit et les cogneu assez. Il a dit a ses gens, a ceulx la assembléz : « A Cocherel les vy, ou je fu attrappé. »
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Bertrant et sa compaignie se tenent ierement. le Besgues de Villaines ot moult de hardement, del espee fery bien et hardiement. Et Arnoul d’Odrehan s’i porta vaillement, et Guillaume Boytel et les autres ensement. Chascun a cellui jour ierement se defent. Et Jehan de Chando, au ier contenement, entre les Espaignolz se bouta vaillemment. Le mareschal d’Espaigne y vint moult richement. Devant Chando fery Arnoul de Madalent, d’une bonne espee de guerre, trenchant roydement, le consceu sur l’escu, sur le pis vistement, mort l’abati a terre, plus n’y ist parlement, dont Jehan de Chando en ot le cuer dolant. Il it le mareschal assaillir ierement. A lances et a dars fu lancé tellement que a la terre cheü, voyres, par tel convent qu’il eüst esté mort a dueil et a torment, quant Henry, roy d’Espaigne, y vint ireement. Le cheval qu’il avoit a ce jour proprement valoit pour la bataille plus que in or ne argent. la place derompy et le mareschal prent, amont le releva et lui dist haultement : « A, Gentilz mareschal. Comme tu as hardement. » La it aler Chando bien ensus plain harpent et sa bataille it reculer ensement : se les autres Espaignolz avironneement eüssent le sien cuer et le sien bon talent, ja le prince de Gales ne touz ses parent n’eüssent veü de Bourdeaux le chassement, ne s’en peüst vanter en jour de son vivant qu’il eüst remis le roy Pietre ou chassement. Et le prince venoit moult eforceement. Trompes et chalemies sonnoient haultement et faisoient mestier par tel convenant c’on n’y oïst tonner tonnerre qui descent.
[142v]
- Bataille de Nadres -
[143r]
Sa baniere faisoit porter moult noblement, de France et d’Engleterre painte jolyement. La baniere d’Espaigne y estoit en present. La ou le prince voit le grant tournoiement, fait approchier les siens en disant haultement : « Ja sans moy ne sera iné icellui torment. Et ne remetray en Espaigne noyent roy Pietre qui en est chassié villainement que je n’ayë feru d’espee aucunement. » Il a dit a ses hommes : « Menéz moy droitement en la plus grande presse, la ou a plus de gent, contre ceulx a cheval qui la sont a present, qui se tenent tout quoy et si serreement. A eulx je me vouldray combatre vraiment. La place me lerront, se la mort ne me prent. »
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414 Ensement dit le prince qui tant ot le cuer ier. Devers les gens d’Espaigne qui furent mains millier, sur les chevaulx couvers jusques ou sablonier se it adonc le prince mener et convoier avec le roy Pietres qu’il ama et tint chier, et le quenx d’Ermignac, d’Alebret le guerrier, Perrigot de l’Abret n’y doit on oublier, et le ier seneschal qui estoit de Poictiers, et celui de Bourdeaux qui it a priser, cellui de Mucident, un hardy chevalier. Et le conte de l’Isle y vint sur le destrier, cellui de Partenay qui le prince avoit chier, et le sire de Pons, d’Auberoce Garnier, cellui de la Riole et de Blaines Richer. Bien .vim . hommes d’armes qui touz eurent courcier, s’en vont vers Espaignolz a force desranger, qui estoient .xm ., selon le mien cuider, tout aussi bien armé pour la bataille aider c’onques n’ot telles gens Alixandre d’Alier. Et d’autre part avoit au cousté senestrier
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- Episodes espagnols -
dix milles de leurs gens arméz au senestrier. Mais quant virent Engloys devers eulx approchier ilz laisserent l’estour, si s’alerent neer. 415
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En tant que la bataille estoit toute assemblee et que l’un a l’autre avoit force esprouvee et d’octire l’un l’autre volunté et pensee, vint le prince de Gales a toute son armee assaillir Espaignolz, la gent plus redoubtee. Roy Pietres qui les vit demener grant ponee comme preu et hardy, a chiere redoubtee, s’en vint au prince droit, criant a la volee : « Gentilz prince, dist il, homme de grant renommee, je vous pri s’il vous plaist que sans faire arrestee que je puisse premier commaincer la meslee encontre cestes gens qui sont de ma contree. A leur baniere voys ceste gent defaee : de Sebile en y a qui m’a ville ont livree, et de Toulecte aussi et de Burs la muree. Voluntiers en verroie la place delivree. Or m’y laisséz aler de bonne randonnee, la volunté que j’ay leur sera delivree. » Et le prince respont : « Ce me plaist et agree. » Adonc a le roy Pietres sa baniere levee plus haultement que nulle qui la soit demonstree. A pointe de cheval et a lance avalee se fery dedens eulx comme beste forsennee, en disant haultement : « Filz a putain prouvee. Pour un bastart m’avéz ma terre destournee. Vous en mourréz touz de mort envenimee. Et le bastart aura la teste jus coppee, et si en sera pandu dessus une ramee. » Un chevalier d’Espaigne fery a la volee. Quant cellui ot du roy la maniere advisee, pas ne l’atendist pour l’or d’une contree : 11837
corr. d’après P : b. aura teste jus, la ajouté.
[143v]
- Bataille de Nadres es Espaignolz se mist, si a la fuite trouvee. Et dist aus Espaignolz : « Fole gent desraee. Véz cy vostre seigneurs de loial espousee, qui s’i combatre la chiere a bien dervee. Je louhe que sans oignons faisons une brouhee. »
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416 Quant les Espaignolz virent leurs seigneurs approchier, ceulx qui furent devant moustroient le derrier. A la fuite se sont mis les Espaignolz lanier. Et le prince de Gales les it si approchier a pointe d’esperon, a lances convoier, que jusques a la rive les menerent baigner. La entroient dedens comme poisson en vivier : qui l’eave ne puet boyre, il le convient noyer. L’ayve it leurs cheveaux jusques ou fons tresbuchier. Et tant en y noya sans venir au gravier que par dessus les mors pouoit on chevaucher. De .x. miles qui furent a celle eaue approchier et des autres .x. mille au cousté senestrier a droit port de salut n’en revint .i. miller. Ensement les it on dedens l’eave baigner. La fu Gaultier Huet, un gentilz chevalier : d’une lance qu’il ot les aloit estiquier. Trente .M. en ont ce jour fait ens noyer, dequoy on ne voit jambe ne hanepier. « Aléz vous en, dist il, ilz a putain lanier. Vous ne valéz touz la monte d’un denier. »
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417 [144r]
Le bers Gaultier Huet it forment a doubter, o lui Jehan de Brenes, c’on n’y doit oublier, Hue de Caurelay, le gentilz et le ber, ceulx ont fait Espaignolz dedens l’ayve afondrier. Ceulx qui de la riviere se peurent eschapper s’en fuyent roydement pour leur vie sauver. A Toullecte s’en vont sans point de l’arrester.
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- Episodes espagnols -
Et le bon roy Henry qui tant fait a loer, estoit en la bataille, n’ot cure de reculer. Et Bertrant du Guesclin a tout oÿ compter : comment les Espaignolz ne savoient nager, comment ilz sont fouiz quant on les vouloit tuer. Se Bertrant fu dolans, ne devéz demander. Au Besgues de Villaines a dit sans demorer : « A, Chevalier, dist il, or pouéz demander comment les Espaignolz se sont volu porter. Ilz s’en sont tous fouïz, Dieu les puisse craventer. La plus grande bataille qui plus it a doubter, s’en sont alé fuiant, plus ne ouzent contrester. » Et lors a dit le Besgues quant il oÿ compter : « Au deable, dist il, il s’en puissent ilz aler. Par eulx nous conviendra grant honte porter. Faictes le roy Henry de la bataille aler et se mectre a garant pour sa vie sauver, car se Pietre le tient, il ne puet eschapper qu’il ne le face mourir ou aus fourches mener. Et si nous defendons jusques aus membres copper, parquoy on ne nous puisse nullement reprouver que faulcement veillons la bataille laisser. Ainçois que je me rende, le feray comparer. » Se dist le bers Guesclin :« Ce fait a creanter. » 418
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Quant Bertrant du Guesclin le chevalier oÿ, tantost isnellement la presse derompy. A l’espee d’acier tellement y fery que la presse aus Engloys qui sont leur ennemy, derompy tellement qu’il vit le roy Henry avec le mareschal qui fu avec lui. La resne du cheval par force lui toly et hors de la bataille le mena sans detry. Haultement lui a dit : « Franc roy. Pour Dieu mercy, mectéz vous a garant, voz gent vous ont traÿ. 11897
q. je le face rende, le face exponctuée et me suscrit.
- Bataille de Nadres -
[144v]
.Lx. mille Espaignolz, arméz et fervesty, sont dedens la riviere tellement enfuÿ que touz sont neé et en eave enfouÿ. Et les autres dix milles, ordonné et baty au cousté senestrier pour esmouvoir estry ne vaillent mie la montance d’un espy. La bataille est perdue, je le vous certefy. Et le faulx conte d’Aisnes vous a fait cecy, car qui m’eüst creü, il ne fust pas ainsi. A, Gentilz, noble roy, je vous prie mercy mectéz vous a garant, pour Dieu je vous en pry, ou tost vous veréz priz par le vostre ennemy. Et sachiéz s’il vous tient, il dira de vous fy : trayner vous fera a la couhe d’un ronssin et pendre laydement comme traÿtre failly. Or tost aléz vous en et en faictes ainsi. – A, Bertrant, dist le roy, que feray je de ty. Hé, Chevalier. Tu m’as si loiaument servy et puis je te fauldray. Je t’ay amené cy. – Sire, se dist Bertrant, ne penséz point a my. J’ay deservy la mort, se Dieu le conscenty. Mais vous ne l’avéz pas tellement deservy car pour vostre heritage que Pietre vous toly avéz perdu honneur, se Dieu n’en a mercy. » Se dist le roy Henry : « Par Dieu qui ne menty, puis que aler m’en convient et que touz m’ont failly, je me iray maintenant venger a ces gens cy. »
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419 Quant le roy a oÿ parler le bon Bertrant, il tint trayte l’espee qui d’or va lambïant. Entre Engloys se bouta par ennuy si tres grant que la presse depart et les va desfoquant. A destre et a senestre va Engloys trebuchant, ainsi que tout desrué va les rens departant. Et Bertrant du Guesclin l’atendoit au devant. Au Besgues de Vilaines a dit tout en oiant :
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- Episodes espagnols -
« A, Sire, dist Bertrant, voy cy roy souisant. Bien est digne d’avoir un royaume vaillent. » Et le roy Henry va arrieres repayrant un chevalier engloiz qui Henry va suyant. Roy Henry le hardy au heaume luysant du chief lui arrache et lui dist en oustant. Venu est a Bertrant et lui dist maintenant : « Prenéz ce prisonnier et faictes vostre commant Je ne puys arrester pour faire plus avant. – Aléz se dist Bertrant, franc noble roy sachant, pour le plus hardy roy de ce siecle vivant. Je pri a Jhesucrist, le pere tout puissant, que partir vous puisséz aujourduy a garant, par quoy icellui roy Pietres qui de cuer vous ait tant, ne vous encontre derriere ne devant. » Ainsi s’en va Henry sur le cheval brochant. O quatre chevaliers ou il s’aloit fïant s’en departy Henry, la champaigne fuyant. 420
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Va s’en le roy Henry, la champaigne a guerpie. A quatre chevaliers, en qui forment se fye, s’est mis lors a chemin, a chiere couroucie. « Aye. Dieu, dist il, doulce virge Marie. Que m’est il advenu en icelle partie ? Or est toute perdue la terre que j’ay gaignie. » A un chevalier dist « Chevauchéz, je vous en prie, chevauchéz serreement toute nuyt anuitie. A Toulecte en iréz, pour Dieu vous en supplie, dictes a ma moullier qui laiens est logie, que a Tristemare voyse qui est de ma partie, et se mecte a garant elle et sa partie. » Et il a respondu : « Je ne vous fauldray mie. » Or lerray de Henry jusques une autre fye et diray de ses gens comment fu desconfye . Si tost que la bataille premiere fu fuÿe, les Genevoix qui furent en bataille rengie
[145r]
- Bataille de Nadres ne tindrent nul conroy, je le vous certiie, ne plus que fait la beste quant elle est chassie.
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[145v]
Devant les plains de Nadres, par devant la riviere, fu grande l’envaïe et la bataille iere. Mais adont Espaignolz se tindrent touz derriere et si s’en vont fuyant, comme breby sur gaschiere quant le loup les assault devant et sur coustiere. Mais les bons chevaliers de France droiturere* tenoient devant eulx ierement leur baniere, « Audrehan. » vont criant de voix haulte et legiere. Et Bertrant se combat, n’a cellui qui ne fere. Chando y est venu de volunté entiere. Quant il choisi noz gens aussi droit que une osiere, aus armes recogneu noz gens en la gaschiere. Leurs lances sont brisees, gisans sur la quarriere. Haultement leur a dit : « En l’onneur de saint Pierre, au prince vous rendéz, ou vous auréz hachiere. » Et Bertrant qui l’oÿ raicha sa visiere et feri un Engloys par telle maniere qu’a terre l’abbati enmy une fouchiere. le Besgues de Villaines sur celle gent archiere i feri tellement que mains en mist en piece. Le gentilz mareschal a la hardie chiere abati devant lui une noble baniere et cellui qui l’apportoit abbati sur l’erbiere. Mais Espaignolz s’en vont, la male mort les iere. Ceulx qui les vont suyant les tuent par derriere. Oncques rat en fu si bien prins a la ratiere que furent Espaignolz, telle gent lousengiere.
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422 Seigneurs, bien prés de Nadres, vers la maladerie, fu la desconiture dessus la praerie, tellement c’oncques gent ne fu mieulx desconie 11986
corr. d’après P : m. le bon chevalier d.
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- Episodes espagnols -
et par les Espaignolz et par leur couardie. Roy Pietre leur disoit : « Fausse gent renyee. Mal avéz contre moy la baniere drecie. Vous en seréz octis a dueil et a hachie. » Le prince des Galois a belle chevauchie,* et roy Pietres o luy et toute sa maisnie, Hue de Caurelay y fu, je vous afye, et le duc de Lencloistre, baniere desploie, le conte d’Ermignac a la barbe lorie. Si fu Jehan de Brenes qui siet en Normendie, avec Gaultier Huet qui l’espee ot sachie. Touz ceulx s’en sont venuz commaincer l’envaÿe a Bertrant du Guesclin, que Jhesu benye, au Besgues de Villaines, au chastellain de Trie, et au bon mareschal qui tant ot seignorie. Et le prince vint a eulx, haultement leur escie : « Rendéz vous, rendéz vous. Je le vous signiie. Se vous ne vous rendéz, vous feréz grant folie. » Mais le Besgues lançoit par si grant felonnie d’une lance qu’il ot receu a celle ie. En l’estour se fery, comme l’istoire crie, avec une gent qui fu de leur partie, et fu mis a garant, si que prins ne fu mie, non mie si trestout ; mais ains que fust complie* fu au prince livré qui en ot chiere lie. 423
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Le prince va criant : « Franc mareschal gentilz. et vous Bertrant aussi, pour Dieu de paradis. Car vous rendéz a moy, ce sera vostre prouit. » Si dist Pietres le roy : « Véz cy mon ennemy par qui j’ay tout perdu mon roiaume de pris. A eulx me veil vengier. » Dont c’est au devant mis. Mais Bertrant du Guesclin s’en est avant sailli, de l’espee lui a sur son escu assis, que du cop qu’il receu en est l’escu sailli. Et lui dist : « Rendéz vous, vous y avéz trop mis. »
[146r]
- Un banquet morbide Bertrant voit tout entour ses gens prins et octis. Quant ses hommes perçoit matéz et desconiiz, atant c’est escrié le chevalier eslis : « Au bon prince me rens, car c’est le plus gentilz. »
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424 Ainsi fu prins Bertrant qui le cuer ot dolant, et le bon mareschal, des autres ne sçay quant. Le roy Pietres s’en vint au prince souisant. « Le mareschal de France et le vassal Bertrant,* dist le roy Pietres, pour Dieu les vous demant. » Mais le prince dist : « Il n’est mie appartenant que les vous delivre, je ne le feray noiant. A moy se sont renduz sain et sauf et vivant : si sont mes prisonniers et par bon convenant j’en saray ordonner trés bien a mon commant. – Par foy, dist le roy Pietre qui le cuer ot joiant, je donray de Bertrant d’argent tout son pesant, et ne deüst avoir en Espaigne la grant calice sur autier jamais en mon vivant. » Dist le princes de Gales : « N’en parléz plus avant. » Le Castal appella et lui dist en riant : « Sire, Castal, dist il, cousin, venéz avant. Gardéz moi bien Guesclin car je le vous commant. » Lors dist le Castal : « N’en parléz plus avant. il sera bien gardé, je le vous acreant. » Venu est a Bertrant, si lui dist a itant : « Sire, Bertrant, dist il, or va le temps changent. Par devant Cocherel me tenistez dolant, or vous tiens cy endroit du tout a mon commant. » Et quant Bertrant l’oÿ, si respont en oiant : « Vous ne m’avéz pas prins a l’espee trenchant. Mais je vous conquesteray sans .i. point plus avant. »
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425 Aussi tost que Bertrant et les siens furent prins fu tost le remanant vaincus et desconis.
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- Episodes espagnols -
Espaignolz vont fuyant, si en y ot moult d’octis et de noyés aussi, s’en eschappa de vifz. Dont demanda dam Pietres : « Ou est le faulx Henry ? Je seray moult dolant si decy c’est party. » Tracer a fait les champs, les vaux et les larrys, mais les plus si s’en vont qui ont les curs fainys. En Nadres sont entréz les grans et les petis. Ilz ont trouvé les biens et les chappons roustyz, char salee, bon pain au disner sont assis. Mais le prince de Gales si c’est sur les champs mis et it mectre les tables assez prés des octis. Le mangier et le boyre lui fu illec tramis. Grant joye demenerent sur les champs dont je dy. Et le Castal de Beuf qui tant estoit hardy, en appela Bertrant, a raison l’en a mis. « Beau sire, vous estez mon amis, car vous estez des noz, j’en suys certain et fys. Or me juréz l’onneur que vous avéz promis, et le foy que avéz fait la noble leur de lis, que vous ne partiréz si auréz vostre congié pris au prince suisant ou vous estez assis et que avec nous vendréz avec ses merciz, et vous ne seréz ja en autre prison mis. – Sire, se dist Bertrant, par Dieu de paradis, que je ameroie mieulx estre mort et feny que de ce serement je me fusse mespris, ne le bon mareschal qui tant est gentilz. – Par foy, bien vous en croys, dist le Castal soubtilz. Delay moy en ma chambre sera fait vostre lit. » 426
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La bataille de Nadres fu ainsi achevee. Toute nuyt demoura le prince sur la pree et furent bien servi en icelle vespree. Et le lendemain aussi c’est le ost reposee, pour eulx a deslogier n’y vint personne nee. Le roy Pietres parla, a qui la chose agree :
[146v]
- Le prince et Pietres en route vers Burs -
[147r]
« A, Sire, dist il, mon honneur avéz sauvee mais que vous me menéz a Burs qui est fermee. La cité vous sera en mon nom delivree, et Toulecte ensement ne vous sera refusee, et Bervesques aussi vous sera desfermee : n’y a ville ne soit contre vous desfermee. Et Sebile aussi ne vous sera devee . Et quant ceste besoigne sera bien achevee, hommage vous feray tout a vostre desiree. » Et le prince respont : « Telle est ma pensee. En vostre poctession reviendréz ceste annee. »
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427 Apréz ceste bataille, dont je vous voys comptant, si departy le prince et ses hommes vaillant, et chevauchent vers Burs et en ault devisant. Du Besgues de Vilaines s’en vont les plus parlant, et du bon mareschal d’Espaigne la devant, qui par force de l’estour s’alerent departant. Mais ilz eurent en in encontré moult pesant, dequoy ilz furent prins, comme dit le romant, et amené au prince qui en ot joyë grant, ainsi que assez briesment je vous iray comptant. Or chevauche le prince a tout son ber bobant. Vers Burs vont chevauchant, ou on fut moult dolant. Par la ville plouroient homme, femme et enfant, bourjoises et bourjois, chevalier et sergent. L’un a l’autre dit : « Véz cy le tirant, dam Pietre le felon, le hardy mescreant, qui oncques ne it bien en jour de son vivant. Tous nous destruyra, ja n’y arons garant. Perdu avons Henry le noble roy vaillant, le large, le courtoys, le doulx et le vaillant. A, Prince de Gales, d’Engleterre la grant, vous avéz fait pechié, oncques ne feistez tant, qui nous avéz destruit roy Henry le puissant et ramené cellui qui ne vault tant ne quant. »
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En la cité de Burs a grande marrison quant sceurent la venue de Pietres le felon et du prince de Gales, chevauchant le royon avec ses grans os et le fort roy Peyron. Ainsi qu’il chevauchoit et o luy ses baron lui furent amené deux nobles prison : le mareschal d’Espaigne fu l’un, se dit on, le Besgues de Villaines qui cuer ot de lÿon. Et furent prins ja bien prés de Saint Fagon. Les chevaliers du prince qui tant ot de renom, avoient prins ces .ii. et mis a ranson. Au prince les rendirent en sa delivroison. Quant le Besgues choisi, si le mist a ranson. « Estez vous la, dist il, trop bien vous cognoist on. J’estoie moult dolant en ma condicïon quant eschappéz estoiéz de la grant chapplisson. Vous m’avéz fait des maulz assez et a foison et mon pere ensement du service Charlon. Mais foy que doys a Dieu qui soufry passïon, entre vous et Bertrant auréz forte prison. Ne m’eschapperéz pas, ainsi que le coulon qui ist de columbier et va sur le boisson. J’ay pain et vin et char assez et a foyson. – Sire, se dist le Besgues, a Dieu beneïsson. Meulx vault estre en prison que mort, c’est bien raison. On y est bien .vii. ans que depuis en ist on. Mais l’omme qui est mort jamais n’avra on. » Le roy Pietres parla n’y it arrestison « Sire, prince, dist il, donnez moy ce larron. C’est l’amiral d’Espaigne, le traïtre felon, qui encontre nous a aydé le faulx quoystron. » Et le prince lui a dit : « Je le vous donne en don. » Puis le it il mourir a grant destructïon a Sebile la grant, ainsi comme vous diron. 12162
corr. d’après P : e. vous la dist trop b., il ajouté.
[147v]
- Le prince et Pietres en route vers Burs -
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[148r]
Si comme le prince va o son eforcement aler envers Burs la ville droitement, s’en va le roy Henry qui le cuer ot dolant. Son dommage regrecte et la françoyse gent. « A, Bertrant, dist il, homme de grant escïent. Vous me disoiéz trés bien ce grant encombrement. Car se je ne me fusse combatu nullement, ja le prince de Gales ne les siens ensement ne nous fussent eschappéz, je le sçay vraiment, ains fussent de famine mors doloreusement. Or n’ay en tout le monde ne ami ne parent. Hier estoie nommé roy bien et haultement, hier estoie servy a mon commandement, Aujourduy compte n’en tient on plus que d’un pullent. Hier avoie a digner bien et largement, aujourduy n’ay dequoy puisse mectre a ma dent. Fortune merveilleuse, le corps Dieu te cravent. Tornee es contre moy, infortuneement. A, Trés doulce dame. Dieu vous gart de torment. Hier estoiéz vous regne, huy n’avéz noyent. Hier avoiéz vous rouyaume en vostre gouvernement, huy ne tenéz de terre qui vaille .i. seul harpent. Certes, j’ay plus pour vous le cuer mat et dolant que je n’ay pour moy, se Jhesucrsit m’ament, car adéz puet avoir un homme recouvrement par la force Dieu ou d’aucun bon parent, mais en femme n’y a plus un recouvrement. » Ainsi disoit Henry au ier contenement. Et quant il ot ce dit, il a dit autrement : « Or ay je dit que fol, par le mien serement, quant ainsi m’esbahys, car le sage m’aprent que pour grande richesse lïesce ne s’appent, ne pour grant pouvreté esbahir nullement, car le monde est grant pour gouverner sa gent. Et si ay de bons amis plenté et largement. Encores est le roy de France vrayment
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et le bon duc d’Anjou, au ier contenement. Bertrant n’est mie mort qui m’aime loialment. S’il pouoit eschapper par or ne par argent, tost m’auroit recouvré en cestui chassement, mais que le prince ait fait son achevement et qu’il soit repayré a son eforcement. Tost auroie rescous ma perte vraiment. » Ainsi disoit Henry qui s’en va seulement. Or nous dit la matiere qu’il ala tellement que a Tristemare vint l’onneur qui lui apent. La trouve sa moulier, la roÿne au corps gent. Quant la dame choisi adonc si simplement, adont ne peu parler, ains se tint coiement. Quant la dame le vit, si cogneu son talent. 430
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Quant la franche roÿnne a son seigneur choisi, toust et isnellement s’aprocha deléz lui et lui dist : « Monseigneur, dictes moy qu’est cecy. Par foy, or voy je bien le cuer avéz failly, qui vous voys maintenant entrer en tel souscy. Laisséz ester, beau sire, pour Dieu je vous en pry. Se vous avéz perdu, n’aiéz le cuer marry. Une autrefoiz viendra qu’il n’yra mie ainsi. Dieu vous veult esprouver se vous estez a lui. Or vous reconfortéz, pour Dieu sire mercy. Vous auréz temprement vostre cuer esjoÿ, car Dieu vous aidera, la ou du tout m’afy. Les Engloys ne sont pas tousjours en un party : si tost que les Engloys seront decy departy, vous verréz comment vous recouvrerréz ami. » L’evesque de Toulecte hors d’une chambre cy, un trop vaillent prelat qui moult ama Henry. Bien le reconforta et moult bien le servy. 431
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L’evesque de Toulecte qui estoit venu la,
[148v]
- Pietres et le prince reprennent Burs le roy et la roÿnne doulcement conforta, et leur prioit de cuer que bien leur aidera. De ce ne failli pas, ainsi c’on vous dira. Je croy meilleur prelat on messe ne chanta.* Oncques vers le bon roy folie ne pensa, ne envers sa moulier, que a garder lui bailla, mais ainsi que sa seur l’onnoura et garda. Puis des amis conquist et maint bel don donna pour Henry secourir quant mestier en aura. Depuis mist il le siege a Toullecte dela, en tant que roy Henry par deça repayra au noble duc d’Anjou qui bien recueilli l’a, ainsi comme vous orréz quant le point en sera. Or en layrons jusques que le point vendra. Du prince vous diray qui devers Burs s’en va. Quant il vint par devant, a la cité manda c’on lui rende les cléfz et il les sauvera. Et l’evesque de Burs par sauf conduit ala vers le prince de Gales qui devant se loga. Quant le prince le vit moult bien le festÿa. Et a dit a l’evesque : « Or ne me celéz ja. Celle cité de Burs, dictes qu’elle fera. » L’evesque respont : « Elle s’accordera a vostre volunté ainsi qu’il vous playra. Mais véz cy le roy Pietres : si tost qu’il y sera, une telle vengence des bourjois il fera l’un sera decolé, l’autre pendu sera. Si vous prions pour Dieu qui le monde crea, veilléz nous conseiller, ou trop mal nous ira. Chascun a vostre gré du tout obeyra. La cité est a vous et tout quant qu’il y a. Bourjoises et bourjois, chascun vous servira. Chascun de son trezor assez vous partira. Mais soiéz nous garant et on vous amera. » Quant le prince l’oÿ, adont s’umilia. « Par ma foy, dist le prince, puis que ainsi va, puis qu’elle obeïst a moy, ja mal n’aura, ne ja le roy d’Espaigne dedens n’entrera,
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decy jusques atant que juré aura si sollempneement que a chascun suira, que a petit ny a grant riens ne demandera. Et tout ce qui est fait tout pardonné sera. – Sire, se dist l’evesque qui sagement parla, en confessïon di, que nul ne le sara. S’il en avoit juré tout quant Dieu fait a, et Marie sa mere qui .ix. mois le porta, et la piteuse mort que Jhesu endura ens ou mont de Cauvayre ou on le travailla et sur les sainctes Pasques ou il resuscita et sur l’Ascencïon quant es cieulx il monta, sa mere et les apoustres quant les enlumina, et par la Trinité qui tousjours durera, sur touz les seremens son corps se parjura. Mais s’il jure Mahon, pour rien n’en mentira. » 432
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Quant le prince oÿ si l’evesque parler, a rire commainça, il ne s’en peu cesser. « Les deables, dist il, m’ont fait de lui mesler. Ja bien ne m’en viendra, je croy, au retorner. » Certes, il se dit voir, c’est legier a prouver, car de fain et de soif qu’il lui convint porter lui prist si malvait mal qu’il l’en convint iner, car celle maladie le it si fort enler ains depuis ne peu pain par faute avaler, ne grant plenté des autres que avec lui volu mener. Et on ne doit telles gens plaindre ne doler quant ilz vont sans raison les pouvres gens gaster, et la fain et la soif et le froit endurer. Et ilz prenent le mal, si les laissent ester, par fole convoitise qui moult fait a blasmer. On ne les devroit aider ne visiter, non plus que Sarrazins qui sont oultre mer. Et je croy que telles gens veult Dieu oublier. Le prince des Galois va dam Pietre appeller :
[149r]
- Pietres et le prince reprennent Burs -
[149v]
« Roy d’Espaigne, dist il, je veil a vous parler. Par ma foy, j’oÿ Espaigne de vous poy loher. Je suis ycy venu pour vous reconforter et vous devéz vers moy ce fait cy amander. Mes gens devéz paier et touz delivrer, soudees et bons dons acomplir et donner. Et doys aprés vostre mort Espaigne poctesser, ou mes hoirs qui viendront, si on le pouoit trouver. Et le m’avéz volu de vostre foy creanter, les lectres faire escripre, de voz seelz seeller. J’ay fait pour vostre honneur mes gens aventurer , la bataille vaincue et faicte reculer, et Bertrant du Guesclin en prison enfermer, et le bon mareschal qui tant a le cuer ier, le Besgues de Villaines, c’on ne doit oublier, les meilleurs chevaliers qui sont jusques a la mer, sans les autres prisons qui j’ay a gouverner. Pour vous m’a convenu travailler et lasser, mes gens avoir destresse, laidement afamer. Il est en ma puissance de tout le vous reoster que dés ce que vous vouldroiéz vostre foy parjurer, et de tenir convent sans point de l’arrester, et de faire voz gens envers vous racorder, en icelle maniere que vouldray deviser. Car je vous jure sur Dieu qui se laissa pener sur le mont de Cauvaire pour le peuple sauver, et par le saint Sepulcre ou volu ressusciter, que se je puis savoir et que l’on me die au cler que vous veilléz en riens par dessus moy errer, et je fusse a Bourdeaux, que j’ay a gouverner, ou dedens Engolesme, ou bel fet jouer, ou la princesse est, que je doy bien amer, et mon ilz que en son corps ay volu engendrer, si revendroye ça quoy qu’il deüst couster, et feroie avec moy vitaille amener pour vivre largement sans fain avoir, et vous suyvroie ainçois jusques oultre la mer que je ne vous feïsse de male mort iner.
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- Episodes espagnols -
– Sire, dist le roy Pietres, ne vous en fault doubter. Encores plus feray, se voléz commander. – Je veil, se dist le prince, en ceste ville entrer. Et trestouz les bourjois y donrons a disner, aus bourjoises aussi qui moult font a louer, par maniere de paix envers vous actorder. Et a ma volunté vous en vouldréz jurer. » et dam Pietre respont : « Ailleurs ne veil penser. » Puis a dit coiement que l’on ne le peust escouter : « Foy que je doys a Dieu, j’en pense cy user, que ja vous ne autruy ne s’en porra louher. Pleüst a Dieu que je tenisse a ce soupper ma table a l’escarbouscle qui reluit ainsi cler : jamais ne la verroiéz en vostre sale verser. » 433
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Le prince it mander en la cité jolie c’on le laisse entrer avec sa compaignie qui amener y vouldra tout a sa commandie. Et ceulx le font ainsi que nul ne le detrye. Le prince y entra a belle compaignie, et dam Pietres aussi, ou tant a felonie. Des bourjoises adont fu piteuse la vie. Chascune a deux genoilz estoit sur la pavie jointes mains en priant, chacune au roy supplie qu’il veille avoir pitié de la soue maisnie. L’une plouroit moult fort et l’autre lermie. Et quant Pietres les vit de maltalent rongie, le prince l’emmena, que point ne s’en detrie, au moustier droitement de la virge Marie. Par dessus un aultier, ou messe fu oÿe, la furent apportéz par la digne clergie les reliques de Dieu qui de mort vint a vie : de saint Jacques y ot une digne partie que Charles y laissa quant Espaigne ot gaignie. Mainte relique y fu apportee et choysie. Et la jura le roy, voyant la baronnie,
[150r]
- Le prince de Galles et son armée quittent l’Espagne que a homme n’y a femme de la cité jolye il ne demandera vaillent une ortye, mais que jamais ilz n’aient vers lui leur foy mentie. Et ainsi demoura ceste paix parfournie. Le roy Pietres d’Espaigne en aulte seignorie it le prince digner et sa chevalerie, ens ou palais a Burs noblement les festie. Et la furent .viii. jours en bonne amour fournie au semblant qu’il faisoit, en quoy il s’umilie. Mais faulx semblant avoit, couvert de tricherie.
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[150v]
Or fu Pietres a Burs en consolacïon. Et en ce temps de quoy je foys mencïon s’en vint rendre Sebile en grant alictïon, et Toulecte ensement et des autres foyson lui apportent les clefz d’entour et environ : pour le prince de Gales les clefz lui apport’on. Adont le roy d’Espaigne, que l’on appelloit Peyron, dist au prince de Gales qui cuer ot de lÿon, par devant son conseil ou il ot mains baron : « Sire, se dist le roy, oyéz mon entencïon. La mercy Jhesucrist qui soufry passïon, et la mercy de vous, aprés droit et raison, vous m’avéz fait secours de vostre nacïon. Et si m’avéz aidé a force et a bandon tant que au dessus je suis de mon noble royon. Or ne vous puis paier ne acomplir mon don se je n’ay de l’argent a ma division : querre me fault inance et il y a raison. Et vous estez ycy et de gens grant foison ou vous ne trouveréz vivres ne garnison : le païs est mengié et pillié environ. Mais si vous vouloiéz faire mon entencion, vous feroiéz voz gens sans nulle arrestison espandre et departir a droit et a raison, 12430
corr. d’après P : vous feroie voz g.
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- Episodes espagnols -
et vous vous demourroiéz ou vous sembleroit bon. Et je iroie pourchassier a force et a bandon le trezor dont j’ay fait a vous promissïon. Et je pourchasseray par telle entencion que ne vous en fauldra la monte d’un bouton. Et demourons tousjours amis et compaignon. » Quant le prince l’oÿ, si drece le menton : cuidast qu’il lui dist sans nulle mesprison. Si lui a respondu par bonne entencïon. Dist le prince de Gales a le clere façon : « Je prendray mon conseil sans nulle arrestison. » 435
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Le prince appella sans nulle demouree son frere de Lencloistre qui tant ot renommee, le conte d’Ermignac o la barbe meslee, et Jehan de Chando, d’Engleterre la lee, et le Castal de Beuf qui bien iert de l’espee, Hue de Caurelay, a la chiere senee, cellui de Mucident n’y a fait demouree, le quenx de Pennebrot, une bonne contree. Et leur a dit : « Seigneurs, or oiéz ma pensee. Nous sommes en Espaigne, une terre afamee. Et le roy Pietres a sa besoigne ordonnee : il n’a si fort chastel ne ville bien fermee qui tantost ne se soit devers lui retornee. Congié nous veult donner par telle destinee que vers Navarre irons, ou la terre est peuplee. A Tudelle irons et ailleurs s’il vous agree, des biens y trouverons et de bonne vinee . Et Pietres y viendra a certaine jornee et nous sera donner en monnoie doree l’avoir qu’il a promis pour certaine soudee. Or me donnéz conseil, si en dictes vostre pensee. » Et ilz ont respondu sans nulle demouree : « La vostre volonté en doit estre actordee. » Ne sçay a quoy la tençon vous en soit demenee.
[151r]
- Le prince de Galles et son armée quittent l’Espagne Chascun s’i actorda, c’est verité prouvee, car ilz desiroient moult d’aler en la contree. L’un desire sa mere, l’autre son espousee, chascun voussist veoir sa chambre bien paree, car de fain, de froit et de soif et de gelee avoit chascun la char travaillee et penee.
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436 Le prince des Galois et touz ses princers de dam Pietres le roy vont la chose octroier. Ilz ont fait le harnoys et ce qu’ilz ont mestier sur chars et sur charrectes ont mis pour charryer, et la vitaille aussi y ont mis pour mengier. A Bertrant du Guesclin ont baillé bon destrier, et au bon mareschal d’Odrehan le guerrier. le Besgues de Villaines ne volurent pas laisser chevaliers, escuiers que nommer je ne quier. Bien furent ordonnéz touz les prisonners et bien gardéz de prés, ce volu on tesmoigner. Oncques homme ne le vit visage changer, en boyvent ne en mangent ne volu point varïer. Souvent lui oïst on Jhesucrist gracïer et prier Jhesucrist, le pere droiturer, qu’il veille roy Henry a bon port adrecier et que par son plaisir il lui doint recouvrier. Mais il ne sceu parler ne au prince prier que a inance fust mis pour prison eslongier, car le prince avoit contre lui le cuer ier. Huon de Caurelay qui Bertrant avoit chier, dist au prince de Galles pour le baron aider : « Sire, Bertrant tenéz, un loial chevalier : n’est mie riches homs pour grant argent paier. D’avoir legiere in auroit trés bien mestier. » Dist le prince de Gales : « Or le veilléz laisser. N’ay que faire du sien prendre ne convoiter. Sa vie lui feray mal gré lui eslongier. S’il estoit delivré, il auroit desirer
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- Episodes espagnols -
d’estre adéz en bataille et tousjours guerrïer. Departir le feray et vivre sans tencer : je lui donray assez a boyre et a manger. » Et quant Huë l’oÿ, n’y ot que courroucier, et lui dist a Bertrant .i. jour apres menger. La responce du prince lui dist sans targier : « Certes, sire, dist il, je ne puis approchier la vostre delivrance pour yssir de dangier. – Sire, se dist Bertrant, or le veilléz laisser. J’en lerray convenir Dieu qui est droiturer. » 437
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Ainsi comme vous dy c’est le prince departy. Vers Navarre s’en ala qui est noble païs, a Tudelle s’en vint et ou noble pourpris. Mais les vivres trouva partout si fort cueillis que de famine fu le peuple desconfy. Il mesmes si est de pouvreté mal mis en atendant le roy, ou longtemps avoit mis. Mais je vous ay convent que le prince gentilz ne peu oncques avoir un tout seul parisis, ains lui fu le convent du roy Pietres failli. Et quant le prince vit que ainsi estoit traÿ, Ses barons appella et touz ses amis. « Seigneurs, se dist le prince, or oiéz de mes diz. Du roy Pietres d’Espaigne qui tant est maleÿ, m’a failli de convent, de Dieu soit il mauldit. De ce que fait lui ay doys bien estre repris, car il est traïteur et en fais et en ditz. Or ay fait grant pechié, si m’en suis repenty. Il me fault retourner en icellui païs : de lui me vengeray ains que soie departy. Par cellui seigneurs qui en la croix fu mis, se je le puis tenir, il puet estre tout is la teste lui trencheray, ja n’en ara respit. » Et quant les haultz barons ont les parlers oïz, de retourner arrieres ne fu pas leur advis.
[151v]
- Pietres reprend Toulecte « A ! Prince. font ilz, par le corps saint Denis, si ainsi retourne, vostre peuple est honny et mis a pouvreté, afamé et a peril. Mais realons a Bourdeaux soient les pors garniz* et faisons garnisons pour .v. mois ou pour .vi. . Et puis retourneréz o vos gens bien garnis : d’Espaigne chasserons roy Pietre et roy Henry et seréz couronné tout a vostre devis. »
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[152r]
« Sire, font les barons, pour Dieu le tout puissant, ne faictes vostre gent retourner tant en quant, car touz mourent de fain, les petiz et les grans. Atendons la saison et le temps prouitans. » Dist le prince de Gales : « Bien vous voys parcevant : vous doubtéz fain et froit, ne m’en vois merveillant. Mais foy que doy a Dieu, que je tiens a garant, se je ne murs de mort et ne me voys hastant, a male in mectray roy Pietres le soudant. » Ainsi comme je vous voys cy endroit recordant s’en retourna le prince qui le cuer ot dolant, et s’en vint a Bourdeaux, sur Gironde seant. Et ses hommes s’en vont en leurs lieux repairant, s’esmeurent compaignies et se vont assemblant de bastars, de pillars et de gens non savant qui par le monde aloient moult les gens travaillant. Mais de ce me vouldray cy endroit taire atant. Et de Pietres le roy vous iray recordant, qui a Burs en Espaigne fu un pou sejornant et assembla ses gens qui tost vindrent avant. A Toulecte s’en ala, une cité vaillent. L’arcevesque se fu parti ou temps devant avec la roÿne qui le corps ot plaisant, a Bourges en Espaigne qui estoit a Bertrant. La se tenoit Henry qui le cuer ot dolant, et sa moulier aussi qui le cuer ot pensant. 12550
corr. d’après P : n. m’en vois vermeillant
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- Episodes espagnols -
Le roy Pietres s’en vint a Toullecte la grant et manda aus bourjois que l’on lui aille delivrant. Et quant les bons bourjois en ont oÿ le vent, les plus en sont d’actort, les autres refusant. Mais en la in se sont d’eulx rendre consentant, car le roy Pietres fu ce mefait pardonnant. Mais depuis en print il vengence si tres grant que les plus en furent aprés reppentant. 439
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Aprés ce que Toulecte, celle ville fermee, fu livree au roy Pietre et toute racordee, a Sebile s’en ala, une cité louhee. La endroit fu la gent forment desconfortee, car trop doubtent le roy et sa folle pensee. Mais grande fu contre sa venue ordonnee. Galies furent contre sa venue menee a or et argent noblement painturee, qui dessus rouhes vont par dessus la chaussee. Pleines sont les galies dont je foys devisee d’anges, d’intrumens aussi, de maintes fees, qui font esbatement par telle destinee c’oncques telle noblesse ne fu mais regardee. Vivier, poissons noyans y ot grande maree, et serennes chantans par maniere ordonnee, et toute la noblesse qui peu estre trouvee fu encontre le roy a ce jour ordonnee. Les bourjoises crioient a haulte alenee : « Mercy au roy d’Espaigne. » a icelle jornee. Oncques telle pitié si ne fu regardee. La fu receu le roy en la cité loee. Juïfs, Sarrazins et la gent crestiennee alerent contre lui lui faire enclinee. Mais puis emprés en fu mainte teste coppee. 440
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Seigneurs, a quoy iroie alongent la chançon.
[152v]
- Un noble pèlerin à Palpegant Les chevaliers d’Espaigne et les nobles baron se furent ralïéz au riche roy Peyron, au léz devers Galice, entour et environ Le roy manda Ferrant de Castre le felon, et cellui le vint servir et it alictïon. Or vous lerray un pou de ceste achoison, du roy Henry diray qui cuer ot de lÿon, qui fu avec sa femme alé a garison quant vit que Pietres fu en sa regnacïon. L’archevesque appella sans nulle arrestizon, et lui dist doulcement et par belle raison : « Sire, vous garderéz en ceste regïon, car je m’en veil aler par devers Avignon et au bon duc d’Anjou qui cuer a de lÿon. Et prieray secours, j’en ay devocïon. Et je croy que le duc, le frere au roy Charlon, ne me fauldra neent, c’est mon entencïon. Se je rescripz a vous, si faictes a mon bon. » Se dist l’archevesques : « N’en aiéz souspeçon, car foy que doys a Dieu qui soufry passïon, jamais encontre vous n’aray oppinïon. Se vous avéz secours et qu’il soit de raison, touz ceulx qui maintenant sont avec Peyron reviendront avec vous a force et a bandon car Pietres met a mort de gens grant foison. Partout se fait haïr par sa derrisïon et cellui qui est haÿ de ses hommes de nom ne doit estre par droit sire de son royon. »
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Quant Henry prist congié, la reïgne ploura. Or oiéz de Henry, comment s’appareilla : a loy de pelerin se vesti et chaussa. Lui .iiie . sans plus le roy s’achemina,* de male traÿson roy Henry se doubta : le roy Pietres redoubte, que de riens ne l’ama. 12635
corr. d’après P : lui .iiiie . sans p.
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- Episodes espagnols -
Il avoit bien raison, de ce ne doubtéz ja. Par devers Arragon le roy Henry s’en va et vint a Perpegant, la ou le roy trouva. Mais ne it nul semblant ne point ne se monstra. Et un Arragonnoys a Henry s’avança, si tost qu’il l’a veü, pelerin l’appella. « Or me dictes, amis, pour Dieu qui tout crea venéz vous de Saint Jacques, le baron, par dela ? – Oÿ sire, dist il, mon corps esté y a. » Dist le Arragonnoys : « Pelerin, comment va ? Ou est le roy Henry et comment lui esta ? » 442
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Dist le Arragonnoys qui fu bon chevalier : « Ou est le roy Henry ? Dictes le moy, paumier. – Par ma foy, dist Henry, j’ay oÿ noncier qu’il est a Tristemare avec sa mouiller. Il a tout perdu d’Espaigne l’eritier, touz lui ont failli ses hommes et ses guerriers. » Dist le Arragonnoys : « Ne valent un denier. Faussement ont failly le bon roy droiturer, dequoy il a perdu mains loiaux chevaliers. Hé, Bertrant du Guesclin, Jhesu te veille aider, et bon Besgues aussi de Villaines au cuer ier, et le bon mareschal d’Odrehan au corps chier, et l’amiral d’Espaigne et maint bon chevalier que le prince de Gales tient comme prisonnier. Or me dictes, paumier, ne me veilléz noier : savéz de la gent dont vous m’oiéz noncïer s’ilz sont a Bourdeaux aussi comme prisonnier ? – Oÿ, se dist Henry, je le sçay sans cuider. » Dist le Arragonnoys : « Je vous veil acointer que le prince de Gales et les amis plus chier sont maintenant dolant, qu’ilz sont venuz aider le roy Pietres d’Espaigne pour Henry guerroier. – Par ma foy, dist Henry, j’ay bien oÿ traiter qu’il n’a receu du roy ne maille ne denier. »
- Un noble pèlerin à Palpegant [153v]
Dist le Arragonnoys : « Se vous vouléz mangier, je vous iray lassus ou palais convoier. Et vous deux compaignons ne vous fauldra laisser. Et si vous feray boyre du meilleur du celier en l’onneur de saint Jacques et de Dieu tout premier. Et que Dieu veille aussi recouvrance envoier au noble roy Henry qui tant fait a priser. – Sire, dist le roy Henry, ce fait a mercïer. Et nous le prandrons de bon cuer et entier. »
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443 Le Arragonnoys it le roy Henry aler la dessus ou palais et l’assist au disner la ou le roy disnoit, c’on le vist bien cler, qui son plat et son mes lui it lors presenter.* Et furent bien servi, de ce n’estoit doubter. Et aprés le mangier, que le roy volu lever, l’ala le roy Henry veoir et saluer. Et le roy d’Arragon lui a dit ault et cler : « Pelerin, dist le roy, ou vouléz vous aler ? – Sire, droit a Paris, sans point de sejorner. De la court du roy suis pour sa masse porter. » Dist le roy : « Veilléz nous a lui recommander. » Si dist le roy Henry : « J’ay a vous a parler, mais que on n’y peüst que vous et moy trouver. » Et le roy respondy : « Ce fait a creanter. » Dessus une fenestre sont aléz a hurter. Et dit le roy Henry qui se volu encliner : « A ! Noble roy, dist il, plus ne me quiers celer. Je suis le roy Henry, que tant souloiéz amer. Je suis le pouvre roy qui n’a riens a garder. » Et quant le roy l’oÿ, se le va relouer : « A, Bon roy, dist il, par le corps saint Omer, pour quoy ne l’avéz dit un po avant digner. – A, Sire, vraiment je foys bien a celer. Bien y a achoison, legier est a prouver. Je m’en voys par dela au Saint Pere parler
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- Episodes espagnols -
et au bon duc d’Anjou le secours demander, pour tant que bonne amour m’avéz fait demonstrer. » Dist le roy d’Arragon : « Dictes moy sans fausser. Et ou est la reÿne au beau vïaire cler ? – Sire, elle est a Bourges, dont je doys possesser, avec l’archevesque qui tant fait a louer. Et si mande des gens, qu’elle vouldra poser siege devant Toulecte et soudoiers mener. Et je voys au secours, se je le puis trouver. » Dist le roy d’Arragon : « Il ne fault doubter que tousdiz ne puisséz bien a moy recouvrer de deux mille hommes d’armes sans demourer, trois mois touz acomplis sans le vostre a louer. » Se dist le roy Henry : « Se fait a mercïer. » 444
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Léz fu le roy Henry quant il oÿ la raison. En tel point que je dy se party d’Arragon. De Perpegant issi, lui et ses compaignon, a loy de pellerin de corps et de façon : l’escharpe avoit au col, en la main le bourdon, dolant et courroussé et plain de marrison. Et jura Jhesucrist qui soufry passïon, que a Bourdeaux s’en ira sans arrestison pour savoir se Bertrant est mis a ranson, et le bon mareschal qui Ernoul ot nom, le Besgues de Vilaines, qu’il ama de cuer bon. « Sire, dient ses hommes qui oient sa raison, se n’est mie bon sen ne bonne avision. Se vous estez cogneu par aucune achoison, vostre vie ne vault la monte d’un bouton, car le prince de Gales qui cuer a de lÿon, est fel et ourgueilleux et plain de desraison. Pour Dieu n’y aléz pas car ce n’est mie bon. – Si feray, dist le roy, j’en ay devocïon. Or m’en aïde Dieu qui it Longis pardon. » Ainsi le it Henry le roy de grant renon. A Boudeaux prinst sa voye, volant ses gens ou non.
[154r]
- Visite d’Henry à Bertrant prisonnier à Bourdeaux En la cité entra a une Ascensïon et si c’est houstelé chés Lorens de Mascon qui tenoit bon houstel et trés riche maison. La nuyt se reppousa en trés grant souspecton comment venir pourroit a son entencïon. Ceulx qui furent o lui en icelle saison vousissent estre adont tout droit en Avignon.
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[154v]
Or fu le roy Henry a Bourdeaux la cité. Au matin se leva, n’a pas son corps paré : pas ne voussist avoir un drap d’or bien ouvré. Au moustier Nostre Dame sont touz ensemble alé. La messe oÿ le roy de bonne volunté. Et aprés le service a partout regardé et vit des chevaliers venir trés grant plenté, et d’escuiers aussi qui moult l’ont regardé. Et de ceulx qui avoient avec Bertrant esté veoient roy Henry, qu’ilz ont moult salué. « A, Pelerin. font ilz, vous venéz du regné ou nous avons ésté pouvrement salué. – Par ma foy, dist Henry, j’ay en la place esté ou la besoigne advint dont vous avéz parlé. » Il vit un escuier qu’il a bien ravisé : avec Bertrant le vit plus d’une foy armé. Il le tira a part, si l’a araisonné : « A, Gentilz homs, dist il, dictes moy verité de Bertrant du Guesclin et de l’autre regné. Sont ilz mis a inance ? Auront ilz point iné ? » Se dist l’escuier : « Par saint Trinité. Le gentilz mareschal a des amis plenté : je voys qu’il inera, car on en a parlé. Aussi fera le Besgues, ou tant a loiauté. Chevaliers, escuiers qui furent eschappé iront querir inance a pié ou mal monté. Mais Bertrant demourra, ainsi c’on m’a compté : on n’oze dire au prince ne avoir demandé que Bertrant pour argent puisse estre delivré. »
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- Episodes espagnols -
Et quant Henry l’oÿ, si en ot le cuer iré. « A, Gentilz escuier, dist le roy naturé, pourroit on par nul tour avoir a lui parlé ? – Qui estez vous ? dist cellui qui l’avéz demandé. Estez vous de Bertaigne, celle noble duché ? » Dont l’a le roy Henry a un autier mené. La se sont entre eulx deulx pour parler encliné. 446
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Le roy et l’escuier furent en parlement. « Amis, se dist le roy, je vous ay en convent, que je vous ay veü avec Bertrant souvent. Mais je vous pri pour Dieu, dont on fait sacrement, ma vie me sauvéz, s’il vous vient a talent. Car destresse de cuer, ennuy et maltalent m’ont amené ici si forceneement, que je n’ay a mon cuer advis ne sentement. Je suis Henry d’Espaigne, celer ne vault neent. » Oyt le l’escuier, si lui dist bellement : « Sire, dist l’escuier, pour Dieu, venéz vous ent tout droit a mon houstel sans point d’arrestement. Si parleray a vous trop plus priveement et boyrons du vin assez et largement. » Et le roy respondy : « Il me plait vrayment. » Lors s’en fuyt l’escuier qui bien la voye prent. Le roy Henry mena a l’oustel droitement, a sa table le mist et les siens ensement. A son houstesse dist : « Dame, certainement véz cy des pelerins qui sont moult bonne gent. Ilz sont de mon païs, je vous ay en convent. Faictes perser du bon vin, du meilleur vistement. » Et l’oustesse dist : « A voustre commandement. » A table sont assis tost et hastivement. Lors dist le roy Henry : « Or avisons comment je porray de Bertrant acomplir mon talent. » Se dist l’escuier : « Vous sauréz briesment. Je iray parler a lui, se je puis nullement.
[155r]
- Visite d’Henry à Bertrant prisonnier à Bourdeaux Il est en une chambre avec chambellen. Se je puis exploictier, je saray son talent. » Adont s’en departy tost et incontinent.
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447 L’escuier s’en part, ne si volu arrester. En la chambre est venu, le portier va trouver. « Sire, dist l’escuier, veilléz moy escouter. Je suis un escuier, c’on a laissé iner. A inance suis mis, si m’en convient aler querir ma rançon, se je en puis iner. Or vouldroie moult bien, s’il vous plaisoit, parler a Bertrant monseigneur, que avéz a gouverner, pour savoir s’il veult riens en Bertaigne mander. – Oïl, dist le portier, bien y pouéz entrer mais que vous me veilléz bonnes chausses donner. Il ne vous convient fors a Bertrant parler. C’est ung homme qui ne scet nulle riens refuser. Pleüst a Jhesucrist qui it ciel et mer, c’on ne le laissa plus en son païs aler et que je le peüsse tout en mon temps garder. – Sire, dist l’escuier, se Dieu me puisse sauver, cellui ne le vouldroit pas qu’il deüst demourer. Or me laisséz leens et je iray empetrer tant que gré n’en porréz savoir au retorner. – Aléz, dist le portier et si y veilléz penser. »
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[155v]
L’escuier gentilz dedens la chambre entra. Quant il fu venu la et Bertrant regarda. Il est venu a lui, doulcement l’enclina. Et quant Bertrant le vit, doulcement l’appella Et lui dist : « Mon amy et que faictes vous ça ? Bien sçay que vous queréz, mais point d’argent n’y a. Mais se je puis issir et quant a Dieu plaira, 12816 12821
corr. d’après P : je ne puis e., ne supprimé. corr. d’après P : e. c’on m’a laissé f., m supprimé.
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- Episodes espagnols -
je vous conforteray et quant qu’il en y a. Et si vous remeneray a ceulx de par dela et trouverons la place qui nous recouvrera. – Sire, dist l’escuier qui sagement parla, pour une autre besoigne suis venu a vous ça. Le roy Henry est cy, a vous envoié m’a. A loy de pelerin se vesti et chaussa, pour vous venir veoir ainsi s’appareilla. Tout droit au Saint Pere en Avignon s’en va et vers le duc d’Anjou, quar il le trouvera. » Et quant Bertrant l’oÿ, la chiere hault leva et dist a l’escuier : « Grant folie pensa. Se le prince le scet, voir il le destruyra. Ne je ne sçay comment a moy parler pourra. » Se dist l’escuier : « Je sçay bien qu’il donra au portier tant d’argent que entrer il le lerra. – Par ma foy, dist Bertrant, ceens point d’argent n’a. Mais il a un lombart en la ville dela qui me fait ma inance : on le lui envoiera. Se je puis esploitier, roy Henry me verra. » A icelle parole le portier appella. Et il y est venu, car forment desira a faire son plaisir pourtant que bien donna. Pour ce dit on, je l’ay oÿ dire pieça, cellui qui n’a point d’argent point de vallet n’a. 449
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Quant Bertrant a veü devant lui le portier, « Amis, se dist Bertrant, j’ay de vous grant mestier. Il a .i. pelerin que j’ay merveille chier : il est de mon païs mon bourjois heritier. De Saint Jacques revient le bon baron prier. Voluntiers lui donroye cy dedens a manger et si n’ay point d’argent pour le festïer. J’ay un riche lombart qui fait bien a priser, qui ne me fauldra point, si que j’ay desirier 12856
corr. d’après P : e. quant Bertrant la c., l’oÿ ajouté.
- Visite d’Henry à Bertrant prisonnier à Bourdeaux -
[156r]
que vous aléz vers lui sans point de l’atargier. Dictes lui que vers lui vous envoie prier. En trés bonnes enseignes vous porréz avancier que .iiiic. lorins vous veille tost bailler. Et vous en auréz cent a vostre repairer, pour ce que je vous trouve loial sans varïer. » Et le portier lui repond : « Ce fait a gaigner. J’avoie grant besoign d’avoir tel prisonnier. »
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450 Le portier it issir l’escuier aprés lui. Pour le bon pelerin dont vous avéz oÿ tant a fait le portier et si trés bien furny qu’il trouva le lombart qui l’argent lui oufry. Il en retint .i. cent, Bertrant le volu ainsi. Le disner fu toust prest ordonné pour Henry et vint dedens la chambre a heure de mydy. Le disner trouva prest. Quant Bertrant le choisy, doulcement l’acola et bien le conjoÿ. Son estat demanda et il le lui gehy. « Sire, se dist Bertrant, quant partiréz decy, vous me salueréz et de ce vous supply, le Saint Pere de Romme et le bon duc aussi. Et leur diréz aussi que, pour Dieu, je leur pri vous veillent conforter et dire de par my que nul homs ne meneroie vaillent .i. parysy ne nul ne soit priant au prince seignory. C’est le plus orgueilleux qui oncques de mere nasqui car onques pour priere son cuer ne s’amoly. Mais j’espoir que j’aray vers lui .i. bon amy. Si tost que vous porréz vous partiréz decy. » A icelle raison l’oustesse sailli, une trés vaillant femme, bonne et loial aussi. Elle vint a Bertrant, que point ne s’alenty, et lui dist : « Monseigneur, trestout c’est acomply. Venéz vous en seoir, vous seréz bien servy. » Lors sont alé seoir en ou lieu dont je dy.
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En la chambre Bertrant sont assis les barons et furent bien serviz a leur divisïon de pain, de char, de rost, de bonne venoison. Le portier appella sa femme par son nom : « Dame, dist le portier, j’ay grant suspeçon que ceulx pelerins cy nous facent traÿson. Foy que je doy a Dieu, j’ay en entencïon d’aler devers le prince compter ceste façon : il y envoiera pour savoir le coron. On prent bien tel argent qui fait confusïon. » Quant la dame l’oÿ, si ne dist o ne non. Elle vint a Bertrant qui cuer ot de lÿon, coyement lui a dit par moult simple raison : « Beau sire, gardéz vous qu’il n’y ait souspeçon en ceste gent icy ne malvaise façon, dequoy avoir peusséz nulle octasïon, car le portier ira sans point d’arrestizon aus chevaliers du prince compter ceste façon. » Et quant Bertrant l’oÿ, si lexi le menton ; venu est au portier et a prins un baston. Tel cop lui a donné dessus le greppinon que devant lui le it cheoir a genoillon et puis si lui ousta les clefs de la prison. 452
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Quant Bertrant ot batu le portier tellement, il a dit a Henry : « Beau sire, aléz vous ent. Saluéz moy mes gens et ma femme ensement. » Lors se leva Henry et son bourdon prent, avec l’escuier s’en party vistement. Et Bertrant clost la porte tost et hastivement. Le portier eüst mort, si ne fust son chambellen. « Traïtreur, dist Bertrant, le corps de Dieu vous cravent. 12943
t. et inc hastivement, inc cancellé.
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corr. d’après P : L. porta appella s.
[156v]
- Henry rend visite au duc d’Anjou Ce pelerin icy cy estoit mon parent, A boyre lui donnoie de mon vin liement. Pour le festier avéz prins mon argent et puis si le vouléz traÿr vilainement. Si on l’eust ravisé, je sçay certainement destresse de prison eüst eu fermement, et si en fust arriere de son departement.» Lors a mis le portier a son commandement par dedens une chambre fermee fermement. Tellement le bastyt d’un baston ferement qu’il n’en fu en .viii. jours levé certainement. Ainsi ot par femme ce malvait paiement. Encores lui ennuya qu’il n’ala autrement car le portier l’avoit batue moult souvent. Le roy Henry s’en va, si ousta son vestement et prist ung autre abbit, de cellui n’ot talent. A Dieu se commanda, a qui le mont appent. « Sire, dient les hommes, avéz fait vostre talent. Vous nous avéz prez mis a grant triboulement. Qui bon conseil ne croit, il folie souvent. »
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[157r]
Ainsi comme je vous dy roys Henry eschappa, de Bourdeaux est yssu et son habit changa. Dedens la Languedoc roy Henry s’en entra. A Bediers est venu et illec trouva un gentilz chevalier a qui il se moustra ; frere estoit au Besgues et illec demoura. Et quant le roy Henry oÿ et escouta que le frere du Besgues estoit demouré la, il est venu a lui, de Dieu le salua. Et quant le chevalier le vit et regarda, en l’eure le cogneu et bien le ravisa et puis isnellement et tost il l’enclina. Et le roy vistement son estat lui compta, comment il avoit fait et comment il ouvra. 12947
corr. d’après P : d. de mon liement, vin ajouté
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- Episodes espagnols -
Adont le chevalier le sien lui presenta, son corps, son avoir et dit qu’il le menra par dedens Avignon, au pape par dela, et au bon duc d’Anjou qui noblement regna. Adont a son pouoir roy Henry ordonna. Il yssi de Bediers, gueres n’y demoura, jusques en Avignon le roy ne s’arresta. A Villeneusve vint et illec trouva le noble duc d’Anjou qui estoit alé la. En sa chappelle fu ou la messe escouta. Un chevalier lui dist que Henry estoit la. Dedens son oratoire le roy Henry manda. Le service de Dieu chascun d’eulx escouta. Et aprés le service que le prestre chanta yssirent main a main, le duc moult l’onnoura le riche roy Henry que loiament ama. 454
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Le noble duc d’Anjou n’y it arrestement. En sa chambre mena roy Henry vistement, sur un lit sont assis qui fu de parement. La lui compta le roy tout son demainement, le meschief, l’ennoy, le dueil et le torment qu’il avoit receü si doleureusement par le prince de Gales et son avancement. « Par ma foy, dist le duc, nous savons vraiment que le prince de Gales ne vous aime noient. Et son pere nous a guerroié longuement a tort et sans raison, on le scet vraiment. Moult a travaillé France et grevé longuement. Mais Fortune et Eur ont fait avantement qui a duré a nous fortuneement,* que ceulx qui en deüssent avoir fait vengement nous ont tourné le dos et ne savons comment fors que par traïson qui moult de gens sourprent. Or it le roy Jehan qui ait son sauvement, la paix a Edouart qui Engleterre appent.* Mais ce sera la paix qui fauldra temprement,
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- Henry et le duc d’Anjou à Avignon car c’est paix sans amour, norrie en maltalent, en ourgueil convoiteux qui moult de gens sourprent. Et croy que ceste paix ira petitement, car le prince de Gales en grant ourgueil s’estent. Et si nous aporte assez de maltalent de ce de quoy il a mespris vers vous la dent,** de vostre bon vouloir, a vostre bon esciant, et pourtant que avec vous avéz en vostre gent Bertrant du Guesclin qui tant a hardement, et le bon mareschal et des autres granment. Or vous est avenu .i. grant encombrement dont nous avons esté et sommes bien dolant. Mais s’il plaist a Jhesu, a qui le mons appent, encores y pourra bien avoir amendement. Et se nous y poons mectre enforcement, nous vous ferons secours assez prochainement. » Et quant le roy l’oÿ, grant graces lui en rent. Lors alerent disner en sale richement. Et it adont le duc tel appareillement que se le roy fust son frere proprement. Si fust beau le disner et servi noblement, de riches vaissaux d’or et d’argent seulement que touz s’en esbaÿrent avironneement, et mesmes le roy s’en esbaÿ forment dont tel avoir venoit si esforceement. Et furent bien servy et seignoriement. Et aprés le disner, je vous ay en convent, ainçoys le deservir, sachiéz certainement, dist lors le duc d’Anjou a Henry vistement : « Noble roy, dist le duc, or oiéz mon talent. A vostre bienvenue, tout de commaincement, je vous donne les vaissaulx qui sont d’or et d’argent, dont nous avons esté servy cy a present. »
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Henry le roy d’Espaigne fu léz et joyant 13021
corr. (voir note) : m. vers vous mespris la d., mespris supprimé
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- Episodes espagnols -
quant il vit le present qui lui fu donné grant. Le duc d’Anjou en fu malement meschant.* Puis alerent monter tantost qu’il en fu temps vers le palais du pape qui fu bel et luisant. Ou palais sont venuz, ou le pappe puissant fu en consistoire avec ses clers savant encontre la venue des deux seigneurs plaisant. Vous veïsséz venir d’armes pluseurs sergens, evesques et prelaz, bien fu appartenant. En la chambre du pape, se nous dit le romant, fu le duc amené et Henry le savant, et vindrent main a main en moustrant bel semblant. Le pappe vint a eulx qui n’y fu arrestant, et a dit doulcement : « Bien veignent mes enfant. » 456
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En la chambre du pappe dont vous oÿ avéz vint roy Henry d’Espaigne et le duc honnouré. le pappe saluerent qui bien fu ordonné. Et le pappe les a beneïs et sacréz. De ce que la fu dit par moy plus ne sauréz. Mais le roy Henry fu trés bien reconforté tant qu’il en fu a cuer fermement asseuré. O le duc demoura le bon roy couronné. Et en celle saison dont vous oÿ avéz, le Besgues de Vilaines fu du prince mandé. La avoit chevaliers et escuiers assez. Chando y fu venu, un chevalier doubté, Huon de Caurelay n’y fu mie oublié, le sire de l’Abret qui fu preux et sené. Olivier de Cliçon y fu adont alé, qui en ce temps estoit du fort prince privé, et d’autres chevaliers courageux et membréz. Le prince vit le Besgues, si lui dist : « Ça venéz. Estez vous dont cellui Besgues qui tant grevé avéz le bon roy d’Engleterre, dont je suys engendré ? » Et le Besgues respont que trés bien avisé :
- La mise à rançon du Besgues de Villaines -
[158v]
« Monseigneur, dist le Besgues, vostre vouloir diréz. Pouvre chevalier suis et vous bien le savéz. J’ay servi monseigneur qui roy est appellé. Et est mon droit seigneurs et mon droit advohé. De mon petit pouoir, tel que savoir pouéz, ay esté maintefoiz a mon pouoir arméz. Ma force est petite, poy en estez grevé. Mais je vous jure sur Dieu qui en croix fu penné, que je suis a mon cuer corroucié et iré de ce que sans raison de moy vous vous pleignéz. Croiéz, se je eüsse peü ou temps passé, je eüsse voluntiers vostre estat empiré et l’estat monseigneur essaucié a touz léz : ce doit faire proudons s’il est ordonné. – Beau sire, dist le prince, moult sagement parléz. Se le bon roy Phelippe qui du siecle est iné, et le bon roy Jehan qui fu loial assez, eussent eu en leurs temps telz chevaliers assez, ou il n’eüst eü en plus de fausseté que en ces trois que je tiens en prison enferméz, ja le roy Edouart ne dela la mer passé, ne fust alé si avant con il a esté assez, ainçois en fust venue une telle amitié dont le païs de France en fust plus amandé. »
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457 Ainsi disoit le prince au ier contenement. Et je croy qu’il disoit verité loialment, car s’il eüst eü en France autelle gent que Bertrant du Guesclin, au ier contenement, et le bon mareschal d’Odrehan proprement, le Besgues de Villaines et des autres granment, le gentilz mareschal de Sausorre ensement, avec Jehan de Brenes et des autres granment, ja la chose ne fu aler tellement. Le prince des Galois n’y ist arrestement. Au Besgues de Villaines, dont j’ay fait parlement, mist a inance lors pour or et par argent,
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- Episodes espagnols -
et le bon mareschal d’Odrehan ensement. Et Bertrant demoura en prison tellement. May de lui me tayray, si vous diray comment le Besgues s’en revint aprés son inement tout droit en Avignon, ou le Rone s’estent. Le duc d’Anjou trouva, ou l’istoire ment, qui lui it grant honneur et donna bel present. Et adont fu remis .i. certain parlement pour realer en Espaigne a grant eforcement. Et prinst le duc d’Anjou souldoiers par argent. Et it Henry inance et manda bonne gent et les mist en Espaigne bien et hardiement. A l’entree d’Espaigne tout premierement s’en vint a Salmanque qui forte est durement, et mist le siege entour et assailli forment. Et it tant que la ville se rendi plainement. 458
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Or est le roy Henry en Espaigne rentéz. Il mande ses amis environ de touz léz. A Bourges en Espaigne est le vassal alé de par le roy Henry qui tant fu naturé.. A la reïgne vint, ou grant est la beaulté. De Dieu la salua qui fait croistre les bléz. « Dame, dist le message, ces lectres cy liréz de par le roy Henry qui est vostre advouhé. » Quant la dame l’oÿ, le sang lui est mué. L’archevé l’appella, si lui dist : « Ça venéz. Si lirons qu’il y a, si vous plaist vous l’orréz. » Et l’archevesque dist : « Dieu en soit adouré. » Dont virent la teneur, comment il est entré ens ou païs d’Espaigne qui tant est renommé, et a bonne gens d’armes, a tentes et a tréz ; si avoit prins Salmanque qui estoit fort assez, et venoit a Mandrie qui est un po deléz ; et que droit a Toullecte qui est fort de touz léz, vouloit mectre le siege, c’estoit sa volunté.
[159r]
- Retour d’Henry en Espagne Quant la roÿne l’oÿ, le cuer lui est levé. « A, Beau sire, Dieu, vous en soiéz louhé, et vous franc duc d’Anjou qui nous reconfortéz. Je pri a cellui Dieu qui fu de virge né, et qui fu en la croix de la lance enferré, et ou sepoulcre mis et puis ressucité, que rendre le vous veille quant besoign en aréz. »
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[159v]
La roÿne d’Espaigne fu au cuer resjoïe quant elle oÿ du roy, ainsi lui signiie qu’Espaigne venoit baniere desploye et Salmanque estoit a lui toute octroïe. Adonc manda la dame touz ceulx de sa partie et ordonna un ost qui lui fu en aÿe. L’arcevesque y vint qui point ne se detrye. A Toulecte ont mandé en lectre bien ploÿe qu’elle soit a Henry et a son ost baillie, rendue et delivree et, se nul lui detrie, il en sera pendu a dueil et a hachie. Mais un chastellain ot en la cité garnie de par Pietre le roy qui le chastel maistrie. Le chastel fu pourveu et la tour bien garnie. Et jura Jhesucrist, le ilz sainte Marie que s’il y a bourjois qui a Henry s’alie, ne qui donne conseil, ne de riens s’umilie, que aus creneaux de la tour, voiant sa baronie, le fera encroier comme beste enragie. Adont fu de Toulecte la chose si antie de petis et de grans, tretouz par compaignie, qu’ilz ne se rendront ne pour mort ne pour vie, si fera des chevaux la propre char mangie. Je le vous dy pour vray qu’ilz ne mentirent mie. Tant se tindrent laiens sentans peine et hachie, fain et soif y soufrerent, povreté enhaÿe, c’oncques telle pitié, je croy, ne fu oÿe 13159
d. qui fu de jour noir virge n., jour noir exponctué.
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- Episodes espagnols -
pour meschief qu’ilz eussent, ne pour forte assaillie. Au roy Henry ne volurent obeÿr d’une alye tant qu’ilz seurent de vray que Pietres perdy vie, ainsi comme vous orréz en l’istoire dire. 460
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Par dedens la cité de Toulecte la lee* i fu faicte l’aliance et de foy creantee qu’ilz ne se rendront pour chose qui soit nee au riche roy Henry d’Espaigne l’onnouree ; si auroient desmangié la char salee. Le chastellain qui fu en la tour bien quarree pourveoit son chastel de vitaille ordonnee ; assez y envoia farine bullectee. Au roy Henry en fu la verité prouvee comment Toulecte fu contre lui rebellee. Et Henry en jura de sa foy creantee qu’il y seroit aus champs logié toute l’annee que par force ne fu gaignié et afamee. Seigneurs, il y fu tant par noif et par gelee que Toulecte afama comme gent esgaree, ainsi comme vous orréz, s’il vous plaist et agree. Seigneurs, or escoutéz, par la Virge honnouree. Si orréz hystoire qui doit estre escoutee, faicte de verité, sans bourde massonnee. 461
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Seigneurs, or faictes paix, pour Dieu qui tout forma. Depuis que roy Henry en Espaigne rentra, s’en vint a Salmanque et a lui s’attorda, et puis vint a Mandrie qui a lui se presenta. Les gens du plat païs avec lui assembla. le Besgues de Villaines l’avangarde mena. Adont ot en conseil que a Toulecte s’en ira. Vint a Toulecte ses gent, la cité demanda. Le chastellain qui fu d’Espaigne par dela, manda au roy Henry que jamais ne l’aura. Dont puis le roy Henry grant siege y leva.
[160r]
- Siège de Toulecte par Henry Se roy Pietre n’y vient et quant il y viendra, s’il n’est desconi devant il demourra. Par dela la riviere le Besgues s’avisa, a eulx devers Cordonne le siege ediia. La furent les fourests, mais il y en trencha, et les mist es chemins et son ost enferma, fors les chemins sans plus ou vitaille viendra. Et le bastart de Baines avec lui sejorna, Regnaut de Limosin, en qui bien se ia. Et y fu Thomas Pietres qui bonnes gens mena. Et au léz deça l’eave roy Henry s’enferma la cité de Toulecte, que moult bien il garda Pietre Ferrant o lui qui moult bien se garda, cellui de Quarrion, que conte on appella, et le conte d’Auçoyre, que point ne s’oublia, frere estoit Henry et un roy l’engendra ; le conte d’Au son frere y fu, n’en doubtéz ja.* Si fu Pietre Gonssalle qui Pietres renoya, et Pietres de Sarmante qui moult bien se porta. Le maistre de Saint Jacques avec lui ala et le conte de l’Isle, de Gascogne dela. Et si fu l’arcevesque qui Toulecte laissa pour l’amour de Henry, que loiaument ama. En ce temps fu Toullecte assise ensement la. Maintes adventures y ot, dequoy on se tayra. Tant furent afamé que la chair on menga des chevaux de la ville et ce que on y trouva. Juïfz et Sarrazins qui lors demouroient la, plus de .xxx. milliers de fain en enraga. Ainsi le chastellain de la ville maistria.
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[160v]
Seigneurs, grant fu le siege a Toulecte la grant. A peine que la mere ne manga son enfant, car ceulx de la cité eurent en convenant au roy Pietres d’Espaigne qui de mal a fait tant, qu’il assemblast secours pour eulx faire garant.
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- Episodes espagnols -
Et Pietres leur manda, quant il oÿ le mant, qu’ilz gardassent la ville comme gent souisant et qu’ilz les secourroit d’un secours si puissant que Henry et les siens seroient recreant, et que pour eulx aider il aloit esploitant, et iroit en Grenade a nef et a chalent, et dedens Bel Marine alïance faisant ; ne larroit Sarrazins ou païs habitant qu’il n’amenast o lui deça la mer bruiant. Ainsi manda dam Pietres, comme je vous voys comptant. Or vous vouldray laisser de lui et de Bertrant vous diray verité, selon mon essïant, comme delivré fu du prince combatant et comment il reala en Espaigne la grant, ou il desconit Pietres qui ne valoit noiant. 463
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Seigneurs, or faictes paix, laissé la noise ester et vous orréz beaux motz, se vouléz escouter. Le prince des Galois qui tant it a doubter, tint long temps en prison Bertrant sans demourer. Et nul homme si ne ouzoit de riens de lui parler, car le prince doubtoit, si comme j’oÿ compter, un point qu’il y avoit, c’est legier a prouver, de son pere Douart qui maint oultre la mer, ne se recommainçast par foy de rebeller. Si it elle bien tost, si comme orréz compter. Mais Bertrant fu delivre par rançon donner. Un jour estoit le prince levé de son digner, en chambre de retrait estoit volu aler avec ses barons a espices donner. Et tant que les barons prindrent a deviser et d’armes et d’amours, les beaux faiz recorder de mors de chevaliers, de prisons rachepter, et de pluseurs estas et de faiz d’oultre mer, et comment saint Loÿs, pour son ame sauver se laissa prendre en Tunes et si se it peser
- Mise à rançon de Bertrant -
[161r]
de son or en balance et son cuer dessevrer et ouster de prison et du tout delivrer. Tant que le prince dist qui ne s’en pouoit garder : « Puisque un bon chevalier pour la bataille aider est prins en bons faiz d’armes a loy de chevalier et qu’il seroit prison et mis a son jurer, il ne se doit partir ne de prison gitter jusques son maistre dye : “ Vous en pouéz aler ”. Et on ne lui doit mie du sien trop demander qu’il ne puisse le sien corps autrefoiz delivrer. » Le sire de l’Abret le prist a escouter, sur ce fait cy endroit commainça a noter. Si lui dist : « Noble sire, ne vous veilléz irer de ce que j’ay oÿ derieres vous compter. – Par foy, dist le prince, je devroie amer aucun bon chevalier s’il est a mon disner et il oÿt dire chose pour moy a ravaler, se tost ne le disoit pour ma vie amander. » Se dsit cellui de l’Abret : « Je le diray tout cler. On dit que vous tenéz et faictes enserrer un chevalier prison, que je doys bien amer, et lequel vous n’oséz de vostre prison ouster ain qu’il ne vous puisse empirer ne grever. » Olivier de Cliçon a dit sans demourer : « J’ay oÿ maintefoiz ce parler recorder, mais, voir, je ne l’ousoie au bon prince compter. » Dist le prince de Gales : « Et je vous veil jurer que ne sçay chevalier en terre ne en mer, se c’estoit mon prison que feïsse fermer, que je doubtasse tant, je n’en puis bien vanter, que je ne lui laissasse pour son avoir iner. » Se dist cellui d’Alebret : « Qui vous fait oublier Bertrant du Guesclin qui ne s’en puet aler ? » Quant le prince l’oÿ, coleur prinst a muer. Ourgueil, ire et desdaign l’alerent si tenter que par despit lui dist : « Faictes cy amener Bertrant du Guesclin, je m’y veil acorder. »
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Quant le prince de Gales a oÿ de Bertrant, par ourgueil et despit qui le vont sourmontant a dit a ses barons : « Or venéz cy avant. Bertrant vous me aléz tellement menaçant. Si avoir veult rançon, il l’aura maintenant. » Et ilz ont respondu : « Vous aléz bien parlant. » Adont y sont aléz chevaliers et sergent. En une chambre vont le chevalier trouvant, qui a son chambellain aloit esbanoient et jouoit aus eschaz, la s’aloit esbatant, et n’estoient que deux ensemble deduisant. Il ne lui souvenoit de nulle riens vivant, de nulle delivrance ne lui va remembrant. Et véz vous les chevaliers qui le vont saluant. Et quant il les choisi, il sailli en estant et dist : « Bien veignéz vous. » , en moustrant bel semblant. Lors a son chambellain a dit en soubzriant : « Aléz querir du vin, car je le vous commant. » Dient les chevaliers « Bien est appartenant pour les bonnes nouvelles qui vous seront plaisant que nous vous apportons de cuer baut et joyant. » 465
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L’un des chevaliers qui fu preux et sené, en appella Bertrant qui tant fu redoubté, et lui dist : « Monseigneur, faictes, cy en venéz. A monseigneur le prince vous y estez mandé. Vous avéz eu des amis a court assez : je croy que vous seréz a rançon livré. « A rançon, dist il, qu’est ce que dit avéz. Je n’ay denier ne maille, encores doys je assez. Je doys moult bien dix milles c’on ma ceens presté, que j’ay despendu puis que je fu planté. – Comment, se dist l’autre, les avéz vous alouhé ? » Et Bertrant respondy : « Par moy vous le seréz. J’en ay beu et mangé, donné, joué aus déz,
[161v]
- Mise à rançon de Bertrant -
[162r]
et si petit d’argent s’en est tantost aléz. Mais j’aray tost paié se je suis delivré. Tel ne s’en donne garde qui n’en donnera assez. Tel esparigne le sien et est bien enfermé qui pour moy aïder retournera ses clefz. » Et un sergent lui dist : « Sire, bon cuer avéz. il vous semble que voir soit quant que vous penséz. » – Par foy, dist Bertrant, tu es bien rassoté, car un homme ne vault riens qui est desconforté et ung homme desconfy vault autant que maté. » Et l’autre disoit : « C’est une homme tout faé. Il semble tout adéz qu’il soit tout asseuré. » Ensement fu Bertrant en la chambre mené ou le prince estoit et le riche barné. Il y estoit Chando, .i. chevalier louhé, un loial chevalier, d’Engleterre fu né. Preudons, sages, estoit et hardy homs armé. Et qui l’eüst creü, on se fust accordé, car de touz bons conseilz estoit endoctriné.
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466 Avec le prince estoit bonne chevalerie. Le sire de l’Abret fu en la compagnie, Olivier de Cliçon, ou tant ot baronnie, qui n’acointa aus gens tuer toute sa vie mais qu’ilz fussent Engloys de son adverse partie, neent plus que font bouchiers bestes en boucherie. La fu de Caurelay Huon a chiere lie, et le conte de l’Isle, une terre jolye. Si fu le seneschal de Bourdeaux la garnie, et autres chevaliers que je ne vous dy mye. Le prince fu tout droit enmy sa baromnie et parloit a ses gens, a qui il s’esbanie. Atant véz vous Bertrant, que Jhesu benye. Une cote de gris avoit ou dos vestye, bien semble qu’il soit homme venant de Honguerie. Quant le prince le vois, ne puet muer ne rire.
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- Episodes espagnols -
Il a dit a ses gens : « Par la virge Marie, Il n’est mie taillé qu’il eüst belle amie. Elle seroit de lui laidement embracie. » 467
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Quant le prince choisi Bertrant qui venoit la, de cy loign qu’il le vit a rire commainça. Bertrant a l’aprochier un petit l’enclina. « Or avant, dist le prince, Bertrant, comment vous va ? – Sire, ce dist Bertrant, par Dieu qui tout crea, sachiéz qu’il me sera mieulx quant il vous plaira. Je suis tout enfusté ; j’ay oÿ piece a les soritz et les ras, dont bien ennoyé m’a, mais le champ des oiseaux je n’oÿ ja pieça. Je les iray oÿr quant il vous souira. – Bertrant, se dist le prince, beau sire, ce sera tantost, si vous vouléz, fors que a vous ne tiendra. Mais vostre serement jurer vous conviendra que jamais vostre corps nul jour ne s’armera a l’encontre de moy ne de ceulx par deça, ne pour aider Henry en Espaigne dela, ne ne combatréz dam Pietres par dela, ne encontre cellui qui mon corps engenrra : c’est le roy d’Engleterre ou tant de prouesce a. Toutefoiz que vostre corps jurer vouldra, je vous delivreray ainsi qu’il vous plaira. Et que avéz despendu tout paié vous sera et dix milles lorins aussi on vous donra pour vous remonter quant on se partira. Il le vous fault jurer ; et quant ainsi sera, vous seréz delivré, ne autrement n’yra. – Sire, se dist Bertrant, ja il ne m’aviendra pour gesir en prison tant que mon corps durra. Ja a touz mes amis reprouvé ne sera. » 468 « Sire, se dist Bertrant, vous parléz pour noyant.
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- Mise à rançon de Bertrant -
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Si autre chose n’y a, si me dictes “ Va t’en. ”, car par cellui seigneur, a qui le mons appent, je serviray touz ceulx bien et songneusement que j’ay tousjours servi de cuer entierement. C’est le bon roy de France, que j’aime certainement, et a qui j’ay esté de mon commaincement, et le bon duc d’Anjou, de Berry ensement. Et le duc de Bourgoigne ne fauldray nullement, et le duc de Bourbon, car je l’ay en convent. Mais laisséz moy aler, s’il vous vient a talent, car vous m’avéz tenu prisonnier longuement a tort et sans raison. Je vous diray comment je m’estoie de France departy proprement. Hue de Caurelay, a qui je eu serement, voyre, par bon advis, moy et toute ma gent, que sur les Sarrazins aquerre sauvement avoions en noz propos enprins parfectement. – Et que n’y aloiéz vous ?, dist le princes briesment. – Et je le vous diray, dist Bertrant aultement. Nous trouvasmes dam Pietre – que le corps Dieu cravent. – qui la roÿne avoit fait mourir faussement. C’estoit vostre cousine, ille vostre parent le bon duc de Bourbon qui tant ot d’esciant, qui du sang saint Loÿs par nature descent. C’est vostre meilleur cousté de sang et de jouvent. Je m’arrestay pour lui, pour prendre vengement, et pourtant que je sçay et si croy fermement, cellui Henry doit tenir le droit couronnement et si doit estre roy d’Espaigne entierement. Or m’arestay dela pour ce cas pleinement, et pour destruire aussi et mectre a torment Sarrazins et Juïfz, dont il y a forment en ces parties la ou je fus proprement. Or estez vous venu a vostre eforcement en Espaigne dela moult ourgueilleusement. Vous y estez venu pour or et pour argent et pour avoir Espaigne aprés son inement. Vous y avéz esté afamé laidement
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- Episodes espagnols -
et m’avéz destourné et les miens ensement, et grevé vostre sang tout premierement et quant vous avéz fait afamer voz gent, et receü ennuy et grant encombrement et voz amis destruys ainsi vilainement. Si vous a il trompé par son enchantement et ne vous a tenu loiauté ne convent, dont je lui en sçay bon gré, par le mien serement. » 469
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Quant Bertrant ot compté au prince sa raison, pour le regarder hault dreça le menton. La ne se peu tenir de dire sa raison : « Bertrant, vous aléz droit, si ait m’ame pardon. – Par Dieu, vous dictes voir. » , se dient les baron. Grant joye ont eu entour et environ. L’un a l’autre dit : « Véz la .i. bon berton. » « Or Bertrant, dist le prince sans nulle arrestizon, vous ne m’eschapperéz sans paier rançon. Et encores me esmoye quant vous avéz le don. Mais on dit que tenu vous ay en ma prison pour la doubte de vous et de vostre façon. Mais pourtant que chascun isse de souspeçon et quant je ne vous doubte en nulle garnison, je vous deliverray, voyres, par rançon. – Sire, se dist Bertrant, par le corps saint Symon, de la vostre inance j’ay d’argent grant besoign. Je suis un chevalier pouvre et de petit nom, et ne suis pas aussi de telle estractïon la ou je puisse avoir inance a grant foyson. Dictes vostre vouloir et vostre entencïon, et quant je aray oÿ la demande et le don, se je ne puis iner, je riray en prison. » 470
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« Sire, se dist Bertrant, veilléz vous adviser et me faictes raison, si m’en laisséz aler.
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- Mise à rançon de Bertrant – Ou iréz vous, beau sire ? Ne me veillé celer. – Sire, se dist Bertrant, se Dieu me puisse sauver, ge iray ou je pourray ma perte recouvrer. Je ne vous en di plus, or me laisser ester, mais faictes moy raison, bien le doys demander. Pouvre chevalier suis, je ne m’en quiers vanter. Ma terre est engagie pour chevaux achapter, je n’ay denier ne maille ne monnoie a compter. Et si doys a Bordeaux, c’on m’a fait delivrer dix mille livres, voyres, que vouldroit bien compter. – Or Bertrant, dist le prince, veilléz vous adviser combien vous me vouldréz de rançon donner, car ja n’en orréz parler, sur vostre vouloir, ne vostre rançon vous ne me orréz sommer : ja plus n’en paieréz que vous vouldréz nommer. – Par foy, se dist Bertrant, moult faictes a loher. Et vous daigneriéz vostre rançon fausser. Et quant vous le vouléz sur moi rapporter, je ne vous en doys pas aussi plus ravaler ; .lx. mille doubles d’or vous feray compter : et sera ma rançon que je veil acquicter. » Quant le prince l’oÿ, coleur prinst a muer. Touz les chevaliers a prins a regarder et leur a dit en hault : « Me fait il bien gaber que .lx. milles doubles d’or in me fait donner. Bertrant, se dist le prince, vous n’en pourroiéz iner. Ne je n’en veil pas tant, veilléz vous aviser : a plus de la moitie vous pouéz ravaler. – Sire, se dist Bertrant, or le laisséz ester, car puis que je l’ay dit, il le fault achever : .lx. mille doubles vous feray amener, se parmy ceste in vous me vouléz quicter. – Oÿ, se dist le prince, mais je ne puis penser que vous peüsséz en un mont assembler. – Sire, se dist Bertrant, se je le sçay trouver, iray tout partout sans ma foy parjurer. 13528
q. .lx. d’or f., doubles suscrit.
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- Episodes espagnols -
– Oÿ, se dsit le prince, je le veil creanter. » Et quant Bertrant l’oÿ, adont dist ault et cler : « Sire, prince, dist il, Henry se puet vanter que d’Espaigne pourra tousjours roy demourer. Roy d’Espaigne morra, quoy qu’il doye couster. Et de ma rançon, qu’il me doit trouver, paiera la moitie, mains ne lui puet couster. Et l’autre remanant, foy que doy saint Omer, me prestera le roy qui France doit garder. Et de tant vous dy, bien je m’en ouze vanter, que ce bien ces .ii. cy peüsse je trouver, n’a illeresse en France qui sache il iller qui ne gaignast ainçois ma inance a iller qu’elles ne me vousissent hors de voz las gicter. » Quant le prince l’oÿ, si dist lors sans cesser : « Quel homme est cecy, que je voys cy ester. Ne s’esbahist en rien, ne en fait ne en parler, en plus que s’il eüst tout l’or d’oultre mer ne deça ensement a lui a gouverner. A inance c’est mis, c’on doit bien redoubter, .lx. mille doubles, ce fait bien a priser. Je le vousisse bien pour .x. .m. quicter. » 471
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Grande fu la inance a quoy Bertrant c’est mis. N’y a hault baron qui n’en fust esbaÿ. – Or suis je delivré. » , dist Bertrant le hardy. Dist Jehan de Chando : « Et ou sera ce pris ? – Sire, se dist Bertrant, j’ay de bons amis. Je le trouveray bien, j’en suis certain et is. – Par foy, dist Chando, j’en seray resjoÿ. Se vous avéz mestier de moy, tant vous en dy .x. .M. vous presteray, de tant suis bien garny. – Sire, se dist Bertrant, je dy .v.C. mercys. Mais je vouldray, ainçois que vous aie requis, esprouver celle gent qui sont de mon païs. » Par Bordeaux la cité en fu le son oÿ.
[164r]
- Mise à rançon de Bertrant -
[164v]
L’un a l’autre dist : « C’est bien l’ennemy. Il a un chevalier qui en Espaigne fu prins, qui a .lx.M. doubles c’est de rançon mis. » Adont vous veïsséz les grans et les petis, toutes gens de mestier et bourjois seignoris, qui venent de l’oustel au prince seignory, touz pour veoir Bertrant qui tant fu bien apris. Les chevaliers du prince ont les bourjois choisis qui pour veoir Bertrant venent en ce pourpris. Amené ont Bertrant qui estoit de grant ris. Quant il fu des bourjois et du commun choysis, l’un a l’autre dist « C’est un droit ennemy. Mal dicte soit l’eure quant il eschappe vif. Il a fait mains de maulx, encores fera il pis. »
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472 Les bourjois de Bourdeaux vit on fort esmaier quant il virent Bertrant la dessus apaier. L’un a l’autre dist : « Véz la let chevalier. » Et l’autre disoit : « C’est un let berruier. – Il n’est pas berruier. ce respondi le tiers, ains est berton gentilz et a le cuer legier. Le corps a grant et fort et le viaire ier. Il a moult bien la chiere de malvaisement paier. – Si a mon, se dist l’autre, foy que doys saint Richier. Cuidéz vous que cestui doye denier paier de la grant rançon ou se veult obligier ? Nenny, certainement, ains s’en ira piller. Il n’en paiera ja du sien un seul denier. les gens du plat païs en fera obliger. » Et ceulx qui le cognoissent, Bertrant le bon guerrier, disoient : « Taiséz vous et n’en veilléz plaider. Il n’a en tout le monde nul meilleur chevalier, ne qui si bien se sache en une guerre aider. Il n’est chastel si fort assis dessus rochier, que si tost c’on le voit venir et approchier, qui contre lui se tiegne, ne esté ne yver.
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- Episodes espagnols -
Il n’a par dedens France le païs droiturier si pouvre homme ne femme, s’il en faisoit prier, que chascun ne voussist de son avoir tailler. Et n’y a vigneron, pour vignes vendenger, qui tost ne lui donnast de sa vigne .i. quartier ainçois que le laissast longuement prisonnier. » 473
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Mesme la princesse qui femme au prince estoit, qui fu en Angolesme quant ce fait avenoit, et comment on lui dist que un chevalier estoit qui a .lx.M. doubles d’or rançonné estoit, pour veoir le vassal s’en vint a Bordeaux droit. Et Chando l’amena qui Bertrant bien amoit. Quant la dame le vit, doulcement l’onnouroit. Pour le conseil du prince qui mandee l’avoit, festïa bien Bertrant et honneur lui portoit, aporter it le vin, espices lui donnoit. Apres dist a Bertrant que voluntiers verroit et pour sa bienvenue elle lui aideroit, de .x. mille doubles d’or elle l’alargiroit. Et quant Bertrant l’oÿ, adont l’en mercïoit et puis dist en riant .i. mot qui bien seoit qu’il estoit bel et doulz quant dame lui aidoit. 474
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Ensement la princesse a Bertrant actorda que de dix mille doubles d’or elle l’aydera. Adont s’en departy et congié demanda, et en la court du prince la nuitie souppa. Or advint aprés qu’il s’en party dela pour trouver la inance ou querir la pourra, par tel convenant que au prince creanta que a un droit certain jour devers lui reviendra ou a tout sa inance, nonpourquant s’il ne l’a devoit il revenir et ainsi le jura 13620
v. a Bordeaux gn droit, gn cancellé
[165r]
- Bertrant quitte Bourdeaux -
[165v]
que jamais en sa vie armer ne se pourra, decy a icelle heure que tout paié aura la dicte rançon en quoy il s’obliga. Et parmy ces convens que Bertrant actorda s’en party de Bourdeaux a sauf conduit qu’il a. A privee maisnie Bertrant s’achemina par tel convenant, que je vous diray ja, que ainçois qu’il retournast a Bourdeaux par dela une ville fermee trés bonne conquesta. Oncques haubert n’en vesty ne espee ne sacha : une verge en sa main dedens la ville entra, ainsi comme vous orréz qui tayre se voldra. Hue de Caurelay, quant Bertrant s’en ala, moult amoureusement adont le convoia et lui a dit : « Bertrant, savéz comment il va. Nous fusmes compaignons en Espaigne dela, de prisons et d’avoir chascun si octroia. Oncques le corps de vous au mien s’i n’estriva. Je suis vostre tenu, je l’ay sceü pieça et je m’avisera comment la chose ira, mais que mon corps icy de tant vous aidera : c’est de .x.M. livres que mon corps paiera. – Je ne sçay, dist Bertrant, comment la chose ira. Nous fusmes compaignons ou païs par dela, en Bretaigne et ailleurs la fusmes longtemps a. Je ne veil riens compter, ne ne conteray ja. Mais se j’en ay mestier, on vous en priera. » Au departir qu’il it l’un l’autre baisa. Ainsi s’en va Bertrant, a Dieu se commanda.
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475 Ainsi s’en va Bertrant qui cuer ot de lÿon. De Bourdeaux se parti, la cité de renon. Il n’ot pas tant alé, si comme dit la chançon, que un escuier lui vint a pié comme garçon et ot suyvy Bertrant, comme dit la chançon. Bien recogneu Bertrant quant il vit sa façon.
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- Episodes espagnols -
Adont isnellement ousta son chapperon. « A, Sire, dist il, a Dieu beneïsson. Quant sur les champs vous voys je ne scens que bien non. – Amis, ou aléz vous ? dist Bertrant ault ton. – Sire, dist l’escuier, je revois en prison a Bordeaux la cité, comme doys de raison, car je ne puis encores avoir ma rançon. – Et combien te fault il ? dist Bertrant le baron. – Sire, il me fault .C. frans, je croy, ou environ. – Cent frans, se dist Bertrant, ce n’est mie foison. Et il t’en fault .l. pour un destrier gascon, .l. pour toy armer, tu en as bien besoign. » Dist a son chambellain, c’on appeloit Yvon : « Veilléz lui .iic . frans donner tout en pur don. Il est bien homme d’armes et bien le cognoisson. Il me viendra servir quant viendra la saison. – Sire, dist l’escuier, Dieu vous face pardon. Vous m’avéz delivré du plus malvait glouton qui oncques portast armes ne vestist aubergon. .xxx. jours m’a tenu es doys les gresillons et les fers en mes piéz par dessus la talon. » Cellui delivré lui a .iic . frans de randon. « Dont viens tu ? dist Bertrant. Ne me foys celoison. – Sire, dist l’escuier, droit de Tarrascon. La est le duc d’Anjou logié ou pavillon, o lui mains chevaliers et gens d’armes foison. La roÿne de Napples lui maine grant tenson. – Amis, se dist Bertrant, a Dieu beneïsson. Je m’en vois celle part, j’en ay devocïon. » 476
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Ainsi s’en va Bertrant, a la chiere menbree. Droit vers Tarrascon a sa voie tournee. Ne sçay que la chançon vous en fust demenee. Il est venu en l’ost a maisnie privee. La fu de celle gent cogneu sans demouree. Venuz sont contre lui, si lui font enclinee.
[166r]
- Siège de Tarrascon Au duc d’Anjou en fu la nouvelle comptee. « Sire, dient ses gens a moult haulte alenee, Bertrant du Guesclin vient, la est dessus la pree. » Et quant le duc l’oÿ, bien lui plaist et agree. Le duc s’en est venu en sa tente litee, du cheval descendi qui la resne ot doree. Atant véz vous Bertrant, a la chiere membree. Le duc a encliné par moult simple alenee. Et le duc lui a dit a moult aulte volee : « Bien veignéz. Vraiment vostre venue m’agree. Comment le faictes vous, pour la vierge honnouree ? – Trés bien, se dist Bertrant qui de riens ne s’esfree, mais que ma rançon fu du tout acquicter. » Se dist le duc d’Anjou : « Par la virge honnouree, elle sera moult bien paiee et ordonnee. Pour .xxx. milles doubles n’y feréz demouree. – Sire, se dist Bretrant, a bonne destinee. Mais encores me fault il autelle duree. »
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[166v]
« Sire, se dist Bertrant, je me suis ransonné a .lx. mille doubles, il fault qui soient paiéz, car oncques ne cuiday de prison estre ousté. – Par foy, se dist le duc, je le cuidoye assez. Nous en inerons bien, or ne vous en doubtéz. J’ay icy une guerre dont je suis trop iré. La roÿne de Napples me fait trop de griestéz. Elle veult contre moy tenir ses herités. Arle le Blanc me tient, toutes ses fermetés.* – Sire, se dist Bertrant, vous le conquisteréz. Jamais n’en partiray jusques vous les aréz. » Lors monta ou cheval quant il fu repposé. Puis a Tarrascon on engins eu levé. Et dist aus geteours : « Faictes et si gictéz. Nous aurons la ville, se croyre me vouléz. » Et ceulx ont respondu : « Si comme vous commandéz, puis que le nostre bien vraiment vous nous voléz. »* Une espie s’en est priveement alé ;
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- Episodes espagnols -
vint a Tarrascon, si est dedens entré ; venu est aus bourjois qui mandoient les clefz et a la cappitaine qui les a gouverné. « Seigneurs, se dist l’espie, envers moy entendéz. Je viens de l’ost au duc qui d’Anjou est nommé. Tout aussi vray que Dieu fu en la croiz penné et qu’il fu autres jour de mort ressuscité, Bertrant du Guesclin est de prison gicté. Il est venu en l’ost a .iim . hommes armé, Bertons et autres gens tellement ordonné que pour pierres gecter ne puet estre grevé. » Et dient les bourjois : « Mal y fust arrivé, car puis qu’il est venu, véz nous cy afolé. » 478
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Par dedens Tarrascon, la ville suisant, furent touz esbaÿz les petis et les grans quant ilz eurent oÿ la nouvelle Bertrant. Or nous dit l’istoire, dont fait est le rommant, devant Tarrascon, dont je vous voys comptant, faisoit le duc gicter maintes pierres pesant a .xviii. engins qui furent la devant. En icelle saison, dont je vous voys comptant, vint au duc un secours pour l’amour de Bertrant : Olivier du Guesclin, son frere le vaillent, Olivier de Manny, un hardy combatant, et Hervé le sien frere vint a lui acourant, et Alain de Manny, avec lui maint sergent. Si vint Petit Cambray sur .i. cheval courant, Alain de la Hussoie et son frere Tristant, Emerïon c’on va Estienne appellant. Et quant Bertrant le sceu, si les va festïant et ilz furent de lui bautz, liéz et joyant. Il leur a dit : « Seigneurs, je vous jure et creant qu’en Espaigne irons temprement cheminant, mais que j’aye paié ma rançon trés grant. Chascun vous donra cotte, haubert ou jaserant.
- Siège de Tarrascon -
[167r]
Et villes et cités enin vous donront tant que bien riche seront touz voz appartenant. » Et ilz ont respondu : « Nous l’alons desirant. Nous materons Pietres le chief mescreant. »
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479 Seigneurs, grant fu le siege devant Tarrascon. Avec le duc d’Anjou estoient mains baron. La fu Robert le conte qui fu de sa maison. Si fu le Burs de Bierne, .i. hardy compaignon, et Perrin de Savoie, que oublier ne doit on. Jacques de Bray y fu et Alain Papillon, et le petit Meschin qui cuer ot de lÿon. Or it le duc d’Anjou faire telle façon dessus une riviere qui court a Tarrascon, un grant pont de basteaux et grant defencïon encontre les galies, dont il venoit foison.* La roÿne de Napples qui tant ot de renon, pour la ville secourre qui estoit en son nom avoit .lx. néz, je croy, ou environ, de bonnes gens arméz a leur divisïon. Mais n’y peurent entrer ny empirer .i. bouton, retraire lé convint, ou vousissent ou non. Droit a Arle le Blanc irent repairison. Moult fu grande la guerre en celle regïon.
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480 Par dedens Tarrascon, celle ville fermee, la fu le duc d’Anjou, o sa gent redoubtee. A .xviii. engins gictans de randonnee assaillirent la ville toute jour ajornee, qui bien se defendoit, comme gent aduree. Ne se vouloient rendre, ains gardoient l’entree. Lors Bertrant du Guesclin qui tant ot renommee, monta sur son cheval, ains n’y porta espee, et n’avoit en sa main que une verge pelee. 13797
corr. d’après Nh : encontre les Engloys d., voir note.
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- Episodes espagnols -
Aus bailles est venu, qu’il n’y it arrestee, et puis s’est escrié a moult aulte alenee : « Faictes parler a moy sans nulle demouree. Et se vous ne creez mon dit et ma pensee, il n’y ara cellui qui n’ait la teste coppee. » Parmi la ville ont la nouvelle escoutee que Bertrant du Guesclin les atent a l’entree. 481
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Les bourjois de la ville vindrent isnellement aus bailles de la porte pour tenir parlement. Le cappitaine y fu tout premierement. Et quant Bertrant les vit, si leur dist doulcement : « Beaux seigneurs, je vous pri, pour Dieu omnipotent, que vous aiéz pitié de vous et de voz gent, de femmes et d’enfans, du tout entierement, car je vous jure sur Dieu, que je croy fermement, que se vous ne creéz conseil isnellement, je vous feray morir a dueil et a torment. Il ne vous demourra monoie ne argent, ne femme, ne enfans, ne cousin, ne parent, que tout ne soit gasté et mort honteusement. Véz cy le duc d’Anjou qui tant a hardement, qui est frere du roy a qui doulce France appent. Obeïsséz a lui, si feréz sagement. Et si vous ne le faictes, je vous ay en convent, et si le veu a Dieu, a saint Yve ensement, que je demourray si tant et longuement que je vous auray a mon commandement. Et se je le puis faire et raison s’i assent, touz les riches bourjois de vostre contenement feray trenchier les testes a touz entierement. Et tout le deumeurent de la guienne gent feray de Tarrascon issir communement, et femmes et enfans et tout le convent, qu’ainsi s’en ystront tout communement que Eve et Adam irent par le Dieu commant,
[167v]
- Siège de Tarrascon par desobeïssance qu’ilz irent plainement quant Eve fu temptee par le fait du serppent. Et si vous aviséz demain tant seulement et puis le second jour a prime droitement soiéz appareilléz a mon commandement, ou jamais vous n’aréz paix en tout vostre vivent. »
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[168r]
« Seigneurs, se dist Bertrant, pour Dieu de paradis, or aiéz s’il vous plaist conseil et bon advis. Et si ne conscentéz ne en faiz ne en diz, la roÿne de Napples, a qui este subgiz, ne vous puet conforter des gens de son païs. Mais le bon duc d’Anjou qui tant est poestis, qui est frere germain au roy de Saint Denis, vous puet bien garantir tant qu’il sera vif. Je le vous dy pour bien et pour estre gariz. A cellui vous comment qui en la croix fu mis. » Adont le cappitaine est dela deppartyz. Parmy Tarrascon en est levé le cry. La peüsséz veoir les grans et les petis et dire l’un a l’autre : « Vray Dieu de paradis. Véz cy durez novelles, dequoy nous vauldrons pis, quar il fault que le sort Bertrant soit acomplis. Oncques ne fu chastel si fort ne bien assis que a lui ne se rendist ains qu’il fu departy. » En Tarrascon fu grant noyse et grant cry. Les femmes estoient encontre les maryz, cent en y ot en la ville batuz des plus hardiz.
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483 Dedens Tarrascon est la nouvelle alee que Bertrant du Guesclin qui tant a renommee, les menace touz de mourir a l’espee se la ville briesment n’est par eulx delivree. Adont fu la commune noblement assemblee pour tenir parlement de celle eure ditee.
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- Episodes espagnols -
La fu au duc d’Anjou la ville actordee. Et en celle saison y ot grande meslee. Contre les Provenceaux a baniere levee venoient devers l’ost chascun ou poign l’espee. Dessus une montaigne qui estoit grant et lee, monterent noz gent de hardye pensee. Et ceulx de la dessus ça jus en la vallee traoient ierement sans faire demouree ; mais le trait ne vali une pomme pelee, car par dessus le trait fu nostre gent montee, et furent reculéz bien une arbalestree. En ceste place fu ceste gent delivree. Olivier de Manny et ceulx de son armee prindrent le cappitaine a icelle jornee. Lendemain au matin, aprés prime sonnee, fu en Tarrascon ceste gent aprestee pour la ville rendre qui bien estoit fermee. Quatre bourjois y vint, de grande renommee, devers le duc d’Anjou en sa tente drecie, ou toute la leur fu de son ost assemblee. 484
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Le duc d’Anjou estoit dedens son pavillon* o Bertrant du Guesclin, qu’il l’ama de cuer bon, Olivier le sien frere, bien le scet on, et Petit de Cambray avec Emerïon, Alain de la Hussoie et son frere Guïon. Si fu Robert le conte et Regnault d’Aridon, avec Jacques de Brai et Alain Papillon, et le petit Meschin et le bourc de Digon, avec pluseurs autres qui sont bon champïon. Plus desirent la guerre que espervier le hayron. Les quatres bourjois vindrent dedens le pavillon, dist l’un des plus sages qui fu de grant renon. A dit au duc d’Anjou sans nulle arrestizon : « Trés gentilz duc, de noble estractïon, a vous nous ont tremis ceulx de Terrascon. Bourjoises et bourjois et touz les enfançon
[168v]
- Siège de Tarrascon vous envoient les clefz a vostre devisïon. Et vous prient pour Dieu qui soufry passïon, que a touz ceulx de la ville veilléz faire pardon qui contre vous ont fait grande rebellïon. » Et quant le duc l’oÿ, si dreça le menton. Moult grant piece pensa qu’il ne dist o ne non, car receü avoit grande perdicïon pour ceste ville avoir en sa poctessïon. Mais Bertrant du Guesclin l’appella a ault ton : « Sire d’Anjou, dist il, or oiéz ma raison. Je vous prie pour Dieu et le corps saint Yvon que a ceulx de celle ville veilléz faire pardon. – Bertrant, se dist le duc, je le vous donne en don. Par vous ce sont rendu et par vostre achoison. Et je le vous octroy et en faictes vostre bon. – Or avant, dist Bretrant, presentéz vostre penon et on le portera lassus en ce danjon. »
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[169r]
Quant Bertrant le gentilz ot fait mectre voiant le pennon sur la tour qui estoit par avant, les portes it ouvrir du tout a son commant. Les dames de la ville venoient fort plourant a l’encontre du duc qui le cuer ot vaillant. La endroit se logerent touz les plus souisant. Gens y laissa le duc du tout a son commant et un bon chastellain ou il s’aloit fïant. Et puis dela ala droit en Arle le Blanc, aus champs s’i se loga et mist .i. siege grant. Mais parlement y ot du duc et de Bertrant et tant qu’il m’est advis, selon mon escïent, qu’ilz irent leur actort par monnoie paiant. Dont Bertrant du Guesclin leur a dit en oiant : « Seigneurs, il me convient, se Dieu plait, faire tant que je me puisse armer, car mon temps voys perdant. Il ne me fault que argent ne me voyse adoubant et prier mes amis qu’ilz me voisent aidant.
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- Episodes espagnols -
Et je leur aideray en Espaigne la grant, car je ne ineray jamais en mon vivant si auray mis le roy Henry ainsi que devant. Un pelerin m’a dit, de Saint Jacques venant, qu’ilz sont devant Toulecte et la se vont logent. La est le roy Henry qui le cuer a dolent, la reïne sa femme qui de beauté a tant, et l’arcevesque aussi qui les va va confortant, le Besgues de Villaines et o lui ses enfant. Devant Toulecte sont, la me vont actendant. En Bertaigne m’en iray, se Dieu plaist, chevauchant. Se iray veoir mes gens a Roche Dorïant, le Seigneur de Courant, un chevalier vaillant, et touz mes amis que je voys desirant. Puis iray a Bourdeaux tenir mon convenant que je fauldray ja en jour de mon vivant. » Se dist le duc d’Anjou : « Vous aléz bien parlant. De moy emporteréz .x.M. maintenant. Et au pappe de Romme iray si exploitant que .xx. mille en auréz et puis feray tant que monseigneur, mon frere, le roy le vaillant, vous en donrra plenté, pour vray le vous creant. Et de moy en auréz .xx. mille en confortant. Et se besoign vous croist, si le m’aléz mandant, car s’il a point d’argent en ce monde comptant, assez en trouverons, ne vous aléz doubtant. » Dist Bertrant du Guesclin : « Véz cy secours vaillant. » 486
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Bertrant en appella Olivier de Manny, un sien cousin germain, bon chevalier hardy, et son frere aussi, un chevalier hardy : « Soiéz appareilléz, seigneurs, je vous en pry pour venir en Espaigne tantost avecques my, et pour reconforter le noble roy Henry et destruyre dam Pietre qui l’a bien deservy. » Et ilz ont respondu : « Nous n’y arons point failly. »
- Bertrant vient en aide à d’autres chevaliers [169v]
Bertrant a prins congié au duc sans nul detry, et a touz les barons qui sont illec aussi. Adont isnellement Bertrant s’en departy, les .xx.M. lorins ne mist pas en oubly. Mais l’istoire dit et tesmoigne aussi ains que a Bourdeaux venist, dont l’autre jour issy, de tout son argent dont on l’avoit servy il ne lui en demoura vaillent un parisy, que parmy le chemin il n’eüst departy a pouvres prisonniers qui l’avoient servy.
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487 Seigneurs, c’est verité que Bertrant le senné encontra chevaliers et escuiers louhéz c’on avoit a Bourdeaux laidement rançonnéz, du roiaume de France et de Bertaigne néz. Premier en trouva .x. laidement atournéz : l’un estoit a pié, l’autre mal monté, le tiers fu mal vesti, l’autre dessiré. Tout ainsi comme chatz estoient assembléz. Chevaliers, escuiers c’estoient renvoiéz sans or et sans argent, soufrant grandes griestéz disoient l’un a l’autre leur grandes neccessités et comment on les ot en prison demenéz, et a gehyne mis et les membres tiréz, et mis en gresillons et les piéz enferréz, et maudisoient l’eure c’on les avoit menéz ou roiaume d’Espaigne pour telles cruaultéz. De Nadres divisoient des mors et des navréz. L’un disoit a l’autre : « Plus n’y seray tourné. » Et l’autre disoit : « J’en suis tout appresté, mais que Bertrant y fust arriere retournéz. – C’est dommage, dist l’autre, qu’il n’a argent assez, car il auroit bien tost gentilz gens recovréz. » Et le second disoit : « Il est bien verité. » En une houstelerie furent toux .x. entréz. ilz ont l’ouste appellé qui les a escoutéz.
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- Episodes espagnols -
« Aportéz nous du vin, houste, se vous vouléz. » Et l’ouste respont : « Dequoy le paieréz ? » Se dist un escuier : « Dequoy vous esfraier. Il a cy chevaliers et escuiers assez. – Chevaliers, dist l’ouste qui fu bien escolé, ou avéz vous laissé voz esperons doréz ? Se eusséz voz chevaux ceens bien establéz, encores ay je estable, fain et avoyne assez pour .l. chevaux norrir .x. mois passéz. » Se dist un escuier qui de Nante fu né : « A, Bel houste, dist il, pour Dieu, ne vous gabéz. Nous venons de Bourdeaux, si avons des maulx assez. Et Bertrant du Guesclin qui nous y ot mené, delivré fu l’autrier, un chevalier louhé, a .lx.M. doubles d’or in fu rançonné. Tout le monde en fu forment espaonté comment un tel avoir pourra estre trouvé. » Et l’ouste respont : « Il en aura assez. Encores ay je .x. chevaux, dont je heanne les bléz, et cincq cens gras moutons et de pourceaux lardéz, du vin en mon celier .xxx. tonneaux passéz, que pour lui vendray et touz les draps forréz que a ma femme achatay, par Dieu qui fu penné. Il en aura plus tost que un pestaux n’est lavé. Et pour l’amour de ce que de lui me parléz, je vous feray servir de rost et de pastéz, de touz les meilleurs vins que j’aray boyréz, et vous coucheray bien, se demourer vouléz, car du meilleur du monde aujourd’huy me parléz. C’est tout le plus hardy et le plus redoubté, et le plus heureux et le plus fortuné qui soit en tout le monde, ne qui oncques fu né. Car avec tout ce qu’il a ainsi fondé, si est le mains conveteux qui soit en .C. citéz. C’est tout le plus courtoys qui peust estre trouvé. C’est le mains ourgueilleux et le mieulx enparlé qui soit en tout le monde environ de touz léz. » Lors dist a sa maisnie : « Ceste gent cy servéz
[170r]
- Bertrant vient en aide à d’autres chevaliers de touz les biens que j’ay et que Dieu m’a prestéz. » Lors fu la table mise ainsi con vous oiéz. L’un a l’autre dist : « Dieu nous a amenéz. Saint Julïen nous a richement housteléz. »
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[170v]
Si comme les prisonniers estoient a mangier, atant véz vous Bertrant, o lui son escuier, qui tant a son houstel se venoit herbergier. Et quant les prisons ont veü le chevalier, touz ensemble les diz ont prins a merveiller. « Véz cy Bertrant, dist il qui cy se vient loger. » Adont se sont touz contre lui prins a drecier. Et quant Bertrant les vit, si leur a dit sans demourer : « Dont venéz vous, dist il, pour Dieu le droiturer ? Seigneurs qui vous a fait ainsi appareiller ? Il semble a mon advis que veignéz de chacier ou aucun murtrier vous a fait espïer. Je ne vous vy de plus, se Dieu me veille aider, que vous estoiéz montéz a loy de chevalier, en armes, en chevaux a loy de soudoyer. Devant Nadres vous vy a loy de bon guerroier, vous estez escuier et vaillant chevalier. Aussi bien vous cognois comme je foys un denier. Par ma foy, de vostre mal me doit bien ennuier. Il ne semble noient que veignéz de piller. Se m’aïst Dieu de gloire, je vous en ame plus chier. – Sire, se dist l’un, nous sommes prisonnier. Pris fusmes devant Nadres, ne le pouons noier. A Bourdeaux nous ont fait mains trés grant emcombrier, en prisons, en ceps et en fers bien atachier, et en gehine mis comme larron murtrier. Mis sommes a inance, qu’il nous convient paier sur nostre serement ou retournier arrier. Si m’aïst Dieu de gloire, nous n’apportons denier. Mais pour l’amour de vous, chevalier droiturer, l’ouste de ceens nous envoie a mangier
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- Episodes espagnols -
et a boyre son vin du meilleur du celier. » Et quant Bertrant l’oÿ, si va l’ouste embracier. Lors s’assist deléz eulx et si se vont drecier, et dient : « N’aiert point a si noble princier de seoir deléz nous, ne son corps embracier. – Seigneurs, se dist Bertrant, or le veilléz laisser car o vous demouray, dont j’ay grant pitié. Par moy avéz perdu vostre païs a voider, et par moy auréz, se Dieu plaist, recouvrer. » 489
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Deléz les prisonniers s’assist Bertrant le ber et de leur avanture leur prist a demander. « Seigneurs, se dist Bertrant, ne me veilléz celer combien vous conviendra ensemble reporter pour vostre in acomplir ains que puisséz iner. » Adont ont commaincé ensemble a deviser. La monte de leur in commaincent a nombrer que .iiii. mille livres leur convient sans cesser. « Quatre mille, dist Bertrant, c’est legier a iner. Et si vous en fault bien .iim . pour monter, a Bourdeaux la cité donner et presenter, et mille pour voz fraiz pour venir et aler Et si en fault a l’ouste mille quant sera au decevrer, pour tant que pour m’amour vous a cy fait digner. » Son chambellain Yvon va tantost appeller et dist isnellement : « Faictes cy delivrer .viii. mille lorins et ne m’en fais parler. Cellui argent que je porte ne me doit demourer : il en viendra de l’autre pour moy rachapter. » Et quant ceulx l’ont oÿ si faitement parler, lors s’alerent touz a genoilz encliner. « A, Sire, font ilz, Dieu vous veille garder. – A, Gar, se dist Bertrant, je vous veil commander que quant vous orréz dire et pour vray recorder que je voyse en Espaigne, ne veiller arrester, 14118
e. si en en f., premier en exponctué.
[171r]
- Bertrant vient en aide à d’autres chevaliers car je vous y feray grant honneur conquester. Le roy Henry feray comme roy couronner, et dam Pietre feray a douleur decliner, s’il plaist a Jhesucrist, que je doys honnourer. »
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490 Quant les prison oÿrent le noble Bertrant, s’ilz en furent léz, ne l’aléz demandant. Et l’ouste le va doulcement mercïant et lui dist : « Monseigneur, car laisséz maintenant vostre or et vostre argent, mestier en avéz grant. Encores en ay pour vous du tout a vostre commant. » Dist Bertrant du Guesclin : « N’en parléz plus avant. Jamais n’en tenray, croys, en jour de mon vivant. Bien sçay que j’ay encores de remanant xii.M. pour aler a Bourdeaux cheminant ; mais ainsoys m’en iray en Bertaigne la grant. » La nuit sont demeuré bautz, lïéz et joyant Et lendemain matin, aprés l’aube crevant, se sont ceulx departy tendrement larmoient. « Sire, nous en alons a Bourdeaux errant. Nous somme touz a vous con vray obeïssant. – Aléz, se dist Bertrant, a Jhesu vous commant. Ne me saluéz homme ne femme ne enfant. »
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[171v]
Les prisonniers s’en vont vers Bordeaux la cité de rançon pourveüz et trés bien remonté. Quant vindrent a Bourdeaux, si sont remoustré a leurs maistres mesmes ou s’estoient juré. Et de l’oustel au prince, chevalier honnouré, quant voient les prisons si trés tost retourné, et si bien en arroy et si bien ordonné, n’y a cellui qui n’en soit a son cuer esfraé. « A, Faulx gloutons bertons, ou avéz vous esté ? Vous estez murtriers et si avéz robbé. 14145
mais en ainsoys m., en cancellé.
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- Episodes espagnols -
Vous en seréz penduz et briesment tryné. » Au seneschal s’en vont, la furent ilz mené. Et si ont dit : « Sire, nous sommes enchanté. Ces prisonniers cy nous sont faulcement eschappéz. Ilz juroient touz quant furent rançonné que par la rançon ou furent accordé seroit toute vendue de chascun son herité. Jusques en leur païs n’ont pas encore esté et si sont si endroit ensement retourné. » Lors dist le seneschal : « Ou avéz vous esté ? Ce qui n’est pas perdu avéz ja recouvré. » 492
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« Ha, dist le seneschal, savoir nous conviendra qu’il vous est avenu, dire le vous fauldra. » Se dist un chevalier : « Et on le vous dira. Trouvé avons Bertant qui en Bertaigne va. Par dedens un houstel avec nous se loga et nostre rançon a chacun demanda. Quatre mille lorins a nous il en bailla et pour nous remonter .iim . nous donna. Et a l’ouste en donna mille pour ce qu’il apporta ens ou non de Bertrant, que loialment ama, a boyre et a mangier qui bien nous besoigna. » Oyt ce le seneschal, moult de foy se seigna ; dist que nulle hystoire puis que Dieu endura la mort dessus la croix quant Longis le perça n’oÿ parler de tel, moult forment le prisa. En la sale s’en vont ou le prince on trouva, qui avec la princesse moult noblement digna devant en audïence ceulx qui estoient la. L’aventure Bertrant leur dist et recorda, comment il se maintint aus prisons qu’il trouva. Quant la dame l’oÿ, forment s’esmerveilla. 14182
et l’oute en d., a suscrit.
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corr. d’après P : s. savoir vous c.
- Bertrant vient en aide à d’autres chevaliers [172r]
Ce que lui ot donné ne plaint ne regreta et dist jamais avoir si bien n’employera. Mais le prince dist lors : « Savéz comment il va ? Si se chevalier vit ainsi que regné a, oncques plus grant de lui a cheval ne monta. Tout partout en ce monde chascun le doubtera. Encores mauldiray l’eure quant on le delivra. » Seigneurs, il se dit voir, ainsi c’on vous dira. Or commaince chançon, ou de beaux motz y a.
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493 Seigneurs, or entendéz, que Dieu vous benye. De Bertrant vous diray, ou tant ot baronnie, qui par Bertaigne va, une terre jolye. Vint au seigneur de Cran qui lui promet aÿe. Le viscoins de Rohen lui it grant courtoisie, Robert de Beaumanoir, a la chiere hardie, et le sire de Gal qui fu de sa partie. Et Charles de Dinant lui moustra chiere lye, et l’evesque de Renes qui moult sceu de clergie, Bertaigne bertonnant, une gent moult hardie. A Roche Dorïant a sa voye acueillye. La ville fu a lui donnee et octroïe. Chascun lui actorda requeste et seignorie. Et il leur mist un jour, qu’il ne faillirent mie, que la inance fu a Bourdeaux envoïe. Et atant se party avec sa maisnie. A la Rochelle ala qui sur mer est bastie. La trouva chevaliers et grant escuierie dont chascun retournoit en la soue baillie comme pouvre prisonnier, mauvaise robe vestye et monté pouvrement a privee maisnie. Ils furent pouvre gent et pouvre compaignie. Bertrant ont encontré qui trés bien les festye. Ne sçay que la chançon vous en fust alongie. Les prisonniers demainent joye a chiere lye. Ains que Bertrant cessast, comme l’istoire crie,
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- Episodes espagnols -
furent vingt mille livres en icelle partie baillees et delivrees, ne lui demeure maillie. 494
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Quant Bertrant du Guesclin revint en sa prison, denier ne maille n’avoit vaillant un esperon. En la place trouva le prince de renon, et Jehan de Chando qui cuer ot de lÿon, Huon de Caurelay et des autres foyson. Quant il a veu Bertrant et touz ses compaignon, il leur a dit : « Seigneurs, or vient ma rançon. » Dient les chevaliers : « N’a vaillent ung oignon. – C’est voir, se dist le prince. Vous estez compaignons. N’en conte en tout le monde vaillant .i. esperon. » Lors a dit a Bertrant doulcement a bas son : « Bien reveigné, Bertrant, en icelle saison. Puis qu’il a bien paié, se n’est pas mon prison. Ou estez vous logié ny en quelle regïon ? – Sire, prince, dist il, en la vostre prison. Je n’ay ne croix ne pille, se m’aïst saint Symon. – Par ma foy, dist le prince, ce n’est pas pour vostre bon. Quant seray je paié ? J’en ay devocïon. – Sire, se dist Bertrant, en procheine saison. Vous pourroiéz bien vouloir, n’en feray celison, que de ce paiement n’eüsséz nul coron. – Comment, se dist le prince, estez vous si berton que ainsi ont vostre argent touz les autres prison et vous nous demouréz un pou en nostre prison. – A, Sire, dist Bertrant, n’en parléz se poy non. Je leur doys bien donner, ce sont mes champpïon. » 495
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Seigneurs, aprés ce temps, se dit l’auctorité, fu tellement Bertrant aidé et conforté que le prince en fu forment espaonté. Ensement que Bertrant fu en la court alé avec les chevaliers servi et honnouré,
[172v]
- Bertrant paie sa rançon véz vous un chevalier en la sale entré, dist au prince de Gales : « Monseigneur, entendéz. De par Bertrant est cy .i. sommier d’or troussé, qui pour l’amour de lui vous est cy envoié. Trente mille doubles d’or cy compter vous pouéz. – Qui les a envoié ? dist le prince senné. – Sire, prenéz l’avoir et de plus n’en parléz. » Lors vint un escuier qui fu bien advisé. – Sire, prince, dist il, Bertrant est rachaté de .xx. mille doubles d’or ; ensement en avéz .l.M. doubles et dix mil en prenéz sur la vostre moullier, ou grant est la beauté. – Se chascun fait ainsi, dist le prince membré, je seray bien paié et devray assez. »
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[173r]
La rançon Bertrant fu si trés bien paiee, si que du remanant it grande courtoisie. Tant it que en la cité qui sur mer est bastie, on ne lui demanda une pomme pourrie. Et puis manda ses gens et sa chevalerie. Tout parmy Roncevaux a sa voye acueillie a mille soudoiers, de bonne gens hardie. Olivier de Manny fu en sa compaignie, son frere Olivier aussi n’y faillie mie, et Henry de Manny qui bons escuiers guye. Et Alain de Manny y fu lance drecie, et cellui de la Hussoie et Antoyne de Brye, le sire de Pommiers qui onc n’ama folie, Guillaume de Lonnoy et Tibaut de Pavye. Si fu Emerïon, homme de grant lignie, et cellui d’Odrehan qui fu de Pictardie, et le petit Meschin et le bourc de Penie. Si fu Karenlouet, a la chiere hardie, qui puist octist Chando d’une dague aiguisie. En Espaigne s’en vont, n’est nul qui les detrie. Vers Molines s’en vont, une duché garnie,
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- Episodes espagnols -
dont Bertrant du Guesclin avoit saisi partie mais il ne l’avoit pas entierement gaignie, comment que roy Henry lui donnast une fye. Et le roy Henry fu en une autre partie, entre lui et ses gens ont Toullecte assegie. Et si fu la roÿne, que Jhesu benye. Si y fu l’arcevesque de Toullecte l’antye, qui it au roy Henry honneur et courtoisie : pluseurs foys lui sauva sa moullier et sa vie. 497
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Par devant la cité de Toulecte nommee y ot maint chevaliers et gens bien ordonnee, le Besgues de Villaines en icelle armee qui en Espaigne acquist los et grant renommee. Mais en Toulecte ot une gent forcennee, car ne vouloient riens fors que guerre aduree. Le chastellain avoit la defense juree, qu’il ne la rendroit a creature nee fors a Pietres le roy, par sa foy creantee. Pour le chastel garder qui tant a renommee, n’isoit en la cité qui estoit grant et lee, ain qu’il ne fust prins ne sa char atrappee, car s’a ceulx du chastel n’estoit paix pourparlee, la ville ne pouoit a nul estre livree. 498
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Entre ceulx du chastel et de la ville aussi* avoit une devise que je vous diray cy : se ceulx de la cité, dont je vous diray cy, voulent au chastellain ou delivrer pour lui .iiii. bourjois ou .v. qui sont les mieulx norry, en la cité ira et mains et a vespry et le confortera ainsi con vray amy, long temps tindrent le siege contre le roy Henry en actendant roy Pietre, a qui furent amy. 14319
corr. d’après P : car sans ceulx d.
[173v]
- Siège de Toulecte Il estoit a Sebile, ainsi que diray cy ; s’estoit en Bel Marin, un roiaume garny, esté querrir secours a guise d’ennemy. Le roy de Bel Marin par grace lui oufry dix mille Sarrazins que au roy Pietre vendy sur la loy Jhesucrist et dist : « Je le reny. » Le roy de Bel Marin trés bien les pourveÿ et tremist parmy mer tout ce qui leur failly.
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[174r]
A cestui parlement ou Pietre s’actorda la loy de Jhesucrist a ce temps renoya. Lors l’amiral de mer sur sa foy lui jura que a droit port les paiens liverra. Et Pietres ot convent que par terre va. Dix mille Crestïens de Sebile gicta, et dix mil Sarrazins que Juïfs envoia. Il chemine de nuyt et de jour reposa pour venir a Toulecte, Henry prandre cuida. Il fu devant Toulecte et de prés l’assega. Ceulx de Toulecte oÿrent que Pietres venoit la, ilz en furent joyaux, chascun le convoita, car la famine vint qui fort les tormenta. Or isserent un jour es coustés par deça et eurent a conseil que tantost c’on saura que Pietres doit venir, chascun le festira, a l’encontre de lui la cité istra la plus grande partie et l’autre demoura. Mais un jour en issirent pour venir par dela, au léz devers Cordonne l’issue s’apporta. le Besgues de Villaines la nuyt eschegaita. Droit sur le point du jour l’issue regarda. Au dessus de la ville par .i. val s’en ala. Et puis vint sur l’embusche et sur eulx s’avala, et crye son enseigne et le cheval brocha. Droit entre la cité et l’ost se devala. Et la furent encloux, deables les apporta,
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- Episodes espagnols -
car mort furent et prins que pié n’en eschappa. La ville si le vit, chascun armer s’en va. Le chastellain lassus ierement s’ordonna. L’ost au roy Henry moult bien s’appareilla. La commainça assault qui longuement dura. 500
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La cité de Toulecte fu forment envaïe. La porte fu ouverte, la chaine abaissie. Aus bailles sont venuz, tout oultre la chaussie. La vint le roy Henry baniere desploÿe, et tenoit en sa main un dart par grant maistrie et lance aus Espaignolz et forment les agrie. Et disoit haultement : « Fole gent enragie. Vous avéz autrefoiz esté de ma partie. Or m’avéz refusé, fole gent renoïe : vous en seréz destruit a dueil et a hachie. Ja dam Pietre le fol ne vous fera aÿe. Se par force vous prens, vous auréz villonie. Juïfz et Sarrazins, telle gent ennemie, feray touz ardoir sur la maistre chaussie. » Jusques aus bailles s’en vient sur la gent enragie, es portes les remist par sa chevalerie. Le chastellain estoit desur la tour antie et voit le roy Henry qui ainsi contralie. Il it gicter sur lui chaillotz par sa maisnie. « Par foy, dist il, Henry. Ne vous doubte une alie. N’aura beste ceens ne soit toute mangie. Nous mangerons l’un l’autre par droite enragerie, ou Pietres sera mort et tolue la vie, ainçois que la cité aiéz en vostre baillie. » Lors commainça l’assaut et iere l’envaïe. le Besgues de Villaines ierement les cuvrie. 501 le Besgues de Villaines ot cuer de chevalier. 14375
corr. d’après P : e. l’autre aus E.
- Siège de Toulecte -
[174v]
Si ot le roy Henry qui moult fait a priser. La cité assaillirent jusques a souleil couchier. La vile fu moult fort et devant et derrier, parfont sont les fousses c’on a fait renforcer. Ceulx de dedens sont retraiz a leur desirer et ceulx deça revont dedens leur ost logier, et actendent secours, ilz en ont bien mestier, car dam Pietre venoit a la cité aider. L’amiral faisoit ses gens par mer nager que ceulx de Bel Marin faisoient envoier.* Ou secours de la mer estoient .x. millier* Sarrazins mescreans, que Dieu doit emcombrier. Et vient Piectre par terre, o lui maint soudoier, et furent bien .xx.M. pour s’onnour essaucer. Et venent toute nuit jusques a l’esclairer, de jour se reposent, es boys se vont logier, avec eulx font porter a boyre et a manger. Bien cuide avoir l’ost Henry a essiller, sourprendre les cuidoient et mectre en leur danger. Mais Henry le sara, a qui Dieu veille aider. Car aprés tel assault qui it a ressongner, le Besgues se leva quant vint au descoucher. De lui furent mandé tantost les charppenter devant la cité it tantost fourches lever. Les prisons it droit la mener et convoier, et pour faire au vent encroier et bailler en despit de la ville et pour eulx courroucer.
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502 Ensement comme le Besgues fait pendre celle gent, il y ot un bourjois, riche si grandement, aus gens le roy Henry a dit couvertement : « Menéz moi a Henry, dist il, appertement. Je lui feray prouit et honneur grandement. » Adont y fu mené sans nul arrestement. Et quant le roy Henry le vit, si lui dist ierement : « Dy va, se dist le roy, ne me cele noyent.
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- Episodes espagnols -
Pour quoy me sont contraire si fort celle gent ? Ilz estoient a moy il n’a pas grandement. – Sire, dist le bourjois, je vous diray comment. La bataille de Nadres deit vostre convent, car aprés la bataille et le vostre encombrement, le roy Pietres nous prist, je vous diray comment. Nous n’eüsmes de vous aucun confortement. Et adont par ce fait feïsmes serement, les grans et les petiz environneement, que jamais au roy Pietres ne fauldrons nullement. Et aprés tout ce vous diray comment,* qui nous tint orgueilleux contre vous tellement. Mais pas ne le saréz, sachiéz certainement, se vous me respitéz ma mort si en present. » Et dist le roy Henry « Et mon corps s’i assent. » 503
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« Ha, dist le roy Henry qui cellui escouta, or me dy verité et tu n’y morras ja. – Sire, dist le bourjois et on le vous dira. Gardéz vous du roy Pietres, il vous decevra. Le roy de Bel Marin lui envoie deça un secours par la mer qui briesment vous viendra, des plus fors Sarrazins de la mer par dela. Et Pietres vient par terre qui .xx.M. hommes a. Et viennent toute nuyt tant que la nuyt durera et puis qu’il sera jour nul ne cheminera. Et sachiéz s’il puet, il vous decevra ; il le nous a mandé, bien le savons pieça. » Et quant le roy l’oÿ, tout le sang lui mua. Il a dit au bourjois que bien se gardera. Il prinst un messagier, a Bertrant l’envoia, qui fu en la duché que Henry lui donna, qui Molines estoit nommee par dela. Bertrant une partie au fer en conquesta. 14458 14459
corr. d’après P : i. le vous a m. corr. d’après P : l. roy Henry t.
[175r]
- Siège de Toulecte Adont du remanant conquester se pena : l’un obeÿ a luy, l’autre le renoya. Seigneurs, cellui messagier a Bertrant se monstra, le fait entierement tout lui signiia tout ainsi que dam Pietre contre lui s’ordonna. Le messager party et adont esploita. Bertrant lui it honneur et bel don lui donna.
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504
[175v]
Quant le message vit Bertrant le redoubté, le brief du roy Henry lui a lors presenté. Bertrant lire le it, se croy, a un abbé. Quant oÿ la teneur et ot tout escouté, il a dit a sa gent : « Or aions avisé de nostre ami aider et le nostre advohé. Espïer nous convient nostre ennemi mortel, Pietres le mescreant, le traïtre preuvé. Par lui sont Sarazins cy aval amené, par mer venent ja, toust seront cy amené. Or vous appareilléz, n’y aiéz arresté. Alons devers Toulecte, la noble cité. » Olivier de Manny a Bertrant appellé. « Sire, cousin, dist il, j’en ay grant volunté, et aussi ont touz ceulx qui sont cy assemblé. » La furent les Bertons noblement adoubé et montent es chevaux qui furent bien sanglé, et pendant a leurs colz mains fors escuz lassé, et prenent les pennons qui bien furent levé. Au chemin se sont mis de bonne volunté, desirant de combatre et bien entalenté, commes bonnes gens d’armes chevauchant aüné. Bertrant au roy Henry a son estat mandé, qui vient droit a Toulecte pour Pietre le doubté, et qu’il soit sur sa garde qu’il ne l’ait atrappé.* La vont les chevaucheurs qui sont bien advisé, despitent Espaignolz qui venent abryvé. 14496
sur g sa g., g cancellé
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- Episodes espagnols -
Le roy Pietre venoit a son riche barné. Droit au port sont venuz, illec furent trouvé iceulx de Bel Marin richement adoubé. Et quant Pietres le vit, moult grant joye a mené. 505
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Quant Pietres le roy ot o lui les mescreans qui sont de Bel Marine, .i. païs qui est grant, au roy Pietres les vint presenter l’admirans et lui dist : « Roy d’Espaigne, véz cy confortans. Le roy de Bel Marine acomplist voz commans. Gardéz vos ennemis, ne soiéz desfaillans. Car mandé lui avéz que vous seréz passans par dedens Bel Marin, dont il est roy tenans, et seréz la endroit vostre loy renÿant, et prendréz la loy en quoy il est croyant. A sa ille seréz a moullier espousant et la feréz roÿne d’Espaigne tout son temps. » Se dist Pietres le roy : « Je lui suis desirans. Or me veilléz aider et soiéz confortans, par quoy ce faulx bastart qui ainsi m’est nuysant, puisse estre mis a in avec ses aidans. » Se dist l’admirant : « Ja n’en soiéz doubtans. Nous le vous livrerrons quant il en sera temps. Par dedens Bel Marin, au roy qui est vaillant ja sera presenté le lerres soudoians. Justice en sera faicte devant les regardans. » Se dist Pietres le roy : « Je me suis accordans. En nuyt cheminerons tant qu’il sera jour grant. Préz sommes de Toulecte, a dix lieues seant. Touz les coureurs iront quant souleil sera grant. » Ensement fu chascun se fait accordant. Mais temprement cherra l’orgueil et le bobant. Car si bien se exploicta le bon vassal Bertrant, derrieres leur venoit et ses arrieres bant, banieres et pennons desploiees aus champs, 14519
d. l’admirant s j., s cancellé
[176r]
- Le cheval de dam Pietres les chevaux ressengléz, les espies courant pour oÿr des nouvelles des felons mescreans. Bertrant sceu leur embusche et tout leur convenant. Et manda a Henry qu’il seroit departans et viendra contre lui a touz ses combatans.
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506 Quant Bertrant du Guesclin oÿ dire et compter ou Pietre se logeoit et ses gens d’oultre mer, a deux lieues de lui volu Bertrant ousteler si trés priveement c’on ne savoit parler. Et le bon roy Henry se volu si ordonner que de Toulecte it sa bataille livrer. L’arcevesque laissa pour le siege garder et la reÿne aussi y it lors demourer. Devant le jour s’esmouvent sans trompecte sonner, devant Bertrant a fait ses espies aler. Et roy Pietres venoit qui se cuidoit haster pourtant que a Toulecte les cuidoit atrapper. Se fu un mercredi, comme devant disner, que roy Pietres ot fait sa maisnie ordonner dessus une riviere pour eulx reposer. Atant vint une espie qui les print a crier : « A, Franc roy d’Espaigne, or vous veilléz garder. Véz cy le roy Henry qui vous cuide happer. » Et quant roy Pietres l’oÿ, se prinst a cryer : « A, du larron bastart, que Dieu puisse craventer, me veult il dont d’Espaigne par sa force gitter. Or avant, dist le roy, je me veil assembler a ce felon bastart pour ma vie sauver. Jamais joye n’aray si le voys eschapper. » Ainsi disoit roy Pietres, ou il n’ot que aïrer. Car l’istoyre dit que, point ne veult fauscer, plus hardy chevalier ne pouoit on trouver, ne de si grant courage pour bataille achever. Il fait ses corps bondir et ses trompes sonner. Vers Toulecte s’en va pour Henry encontrer.
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- Episodes espagnols -
La vit on l’un l’autre des deux freres troubler, desirans de l’un l’autre essiller et mater. Aus deux ousts approchier puet on bien viser les ungs contre les autres bon visages monstrer. Au venir vist on les lances avaler, banieres et pennons encontremont lever. Pietres vint ou cheval qui lui vint droit jouster. Nul plus courant cheval ne pourroit on trouver : Passefer ot nom en françoys, pour voir, et vint droit de Surie, si comme j’oÿ compter. Un roy de Saint Sepoulcre, que je ne sçay nommer, qui tint Jherusalem, ou on it Dieu pener, crois, ot ce cheval c’on lui it presenter. Le roy de Damïete lui a fait amener, un riche cité qui moult fait a louer, ou on it saint Loÿs jadis emprisonner. Le roy de Bel Marin, que Dieu ne volt amer, ala dedens Surie pour secours amener contre le roy d’Espaigne qui se vouloit grever ; si amena le cheval pour Crestïens grever. Le roy de Bel Marin, dont vous m’oéz compter, le donna au roy Pietre l’autre hier au decevrer et .xm . paiens, tout pour Henry grever. Cellui qui sur ce cheval puet vistement monter, de touz les chevalx c’on lui puet amener ne se doit cellui de dessus par nul tour doubter qui ne puisse bien de touz les autres eschapper. 507
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Le cheval de dam Pietre est de celle façon qu’il ot les quatre piéz aussi blanc que coton, et si ot la teste noire entour et environ, et les yeulx o plus rouge que feu de charbon, et si ot le corps plus jaune que n’est or ne leton. Le roy Pietres brocha a pointe d’esperon tout oultre les batailles, par telle division 14591
corr. d’après P : p. vistement monstrer
[176v]
- Bataille de Toulecte -
[177r]
que tout ce qu’il encontre trebucha ou sablon. Le Besgues de Villaines encontre dam Pieron. Il brocha le cheval a force et a bandon et tenoit une lance a un fer long et bon, vers le roy Pietre va a guise de lÿon. Mais les rens trespassa, voussist ou non, et revint a ses gens qui croient Mahon. Contre les gens Henry it grant establisson. La commainça bataille d’estourdie façon.* Mains chevaliers verserent adonc jus de l’arçon, aval encontre terre verserent maint penon.
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508 Assez prés de Toulecte, .iiii. lieues sans plus, fu faicte la bataille dessus les préz herbus. La s’est le roy Henry ierement combatus. le Besgues de Villaines s’i est bel maintenus. Contre les Sarrazins est roy Henry venus, a destre et a senestre les a forment batus. Et les Sarrazins ierent de bons espois aguz, de lances et de dars, de faussars esmoluz. Ceulx qui choient a terre sont touz esperduz. Le admirant y iert qui estoit moult esmeuz. Chascun par grant despit la place ou est venuz.* Ja fust le roy Henry dolant et irascuz, se Bertrant du Guesclin n’y fust tantost venuz, et Olivier son frere, le preux et le menbruz. Olivier de Manny y est fort acouruz, et Alain le sien frere et Alain et Artuz. Si vint Karenlouet de bon cuer esmeüz, un hardy escuier, sur les autres esleuz. Et quant Pietres le roy a nous barons veüz, il en fu a son cuer moult dolant et confus.
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509 Quant Bertrant du Guesclin a toute son armee vint a celle rescousse a baniere levee,
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- Episodes espagnols -
le roy Pietres en ot la chiere moult iree ceulx qui crioient « Guesclin. » a aulte alenee. La commainça bataille pesant et esfraee. La ot mainte cervelle sur le champ espautree, mains poigns, maintes jambes et testes copés, mains chevaux abatuz la goule baee. Quant Bertrant vit Henry, a toute son armee,* il n’en vousist tenir tout l’or d’une contree. Henry vit l’admiral qui bien iert de l’espee, qui sa gent travailla moult fort celle jornee. Une lance demande et on lui a livree. Lors la mist en sa main, bien estoit ailee, et broche le cheval qui sault parmy la pree, encontre l’admiral s’en va de randonnee. Par dessus son escu lui a telle donnee l’aubert lui perça, la maille a desclouee, et tout oultre son corps fu la lance entree. A terre l’abbati, si gist goule baee. La ot des Sarrazins grant noise et grant criee, et se sont reculéz dessoubz une ramee. Et Bertrant du Guesclin n’y a fait demouree. Il escria « Guesclin » a chiere forcennee, tout devant le roy a son enseigne versee. 510
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Forte fu la bataille, oultrageuse et pesant. Olivier de Manny y fu bien combatant. Si fu Karenlouet, un escuier puissant d’une hache a deux mains qui bien estoit trenchant. Un chevalier gentilz appellé dan Jehan. cellui fu de Marueil, un chastel qui est grant, conseiller fu dam Pietre qui tant fu mescreant. Carenlouet le vit, si le fu esgardant. D’une hache o .ii. mains qui ot ou poign qu’il ot grant, le fery sur l’espaule ; le cop fu si pesant l’espaule et le brafz lui gicta sur les champs. 14638
corr. d’après P : s. le champ espautee
[177v]
- Fuite de Pietres De ce cop fu léz Henry le roy puissant. le Besgues de Villaines si fu bien cognoissans. Adont crie son enseigne, en l’estour fu entrant. Dist a Karenlouet un mot qui fu plaisant : « Benoite soit la mere qui porte telz enfans. »
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[178r]
Quant roy Pietre oÿ le cop qui fu donné, il fu tout desconfy et forment aïré. Son chambellain qui fu Maroule appellé, lui a dit : « Noble roy, or soiéz advisé. Je me doubte forment que aujourduy ne perdéz. Trop voys voz ennemis espris et aluméz. » A icelle parole qui vous oÿ avéz, le Besgues de Villaines s’est des rens dessevréz. Sur le roy Pietre vient droit au senestre léz. Au léz devers la mer les a fait arester, les pors leurs a tolluz et les pas destournéz. Et quant Pietres le voit, le sang lui est mué. A soy mesmes dist : « Je suis desherité. » Il a dit a ses gens et a touz ses privéz : « Mettéz vous a garent qui veult estre sauvé. » A l’entree du boys fu l’assault mortelz. La en y ot assez de mors et de navréz, et des chevaux cheüz qui se sont espauléz. La vist on paiens a la terre verséz. Des .xm . qui furent ne sont .vc. demouréz, et .vic . crestïens, bien richement montéz. Ceulx sont avec dam Pietre es boys entréz. Et la eüst esté roy Pietre delivré, mais noz barons doubterent, se dit l’auctorité, que dedens la forest, dont vous oÿ avéz, ne fussent embusché ceulx du roy Pietres assez, Et pourtant fu Bertrant la endroit arresté.
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512 Pour doubte de l’embusche vont noz gens demourant.
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- Episodes espagnols -
Bien .ii. lieues de terre vont noz gens sejornant et vont pluseurs coureurs envoier par devant, qui la forest sercherent ou milleu et avant. Et quant noz gens choisirent que Pietre va fuyant, la se sont mis aprés a force cheminant. Et Pietre s’en fuioit qui le cuer ot dolant. A Montesclaire vint, la se vont percevant que de la bataille va desconfy repairant. La porte lui ouvrirent pour lui faire garant. Un pou s’est refreschi lui et ses confortant, puis a dit a ses gens : « Or alons remontant. Et n’arrestons pas cy, bien cognois ce Bertrant et Henry le bastart, car ilz nous vont serchant. » Et ceulx ont respondu : « Vous aléz bien parlant. » De Monstesclaire sont isnellement partant, a force de chevaux vont la mer costiant. A leur talent ne trouvent mariner ne chalant qui devers Bel Marine les voyse remenant. De .xm . Sarrazins qui furent apparant ne furent que .vc . adont de demeurant. 513
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Or fu le roy Pietres a poy de compaignie. Monteclaire laissa qui estoit bien garnie. Et véz vous le roy Henry, a tout son ost banie, et Bertrant du Guesclin a baniere drecie, venent a Monteclaire qui fu bien bertechie. Aus bailles vint Henry, a haulte voyz s’escrie : « Parlez, dist il, a moy, seigneurs. Je vous en prie. » La cappitaine vint sur une tour antie. Bien perçoit roy Henry a sa targe vestie. « Que vouléz vous, dist il, en icelle partie ? » Se dist le roy Henry : « Bonnement je vous prie rendéz celle ville. J’ay Toulecte gaignie et Pietres desconfy et toute sa maisnie. Je vous ay en convent, sur la virge Marie, bon seigneurs vous feray touz les jours de ma vie
[178v]
- Henry et son armée à la poursuite de Pietres et vous feray honneur a touz et courtoisie. Toute fausse coutume vous sera abaissie. » Se dist le chastellain : « Et on le vous octroie. » Lors fu la porte ouverte, la barriere baissie. Le roy y est entré avec sa baronie. Au Besgues de Vilaines qui la chiere a hardie, a donné la ville et la chastellanie. En possession fu, que nul ne l’en detrye. François se sont logéz, eulx et leur compaignie. Ainsi ot le chastel le Besgues en sa baillie. Et Bretrant ot Molines, une duché jolye, mais a conquester fu tres bien la moitie. Et Bourges en Espaigne tint Bertrant chiere lie. « Penséz de conquester, ne vous y feignéz mie. Je pourveeray chascun selon sa vaillandie. Ensement comme le pappe pourvoit une abbaÿe, vous pourveeray chascun d’aucune seignorie. Touz riches vous feray ainçois ma departie. »
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514 A Monteclaire fu nostre gent honnouree. Bien y furent logéz jusques a l’ajornee. Lendemain sont arméz comme gent redoubtee et montent a cheval a baniere levee, les bacinés ou chief et puis sainte l’espee. De Montesclaire sont yssus sans demeuree. Aprés Pietres s’en vont, comme gent redoubtee, et jurent Jhesucrist et la vertu louhee, qu’ilz le suyvront tousdiz jusques la mer salee.
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[179r]
Or s’en vont noz barons baniere desploïe aprés Pietres qui ot poy de maisnie. Noz barons sont venuz au mont Sainte Marie. Belle place y avoit et moult noble abbaÿe. La se sont reposé, jusques atant que une espie a dit au roy Henry : « Sire, je vous aie
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- Episodes espagnols -
que Pietres trouveréz, avec sa compaignie, tout droit a Mont Jardin, une ville fornie, car je l’ay encontré bien prés de la chaussie. » Lors monterent es chevaux et n’arresterent mie, la lance en la main et la targe embracie : bien semblant gens de guerre, courageuse et hardie. Et roy Pietre s’en fuit a chiere couroucie. Et vint a Mont Jardin, une ville jolye, aus bailles est venu et sa chevalerie. La porte contre lui trouve bien verrolie. Le chastellain estoit dessus la tour fournie et a veü roy Pietres devant la chaussie. Sa perte savoit bien et sa grant vilonnie. « Que vouléz vous, dist il, en ceste commandise ? »* Se dist Pietres le roy : « Ne recognoisséz mie le vostre droit Seigneur qui humblement vous prie que dedens Mont Jardin logéz sa compaignie ? » Se dist le chastellain : « Vous parléz de folie. Car vous n’y entreréz jamais jour de vostre vie. Aléz vous en decy, le corps Dieu vous maudie. Vous estez si felon que chascun vous renye. Vous avéz renoié Jhesu, le ilz Marie, vous n’estez mie digne de tenir seignorie. A Henry nous tenons, dont chascun s’i octroie. Se decy ne partéz, je vous acertiie que une pierre pesant vous sera envoie. » 516
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Ainsi a Mont Jardin fu Pietres refusé. Adont s’en est party courroucé et iré. A la voye s’est mis les grans chemins ferré, quatre leuez et plus s’en est courant alé. Et véz vous .i. Espaignol qui moult estoit lassé, et son cheval aussi estoit fort malmenee. Quant Pietres ravisa, a terre c’est versé. Et quant Pietres le vit, si le cogneu assez. « Dy va. Et dont viens tu ? dist Pietres le desrué.
- Henry et son armée à la poursuite de Pietres -
[179v]
– Sire, dist l’Espaignol, ja bien tost le sauréz. A vous suis envoié, il est bien verité, du maistre de Saint Jacques, que ja bien tost verréz, et de Ferrant de Castre qui bien est vostre privé, et cellui de la Tartaire qui maistre est nommé, et de la Taletiere qui est sire appellé. Dix cens hommes d’armes vous amenent montéz, de riches armeüres est chasun adoubé, a lances et a dars, a faussars aguiséz, et a bon ars tourquois richement adoubéz. – Amis, dist le roy Pietres, Dieu en soit aouré. D’eulx avoie mestier, car j’estoie atrappé. Et si me suit Henry le traïtre prouvé et Bertrant du Guesclin qui tant est redoubté, Olivier de Manny qui tant est desreé, le Besgues de Villaines et des autres assez, qui me voulent tollir mes nobles heritéz. Et ont Toulecte assise, ou est bonne cité, qui pour moy se defendent et seufrent grant griesté. Aléz devers Ferrant et le me saluéz. Et je me esploicteray tant qu’il soit actrappé. »
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517 Or fu lïé roy Pietres de ce que dire oÿ, que de Ferrant de Castre venoient ça pour lui, le maistre de Saint Jacques et les autres aussi. Et tant ala dam Pietre que ses barons choisi. Ceulx furent descenduz en my un pré lory, et si faisoient logez d’arbres qui sont lory, delay une fontaine qui souëf les norry. Contre dam Pietre vont qui le cuer ot marry. Quant Pietre vint a eulx, du cheval descendy c’on nommoit Passefer, ainsi comme j’entendy, et dist « Freres. Barons. Bien soiéz venuz cy. A vous je me complains du faulx bastart Henry, de Bertrant du Guesclin, mon mortel ennemy, et des felons François qui si m’ont desconfy. »
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- Episodes espagnols -
Et dist Ferrant de Castre : « Sire, ce poyse my, aussi fait il aus autres, pour certain le vous dy. – Grans mercy. » , dist le roy. Adont les conjoÿ. Au disner sont assis enmy le pré joly qu’il n’y ot nappe mise, chascun digne sur luy. Atant un chevaucheur et .ii. coureurs aussi. Ils ont trouvé Pietres, puis dist un : « Je vous dy temprement veréz cy les gens de Henry, deux cens hommes d’armes, apprestéz et vesty, qui venent espïer s’ilz vous trouveront cy. » Léz fu le roy Pietres quant la parolle oÿ, car bien furent .iim . arméz encontre luy. 518 Le roy Pietres a fait .v . hommes monter encontre les .iic . dont il oÿ parler. Au maistre de Tartaire les a fait delivrer.* « Encontre ces François qui nous cuident trouver. Et se besoign vous croist, si nous faictes mander. » Et le maistre respont : « Ce fait a creanter. » Or s’en vont lé .vc . le passage garder, par derriere une haye se vont touz desmonter. Et les .iic . venoient pour la proye happer, pour espier roy Pietres et son chemin trouver. Carenlouet les maine, bien les sot garder. Dedens une valee sont prins a avaler. Ceulx de l’embuschement vont es chevaus monter. Au dos leur sont venu bellement a crier, « Saint Jacques. » haultement ont prins a reclamer. Carenlouet l’oÿ, lors a dit sans cesser : « Seigneurs, or du bien faire il nous convient ouvrer. Nous ne pouons decy sans bataille eschapper. » c
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Quant Carenlouet vit que le aguet venoit, bien et hardiement mist ses gens en conroy. 14854
corr. d’après Nh : le maistre de T
[180r]
- Embûche en forêt -
[180v]
Ilz crioient « Guesclin. » , au plus ault qu’il pouoit. Envers les Espaignolz Karenlouet venoit. Le maistre de Tartaire au devant lui venoit. L’un feroient d’un glaive, l’un d’un espoit. Carenlouet le iert de la lance si roit que l’escu lui perça et l’aubert entamoit. Et de corps et de pis tellement l’encontroit que lui et le cheval a terre abatoit. Le maistre cheu mort, car chascun l’assailloit ; l’un le iert d’un glayve, l’autre d’un espoit. Quant les Espaignolz virent, forment leur ennuyoit.* Es François se ferirent, .vc . en y avoit encontre les deux cens, plus l’on n’y en contoit : c’estoit .v. contre deux qui bien conter saroit. Une malvaise partie y furent la endroit, mais bien se defendirent ce qu’il en y avoit. A ce commaincement y entrerent si roit que chascun de noz gens le sien y abatoit. Mais force pait le pré et force y venoit. Ilz entrerent es noz ; on les esparpilloit tellement que la place bien jonchie en estoit et furent reculéz jusques a un eunoy.* Quant Carenlouet vit comment la chose aloit, du cheval descendi, dedens les bois entroit. Lui .xe . de pié vistement s’en fuyoit entre espines et ronces ; si fort le dessiroit que la char de son corps en maint lieu derompoit et que le sang aussi en maint lieu lui iloit. Les autres gisent mort, que nul n’en relevoit. Espaignolz ont le champ conquesté la endroit. Le maistre de Tartaire qui a terre gisoit, porterent avec eulx ou roy Pietres estoit.
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520 Vass’ent Carenlouet a pié et sans destrier, et s’en va sans tenir voye ne senter, tant qu’il trouva l’ost Bertrant le chevalier
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- Episodes espagnols -
qui venoit devant l’ost son frere Olivier, et le Besgues gentilz, qu’il ama et tint chier. Et quant Carenlouet les print a approchier, a haulte voix leur dist : « Penséz de l’esploicter. Roy Pietres trouveréz, o lui mains chevalier. Le maistre de Saint Jacques lui est venu aider, car j’ay oÿ « Saint Jacques. » reclamer et huchier. Nous avons tout perdu et sans riens gaigner. » Dist Bertrant du Guesclin : « Veilléz vous apaiser. L’une foy fault gaigner et l’autre laisser. N’y a que du penser de l’autre gaigner. » Lors descendi chascun de son courant destrier et les ont resenglé pour plus les enforcier. Adont a fait Bertrant ses coureurs chevaucher pour l’embusche trouver de Pietres l’aversier. Lors revont a Bertrant l’aventure noncier et ont dit la ou Pietres it sa gent embuscher. « Or avant, dist Bretrant, il nous fault exploitter. » Bertrant it .iic . hommes trés bien appareiller, vers l’embusche du roy les a fait approcher. Quant Pietres vit venir l’avangarde premier, il est sailli avant pour se revenger. Le maistre de Saint Jacques a broché le destrier, tint la lance en sa main et l’escu va embracer. Encontre les deux cens est venu apoier. Si fu Ferrant de Castre qui bien se sceu aider, et roy Pietres aussi, estoit sur Passefer. La veïsséz bataille a force commaincer. L’avangarde fu mise a mortel encombrier quant Bertrant du Guesclin, de Manny Olivier, et roy Henry d’Espaigne le noble guerrier vindrent a la rescousse pour leurs amis aider. 521
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A ce commaincement pour rescourre no gent vint Bertrant du Guesclin, a l’aduré talent. Olivier de Manny s’i prouve vaillemment.
[181r]
- Embûche en forêt Au maistre de Saint Jacques s’assembla ierement, qui « Saint Jacques. » crioit a sa voix clerement. Olivier de Manny le fery tellement d’une espoie a deux mains qui trenchoit roidement, sur le col du cheval l’espee lui descent : tellement l’assena que la teste lui fent. Le cheval est cheü et le maistre s’estent, d’espoies, de lances et dars ot sur lui plus de cent. La endroit fu octis a dueil et a torment. Olivier de Manny luy cria aultement « A saint Jacques aléz, oufréz lui ce present. » Adont le roy Henry y fery leement. le Besgues de Villaines s’i prouva vaillemment. Olivier du Guesclin et toute no gent si prouverent si bien, ou l’istoire ment, que Pietres s’en fouÿ si trés vilainement, n’enmena que .iiic . a son departement. Poy failli qu’il ne fu prins et les autres ensement.
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[181v]
Vass’ent Pietres le roy desconit et maté. Par les forés s’en va dolent et aïré, o lui Ferant de Castre qui bien c’est avisé, pourtant que roy Pietre estoit si bien monté, et qu’il fu devant lui .C. arpens mesuré. Dessus une montaigne estoit Pietres monté. Par dessus son cheval – Passefer fu nommé – s’en va devant les autres, dolant et efraé. Et quant Ferrant le voit qu’il est ainsi passé, a soy mesmes dist, qu’il ne fust escouté : « Au deable d’enfer soit Pietres commandé. Et qui mais le suivra, de Dieu soit il dampné. » Es forés se bouta et si s’est exillé, vers Galices s’en va, dont maistre fu nommé. Et Pietres qui chevauche comme oisel empenné regarde tout entour, si c’est tout seul trouvé. Et quant il vit ses gens si faitement privé :
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- Episodes espagnols -
« Aïe, dist le roy Pietres, chetif, maleüré. Or suis par un bastart laidement atrappé. A, Bertrant du Guesclin. Par toy suis condempné. A, Besgues de Villaines. Faulx traïtre prouvé. Maldicte soit l’eure quant oncques tu fus né. Olivier de Manny, par toy suis afolé, et par Carenlouet aussi qui est tant ousé. » 523
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Vass’ent Pietres le roy tout seul sans compaignie, par desus Passefer qui court par aramie. Cellui jour lui sauva par .iiii. foiz la vie, car Henry le suyvoit qui ne le laissa mie. « A, Dieu, se dist Henry, ilz de virge Marie. Se ce faulx mescreant m’eschappe a ceste ie, encores me fera il ennuy et villennie. Or avant, dist le roy, beaux seigneurs, je vous prie. apréz ce felon roy, ou tant a tricherie. » Mais Pietres estoit ja deux lieues et demies. Et vint a Morassent tout seul sans compaignie, mais n’y ousa entrer ne gesir la nuytie ; ainçois il s’en ala, la haulte mer costie, venu est a un port sur la mer ressongnie. La trouva maintes nefz, une y fu chargie qui s’en devoit aler ou païs de Surie. « Amis. si dist le roy, car my sauve la vie. Plus gaigneras a moy, je le te certiie, que en tout autre avoir ne en ta marchandise. – Qui estez vous ? dist cellui. Ne le me celéz mie. » Se dist le roy dam Pietre : « Droit est que te le die : je suis le plus meschant tant con le souleil tournie. Ne m’en demande plus, amis, je le te prie. » Se dist le mariner : « Je sauray vostre lignie. De bataille venéz contre vous desconie. » Se dist Pietres le roy : « Je te le certiie qu’il ne m’est demeuré escuier ne maisnie. » Se dist le mariner « C’est pou de compaignie.
- Pietres traverse la mer en solitaire [182r]
C’est trop malvaise bataille et trop mal commaincie dequoy il ne demeure nulle personne en vie. »
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524 « Ha, dist le mariner. Comment vous appell’on ? Vous avéz bon cheval, il scent bien l’esperon. Vous n’avéz pas esté oiseux, bien le voit on. – Amis, dist le roy Pietres. Il est bien de raison cellui qui a perdu, tout adés le gab’on. » Véz vous un bon marchant qui entra ou domon. Et cellui estoit juïf, si ot non Salemon, de Sebile estoit né, comme dit la chanson. Cellui ravisa dam Pietre au nés et au menton. Au mariner a dist sans nulle arrestison : « Maistre, dist le juïf, vous tenéz bon prison, car il est roy d’Espaigne et l’appelle on Peyron. » Oy ce le mariner, si a dit a hault ton : « Par icellui seigneur qui soufry passïon. Dedens la mer salee gicteray ce larron. » Il a dit a ses gens : « Prenéz moy ce glouton. Il le nous fault noier, il y a bien raison, car il n’a pieur homme jusques en Pré Noyron. Sa femme it morir, a la clere façon. S’il a perdu sa terre et son noble royon, sa vie perdra, si n’aura se bien non. »
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525 « A, dist le mariner, gictéz le en celle mer, ce traïtre larron qui n’aiert a amer.» Adont le sont aléz .iiii. sergent combrer, par jambes et par piéz le va chascun happer. Adont se va le roy a leurs piéz gicter. Voiant les mariners commainça a plourer et leur a dit : « Seigneurs, veilléz vous aviser par quel rançon pourray de voz mains eschapper. Tant d’or et tant d’argent vous feray delivrer, comme par le mien corps contre in or peser.
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- Episodes espagnols -
– Seigneurs, dist le juïf, je le veil achapter, et tantost vous vouldray le vostre argent donner. » Se dist le mariner : « Je le veil creanter. » La endroit fu vendu a paiens oultre mer. On ne vit oncques roy tellement demener. A ses faiz cy se doyvent toutes gens aviser, car si tost que Fortune veult sa rouhe tourner, cellui qui est dessus fait dessoubz avaler et la est en tel point qu’il ne s’en puet ouster. Et s’il est en fortune, il se doit aviser quant sur la maistre rouhe il se veult couronner. En la haulte fortune ou il se veult poser, doit dire : « Sire Dieu, je te doys bien louher quant tu m’as de si bas fait si hault fortuner. Or me doys bien soufrir, or doys je bien louher. Or ay je bien raison de ma vie amander. Or me doit souvenir des vices oublier. Or me doys tout partout ou je doys regarder. Or me convient paier, agreer et compter. Or doys aus pouvres gens de mes vivres donner, et donner leeement, ou nom Dieu presenter. Et mes pouvres amis veoir et visiter, repentir des mefaiz et me doy confesser. Et se j’ay de l’autruy, je doys recompenser. Et se j’ay en haÿne, or doys je pardonner. Estre humble et doulx et les gens saluer, bonne table tenir, bonnes gens endurer, aquerre des amis par largement donner. Et ainsi pourray je en bien continuer. Et si pourray aussi l’ame de moy sauver. » Ainsi doit dire cuer qui a bien veult penser, et s’est toute la in ou l’homme doit penser. Mais aucuns fortunéz qui se cuident ramper, cuident aucunefoiz jusques au ciel aler et ne regardent pas des degréz avaler. Et en ce point le vient le deable tempter, tant qu’il vient si puissent qu’il cuide tout passer. L’orgueil de son corps ne le laisse bien penser.
[182v]
- Retour au siège de Toulecte -
[183r]
Or est venu du mont tout aval devaler, et par ses fausses euvres, qu’il a volu ouvrer, si a fait aprés sa mort tellement regreter. C’est dommage dont tant l’avoit on laissé durer. Plaindre si fait autant c’un chien c’on voit crier. Et supposé qu’il puisse en ce point cy regner et que Dieu si ne veille la vengence monstrer, il est lassus puissant pour l’amande doubler, car il est souverains pour l’ame condempner. Qui sur ces poins icy sauroit trés bien gloser, moult de si faicte gent pourroit on bien trouver qu’en in font leurs amis et eulx deshonnourer. A la droite matiere me vouldray retourner. Du roy Pietres lerray un pou cy ester, diray du roy Henry et de Bertrant le ber, d’Olivier de Manny, c’on ne doit oublier, du Besgues de Vilaines qui tant fait a loer, et des bons chevaliers, de quoy on doit parler, qui irent le roy Pietres et sa gent reculer et fuïr tellement qu’il entra en la mer. Or cuide bien Henry qui tant fait a doubter, que jamais le roy Pietres ne doye retorner. Sachéz que si fera, il s’en puet bien vanter, car un secours s’en va aus paiens empectrer tel que si Dieu n’en pense qui se laissa pener, que la crestïenté en fera decliner. Maintes jeunes pucelles en fera vïoler et maintes bonnes dames sans mary demorer, ainsi comme vous porréz oïr et escouter.
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526 Seigneurs, or faictes paix pour Dieu de paradis, une vraye hystoire rimee de beaux diz, de Bretrant du Guesclin qui tant fu seignoris. A Toulecte repayre le noble roy Henry, et les bons chevaliers dont il estoit servy. Seigneurs, devant Toulecte estoit le siege mis.
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- Episodes espagnols -
La estoit la roÿne qui tant ot cler le vis. Et le bon archevesque y estoit, se m’est vis. Quant noz gens s’en revindrent des assaulx dessus diz, l’ost en fu moult lïé, le peuple resjoÿ. Demandé ont aucuns si Pietres estoit pris, ou s’il avoit esté en la bataille octis. Et les aucuns disoient qu’il s’en estoit fouÿs. En celle cité fu le peuple moult marry pour le secours qui fu actendans ou pourpris. Du roy Pietre ne savent s’il estoit desconfy. Par celle cité fu le peuple esbaÿ, car les vivres estoient villainement failly ; grant destresse y avoient les grans et les petis. Ne savent les aucuns prendre certain advis de rendre la cité, moult y furent pensis : l’un s’i assentoit et l’autre envis. Mais le faulx chastellain qui ou chastal fu mis, ne vouloit assentir, dont il en valoit pis. Nonpourquant pour famine en fu le conseil pris, quant droit a mynuit, se nous dit l’escrips, se fu dedens Toulecte un faulx sarrazin mis, qui entra en la ville parmy un faulx postis. Le conseil assembla quant jour fu esclarcy et leur a dit : « Seigneurs, or oiéz a mes diz. Par vous me suis pené et par faiz et par diz. Nouvelles vous diray dont seréz rejoÿz. » 527
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« Seigneurs, dist le paien, or oiéz mon semblant. De Sebile viens droit, une cité vaillent. Les .iii. lois qui y sont vous vont par moy mandant qu’ilz ont oÿ nouvelles du roy Pietres le grant. Il est a Bel Marin, le roiaume puissant. Et par nous il vous mande et vous va suppliant que vous ne vous rendéz mie a Henry le tirant, ne aus François de France, ne au vassal Bertrant. En Bel Marin s’en va le roy Pietre nagent
[183v]
- Visite de Pietres à Bel Marin -
[184r]
et amenera secours du peuple Tarvagant. Et le roy de Grenade en a envoié tant qui sont dedens Sebile, la cité souisant, que toutes les maisons qui y sont en estant en sont si remplies et derieres et devant que ne le vous diroit nul clerc lisant. » Et quant le chastellain va la chose escoutant, a touz ceulx de Toulecte a dit incontinent : « Or vous tenéz trés bien, dist il, petis et grant, car se vous vous aléz a Henry accordant, en feu gregois sera ceste cité ardant. » Lors furent les aucuns courroucié et dolant. Et le roy Henry it d’engins charppenter tant qu’il en y avoit dix a la porte devant. Ainsi furent Toulecte noz gens assaillant. Or vous diray de Pietres le fol roy mescreant, qui tellement ala sa besoigne ordonnant. Quicte fu de sa prison a tout son talent. Par or et par argent ala si bien inant qu’a Bel Marin vint droit le paÿs chevauchant, une bonne cité dessus la mer seant, et la se reposa ; elle a non Sourmontant. Lendemain se leva, le cuer ot moult dolant. Et par desesperance qui le va sourmontant dist adont a son cuer, bien le vist on apparant, que Dieu regnoieroit et sa mere vaillant ains qu’il n’eüst vengence du tout a son commant de son frere Henry qui le va enchassant, du Besgues de Vilaines et du felon Bertrant, d’Olivier de Manny qui le va guerroient, et de ceulx de Beaumont, en Bertaigne seant.
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528 Or fu a Bel Marin Pietres l’Espaignol, par dedens Sormarseire, ou moult ot de Turquois, de bons Crestiens .iim ., voyres, par Dieu, bien trois, qui par treü demeurent avec les autres lois.
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- Episodes espagnols -
Le roy de Bel Marin fu chevalier adroit. Moult haÿ Jhesucrist qui moru en la croys, et la virge Marie et les sains benoys, et aussi enhaÿ moult chevaliers françoys. Par devant Espaigne ot esté pluseurs foys, par devant le carile, devant les Grenadoys, ot esté jadis prins, corroucié et destroys. Quant de Pietre oÿ qui tant fu maleois, a sa court le manda, ou palais maginois. A sa court est alé Pietres le dolans roys et a trouvé le roy qui moult lui fu courtoys. Les Sarrazins trouva en moult noble conroys, vestuz noblement de cendaulx a orfroys et de beaux draps ouvréz de mains Sarrazinois. Pietres le salua voyant touz les Turquoys : « Sire de Bel Marin, de Pharise et d’Orblois, a vous m’en suis venu plaindre de cuer destrois du faulx bastart d’Espaigne, traïtre maleois, qui me toust mon roiaume et mon noble terrois, de Bretrant du Guesclin le mal Berton françoys et des faulx Crestïens qui tenent leurs conroys en mon noble royaume dont tolu m’ont mes ploys. Et se vous ne m’aydéz, gentilz et noble roys, jamais en mon roiaume ne tendray .i. tournoys. » Le roy de Bel Marine lui dit a haulte voix : « Roy d’Espaigne, dist il, assez bien vous cognois. Touzjours avéz amé Sarrazins et Grijois, et leur avéz porté amour par pluseurs foys. Par la foy que je doys a la loy des Turquois, et la loy des paiens et des Babilonnois, je ne vous fauldray ja tant que je soie roys, mais que aourer veilléz les dieux que je cognoys. Et si ay deux belles illes, aussi blanches que noys, dequoy vous auréz l’une et sachéz, a vostre choys. » Lors vindrent les pucelles tenant parmy les doys. Paiens les amenoient en tenant par les ploys, en couronnes plaisans d’or in arabïoys
[184v]
- Visite de Pietres à Bel Marin a pierres et a perles aussi gros que poys. La noblesse des deux ne vous diray des moys. Le roy de Bel Marin les assist a hault doys. Grande fu la noblesse ou palais qui fu froys. De menestriers y fu grant l’esbanoys. Je croy qu’il n’est nul homs, chevalier ne bourjois qui ne fust esbaÿ de veoir leurs bufoys.
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[185r]
Par dedens Sarmarant, une noble cité, qui est en Bel Marin, une grant roiaulté, fu dam Pietres le roy entré en parenté. Le roy manda ses illes pleines de grant beauté : Marie ot nom l’une, se dist l’auctorité, et l’autre ot nom Danie, ou ot sen a plenté. Le roy prinst un baston, contremont l’a levé : « Roy d’Espaigne, dist il, oiéz ma volunté. Vous avéz un bastart en la vostre herité qui vous toust le roiaume dont vous estez fondé. Ou despit de touz ceulx de la crestïenté et de Dieu crestienné, que je ne prise un dé, je vous rens cy Espaigne et Burs vostre cité, et tout le roiaume qui vient de vostre costé. Et .xxxm. paiens qui seront bien armé et ma ille mondaine, ou tant a honnesté, que vous espouseréz a vostre volunté. – Sire, se dist dam Pietres, il me vient bien en gré. Et je suis de vostre loy, j’en ay ma volunté. – Roy d’Espaigne, dist il, vous avéz bien parlé. Aletaire mon ilz conduyra mon barné. Il n’a mie .xx. ans, sachiéz de verité, n’a si bel chevalier ne si bien estofé de cy jusques a Damas, ou tant a richeté. Quatre roys Sarrazins sont ses oncles nommé. Le soudans de Damas est son oncle l’aisné, cellui de Jherusalem, un roy bien redoubté, 15225
p. aussi comm gros q., comm cancellé.
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- Episodes espagnols -
le roy de Satalie, lui est de mon cousté, et le roy de Grenade qui vous fait amité. Vingt mille Sarrazins sont de par lui alé a Sebile la grant, en la mer sont entré pour aler a Toulecte defendre l’erité. Il nous convient haster, car moult sont afamé. » Se dist Pietres le roy : « Vous dictes vérité. Se sont bien loiaux gens et bien se sont porté. Et je leur rendray leur bonne loiauté. » Ensement son afaire a roy Pietres ordonné. Le roy de Bel Marine a son peuple assemblé. La navire fu preste, ou des netz a assez. Belle fu l’ordonnance devant celle cité et par dedens aussi de noblesse plenté. 530
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Telle fu l’ordonnance du roy et de sa gent. Pour Pietres secourir en assemble granment et des néz sur la mer en assemble forment. De vitailles, d’armeures y a trés grandement, d’escuz, de bonnes lances largement, de tentes et de tréz y ot foison bien grant, banieres et pennons a or et a argent. En la cité avoit venu nouvellement deux gentilz pelerins, venuz tout droitement de Jherusalem droit, la cité proprement ou Jhesu receu mort pour nostre sauvement, et furent de Gascoigne tout naturellement, qui vindrent en la ville, si prinstrent logement avec les Crestiens qui furent resident par dedens la cité par un treü d’argent. Quant les .ii. Crestiens virent l’estorement pour aler en la guerre ainsi eforceement, aus autres Crestiens demanderent briesment pour quoy cellui apparail ce faisoit tellement. Et ceulx leur ont compté et pour quoy et comment, et que Pietres le roy, au ier contenement,
- Les pèlerins à Monssussanc [185v]
estoit illec venu pour fol entendement, pour renoier la loy du divin sacrement. Et pour ce fait icy lui avoit en convent le roy de Bel Marin a aider loiaument et octroié sa ille en droit mariement, et que paiens devoient passer prochainement pour destruyre Henry qui tant a d’escïent, et Bertrant du Guesclin qui tant a hardement, et touz les chevaliers de son gouvernement, et remectre dam Pietres en son couronnement, et de destruyre France et tout mectre a torment.* Et quant les pelerins en oÿrent le vent, pour Bertrant du Guesclin en furent moult dolant. Dela se departirent quant ilz sceurent comment le roy de bel Marine fait son assemblement, et entrerent en mer et nagerent au vent. Et avoient touz deux volunté et talent que en l’ost du ber Bertrant on peust savoir comment le roy Pietres avoit fait son empetrement au roy de Bel Marin et aus siens ensement, parquoy contre leur force et leur eforcement ilz peüssent savoir l’estat tout plainement pour estre pourveüz contre eulx seürement. Mais nonpourtant aloient a cellui temps present,* en ce païs d’Espaigne, assez doubtablement, pour le prince de Gales et son eforcement qui avoient fusté Espaigne laidement. Et pourtant se celoient les pelerins souvent.
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531 Ces deux pelerins qui estoient gascon, entrerent en la mer en un riche dromon. Du sepoulcre venoient acquerre le pardon ainsi que a pluseurs gens en prent devocïon. L’un de ces pelerins ot nom Pierre Floron, Jamet de la Riole ot nom le second. Par mer aloient tant, comme dit la chanson,
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- Episodes espagnols -
que au porc de Monssusanc, un bon chastel de nom, qui siet sur la mer assez prés du sablon, et la sont arrivéz les pelerins de nom. Par devers le chastel, ou chastellain ot l’on, alerent querre aumosne pour essaier leur nom, par tant c’on les haÿ en celle nacïon. Et véz vous la chastellaine qui clere ot la façon, une moult vaillent dame, de noble estractïon. Le roy Henry amoit et il y ot raison, car de son sang estoit, c’estoit dont bien raison, de par la riche dame qui beauté ot foison, la mere au roy Henry qui Dieu face pardon. Icelle chastellaine, dont je foys mencïon, vint aus .ii. qui venoient du temple Salmon. Se dist la chastellaine : « J’ay grant devocïon que vous veignéz ennuyt soupper en nostre maison, en l’honneur de cellui qui soufry passïon et qui ressucita de mort saint Lazaron, ou vous avéz esté pour vostre remissïon. » Se dist Pierre Floron : « Dame, par saint Symon. Je feray par le gré Jamet mon compaignon. » Et cellui lui a dit : « Frere, a Dieu benisson. De ma dame ferons le vouloir et le bon. » Par ceste demouree, dont je foys mencïon, vint sur Pietres le roy grande confusïon, ainsi comme vous orréz en bien courte saison. 532
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Or sont les pelerins ou chastel houstelé avec la chastelaine, ou tant ot loiauté. Et quant les pelerins eurent la nuyt souppé et qu’ilz furent de table par la sale levé, la dame les a prins pour oïr leur secré. « Pelerins, dist la dame, ou avéz vous esté ? Dictes moy des nouvelles de la sainte cité ou Jhesu ot son corps travaillé et pené. – Dame, se dist l’un, nous y avons esté,
[186r]
- Les pèlerins à Monssussanc -
[186v]
et le mont Olivet monté et avalé, et dedens Bethleem le moustier honnouré, la ou Jhesu nasqui, ou tant ot pouvreté, dont virge delivra en sa virginité, sur le mont de Calvaire ou il a maint degré, et le sepoulcre Dieu baisé et acolé, ou les freres du temple ont touz les jours chanté. – Pelerins, dist la dame, or ne m’aiéz celé : leur font les Sarrazins ne peines ne griestéz ? – Nenny, dame, dist on fors puis .i. an passé que les Sarrazins sont durement argüé, pourtant quant oÿ dire que en leur habité, qu’il a un crestïen en la crestïenté, tout le plus hardy homs et le plus redoubté, de quoy les Sarrazins soient endoctriné. Et a ce chevalier fïancé et juré que s’il puet mectre paix, amour et amité ou roiaume de France, ou ilz se sont troublé, et en cellui d’Espaigne s’il avoit achevé, qu’il iroit en Surie, ou il a bel regné conquerre le païs et la grant roiaulté. Et cestui chevalier dont ilz se sont doubté c’est Bertrant du Guesclin, ainsi l’ont appellé les pelerins de France qui dela ont esté. » Lors ont tout son estat dit et recordé. « Seigneurs, se dist la dame, je le cognois assez. Il est avec Henry, le bon roy couronné qui doit tenir Espaigne de son droit herité. Or est devant Toulecte, ou il a moult esté. Et ce dit on pour vray, on le m’a recordé que ceulx qui sont dedens ont famine plenté, mais le secours actendant de Pietres le dervé. Mais on dit c’on l’a mort et en la mer gicté, car oncques ne it bien en jour de son aé. » 533 Quant les pelerins ont la parole escoutee,
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- Episodes espagnols -
« Dame, se dist l’un, par la vertu louhee. Pietres n’est mie mort, c’est verité prouvee, car nous l’avons vëu oultre la mer salee, par dedens Bel Marin, une terre peuplee. Le roy de Bel Marin lui fait belle assemblee et lui baille son ilz o la brace quarree : sa oultre passeront a baniere levee. Et si lui a le roy sa ille ordonnee et la doit espouser aprés guerre inee. Oncques ne fu tel ost ne si bien ordonnee. Et si seront touz prest ains .xve . passee.* » Quant la dame l’oÿ, si fu toute efraee. Lee en fu en cuer, si en fu aussi iree : courroucié pour tant qu’il n’a vie inee, lee par la nouvelle qui en sera portee devers le roy Henry et lui sera comptee. La chastellaine s’est partie et sentee. Pour icelle nouvelle qui lui fu apportee, dix livres doubles d’or leur donna la vespree. 534
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Apres ceste venue, que je vous voys comptant, se departy la dame au gent corps avenant. A loy de pelerin se va appareillant. Lui .iiie . party, ne s’i va detriant. Vers Toulecte s’en va la dame cheminant. Et tant volu cheminer a loy de peneant qu’elle est venue en l’ost du roy et de Bertrant. La tente du roy va la dame demandant, et on lui enseigna, lors descendi errant. A loy de pelerin va le bourdon portant. En la tente trouva Henry le combatant, et Bertrant du Guesclin, Olivier le puissant, le Besgues de Vilaines au hardy convenant, et Alain et Henry, .iii. freres souisant, Alain de la Hussoie, de Nadres Enguerrant, 15417
corr. d’après P : l. donna vespree, ajout de la.
[187r]
- La plan de Pietres dévoilé et de Toulecte aussi le bon prelat puissant. Et avoient conseil les barons avenant qu’ilz yroient leur ost en .ii. pars departant, et que l’une partie iroit siege tenant par devant la cité de Sebile la grant, pour ce que Sarrazins et Juïfz mescreant et toutes le troys loys s’aloient argüant. L’un vouloit Henry et l’autre Bertrant, et le ters le roy Pietres ; si furent varïent. Et en furent d’actort au conseil departant. Atant est la roÿne, ou de beauté ot tant, avec la chastelaine qui est noble et vaillant.
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[187v]
La roÿne d’Espaigne avec lui amena la bonne chastelaine qui a loy se moustra ; son abit ot vestu, car elle lui donna. Et quant le roy la vit, tantost la ravisa. Il est venu a lui, a deux brasz l’acola. « Ma cousine, dist il. Et que faictes vous ça ? Pour Dieu, dictes le moy : qui vous y amena ? – Sire, se dist la dame, vous le sauréz bien ja. » A tout isnellement lui dist et recorda pourquoy les pelerins en son chastel loga, les nouvelles qu’ilz distrent et c’on lie recorda, comment en Bel Marin le roy Pietres on laissa, comment le roy aussi sa ille lui donna pour icelle esperance que Espaigne il rara. Et comment tout Espaigne, se dit, lui rendra, l’assemblee qu’il fait et comment il venra, et du roy de Grenade qui le confortera. Et quant Henry l’oÿ, tout le sang lui mua. A Bertrant du Guesclin la nouvelle compta. « Cellui deable revient qui touz nous honnira. Car tant de Sarrazins dessus nous amenra, des Crestïens aussi de Sebile dela, 15436
corr. d’après P : i. siege tenoit
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- Episodes espagnols -
que tout le plus hardy attendre n’osera. – Sire, se dist Bertrant, ne vous esmaiéz ja. Aiéz fïance en Dieu et il vous aidera. Et sachéz bien que Dieu vostre frere punira : il a Dieu renoyé, si que mal lui viendra. Or ne vous esmaiéz, pour Dieu qui tout crea. Et si laisséz venir qui venir y vouldra : quant plus y viendra et plus y en mourra. » 536
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Dist Bertrant du Guesclin : « Ne vous esmaiéz mie. Véz cy bonnes nouvelles, par la virge Marie, puis que Sarrazins venent en icelle partie. Or ne me fault aler ou païs de Surie, ne a Romme ensement, celle cité antie, que j’ay saint Pere a l’uys et prés de la chaussie. Si endroit demourons et nostre baronnie et sarons sur les champs a touz les bonne espie par quoy les Sarrazins par leur louzengerie ne nous aient sourprins ne main ne anuytie. » Ainsi fu le conseil par la dame jolie, qui moult noblement fu en ce lieu convoïe. Et paiens de Grenade .xxm . a une ie arriverent adont en icelle partie. Droit au port de Toulecte fu leur ost choisie. Et quant noz chevaliers ont la nouvelle oÿe que par la mer venoient ceste gent enragie pour secourre Toulecte qui bien fu travaillie, de l’ost se departy nostre chevalerie. La reigne y demoura qui bien fu enseignie. Or vous di que cest ost, dont je vous signiie, fu contre la cité tellement enforcie que ceulx de la cité qui mal estoit garnie, n’y pouoit on trouver pour la grande bastie. 15482 15483
corr. d’après P : e. si arons sur l. corr. d’après P : par les Sarrazins p.
[188r]
- Bataille de Toulecte -
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537 Droit au port de Toulecte alerent noz gent. A trois lieues ou plus estoit le port passant. Sarrazins se logerent a terre vistement. Mais Bertrant leur sailli a un adjornement, le Besgues de Vilaines, au bon contenement, Olivier de Manny qui tant ot hardement, et crioient « Guesclin. » a leur voix doulcement. Entre paiens se sont ferus hardiement ne se donnoient garde de cest empechement . A cel primier empainte se sont mis tellement que mil en abaturent devant eulx en present. La furent Sarrazins esbaÿz tellement es nef et es bateaux rentroient vistement. Tentez, trez ont laissé, joiaux, or et argent. Sept milles en demoura qui furent sanglant. Leur velle ont drecee, si se sont mis au vent. Et noz chevaliers s’esjoÿrent forment. Le gaign ont departy adont moult loialment. A l’ost se sont retraiz, sonnant moult haultement. Or dirons des paiens que Dieu ne aime noient. Par mer s’en vont nagent a l’aer et au vent. Leurs joiaux pleignent, leur dommage, leur argent. Avec eulx n’estoit mie Pietres certainement, ne le ilz au fort roy ou Bel Marin appent, ains sont en un dromon arméz gentement. Ou païs de Grenade la ont trouvé granment de Sarrazins touz préz pour aler vistement, ou Pietres les mena a son commandement. La assembla roy Pietres, dont je dy en present, Juïfz et Sarrazins et crestïenné gent. Et les .xxm . qui furent desconfy si laidement au roy Pietres s’alerent presenter proprement. A Sebile la grant enmena ceste gent et it telle assemblee, comme l’istoire chant, que .l.M. furent en cellui assemblement. La pouoit on voir maint Sarrazins puent,
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- Episodes espagnols -
qui menacent aloient Henry, au ier convent, et Bertrant du Guesclin et le Besgues ensement, et toute la puissance du roy Henry la gent. A l’issir de Sebile veïsséz en present merveilleux ost qui la se maintient ierement. La pëust on voir mains riches garniement, mains escuz, maintes lances ferrees gentement, mains bacinés aussi ouvréz joliement, penars, dars et faussars qui trenchant roidement, les pourveances grans pour vivre largement. Ainsi envers Toulecte s’en vont delivrement. Quant Bertrant et Henry sceurent leur convenant, pour eulx bien recueillir ordonnerent leur gent. Bien en eurent mestier, vous orréz bien comment. Or approche la mort et le deinement du roy Pietre qui ja ot regné faussement. Mais Dieu le paiera assez prochainement, ainsi comme vous orréz cy aprés briesment. 538
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De Sebile la grant qui tant est bien fermee, se party le roy Pietres a moult noble asemblee, .l.M. ou plus de gent bien adoubee. N’y a cellui qui n’ait l’armeüre endossee, bacinet, haubergon, lance, escu et espee, a grans dars ailéz c’on gicte a la volee. Crestïens y avoit de Sebile la lee et du païs entour et de celle contree bien .xxxm . ou plus, c’est verité preuvee, avec maint Juïfz qui ne valent riens nee. Paiens et Sarrazins y vont teste levee. A .l.M. y fu cest ost nombree, vont ceulx envers Toulecte, celle cité fermee. Pietres convoye l’ost par mont et par valee, o lui le ilz le roy de Bel Marin la lee : Aletaire ot nom, moult menoit grant ponee, dix huit ans avoit, je croy, en celle annee.
[188v]
- Bataille de Toulecte -
[189r]
« Roy Pietre, dist Aletaire, par Mahon d’Aquilee. Nous avons avec nous noble gent assemblee, mais le mains en y a de ceulx de vostre contree. Juïfz et Sarrazins y a grande maree, avec .iii. roys a cy de gens grant assemblee. Tant de fïance n’arroie en toute ma duree en ces felons Juïfz qui ne valent riens nee ne en ces faulx Crestïens qui ont loy difamee que j’aroie es paiens de nostre loy notee. Et pourtant le vous di, Pietres, s’il vous agree, que une bataille soit des paiens ordonnee qui se ralieront a ma baniere lee, et si les conduyray en l’estour sur la pree. Vous conduyréz aussi a vostre desiree, Crestïens et Juïfz qui sont de vostre contree et aideront l’un l’autre si besoign s’i agree. Mais nenny je sçay bien, sans nulle demouree, que quant Henry aura la nouvelle escoutee que nous venons sur lui a si belle assemblee, Toulecte nous laissera sans nous livrer meslee. Ne nous actendront pour l’or d’une contree. » Dist Pietres « Jamais jour n’y mectéz vostre visee. Tant que Bertrant lui ait compaignie juree a nous ne sera pas bataille devee, que Bertrant ne fuyroit pour l’or d’une contree. A bataille livrer mectéz vostre visee, car saillir n’en pouons sans avoir la meslee puis que Bertrant y est qui est l’ame dampné. » La avoit une espie qui de la fu sevree. Au roy Henry ala tost lui a racomptee telle chose dont roy Pietres receu pouvre soudee.
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539 Or s’en va l’espie qui fu au roy Henry. Devant Toulecte vint, dessus le pré lory. En sa tente trouva Henry dont je vous dy, et l’arcevesque bon et la roÿne aussi,
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- Episodes espagnols -
et Bertrant du Guesclin, Olivier aprés lui, Olivier et Alain et Henry de Manny, le Besgues de Vilaines qui Henry moult chery, et mains bons chevaliers dont je vous lerray cy, qui fort se devisoient de Pietre le maudy et de l’efort qu’il va amenant avec luy, car ja leur en ot on raconté et gehy. Devant le roy Henry l’espie se lechy et puis le salua de Dieu qui mort soufry. « Sire, dist le varlet, ne mectéz en oubly de vous gens au devant pour actendre l’estry, car vrayment roy Pietres approche forment cy. Si amene Sarrazins, Juïfz avec lui, et de Sebile aussi mains Crestïens hardy : bien sont .l.m. de combatre aramy. Le roy de Bel Marin qui n’est pas vostre amy, a son ilz envoié o Pietres le hardy. Aletaire a nom le paien dont je dy, n’a que dix huyt ans, le corps a agensy. Il ne doubte riens tant que n’en soiéz fouy sans bataille livrer et debat et estry. Mais le roy Pietres dit, bien je l’ay oÿ, que tant que le Guesclin ait l’ame avec ly,* et le Besgues ensement qui sont bien amy, que a bataille ne puis saillir, je vous afy, mais quant caresme en mars qui est devant avril. Et le jeune paien point ne s’en esbaÿ, ainçois en mercïa Mahomet le pourry. Il ne vous prise touz la monte d’un espy. Mectéz vous en arroy, autrement ne vous dy. » Atant se taisi coy, lors parla roy Henry et dist « Entre vous touz, mes freres et mes amys, qui saura bon conseil, si ne le cele cy. Car conseiller nous fault briesment, sans detry, comment Pietres le faulx puet estre recueilly. Se tost n’est confundu, je me verréz honni Dist Bertrant du Guesclin : « Ne soiéz esbaÿ. A Dieu le veu, les griefz serront touz ainy.
[189v]
- Bataille de Toulecte Pietres vous rendrons ains que soit le ters dy, si a mon conseil vouléz touz estre assenty. » Se dist le roy Henry et touz les autres aussi : « Qui vous en desdira, de Dieu soit il maudit. »
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[190r]
« Seigneurs, se dist Bertrant, oiéz que vous dirons. Tout le nostre ost avec nous menons encontre le roy Pietre qui n’est mie proudons. La cité de Toulecte par ce point ne perdrons car refreschi seront a leur divisïon. Les troys pars de cest ost, si vous plaist, prendrons, la .iiiie. partie a ce siege lairons en garde la roÿne o l’arcevesque bon. Des gens du plat païs assez leur livrerron que tout incontinent cy endroit manderon. Ces gens en nostre lieu, en nostre costé lairon. Bien cuderont touz ceulx de la cité de nom que ce soient gens d’armes, car de nuyt partiron. Par toutes bonnes villes gens d’armes manderon, et de noble chasteaux et de mainte garnison ; soit fait hastivement sans atendre saison. Et dessus le roy Pietres hardiement alon, lui et toutes ses gens briesment desconiron. Et ne les doubtéz ja nul jour s’ilz sont foison, car ilz seront assaili a ma divisïon. Vous en verréz fuÿr paiens comme larron, et Juïfz d’autre part et Crestïens de non, car fïance n’auront, selon mon entencïon, que l’un doyt aider l’autre a son besoign. Juïfs n’aideront pas a la gent de Mahon, point ne leur aideront ceulx qui croient Mahon, car point ne sont touz d’une foy ne d’un nom. Et nous sommes touz un et serons par raison. Nous serons en Jhesu qui soufry passïon. Et sommes bons Crestiens sans autre nacïon. 15652
corr. d’après P : s. vous plaist prendons
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- Episodes espagnols -
Et voulons soustenir droit, foy et raison. Et Dieu nous aidera, ou j’ay entencïon. Or le faison ainsi et soions touz proudon. Car je vous jure sur Dieu qui seufry passïon, oncques telle jornee n’avint a champïon car tout riche sera le maindre compaignon. – A, Dieu, dist Henry. Bertrant tant est proudon. Ja ne sera destruit qui croyra sa raison. Se chascun acordoit ceste divisïon, moy semble que briesment auroie vengeson de Pietre qui tant m’a fait de destruction. » Le Besgues de Vilaines si a dit a ault son que Bretrant ne desdira, si ait s’ame pardon. 541
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Tout ainsi que Bretrant la chose conseilla fu fait et actordé, chascun s’i actorda. De l’ost au roy Henry les .iii. pars dessevra, et la .iiiie . part au siege demoura. Des gens du plat païs assez illec ala, qui grant visage font vers la cité dela. Et le bon roy Henry gens d’armes conquesta en villes, en cités, en chasteaux qu’il y a. De toute sa puissance gens d’armes aüna et communes aussi, arierbanc cria. Ainsi le roy Henry envers Pietres s’en va, et tant mena ses gens que roy Pietre aprocha ainsi que a une lieue d’un chastel qui fu la, c’on appelle Moncel , ainsi on le nomma. Vingt cincq coureurs Henry y envoia pour savoir les os et quel nombre il y a. S’ilz furent bien montéz, ne le demandéz ja. L’ost dam Pietres ont trouvé, bien fu qui les ema. En l’euree d’un boys ceste gent embuscha, – les Boys des Oliviers fu nommé ce boys la – 15693 15697
corr. d’après P : de la .iiiie. p. corr. d’après P : c. en gens d’armes qu’il y
[190v]
- Bataille de Moncel voient les Sarrazins qui venent par deça, Juïfz et Crestïens, maintes banieres y a. Et dist un coureur, que Oliver on nomma : « Point n’a euvre laissie, vrayment, ne aura qui a ceste gent cy bataille livrera. Je croy bien que Bertrant jamais ne vivra, car il est trop hardy, octire se fera. »
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[191r]
Ainsi les coureurs s’aloient devisant. La ot un escuier, breton fu bretonnant, qui perceut troys paiens qui aloient volant ; mais ilz furent armé du tout a leur commant. Quant le Breton les vit, le cheval va brochant, l’escu mist en chantel, la lance va branlant. Un Sarrazin feru de lance bien trenchant, si bien que corps et cuer lui ala tresperçant. Au resacher sa lance ala en .ii. rompant. Adont sacha l’espee qui bon ot le trenchant. Bien en cuida ferir un Sarrazin puissant, mais le paien s’ala arrieres repairant pour le Breton ferir, par tel convenant que l’espee et le branc lui vola sur le champ. Dolant fu l’escuier quant le cop va sentant. Ja fust mort et octis, quant l’embusche vaillent s’en sont venuz a lui et se vont escriant : « Amis, tenéz vous bien, secours auréz puissant. » Sur les .ii. Sarrazins vont ierement frappant, qui prirent a fuïr quant les vont avisant. L’un des deux y fu octis tout en courant, l’autre eschappa, cheval ot moult puissant. Jusques a l’ost dam Pietre ne s’ala arrestant. Quant il entra en l’ost, alarme va criant, et ala au roy Pietres l’aventure comptant des coureurs Henry qui ou boys vont logent. Et quant Pietres oÿ le certain convenant 15719
q. perceut qu troys p., qu cancellé.
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- Episodes espagnols -
que Henry vient sur lui et le noble Bertrant, son ost it arrester sans aler plus avant. Et bien dist que Henry, a son pouoir plus grant, atendra en bataille sans aler reculant. Adonc ala ses gens noblement ordonnant, et leur donna bon cuer et les va rehaitant. Et leur ala cel jour telle chose promectant que point ne leur donna, de ce soiéz creant. 543
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Ainsi que a une lieue du chastel de Moncel s’arresterent Juïfz et paiens au cretel, et Crestïens qui lors n’eurent corps loial de fuïr le roy Pietres qui cuer ot de cheel : mescreant, ydolatre fu et de faulx appel. Pour roy Henry actendre s’ordennerent moult bel. Des coureurs diray qui sont ou boquetel. Le roy Pietre nombrerent qui est sur le preel. Et puis sont retourné en brochant le morel, vindrent au roy Henry qui fu de sang royel. De Pietres lui ont dit tout l’estat de nouvel, qui pour estour livrer s’ordonnerent moult bel. Roy Henry en louha Dieu l’espiritel, et aussi it Bertrant qui ama le sembel. 544
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Liéz fu roy Henry et Bertrant ensement, et touz les seigneurs de leur assemblement, et de ce qu’ilz auront bataille temprement. Aus armes sont couruz touz communement, en cheminant tousjours s’aprestent gentement, car Bertrant et Henry se hastent malement. Et disoient : « Seigneurs, ou nom Dieu tout puissant, or pensons d’esploitier et d’aler sagement tant que Pietres trouvons et son assemblement ain qu’il ne s’en fuye ainsi ne autrement, 15756
corr. d’après Nh : e. dessus appel
- Bataille de Moncel -
[191v]
car si briesment n’est pris ou mort vilainement encores nous grevera, car il a trop de gent. Et si est aloyé a la paienne gent, il a Dieu relenquy et le saint Sacrement. S’a amené Paiens, Juïfz et autre gent : point ne nous fault passer la mer certainement pour Sarrazins trouver dedens leur tenement , car ilz venent sur nous, a leur encombrement. Aujourduy conquerrons honneur certainement. Ilz seront touz noustres a nostre commandement. Le plus pouvre qui soit en nostre ordonnement sera riche a tousjours, se la mort ne le prent. Et cellui qui mourra acquerra sauvement. Chascun soit huy proudon de hardy convenant, sans la mort redoubter, car on scet proprement que une foyz fault morir, si ne scet on comment. »
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545 Or chevauche Henry o Bertrant le senné, le Besgues de Villaines a moult noble barné qui de livrer estour sont moult entalenté. Si bien ont exploitié, tellement ont erré que l’ost Pietres ont veü qui estoit sur le pré, et furent touz coys sur le champ arresté. La sont venuz noz gens et ont tendu leur tré, pour bataille livrer se sont bien ordonné. La peüst on veoir maint confanon levé, mains bacinetz aussi et mains escuz nervéz, banieres et pennons de soye bien ouvréz. La y ot maintes trompes et maint cornet sonné. Ces armes reluisoient en gictant grant clarté. Le roy Henry les voit, a Bretrant l’a moustré. « Bertrant, se dist le roy, bien avéz regardé l’ost et la noblesse que Pietres le desrué nous a cy amené, pour sa grant cruaulté. Paiens et Sarrazins a o lui assemblé : plus y a de paiens que de crestïenté, et de Juïfz aussi, bien les ay advisé.
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- Episodes espagnols -
Véz vous la baniere aus champs d’or in ouvré, a un grifon rampant de goules painturé. Par foy, c’est la baniere au roy de Ianee, qui est ilz au fort roy de Bel Marin nommé. A cestui la seray aujourduy assemblé. Se Jhesu, par sa grace, m’avoit l’un destiné qui prendre le peüsse en vie et en santé, oncques si noble prise ne vit homme créé. Tant d’or in rendroit c’on ne l’aroit nombré. – Sire, se dist Bretrant, qu’avéz vous enpensé ? Viséz vous a l’avoir ? Je n’y acompte .i. dé. Car foy que doy a Dieu qui maint en majesté, si tost que je seray aus Paiens assemblé, en moy ne trouveront amour ne amitié s’ilz n’ont le saint baptesme receu et demandé. Descendons touz a pié tantost dessus le pré. Trois batailles ferons, ainsi me vient a gré, la plus grant ou meilleu, les autres ou cousté. Sarrazins en cherront, ainsi l’ay en pensé, pié n’en eschappera ne soit a mort livré. A Dieu le veu. Les gars seront touz appresté et Pietres le felon trestout desbareté. – Dieu vous en veille oÿr. » , dist Henry l’aduré. 546
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Noblement s’ordonnerent no crestïenné gent. Une grosse bataille ordonnerent briesment, que roy Henry mena trés hardiement. Et a l’autre conduyre le bon Besgues s’assent. Et une autre en mistrent en conroy noblement* que Bertrant si mena a destre gentement. Et en ces trois batailles, dont je dy a present, n’y avoit que .xxm ., comme l’istoyre appent. Roy Pietres d’autre part avoit o lui grant gent, Sarrazins et Juïfz, Crestiens ensement : 15844
s. juïfz q crestiens e, q cancellé.
15839
corr. (voir note) : et un autre e.
[192r]
- Bataille de Moncel -
[192v]
a bien .l.M. les nombrerent present. Et irent .v. batailles en leur ordonnement, rengie et ordonné furent moult ierement. Par les rens s’en aloit roy Pietre bellement et disoit aus Paiens de sa voix aultement : « A mon droit secourir m’aideront pleinement. Aletaire, beaux sire, ilz du roy proprement qui tient de Bel Marin le noble tenement, vous savéz bien que j’ay vostre pere en convenant a vo seur espouser qui de beauté resplent, et de prendre la loy de Mahon plenement. Et Henry le bastart et son assemblement seront desconiz aujourduy laidement. Jamais n’auroient pouoir contre moy nullement, voyres, se Jhesucrist a nostre droit entent. Ilz sont a desconir : vous voiéz clerement cincq sommes contre .ii. ou plus, mon escïent. – Pietres, dist Aletaire, ne vous doubtéz neent. Car foy que doy Mahon, a qui mon ame appent, sil n’y avoit que moy avec ma bonne gent, si ne doubte je pas que assez prochainement de Henry et des siens n’aiéz le vengement, car j’ay avec moy une hardie gent qui oncques ne fouÿ en oultre nullement. Je doubte que Henry et les siens ensement ne fuyent avant nous pour leur sauvement. » Dist Pietres le felon : « Il y pert malvaisement. Ne veéz vous les siens en si noble convent ? Telz .ii. chevaliers a en son gouvernement qui ne fuyroient mie pour tout l’or d’Orïent. Il y a un Bertrant qui regne puissanment, qui a nom du Guesclin, a qui Bertaigne appent : cellui tient en vigour Henry certainement. Je voys la sa baniere balant contre le vent, a un aigle de sable, dont le champ est d’argent. Mains Bretons a o lui qui moult ont ardement. .I. autre chevalier a Henry le pulent, a troys lÿons de sable painturéz gentement,
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- Episodes espagnols -
et sont ouvré de goules, je le voys clerement, a deux lÿons de poupre assi faitissement, a un quartier d’Espaigne, le noble tenement . Henry lui a donné du portier hardement et si lui a donné une compté present c’on nomme Riledieu, le noble tenement ; le Besgues de Vilaines le nomment toute gent. Ces .ii. chevaliers la ne fuyront nullement. Se tenir les pouoie a mon commandement, ne les respiteroie pour or ne pour argent, car je sçay bien de vray, s’ilz regnent longuement, qu’ilz me feront iner et morir laidement. » Dist Aletaire : « Sire, ne vous doubtéz noient. De ces .ii. chevaliers vous feray vengement et les vous rendray mors ou vifz vraiment. Touz seront desconfyz, se la mort ne me prent. » Adont a fait sonner en la trompe d’argent. Son eschiele conduit pas pour pas bellement vers l’eschiele Bertrant qui moult ot hardement. Bertrant le vit venir, si a dit aultement : « Or avant, mes amis. Or soiéz bonne gens. Ces gars seront a nous qui venent tellement. Jamais ne s’en iront dedens leur tenement. » Sa trompe it sonner Bertrant moult aultement. La commainça bataille et horrible content. Tel y cuida gaigner qui y perdu forment. 547
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Or approchent les roys de chascune partie pour bataille livrer et trés iere partie. Le noble roy Henry en riens ne se destrie. Sa gent va confortant, de bien faire les prie, et s’en va par les rens menant chiere esbaudie. « Or avant, mes amis, dist Henry chiere lie. Or voiéz vous bien cy vostre adverse partie. Véz cy Paiens qui venent, une gent enragie. Juïfz et Crestïens sont de l’autre partie. Ilz sont .vi. contre .ii., mais ne les doubtéz mie,
[193r]
- Bataille de Moncel -
[193v]
car Dieu et nostre droit huy nous fera aÿe. Tost sera ceste gent matee et desconfye. Vous Bertrant et vous Besgues, ou mon cuer se fye, vostre bataille menéz contre gent paennine, et je iray contre Pietres, que je ne ame mie, qui est mon ennemy pour cause deservie. » Ainsi fu actordé, la chose en fu bastie. Lors fu mainte trompecte sonnee et bondie. La se sont approchié de chascune partie. Il n’y a si hardi a qui le sang ne fremie. L’un l’autre confessoient dessus la praerie, disoient oroisons ou nom du fruit de vie. Le Besgues de Vilaines qui tant ot seignorie, s’avança tellement, lui et sa gent hardie, qu’il assembla premier sur la gent renoïe. Quant vint a l’assembler lors fu la traerie. Quant le traire failli, bataille ont commaincie. Et vindrent main a main en faisant crierie. Le Besgues fu a pié, aussi fu sa maisnie. Moult bien furent arméz tout a leur commandie. L’escu avoit au col, la lance bien fourbie, le bacinet ou chief qui au souleil lambie, entre Paiens se iert en disant « Dieu aÿe. », qui ne croient en Dieu ny en saincte Marie.* Lors fery un Paien qui fu né en Surie, nepveu estoit du roy de Bel Marin l’antie, et ot non Ruin, du païs de Salerie. Le Besgues le feri de la lance agusie. Escu ne aubergon ne lui it garantie, le corps lui terperça et le cuer et le ie, tout mort le rua jus, sa lance trespercie.* Le second mist a mort, au tiers tolu la vie. « Nostre Dame. crioit. Au roy Henry aïe. Feréz y bonne gent, la bataille est partie. Huy verra on le preux, ou bonté est partie. » Lors irent sur Paiens si trés grant envaïe 15935
corr. d’après P : q. le taire failli b.
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- Episodes espagnols -
que Paiens reculerent plus de demie archie. 548
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Moult fu fort cel estour et la bataille grant. Noblement se porta le Besgues souisant, et aussi font ses gens qu’il aloit conduisant. Celle premiere eschiele alerent reculant qui leur estoit venue ainsi que en costiant. A Aletaire fu raconté d’un Perçant* que mort fu son cousin, lequel il amoit tant. Moult en fu dolant, si le va regretant. Sur le Besgues s’en va sa bataille menant. Le Besgues le receu, point ne va reculant, ainçois l’ala ferir d’une lance trenchant. L’escu lui a rompu et le bon jazerant, mais l’auqueton fu fort qui fu de bouguerant. Nonpourtant fu feru par tel convent que l’abbati tout envers enmy le champ, mais tost fu redrecie de la gent Tervagant. Et puis ont assailli le Besgues souisant, et il se defendi a loy d’un amirant. Mais ce ne lui valu la montance d’un gant que tost ne lui faussist fouïr en reculant ou estre mort ou prins et ses gens ensement, quant sur lui s’embaty le noble Bertrant, avec lui son eschiele et « Guesclin. » va criant. Quant le Besgues l’oÿ, soy va reconfortant. « Vilaines. va criant, Dieu, soiéz nous aidant. » Et Bertrant qui l’oÿ lui va fort escriant : « Gentilz Besgue, dist il, je vou pri et commant que la vostre baniere qui la va ventelant, faictes mectre jouxte la moie en son estant. Ne faisons que une eschiele, doresmais en avant. » Adont se vont ensemble ceste gent escoutant, et dessus Sarrazins se vont aventurant, et combatent de glaives ierement en poussant. 15961
corr. d’après Nh : Aletaire fu rencontré du perçant, voir note.
- Bataille de Moncel [194r]
Quant les glaives faillirent, espees vont sachant. Le vif des armeüres vont soutivement querant que d’un cousté et d’autre se vont endommagent. Bertrant crie « Guesclin. » a sa voix hault et grant, et le Besgues crioit « Vilaines. » en criant. Olivier de Manny s’i ala bien portant, et son frere Alain et Henry le vaillant, Olivier Gentilz, un escuier puissant. Le Besgues ot un ilz qui le va costiant, qui dessus Sarrazins s’ala aventurant. Tant y it de prouesce, comme dit le rommant, que chascun les aloit forment auctorisant. La fu fait chevalier de Henry le puissant.
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549 Grande fu la bataille et iere la tençon. Noblement si porta Bertrant dont nous parlon, le Besgues et son ilz et Olivier le bon, et touz les chevaliers et les bons compaignon. Or diray de Henry a la clere façon. Envers Pietres s’en ala a son establisson. Pietres avoit tant de gens, nombrer ne les puet on.* Juïfz et Crestiens avoit en sa parçon, moitie furent a pié, les autres en l’arçon. Pietre fu a cheval, ou monde n’ot si bon, de ses armes couvert, ier fu comme lÿon. S’estoit Pietre armé a sa divisïon, et avoit a son col un escu a lÿon, la lance tint ou poign, dont le fer fut bon. Voit son frere venir qui Henry avoit nom, qui devant sa bataille venoit sur .i. gascon armé et haubergié, couvert d’un siglaton. Si estoit armé Henry a loy de champïon, et avoit a son col un escu bel et bon, 16007
e. ala son e., a suscrit.
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corr. d’après Nh : P. avoit de gens n., tant ajouté, voir note.
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- Episodes espagnols -
et tint la lance ou poign, o .i. fer de façon. Le roy Pietres poursceu qui venoit de randon. Assez le recogneu a son destre blason, car d’Espaigne portoit tout plain l’escu royon. Aussi faisoit Henry, le riche roy de nom, chascun se nommoit roy en sa divisïon. Quant vint a l’aprochier, dam Pietre le felon escria ferement et dist en sa raison : « A, Bastart renoié et traïtre larron. En mes las te tiendray en bien breve saison. Car prouver te vouldray par dessus ce sablon, que a tort m’as enchassé de ma regïon, comme fol et traïtre, bastart de mal renon. Car oncques nostre pere qui Dieu face pardon, ne digna tant ta mere priser nulle saison qu’esposer la voussist, c’est bien vray et raison. – Pietre, se dist Henry, a ce nous actordon. Mais mon pere gentilz par devant mains baron, par devant l’evesque de Burs, bien le scet on, ot plevie ma mere par bonne entencïon et si geu avec elle et en it tout son bon. Et lors fu je engenré et en celle saison ma mere le pouoit bien tenir a baron, espouser ne pouoit femme voir se elle nom. Et pour ce point ne suis ne bastart ne coistron. Mais bastart proprement bien nommer te puet on, et partant ne doys pas tenir la regïon. » 550
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« De mon corps vers le ton tost le veil prouver. – Traïtre, dist Henry. Tu fais trop a blasmer. Ne tu n’es mie digne de couronne porter. Je croy que onques mon pere ne te volu engendrer. On changa les enfans, ce veult on proposer. Bien pert a ton maintien, point ne veulx amonstrer. Tu ne veulx que Juïfz et Sarrazins anter. 16040
corr. d’après P : et plevie ma m.
[194v]
- Bataille de Moncel -
[195r]
Tu is a villains tort ta moullier tuer, qui du sang saint Loÿs se faisoit appeller ; seur estoit la roÿne de France qui n’a per. Et puis as tu volu aus Paiens actorder de Jhesu renoier et Mahon aourer, pour Sarrazins felons faire deça passer, pour la crestïenté exiller et gaster. » Lors acole l’escu, le cheval va hurter. Et puis ala la lance maintenent avaler, contre Pietre va tant qu’il puet randonner, et Pietres contre lui ne le veult refuser. Quant vint a l’assembler, grans cops se vont donner, n’y ot cellui ne face l’escu escartelier. Mais les haubers sont fors, ne pouent entamer, les poitrines d’acier ne pouent empirer. La lance au roy Pietres va en esclas aler, mais la lance Henry se tint royde a jouster. Et Henry estoit fort qui ou corps volt bouter. Et de cuer et de corps se volu cy esprouver que le roy Pietre it hors des arçons voler, a terre l’abbati, la le it sejorner. Henry reprent sa lance, dont le fer estoit cler, le roy Pietres en cuida par les coustes frapper, mais ses hommes sont la venuz pour le rehausser et le irent tantost ou cheval remonter, et vont le roy Henry entour avironner. Et Henry se defent, ne daigna reculer, son enseigne cria, Dieu prist a reclamer. Et ses gens sont venuz pour le visiter. La se vont les batailles a touz lieux assembler. La y ot un estour qui it a redoubter. Oncques de tel estour n’oÿ nul homme parler.
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551 Forte fu la bataille, nul homs ne vit grigneur. Henry ot nobles gens et de noble valeur, 16055
corr. d’après P : f. a villains a tort t., a supprimé.
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- Episodes espagnols -
et si fu bon aus armes, nul homs ne vit meilleur. Et aussi roy Pietres, si fu vaillent jousteur, en toute l’assemblee n’ot meilleur ne plus sceur. A dextre et a senestre se iert enmy l’estour, ce qu’il ataint a cop, de la mort prent saveur. Une espee tenoit Pietres le soudoieur, trenchant comme un raseur de chés le barbïeur. Bien en cuida ferir Henry le guerroieur, mais Henry se retrait, dont il it sen grigneur. Le branc descent aval dessus le missodour, la teste lui trencha tout ainsi que une lour : Henry et son cheval abaty sur l’erbour. Tantost fu relevé Henry le pongneour, son enseigne va criant pour avoir secour. Et ses hommes le vont avironnant entour, cheval lui ont donné tantost et sans demour. Et Henry y monta a loy d’emperour, et puis se rebouta maintenant en l’estour, en disant : « Ou es tu, Pietres ? Faulx traïteur. Se tenir je te puis, tu morras a doleur. » Et Pietres lui revint tout espris de folour et rassailli Henry a force et a vigour. Se Jhesu n’en pensast, ce fust son dernier jour. 552
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Forte fu la bataille de chascune partie. Pietres contre Henry maintint bien l’estournie car il savoit assez d’estour et d’escremie ; aussi faisoit Henry qui en Jhesu se ie. Henry ot bonne gent, isnelle et hardie, et se tenent serréz, ne destoquent mie, ains ferent en poussant contre adverse partie, et irent reculer Pietres o sa partie. Ou vousisent ou non, leur bataille ont parcie. Tant en mirent a mort, n’est nul qui le vous die. L’une bataille en l’autre s’est si entouaillie 16096
corr. d’après P :c. ferir Henry Henry le g., Henry supprimé.
[195v]
- Bataille de Moncel que la gent du roy Pietres s’en est esmaie. Car Bertrant du Guesclin, a la chiere hardie, le Besgues de Vilaines qui fu de sa partie, et Guillaume Boytel qui ne se faigny mie, et cellui de la Hussoie, ou tant ot seignorie, Olivier et Alain de Manny la garnie, et leur frere Henry a la brace fournie, Carenlouet le ber a la chiere hardie, et mains autres proudomes de trés bonne lignie, se porterent si bien en bataille fournie qu’ilz en irent fouÿr celle gent ressongnie, Juïfz et Sarrazins, que Jhesu n’aime mie. Ainsi les faulx Paiens irent la departie. Voit ce Pietres le roy, moult bien ne lui plaist mie. A sa gent escria qui estoit baptizie : « A, Seigneurs, dist il, huy pers ma seignorie. Ces Paiens ont failli, Dame Dieu les maudie. Or voys je bien que un homme est plain de grant folye qui estrange boyel nul jour au sien alie. »
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[196r]
Or s’en fuyent Paiens tout contreval les champs a cens et a millers et les vont departant. Le ilz qui fu du roy Bel Marin gouvernant,* quant ses gens vit fouÿr, au cuer fu moult dolant. Pour sa vie sauver s’en fuyt a travers champs, o lui .iii. admirans, ou moult se fu fÿans. Une forest y ot, se nous dit le rommans. La cuiderent entrer, ce fu leur essïant, mais ilz furent sceüz de noble combatant, tant du noble Bretrant que du Besgue vaillant, Olivier de Manny et touz ses confortans. les Paiens ont enclos et furent assaillans. Et de rendre leurs corps leur furent semmonans, et de croyre en Jhesu qui sur tous est puissant, et d’eux baptiser ; mais les Paiens pulent ne furent a noz gent en riens obeissant,
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- Episodes espagnols -
ançois se desfendirent aus bons asseréz brant tant que des nous octirent .iii. escuiers vaillant. Lors furent assailli .iiii. escuiers puissant, touz .iiii. furent mors et octis sur les champ, on ne laissa sur eulx qui vaussist .iiii. gant. Temps est que du roy Pietres vous soie devisant. hors de l’estour fouÿ quant vit qu’il en fu temps, monte sur .i. cheval qui estoit bien courant. A un chastel s’en vint, comme dit le rommant, qui fu a une lieue de l’estour dont je chant ; on l’appella Moncel, sur montaigne seent. Pietres entra leens a .iiiic . sergent et .iiic . soudoiers qui la furent manant. Ainsi furent .viic . ou chastel suisant. Ce fu trop, que laiens fu le vivre faillant. Pour ce point fu le roy Pietres en la in meschant que morir lui convient, il estoit bien temps. Faussement ot regné, tout ainsi que un tirant. Si morra malement, comme orréz comptant. 554
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Or est dedens Moncel le roy Pietres a garant. Si avoit laissé ses gens combatans sur les champs. Sarrazins s’en fouÿrent comme touz recreant. Et quant ceulx de Sebile qui furent Dieu creant, virent que Sarrazins vont dela departant, adont vont aprés eulx et les vont assaillant, gictent dars et faussars, moult en vont octïant, et leur dient en hault : « Traïteurs. Soudoiant. Au besoign nous ailléz vilainement faillant. Jamais ne retourneréz en païs Tervagant, ne jamais au roy Pietre n’yrons obeïssant, ne en bataille n’yrons o lui sur les champs. » Ainsi s’en vont Paiens fuyant et eslongent. Et Sebilois les vont devant eulx enchaussant, et les Juïfz aussi vont Paiens assaillent. 16178
c. les gens champs, gens cancellé.
- Bataille de Moncel -
[196v]
Et le bon roy Henry, le Besgues et Bertrant, leurs hommes et leurs gens et touz leurs confortant, vont aprés Sebilois et Juïfz enchassant. Tant en mirent a mort, couvert en son les champs. Ains tel desconiture ne vit nul apparant. Car Henry les suyvoit tousjours en combatant et de Pietres trouver avoit le cuer joiant. Et disoit a Bertrant le noble combatant : « A, Bertrant. Beau amis. Et vous, Besgue vaillant. Se Pietres nous eschappe, véz me cy bien meschent. – Sire, se dist Bertrant, foy que doy saint Amant, ains suyvroie ces gens en Sebile la grant que de Pietres ne sache tout le convenant. » Le Besgues de Vilaines va ce fait acordant, Olivier et Henry de Manny le vaillant. Si it Karenlouet qui dit : « Alons avant. » Et Guillaume Boytel ne les va desdisant. Touz furent d’un actort les petiz et les grant de suÿr jour et nuit Pietres le soudant ; cuidoient qu’il alast en Sebile la grant. Atant un courour s’en vint devant Bertrant, et estoit de la gent Bertrant dont je vous chant. « Monseigneur, dist le bers, je vous jure et creant dam Pietre le faulx roy vous iray enseignant. A Moncel est alé, chastel souisant. Bien sçay qu’il est entré dedens a son garant, avec lui .iiiic . de sa gent les plus grant. Si en a ou chastel bien trouvé autant qui entour du chastel le iroit assegent. Ilz mourroient de fain ains .xx. jours passant. » Et quant Bertrant l’oÿ, Dieu en va gracïant. Au roy Henry ala la nouvelle nonciant. Et quant Henry le sceu, joyë en eu moult grant. Tantost a fait noncier parmy l’ost en criant sur la hart qu’il n’y ait si petit ne si grant qui avec lui ne voyse sans aler demourant, ne que du conquest preigne la montance d’un gant tant qu’il aura Moncel assis a son talent.
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- Episodes espagnols -
Lors furent les pillars courroucéz et dolant. 555 16231 16233 16235 16237 16239 16241 16243 16245 16247 16249 16251 16253 16255 16257 16259 16261 16263 16265
Le roy Henry a fait sa trompecte sonner, rassemblé a ses gens, bien les scet ordonner, et d’aler a Moncel les vait touz acoler. Cincq cens hommes laissa pour le conquest garder ain que nul n’y peust piller ne rober jusques atant qu’il auroit Pietre fait iner, qui deüst les pillars octire et decoper ne se tenissent pas de piller et rober. Si en fu depuis ce dy a mains le chief copper. Temps est que de Henry vous doye diviser, du Besgues de Vilaines et de Bertrant le ber, de Guillaume Boitel, de Henry de Moncler, et de mains autres chevaliers que je ne sçay nommer. Roy Henry et ses gens pensent d’esperonner. Devant Moncel se vont logier et amasser, drecier tentez et trez pour en assez logier, cuisines ordonner pour viandes atorner ; il sembloit qu’ilz deüssent la .x. ans demourer. Au mur du chastel vint roy Pietres escouter et voit tout environ gens d’armes arriver, le chastel approchier et les chemins garder. Adont lui commainça tout le sang a muer. Son cappitaine ala a conseil appeller. « Amis, me saroiéz vous certain conseil donner comment hors de ceens je peüsse eschapper ? Car si encores pouoie sauvement cheminer, assez briesment vouldroie tel secour amener dont touz mes ennemis feroie a mort livrer. » Se dist le cappitaine : « Je n’y sçay que viser. Se au secours vouloiéz aléz et cheminer, il ne vous fauldroit mie longuement demourer. Trop sommes grant foyson pour tel fait garder : plus sommes de .viic ., touz legiers bacheler, pour .xve . n’avons mie assez a manger. Chastel qui n’est garny en fait mains a doubter. »
[197r]
- Bataille de Moncel -
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Dist Pietre le felon : « Or ne sçay je que faire. Pour moy sauver me suis icy volu retraire. Or avons poy a vivre, ce nous tourne a contraire. Se peuple la dehors nous fera soufrir hayre. A mangier ont assez, mal preu leur puisse il faire. Or voys je bien que Henry par foy me maine guerre, qui si tost m’a suÿ pour moy a la mort trayre. J’ay faucement ouvré contre mon noble paire, ma femme la roÿne qui doulx ot le vïaire. Et si ay creuz Juïfz qui sont de putafaire, et Sarrazins qui ont loy qui nous est contraire. Je croy que briesment en auray mon salaire. »
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557 Ainsi se devisoit roy Pietres dont je dy. Voit sur les champs drecier tentez et tréz aussi, et logez estorer et drecier par tel cy que s’ilz deüssent la estre an et demy. Voit cuysines fumer, de quoy la layreur senty. Voit vitailles amener, char, pain et vin aussi. Voit les chemins garder du chastel seignory c’on n’y laissast entrer un parysy. « A, Dieu, se dist Pietres, véz moy cy acrouppy. Je seray atrappé et si ay tant fouÿ. Si ce bastart me tient, que tant ay enchery, il me fera mourir, bien sçay, sans nul detry car il me het a mort et aussi foys je luy. Conseiller ne me sçay, par le corps saint Remy. Adviser me convient comment seray gary. Ce deable Bertrant m’a malement honny. Ja Henry le bastart n’eüst duré ainsi si ce ne fust l’aide qu’il a de ces gens cy. Confunduz soient ilz de Dieu qui ne menty, car ilz sont si loiaux et de bonté garny que a traÿson faire ne seront assenty. Bien me venist a point, a ce que je choysy,
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- Episodes espagnols -
se je peüsse voler comme un oisel joly. » 558 16301 16303 16305 16307 16309 16311 16313 16315 16317 16319 16321 16323 16325 16327 16329 16331 16333
Or furent touz d’acort ou chastel par dela que droit a mynuyt roy Pietres partira, lui .ve . sans plus de gens plus ne menra. Assez d’or et d’argent en celle nuyt troussa pour soudoiers avoir, se dit, qu’il amenera. Ainsi au mieulx qu’il peu son voiage ordonna. On ne savoit en l’ost que roy Pietres pensa, mais on savoit bien assez, car on leur compta, que a vivre eurent petit et que famine y a. Si vous dyray de quoy Henry le roy s’avisa. « Sire, se dist Bertrant, oiéz c’on vous dira. Ce chastel par assault ja nul jour on n’aura. Envoiéz un heraut ou chastel par dela pour parler au roy Pietres, savoir comment il va, s’il tiendra le chastel ou s’il le rendra. Si a mercy veust venir, on le recevra et lui donray duché dont il se chevira. Puet estre que une paix de vous deux se fera. – Bertrant, se dist Henry, fol le me conseillera, car s’il se apaise a moy, en in me traÿra. Se je le puis tenir, jamais ne me nuyra. Nonpourquant je veil bien c’on envoie dela. » Un heraut appella, son vouloir lui compta. Sur .i. cheval courant isnellement monta. L’ayraut retint bien ce c’on lui enhorta. Aus bailles est venu, son chapperon ousta. Bien fu qui tost son voloir lui demanda. Et dist que au roy Pietre parler lui conviendra. Au roy Pietre fu dit c’on le demandoit la. Et quant Pietre le sceu, maintenant s’avisa et a son cappitaine dist ce que pensé a. Adont le cappitaine le heraut appella et lui a dit : « Amis, que queréz vous deça ? 16318
corr. d’après P : u. paix de nous deux s.
[198r]
- Capture de Pietres – Le riche roy Henry m’a envoié par deça pour savoir se roy Pietres a lui se rendra, car se rendre se veult, de lui mercy aura, pour chose qu’il ait fait mort ne recevra. » Se dist le cappitaine : « On vous reppondra. Pietres n’est pas ceens ; passé .x. jours a qu’il se departy d’ycy, au secours s’en ala. Tel secour amenra que Henry grevera, ce deable Bertrant en la in en mourra. Ce chastel garderons, assez vivres y a. » Quant le heraut l’entend, tout le sang lui mua. Au roy Henry revint et puis si lui compta. Et quant Henry l’oÿ, de paour fremy a. Et adont jura que jamais n’en partira si aura le chastel et quant qu’il y a. Or porréz oÿr qui oÿr le vouldra comment Pietres fu pris, comment il devïa, et comment le bon roy de France par deça envoia Bertrant querre en Espaigne dela et le it connoistable, l’espee lui livra. Mais ainçois vous dira comment Pietre ina.
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559 [198v]
Ou chastel de Moncel fu Pietre le tirant, qui par moult grant malice s’ala leens celant quant il vit que Henry n’ala point deslogent. Pour issir dela et aler a garant lui cincquieme est issu du chastel souisant. Leurs chevaux par le frain vont bellement menant. Le chastel estoit hault sur roche seant, si failloit avaler con on s’en va issant. Tout bellement s’en va roy Pietre descendant. Le gait fu d’autre part c’on ala ordonnant et avoit fait son tour comme il est aferant, au pié de ce chastel, dont vous voys comptant. Et pluseurs soudoiers qui se vont esbatant au Besgues de Villaines estoient demourant.
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- Episodes espagnols -
Moradas de Ronnille va o luy appellant.* Au Besgues de Villaines est venu maintenant. « A, Sire, fait il. Par Dieu, le roy amant.* Nous avons oÿ gens qui vont au devalant. La voye du chastel nous ne savons noyent. Je croy ce seroit bon c’on alast espïant que ce ne fust Pierron qui ne vault un gant, qui s’en veille fouÿr comme en demussant. » Quant le Besgues oÿ ce qu’ilz vont disant, adont leur dist en bas : « N’en aléz plus parlant. » Adont prent de ses gens du tout a son commant et les mena au lieu dont je vous dy devant. Et ne sceurent que ce fu, mais il vont bien jurant que ce pas garderont a l’espee et au branc, ne nul n’y passera si n’est pour leur talent. 560
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Seigneurs, en cellui temps dont je vous signiie estoit, se dit le livre, la nuyt moult obscurcie. Le Besgues ot fait son tour entour l’ost ressongnie et reprenoit son tour en une autre partie. Roy Pietres voit le guet, comment il se tournie. Et quant il a choisi que le guet n’estoit mie ou chemin ou d’aler avoit moult grant envie, lors prist a avaler, avec lui sa maisnie, lui .ve . sans plus ; mais je vous signiie assez eurent troussé de in or de Rousie*. Bien cuidoit le roy Pietres empetrer villonnie au noble roy Henry et a sa baronnie. Quant Pietre se trouva tout jus sur la chaussie, eschappé cuidoit estre tout a sa commandie. Une breche trouva ou mur, je vous afye. Tout bellement a dit a sa soudoyerie : « Montéz tout bellement, seigneurs, je vous en prie. Car je m’en voys monter ou destrier de Surie. » Lors vint a son destrier, bellement l’aplenie, 16371
corr. (voir note) : s. font ilz p., voir note.
[199r]
- Capture de Pietres mist la main a l’arçon d’un yvoyre entaillie, et mist pié en l’estrie, dont l’euvre fu jolyz. Pour monter ou destrier prenoit son escuellye, quant le Besgues gentilz, sans lumere esclarcye, l’embrassa par les lans disans : « Par saint Eslye. Je ne sçay qui vous estez, mais vous ne vous en iréz mie. Si auréz vostre bel alee a mon pouoir paiee. »
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[199v]
Le Besgues de Villaines qui moult estoit puissant, enherdy le faulx roy ierement par les lans, de monter a cheval lui fu bien defendans. Et bien dit que dela ne sera departans si saura qui il est et qu’il va querant. Et les gens du Besgue vont prendre les sergens qui furent descenduz o Pietres le tirant ; a defense se mistrent, mais ne vali .i. gant. Nonpourquant le roy Pietre, dont je vous suis comptant, une dague tira qui moult estoit trenchant : le Besgues en cuida bien octire sur les champs. Le Besgues vit la dague qui estoit reluisant a la main lui coru, tost lui fu arrachant. Et puis lui dist en hault, point ne lui fu celant : « Je ne sçay si vous estez roy, duc ou admirant, mais foy que doys a Dieu qui est ou ciel manant, si encontre moy vous estez nullement defendant,* a mort vous mectray, n’en soiéz mescreant. Or vous rendéz a moy, n’y soiéz delayant. Dictes moy vostre estat, ne le soiéz celant. – A, Besgues gentilz, dist Pietres le tirant. Je me rens a vostre nom et a vostre commant. Me convient il mourir, sire, Besgues vaillant ? Est dont mon jour venu, que j’ay fouÿ longtemps ? – Sire qui estez vous ? dist le Besgues vaillant. – Helas, se dist Pietre, je suis le plus meschant dont nul oÿ parler passé a .iic . ans. 16424
v. estez v roy d., v cancellé.
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- Episodes espagnols -
Roy Pietre suis nommé de petis et de grans. Or ne seray plus roy, selon mon escïant, car bien voy que morir me fauldra en bref temps. – A, Sire, dist le Besgues, ne vous soiéz doubtans. Pieté aura de vous vostre frere savant, et si l’en prieront les princes souisant. – A. Besgus, dist le roy, ce ne vault pas .ii. gans. A mort me mectra le chien matin, tirans. Mais se sauver voléz ma vie en cestui temps, quatre cités auréz et .xii. chasteaux grans, et de in or chargéz .xii. mules amblans. – Nenny, Pietres, dist il. A ce ne suis pensant. Ja a traïson faire ne seray assentant. » 562
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Or est roy Pietres prins du Besgue de Villaines. Moult le tint ierement, avec lui le maine. En un tref le mena qui n’estoit pas de layne. Alain de la Hussoie fu du tref chevetaine. Quant il vit Pietre prins, moult grant joye en demaine. « Besgues, se dist Alain, par les saint de Touraine. Qui vous a pourveü de si trés noble estraine ? Tel chasseroit .xx. ans en la forest soutaine qui ne prandroit mie proye si trés hautaine. Vous avéz bien trouvé coutel pour vostre gayne. Qui croust en sa maison, il n’aura ja que peine ny adventure n’aura qui a honneur le mayne. » 563
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Alain de la Hussoie si fu en son logis. Moult fu joiaux au cuer quant vit Pietres pris. Et le Besgues gentilz ne s’i est alenty : son vallet appelle qui moult estoit gentilz, et fu nommé Gillet du Loyset, si m’est vis. « Gillet, se dist le Besgues, soiéz decy party. Aléz au roy Henry qui tant est seignory, et lui dictes comment roy Pietres a esté pris.
- Capture de Pietres -
[200r]
S’il veult on lui menra en sa tente de pris. Et si Pietre son frere voloit prandre a mercy, se ne seroit que bien qu’ilz fussent bons amis, car trop est sage cellui qui oncques ne mesprit. » Atant s’en part Gillet qui n’y a arrest mis. Au roy Henry s’en vint, devant lui s’est lechi et lui dist : « Noble roy, or soiéz resjoÿ. Du Besgues monseigneur a esté Pietres pris, au pié de la montaigne du chastel seignory. Lui .ve . vouloit aler hors de pourpris . Or est prins, gentilz roy, atrappé et saisi, et ou logis Alain de la Hussoie est mis. Or vous mande le Besgues, monseigneur qui l’a pris, s’il vous plaist on l’aura par devers vous tremis. Et si vostre plaisance estoit et vostre devis de vous acorder o Pietres le hardy, il plairoit assez bien aus grans et aus petis, car cellui qui ne mesprent, il est moult soubtilz. » Et quant le roy l’entend, le sang lui est fremy. Son mantel qui estoit d’un dïappre fourny, d’une hermine fourré tantost fu devesty. A Gilet le donna et lui a dit : « Amis. Pour les bonnes nouvelles dont par toy suis servy, je te donne ce mantel qui n’est mie pourry. – Sire, se dist Gillet, je dy .vc . mercys. » A son col le gicta, voluntiers s’en vist. Or diray de Henry qui fu moult resjoÿ. Sur un cheval monta qui n’y a terme mis, sans per ne compaignon actendre, se m’est vis ; mais il fu assez tost de ses hommes suyvy. La ou roy Pietre fu va Henry dont je dy. Et quant il vint au tref qui bel estoit basty, le Besgues salua et les barons de pris qui la furent venu et assemblé et mis pour savoir que l’on feroit de Pietres le chetif. Aussi tost que Henry qui tant fu seignory, le roy Pietre avisa, si lui dist a hault cris : « A, Traÿtre, felon. Tres faulx larron despit,
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- Episodes espagnols -
qui tant m’as fait de maulx, or te voys je la pris. » Et Pietres lui a dit : « Tu mens, bastart faintis. Traïtre ne suis pas, mais tu l’es, je le te dy, car tu as contre moy regné comme antecrist. » Et quant Henry le vit, d’aÿr devint espris. Pietres voloit ferir d’une dague de pris entre les mains du Besgues qui lui a dit a hault cris : « A, Roy Henry, dist il, n’aiéz pas ainsi mespris. Pietres est mon prisonnier, je l’ay loiaument pris. Si en mes mains l’octiéz, mains en auréz d’amis. Et qui pert ses amis, je di qu’il en vault pis. » 564
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Dist le Besgues gentilz qui tant fait a priser : « Pietres vous rendray qui est mon prisonner, par telle condicïon que a moy veilléz paier itelle rançon tout denier a denier, comme un tel prince doit donner et octroier. Et s’il est nul qui die ne veille tesmoigner que roy Pietres ne soit mon loial prisonner, sans traÿson penser, sans malice sachier, sans savoir qu’il deüst issir sur le sentier mais par droite aventure que Dieu me it veiller.* S’il est qui le contraire veille signifïer, au riche branc d’acier je m’en vouldray purger. » Par trois foyz volu le Besgues ces paroles noncier, mais nul ne s’avança de lui a laidanger, ainçois le vont touz en honneur essaucer. 565
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Le roy Henry parla sans point delayer : « Gentilz Besgues, dist il, je sçay bien sans cuider que vous portéz le cuer de loial chevalier. Pietres me rendréz, je vous en veil prier. A vostre gré vouldray la rançon paier telle qu’il appartient a un tel prisonnier. » Et adonc lui livra le Besgues au vis cler.
[200v]
- Capture de Pietres -
[201r]
Dont dist Henry a Pietres : « Faulx traïtre lanier. Ja vous feray les membres touz vifz escorcher. – Vous mentéz, faulx bastart. » dist Pietres l’adverser. Et quant Henry s’oÿ de Pietre laidanger, de Pietre le felon se va tantost approchier. D’une dague qu’il tint lui va .iii. cops paier, ou vïaire l’ala ferir et estiquier. Quant Pietre se senty ainsi appareiller, roy Henry embraça et le prinst a luiter tellement que touz deux alerent trebucher. Et Henry l’estriquoit de sa dague d’acier, mais armé le trouva d’un bon haubert d’acier. Le roy Pietre s’ala tellement eforcier que Henry fu dessoubz, en lui n’ot que aïrer. Se Pietre eüst eü une dague a ermier, jamais au roy Henry vivre n’eüst mestier. De sa dague tollir s’esforçoit le murdrier, et le prist des genoulz moult fort a pestiller. Atant véz vous Bertrant du Guesclin au vis fer, a qui on ot compté de Pietres l’adverser.
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566 Bertrant du Guesclin s’en est oultre alé, Olivier de Manny qui tant fu aduré, et Guillaume Boytel, le chevalier louhé, Bertrant parla en hault et dist : « Or entendéz. Lairréz vous roy Henry octire a tel vilté par un faulx renoyé, traïctre parjuré, qui oncques ne it bien en jour de son aé. » Dist au bastart d’Anieres qui estoit son privé : « Aléz aider Henry, bien faire le pouéz. Prenéz le par la jambe, au dessus le mectéz. » Et le bastart le it, qu’il n’y est arresté. Par la jambe saisi Henry dont vous oiéz et le tira amont et dist en sus levéz : « Deportéz vous atant, fait en avéz assez. » Sur Pietre fu Henry, ainsi con vous oiéz.
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- Episodes espagnols -
Lors se leva Henry, plus n’y est demeuré. « Avant seigneurs, barons. Faictes n’y demouréz. Or tost, descobilaz ce traïtre murtrier. » Et ce mout fu a dire que tost fust decolé. 567
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Aussi tost que Henry ot dit : « Descobilaz. » parla un escuier qui ot nom Lucas. A Pietre s’en est venu et lui dist : « Faulx Judas. Tu is copper la teste a mon pere Thomas pour l’amour de ma mere, en son corps commoras* et avec tout ce tu me desheritas et hors de ton roiaume me banis et chassas. Et partant par moy la teste perdras. S’il plaist au roy Henry, par autre ne morras. – Or tost, se dist Henry, delivréz en le pas. Voiant ceulx qui icy sont le chief lui copperas et en Sebile toust la teste porteras ain qu’ilz croient meulx de Pietres les estas. Et en un sac aussi le corps tu mertras, en la tour de Moncel lassus le pendras. Ja ne sera mis en la terre sa bas. Et bien sçay que au Saint Pere le fait ne plairoit pas et on doit obeïr au Saint Pere en touz cas. » 568
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L’escuier dont je dy ny it arrestement, prist un courbe coutel qui trenchoit roidement, Pietre trencha le chief voiant toute la gent et puis en une glaive l’estica erramment, et fu portee au tref Henry isnellement, et le corps demoura ens ou tref qui resplent. Tantost fu devestu sans nul arrestement et gicta on sur lui un drap de bouquerant. Et quant ce vint au jour que le souleil resplent, et que ceulx du chastel sceurent tout clerement la prise du roy Pietre et la mort ensement,
[201v]
- Convocation de Bertrant à la cour de Charles V -
[202r]
adont se sont renduz a Henry plainement. En un sac ont bouté roy Pietres plainement et pendu a la tour qui fu fait a cyment. Et puis ont a conseil que Henry chaudement a Sebile s’en ira faire aus bourjois present de la teste Pieron et de monstrer comment se doyvent retourner a Henry plainement. Ce qui fu dit fu fait assez hastivement, car la force dit, que le vray nous aprent que, quant les bourjois virent le roy Pietre present, que a Henry obeïrent a son commandement. A seigneur le receurent moult honnourablement et de ce qu’ilz ont fait oufrent amandement. Et la fu la teste Pietre portee longuement contreval la cité avironneement. Tellement en haÿrent roy Pietre celle gent que le commun qui vit la teste la present la pristrent et gicterent tost et appartement en un leur qui la est qui en la mer descent.* Ains puis ne fu veüe la teste nullement. Et quant Henry le sceu, le cuer en ot dolant. « A, Bertrant, dist Henry, or me va malement. Par ce chief eüssons Toulecte a nostre commant, car croyre ne vouldront la malvaise gent que Pietre soit octis ne mis a inement. » Dist Bertrant : « S’ilz ne voulent croyre nostre parlement, aprouver nous fauldra a l’acier qui resplent. » Lors apprestent leur oirre tout communeement. Au siege s’en revont qui dura longuement, qui fu devant Toulecte, la cité qui resplent : de cy merveilleux n’oÿrent nulle gent.
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569 Mais or s’en va Henry a pouoir moult grant. Espaignolz a touz lieux se vont a lui rendant. Les clefz des bons chasteaux lui va on apportant, les villes et cités vont a lui enclinant,
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- Episodes espagnols -
touz se rendent a lui, petis et grans ; mais Toulecte n’y volu aler obeissant. Au siege retourna Henry dont je vous chant. Moult honnoura sa femme au gracïeux semblant, aussi it l’arcevesque qui a lui se va pleignant de Toulecte la cité qui tant les va prenant. Or refurent en l’ost tousjours comme devant. Bertrant du Guesclin fu en son tré luisant, avec lui Olivier de Manny le vaillent. De Toulecte s’en vont ensemble divisant qui contre roy Henry va ainsi estrivant. Ainsi comme Bretrant va merencolient comment prise seroit la cité avenant, véz vous un escuier d’onneur bel et puissant que le bon roy de France envoioit a Bertrant. Devant Bretrant le ber se va agenoillant et dist : « Ce Damedieu qui maint en Orïent veille reconforter par son digne commant le royaume de France et le roy tout devant, bien mestier en seroit, on le voit apparant. Et si veille garder Bertrant au corps puissant, le meilleur chevalier et le plus avenant, et tout le plus hardy et le plus avançant, et qui par tout le monde a renom le plus grant, que nul sceüst trouver jusques en Abilant. Sire, le noble roy qui France va tenant vous mande et vous prie que en suppliant qu’il vous plaise venir a Paris la devant, o touz les soudoiers qui sont a vostre commandement, et que en alant droit la vous ailléz concueillant gens d’armes par tout ou l’on les ira trouvant, car le roy a mestier de secours et garant. Engloys se sont esmeuz en Guïenne la grant, en terre de Poictou, en Boulenoys devant, en Guïenne, a Calais dessus la mer ceent. Les treves sont faillies, le païs vont pillant. 16650
o. tousjours de comme d., de exponctué.
[202v]
- Prise de Toulecte Engloys de jour en jour se vont fortifïant. Robin c’on dit Canoles a eforcement grant, viendra devant Paris, de ce se va vantent. Nul ne scet le meschief ne le bisestre grant qui est ens ou roiaumme aujourduy apparant, car touz les fors Engloys, de quoy il y a tant, chasteaux, villes, cités se vont fortifïant et courent le païs et arriere et avant. De ville en autre n’oze aler homme marchant. –Amis, se dist Bertrant, par les sains d’Orïent. Et que ne va le roy gens d’armes assemblant et ses nobles communes, de quoy il y a tant, pour recevoir Engloys qui sont si fel tirant ? – Sire, se dist l’escuier, or vous va actendant. Encores ay je oÿ dire a la court souisant que l’espee auréz du tout a vostre commant et seréz connoistable de France la puissant, car le sire de France, connoistable savant, devient fraïlle et veil, se dient les auquant, et de rendre l’espee va le roy semmonant. Tenéz, véz cy la lectre et le scel pendant que le roy vous envoie de France la devant. » Adont ala Bertrant la lectre recevant. L’escuier it lever et commanda errant que a table fust servy du tout a son commant. La lectre ouvry Bertrant qui n’y va detrïant, et puis lire la it, la en trouva autant comme l’escuier lui avoit dit devant. « Hé, Dieu, se dist Bertrant. Laisséz moy vivre tant que le jardin des clefz, ou chascun va pillant,* puisse estre refermé du tout a mon commant. »
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570 Bertrant vint a Henry le riche roy de nom. Les nouvelles lui dist du noble roy Charlon. Et quant Henry le sceu, ne lui vint mie a bon. A Bertrant depria que par nulle achoison
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- Episodes espagnols -
ne parte d’avec lui, si aura a bandon, car on doubtoit Bertrant, sa grace et son renon. Et a l’escuier revint, si lui donna grant don, et puis le renvoia au roy de Montlaon. De l’escuier lerray, de Bertrant vous diron, qui de raler en France a grant devocïon. Bertrant it assembler le conseil de nom, chevaliers, escuiers et mains nobles baron pour viser par quelle voie et par quelle façon pourroit Toulecte avoir, ou il a main donjon. « Seigneurs, se dist Bertrant, pour Dieu et pour son nom. Or ne soit point celé qui saura riens de bon, die chascun son dit, comment Toulecte auron. Briesment m’en fault aler en France le royon. Robin Canole iray voir en sa façon, qui a vouhé un veu et juré sans raison que cy prés de Paris portera son penon que le roy le pourra voir de son donjon. Par saint Yves, s’il plaist au riche roy Jhesom bien me pourra voir par devant sa façon. » Se dist le roy Henry : « Par les sains d’Orïon. En Toulecte ne voulent croyre nostre raison, que Pietre soit octis a sa maleïçon. Nostre fait fust prouvé si le chief eüsson. Assez recogneüssent le vis et le menton. » Dist Bertrant : « Je diray comme nous le feron. La baniere qui fu Pietres leur monstreron, entour de la cité nous la traÿneron, et puis ferons semblant que touz nous en fuyron. Vous verréz que aprés nous acourront de randon. S’ilz s’en revont leens, avec eulx entreron. – Hé, Dieu, se dist Henry, que ce conseil est bon. Se fait soit actordé, car ainsi le feron. » 571
16749
Seigneurs, en ce temps dont je vous ay parlé avoit telle famine par dedens la cité
[203r]
- Prise de Toulecte -
[203v]
qu’il n’y avoit chien ne chat qui y fust demouré, ne cheval, ne jument, tout y fu devoré, et paissoient les gens herbes en un souppé. Au roy Henry fu dit qui en ot grant pitié. Adont a roy Henry maintenant commandé la baniere qui fu a Pietre le derué et le maistre estendart qu’ilz eurent conquesté soit devant la cité tout en l’eure levé. Et il fu ainsi fait comme il ot commandé. Et quant le cappitaine a tout ce regardé, aus creneaux s’appouha , si a Henry regardé et du trait de leens l’a moult bien asséné. Et quant il vit Henry, si lui a demandé : « Que ce signifïoit c’on avoit ordonné a drecier la baniere d’ouvrage painturé telle que le roy Pietres ot en l’estour porté ? » Lors lui compta Henry la droite vérité, comment a Sebile fu ja le chief porté et comment en un lu fu du commun gicté. Mais croyre ne le volu le cappitaine desrué, dist si est contrefait l’estendart eslevé et qu’il ne rendra Toulecte la cité a homme si non au roy qui Pietre est nommé. Adont lui dist Henry, par grande cruaulté : « Cappitaine, entendéz ce que je compteré. Je vous jure sur Dieu qui maint en magesté, se vous ne vouléz rendre ains .iiii. jours passé Toulecte le cité et du long et du lé, je vous jure sur Dieu que vous seréz trayné entour de la cité, ou tant a richeté, ainsi comme on fera l’estandart eslevé et puis aprés si auréz le chef coppé. » Et puis le roy Henry a tantost commandé c’on traynast la baniere au tour de la cité et l’estandart dequoy vous ay recordé, et puis si soit gicté ou meilleu du foussé. Et il fu ainsi fait con l’ot divisé. Mais le faulx cappitaine n’y acomptoit .i. dé,
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- Episodes espagnols -
ains it le serement, que l’oÿ le barné , que ainçois qu’ilz se rendissent a Henry le membré de l’un l’autre mangier ont leens actordé. Quant Henry et Bertrant on ce fait escouté, touz furent esbaïz de ceste cruaulté. « Par foy, se dist Bertrant, ilz sont bien enchanté que de manger l’un l’autre se sont ainsi vanté. » Or nous dit la matiere par droite verité tant tindrent la cité en grant cruaulté qu’il en moru leens de fain, de lascheté, tant Juïfz, Paiens, que de Crestïenté, tant grans que petis .xxxm . passé. 572
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Oncques le roy Henry qui tant fu seignory, ne Bertrant du Guesclin qui de cuer fu gentilz, ne de touz les seigneurs, nul n’y ot si petit qui sceussent viser tour ny en fait ne en dit comment ceulx de leens peüssent estre sourpris. Si furent ilz .ii. jours de la place partiz pour donner a entendre qu’ilz s’en fussent fouïz. Mais tout ce ny valoit vaillent .ii. espis, car ilz furent leens de guerre trop apris. Bertrant vint a Henry, le congié a requis, et lui dist : « Monseigneur, ou nom de Jhesucrist me donnéz le congié, je le vous ay requis. Aler m’en veil en France, droitement a Paris, car j’ay mandé au roy que la seray vertis, que d’Engloys est tout plain de France le païs. – A, Bertrant, dist Henry, se je suis a pié mis, que sans avoir Toulecte seréz cy departy. On vous tient a si sage et estez si soubtiz, et qu’il n’est forteresse que vous n’eüsséz pris. – Sire, se dist Bertrant, je suis tout esbaïz : si non mie gens laiens, mais antecris. Nonpourquant j’ay ennuyt un pou m’entente mis comment on auroit celle cité de pris.
[204r]
- Prise de Toulecte Véz cy l’arcevesque qui est proudons saintis : voise en la cité mais qu’il aie sauf conduit et presche tant les gens qu’il les aie converty. Et jure sur ses ordres, mecte la main au pis, que Pietres le felon est iné et octis, c’on les recevra et prandra a mercy. Et se croyre ne voulent l’arcevesque gentilz, on donra sauf conduit a .x. bourjois de pris qui iront a Sebile, ou il a murs assis, pour enquerir de Pietres s’il est mort ou vif. Plus croient ceste gent en Pietre, si m’est vis qu’ilz ne font en Jhesu, le roy de paradis. »
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[204v]
Ne sçay que vous iroie longuement devisant. Tout ainsi que Bertrant leur ala devisant fu fait et achevé par sauf conduit donnant. Et ala l’arcevesque en la cité puissant. Et tant leur prescha et ala sermonant que au riche roy Henry s’alerent rendant, sauf le corps et l’avoir et ce qu’ilz ont vaillant. Henry si actorda, en la cité va entrant. A mercy les receu et leur a dit en oiant que de ce qu’ilz ont fait ne vauldront mains .i. gant et que oncques meilleurs gens n’alerent mais regnant. Et le bon cappitaine qui s’estoit tenu tant, cappitaine fu fait tout ainsi que devant. Or est dedens Toulecte Henry le combatant. Assez donna joiaux au noble Bertrant. Hennaps, couppez et nez de in or reluisant envoia au bon roy de France la devant, par .iiii. chevaliers que a Bertrant va livrant. Et lui a dit : « Bertrant, avez cuer vaillant. Par vous suis a honneur, ja ne l’iray celant, et par les bons Françoys qui vous vont compaignant. En France retournéz, je voys bien l’apparant. Mais puis que me laisséz, s’il plaist au roy amant,
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- Episodes espagnols -
le Besgues de Villaines m’ira si demourant, et son ilz ensement qui est preux et vaillant, Regnault le Limosin et dam Pietre Ferrant. Encores n’ay mie Espaigne a mon talent. Bien en y a le tiers ou n’ay encores noient. Se trop n’eüsse a faire en mon païs puissant, par foy je vous livrasse .xxm. combatant pour mener au bon roy de France le vaillant. Mais se puis achever ce ou je voys tendant, je mectray en mer mainte galie grant qui greveront le prince et touz ses confortant, et aideront François, j’en ay volunté grant. – Sire, se dist Bretrant, a Jhesu vous commant. Jhesu vous croysse honneur par son dignement. »* Assez le convoia Henry au cuer vaillant et puis s’en retourna en Toulecte la grant. Et Bertrant par deça revint en approchant. En sa duché renvint, c’on aloit appellant la duché de Molines, un païs souisant. Gens d’armes conqueroit et arrieres et avant. Vers le roy envoia en lui excusant decy qu’il ne s’en va si tost retournant, car pluseurs y ot en sa duché vaillant qui a Bertrant n’aloient en rens obeïssant. Et Bertrant va pourtant sur eulx conquestant. 574
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Ainsi Bertrant a la chiere hardie envoia envoia vers le roy de France la garnie pour l’excuser que si tost ne vient mie, car l’istoire dit et pour vray nous aie, que Charles le bon roy de France la garnie l’envoia par .v. foys querrir, je vous aie. Bertrant a son voloir venir ne pouoit mie, car ou païs avoit en mainte partie villes, chasteaux, cités et mainte tour antie qui garderoient le pas, ne doubtéz mie,
[205r]
- Prise de Sorie contre le roy Henry et contre sa partie. Un jour devant Bertrant, a la chiere hardie, lui vint .i. chevalier, ou moult ot courtoisie ; monseigneur de Berguectes ot nom, je vous aie. De par le roy aloit en icelle partie pour parler a Bertrant qui tellement detrie. Le ber le salua de Dieu, le ilz Marie, et Bertrant lui monstra honneur et courtoisie. « A, Sire de Berguectes. Dieu vous doint bonne vie. Quel besoign vous amene en ceste partie ? » Se dist le chevalier : « Sans besoign n’est ce mie, car se Jhesu n’en pense, le ilz saincte Marie, le roiaume de France sera tout agastie. Si vous requiert le roy confort et aÿe, que secours lui facéz o vostre gent hardie. Tout sire vous fera de sa connoistablie et vous saisira de l’espee fourbie, car l’oice ne puet meulx estre emploïe en chevalier qui soit en cest mortel vie. »
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[205v]
« Sire, se dist Bertrant, j’ay bien entencïon d’aler devers le roy dedens briesve saison, combien que le bon roy de France et de Laon me congia l’autrier hors de ma regïon, et me donna argent et or in a foyson ain que je menasse compaignies, dont il y ot foison. Assez nous banissoit de France le royon, puis qu’il nous envoioit hors de sa regïon. Il voussist bien adonc que touz penduz fusson. Or m’a Jhesu donné force et poccessïon de servir roy Henry, par telle condicïon qu’il m’a donné conté et duché de renon, ne de plus conquester ne me seroit besoign, se Henry fust a paix dedens sa region. J’ay prins a lui congié par bonne entencïon 16906
corr. d’après P : si vont requiert l.
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- Episodes français -
pour aler a Paris voir le roy Charlon. Mais aler me convient voir Alain de Beaumon et son frere Jehan, c’est nostre estractïon. Devant Sorie sont, le chastel de regnon. Leens a Espaignolz que je n’ayme .i. oignon, qui rendre ne nous voulent la tour ne le donjon. La les iray voir, s’il plaist au roy Jhesom : ilz me lairront la tour a leur maleïçon ou mourrir les feray en prochaine saison. Et puis assembleray gens d’armes a foison. Parmy Languedoc m’en iray a bandon voir le duc d’Anjou qui de nous a besoign. Puis iray a Paris et sans demouroison. Decy vous partiréz, a Dieu beneïçon, au bon roy me diréz que j’ay devocïon de faire son voloir et son entencïon. » Se dist le chevalier : « A Dieu beneïsson. » De Bertrant se party le chevalier de non. Et Bertrant chemina, si comme dit la chançon, tant qu’il vit de Sorie le noble donjon. Devant estoit Jehan et Alain de Beaumon a grant force de gent, en grant establisson. Bertrant fu receü en grant alictïon. Et quant ceulx du chastel oÿrent la façon que Bertrant fu logié par dessus le sablon sauf le corps et l’avoir ainsi les receu on. Bertrant vint ou chastel c’on rendy en son nom. La demoura .viii. jours en consolacïon, au .ixe . s’en part en noble establiçon, ainsi qu’il deu partir de celle mancïon. Il vint le mareschal d’Odrehan le proudon qui lui it un salut de par le roy Charlon. 576
16959
Bertrant dedens Sorie, ou il a noble tour, porta grant honneur au bon mareschal ce jour. 16946
corr. d’après P : t. qu’il de Sorie l., vit ajouté.
- Plainte du comte de Foys -
[206r]
A digner lui donna en portant grant honneur. Et furent touz d’acort de mouvoir sans sejour et de venir en France la majour. Bertrant a fait son ost assembler sans demour, tant qu’il ot cincq cens hommes arméz de bon estour. Tant ala ceste gent au gré du createur que en la conté de Foys, ou il a maint estour, vindrent a un midy, qu’il faisoit grant chaleur. Le bon conte ont trouvé tout droit a Ventadour qui menoit une guerre dont il fu en errour au conte d’Armigniac qui requeroit estour. Le bon conte de Foys, dont je vous foys clamour, quant de Bertrant oÿ, le noble pongneour, qu’en ses marches venoit et dedens son estour, encontre lui ala pour lui porter honneur. « Bertrant, se dist le conte, par le mien sauveur. Je vous doys bien cherir et faire ault honneur, car en ce monde n’a de vie corps meilleur. Mais de vostre bon frere Olivier le minour ma plains trop malement, a vous en foys clamour. Le conte d’Ermignac sert de nuyt et de jour, et m’aporte dommage et trés grant deshonneur. – Par ma foy, dist Bertrant, il a fait au droit tour, puis qu’il tient le conte a maistre et a seigneur. En gaignent son argent doit faire son honneur. Si autrement le faisoit, il seroit traïteur. »
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577 « Gentilz conte de Foy, dist Bertrant au corps chier, se mon frere gentilz, que je doys avoir chier, au conte d’Erminac s’est volu alïer, il le doit bien servir s’il reçoit son louher. Aussi feroie vous, par les sains de Larmier. Et fust contre mon frere, vous vouldroie garder, puis que de vous prandroie argent et or mier. – Bertrant, se dist le conte, par Dieu le droiturer. Je vous donray d’or in et d’argent un sommier si vous me vouléz cy de vostre foy fïancer
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- Episodes français -
et que a touz jours me veilléz contre touz garder. – Et je vous en diray, dist Bertrant le princer, a ce fait me veil bien de bon cuer octroier. Pour vous encontre touz je porteray l’acier, hors mis la leur de lis que je ne doys blecier, car ja ne me verréz armer ne hauberger contre les leurs de lis, ains les veil essaucer. Je n’aconte au sourplus la monte d’un denier. Au conte d’Ermignac vous feray apaiser. Et se paix ne s’en fait tout a son desirer, si feray je mon frere devers moy repairer. » Puis se parti de lui et pensa d’exploiter, jusques en Languedoc ne se volu detrier. La it Bertrant son nom a touz léz publier. La assembla Bertrant mains nobles soudoier, a mil et cincq cens hommes pouoit on son ost nombrer. La prinst en cheminant Bertrant le chevalier villes, chasteaux et tours ouvrees a mourtier. La conquesta Brandonne au traire et au lancier. La ville et le chastel conquist sans atargier. Et si conquist aussi .v. villes a clochier et Monpaon la ville qui moult it a priser. Si conquist Marcenail, un chastel ault et ier. La prinst le nom Bertrant si a mouteplier que de partout vient on a lui les clefz bailler. Et Bertrant les receu, ou nom du Droiturer, puis garnissoit les fors tout a son desirer et leurs it faire hommage, jurer et fïancer ou nom du noble roy pour s’onnour essaucer. Et tant ala Bertrant et avant et arrier que le bon duc d’Anjou trouva un anuyter, qui Bertrant honnoura et le volu festïer. « A, Bertrant, dist le duc, bien vous doit on priser. Vostre grace et vostre non ne puet nul espirer, puis .xve . avéz fait d’Engloys esmaier que faire ne poroie en un an tout entier. »
[206v]
- Bertrant en Pierregort -
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[207r]
Quant Bertrant entendy le bon duc qui parla, de l’onneur qu’il lui dit assez le gracïa et bien dit qu’il ne vault ne ja il ne vauldra c’on teigne tant de bien de lui comme la voix a, mais son pouoir a fait et touz jours le fera. Du noble duc d’Anjou Bertrant se decevra, avec milles et cinq cens hommes que o lui amena, o lui mareschal d’Odrehan qu’il ama, vindrent en Pierregort, la ou fort ville a. Le bon conte receu Bertrant, moult l’onnoura – et non pas le droit conte mais son frere fu la.* Noble fu le disner que chascun ordonna. Et aprés le disner chascun s’esbatre va, o Bertrant le frere au conte qui bien l’acompaigna, et le bon mareschal que Audrehan justissa. Bertrant vit une baniere ou grant forteresse a. Et parçoit la baniere qui ou clochier fu la, dedens ot .i. liepart d’or in qui lambïa. « He, Dieu, se dist Bertrant, qu’est ce que je voys la ? Avéz a voysins Englois si prés deça ? – Oÿ, se dist le sire, mal ait qui les gaigna. Il aura tost un an ne partirent dela. Je ne les puis avoir, on ne les aura ja, car il y a bon vivre et forte place y a, et gens bien defensables, bien l’ont monstré pieça. » Et quant Bertrant l’oÿ, moult fort le regreta. Et puis jura saint Yves dela ne partira si aura l’abbaÿe et dedens souppera, et l’abbé et les moynes en cloistre mectra.
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579 Bertrant jus de la tour avala roydement. Son heraut appella et lui dist : « Tost va t’en autour de ces villages ; partout communeement mes gens y trouveras ; dy leur entierement que l’abbaÿe m’en voys assaillir errament,
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- Episodes français -
car remectre y voldray l’abbé et le convent.* Engloys en mectray hors bien prochainement. » Adont it sa trompecte sonner bien haultement. Lors corurent aus armes ses hommes et sa gent. Les huys et les fenestres et eschielles bien C. pristrent en Pierregort par tout communement, et s’en vont a l’assault sans nul arrestement. Le bon frere du bon conte la fu present, qui ot non Calerant et ot moult le corps gent. Quant il vit de Bertrant tout l’ordonnement, aprés lui s’en ala a bel estorement et it la charrïer trois engins en present qu’il cuidoit moult bien faire drecier a son talent. Mais Bretant lui a dit : « Nous n’en vouloit neent. Ançois que drecéz fussent les engins nullement berons nous du vin de leens largement. » Aus bailles vint Bertrant pour faire parlement. Et au fort cappitaine parla moult longuement : « Cappitaine, dist il, or oiéz mon talent. Rendéz nous vostre fort sans nul delaiement. Si mectrons leens l’abbé et le couvent qui sont en Pierregort courroucié et dolent. Vous vivéz en pesché, en escommuniement. » Se dist le cappitaine : « Nous n’y acomptons neent. L’abbaÿe n’auréz ja en vostre vivant. Nous serons bien rassouz a nostre commandement. » 580
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« Cappitaine, dist Bertrant, rendéz nous l’abbaïe. » Se dist le cappitaine : « Encores ne l’avéz vous mie. A qui diroie je qu’elle auroit esté baillie ? – Bertrant du Guesclin me nomm’on sans celise. » Se dist le cappitaine : « Damedieu vous mauldie et qui vous a tramis dedens ceste partie. Plus avéz de renon que homme qui ait vie. Mais pour ce n’auréz pas la nostre manandise. Se vous nous assailléz, vous feréz grant folie.
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- Bertrant en Pierregort Assez y perdréz de vostre barronnie. Si n’y conquesteréz la monte d’une ortie. – Cappitaine, dist Bertrant, par les sains de Pavie. Se par force vous prens, vous perdréz la vie. » Adont it sa trompecte sonner a la bondie. Et ses bonnes gens vont commencer l’envaïe, de traire, de lancer, de gicter a une ie, de remplir les fossés de terres, de fouillie. Maintes eschielles furent contre le mont drecie. Chascun ot une targe ou fenestre chargie. Pour le trait, pour le giet l’un brait, l’autre crie. « Avant, se dist Bertrant, ma trés noble maisnie. J’abandonne quant qu’il a en celle abbaïe, chevaux, or et argent et maint drap de Nubie, couppes, hennaps, joiaux et le bon vin sur lye. Mais mectéz tout a mort celle soudoierie. Avant a ces ribaux, leur puissance est faillie. A Dieu le veu, les gars y lairront touz la vie. »
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Bertrant monte en l’eschiele une targe sur lui. En l’autre eschielle fu Olivier de Manny, et d’autre part Alain et son frere Henry, a Alain de Beaumont qui le cuer ot hardy, et Jehan de Beaumont, Fauton et Sanary. Le gentilz mareschal d’Audrehan s’i fery, aussi it Calerent qui crioit a hault cry : « Pierregort ! Sire Dieu ! Aidéz nous aujourduy a in que destruyre puissons ce mal voisin, qui nous ont desrobbé et le païs commun. » François montent amont, chascun crioit son cry. Engloys gictent sur eulx et feroient aussi rouges barreaux de fer et vive chau en my, et grans boys traversans et mains tonnelz emply. Oncques de tel assault homme parler n’oÿ. Mais toute leur defense nulle riens n’y vally, car Bertrant entra ens et ses hommes o luy.
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- Episodes français -
Et ceulx qui furent mors furent ensenchy. Lors Bertrant d’une hache le cappitaine fery, decy jusques aus dens tout lui parfondy. Quant les Englois l’ont veu, si se rendant a luy. L’abbaÿe a touz lieux des noz bien tost s’emply. Bertrant et les seigneurs en pristrent a mercy. Qui est mort, si est mort, l’on n’y acomptoie .i. espy. L’abbé et le couvent furent la estably. Sans noise et sans debat fu le chief departy. Celle nuyt y souppa Bertrant, dont je vous dy, et Calerent le frere du bon conte avec lui. Le gentilz mareschal d’Odrehan n’y failly, Olivier de Beaumont et touz ses bons amy. Et puis en Pierregort celle nuyt ont dormy. Trois jours tant seulement la se sont refreschy. Quant vint au ters jours, Bertrant dont je vous dy en envoia devant le mareschal gentilz pour dire au noble roy la nouvelle de luy et lui dist que briesment et tost l’auroit suÿ mais il lairra ses gens ens ou païs honny es fors qu’ilz ont conquis et qu’ilz ont bien garny et que son bon abbit changeroit par tel sy que des Engloys ne soit cogneü ne choisy. Ainsi le dist Bertrant et il le it aussi car quant dedens Paris entra, je vous afy, lui .vime . sans plus y entra assery, d’une cote de gris simplement se vesty. Avec son hardement estoit Bertrant soubty. Je croy que son parail puis .C. ans ne nasquy. 582
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Le gentilz mareschal ne s’i est delayé. De Bretrant se party et a pris le congié, vass’ent droit a Paris ou il a maint clocher. Tant par ses jornees it que dedens s’est lancié. Droit a Saint Pol trouva le gentilz roy prisé. De Bertrant lui a dit qui est la approchié,
- Bertrant à Paris [208v]
et de sa grant prouesce lui a moult retraitié, et par devers le roy l’a moult auctorisé et qu’il viendra briesment a cheval ou a pié. « Hé Dieu, se dist le roy, je l’ay bien desiré. Car, voir, Robin Canolle qui ne m’a adaignié avec ses Englois sont maintenant lougié dedens le Gastinois, ça venent tout rengié. A Saint Marcel seront ains .ii. jours passé. » De ce dist voir le roy, point ne l’avoit songié. Devant Paris s’en vindrent les Englois afaité, partout boutant les feuz, dont c’estoit grant pitié. A Paris out gens d’armes, a cheval et a pié qui d’issir sur les champs eurent grant volunté. Contes et ducs y ot, mains chevaliers prisé, qui grant volunté ont d’issir sur le plessé. Mais du bon roy Charlon n’en eurent pas congié. Dont le commun estoit presque tout enragié, et gens d’armes aussi n’en furent pas lïé : plus volunters yssissent qu’ilz n’eüssent mangié. Se combatu n’eüssent, si eüssent ilz pillié.
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583 Ainsi devant Paris se tint Robin Canole, qui les Englois semont de mal faire et escole. L’un octist un prestre, en son col l’estole, l’autre un moustier par sa foleur desole, le ters femme ou pucelle par force vïole, et le quart par gehine un proudomme afole. A mal faire pluseurs se mectoient en mole. Mais se Dieu sault Bertrant, que onc n’ama escole, il leur vaussist meulx estre touz en la vole.*
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584 Or sont devant Paris Engloys communeement, estoient touz d’accort de livrer le content et demandant bataille a la foy souisant. Mais le bon roy Charlon qui regna sagement,
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- Episodes français -
n’avoit mie conseil de faire issir sa gent. Dont mains François y ot qui en furent dolant, car en Paris avoit de gens d’armes grannment, contes, ducs, chevaliers, de noble estorement. Mais ilz n’osent issir, que le roy leur defend. Car Engloys furent fort, tant que a ce jour present vingt mille combatans estoient largement. Ainsi furent .v. jours en bel ordonnement actendant s’ilz auront bataille ne content. La y ot un Engloys qui moult ot hardement, qui louha a Jhesu, le pere omnipotent, que a la porte ou aus bailles de Paris proprement iroit ferir de glaive aventureusement. Adont se it armer moult honnourablement, puis monta ou cheval qui cousta grandement, et prinst la lance ou poign et l’escu au col pent. La visere abat du bacin a argent, puis brocha le cheval qui ne court mie lent. Envers Paris s’en va courant hardiement. Englois le reconmandent a Dieu omnipotent et prierent qu’il peust retourner sauvement. Car l’Engloys y moru, vous orréz bien comment. 585
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Seigneurs, icellui Englois, dont je foys mencïon, chevalier l’avoit fait Thomas, cellui de Grantson. Aussi tost que l’Englois, dont icy nous parlon, ot receü colee et de l’onneur le don, adont vouha le veu que devant dit avon. Vass’ent vers Saint Marcel, brochant de l’esperon. Un escuier avoit qui jura saint Symon que avec son maistre ira pour voir sa façon. Quant l’Englois approcha la porte et le porton, bien le virent Françoys, dont il y ot foyson. Monseigneur de Hangiet y estoit en son nom, armé de toutes armes a sa divisïon. Son escuier appelle et lui dist a hault son :
[209r]
- Bertrant à Paris -
[209v]
« Or tost, viens moy lacier mon bacinet royon. Si me baille l’escu et la lance au penon. Je voys droit cy venir d’un Englois la façon. Honte seroit pour nous se dessus ce sablon ne trouvoit qui joustast a lui un horïon. » Adont fu adoubé tout a sa division. La lance tint ou poign, si ot l’escu au lÿon. Vass’ent contre l’Engloys a pointe d’esperon. Et l’Engloys contre lui ne prise un bouton. A l’aprochier se sont feru de tel randon que chascun de son glaive it alors mains tronson. le sire de Hangiers s’i prouva comme proudon. La main mist a l’espee et tira de randon. Mais le cheval qu’il ot s’espaula, se dit on ; tant du fays de jouster que de l’estorcïon convint que le cheval cheüst ens ou sablon. Quant son cheval cheu, excuser le doit on. Quant l’Englois vit cheoir le chevalier de nom, adont prist de son glaive le plus maistre tronsson pour octire et tuer le chevalier baron, et le semmonoit fort de mectre a ranson. Et ja lui eüst fait ennuy et destruction, quant a lui son venuz .iiii. bon compaignon, des gardes de la porte dequoy nous vous parlon. L’Engloys ont assailli entour et environ. Tant lui donnent de cops qu’il ne sent se mal non. Par force l’abbatirent du destrier ou sablon. Et quant son escuier apparceu la façon, a son maistre cria : « Defendéz vous, baron. je vous querrir secours a Thomas de Grantson. » Adont prist a brocher, si monstra le talon.
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586 Or est le chevalier a la terre abatu. Des .iiii. chevaliers fu tellement feru qu’il fu mort et octis, de son temps n’y a plus. Son cheval s’en fuÿ par dessus ces paluz,
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- Episodes français -
qui estoit tout noir, moult fu grant et coursu. La vint un chevalier qui fu preux et menbru, de Royneval tenoit les ventes et les truz. Le bon cheval saisi, qu’il n’y atendi plus. Et l’escuier englois qui s’estoit trait dessus fu suï tellement que en la in fu mis jus. A Thomas de Grantson fu le fait despendus, et a Canole aussi qui moult estoit son dru. Moult en furent troubléz, dolans et irascuz. Pluseurs Engloys y ot, si on les eüst creüz, pour donner assault fussent devant Paris venuz. Pluseurs en y avoit qui faisoient refus, car a Paris y avoit .viii. contes et deux ducs, et grant foison de gens en armes esleüz. Sachéz que d’Orlaïns y fu le duc membruz, qui fu oncle du roy, a qui Dieu face salut. Et si fu de Sausorre le conte pourveü. et de Nerbonne aussi, ou il a riches murs, i fu le bon viconte et son frere Porrus. Le quenx de Dampmartin ne se tint mie sus. 587
17295 17297 17299 17301 17303 17305 17307 17309
Dedens Paris estoit le conte de Joigny, cellui de Turquainville, de Porcïon aussi, et Jehan de Vïenne, un chevalier gentilz, le conte de Saint Pol qui le cuer ot hardy, et de Brayne y estoit le conte seignory. Si estoit avec eulx Berendart de Jency, le sire de Fontaines, icellui de Sampy, Gaultier de Chatellon et de Houdain Henry, et Robert d’Estrumel, chevalier agenty. Dedens Paris y ot, a ce que dire oÿ, dix mille soudoiers, sans les bourjois gentilz. A ce jour fu issu de Paris, je vous dy, d’ommes .xl.M. arméz et fervesty, et la ville gardee contre tout ennemy. Mais au roy ne plaisoit, ains moult defendy.
[210r]
- Bertrant à Paris Nul ne voyse sur les champs ne main ne avespry pour bataille livrer, car le roy actendy que Bertrant du Guesclin fust venu devers lui. Et tant ala la chose, si comme j’entendy, que Englois furent .v. jours et presque demy logéz devant Paris, de mal faire aaty. Et tant qu’ilz se trouverent de vivres desgarny, car le païs estoit derobé et tout gappi.* Si eurent a conseil qu’il seront ressorty. A desloger dela se sont touz assenty. Car avant la famine qui soursprist ces gens cy, gens d’armes chastoient noz gens par tel cy que espandre ne s’osoient par le païs gentilz que touz ne fussent pris, atrappé et saisi.
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[210v]
Or s’en vont les Engloys, France vont eslongent. En cheminant s’en vont tout le païs gastant, ardant villes, chasteaux, maintes maison puissant, et dames et pucelles vont souvent eforçant. A dix lieues entour les va chascun fuyant, cellui qui chiet en leurs mains, il se tient meschant. A pouvreté ont mis mains bons riches marchant. Nous gens d’armes françois les vont fort chastient : Gaultier de Chastillon les va de prés suivant et Oudart de Concy, le noble combatant, et de Vïaux Jehan, a l’aduré talent, et cellui de Saussorre qui cuer ot d’amirant. Monseigneur de Hangéz ne si va oubliant. Le noble viconte de Nerbonne la grant, et le conte d’Auçoyre qui fu entreprenant, et le sire qui fu Raineval gouvernant, et mains bons chevaliers je n’en sçay nommer tant poursceurent Engloys qui se vont esloignant. Assez y ont conquis noz gens suisant, et mains nobles prisons alerent conquestant. Mains prisonners françois alerent rescouant,
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- Episodes français -
la proye et le bestial vont aus Englois tolant. Quant espandre se cuident ainsi c’on va fuiant, rassembler les convient ou morir ou champ. A peine, a meschief, en mesaise endurant alerent tant Engloys et tant vont exploitant, que Loyre la riviere alerent traversant, vers la cité du Mans la se vont ilz traiant. Or est temps c’on vous die du noble Bertrant, qui par son grant malice ala tant cheminant, lui .ve . sans plus, comme dit le romans. Il fu dit au bon roy qui tant fu avenant que encontre Bertrant alast tost envoient Bureau de la Riviere, son chambellain plaisant. 589
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Contre Bertrant s’en va Bureau de la Riviere. Aussi tost qu’il le vit, lui monstra bonne chiere et lui gicta au col ses deux brafz par derriere. Puis le prist par la main sans pensee lanïere : de lui bien honnourer savoit bien la maniere. Bertrant ala o lui sans trop longue priere. A Saint Pol sont venuz, le bon manoir de pierre, la trouverent le roy seent en sa chiere, qui lors aplanïoit une blanche levriere. Si tost qu’il vit Bretrant qui ot cuer d’ampierere,* en estant se leva de trés lie maniere. Bertrant prinst par la main et lui dist : « Par saint Pere. Vous soiéz bien venu en ma cité pleniere. Trop avéz demouré en Espaigne la iere. Garder vous conviendra de France la frontiere et visiter Engloys, que la passïon iere. qui par nostre roiaume vont portant leur baniere et ont bouté les feuz ou on vist la fumere, c’on les pouoit voir de Saincte Gennevieve. – Sire, se dist Bertrant, n’est ce pas la maniere ? La ou n’a point de chat, la sorit se tient iere. » 17365
t. le ch roy s., ch exponctué.
[211r]
- Bertrant à Paris -
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[211v]
Bertrant du Guesclin s’ala agenoiller, mais le roy par la main l’ala tantost lever. « Bertrant, si dist le roy, certes, je vous ay chier. Mains nobles messagers vous ay fait envoier. Or estez vous venu, si en doys Dieu gracïer. Mais de vostre venue ne donneroie .i. denier, si a tout mon voloir ne vouléz obliger et prendre aucun oice si le vous veil bailler. Ou monde n’a de vous plus eureux chevalier, ne plus hardi aus armes, a estour commaincer, ne qui veille son corps en riens mains esparigner. Et pour ce vous vouldray un oice bailler, telle que pour vostre corps en honneur essaucer : connestable seréz, se je sçay adrecier, par tout nostre roiaume garder et essaucer. – Sire, se dist Bertrant, ne me veilléz noier. N’est mie connestable, pour vostre droit desrainier, le sire de Frennes, pour vostre droit chalenger ? –Bertrant, se dist le roy qui tant fait a priser, le bon sire de Frennes qui est bon chevalier, et qui nous a servi sans point de varïer, est desores mais veil homs pour estour commaincer, pour les routes suïr et toute nuit veiller. Ja a rendu l’espee et y veult renoncier. Et m’a volu aussi de sa foy fïancer que s’il avoit tout le monde a debailler et il voussit avoir un bon confanonnier pour sa terre garder son païs essaucer, a nulluy fors a vous ne le vouldroit bailler. – Sire, dist Bertrant, je vous veil conseiller. Vous feréz assembler demain a l’esclairer ducs, contes, chevaliers et vostre conseil entier, et de Paris aussi mains bourjois droiturer. La vostre volunté leur veilléz desrainier et s’ilz sont d’actort de faire vostre plaider. De vostre vouloir faire suis prest de commaincer,
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- Episodes français -
mais on ne doit telle chose sans conseil appointer. » Adonc lui va le roy ses brafz au col lancier. Le soupper fu tout prest, si s’assirent au manger. Moult honnoura Bertrant nostre roy droiturer. Et it la nuyt pourtendre et bien appareiller une chambre ou Bertrant ira la nuyt logier de draps a leurs de lis ouvrees a or mier fu la chambre tendue qui fu painte a or mier. Ainsi comme pour le roy, o le courage entier, Bertrant dont je vous di, dont chascun doit prier, en celle chambre volu dormir et sommeiller, jusques a lendemain qui deüst esclairer, que le bon roy gentilz oÿ messe au moustier. Puis manda son conseil qui n’y volu targer : ducs, contes, chevaliers, bourjois et escuier. Des bourjois de Paris y ot demi miller. Le prevost de Paris ne si volu oublier, et des marchans aussi le prevost droiturer. Tant de monde y ala, ne le savoie nombrer. Adont parla le roy de France l’eritier, et dist maintes parolles dont il it a priser. 591
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« Seigneurs, se dsit le roy qui Charles fu nommé, a mon commandement estez cy assembléz. Voir est nostre roiaume a esté moult grevé et ores et autrefoiz trés fort suppedité a tort et sans raison des Engloys redoubtéz. J’ay eu moult a faire depuis que fu né, et de ceulx qui deüssent garder mon herité et qui juré m’avoient et foy et loiauté m’ont aujourduy failli et m’ont le dos tourné. Et je ne suis que un homme, vous le savéz assez. Il n’y a en moy force fors ce que m’en donnéz. Se dedens mon roiaume estoie seul alé 17431 17434
corr. d’après P : d. Paris n’est volu o. corr. d’après P : l. roy de France de France, de France supprimé
- Bertrant est nommé connétable [212r]
et eüsse tout l’avoir qui oncques fu fondé, tout ce ne vauldroit la monte de deux déz. De son païs n’est pas sire qui n’est amé. Et pour ce que je veil bien acomplir voz gré et faire le prouit de nostre roiaulté, veil que au gré de chascun soit fait et ordonné, par quoy noz ennemis puissant estre grevé, connoistable gentilz, dont nous serons gardé. Le bon sire de Frennes, connoistable nommé, qui du sang roial est et de hautain lieu né, devient fraille et viel, a nous s’est excusé et l’espee rendue voiant tout nostre barné. Et m’a juré sur Dieu qui maint en Trinité, qu’il ne scet ou monde nul si redoubté a qui fust meulx seant l’espee en verité que a Bertrant du Guesclin qui de nous est amé. Se ce vous semble bien, ainsi soit actordé. Dictes en vostre plaisir et vostre volunté. » La n’y ot chevalier, conte, prince ne per, escuiers ne bourjois qui ne soit escrié : « A Bertrant ! A Bertrant ! L’espee lui livréz ! Voir, s’il est connoistable, Englois seront grevéz. »
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592 Quant le roy Charle ot sa bonne gent oÿe, lors a dit haultement : « La noyse soit laissie. Combien que a vostre gré soit la chose bastie et que j’aye conseil demandé ceste ie pour faire tout le gré de ma gent seignorie, sans prejudice soit, oiéz que je vous dye. Car se puis faire connoistable a ma commandie du meudre chevalier de ma court eforcie, mais je vouloie bien, ne le celeray mie, le prouit du roiaume que j’ay en ma baillie. » A ce que le roy dit tout le monde si octroie. « Or ça. se dsit le roy. Bertrant, je vous en prie, l’oice recevéz de la connestablie.
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- Episodes français -
Par ceste espee cy, a la pointe aguisie, vous met en vostre main toute ma seignorie et toutes mes gens d’armes et ma maisnie, pour mener tout par tout a vostre commandie. Mectréz peine que France soit tantost resjoïe, qui par Englois a tant souvent esté blecie. – A, Sire, dist Bertrant, vous m’ofréz courtoisie. L’oice est bel et bon, ne le refuseray mie. Puis que Jhesucrist m’a cest honneur envoye, se je la refusoie, je feroie folie. Mais un don vous requiers, par vostre courtoisie, qui n’est mie trop grant, je vous acertiie, que ja la vostre honneur n’en sera amendrie. Se ce don refuséz, Dame Dieu me mauldie se ceste oice n’y est par moy renoncie. » Se dist le noble roy : « Bertrant, je vous en prie, dictes quel don vouléz, ne le refuseray mie, mais que ne demandéz ma couronne jolye et ma noble mouillier, que je tiens a m’amie. – Nenny, se dist Bretrant, par Dieu le fruit de vie. J’ay d’une femme assez et trop de la moitie. » 593
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« Sire, se dsit Bertrant, je vous en diray tant. De la connoistablie voys l’oice prenant par tel condicïon que diray maintenant, que s’on vous va de moy nulle riens rapportant ainsi que aucun traïtre va a la foy lobant, que de chose c’on dye homme n’iray creant ne pis ne m’en sera en jour de mon vivant jusques atant que cellui qui va murmurant en aura raconté par devant moy autant comme dit en aura ainsi que en denonçant. » Se dist le noble roy : « Je le voys accordant. – Sire, se dist Bertrant et je meulx ne demant. » Adont reçoit l’espee present chascun voiant 17496
se ce ref don refusez dame dieu vous mauldie, ref et vous exponctué, me suscrit.
[212v]
- Bertrant demande une aide inancière au roi -
[213r]
et baisa en la bouche le riche roy savant : ainsi fu connoistable Bertrant dont je vous chant. Gens d’armes vont a lui corps et cuer presentant, et Bertrant les ala doulcement recevant. Longuement n’ala mie Bertrant la reposant, ains jura Damedieu, le pere tout puissant, que les Englois ira bien briesment poursuivant et les combatra ains long terme passant. Au roy s’en est venu, argent va demandant. Le roy lui it livrer en in or reluisant la paie de mil hommes .vc . ensuivant pour .ii. mois seulement. Et quant le bers Bertrant voit si petit d’argent, a dit au roy errant : « Gentilz roy, dist Bertrant, par le mien essïant, véz ne ci pas d’argent pour faire un fait vaillant. De mil et .vc . hommes que vous n’aléz paient combatre n’en puet on vingt mille en poussant. Aléz rompre ces cofres ou il a argent tant. Eschars prince n’y a ja honneur conquerant. »
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594 « Sire, roy, dist Bertrant, je vous dy sans cuider : ja ne servira bien qui n’aura bon louher. – Bertrant, se dist le roy, vous en iréz chacier noz ennemis felons et de prés costïer sans combatre a plain champ et sans eulx defïer, tant que assemblé auréz maint noble soudoier. » Se dist Bertrant : « Je veu a Dieu le droiturier se je les puis trouver en voie ne en senter, en eulx me mectray comme loup en bergier, et fussent vingt contre un, je n’y compte un denier. Je vous commande a Dieu et au corps saint Richer. A Quen en Normandie la m’iray herberger. La feray ma semonce pour Engloys empirer, a touz ceulx qui viendront donray je bon louher. Briesment auray bel ost sur moy a justicer, trois mille ou .iiiim ., je l’octroy de legier.
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- Episodes français -
Or sera grant meschief si on ne les puet paier. C’est ce qui a apris gens d’arme a piller par malvaisement paier et convoier arrier. Si en vostre tresor n’avéz in argent et or mier, si empruntéz a voz gens. Vous n’avéz oicier qui ne inast d’or in, se croy, demy sextier. Si aussi bien je savoie jouer d’aucun mestier comme faisoit Basin et Maugis le guerrier, ces chapperons forréz iroie renverser, je sauroie assez tost qu’il a en leur grenier. A telles gens deusséz emprunter sans targer, car les aucuns le gaignent a tort et de legier. » 595
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Bertrant du Guesclin mie ne s’arresta. Moult noble compaignie avec lui mena. A Quen en Normandie sa semonce nonça. Gens d’armes s’en vont a tous léz ou il ala, pour le renon de lui chascun le desira : tel ne l’avoit onc veu qui grant bien en compta. Et tant ala Bertrant et si bien exploita qu’il est venu a Quen, ou on le festïa. Gens d’armes a touz lieux alerent par dela. Pour mil et .vc . hommes l’argent du roy pris a, mais plus de .iiim . avec lui en trouva. Et Bertrant les reçoit, homme n’en refusa. Quant argent lui failli, oiéz dont s’avisa. A sa femme espousee priveement manda qu’elle l’aille voir plus tost qu’elle pourra, le plus honnestement que faire le pourra, et toute sa vaisselle face amener la pour ce que court pleniere, se dit, tenir vouldra. La dame ne sceu mie a quoy Bertrant pensa : il pensoit a prester au roy tout quant qu’il a. Et la dame pensoit que Bertrant qui l’ama la desirast avoir pour bailler de cela. 17558
corr. d’après P : si aucun bien j.
[213v]
- Bertrant fait fondre sa vaisselle -
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[214r]
Or fu Bertrant a Quen qui sa femme ot mandé, qui tant fu gracïeuse, sage et bien emparlee. Moult estoit en scïence parfondement fondee et de hault lieu estoit aussi estraicte et nee, et fu de Raguemaux, de Bertaigne la lee. Au noble Bertrant c’est noblement presentee. Et quant Bertrant la vit, estroit l’a acolee. En sale sont alé qui de biens fu peuplee. La donna a digner Bertrant celle jornee aus barons chevaliers dont fu l’assemblee. La vaisselle Bertrant fu sur table monstree : la fu mainte noblesse en sale regardee. La out mains chevaliers de grande de renommee. Le gentilz mareschal d’Odrehan l’a miree, et messire Jehan de Vïenne la lee, qui puis fu amiral de la mer salee. Olivier de Cliçon estoit en l’assemblee, qui puis fu connoistable de France la peuplee aprés la mort Bertrant qui tant ot renommee. Avec ceste gent cy, dont j’ay fait devisee, fu Alain de Beaumont qui moult ama meslee, et son frere Jehan, ou honneur fu plantee. Olivier du Guesclin y fu a la jornee, qui fu frere Bertrant a la brace quarree, et le conte du Perche qui la chiere ot membree, et cellui d’Alençon et Pietre de l’Estree, et mains autres barons dont ne foys devisee. Noble fu le digner a icelle jornee. Bertrant tint court pleniere par telle destinee que chascun qui fu la disoit en sa pensee c’onques a court de roy tant eüst renommee, ne virent faire un jour chose meulx ordonnee, ne tant d’estranges mois servir a la volee. La vaisselle Bertrant fu la moult regardee, car moult estoit grant et richement ouvree. Olivier de Cliçon parla sans demouree :
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- Episodes français -
« Sire, Bertrant, dist il, ne me faictes cellee de ceste gent qui est par deça arirvee. Quatre milles souldoiers et plus a ma pensee, vous sont venu servir en ceste contree pour aler sur Englois a baniere levee, et le roy qui de France tient la terre honnouree, que pour mille et .vc . n’a monnoie comptee ; et se sont refusé, je doubt en ma pensee que avec les Engloys ne facent retournee, ou une grant compaignie en sera eslevee. – Sire, se dist Bertrant, par la virge honnouree. Touz seront retenuz a gage et a soudee, et fussent telz deux tant, pour commaincer meslee, j’aray assez argent et monnoie doree. Ne veéz la vaisselle dont la salle est peuplee ? Par ma foy, je ne l’ay plevie ne espousee. Bien m’en puis departir tout a ma desiree. Au roy les presteray jusques une jornee, qu’Englois paieront tout ains l’annee passee. » 597
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Noble fu le digner, nul homs ne vit grigneur. Moult fu sage Bertrant et moult savoit d’onneur. La fu moult honnouree sa moullier de valeur. Et Bertrant, quant se vint droitement au ters jour, toute sa vaisselle, sans penser a foleur, engaga et vendu et livra par tel tour que touz les chevaliers et soudoiers d’onneur retint et soudoia et paia sans erreur trois milles combatans, dont il fu conduiteur. Assez en y avoit qui eurent poy atour. Bertrant les pourveÿ d’armes et de coureur. Vitaille it charger, pourveance de valeur. Et it signifïer environ et entour que chascun s’en voise aprés lui et sans demour droit au chasteau de Ville, ou il a belle tour. La vouldra ordonner ses os par tel atour
[214v]
- Bertrant fait fondre sa vaisselle que des Englois, se dit, approchera la lour qui entour Pont Valain prenoient leur sejour. Or approche aus Englois un perte grignour, ainsi con vous orréz recorder sans demour.
519 17657 17659
598 Bertrant du Guesclin, quant eu paié sa gent tant de sa grant vaisselle comme de son argent dont il avoit d’Espaigne apporté largement, d’eulx trés bien apprester leur it commandement comme pour eulx defendre, se besoign leur en prent. Et bien a dit Bretrant que assez prochainement leur fera deservir les soudees c’on prent. Point ne s’est arresté Bertrant au ier talent. De son ost apprester a fait commandement. Lors veïsséz haubers apprester vistement, bassinetz refourbir, resclarcier ensement, et espees fourbir, dont l’acier resplent, et enhanter ces fers de glaives gentilment, et ces chevaux ferrer et cloer fermement. Chascun en son endroit se pourvoioit sceurement. Et dist l’un a l’autre, a la foy et souvent : « Vive ce Bertrant ! Vive qui regne tellement, qui ne nous laira mie cy vacquer longuement. Et n’atendra mie que Englois nullement lui viegnent querir sa, n’assieger nullement, ainçois ira sur eulx bien et hardiement. A tel homme doit on donner or et argent, et bailler soudoiers a son commandement, et l’espee bailler qui a connoistable appent. – C’est voir, se dist l’autre, par les sains d’Orïent. Nous serons touz riches assez prochainement. » Or diray de Bertrant a l’aduré talent. Quant lui et les seigneurs furent prest bonnement, le congié demanda a sa femme au corps gent : 17661 17668
G. quant oy eu paié s., oy exponctué. n. s’est app arresté B., app exponctué.
17661 17663 17665 17667 17669 17671 17673 17675 17677 17679 17681 17683 17685 17687 17689
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- Episodes français -
« Dame, se dist Bertrant a l’aduré talent, vous demourréz droit cy asseüreement. Et si vous améz meulx a Roche Dorïant, vous y pouéz moult bien aler a vostre talent, car le duc d’Orlaïns m’en it jadis present. Veilléz prier pour moy a Dieu du fermement que a joye me ramayne en cestui chassement. Mais ne retourneray en cetui tenement si en auray eu estour, bataille et content contre le connestable d’Engleterre vraiment, ou le sien leutenant qui moult a hardement. C’est Thomas de Grantson, se le nomme la gent, Hue de Caurelay, Cressolle ensement, et Canolle, que orgueil demaine tellement qu’il ne prise François .ii. denier seulement. – Sire, si dist la dame, je prie au Sapient de mort et de prison vous gart entierement. Et si vous pri que en vous aiéz remenbrement des jours qui perilleux povent estre souvent devant Nadres faillistres a mon commandement. Se creü eüsséz tout mon enseignement, ja perdu n’eusséz en estour ny en content. – Dame, se dist Bertrant, je sçay certainement. Qui sa femme ne croist a la foy s’en reppent. » 599
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De Quen en Normandie se departy Bertrant, au noble cappitaine en va congié prenant. La oÿst on sonner maint cor et olifant, de moult hault instrument jouer en deduisant. La peüst on voir maint destrier auferrant, et lances et escuz, mains bacinés luisant. De la clarté des armes vont les champs reluisant. Au bon chastel de Ville est arrivé Bertrant. Un jour et une nuyt s’i ala repposant. Atant y est venu un heraut en present qui estoit a Thomas de Grantson l’avenant.
[215r]
- Halte de l’armée française au château de Ville Devant le ber Bertrant s’ala agenoillant, de Dieu le salua, le pere roy amant. « Or sus, se dist Bertrant, dictes vostre convenant. Vous estez a Thomas de Grantson, je m’en vent, car ses armes portéz ou tunique apparant. – Sire, vous dictes voir. dit le heraut puissant. A vous m’a envoié, ja ne l’iray celant. Or diray s’il vous plaist ce qu’il vous va mandant. »
521 17725 17727 17729 17731
600
[215v]
« Sire, dist le hayraut a la chiere hardie, vous estez connoistable de France la garnie : de tant est vostre honneur crevé et essaucie, et vous le valéz bien, par Dieu le fruit de vie, car meilleur n’a de vous decy jusqu’en Surie, ne plus adventurant contre adeverse partie. Tousjours avéz esté en prouesce fournie, c’est vostre nom espandu en terre baptisie. Or est droit et raison, mais qu’il ne vous enuye, que a vostre avenement soit bataille plevie encontre mes seigneurs qui tant ont seignorie. Thomas cellui de Grantson de bataille vous prie, Hue de Caurelay mie ne s’i oublie. Et Cresoule aussi, a la chiere hardie, et David Holegrene qui volunters tornie, et Giefroy Hourselay et la grant baronie vous requierent un jour, qu’il soit mis sans detry, que bataille leur soit donnee et ottroie et la place juree, nommee et fïancie. Et s’il n’est ainsi fait, je vous jure et aie assaillir vous viendront en ceste partie, ou de jour ou de nuyt, par telle maistrie que blasme en auréz et grande villonnie. Tenéz, véz cy la lectre qui vous est envoie. » Bertrant a pris la lectre, tantost l’a desploye, a lire la bailla a son secretaire Helie. 17730
corr. d’après P : ajout du verbe dit entre voir et le heraut
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- Episodes français -
Et celluy l’a leu en hault voiant la baronnie. En la lectre ont trouvé la devise jolye telle comme l’ayraut l’avoit devisie. Quant Bertrant l’a oÿ, Dame Dieu en mercie. Lors jura Damedieu en la soie partie que voir ira Englois et la soie maisnie. Or oiéz de Bertrant qu’il it, je vous en prie. 601
17767 17769 17771 17773 17775 17777 17779 17781 17783 17785 17787 17789 17791
Bertrant en appella le heraut messagier : « Heraut, se dist Bertrant, entendéz mon cuider. Ou pourroit on trouver ne en quel heritier les princes qui me font cecy signifïer ? Et le heraut respont : « Par les sains de Bavier. Bien prés de Pont Valain, la sont venu logier pour bataille et faire a vous grant encombrer, et sont enmy le champ, ou bel fait estiquier. Mais pas ny sont touz les Engloys droiturer. Yvon de Caurelay qui tant fait a priser, et Cresonele aussi, le noble chevalier, s’en vont pour les chasteaux pour Englois dessegier et amener en l’ost pour eulx venir aider. Bien trouveréz a qui bataille commancer. A vostre commaincement ne devéz detrier, qu’aus Englois ne devéz livrer de vostre mestier et bataille livrer, on vous en veult prier, que pour le meilleur homme et certain chevalier qui se mesle aujourduy d’un cheval chevaucher le plus adventureux qui sache guerroier. De combatre vous voulent commencement prier. De vous voir ou champ ont plus grant desirer c’onques n’ot vallet de femme baiser. – Amis, se dist Bertrant, par Dieu le droiturer, ilz me verront briesment, se Dieu me veult aider, plus tost, s’il plaist a Dieu, qu’il ne leur ist mestier. »
[216r]
- Halte de l’armée française au château de Ville -
523
602
[216v]
A son trezorier it Bertrant commandement c’on donne au messagier .xiiii. mars d’argent et c’on lui donne du vin assez et largement, et se la nuit vouloit prendre harbergement, c’on lui drece bon lit et lairant souëfment. Et il fu ainsi fait a son commandement. Bertrant a pris congié du heraut errament et lui dist : « Messager, or oiéz mon talent. Se reposer vouléz en nuyt avec noz gent, vous auréz de telz biens, qu’il y a largement. Quant aler en vouldréz, il me plaist bonnement. A vostre maistre diréz qu’asséz prochainement nouvelle auront de moy par aucun convenent, et que s’ilz ont desir volunté ou talent de nous voir en champ main a main en content, encores ay je plus grant desir certainement d’eulx voir et trouver, car, par mon serement, au bel que pourray leur monstreray briesment. – Sire, dist le heraut, vous parléz loiaument. » Adont fu l’ayraut compaigné gentement de gentilz menestrers , de heraux ensement. Tant lui ont presenté de vin et de piment qu’il fu tout enyvré, car le vin le sourprent, et lui convint dormir jusques l’ajornement. Or pouent les Englois atendre largement. Or oiéz de Bertrant, o l’aduré talent. Signifïer a fait a toute ses gens chascun monte a cheval tost et isnellement, qui amer le vouldra si le sieve briesment, car aus Englois, se dit, ira isnellement pour bataille livrer tost et incontinent, et responce donner pour leur heraut Clement* qui le mal saint Martin tenoit moult ierement.
17793 17795 17797 17799 17801 17803 17805 17807 17809 17811 17813 17815 17817 17819 17821 17823
603 Bertrant it assavoir aus barons seignoris
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- Episodes français -
et aus bons chevaliers et escuiers de pris, et aus valletz servans et soudoiers aussi, que touz soient briesment en armes fervestiz. Et voisent aprés lui touz grans et petis, car mais n’arrestera ne de jour ne de nuyt, si sara ou Englois sont arresté et mis. Par devant Pont Valain, au dessus d’un larris, dessus un sablement, au dehors des courtilz, aus Englois livrera bataille et estris tout aussi tost, se dit, qu’il les aura choisi. « Sire, dient François et qu’est ce que tu dis ? Ja est mynuyt et le temps obscurciz, et vente d’un froid vent qui a haucer s’est pris, et pleut malement en aroissement tousdiz. Ne fu si divers temps passé a des mois dix : n’est homme qui durast, ne cheval, ne roncin. Adviséz vous, Bertrant, chevalier et amy. Atendons a demain que jour soit esclaircis et que ce temps sera cessé et esclarciz. » Et quant Bertrant oÿ de noz François le dy, si leur a dit en hault, de chascun fu oÿ : « Au primes fait il bon dessus noz ennemis, car ilz seront briesment atrappéz et sourpris. A Dé le veu. Jamais ne sera desvesti ne je ne mangeray de pain, ne blanc ne bis, ne ne descendray de mon destrier de pris se mal gré moy n’en suis a la terre latis, si auray trouvé Englois et commaincé estris. Viegne o moy qui vouldra, sans faire nul estry, car ceulx qui ne viendront, par le corps Jhesucrist, de traÿson seront resputé et repris, acusé en seront au roy de Saint Denis. – Hé, Dieu, dient Françoys, véz cy un antecris. » 604
17859
Ainsi disoit Bertrant qui fort va chevauchant. Avec lui n’avoit qui .iic . combatant,
[217r]
- L’armée française chevauche de nuit encores amassent meulx a aler reposent, car il pluoit adont une pluye pesant et ventoit un froit vent qui fu froit et cuisant. Et faisoit si noir, se nous dit le rommant, c’on ne pouoit voir .v. piéz a son devant. Tel cuide aler la voie et le chemin plus grant qui va hors du chemin par le champs traversant et qu’il treuve un foussé ou il va tresbuchant : ains gens d’armes n’alerent telle nuit endurant. Le gentilz mareschal, cellui c’on dit d’Odrehan, quant il vit que Bretrant s’en aloit tout devant, lors jura Damedieu qui volu former Adam, que aprés Bretrant ira o sa gent souisant. Et bien dit c’oncques mais ne regna tel Bertrant et que Dieu l’ordonna pour son digne commant pour remectre la leur de lis en son estant.
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605 Le gentilz mareschal ne si volu arrester. Sa route va partir et les veult emmener, a .viic . combatans les pourroit on nombrer. N’y a cellui qui n’ait haubert qui reluist cler et bacinet ou chief et lance pour jouster. Moult eurent grant desir de bataille livrer, mais la force du temps si les fait desmonter. Aprés le mareschal, dont vous m’oéz compter, volu Jehan de Vienne aprés Bertrant aler. Olivier de Cliçon ne volu pas demourer, et le conte qui doit le Perche gouverner, et le noble viconte de Rohen sans fausser, cellui de Rochefort qui moult fait a doubter, et de la Humandie le sire au corps cler, Tournemine qui fu proudons aus cops donner, et le sire de Rays qui bien fait a amer, et autres mains barons, chevaliers, contes et per, se mistrent au chemin pour Bertrant conforter. Et dient l’un a l’autre : « Alons aventurer
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- Episodes français -
avec le meilleur homme dont nul saroit parler, le plus preu de son corps que nul pourroit trouver, et eureux de ce dont se veult entremesler, car qui n’est eureux en fait ou en parler jamais jour a nul geu ne devroit jouer. » 606
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Touz s’en vont o Bertrant, conte, prince et baron. Mais ne vont point ensemble, si comme dit la chanson : par routes, par treppeaux chevauchant le sablon. Ainsi toute nuyt s’en vint a bandon, l’un ça et l’autre la, par telle oppinïon qu’ilz se vont esgarant parmy la regïon, puis se vont rencontrant de buisson en buisson. Tant eurent de meschief leurs chevaux, se scet on, que dessolé en sont .iic . ou environ. Tout especialment eurent du mal foison ceulx qui avec Bertrant chevauchent a bandon, car Bertrant chevauchoit par telle condicïon que un destrier recreu et un bon arragon. Assez en fu blamé de ses hommes de nom : « A, Sire, font ilz, touz noz chevaux perdon. Jamais au nostre besoign ne nous en aideron. Et aussi de noz gens assez perdu avon, qui se sont esgaré par l’orage felon et qui venir ne pouent le cours ne le troton. – Seigneurs, se dist Bertrant, nous vous respondron. Il sera ja toust jour, bien entour nous verron. Se les Englois trouvons, dedens nous bouteron. Touz seront desconiz, nous les sourprendron. Se nul cheval n’avons, demain en conqueron. Assez arons demain cheval et mains gascon, ou jamais a nul jour plus mestier n’en aron. » 607
17927
Or chevauche Bertrant qui le corps ot certain, a cincq cens combatans qui moult lui sont prochain :
[217v]
- L’armée française chevauche de nuit Bertons et Poitevins et Manceaux pour certain, et mains Normans y ot qui ne sont pas vilain. Avec Bertrant estoit de Beaumont sire Alain, et Jehan de Beaumont qui fu bon de la main, Olivier de Manny qui point n’avoit cuer vain, et Alain de Manny, son bon frere germain. Touz sont aléz ensemble et par val et par plain qu’ilz se sont touz trouvéz bien prés de Pont Valain. Le temps se racoisa, souleil luisoit a plain. Adont ont gracïé Jhesu le souverain. Mais tant furent baigner et mouillé pour certain qu’il sembloit proprement c’on les chassast du bain.
527 17929 17931 17933 17935 17937 17939
608
[218r]
Or fu le bers Bertrant, a la chiere hardie, bien prés de Pont Valain, en une praerie. Le temps se reschaufa et se laissa la pluye, et le souleil leva qui luist et reslambie. Petit la s’arresta Bertrant et sa maisnie. Et regarda sa gent qui moult est maïgnie : ne furent que .iic ., encores n’y sont ilz mie. Pluseurs le vont suyvant au long de la chaussie. Bertrant arraisonna sa noble compaignie, et de descendre a pié moult doulcement les prie. Et de bien ressengler les cheveaux il leur prie, chascun a son endroit ait l’armeure saisie, si quant descendrent, prest soient touz sans faillie de ferir sur Englois en menant chiere lie ; ainsi seront sourprrins que du faucon la pie. « Seigneurs, se dist Bertrant. Ne vous esmaiéz mie se nous sommes poy gens, je n’y compte .ie . aillie, car nous arons secours de Dieu le fruit de vie et de noz gens qui venent au long de la chaussie. Je sçay bien que Cliçon, voir, ne nous fauldra mie, ne le viconte aussi de Rohen la garnie, cellui de Rochefort, a la chiere hardie, de Vïenne Jehan et le sire de Trie.
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- Episodes français -
Et aiéz bon cuer en vous, pour Dieu le fruit de vie, car homme qui s’esbaÿst, il est mort a moitie. » 609
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Bertrant du Guesclin it rafreschir sa gent, car trop furent gasté et mouillé ensement, et leur chevaux foulléz et lasséz grandement. Et nonpourtant se sont ordonnéz gentement et ont leurs draps escouz en tortant fermement. Bien se sont conrayé et armé puissamment, touz prests pour assembler, se le besoign en prent. Si avoient pain et vin apporté en present. Et en mangent leur pain, les aucuns bonnement l’ont seigné et beny a leur commaincement et l’on prins et usé pour acommuniement. L’un l’autre a confessé bien et devotement, dit maintes oroisons en priant Deu souvent qui les veille garder de mal et de torment. Puis montent es chevaux abandonneement. Et vont tant cheminant qu’ilz virent clerement Englois qui sur les champs font arresteement. En une roche sont entré .vii. ou .viii. cent, les autres es villages prenoient logement, atendant le heraut qui dormy longuement. Et point ne se doubtoient que Bertrant au corps gent se deüst si haster de mouvoir le content. 610
17989 17991 17993 17995
Thomas qui de Grantson tenoit la seignorie atent son messagier qui ja ne viendra mie ; n’eüst jamais pensé a nul jour de sa vie que Bertrant fust venu a si pou de maisnie, ne qu’il eüst erré ne enduré la nuytie, c’oncques telle ne fu veue ne choysie. Et Bertrant s’en venoit a baniere baissie bellement, qu’il n’y ot baniere desploye, ne trompecte sonnee, on n’y bret ne n’y crie.
[218v]
- Embuscade de Pont Vallain Dessus leurs bacinés, par soutille maistrie, eurent mis de leurs draps qui ne reluisent mie, ain que Englois pensassent que ce fust de leur maisnie. Quant prés furent des Englois si que a demie archie, a pié sont descendu enmy la praerie et puis se sont rengié tout a leur commandie. Et si ont descouvert mains armeures jolie, et mains penons levéz, maintes enseignes drecie. Et approchent Englois en disant : « Dieu aÿe ! Mont Joye ! Nostre dame ! Au roy de Saint Denyse ! A Guesclin le meilleur ! Englois perdront la vie !» Lors ierent sur Englois par telle felonnie que chascun abati le sien sur la praerie. Engloys sont esbaïz, l’un bret, l’autre crie. Qui les vist courir parmy l’ost seignorie et fouÿr ça et la en menant laide vie. Et crioient en hault : « Voir, nostre ost est trahye. » A Thomas de Grantson fu la chose noncie, que Bertrant est venu qui les Englois chastie. Et quant Thomas le sceu, si ot chiere courroucie. « Hé, Dieu, se dist Thomas, or sçay je sans follie que mon heraut, a qui j’ay ma lectre baillie, m’a amené Bertrant par traïson bastie. Il n’est mie preudons qui en traïtour se ie. »
529 17997 17999 18001 18003 18005 18007 18009 18011 18013 18015 18017 18019
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[219r]
Thomas cellui de Grantson ne s’i va delaiant. Maintenant it sonner sa trompecte en oient et les Englois se vont entour lui assemblant : entre .vii. et .viiic . les ala on nombrant. A l’estendart Thomas s’en aloient courant pour eulx a ordonner, si comme est aferant. Et Bertrant et ses gens se boutent si avant que loges et tréz vont a terre versant. Quant qu’ilz ont encontre vont a terre gectant. A ce commaincement se vont si exploictant qu’il en ont bien .iiic . octis sur le champ.
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18033 18035 18037 18039 18041 18043 18045 18047 18049 18051 18053 18055
- Episodes français -
« Or avant, mes enfans, dist Bertrant le savant. Engloys sont desconiz, plourer s’en vont fuiant. Je vous requiers un don ou nom du Roy amant : c’est que vous me livréz l’estendart avenant de Thomas de Grantson, que je voys la devant. Ja la baniere avons abatue en ce champ. Toust verréz desconfyz tout le demourant. » Adont s’en vont François bellement approchant, rengéz et ordonnéz, en « Guesclin ! » hault criant. Et Engloys vont encontre, bataille desirant. Bien s’i porta Thomas de Grantson le vaillant, et David Holegrene ne si va point feignant, et Giefroy d’Orselay, a l’aduré semblant. Et les Engloys touz se vont si bien aidant que a noz François feïssent un encombrier grant, quant d’Odrehan y vint le mareschal puissant, et Jehan de Vïenne qui puis fut amirant, Olivier de Cliçon le noble combatant. Bien sont .viic . ou plus, « Monjoie ! » vont criant, et dessus les Englois se vont abandonnant. Y la fu Hourselay, l’espee va rendant. La furent desconiz Engloys, petis et grant, car François abatirent la baniere luisant. Quant Thomas de Grantson perceu le convenant, adont voussist bien estre a Huy ou a Dinant. 612
18057 18059 18061 18063 18065
Quant Thomas de Grantson vit Englois desconiz, adont moult voluntiers se fust a garant mis. Mais il fu de Bretrant ierement assailli et lui dist : « Rendéz vous, ou vous seréz octis. » Lors se rendy Thomas, voluntiers ou envis. Et aussi se rendy Holegrene David, Thomelin Solizet y fu cellui jour pris. Et ainsi comme Englois furent touz desconiz vint le noble conte de Rohen le gentilz, et cellui de Rochefort, la ou les murs sont bis,
- Assaut de Vaulx -
[219v]
ceulx de la Humandie et mains autres marchis. L’estour virent iner, si en furent marris. La n’y ot nul François, tant fust de petit pris, qui n’eüst prisonnier ou conquest a devis. Mais pluseurs des Englois s’en eschapperent vifs et s’en vont droit a Vaulx, une ville de pris ; englesche fu la ville qui fu forte a devis. Or oiéz de Bertrant qui tant fu seignoris. En son ost it crier par un heraut joly que chascun aprés lui se soit a chemin mis. La s’en ira soupper dedens les murs massis, et y gira, se dit, fait y estoit son lit. Englois n’y demoura touz ne soient octis. « A, Dieu, dient François, Bertrant est tout ravys. Ne se scet reposer ne de jour ne de nuyt. Couronne portera, se longuement est vifz : ou nombre des neuf preux devroit estre mis. »
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613 Ainsi comme je vous dy, la bataille inoit. Mains Englois y moru et mains en eschappoit. Poy y moru des noz qui le voir en diroit. Vers la ville de Vaux mains Englois y conroit. La furent receüz aucun qui la venoit. Et qui n’y pot entrer, d’autre part s’en aloit. Envers Bressiere vont, ou bonne ville avoit. Et devers Moncantour mains Englois cheminoit, et par devers Saint Mor, ou Cresonelle estoit, a Reli, a Norons, ou moult Englois avoit, en un gentilz païs que Gastine on nommoit. Ainsi fuyent Englois qui puet il se sauvoit. Et Bertrant du Guesclin tellement exploictoit qu’il vint par devant Vaulx, aus bailles arrestoit. Le cappitaine y fu qui Bertrant demandoit pour quoy venoit cy prés et quelle chose il querroit. Et Bretrant le gentilz son vouloir lui disoit, et tout son estat Bertrant lui racontoit,
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18103 18105 18107 18109
- Episodes français -
de par le roy de France la ville requeroit. Et cellui respondy que ja n’y enterroit. Et Bertrant lui jura que assaillir la feroit, se par force la prent, encroer le verroit. Et cellui respondi que point ne le doubtoit. Lors it Bertrant crier « A l’assault, fort et roit ! » , et jura Damedieu et le corps saint Benois que ou maistre donjon celle nuyt soupperoit. 614
18111 18113 18115 18117 18119 18121 18123 18125 18127 18129 18131 18133 18135
Bertrant du Guesclin ne s’i est arresté. Vaulx a fait assaillir par ses gens aduréz. Moult fu grant l’assault de Bertrant, se creéz, car par noz bons François sont Englois appresséz. Et les Englois se sont a defendre penéz et ont sur noz Françoys mains marrïen gectéz, et mains tonneaux emplis et ierement boutéz. La ot un escuier qui en Bertaigne fu né, qui ja estoit monté sur le mur bien ouvré, aus Englois se combat comme lÿon creté. Aprés lui est monté un escuier senné. Et Jehan de Beaumont y est emprés rampé. Main a main se combatent aus Englois desraé. En une tour petite s’en sont ces .iii. alé. Lors veïsséz François monter a touz coustéz. Et quant le cappitaine vit qu’il est atrappé, a une porte vint dont il avoit les cléfz. Bien s’en cuida fouÿr, mais il fu atrappé. Par telle porte sont noz gens leens entré. Englois furent tous mors qui leens sont trouvé, petit ne demoura qu’ilz n’y fussent tuéz. Ainsi fu prise Vaulx, comment oÿ avéz. La se sont rafreschy noz François honnouréz. Ville et abaÿe y ot, c’est vérité. Assez y ont trouvé bons vivres a plenté, des bons vins de Poictou y trouverent assez, 18135
corr. d’après P : d. bons de P., vins ajouté
[220r]
- Prise de Saint Mor et or in et joiaux, richesses a plenté. La se sont rafreschy et trés bien conraé. Puis envoia Bertrant ses coureurs privéz a Rely, a Nerons, .ii. chasteaux garitéz, pour enquerir si Englois y estoient demouréz. Noz coureurs trouverent qu’ilz s’en estoient aléz : pour doubte des François s’en estoient sevréz pour aler a Saint Mor, dessus Loyre fermé. Et quant a Saint Mor vindrent, si se sont escrié : « Vuidéz touz decy, nous serons attrappé. Nous ne garderont mie murs ne fosséz, ne grans pons levys, ne engins bien charppentéz. François sont dedens Vaulx, la noble fermeté : le boucher est venu dont seréz acoré.»
533
18137 18139 18141 18143 18145 18147 18149
615
[220v]
Ainsi dient Engloys quant a Saint Mor entrerent. De ce qu’ilz vont disent Englois espaonterent. Lors haucerent les pons et les portes fermerent. Pour la ville garder moult trés bien s’appresterent et irent moult bon gait, car la nuyt se doubterent, car Bertrant du Guesclin moult souvent redoubterent. Olivier de Gliçon Englois petit amerent, car a mort les metoit et pour ce le doubterent, le bouchier de Cliçon et ainsi l’appellerent. Et Bertrant et sa gent a Saumur s’en alerent, grosse ville françoise et la se reposerent. La se sont rafreschyz, car moult le desirerent. Oiéz de noz Françoys qui Bertrant appellerent, pour conquerre Saint Mor maint conseil lui donnerent.
18151 18153 18155 18157 18159 18161 18163
616 Or furent a Saumur noz François suisant : Bertrant du Guesclin, a l’aduré talent, et le bon mareschal, cellui c’on dit d’Odrehan, Olivier de Cliçon qui fu bon combatant, et Alain de Beaumont, cousin germain Bertrant,
18165 18167
534 18169 18171 18173 18175 18177 18179 18181 18183 18185 18187 18189 18191 18193
- Episodes français -
et mains bon chevaliers que point n’iray nommant. A raison les a mis le noble Bertrant. La leur dist et compta la prouesce trés grant qu’il vit en Cressonele, le noble combatant, ens ou païs d’Espaigne, la contree vaillent, et comment Cresonelle a garnison puissant* et par dedens Saint Mor, dessus Loyre seant, et la ville est moult fort et les murs furent grant. Conseil leur demanda et les va requerant comment on aura la ville souisant. Adont s’alerent touz les princes consentant c’on aille a Cresonelle un heraut envoient pour lui signifïer que le fort aille rendant au riche roy Charlon et au gentilz Bertrant. Le heraut y ala, ne l’ala refusant. Et dist a Cresonelle son bon et son commant, mais Cresonelle ala le nom de Dieu jurant : « Ne rendray au roy son fort en mon vivant. » Et tant ala la chose neant contre neant que Bertrant volu mander, par sauf conduit donnant, le gentilz Cresonelle que a lui alast parlant. Cresonelle y ala ne l’ala refusant. Et tant ala Bertrant a lui parlementant en lui apleniant et en lui menacent que du fort delivrer il s’alast acordant et lui nomma le jour qu’il l’ala delivrant. 617
18195 18197 18199 18201 18203
Ainsi ce parlement se parti et ina. Cresonelle a Saint Mor vistement retourna. Vass’en isnellement, dedens la ville entra. A ses hommes touz de Bertrant raconta, ce qu’il a demandé et ce qu’il actorda. La furent a conseil et chascun le louha que briesment s’en iront de celle ville la, les joiaux et l’or in chascun en vuidera et toute la richesse, que riens n’y demourra,
[221r]
- Prise de Bressiere et contreval la ville le feu on boutera. Se fu fait il fu dit, quant partirent dela le feu mirent partout et la ville embrasa. Toust fu dit a Bertrant qui a Saumur demoura. Dolant en fu Bertrant, maintenent commanda c’on s’en voyse aprés lui, sa trompecte sonna. Envers Bressiere vint et la s’achemina car on lui dist que Englois s’en fuÿrent droit la. Et mains nobles barons aprés Bertrant s’en va. Or escoutéz comment les Englois trouvera et comment de Bressieres la ville gaignera. Et tant ala Bertrant et si bien s’achemina avec sa bonne gent, que Bressiere advisa et perceut les Englois dont plenté y ot la, qui furent en fuÿ, comme dit on vous a, et cuident entrer en Bressiere dela. Mais le fort cappitaine l’entree leur vea et moult trés grandement a eulx parlementa. Et entre eulx Guesclin en Englois se bouta, et noz gentils François chascun son cry cria. A pié sont descenduz noz gens de deça et ierent sur Englois qui furent par dela. « Hé, Dieu, dient Englois, trop malement nous va. Ce deable Bretrant durer ne nous lerra. Oncques tel chevalier ou monde ne regna. »
535
18205 18207 18209 18211 18213 18215 18217 18219 18221 18223 18225 18227
618
[221v]
Ainsi devant Bressieres furent Engloys sourpriz. Bien estoient .Vc . par dessus les larris. Quant virent noz François, a defense sont mis. Mais toute leur defense ne vault .ii. parisis, car il furent ce jour afoléz, mors ou pris. Quant au dessus en furent noz barons seignoris, adont se sont logiéz aus champs et aus courtilz. Et la fu le conquest paisiblement party. Pour aucun prisonnier commainça un estry, mais Bertrant commanda et Cliçon le gentilz,
18229 18231 18233 18235 18237
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- Episodes français -
que touz fussent octis, Englois grans et petis, s’en demouront en pais sans commaincer estris.* Et ainsi fu il fait, si comme dit l’escript. Ainsi devant Bressiere, dequoy je vous devis, moru .vc . Engloys dessus les préz loris, et .xl. qui furent entré ens ou pourpris. Et Bretrant qui estoit connoistable gentilz, monta sur un destrier qui n’y est alenty. A la porte s’en vint prés du pont leveïs, voit a la porte en son les Englois poestiz. Au cappitaine parla du tout a son devis et requerant le fort, il en fu escondis. Adonc jura Bertrant qu’il seroit assailli. A l’ost s’est retourné, si s’escrie a hault cris : « Or avant, a l’assault, mes bons loiaux amis ! » Lors courent a l’assault les grans et les petis. 619
18255 18257 18259 18261 18263 18265 18267 18269
Merveilleux fu l’assault dont on vous comptera. Ung banieré avoit Bertrant que bien ama, c’on dit Jehan du Boys, ainsi on l’appella. Par force au pié du mur la baniere porta. Un Engloys l’aherdy, bien ouster lui cuida, mais le bon baneret un tel cop lui donna que un oeil tout le meilleur, par voir, lui creva. L’Englois fu dolant, son oeil bander ala. Et l’assault fu grant et tousjours renforça. Le noble baneret moult trés bien s’i aida, et le bon mareschal d’Odrehan par dela, Olivier de Cliçon qui moult Englois greva, et Alain de Beaumont qui onc Englois n’ama. Le ber Karenlouet point ne se esparigna, Guillaume le Baveux le grant n’y empira, et Jehan de Vïenne*, ou prouesce regna. 18257
d. Boys ali ainsi o., ali exponctué.
18240
corr. d’après Nh : s’en demourons en p.
- Problèmes à La Rochelle -
[222r]
L’abbé de Malepaie mains Englois y greva, et maint autre princier, dequoy on se tayra. Merveilleux fu l’assault et longuement dura. Tellement s’eforcerent noz François par deça* que la ville ont conquise, par force on y entra. Mais le chastel ne fu point pris en ce jour la, mais le jour fu nommé que rendre on le devra. Aprés ce fait Bertrant a Saumur retourna. le gentilz mareschal d’Odrehan s’acoucha d’une telle maladie, oncques puis n’en leva. L’ame en ait Jhesucrist, car loiaument regna.
537 18271 18273 18275 18277 18279 18281
620 Puis advint que Bertrant oÿ dire et compter qu’en chastel d’Odalnay yla se volu bouter Robert c’on dit Canole et volu congié donner a ses gens qui s’en vont pour repasser la mer ; et son bien .xic . qui pensent de l’errer. Robert, cellui de Neuville, les devoit gouverner. Mais le ber Olivier de Cliçon sans targer, au gré du ber Bertrant qui faisoit a doubter, douze cens combatans volu Olivier mener. Le viscoins de Rohen ne si volu oublier, Robert de Beaumanoir qui le viaire ot cler, et le seigneur de Rays qui bien savoit chappler, Giefroy de Karemer qui Engloys ne pot amer, et cellui qui Rochefort doit tenir et garder. Tant ala ceste gent, comme j’oÿ compter, qui veult de Saint Mahieu les grans guéz gouverner. Et veoient les Englois qui cuidoient entrer es néz et es bastiaux pour la mer traverser, mais Olivier leur dist : « Vous ne pouéz passer. A moy vous conviendra vostre treü livrer. » 621 La matiere nous dit et nous va tesmoignant 18274
corr. d’après Nh : n. Englois par d.
18283 18285 18287 18289 18291 18293 18295 18297 18299 18301
538 18303 18305 18307 18309 18311 18313 18315 18317 18319 18321 18323 18325 18327 18329 18331 18333 18335 18337 18339
- Episodes français -
que la y ot bataille merveilleusement grant. Et de .xic . qui furent les Englois combatant, sachéz que les .ixc . furent octis ou champ. Pris fu la cappitaine qui la s’ala rendant. Seigneurs en icellui temps dont je vous vois parlant estoit en Engleterre le prince souisant, qui d’une maladie aloit au lit gisant. Et en Guïenne estoit maint chevaliers vaillant, qui vont de par le prince la grant duché gardant. Si y estoit le duc de Lencloistre tenant, et le Castal de Beuf, a l’aduré talent, Thomas de Felleton, au hardi convenant, senechal de Bourdeaux l’aloient appellant, et mains autres seigneurs, dont je me voys taisant. Cy encontre Bertrant vont fort le pas gardant. Et Bertrant les aloit moult forment visitant, prenoit tours et chasteaux qu’il aloit abatant, et puis envers Saumur il s’aloit retraiant. En ce temps ot en mer une navie grant d’Espaignolz qui aloient les Engloys moult grevant. Et devant la Rochelle alerent atrappent cellui de Panebrot c’on va conte nommant, et les Englois aussi qu’il ala amenant, qui cuidoient moult bien entrer a leur commant pour mectre en prison mains bourjois souisant pour doubte qu’il realassent bons François devenant. Des grezillons aloient deux tonneaux amenant. Mais Espaignolz en furent le païs delivrent. Si en eurent mains prisons riches et puissant. Par la mer sur Englois vont de Bourdeaux courant. Devant Bourdeaux alerent .iiii. néz atrapant. Englois furent neéz sans rançon paient. Puis partirent de la, leurs voyles vont levant, vers Espaigne s’en vont, une contree grant ; vindrent a Saint Ander qui sur mer est sceant. La trouverent Yvain de Gales le vaillant, qui les bons Espaignolz ala bien festïent, car Panebrot haoit a mort, je vous creant.
[222v]
- Bertrant de retour à Paris -
[223r]
Quant il le pot veoir, si mist peine moult grant qu’il le peüst avoir pour faire son commant ; mais il n’en peu iner, si m’en tayray atant. Diray de la Rochelle, celle ville puissant. Quant des Englois sceu bien tout le convenent, ilz aconterent poy a leur peine trés grant : en la ville n’y ot si petit ne si grant qui a estre Françoys n’alast moult desirant. A sa nature va le lieu toujours tirant. Or diray de Bertrant le noble combatant, que le bon roy manda, a qui Dieu soit garant. Et Bertrant vers le roy s’en ala a son mant, qui en son cuer estoit couroucé et dolant de ce que argent n’avoit pour paier maintenant ses nobles soudoiers pour aler plus avant. A Paris vint Bertrant, dont je vous voys comptant ; voua rendre l’oice c’on lui ala donnant si on ne lui baille argent et in or reluisant.*
539 18341 18343 18345 18347 18349 18351 18353 18355 18357
622 Aussi tost que Bertrant fu au roy amonstré, on lui it moult d’onneur, de certain le creéz, et lui baill’on argent et in or monnoié. Un moys enprés le roy s’est Bertrant reposé. Bertrant en appella le fors roy couronné : « Bertrant, se dist le roy, a la Rochelle iréz et diréz aus bourjois qu’ilz me rendent les clefz, et me jurent hommages, foy et loiaultés. – Sire, se dist Bertrant, si comme vous commandéz. » Du roy se desparty Bertrant dont vous oiéz. A noble compaignie s’est de France dessevré, de gens d’armes qui sont moult puissanment montéz. Et tant ont exploictié et main et a vespree que bien ont approchié la Rochelle de préz. Tost fust le plat païs de noz Françoys fusté.* 18358 18373
corr. d’après P : l. baille oice et f. corr. d’après Nh : d. noz bourjois fusté
18359 18361 18363 18365 18367 18369 18371 18373
540
18375 18377 18379 18381 18383 18385 18387
- Episodes français -
Bertrant par sauf conduit a les bourjois mandé, touz les plus grans qui sont de la Rochelle néz. Le mandement du roy leur fu dit et compté. Et leur monstra les poins et les auctorités comment Englois felons s’estoient parjuréz sans tenir aus Françoys ne foy, ne loiaulté : de l’actort qui fu fait ne tenoient .iii. déz qui par le roy Jehan a esté ordonné. Or se rendent François, si feront que senéz. Se briesment ne le font, ilz en seront troubléz. Se dient les bourjois : « Briesment responce auréz, mais que parole aions a la communauté, car se sans le commun nous estoions actordéz, nous feroions le marché d’estre mors ou tuéz. » 623
18389 18391 18393 18395 18397 18399 18401 18403 18405
Les bourjois retournerent sans nulle decevance. Au commun ont parlé et dit en audïence tout le mandement du noble roy de France. Dont eurent a conseil et pristrent alïance que au riche roy engloiz qui tant ot de puissance, manderont que briesment leur face secourance, ou ilz se tourneront a leur droite ordonnance dedens un jour nommé qui fu dit par fïance. Dolant fu Edouart quant sceu la substance. Bien voit qu’il mectroit ses hommes en balance : d’envoier par deça y ont tousjours soufrance. Nonpourtant remanda aus bourjois d’ordenance qu’ilz seront secouruz a escu et a lance, ains que le jour nommé s’aproche ne s’avance. Dont jura Jhesucrist et sa doulce puissance, s’autre reponce n’a par aucune ordonnance, que toutes lé vignes de la contree franche ne lerra a copper ne racine ne branche, ne jamais a nul jour ne porteront substance.* 18394 18402 18406
corr. d’après P : i. se trouveront a l. corr. d’après P : J. et et sa doulce p. et supprimé. corr. d’après Nh : j. ne porteroit s.
[223v]
- Reddition de La Rochelle Et quant les bourjois ont oÿe la ventance, a Bertrant ont paisié par certaine inance, xl.M. lorins du coign du roy de France. Tant en receu Bertrant, a la iere semblance. Et y ot jour nommé par certaine ordonnance que au roy se rendront par bonne concordance, se du roy englois n’ont aucune secourance. Depuis s’en retourna Bertrant par devers France, qu’il avoit de l’argent ou il prenoit plaisance ; non pas qu’il convoitast ne argent ne inance, fors que pour soustenir soudoiers en puissance, car de jour et de nuyt n’ot autre gelouzance que de garder l’onneur du roy sans demourance. C’est meschief et pitié de perdre une telle lance.
541 18407 18409 18411 18413 18415 18417 18419
624
[224r]
Mes or s’en va Bertrant o sa gent aduree. Quant il ot cheminé aussi que une levee et que dessus la nuit fu sa gent houstelee, se monstra a Bertrant un heraut la vespree. De par le Castal de Buef, chiere levee lui jura et promist et par foy creancee, se Bertrant veult actendre sans plus terce jornee, bataille lui seroit et a sa gent, livree. Et Bertrant en jura la virge honnouree qu’il actendroit sur la champeigne lee . Si le it con le dist, ce fu chose averee. Mais ains ne s’amonstra a lui personne nee pour bataille livrer, dont la chiere ot iree. Bertrant en a sa gent devant lui appellee : Olivier de Cliçon qui bien ama meslee, et messire Jehan de Buel la muree, Olivier de Manny qui bien fery d’espee, et Guillaume Boytel, a la iere pensee, Guillaume de Lannoy, a la chiere senee, et Alain de Beaumont, a la brace quarree. « Seigneurs se dist Bretrant, c’est bien chose prouvee
18421 18423 18425 18427 18429 18431 18433 18435 18437 18439 18441
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- Episodes français -
que Englois ont ainsi vers nous leur foy faussee, car nous avons trois jours ycy fait demouree. Or n’y a vivres nulz en iceste contree, estre n’y pouons plus ny heure ne jornee. Ou le Castal est irons lance levee, et si lui courons sus a l’espee aceree. » A ce conseil se fu ceste gens actordee, ne fust un messagier qui vint de randonnee, qui fu au noble duc de Bourbon la peupplee, qui encontre Bertrant venoit a belle armee pour la Rochelle avoir, s’estoit bien sa pensee. Quant Bertrant sot du duc la venue abrivee, contre lui s’en ala o sa gent ordonnee. Le bon duc encontra, ainsi c’un avespree ; encores n’estoit pas la complie sonnee. Un chastel ont trouvé, dont la tour fu fermee, conquis l’ont par assault, par vertu esprouvee, ainçois que pour soupper fust la table levee. Et trouverent des vins en celle tour muree. Touz furent mors ou pris Englois sans demouree. En ce chastel souppa la baronnie amee. S’il n’eüst tost conquist la tour aulte levee, ilz eüssent dormy aus champs sur la pree, car la ville ot esté gastee et desertee. Ne irent comme riens ou chastel demouree. Vers France s’en revont, ce fu chose mandee de par le noble roy. A Bertrant desagree, qu’en la Guïenne n’a sa grant route menee. Mais Bertrant retourna briesment lance levee et it tant de prouesce ains l’annee passee qu’Alixandre ne it autant en sa duree, ainsi con vous orréz a pou de demouree. 625
18475
Or vous vouldray laisser du bon duc de Bourbon et du noble Bertrant qui tant estoit proudon, et de touz les barons qui tant ont de renon,
- Bataille du pont de Lussac -
[224v]
qui s’en vont vers le roy quant il sera saison, les grans faiz merveilleux que acheva le baron. Mais de Chando ainçois s’il vous plaist parleron, qui estoit chevalier et homme de grant non, et fu loial Englois en sa regnacïon. Dedens Poictiers avoit moult noble garnison de gens d’armes qui sont en sa commandison. En ses frontieres dela, dequoy nous vous dison, ot pluseurs fors François et mains noble baron, et mains bons cappitaines de fort estractïon. Karenlouet y fu, le noble champïon, qui a Roche fu, que de Posay diron. Cappitaine en avoit esté longue saison, avec lui Alain Saisi son compaignon, et le ber Jehan Paien, a la gente façon, et Henry Bouterel et des autres foison ; .l. glaives sont, je croy, ou environ, et dix huyt archiers, ne plus n’y aconton. Chando venoit souvent par devant le donjon assaillir, palleter et commaincer tençon. Mais il trouva François envers lui si felon que conquester ne pot la monte d’un bouton. Et celz François dela estoient bon Breton qui ne prisent Englois la couhe d’un siron. Or advint il un jour, comme dit la chanson, que ber Karenlouet, a ses hommes de nom, issi avec ses gens et parti du danjon. La droit envers Poictiers s’en vont par le sablon, le païs vont serchant entour et environ. La proie et le bestial, dont il y ot foison, ont prins a eslever et mainent de randon. A Chando fu conté ceste perdicïon. Lors jura Jhesucrist qui soufry passïon, mal a Karenlouet faire tel mesprison. Sa trompe it sonner et son cor de leton. Et Englois sont couruz aus armes de randon. Bien se sont adoubé .iiic . ou environ, qui touz jurent la mort et la destructïon
543 18477 18479 18481 18483 18485 18487 18489 18491 18493 18495 18497 18499 18501 18503 18505 18507 18509 18511 18513
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- Episodes français -
du ber Carenlouet qui tant fu loial hon. Mais a qui Dieu veult aider, n’aura se bien non. 626
18517 18519 18521 18523 18525 18527 18529 18531 18533
Or est Chando issu de Poictiers en appert, trois cens Englois o lui, chascun ot bacinet. Si avoit chascun .i. jacques par dessus le haubert et la lance ens ou poign, dont le fer estoit net. Chascun ot bon cheval, blanc, sor, ou morelet, et menancent touz le ber Carenlouet, qui si petit les prise et tel despit leur fait que de lever la proye ens ou pré verdelet. Au dehors de Poictiers, assez prés du gibet, vont Engloys chevauchant parmy un garet, de cousté une rivere ou ot mains pontelet ; Vienne l’appell’on, on le scet bien de fet. Chando a encontré dessoubz un montelet un homme qui tenoit en sa main un cornet. A loy de venours se maintient et se fait, et si estoit monté dessus un ginguelet qui l’embleüre va assez meulx que un mulet. 627
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Envers Chando s’en vait cellui qui fu venour. Et estoit de Poictiers, mais il avoit paour, fort broche le cheval, vass’en plus que le cour. Assez cogneu Chando qui fu de bel estour. Maintenant descendi a terre a la verdour et si le salua de Dieu le creatour. « Amis, se dist Chando, or me dy sans demour : as tu veü François ? Qui aient huy mal jour. – Oÿ, Sire, fait il, ilz m’ont fait grant paour. Ilz enmainent prisons de noble valeur, et si enmenent bestial onc homs ne vit grignour. Se conquerre vouléz a touzjoursmais honneur, si aléz au devant d’eulx a loy de pongneour ; moult bien lé consuiréz ains une heure de jour.
[225r]
- Bataille du pont de Lussac Mais passer vous fauldra dela l’ayve le tour droit au pont de Lusac qui est fort comme tour. » Le vallet disoit vray, car la ot un estour, je croy, de poy de gens, nul homs ne vit grigneur.
545
18549 18551
628 Or chevauche Chando, o lui .iii . Englois montéz et bien arméz et en noble conrois. Vers le pont de Lusac chevauchent les Englois. Et tant ont chevauché Englois et Guïennois que d’autre part de l’ayve ont veü noz François qui emmenent prisons a force et a destroiz et chacent bestial contre val les herbois. « Avant ! se dist Chando, hastons nous ceste foys. Si au pont venent François plus tost que nous ainçois, par la ne passerons pas bien a nostre choys, car ilz mectront defenses et rebroys tant qu’ilz aront tremis pas dedens leurs manoirs leurs prisons, leur bestial et dedens leurs belfrois. Des fais Karenlouet trés bien me ramentoys : maintes foys m’ont servy de ses faiz serventoys. » c
[225v]
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629 Or chevauchent Englois qui moult se vont hastant. Touz selon la riviere vont sur les préz courant. Et d’autre part estoient noz François puissant, qui les prisons et le bestial menant. Assez bellement vont, si qu’il est aferant. Véz vous un escuier de noble convenant, qui a Carenlouet s’en va tost amonstrant. « A, Sire, dist-il, aléz vous advisant, car foy que doys a Dieu qui ou ciel est manant issu est de Poictiers Chando le combatant et sont avec lui bien .iiic . combatant 18566
d. ses faiz ra serventoys, ra exponctué.
18577
corr. d’après P : e. son avec l.
18567 18569 18571 18573 18575 18577
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- Episodes français -
qui vous et voz gens vont forment menaçant. De vous adevancer se vont forment penant et si vont touz ensemble et forment chevauchant. Ja leurs coureurs avoient tramis au pardevant. Droit au porc de Lussac, la iront ilz passant, a la in que vous puissent la trouver a plain champ. » Et quant Karenlouet va cellui escoutant, de hardement lui vint ung souvenir plaisant. Et bien y apparu, si comme orréz devant. 630
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Le ber Karenlouet a ses varlés charga la proie, les prisons, dont plenté y a. A Roche de Posay le ber les envoia. Ses gens it arrouter et moult bel les mena. Sur la riviere grant o ses gens chevaucha. Et si trés prés de l’eave a ce jour s’approcha qu’il choisi d’autre part Englois qui sont dela. Adont Karenlouet ses hommes moult hasta qu’Englois rentrent ou pont, de ce moult se doubta. Et Chando d’autre part a ses Englois monstra le bers Carenlouet, car moult bien l’avisa : c’estoit homme du monde que ou siecle plus doubta.* De l’un costé et d’autre chascun si se hasta qu’ilz sont venuz au pont, dont compté on vous a. Carenlouet premier dessus le pont monta. Aussi tost qu’il y fu, du cheval desmonta. Aussi irent ses gens, car il le commanda : a pié sont descendu et se rengerent la. Chascun la lance ou poign saisi et brandela et puis dient qu’Englois voulent passer la. Son nom fauldra nommer qui passer y vouldra. Les archiers sont devant, que petit en y a : ne sont que .xviii.. Chascun s’esvertua, chascun tendy son arc et sa leche escocha. Atant véz vous Chando qui au pont ariva. 18598
corr. d’après P : suppression de vers, voir note.
[226r]
- Bataille du pont de Lussac Carenlouet perceu et le penon qu’il a, et regarde l’arroy comment il s’ordonna. A merveiller se prist, aus Engloys le monstra, et leur a dit : « Seigneurs, or regardéz dela. Bien vous avoie dit tout ainsi qu’il y va. Je vous jure le vray Dieu qui le monde crea, qu’en France n’a meilleur, de tel pouoir qu’il a, comm’est Karenlouet ; pourtant me pesera s’il est mort ou octis en l’estour qui sera. Je sçay bien de certain que chier se vendra. » Ainsi disoit Chando qui puissanment regna. Mais de ce qu’il pensa a plenté demoura.
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[226v]
Or fu au bout du pont Chando avec sa gent. A pié sont descendu tost et isnellement, rengéz et ordonnéz moult trés serreement ; ainsi vont approchant nostre françoise gent. Lors commaincerent la les Englois le content de traire et de lancer, non mie longuement car le trait failli tantost, point n’en ot grandement. Adont parla Chando et a dit haultement : « A, Karenlouet, comme tu as hardement. Trop es oultrecuidé, je le sçay vraiment, qui veulx de .l. hommes cy faire chapplement contre trois cens ou plus en armes exellent. Ne te fais point occtire, ne afoler ta gent, ainçois te rens a moy tout paisiblement, et me rens le bestial tout primierement que tu as conquesté depuis l’ajornement. Et je jure Dieu qui maint ou fermement, je te vouldray quicter et ta gent ensement, pour la moitie d’argent et demi paiement qui a rançon s’aiert, comme raison assent : cellui qui porroit paier cent frans d’or qui resplent pour cincquante sera quicte tout pleinement. » Se dist Carenlouet : « Vous parléz pour neent.
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- Episodes français -
Vous tenéz poy de moy et de mon convenent. Se ainsi le faisons, par les sains d’Orïent, on nous devroit touz hault encroier au vent. Que diroit Olivier a qui Cliçon appent ? Voir ne me ouseroie jamais devant telle gent. Quant je seray cheü de mon cheval briesment, et je seray navré ou corps vilaimement, et que rompu auray mon espoy qui resplent, adont me sermonnéz de rendre vistement. Car je soie dampné si autrement je me rent. » Et quant Chando l’oÿ, au cuer en fu dolant. Lors lui dist le seigneur ou Mortemer appent : « Sire, Chando, dist il, je vous pri humblement ses François me donnéz a combatre present Entre moy et mes gens a ce commaincement : mors ou vifz les auréz a vostre commandement. – Or avant ! dist Chando, aléz appertement. Et je vous secourray, se besoign vous en prent, car le cuer me dit bien, par le mien serement, que de secours auréz mestier prochainement. » 632
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Le sire qui tenoit la tour de Mortemer, a bien .l. glaives qui irent a doubter, s’en vint devant noz gens, la se va ordonner. Bien cuiderent abatre noz gens et verser, mais noz gentilz François qui irent a loer, les irent reculer par force de pousser. Oncques nul homs ne vit tel defense monstrer. Il convint les premiers arriere reculer : ja fussent mors ou pris sans plus avant aler, quant Chando et sa gent le irent retorner et se vont touz ensemble renger et ordonner. La commainça estour, nul hons ne vit son per. La ot fort bataillis de lances a pousser. Englois avoient haches qui irent a doubter ; c’est qui it François trop malement grever :
- Bataille du pont de Lussac -
[227r]
Par ce vint on maint glaives fendre et deppercer. Englois vont cel assault tellement demener, ierement assaillant a chiere de sangler. Et François se defendent pour leur vie sauver, de l’un cousté et d’autre pensoient de frapper. Ainsi que la bataille se prinst a eschaufer, se departy du pont, dont vous m’oéz parler, un vallet qui pensa bien tost de retorner. Aus vallés est venuz qui devoient mener le bestial c’on ot fait au devant arouster. Haultement leur cria car ne leur volu celer « Et venéz a ce pont voz seigneurs conforter, car ilz ont ier assault et qui fait a doubter. S’ilz sont ne mors, ne pris, il vous fauldra iner. Et se la victoire ont, bien vous pouéz vanter que a tousjoursmais porréz en richesse demeurer. » Et quant les vallés ont oÿ ce recorder, vers le pont ont couru sans voye demander. De pierres, de chaillotz, vont leurs girons trousser. Quant ilz vindrent au pont, leurs maistres vont trouver, qui avoient adont moult grant fais apporter et estoient sur l’eur de perdre ou reculer. Quant les vallés perceurent leurs maistres formener, qui avoient adont moult grant fays apporter, – et ja en y avoit de pris pour ransonner – le cry « Carenlouet ! » commaincent a gicter. De pierres, de chaillos qu’ilz volurent apporter aussi dru volent en l’aer c’on voit pluie pluver. Et quant sur les Englois prindrent a avaler, dessus ces bacinés prindrent a marteler que ce sembloient fevres c’on oÿst la frapper. « Hé, Dieu, se dist Chando, nous veult Jhesu grever. S’il fait pluver chaillos, nous ne porrons durer. »
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633 Quant Chando a choisi les chaillos descliquer et qu’ilz irent Englois malement empirer,
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- Episodes français -
adont dist a ses gens : « Pensons de besoigner. Ains tel honte n’avint a corps de chevalier que a nous touz aviendra, je ne le quiers noier, se reculer nous fault et la place laisser. Plus sommes de .iiic . pour François empirer et ilz n’estoient point .l. au commaincer. Secours leur est venu, que j’entens par derrier. – Sire, se dist un Englois qui ot nom Engelier, ce ne sont que varlés, a celer ne vous quier, qui pour aider leurs maistres se venent approchier. – En non Dieu, dist Chando, telz gens doit on priser. Au besoign cognoist on son ami droiturer. Avant, se dist Chando, or pensons d’esploitier. » Lors commaincent Englois noz gens a approchier. La peüsséz veoir de lances estiquier et ferir l’un sur l’autre de ces lances d’acier. Englois furent foison, si furent a priser. Dessus noz gens s’en vont tellement exploicter que les departent touz et font aclarrïer, et en prirent pluseurs, a loy de soudoier. Bien s’i prouva Chando a loy de chevalier. Une hache qu’il tint ala amont drecier, sur un François l’ala tellement decliquier, qui estoit appellé par nom Pierre Bouchier, tout le it empirer le bacinet d’or mier et l’abbati tout jus dessus le sablonnier. La fu prins et saisi a loy de prisonner. Veu l’a Carenlouet, n’y ot que corroucier. La y ot un Berton qui estoit bon archier. Une leche grant ala sur Chando desquicler, tellement qu’il lui it ses armeures bercier et le navra en char et le sang it raier. Cest archier ot nom, sans point de mansonger, Alain de Guigneux et moult fait a priser. Quant Chando se senty de la leche blecier, vous pouéz bien savoir n’y ot que corroucer. 18727
corr. d’après P : en on Dieu d.
[227v]
- Bataille du pont de Lussac -
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[228r]
Quant Chando se senty nafré si faitement, la leche tira hors de son corps vistement. N’estoit pas si navré ne si oultreement qu’il en eüst ja mort receü nullement se pis il n’eüst eu dedens ce chapplement. Chando ne it semblanc du horïon qu’il sent, ains escrioit en hault : « Or avant, bonne gent ! Abatéz ces François. Octiéz a torment qui ne se rendra tost et isnellement. » La commainça l’assault, l’estour et le content. François se sont portéz bien et hardiement. Bien s’i porta cellui qui porta en present le penon noble et grant de la françoyse gent : a Carenlouet fu et ou nom vraiment Yvon qui de Lannoy ot nom certainement. Cellui fu un des bons de tout l’assemblement : cellui qui ataint a cop, a terre l’estent. Sa baniere bailla a un sien chambellain pour lui combatre mieulx a son commandement. D’une lance qu’il tint respousa tellement Englois, qu’il en navra .v. trés vilainement. Si abbati le penon qui a Chando appent. Quant Englois ont veü tout son contenement, lors l’ont avironné et assailli tellement, de haches tant batu si eforceement, qu’il fu jus abbatu enmy le pavement. Et quant il n’en pot plus, adont dist : « Je me rent. » La fu prins et saisi tost et isnellement. Veu l’a Carenlouet, tout le cuer lui dement. Recouvrer le cuida, lors cria aultement son enseigne et son cry pour resjoïr sa gent et pour Yvon aider, mais ce fu pour neent. Des Englois fu enclos avironneement, 18774
a Chando penon appent, penon exponctué.
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corr. d’après P : pour le combatre m.
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- Episodes français -
et batu et feru par tel estorement c’on l’eüst la octis et tué tellement, se ne fust un Englois, de noble convenant, qui it une bonté en ce jour tellement qu’il en fu moult prisié dedens maint tenement. 635
18791 18793 18795 18797 18799 18801 18803 18805 18807 18809 18811 18813 18815 18817 18819
Le bers Carenlouet, dont je vous ay parlé, avoit jadis tenu en son chastel fermé l’Englois dont je vous dy qui l’avoit rançonné et tellement du sien despris et desnué qu’il n’avoit point vaillant .i. denier monnoié : il n’avoit armeüre qu’il n’eüst emprunté, ne cheval, ne destrier, ou il eüst monté. Si en ot Carenlouet malement prins en hé, et en avoit en lui par maintefoiz juré que se Carenlouet avoit jamais trouvé en lieu ou il eüst dessus lui poesté, que pour tout l’or de monde ne seroit respité, qu’il ne fust mis a in, octis et decoppé. Mais Dieu lui envoia en cuer autre pensé. Car quant Carenlouet vit a terre tumbé et que batre le vit ou dos et ou costé de grans haches pesans et par telle ierté qu’Englois tendent a l’octire a grant vilté, le bon Englois berton, que Dieu ot inspiré, ousta hors de son corps haÿne et malvaité. Et s’en vint aus Englois qui l’eurent appressé le ber Carenlouet qui gisoit adenté, et leur cria en hault qui bien fu escouté : « Arriere, traïteurs, felons et parjuré. Et comment estez vous si hardiz ne ousé d’octire, de tuer en un estour mortelz un homme de grant sen et de noble lieu né, puis qu’il a rançon doulcement demandé et qu’il est bien puissant pour estre rançonné. Foy que je doys a Dieu qui maint en trinité,
[228v]
- Bataille du pont de Lussac le premier qui huysmais lui aura adesé, de ceste hache cy lui donray tel santé car il ne lui chaudra combien on vende blé. »
553 18821 18823
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[229r]
Ainsi le bon Englois it Englois reculer. A Carenlouet va et le fait relever. « Carenlouet, dist il, bien me devéz amer meulx que je ne doys vous, a verité compter. car icy vous ay fait vostre vie sauver et vous m’avéz du mien si fait desheriter par grande rançon que ja vous is livrer, que je n’ay cheval mien ne armeure pour armer. Or fault que vous m’aidéz a mon corps remonter, ou je vous feray cy de male mort iner. Rendéz vous hastement tantost sans cop donner au voloir de Chando qui nous doit gouverner. » Se dist Karenlouet : « Bien le doys actorder. » Ainsi fu prisonnier Karenlouet le ber. Quant François l’ont veü, n’y ot que espaonter. Lors se commaincent fort noz gens a decliner. Aucuns se vont rendant pour leur vie sauver et les autres se vont a defense torner. Un Aymeri y ot qui fu hardi et ber, qui de grant hardement s’ala la adviser. Une lance saisi qui le fer avoit cler, dessus Chando s’en va de lance pousser. Tellement l’a enpoint et tant se volu pener que dedens la poictrine l’ala si assener que haubert ne auqueton ne le peurent esparigner, ne le jacques volant, que devant doys nommer, qu’il ne lui ist lors le fer ou corps entrer. Et quant le ber Chando se scent si festier, a ses gens escria qui jouxte lui vit ester : « A, Dieu, je suis mort, en moy n’a que iner. Huy est venu le jour que je doy tréspasser. A Dieu commant le roy d’Angleterre sur mer.
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- Episodes français -
A Dieu commant la dame que je volu espouser. A Dieu commant le prince qui la mer volu passer. Aujourduy vous commant du tout a dessembler. » Quant son frere l’oÿ ensement guementer, a pleurer commainça et a soy demener, et dist : « Mectéz a mort François sans depporter. Qui aura prisonnier, tost le voise acorer, et tout le remanant veilléz a mort livrer. De la mort de mon frere veil vengence monstrer. – Non feréz, dist Chando. Frere, laisséz ester. François font leur devoir, ne les devoit blasmer, ains les doit on priser cherir et honnourer, car qui fait ce qu’il doit, j’ose bien dire au cler que de riens ne mesfet, bon est a excuser. » Par ce point it Chando de la mort respiter mains gentilz prisonniers pour rançon donner. 637
18873 18875 18877 18879 18881 18883 18885 18887 18889
Moult fu le bers Chando bon chevalier de pris. A son frere pria, pour Dieu de paradis, et a ses hommes touz, les grans et les petis, pour ce s’il est navré, François n’en aient pis, ains soient sauvéz ceulx qui se rendront pris, car ilz sont vaillans gens, de prouesce garnis. – Sire, dient Engloys, tout a vostre devis. » Lors vindrent a noz gens les Englois seignoris et leur ont en convent sur le corps Jhesucrist qui tost se rendra sans point mouvoir estris par raison pourra raler en son païs. Les François voient bien qu’ilz en eurent du pis, et qui n’obeÿroit, a la mort seroit mis. Lors se sont touz renduz les grans et les petis que .iiii. n’en y ot de noz François octis ; mais tant furent batuz ceulx qui demeurent vifz que de nafréz y ot environ trente six. Cellui qui ot Chando navré dessus le pis 18857
q. la v mer volu p., v exponctué.
[229v]
- Mort de Jehan Chando fu pris de bon Englois qui avoit nom Henris. Quant son prisonnier ot pris qui ot non Aymeris, son jacques qui estoit de clochettes garnis it tantost despouiller et puis fu revestis a l’envers a in qu’il ne fust pas choisi, car du frere Chando eüst esté octis. A Chando demandoit son fere dont je dys : « Frere qui vous a mort ? Nomméz moy cellui. – Ce fait a, dit Chando, un escuier de pris, a clochectes d’argent dessus son jacques assis. » Adont fu l’escuier entre les autres quis, mais par son maistre fu de la mort garanty et envoié ailleurs par dedens son pourpris. Ne sçay que vous feroie icy trop long devis. Touz furent noz François la retenuz et pris, varlés, pages, chevaulx, touz y furent saisis, et la proye rescousse, vaches, moutons, brebis, les prisonniers rescouz, du tout a leur devis. Et puis se sont Englois de l’assault departy puis Jehan de Chando mené a Chauvegris. Et la moru le ber, si comme dit l’escript. Et Carenlouet fu mené, pris et saisi a Mortemer tout droit, le chastel seignory, et l’autre a Poictiers, une ville de pris. Puis fu Carenlouet a sa inance mis. Trois milles francs d’or in paia le bers marchis, mais la ville de Tours les paia, se m’est vis, Oncques Carenlouet n’en paia .ii. pois bis, ains ot de remanant .m. lorins eslis, car il estoit amé grandement ou païs. Et il n’est rien qui vaille au besoign amis.
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638 Ainsi moru Chando ; il n’est riens qui ne ine. Le bers Carenlouet rala en sa saisine, a Roche de Posay, celle tour maberine. 18916
corr. d’après P : l. paia se m’est vifs
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- Episodes français -
Ains eu ses gens ains .iii. mois par rançon inie, car qui a de l’argent tousjours eschappe et ine. Alain Saisi revint, ou tout honneur s’encline, Pierre Bouchier aussi qui en touz biens se doctrine. Si fut Giefroy Paien et Huet de Scaline, et mains autres, de quoy ne diray point le signe. La y vint un archier qui fu de noble orine, et estoit de Paris, la cité noble et digne ; Jehan avoit nom, ne cuidéz que devine, de Limoges qui it a l’espee acerine mains beaux faiz sur Englois d’oultre marine. Atant vint ung heraut qui a en sa poitrine l’enseigne de Bertrant le connoistable digne, tunicle de in or ouvree de soie ine. Maintenant est monté en la sale pavie, devant Carenlouet moult noblement s’encline. 639
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Devant Carenlouet l’ayraut s’enclina. De Bretrant du Guesclin nouvelles lui compta. Et lui manda Bertrant et pour Dieu lui pria defende contre Englois tant que durer pourra et que, l’iver passé, Bretrant ira dela a toute la puissance des François par deça. Parmy la grant Guïenne un tel traïn fera dequoy jusques a mil ans parlé il en sera. Carenlouet fu aise quant ce mot escouta. Le heraut dont je dy noblement honoura et moult trés noble don aussi il lui donna. Et a Bertrant le ber .C. foys salut manda et lui manda aussi qu’il ne se doubte ja, la Roche de Posay si trés bien gardera, qu’Anglois maudiront l’eure c’onques il y entra. Atant s’en departy l’ayraut et sevra. Et Carenlouet qui hault honneur desira, de gens d’armes françois o lui tant assembla que a plus de .iiiixx . se trouva ;*
[230r]
- Prise de Chastelayraut -
[230v]
chascun estoit receu, homme nul n’en chassa. S’il ne leur donne argent quant venoient la, si leur promet il tant que chascun le louha. Bien dit Carenlouet et Damedieu jura, qu’ançoys qu’il soit long temps touz riches les fera. Or escoutéz, pour Dieu, de quoy il s’avisa. Une bonne ville ot qui estoit prés dela, c’on dit Chastelayraut, forte rivière y a, qui Creuse est appellee, ainsi on le nomma. Le bers Carenlouet o sa gent s’en ala, et jura Damedieu la ville prandra ains qu’il retorne mais ou il demoura.
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640 L’istoire nous dit et va signifïant, que ce Carenlouet, ou de prouesce ot tant, arriva une nuyt o sa gent combatant devant Chastelairaut, une ville puissant. En celle ville y ot, si comme dit le rommant, un poix de fermecté de grans paulx en estant,* qui au devant du mur vont defense faisant. Mais noz François savoient tout le convenant. Si eurent apporté mainte seés trenchant, exmanchees aplonc par tel convenant* c’on en pourroit copper un grant boys en seant sans noise demener la montance d’un grant. Et pourtant noz François s’alerent avalant et seerent les paulx dont je vous voys parlant en terre rex a rex, mais je vous acreant* c’on ne les ala pas touz oultre seent. Puis alerent la trenche de terre recouvrant. Ainsi irent deux nuitz, comme dit le rommant, et de jour s’en aloient par le païs courant, et eurent aporté maintes eschielles puissant et tout ce qui aiert a un estour pesant. Et vont pour assaillir leur besoigne ordonnant, 18966
corr. d’après P : f. ville y a
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- Episodes français -
pour la ville eschaler vont es fousséz entrant. Une tour y avoit qui estoit aulte et grant, ou une gaite avoit qui la estoit gaytant. Pour le gait reveillé aloit souvent criant : « Gaitéz au pié du mur. Aléz partout gaitant. Maintenant sera jour, je le vois apparant. Si irons manger des trippes qui vont au feu bouillant, car, certes, j’ay si fain c’onques n’eü si grant. » Ainsi disoit la gaite, comme je vois devisant, . Mais ceulx dorment, a qui il s’aloit desreant. Nul mot n’ont respondu, ainçois vont fort ronlant. Ja y avoit au pié du mur dont je vous chant plus de .xxx. François en noble convenant qui parlerent en hault et ont dit en oyant : « Nous garderons partout, nous n’alons pas dormant. De ces trippes manger sommes moult desirant. » 641
19009 19011 19013 19015 19017 19019 19021 19023 19025 19027
Quant la gaite entendi noz bonnes gent françoys, es fousséz regarda, oit remuer le boys et les grans paulx oÿ cheoir a une foys que noz gens ont seé sans noise et sans bufoys. Es fosséz sont chëuz vingt ou .xxxiii. et irent moult grant las. Lors la gaite regnois voit bien qu’es foussés sont nobles François. Adont a escrié : « Alarme ! » a une foys, « Traÿ ! Traÿ ! Seigneurs, arméz vous demanoys. » Lors sont couru aus armes la dedens les Englois. Mais onc si tost ne vindrent par dedens les murois, que dessus les crenaux qui furent de lÿois, ne fussent noz François, de cuer preux et courtois. Englois de bien defendre a riches ars turquois, a lances et a haches et a mains bons espois, mais toute la defense ne valy un tornois, touz fussent mors ou pris, s’ilz n’en fussent fÿois. Leens entrent François et les Bretons ainçois. Lors pouent bien manger des trippes a leurs choys.
[231r]
- Prise de Chastelayraut -
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642
[231v]
Dedens Chastelairaut sont nos François entrer. Le jour s’apparu cler, le souleil fu levé. Noz gens parmy la ville ont mains houstelz fusté. Moult de richesses y ont acquis et conquesté, et si prindrent de ceulx de celle fermeté. Et les autres se sont dessoubz le pont bouté, entre deux tours c’on ot de nouvel estoré. Le viconte du lieu se mist a sauveté, mais du sien ot perdu trés grant quantité. Dessus le pont y ot mains Englois redoubté. Bien cuidoient François, dont je vous ay parlé, que ce pont dont je dy fust briesment conquesté. Mais ains sera le pont chierement comparé. En la ville se sont noz Françoys reposé, le pillage party et l’or in monnoié. Assez en ont vuidé de noble richeté, riches draps, gros bureaux et le linge esmeré, chauderes, chauderons et mains bons litz paré, et vaisselles d’argent et d’estaign bien ouvré En bateaux et en néz ont tout mis et posé, proprement les enclumes ou les fevres ont ouvré et les meules aussi qui mouloient le blé. A Saumur, a Chinon fu ce conquest mené. Onc ne fu meulx pillé ville ne cité. Long temps furent noz gens en ceste fermeté. Et par devant le pont, dont je vous ay parlé, furent faictes defenses, breteches ou terré, a la in qu’ilz ne soient sourprins ne engigné. La sont de touz païs les François arrivé. Bien y furent .iim . ains .xxe . passé. Pour conquester le pont ont maint assault livré. Et par dedens bateaux sont noz François entré. A piques et a hoes ont un piller mué, tant que une arche du pont cheÿ ou gué et la tour qui fu jus cheÿ d’autre cousté. Si Englois furent dolant, ne l’aiéz demandé.
19029 19031 19033 19035 19037 19039 19041 19043 19045 19047 19049 19051 19053 19055 19057 19059 19061 19063
560
19065 19067 19069 19071 19073 19075
- Episodes français -
643 Quant Englois ont veü jus cheoir une tour, a l’autre tour s’en sont fouyz pour le secour. Barrieres y ont fait a force et a vigour. Si ont bons arbalestriers et mains bons ars a tour. La tour fu bretechie noblement tout entour et garnie d’Englois, de mains bons pongneour ; si ont vitailles assez, ou ilz prenent saveur. A Poiters puent bien cheminer sans freour. Entre Englois et François estoit l’eauve grigneur.* « Dieu, dist Carenlouet au cuer d’empereour, qui pourroit ruer jus celle seconde tour, Englois seroient huys entré en trés mal jour. » 644
19077 19079 19081 19083 19085 19087 19089 19091 19093 19095
Dedens Chastelairaut fu no françoise gent. Sans le pont conquester y furent longuement. Plusers assaulx y ot, mais ne vali noient. Puis avint que Bertrant, a l’aduré talent, manda Carenlouet qui regna puissament, et touz les cappitaines des fors generaument que a Blois voisent tout a son commandement. Qui venir n’y vouldra, si s’en voise erranment droit par devant Huissel, la ville qui resplent. A certain jour nommé trouverent enppresent le bon duc de Berry, a qui la terre appent, et de Bourgoigne aussi le bon duc reverent, et le conte de Blois, que Dieu gart de torment. Le connoistable aussi y ira temprement, et touz les barrons de son alouement. Joieux furent François, la s’en vont leement. Ne sçay que vous iroie longuement devisant. Touz furent les barons de France entierement. Au pardevant Huissel, en Auvergne seant, se logerent entour bien ordonneement. La furent a un jour, bien nommé justement, 19071
corr. d’après P : a Poictiers puet bien c.
[232r]
- Prise de Saincte Severe bien .xiim . ou plus, de noble estorement, gens d’armes souisant et archiers ensement, arbalestriers de pris qui traient soubtilement. Or nous dit la matiere ou nostre livre s’appent que la ville d’Ussel, dont je dy en present, ne fu pas prise lors, je vous diray commant. Un assault y ot fait moult eforceement, et l’eave des fosséz tolue pleinement, et les fosséz rempliz avironneement, et les gros murs minéz et crevéz laidement ; et ja fust prise Huissel de noz françoise gent. Mais ilz furent sourpris de la nuyt tellement c’on it l’assault cesser par tel anuitement. Et quant se vint au nuyt, adont leva le vent et se chanja le temps si merveilleusement que de nege cheÿ tant et si longuement que lendemain au jour, ains prime vrayment, fu de nege .v. piéz et plus, mon escïent. La convint a meschief departir nostre gent, et s’en rala chascun dedens son tenement. De meschief de froit et de fain ensement par voyes, par chemin en moru longuement. Et fu dit des François tout communeement que Jhesucrist, le pere, le roy de fermement, avoit esté Englois celle nuyt proprement.
561 19097 19099 19101 19103 19105 19107 19109 19111 19113 19115 19117 19119 19121
645
[232v]
Ainsi furent François malement destourbé ; pour la nege convint qu’ilz fussent destourbé. Ainsi passa yver, si approcha esté que noz gentilz François se sont touz assemblé, le bon duc de Berry qui tant ot de ierté, et le duc de Bourbon ou tant ot de loiaulté, le sire de Suilly, ou tant maint poesté, cellui de Courtenay qui moult fu renommé, le ber Henry Didier, en armes exprouvé, le viconte d’Aunay, cellui y est alé,
19123 19125 19127 19129 19131
562
19133 19135 19137 19139 19141 19143 19145 19147 19149 19151 19153 19155 19157 19159 19161
- Episodes français -
pluseurs autres seigneurs que je n’ay pas nommé, o le duc de Berry, o son commant alé. Et tant ot le bon duc de barons assemblé qu’ilz furent bien .vim . en armes estofé. Au connoistable avoit le riche duc mandé que a tout son efort, que a Dieu lui a presenté, s’en voit avec lui en Berry la duché. Soudees leur donra tout a leur volunté. Et Bertrant lui manda que ainçois le mois passé lui menra des Bertons si grande quantité qu’Englois dedens Berry n’y aura demouré. Et manda au bon duc, dont je vous ay compté, voit a Saincte Severe, la ait siege levé. Tost lui menera, se dit, noble barné. Point n’en failli Bertrant que je vous ay nommé. A tel heure parti Bertrant le redoubté de France le païs et du noble regné, que puis ne retourna a Paris la cité jusques atant que .x. fors ot pris ou atrappé, tant dedens la Guïenne, dont bonne est la duché, comme dedens Berry, le païs alosé. Or commaince chanson de grant nobleté, de prises, de chasteaux et de maint cité, de batailles, d’estours en plains champs arresté. Tout d’armes et d’amours vous auray recordé. Et de Sainte Severe vous auray devisé, le plus joly assault c’onques fu ordonné, la prise de Poictiers et du chatel senné. Tout quant que avéz oÿ ne vault un ail pelé envers ce que diray qui m’ara escouté. 646
19163 19165
Or escoutéz, seigneurs, pour Dieu de paradis. Istoire vous diray qui est de noble pris. Il est bien verité, si comme dit l’escript, que Bertrant qui estoit redoubté et chiery, adouba des gens d’armes, armés, fersvestys.
- Prise de Saincte Severe -
[233r]
Olivier de Cliçon ne s’i mist en oubly, et Alain de Beaumont et Jehan le faitis, et de Sausorre aussi le mareschal de pris, et le bastart de Flandres, voires, le plus petit, et mains bons chevaliers dont je n’ay mie advis. Bertrant volu commander a grans et a petis que soient apprestéz, ordonnéz et garniz pour aler en Berry le noble païs, droit a Saincte Severe, ou Englois sont porris. La trouverent le duc de Berry au cler vis et le duc de Bourbon a .vim . fervestis. Ainsi fu ordonné, or est l’attort pris, dont mains Engloys seront afoléz et octis. Bertrant parti de Blois, a la voye s’est mis, parmy Saumur passa, une ville de pris, ou ont esté tousjours bon François, par advis. Or ot Bertrant conseil d’aucun noble marchis de Monconteur grever, ou sont noz ennemis. Cliçon en appella qui estoit son amy. Sept cens lances lui volu bailler, ce m’est vis, et lui pria pour Dieu, le roy de paradis, qu’il voyse a Moncontour pour gicter son advis comment Englois porront estre actrappéz et pris. Olivier y ala avec ses subgitz. A l’un baille une tour a senestre partie, a l’autre un pan de mur de pierre bien taillie. A lui ont obeÿ et a sa commandie. Le bon duc de Bourbon ne s’i oublia mie, tost se it bien armer d’armeüre jolie et corru a l’assault avec sa maisnie. Quant au bort du fossé vint le duc chiere lie et voit les assaillans faisans grant envaïe, qui de la muraille eurent mainte pierre sachie et percéz en deux lieux les fors murs de la ville, or voit bien et cognoist que c’est sans moquerie. Eschieles it venir a plenté et a hye. 19182
corr. d’après P : . este toujours este françois p., este supprimé, bon ajouté.
563 19167 19169 19171 19173 19175 19177 19179 19181 19183 19185 19187 19189 19191 19193 19195 19197 19199 19201
564 19203 19205 19207 19209 19211 19213 19215 19217
- Episodes français -
Ens ou foussé entra et sailli d’escueillie. Au pié du mur rampa avec autre maisnie, et la pris a miner d’une picque jolye. Et Bretrant va entour qui ne se failli mie ; voit Bretons et François qui menent chiere lie, qui vont aventurant et cuer et corps et vie. Lors it Bertrant venir la bonne artillerie : archiers, arbalestriers commencent l’envaÿe. Seigneurs, a icellui temps dont je vous signiie c’on commainça l’assault et la grant erramie n’avoit dessus les murs que varlés et maisnie. Les Englois de leens ne se doubtoient mie c’on leur deüst ce jour pourchasser villonnie. Aussi n’eüst on fait, comme l’istoire crie, se la hache ne fust ens ou fossé glacie. 647
19219 19221 19223 19225 19227 19229 19231 19233 19235
Moult fort fu l’assault et longuement duroit. Bien se prouvent François, homme ne s’i faignoit. N’y a prince ne duc qui a l’assault ne voit. Et Bertrant du Guesclin aus Englois si crioit : « Beaux seigneurs, dist Bertrant qui noblement regnoit, de vous tost rendre a nous je croy que sen seroit. Car je vous jure sur Dieu qui tout scet et voit, se par force on vous prent ains que la vespré soit, tout l’or de ce monde ne vous garentiroit que penduz ne soiez comme gloutons maleoit. Vous donnéz destourbier noz seigneurs cy endroit, Et si savéz que c’est contre raison et droit. Et encores vous dy, on vous respiteroit et touz sauve la vie on vous recevroit. Se rendre vous vouléz, tout on vous pardonneroit. » Englois ont respondu si trés hault c’on l’oyoit ja ne se rendront nul jour tant que Dieu soit et que secours aront qui dela approcheroit. Voir est que aus Englois noble secour venoit 19203
corr. d’après P : e. et saisi d’escueillie
[233v]
- Prise de Saincte Severe de mil et .v.C. glaives que le Castal menoit. Et de l’autre cousté autant en approchoit. Je croy que Dieu le pere de son gré ordonnoit que la hache cheït, dont l’assault commainçoit, car ce l’assault n’eüst esté en ce jour droit a perte fust torné, a dueil et a destroit, aval con vous orréz qui oÿr le vouldroit.
565 19237 19239 19241 19243
648
[234r]
Quant Bertrant du Guesclin, le connoistable ber, ot les Englois oÿ qui alerent jurer qu’ilz ne se rendront tant qu’ilz pourroit durer, adont ala Bertrant grant serement jurer qu’il fera renforcer l’assault et redoubler. Adont a commandé les trompectes sonner, les banieres drecier, au vent desvelopper. Et it parmy les loges crier et commander chascun voise a l’assault sur la teste copper ; cellui qui n’a de quoy traier voyse chaillotz gicter, qui a pic ou martel voyse au mur miner, et encontre les murs les eschieles lever. Qui dont vist François d’assailler apprester, et ces fortes eschieles encontremont lever, et ses pierres de fays dessus François gicter, et tonnelles c’on it de bons chaillos raser, et grant baucs c’on ot fait des forests amener, qui dont vist noz gens cheoir et souviner, et ravaler aval et tousjours redouber, malvaisement cuidast ne ne puët penser qu’il ne les convenist des membres afoler. Mais ilz furent arméz a loy de bachelier, c’est ce qui leur aidoit ce grant fays aporter. Et le bon cuer qu’ilz ont de grace recouvrer c’est ce qui les faisoit tantost sur piéz lever. Femmes y ot legieres, c’on ne doit oublier, qui servirent ce jour François d’abevrer ; 19268
t. sur piéz relever, re exponctué.
19245 19247 19249 19251 19253 19255 19257 19259 19261 19263 19265 19267 19269
566 19271 19273 19275 19277 19279 19281 19283 19285 19287 19289
- Episodes français -
mais ce ne fu que d’ayve dont le ruissel est cler. La ot ung homme d’armes qui faisoit a loer, qui dist : « On deüst bien a cel heuvre mener boyre du meilleur vin dont on peüst iner, car le bon vin fait homme a ardement parer. » Bertrant du Guesclin va ce mot escouter. A noz François ala maintenant escrier : « Avant, mes bons amis ! Penséz de labourer. touz riches vous feray avant souleil coucher. De bons vins vous feray servir et conraer. » Son eschançon ala lors Guesclin appeller et lui a dit, enjoinct et commandé sans tarder qu’il face de bon vin a plenté amener, et face les tonneaux dessus le bout lever, et touz les assaillans face bien abevrer. S’il fu dit il fu fait, tantost sans arrester. Et quant noz François eurent beü de ce vin cler, lors furent plus hardy que lÿon ne sengler. Et enforça l’assault et it a redoubter. Oncques de tel assault n’oÿ nul homs parler. 649
19291 19293 19295 19297 19299 19301 19303 19305
Moult fu grant l’estour et ier et desloiaux. Je croy que nul jour ne vit homs ses paraux, car aussi dru que nege chiet sur les arbricheaux voloient virectons, leches et quarreaux. Au pié du mur traioient arbalestriers isneaux, et Englois leurs gictoient pierres et carreaux, et gictoient sur eulx tonnelles et grans baux. Et en aprés boutoient les pierres des creneaux tant que tout aonny estoient les muraux. Et noz gens d’armes irent dedens les murs grans tros, assez grans pour entrer et vaches et cheveaux. Souvent entroient ens et vieulx et juvenceaux, mais on les repoussoit par merveilleux debaux. Englois gictent sur eulx potons de vive chaux, et puis eave bouillant et mortiers et petaux.
[234v]
- Prise de Saincte Severe Encores irent plus les Englois criminaux : fain et ieurre qu’ilz ont leens a grans monceaux aportoient la droit et lioient par boteaux, puis y boutent le feu qui fu ardant et chaux, et les boutent es tros des grans murs principaux ; et si gictent aussi grans embraséz barreaux. Ce jour irent François endurer mains de maulx. Tel y ot qui laissassent volunters les assaux. Mais Bertrant en jura, oient touz les plus baux, qui sans estre blecié retournera es praiaux encroer le fera plus haut que une saux.
567
19307 19309 19311 19313 19315
650 Forte fu la defense que Englois irent ce jour, et on les assailli a force et a vigour. Richement s’i porta le peuple emperour. Oncques ne s’i faigny prince ne contour : l’un minet aus murs, l’autre a une tour, le tiers ot une eschiele faisant le rampeour. Et vont sur les creneaux a force et a vigour combatre main a main a loy d’emperour : l’un est avalé ens ou foussé grigneur, et l’autre se tient par force de valour sur touz les assaillans qui la furent ce jour. L’abbé de Malepaie y fu de grant valour ; mina moult ierement le mur anciseour c’un trou y it plus grant que la goule d’un four.
19317 19319 19321 19323 19325 19327 19329
651
[235r]
L’abbé de Malepaie ne si est arresté. Tellement fu le mur par la force miné que deux hommes de front y fussent bien entré. Maintenant fu l’abbé dedens le four bouté quant il fu des Englois malement repoussé. Lors escria « Berry et Guesclin. Ça venéz. Véz cy le droit chemin par ou serons entréz. » 19332
corr. d’après P : t. fu le jour par la f.
19331 19333 19335 19337
568
19339 19341 19343 19345 19347 19349 19351 19353 19355 19357 19359 19361
- Episodes français -
Atant est venu gens d’armes a touz léz. Et quant les vit venir l’abbé dont vous oiéz, en lui prist hardement et vigour et ierté, ou trou qu’ilz avoient fait c’est maintenant bouté. Main a main se combat aus Englois aduréz, d’un bon espoy qu’il tient les a si repousséz qu’ilz se sont mal gré eulx arrieres reculéz. « Par Dieu, dist il, de male mort morréz qui contre les roiaux ceste ville tenéz a tort et sans raison, pour ce le comparéz. » Se dient les Englois : « Voir, vous y mentiréz. Se vous entréz ceens, de male mort morréz. » Et ja fust Malepaie dedens la place entré, quant d’une hache fu tellement assené qu’il fu enmy le trou abbatu et tombé, et fu son bacinet en son chief embarré. Et quant Englois perceurent que la fu semonné, par un pié l’ont saisi ; la fust il bien mené, quant de noz François fu ce fait advisé. A l’abbé sont venuz, Malepaie nommé, par les brafs l’ont saisi et le chief levé, et tirent contre Englois par moult grant ierté. Et d’un cousté et d’autre fu tellemment tiré que petit n’y failli que ne fust desmembré. 652
19363 19365 19367 19369
En ce point dont je dy tirerent longuement. Et d’un cousté et d’autre combatent ierement. Et tant irent François par leur eforcement qu’ilz ont l’abbé rescous a leur commandement.* Et lui ont deslacié le bacinet present pour le rafreschir, car la chanson m’apprent car le temps estoit chaut et le souleil resplent. Et quant fu rafreschi l’abbé a son talent 19367
l. rafreschir p car l., p exponctué.
19365
corr. d’après P : o. l’abbé rescours a l.
- Prise de Saincte Severe -
[235v]
et il ot beü un cop de ce vin qui bon sent, son bacinet reit lacier appertement. Et jura Damedieu qui maint ou irmament, qui ailleurs ira miner et si trés grandement que Englois en auront le cuer triste et dolent. Lors ala plus avant et a miner se prent. Et d’autre part y ot grant noyse et grant content, au lieu ou les Bretons assaillent ierement. Ja avoient miné tant et si longuement qu’ilz combatent Englois main a main en present. « Dieu, dient Beruiers, Bourguignons ensement, ceulx Bretons en auront l’onneur certainement, se nous ne nous hastons. Ferons y leement. » Adont vont assaillir Berruier en present. La veïsséz assault et merveilleux content, sur eschielles monter celle françoyse gent, combatre main a main aus crenaux proprement. Les aucuns se tenent bien, par force de juvent, les autres sont ruéz ou fossé laidement.. Ainsi en plusers lieux assaillent noz gens Et Englois ont monstré moult fort defendement ; mais tout ce ne vailli .i. seul denier d’argent, car on leur a navré grant plenté de leur gent, et leurs grans murs percéz en .xx. lieux laidement. Si n’ont mais que gicter pour defendre present. Tout avoient gicter trés le commaincement. Si eurent fait aporter des mortiers plus de cent, et despaver aussi grant part du pavement. Et adont s’avisa leur cappitaine gent comment feroit cesser l’assault et le content. Ou que il voit Bertrant, si lui dist aultement : « Je vous pri que je soie entendu plainement de ce que je diray oyant touz en present. Et si faictes cesser et acoiser vo gent tant que dit vous auray mon fait tout pleinement. – Sire, se dist Bertrant, parléz hardiement. 19394
corr. d’après P : o. mais gicter p., que ajouté.
569
19371 19373 19375 19377 19379 19381 19383 19385 19387 19389 19391 19393 19395 19397 19399 19401 19403 19405
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19407 19409
- Episodes français -
Bien vous entendray, ne vous doubte noient. Car, foy que doy a Dieu, ne au corps saint Clement, l’assault ne cessera ja pour vostre parlement, se dire ne vous oÿ : “Vostre voloir me rent”. » 653
19411 19413 19415 19417 19419 19421 19423 19425 19427 19429 19431
Richart Gilles qui fu de leens cappitaine en jura aultement la vertu souveraine qu’ilz ne se rendront de l’an ne de sepmaine, tant qu’ilz aient chaillots ne pierre en leur dommaine. Quant la ville perdront, c’est leur entente pleine qui’lz iront en la tour faire une quarantene, et en la basse court qui de biens estoit pleine. Mais toute leur pensee estoit malvaise et vaine, car bien brief entreront en doleur et en paine. Cellui de Malepaie forment de ce se penne. Au grant mur du chastel minoit a grant alaine, non pas d’un coutellet tel c’on met en sa gaine mais d’un pic asseré c’on forga en Touraine. A ce grant mur minoit, tellement se formenne qu’il y fu estendu, ce dit, a une vayne : un tel trou y a fait par puissance aultaine c’on y eüst bouté le chief d’une balaine. Quant il ouste un chaillot, .ix. ou .x. en amaine. D’autre part vit du fain une grange moult pleine. A sa voix qu’il avoit plus haulte que seraine demanda lors du feu et jura saint Helayne : « Cy boutray le feu, ce soit a bonne estraine. » 654
19433 19435 19437
Du feu a demandé l’abbé de Malepaie tout pour bouter le feu en celle ville gaie. Et jura Damedieu et l’arme de sa taie ja n’en aura pitié, se dit il, ne s’esmaie. Du feu lui apporta Baudoyn de Vinaie. Et l’abbé le bouta ou trou dedens la raie. 19436
f. lui aba apporta B, aba exponctué.
[236r]
- Prise de Saincte Severe Quant Englois ont veü comment abbé les paie, du fain a destasser chascun moult bel s’arroye pour restraindre le feu qui forment les esmaie. Chascun voussist adont estre en pure la braie tout droit en Avignon, que jadis tint Dam’Aie.*
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19439 19441
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[236v]
Dolans furent Englois, ce pouéz bien penser, quant ilz virent le feu encontremont lever. Assez en y ot d’ars qui convint deiner. Et a celle heure droit que le feu volu monter, volurent noz François d’autre costé entrer. Les aucuns par les murs se vont dedens bouter, et par eschielles vont plus dru amont ramper, et courent sur Englois, ou n’ot que expaonter. Quant Englois ont veü qu’ilz ne peurent durer, vers la grosse tour vont pour leur vie sauver. Et François vont tantost la porte desfermer, les banieres roiaux vont sur les murs poser, « Ville gaignie ! » vont criant ault et cler. Et noz gens entrent ens pour Englois atrapper, tout mectoient a mort quant qu’il peurent trouver : qui ne prie mercy a eulx ne puet durer. Ceulx de la tour cuidoient noz gens contrester, mais le vent fu contre eulx et prist fort a venter. La fumee s’en va en la tour ault monter, et par ce point ne peurent leens Englois durer. Ne sçay que vous vouldroie longuement sermoner. Englois se sont renduz, ne pouent reculer. Leens y ot pillars qui irent a blasmer, faulx Berruiers qui volurent le duc adosser et servir les Englois pour piller et rober. Et maint bany aussi pouoit on la trouver. Bertrant les it touz lïer et actouppler, et puis si leur a dit pour les reconforter : « Par saint Yves, dist il, c’on doit bien aourer, mais ne vouldray de pain ne de vin avaler,
19443 19445 19447 19449 19451 19453 19455 19457 19459 19461 19463 19465 19467 19469 19471
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- Episodes français -
si vous vouldray touz a un arbre encroer. » 656
19475 19477 19479 19481 19483 19485 19487 19489 19491 19493 19495 19497 19499
Ainsi Saincte Severe fu prise et conquestee. Maintes nobles richesses fu la dedens trouvee, de blez et de vin y ot grande maree, et de lars en larder et de leur buletee, joiaux, or et argent et monnoie doree, bacinés, haubergons et mainte bonne espee. Et de draps y avoit mainte pille enpillee, et de lange et de linge mainte huche comblee. On a le feu restraint, la chaleur est passee. Les oustes furent pris de noz gens louhee, cerchie fu la tour, ouverte et desfermee, la cappitaine aprés, a qui qu’il desagrée. Le bon duc de Berry, a la chiere menbree, et le duc de Bourbon, a la iere pensee, furent bien hostelléz en la ville louhee ; aussi furent touz de celle asemblee. De telz y ot qui ont la souppe ou vin combree et beü une foy de la bonne vinee. Touz les seigneurs ont beu comme il leur agrée, mais Bertrant ne beu pas, la souppe a refusee. Dont au duc de Berry malement desagrée. « Bertrant, se dist le duc, par la Virge louhee, que ne prenéz le vin, j’en ay la teste enlee. Doubtéz vous que vostre char ne soit cy enherbee ? – A, Sire, dist Bertrant, sauve vostre pensee. Mais j’ay vouhé huy un vou en ceste jornee, se de moy est faussé, l’ame en sera faussee. » 657
19501 19503 19505
« Sire, se dist Bertrant, par le Dieu de lassus, j’ay louhé et juré au doulx pere Jhesus que mais ne mangeray ny ne beray ou sourplus, si seront ces pillars octis et confondus qui vous ont relenquy pour vous ruer jus,
[237r]
- Le Castal rencontre les Anglais vaincus et par leur fausseté sont Englois devenuz. » Dist le duc de Berry, : « Or ne m’en parléz plus. Faictes les encroer comme felons parjurs. N’en prendroie l’or qui fu au roy Artus. » Et quant Bertrant l’entend, léz est devenuz. De pages et vallés appella .C. ou plus. De cordes qui la sont furent bien pourveüz. Les pillars renoiéz leurs a livréz touz sus, qui touz soient menéz dessus les préz herbuz dehors la porte droit, sans faire autre argus, a l’arbre qui la fu qui moult estoit feillus, soient touz penduz sans .i. jour de refus. « Sire, dist un varlet qui ot nom Portus, nous les deppouillerons, les pendrons touz nus. Meulx vault les draps que les aions que pourrissent lassus.* – Il me plaist moult trés bien. » dist Bertrant le membrus. La ot bien .C. bourreaux de nouveaux devenuz.
573
19507 19509 19511 19513 19515 19517 19519 19521
658 Les François renoiéz furent a la mort mis, a un arbre penduz en y ot cent et dix. Et ceulx qui d’Engleterre furent néz et norris, si furent a rançon retenuz et pris, et ceulx qui furent mors furent en terre mis. Assez y ot de femmes et de enfens petis qui on donna congié d’aler en leur pourpris. Pitié fu a voir les plaintes et les cris. Laiens mist garnison le bon duc de Berry, et refaire les murs et touz les ediiz. Puis partirent de la les barons seignoris, vindrent en l’abbaÿe, enmy les boys fueillis. A troys lieues estoit l’abbaïe que je dis d’une ville fermee qui est de noble pris : ce est la Sousterrine ou il a murs assis. En icelle abbaïe, ou il a lieu jolys, reposerent trois jours noz Françoys poestis. 19535
t. lieues estoient l., -ent exponctué et t suscrit.
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19541 19543 19545 19547 19549 19551 19553 19555 19557 19559 19561 19563 19565 19567 19569 19571 19573
- Episodes français -
Tant dehors que dedens le lieu leur fu petis. Un petit vous lairray des barons aggensis, diray du Castal de Beuf qui fu hardy, qui d’Anglolesme fu sevré et departy, a grant foison d’Anglois et d’armes bien garnys, deux mille bacinés estoféz a devis, et bien .vc . archiers, de trayre ameneïs,* et si en atant pluseurs qui venent aatis. Envers Saincte Seraine avoit son chemin pris pour le siege lever de noz François gentilz. Comme le Castal avaloit un larris, encontra Englois qui estoient partys, qui a Saincte Seraine eurent esté marris. Si furent rançonné et a inance mis. Or s’en vont sur leur foy querrir argent en leur païs. L’un estoit navré en l’espaule ou ou pis, l’autre ot un euil crevé, dont il vault pis, le trés avoit le brafz a la touaille mis. N’ont espoie ne espois, ne haubergon treillis,* et de tous leurs bons draps ilz furent devestiz. Si estoient en ce point plus de .lxvi.. Quant du Castal furent sur les champs choisi, a ses gens le monstra et a dit son advis : « Et quelx gens sont ce ça, pour Dieu de paradis ? » Lors broche le cheval des esperons massis, aus Englois est venu qui furent appouvris. Si a dit le Castal qui moult fu seignoris : « Seigneurs qui estez vous ? Quel gent ? De quel païs ? Je croy que vous venéz d’aucun ier pongneïs, ou vous avéz passé les fourests de l’Anis,* ou les bestes sauvages vous ont fait ces despis. – Sire, dist un Englois qui ot nom Ansseïs, nous avons biens trouvé .iim . lïons gris, qui vous querent partout et de jour et de nuyt. Et sont ces grans lÿons par un aigle conduitz 19558 19570
corr. d’après Nh : n’on espoie n. corr. d’après P : b. sauvages vont ont f.
[237v]
- Le Castal rencontre les Anglais vaincus qui mene les lÿons en bataille, en estris. Riens ne dure contre eulx, tour ne chastel de pris. Comment rat en grenier rampent les murs massis. Raléz dont vous venéz, si vous estez soubtilz, se des biens ne vouléz telz c’on nous appartiz. »
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659 [238r]
« Dieu, dist le Castal, Pere espirituel,* or ont Engloys perdu un moult riche joiel car a Sainte Severe avoit ville et chastel, fousséz aparfondiz, les murs faiz a cisel et noble garnison de peuple moult isnel, gens d’armes et archiers qui traient de quarrel, tant noble richesse et tant noble joyel. Or avons tout perdu par ce felon oisel. Cest aigle cy nous donne un malvait cop mortel. Aussi it il jadis, par devant Cocherel : de son bec me fery assez prés du forel. Et puis me it mener devant un lïoncel qui de couronne fu coronné bien et bel. Moult me porta d’onneur par dedens son hostel. Mais mectre me it puis par dedens un bovel en une noble tour ou il a maint crenel. Se cel aigle tenoie qui brassa ce chaudel, en tel cage seroit mis ains le caresmel. De cest an n’iroit mais voler sur l’abrissel. » Lors actendy Englois delay .i. boquetel. Son conseil assembla et leur dist de nouvel la perte, le meschief, le doleureux meisel que pourchassé leur ont noz François isnel. – Sire, dist un Englois c’on appelloit Mansnel, de ce que en fera on quant il ne puet estre el ?* Il ne fault que viser, par bon conseil roiel, ou on pourra trouver François et Provencel, et penser c’on leur puisse abatre leur revel. 19592 19602
bel exponctué entre coronné et bien. n. leur le ont n., le exponctué.
19581 19583 19585 19587 19589 19591 19593 19595 19597 19599 19601 19603 19605 19607
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19609 19611 19613 19615 19617 19619
- Episodes français -
Je vous jure sur Dieu qui ja forma Abel, qu’ilz iront assegier en menant grant retel La Sousterrine, voir, ou il a maint crenel. – C’est voir, dist Castal, foy que doy saint Michel. » Lors it sonner sa trompe et son riche moinel. Son ost it arrouster contreval le preel, les banieres drecier et mains bel penoncel. Envers La Sousterine vont brochant maint morcel. A trois lieues en furent noz François isnel, dedens une abbaïe qui fu ou bouquetel. Un de leurs chevaucheurs, c’on appelloit Morel, a noz François dira ja bien tost de nouvel. 660
19621 19623 19625 19627 19629 19631 19633 19635 19637 19639 19641
Le gentilz messagier, dequoy nous vous disons, s’ala agenoiller par devant les barons, le bon duc de Berry et le duc de Bourbon, et Bertrant du Guesclin, le connoistable bon. La y ot mains barons, que point ne nommerons ; devant eulx le message se mist a genoilllons. « Seigneurs, dist le messages, oiéz que nous dirons. De Guïenne reviens, si ay passé vaulx et mons. En Angolesme fu, ou il a grant maisons. J’ay donné a entendre femmes et enfançons que de Saint Jacques viens acquerrir les pardons. J’ay veü des Englois les grans establissons : ilz sont .M. et .vc . a bacinés reons, et bien .vc . servans arméz a bandons, et .iiiic . archiers, point meilleurs ne savons. Le Castal les manie qui tant parest ier hons. Et si en atent .viic . a doréz esperons, Bourdelois, Baionnois qui sont iers que lÿons. C’est l’entente aus Englois, ja ne le celerons, de bataille livrer François et Bourgoignons. Aiéz sur ce conseil, car il est bien besoign. – Hé, Dieu, se dist Bertrant. Véz cy bone raison. N’en vouldroie tenir tout l’or de Chaalon :
[238v]
- Conseil des Français avant la bataille si plaist a Jhesucrist, nous les actendron. » Dist le duc de Berry : « Nous nous y actordons. » Dist le duc de Bourbon : « Ce conseil cy est bon. » Dist Bertrant du Guesclin : « Or oiéz mes sermons. Une chose ay visee, que cy nous vous dirons. Se croyre me voléz, ja pis nous n’en vauldrons. »
577 19643 19645 19647
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[239r]
« Seigneurs, se dist Bertrant, a ce que je voys cy, nous aurons briesment la bataille et l’estry. Englois actendray, si plaist a saint Remy. A Bourges s’en ira le bon duc de Berry. Et le bon duc de Bourbon, que Dieu gart de peril, reyra en Bourbonnois le païs agensy. Mais noz gens nous lairront les princes seignory, pour bataille livrer o nous demourront cy. Et aprés cel estour, la bataille et l’estry, reviendront les seigneurs o nous, je les en pry. La Sousterine irons assegier sans detry. Et quant prise l’arons, si irons a Chauvigny, et dela a Poictiers, se Dieu l’a conscenty. A nous se redront ou ilz auront l’estry. » Quant les ducs ont oÿ Bertrant au corps gentilz, si lui ont respondu chascun comme pour luy : « Bertrant, par saint Symon, vous tenéz pou de my. Ne vous laisseray je, ne de moy ne de my. Se la bataille avéz, je m’esteray enmy. – Seigneurs, ne vous ennoye, Bertrant leur respondy. J’ay autre tour visé, se j’en puis estre oÿ, dont vous verréz Englois courroucéz et marry. »
19649 19651 19653 19655 19657 19659 19661 19663 19665 19667 19669
662 « Seigneurs, se dist Bertrant, j’ay autre tour visé. Je croy trop bien que Englois sont ensemble trouvé, de bataille livrer se sont entre eulx vanté. Mais ce fait ne nous ont tramis ne mandé : 19664
Une lettre est cancellée devant comme.
19671 19673
578 19675 19677 19679 19681 19683 19685 19687 19689
- Episodes français -
si n’en pouons savoir toute leur volunté. Si nous les actendons tout droit cy arresté et ilz s’en vont ailleurs pour faire tout leur gré, pour mectre garnison parmy leur fermecté, par dedens Chauvigny le noble herité, et par dedens Poictiers la noble cité, ainsi seroions nous bien deceüz et trompé. S’il entrent a Poictiers tout a leur volunté, de cest an n’en sera le roy Charles doué. Je lo que vistement soions decy sevré, envers Poictiers alons et main et avespree, conquerant le païs et du lonc et du lé. Se le Castal vient, il soit le bien trouvé. Bataille liverrons quant il aura mandé. Mais au devant irons, si on fait ma volunté : qui prent premerement, premier est assenné. » 663
19691 19693 19695 19697 19699 19701 19703 19705 19707 19709
Au conseil de Bertrant s’actorderent les barons. Les trompes font sonner d’argent et de leton. Lors s’esmeurent François entour et environ. La veïst on trousser mains mulletz d’Arragon et trousser mains sommiers et ploier maint penon. Vont s’en sur les champs noz François a bandon, moult furent nobles gens, de noble establisson. Bien furent rafreschyz tout a leur division. Et eulx et leurs chevaux ne sentent se bien non, car ilz orent trouvé en l’abaïe de nom pour eulx et leurs chevaux mains noble garnison. De vivres ne laisserent la monte d’un bouton, de quoy les moynes gris distrent mainte oroison en priant que François aient maleïçon. Assez y en avoit en celle regïon qui avoient en eulx telle condicïon qu’ilz eüssent plus chier en leur entencïon que ceulx qui ennemy furent du roy Charlon eüssent du leur pris une grande parçon
[239v]
- Visite des Français à Anglé que François seulement en eussent un bouton. Et distrent l’un a l’autre : « Par les sains d’Orïon ! Noz Françoys devroient garder la regïon, et ilz vont tout pillant, vaches, beufz et mouton. Et si prenent l’argent du roy de riche nom, si venent sans paier la monte d’un bouton. Envers Dieu et le roy et nous font mesprison. » Ainsi vont les aucuns disans mainte raison. De noz Françoys diray qui sans arrestison quatorze lieues grans chevaucherent adont. Sans boyre ne manger, ne les chevaux gascon, vindrent a un chastel qui estoit de grant nom, qui Anglé fu nommé en celle regïon.
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19711 19713 19715 19717 19719 19721
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[240r]
Tant sont alé Françoys qu’a Anglé sont venuz. Bon chastel y avoit et trés bien pourveüz, en Poictou fu assis prés d’un boschet menu, place, ville y avoit, ains fermee n’y fu. En celle ville sont noz Françoys descenduz. La se sont rafreschy, si ont mangé et beü. Sur un cheval monta Bertrant au corps molu. Devant la porte droit au chastel est venu. Aus creneaux du chastel le cappitaine fu. Si tost qu’il vit Bertrant, si lui it bel salu, et lui a dit : « Bertrant, bien vous ay cogneü, car autrefoiz vous ay, se me semble, veü. Il est bien verité, ja n’en seray tenu, qu’au bon duc de Berry au gent corps esleü, avons pris un actort, voyres, par tel argu que cy tost que Poictiers sera a lui rendu, les clefz de ce chastel aura et le tru, ainsi comme autrefoiz il les a receü. Par son conscentement ainsi ordonné fu, pourtant ne nous doit on pas grever d’un festu. – Sire, se dist Bertrant, n’aiéz paour eü. Nous volons bien tenir et bien sera tenu
19723 19725 19727 19729 19731 19733 19735 19737 19739 19741 19743
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- Episodes français -
ce qui est actordé du riche duc cremu. Mais paier vous convient ce que auray despendu. Et si tantost n’est fait, foy que doy a Jhesu, encores nuyt seréz touz pris et pendu. » 665
19749 19751 19753 19755 19757 19759 19761 19763 19765 19767 19769 19771
« Cappitaine, dist Bertrant, savéz que vous feréz : vous avéz la dedens des vivres a plenté, et le bour ça dessus est tout desrobé ; pour or et pour argent des vivres nous donnéz, et du vin de Poictou, dont vous avéz assez. Et s’il n’est ainsi fait, vous en reppentiréz. » Se dist : « Sire, Bertrant, ja plus ne vous troubléz. Envoiéz des sergens et des vallés plenté et vous auréz des biens tant comme vous en vouldréz, car nous sommes garny jusques a un an passé. – Seigneurs, se dist Bertrant, point tant n’y demouréz. Se Poictiers ne se rent, briesment vous reverréz. » Ne sçay que vous en soit nul long plait devisé. A vivre ont noz gens a plenté et assez. En haste ont reppeü, la se sont desjunéz, puis sont dela party, si sont acheminéz. Et tant ont exploicté noz barons naturelz qu’ilz virent Chauvigny, ou il y a bons fosséz. Bonne ville y avoit, se dit l’auctorité, et quatre grans chasteaux, se dit l’auctorité. Quant Françoys ont veü les chasteaux garitéz, si distrent bellement l’un a l’autre secret : «A, Dieu, Ou sommes nous aujourduy arrivé ? D’un malvait pas venons et en pire entré. » 666
19773 19775 19777
Ainsi dient Françoys ; assez en y avoit aucuns qui oncques mais ne furent la endroit. Le bon duc de Berry Bertrant en appelloit : « De ses .iiii. chasteaux, que veéz la endroit, qui un trés bon visage bien tost leur monstrerroit,
[240v]
- Prise des quatre châteaux de Chauvigny je pense bien et croy chascun se rendroit. Le premier, le second et le ters ont malfait, que grever ne les doys ne faire nul destroit, car l’autre foy y fu a moult noble conroy. Touz les troys cappitaines qui sont de bel arroy, me eurent en convenant chascun obeÿroit a moy aussi avant, comme Poitiers feroit. Or n’ay je pas Poictiers, on le scet et voit, pourtant clamer ne puis nulle riens cy endroit. » Lors jura Bertrant Dieu qui hault siet et tout voit, que touz les trois chasteaux et le .iiiie . auroit, et la ville ensement qui bien fermee estoit, ançois qu’il parte mais, se dit, dela endroit. Adont s’en est monté dessus un palefroy, de nostre ost se party qui prés dela estoit. A la porte s’en vint de la ville tout droit. Le cappitaine ala appeller ault et roit. Et on lui demanda qu’il querroit la endroit, que touz les .iii. chasteaux son nom lui demandoit. « C’est cellui, dist Bretrant qui pou craindre vous doit. »
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667 « Seigneurs, se dist Bretrant, savéz que vous feréz : au bon duc de Berry ceste ville rendéz. Se vous le refuséz, touz destruiz en seréz. Et touz les chasteaux dont estez enserréz se sont a lui renduz et du tout actordéz, si que encontre le duc durer vous ne pouéz. Se par force vous prens, vous seréz acoréz. » Se dist le cappitaine qui ault estoit monté : « Qui estez vous, dist il qui ainsi vous vantéz ? – Par foy, se dist Bertrant, du Guesclin suis nommé. » Se dist le cappitaine : « Vous soiéz bien trouvé. Faictes venir le duc et son conseil privé. Puis qu’ilz ont les chasteaux et qu’ilz ont fait ses gréz, la ville liverrons tout a ses voluntés. – Par ma foy, dist Bertrant, bien estez advisé. »
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- Episodes français -
Bertrant envoia querrir le duc dont vous oyéz, qui est a son vouloir a Chauvigny entré. La ont noz François touz les bons hostelz, prindrent la souppe en vin noz seigneurs naturelz. Puis vont par les chasteaux autour de la fondéz. Et tellement les a Guesclin fort sermonnéz que des quatre chasteaux les .iii. sont demouréz, au bon duc de Berry apporterent les clefz. Au .iiiie . chastel vont noz barons notréz. A l’evesque de Poictiers fu le chastel louhé. Fort estoit et puissant et moult ault eslevé. Aus bailles vint Bertrant et dist : « Ouvréz. Ouvréz. Leans nous fault entrer, soit bon gré ou mal gré. » Le cappitaine qui fu aus creneaux ault monté en appella Bertrant et lui dist tout souëf : « Sire qui estez vous, se demanda le bers senné, qui vouléz si en haste estre ceens entré ? Bien y porréz entrer plus tost que ne vouldréz, car sur vous istrons, se bien tost n’en aléz. Cuidéz que monseigneur, l’evesque naturelz, ne sache mie a qui son fort sera livré ? N’a chastel meulx garny en .xl. citéz, de pain, de vin, de char et de sel et de bléz. Si est monseigneur puissant et riche et membré. N’obeyra au pape, si ce n’est bien son gré. Car assez est puissant et riche et renté pour ses chasteaux tenir et main et avespré, contre touz ceulx de qui pourroit estre grevé. –Sire, se dist Bertrant qui de dueil fu enlé, je pri Dieu que en enfer soient touz ceulx dampné qui tant ont enrichy evesques et abbéz. Ilz ne deüssent mie avoir telz fermetéz, n’estriver aus seigneurs dont ilz furent fondéz, ne tenir ne deüssent de temporalitéz, les iez ne les honneurs des seigneurs trespasséz, ne les grans bailliages, ne les grans prevostéz de quoy homme nul y fust a la mort livré. Oncques ne fu ce fait de Jhesu ordonné.
[241r]
- Prise des quatre châteaux de Chauvigny -
[241v]
Je ne veil mie dire que le clergié senné ne doivent estre bien pourveüz et renté pour avoir a vestir et pour manger assez et Jhesucrist servir de bonne volunté. Se touz les nobles princes terriens et chazés ouvroient a mon gré, par sainte Trinité, telz ouvrages seroient abatuz de touz léz. » Se dist le cappitaine : « Vous les abatréz et mectré tout jus quant saint Pere seréz. »
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668 Quant Bertrant entendi cellui qui le mocqua, moult dolant fu au cuer, de ce ne doubtéz ja. A aulte voyz lui dist : « Mal ait qui vous porta. Par force seréz prins, ou on se rendra. Et se tenir vous puis, voir, on vous pendra. » Atant y est venu l’evesque qui parla, demande au cappitaine a qui il estriva. Le cappitaine lui dist comment la chose ala, la demande Bertrant et tout quant que dit a. Bertrant s’en retournoit qui moult se courrouça, mais l’evesque gentilz maintenant l’appella, et le it retourner et moult s’umilïa. A Bertrant devisa et son nom demanda. Et Bertrant son estat lui dist et recorda que connoistable fut de France par deça. Et ens ou nom du roy le chastel demanda qu’il le mecte en la main du bon duc qui fu la. Quant l’evesque l’oÿ, sauf conduit demanda, car voluntiers, se dist, au bon duc parlera. Adont ot sauf conduit, bien fu qui lui donna. Au bon duc vint parler et moult s’umilïa. Et sachéz de certain plus doulcement parla que le portier a qui Bertrant tant estriva. De deux rouhes, la pire c’est celle qui brayra. 19866
corr. d’après P : c. a quil il e.
19861 19863 19865 19867 19869 19871 19873 19875 19877 19879 19881 19883
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- Episodes français 669
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L’evesque gentilz qui moult savoit d’onneur, au bon duc de Berry monstra assez d’amour et lui a convenant, sur Dieu le createur, que aussi tost que Poittiers, la cité de valour, obeyra a lui sans penser nul faulx tour, de tout ces chasteaux, ou il ot maint atour, lui baildra les clefz sans penser a folour, car a la lour de lis du bon païs françour lui retraioit le cuer, se dist et nuit et jour. Joieux en fu le duc, aussi sont les seigneurs. En son chastel rala l’evesque d’onneur. Aus seigneurs envoia du bon vin du meilleur. Et quant Bertrant si sceu des besoignes l’atour et qu’ilz sont au dessus des chasteaux de valour, les seigneurs appella et dist en sa clamour : « J’ay oÿ recorder et dire par maint jour c’on ne puet les pastéz prendre en leur chalour que en l’eure proprement c’on les sache du four. » 670
19903 19905 19907 19909 19911 19913 19915
« Seigneurs, se dist Bertrant qui tant fu naturau, on doit batre le fer entreulx qu’il est bien chault. Et je le dy pourtant, gentilz prince loyau, que bon feroit aler a Poictiers les grans saulx demander la cité aus bourjois naturaux. S’ilz ne obeïssant tost, si leur faisons assault car si Englois ains que nous y prenons les houstaux, ains que jamais l’ayons nous fera mains travaux. Ce jour d’uy est a nous, mais ne nous viendra mal. Bonne ville huy avons conquise sans default, et les hommages prins de quatre bons chasteaux. Or alons a Poictiers, la cité principaux. Si nous ne l’avons ennuyt, ains qu’esconsse soilaux, j’octroie que je soie encroé a un baux, car le cuer me dit bien huy ne nous viendra maulx. »
[242r]
- Prise de Poictiers -
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[242v]
Au voloir de Bretrant se sont touz actordé, le duc et les barons, le prince naturé. Et s’en vont a Poictiers courant et abrivé, baniere desploie, a mains penons levé, le bacinet ou chief et l’espee au cousté, et la lance en la main, o le fer aceré. Les gens de ce païs sont a Poictiers alé et vont criant : « Traÿ. Nous sommes touz iné. Véz cy touz ceulx qui ont Chauvigny conquesté, et les chasteaux saisiz, receü feaultés. » Les bourjois de Poictiers, quant ce ont escouté, la porte vont fermer qui fu de ce cousté ; n’y ot que le guischet par ou on soit entré ens ou manoir qui fu par la ville ordonné. Se sont les bourjois léz la ville assemblé. La furent au conseil comment sera ouvré, se contre noz François auront resisté, ou s’ilz rendront la noble cité. La y ot, se creéz, mains parlers retorné. La y ot un bourjois, c’on nommoit Ysoré, qui a dit aus bourjois : « Entendéz mon pensé. Qui la ville rendra a François de bonté, je dy que envers le prince sera parjuré, car au prince avons fait hommage et feaulté par le commandement du fort roy couronné qui au prince nous a par vray actort livré. Aviséz vous sur ce, j’en ay dit mon pensé. –Sire, se respondy un bourjois Fouqueré, il est bien vray que au prince, ou tant a de feaulté, fusmes du roy de France baillé et delivré, par telle condicion que le prince notré et le roy Edouart qui tant ot de ierté, devoient l’ordonnance tenir en seürté, ainsi comme en la paix il estoit ordonné. Et ilz n’en ont tenu la montance d’un dé, ains ont tout le statu despecié et faussé
19917 19919 19921 19923 19925 19927 19929 19931 19933 19935 19937 19939 19941 19943 19945 19947 19949 19951
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- Episodes français -
et ont sur les François si avant enjambé : qu’ilz ont vers eulx mespris, il est tout aprouvé. Et puis qu’ilz ont mespris et qu’ilz ont meserré, on ne leur doit tenir ne foy ne loiauté. Je lou que ces Englois soient touz hors bouté, et au duc de Berry nous serons actordé, car un proverbe dit, par vraye auctorité, nature fait tracer le cerf ou bois ramé. » 672
19961 19963 19965 19967 19969 19971 19973 19975 19977 19979 19981 19983 19985 19987
Aprés parla un autre, c’on appella Helie. Dist le noble bourjois : « Par la virge Marie. De rendre la cité je ne desloe mie, mais mains Englois y a par la cité jolye, qui ont vescu o nous et main et anuytie et se ient en nous sans nulle tricherie. Et les avons trouvé bons en ceste partie, sans nous a confesser d’une pomme pourrie, ne sans subvencïon avoir sur nous aussie, ne imposicïon, ne gabelle haÿe. Paisiblement soubz eulx avons usé nostre vie. Tant comme ilz ont esté en ceste partie, si ont la ville amandé, embellye et emforcie. Si ne devons vers eulx penser nulle boydie dont ilz soient destruis et octis a achie, car qui fait traïson ne main ne anuitie s’il n’a bien son loyer en ceste mortel vie, si lui est reprouvé de Dieu, le fruit de vie. Et pourtant vous dy et a Dieu vous deprie, s’on rend ceste cité qui tant est enrichie, que les François auront a nous la foy pluvie que se tenent Englois en la cité jolye, c’on les lerra aler a tout sauve leur vie. Mais de ceulx du chastel, par foy, je ne di mie. S’ilz voulent estriver ne monstrer envaïe, et tenir le chastel par leur iere maistrie, bon feront mectre a mort a l’espee fourbie,
[243r]
- Prise de Poictiers : conseil des bourgeois car par eulx seroit ja la cité cuvrie. » La y ot un bourjois de vielle ancesserie, de grant lignage fu, si ot la barbe lorie. « Seigneurs, dist le bourjois a la brace fournie, encores ne savons la monte d’une alie se les François viendront a la porte bastie, ne s’ilz demanderont la cité seignorie. Je lo que nous alons sur la porte antie, nous touz que sommes cy touz d’une compaignie. Et si a la porte vient la noble baronnie, selon ce qu’ilz auront leur raison commancie, nous leur respondrons amour ou felonnie, car quant que nous disons, c’est plaidoie sans partie. »
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19989 19991 19993 19995 19997 19999
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[243v]
A ce conseil se sont les bourjois actordé. Du manoir sont issu, ou ilz furent bouté, et irent au commun assavoir tout de gré. Sur peine de la hart chascun s’en est alé a sa garde au crenel ou sera ordonné. Englois savoient bien, car il leur fu compté, que le duc de Berry venoit a grant plenté de gens, avec le duc de Bourbon appellé. Ainsi que vers la porte sont les bourjois alé. Véz vous le cappitaine du bon chastel fermé, lui .xxxme . d’Englois moult richement armé. Touz les oiciers y furent assemblé, gouverneur, receveur, prevost, bailli, juré. Aus bourjois dont je dy ont les clefz demandé pour la cité garder tout a leur volunté contre François qui la venoient abrivé. Et dient les bourjois : « Pour neent vous parléz, car les clefz n’auréz en jour de vostre aé. Moult bien les garderons, si a Jhesu vient a gré. Assez sommes puissans pour garder la cité. – Voires, dient Englois, mais on nous a compté que a petit d’achoison vous seréz retourné
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- Episodes français -
a devenir François, rendre la fermeté. Et se vous la rendéz, ce sera fausseté. Si vous en trouveréz desers et touz gastéz. » Se dient les François : « Menacéz tout souëf. Si vous avéz paour, si aléz a sauveté, car encores ne savons c’on aura demandé. – Dieu, dient les Engloys, véz nous cy actrappé. Vraiment ces villains sont François retourné. Qui les auroit ouvers aussi c’un porc lardé, on auroit en leurs cuers la leur du lis trouvé. » 674
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Ainsi dient Englois qui furent chevetaine, gouverneur, bailli, prevost et cappitaine. Mais la commune va criant a aulte alaine : « Moult doulcement nous ont gardé mainte sepmaine. » Bien voyent les bourjois que nature les mayne a amer la leur de lis trés souveraine. Si Englois fussent foison par dedens le domaine, ja eüssent livré bataille trop vilaine, mais ilz n’eussent duré plus que en feu feroit laine. Vers le chastel s’en vont, dont la muraille est saine. Et les bourjois s’en vont vers la porte aultaine, et voient sur les champs les enseignes toutes pleines du bon duc de Berry qui siet prés de Touraine, et celle de Bourbon qui au vent se demaine, et mains penons au vent a la coleur de grayne, et oÿrent sonner mains riches cors d’oraine, voient chevaux courir tout au tour de la pleine. Tant sont bien ordonné celle gent foraine que les bourjois qui sont en la porte mondaine, contre un qu’ilz sont les vont nombrer une .xne . Par le conseil Bertrant qui prouesce demaine, la bonne bourjoisie noz gens françoise maine. Atant véz vous Bertrant dessus une amulaine,* une branche en sa main de leurs toute pleine. Ce signiie paix que François ont a peine.
[244r]
- Prise de Poictiers : négociations -
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675 Devant la porte vint Bertrant le bacheler, une branche en sa main, sans les fueilles ouster, son page avec lui, sans plenté gent mener. Son bacinet faisoit a son page porter, si que au besoign le peust sur la teste poser « Seigneurs, se dist Bertrant, que je voys la ester, il vous plaise a oÿr ma raison recorder, sans traire, sans lancer et sans pierres gicter. Je viens de par le roy qui France a a garder. Son connoistable suis, Bertrant me fait nommer. Et vous pouéz savoir de certain et de cler nul ne mesprent au roy dont vous m’oiéz parler, que a grant perdicïon ne faille a in aler. Je le dy pour Englois deça et dela mer, qui envers nostre roy ont volu mal ouvrer. En peine se sont mis de lui a surmonter, de son honneur amendrir et le desheritier. Ne de la paix, c’on veult fïancer et jurer, et de touz ses faiz c’on n’y volu deviser et c’on avoit volu actorder et seeller, au contraire ont volu regner et pocesser. Et le bon roy de France ne le puet endurer, ne le bon duc d’Anjou qui fait a redoubter, ne le duc de Berry, que pouéz regarder, et de Bourgoigne aussi qui fait bien a amer, ne le duc de Bourbon, que veéz la ester. Tout le monde se veult sur Engloys reveler : la duché de Bertaigne s’i veult bien actorder et le conte de Foy le vouldra visiter. Se vous ne vous rendéz au roy a brief parler, vous vous verréz touz destruyre et desoler. Mais si vostre cité vous nous vouléz livrer, nous vous garandirons et mains et avesprer contre touz ceulx qui sont deça et dela mer. A, Gentilz bourjois. Veilléz vous adviser 20088
corr. d’après P : v. vous tous d., ajout de verréz
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- Episodes français -
et ne vous laissé mie honnir et desheriter. Regardéz ces banieres en ce champ venteler : véz la leur de lis qui vous vient visiter et qui vous vient de lui servir admonnester. A vostre droite nature penséz de retourner. Souveigne vous que Englois voulent guerre mener a tort et sans raison pour nous suppediter. Comment viendroit aussi un roiaulme a garder dont la mere ne puet ne ne doit poccesser. Et nul, si n’est oyr marle, vous le veéz au cler, ne doit France tenir pour coronne porter. A ceste raison si vous veilléz aider. Pour deux causes devéz a ce fait cy noter : premierement au droit que vous devéz garder ; a voz corps, a voz biens devéz ainsi viser, car se la porte tost vous n’aléz desfermer, vostre cité vous verréz destruire et desfermer.* Et s’il vous puet avoir, sur Dieu vous veil jurer que pendre vous ferons, ou les testes copper. Response me donnéz ; et si veilléz penser* que de ces deux chemins que je vous veil monstrer, vous prenéz le meilleur pour souëf cheminer. » 676
20115 20117 20119 20121 20123 20125
Quant Bertrant ot parlé aus bons bourjois de priz et qu’ilz eurent oÿ ses parlers et ses diz, lors parla un bourjois qui ot esté eslis de touz ceulx qui sont sur ces creneaux massis. « Sire, dist le bourjois qui d’onneur fu garny, il est bien verité que du temps de jadis avons tenu noz iefz du roy de Saint Denis. Et encores en tiendrons, s’il plaist a Jhesucrist, car combien que le roy qui gouverne Paris, de nous livrer au prince se fust bien assenty, pour ce n’estoions nous pas Englois de vray advis, mais obeÿ avons comme vray et subgiz, 20112
corr. d’après P : respondre me donnéz e.
[244v]
- Prise de Poictiers : négociations -
[245r]
de leur droit diviser comme il est es escriptz. Ainsi ne cuidons nous de riens avoir mespris. Mais Englois ont mespris, bien en sommes instruys : convenant ont faussé envers la lour de lis. Et pourtant nous serons a vostre gré assenty, et a la leur de lis nous serons obeÿ par tel condicïon, connoistable gentilz, que maintenuz serons et de jour et de nuyt aus coustumes, aus us du bon roy saint Loÿs sans nous a empirer vaillant deux espis. Et se le roy Charlon avoit mestier d’amis, touz prestz nous trouvera et de jour et de nuyt pour aler avec luy dessus ses ennemis, pour vivre ou pour morir du tout a son devis. Et si voulons un don que nous aurons requis : s’aucuns de bons Englois, ou nous sommes subgitz, et que trouvé avons certains et bons amis, et qui ont avec nous esté longtemps norryz, sans nul oultrage faire ne de jour ne de nuyt, c’on ne leur fera mal, oultrage ne despit pourtant que a vostre vouloir ilz soient obeÿs. Qui se defendra en commaincent estris, il vous est pardonné s’il est a la mort mis, car cellui qui se revenge depuis qu’il est sourpris et par son grant ourgueil ne veult prier mercis, s’il murt en cel estat, je dy qu’il en vault pis. »
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677 Quant Bertrant entendy les bourjois de renon, a son cuer ot grant joye, il y ot bien raison. « Seigneurs, se dist Bertrant, vostre bon actordon. je voys querrir le duc de Berry au chief blon, et si ameneray o lui le bon duc de Bourbon, qui a tenir jurront ceste divisïon. Et je de moye part nous nous y assenton. » Et disent les bourjois : « Point meulx ne demandon. » 20159
corr. d’après P : n. nous y asseton.
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- Episodes français -
Dont retourna Bertrant. Et les bourjois de non envoient au commun par les murs environ dire que chascun voyse en la cité de non les princes recevoir en chantant te deum. Et irent assembler mainte religïon qui receurent les princes faisans processïon. Et Bertrant appella les princes de renon qui irent aus bourjois grant honneur a bandon, ainsi qu’il leur pleu et qu’il leur vint a bon. La porte ont avalee, si abaisserent le pont. Noz gens y sont entréz a leur divisïon, baniere desploye, destors le confanon, armés comme pour entrer en un estour felon, en leurs armes paréz et le tunicle en son : ains plus belle noblesse ne vit homme en son. Le pouvre menu peuple se mist a genoillon en regracïant Dieu et son precïeux nom, en disant : « A, Bien viegne la gent du roy Charlon. He, noble leur de lis, honnourer vous doit on car vous estez la leur de consolacïon que Dieu tramist ça jus a Clovys le baron. Plus que faire n’avons de ce leepart felon : voit faire ailleurs son nic, plus de lui ne voulons. » Et quant les Englois ont oÿe sa raison, dela se sont partiz, vont s’en vers le danjon, et disoient en hault : « A, faulx villain, larron ! Vous estez traïteur de folle opinion. – Non. dient les bourjois, ainçois sommes proudon. Mais vous estes traïtres, oultrageux et felon, car cellui qui ne tient foy n’est point sans traÿson. » 678
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Or fu Poictiers rendue ainsi comme je vous dy, en l’an mil .iiic . et puis .lx.x.. Moult furent noz barons en Poictiers conjoÿ. La furent housteléz et moult bien rasfreschy. Puis ne demoura gueres, se nous dist l’escipt,
[245v]
- Prise de Poictiers : assault du château -
[246r]
que touz furent d’actort noz barons seignory et touz les bourjois qui furent enrichi, d’assaillir le chastel qui estoit de hault pris. Quant Poictiers se rendy, ce jour fu samedy. Le chastel lendemain fu des noz assailly, voyres, si vivement, se nous dit l’escript, que c’estoit a voir plaisance et delit. Plus tost s’aventura le grant que le petit. Le commun de Poictiers n’y furent pas fainty, car par eulx les fousséz furent bien tost emplys de fagotz, de tonneaux qui furent desemplys, et gictoient sur planches, fenestres, huys. Et puis venent au mur les bons mineurs de pris, qui pour les murs percer feroient de leurs pis. Eschielles aportoient gens d’armes seignoris et montoient amont comme preux et hardiz. Noblement s’i porta le bon duc de Berry, et le duc de Bourbon, cellui n’y fu pas fainty. Et Bertrant du Guesclin s’escrioit a ault cry : « Avant. Assailléz fort, mes bons loiaux amis. A Dieu le veu. Ces gars sont ja touz desconiz. Tout l’avoir de leans vous est a bandon mis. »
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679 Horrible fu l’assault, si dura longuement. Bien furent assailliz Englois et ierement. Et ilz se sont aussi defenduz gentement, mais force paist le pré, on le dist bien souvent. Le commun de Poittiers s’i porta noblement. Archiers, arbalestriers traioient roydement. Et tant dura l’assault, l’escripture l’aprent, que noz gens sont entréz ou chastel qui resplent. Le premier penonceaux qui la fu mis present, ce fu le noble duc a qui Bourbon apent. Quant Englois ont veü du fait l’avenement, a noz François se sont renduz communement. A rançon est pris qui disoit « J’ay de l’argent. » ,
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- Episodes français -
car le pouvre tousdiz ine malvaisement. 680
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Ainsi eurent François Poictiers et le chastel. Ou chastel ont trouvé tant maint riche joyel, tant maint riches prisons qui au cuer n’ont nul revel, et mains pouvres qui n’ont vaillant .i. basticel. La se sont noz François rasfreschy bien et bel. Le conquest fu parti sans debat ne sembel. Puis orent a conseil les princes naturel que a un chastel iroient, bien muré a cisel, et bonne ville aussi garnie bien et bel,* c’on nommoit Saint Maixent ; dehors ot maint prael la ou se sont logiéz François et Provencel. Mains assaultz y ont fait et mains estour nouvel, mais tout ce n’y valu la monte d’un fusel : trop fort lieu y avoit, ault furent les crenel, et Englois a foison qui gitent mains quarrel. Un cappitaine y ot, c’on appelloit Ancel, qui a Bertrant parla et lui dist de nouvel : « Je veil perdre le chief a tout le hasterel se vous estez trois jours la dessus ce praiel, se bataille n’avéz et estour et sembel, contre le Castal, le chevalier isnel, qui vient a .iim . hommes, dont chascun a clavel,* et lance et haubergon et bacinet roiel. » Et Bertrant respondy : « Foy que doys saint Michel, trois jours atendray des Englois le troppel. » Lors s’alerent François loger en un hamel, atendant le Castal qui le corps ot isnel. 681
20259 20261
François furent troys jours la bataille atendant, mais ce fu pour neent, car les Englois puissant n’estoient point d’actort d’aler estour livrant, 20238 20250
corr. d’après P : Puis oret a conseil l. corr. d’après P : se vous trois jours l., estez ajouté.
[246v]
- Prise de Saint-Maixent -
[247r]
quoy qu’ilz fussent autant que François avenant. Mais le Castal doubtoit d’assembler a Bertrant, car Englois a nul jour n’iroient assemblant contre nul s’ilz ne voient leur plus bel apparant. A Poictiers retourna nostre barnage franc et furent .xv. jours la endroit sejornant, tant que le noble duc de Bourgoigne tenant vint par devers Poictiers, o lui mains combatant. Ainsi vont noz François et leur route croissant. A deux mille et cincq cens les va on esmaiant.* Puis furent touz d’actort, les petis et les grant, que a Saint Maixent iroient un tel estour livrant que le fort auront du tout a leur commant. Adont se vont François gentement aroutant. Vers Saint Maixent s’en vont, dedens Poictou seant, baniere desploye contre vent ventelant. Et tant ont cheminé qu’ilz vindrent droit devant. La ville se rendy tost et incontinent, mais le chastel se tint comme chastel puissant. Noz gens irent assault moult merveilleux et grant. La peüst on voir un assault moult pesant. Mains hommes en cellui jour s’alerent aventurant pour acquerir honneur et louenge plaisant. Se de l’assault aloie touz les faiz recordant, trop tenir vous pourroie, longuement fu durant. Ains de plus fort assault n’ala nul recordant. Et ceulx de la dedens furent bien defendant ; mais toute la defense n’y valy mie un gant, car par force fu pris le chastel dont je chant, bassecourt et chastel et le donjon estant. Et aprés ces faiz cy, dont je voys devisant, s’en alerent François tout le païs fustent. Fontenay l’abbatu s’ala a eulx rendant, et aussi it Borru, dont dame fu Ercent. Cellui Borru dont je dy fu ville puissant. Place, ville y avoit, moutier assez vaillant. A deux lieues dela, se nous dit le rommant,
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- Episodes français -
estoit dessus la mer une ville seant,* bon port de mer c’on va la Rochelle nommant. Or escoutéz, pour Dieu le roy amant, comment de la Rochelle les bourjois souisant sagement, soutilement s’alerent acordent a François devenir en ce temps dont je chant. Ainsi ne irent pas comme it le meschant. 682
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A deux lieues sans plus de La Rochelle droit, droitement a Borneuf nostre barnage estoit. Le bon duc de Bery point ne s’i oublioit, de Bourgoigne le duc voir on y pouoit, et le duc de Bourbon, a qui Dieu amis soit, et Bertrant du Guesclin qui le debat amoit, Olivier de Clisson qui Englois pou prisoit, Rohen et Rochefort, cellui de Rays y estoit. En ce temps dont je dy dedens la mer estoit Yvain de Gales qui noble vayne estoit et contre la Rochelle le pas adont gardoit tellement que par mer vivres ne leur venoit. Et noz gens d’autre part les tindrent a destroit. Mais la Rochelle adont bien pourveüe estoit. Si autant vaussist grever comme elle desiroit a lui rendre au bon roy qui France gouvernoit elle eüst fait ennuy, mais Dieu l’inspiroit la noble bourjoisie qui par dedens estoit, tellement que a noz gens doulcement se rendoit. Vous orroiéz bien comment qui oÿr le vouldroit. 683
20327 20329
Il est bien verité que les nobles barons qui furent a Bourneuf, comme dit vous avons, le bon duc de Berry, le bon duc de Bourbon, aus bourjois de la ville que Rochelle appell’on, par un gentilz ayraut manderent a bandon 20299
corr. d’après P :vers supprimés, voir note.
[247v]
- Prise de La Rochelle que a eulx veignent parler .v. ou .vi. sans tençon, sauf alant et venant, sans nulle traÿson, a certain sauf conduit, sans nulle souspeçon. Et quant les bourjois ont oÿ ceste façon, a noz seigneurs françois manderent a bandon que a eulx iront parler a leur commandison ainçois que lendemain soit le souleil escon. Oiéz dont les bourjois eurent avisïon. En la ville y avoit un noble donjon et chastel moult puissant d’ancïenne façon. Le chastel et la tour qui estoit fort et bon, mistrent tout en un mont, comme dit la chançon, et ruerent tout jus la pierre et le moilon a la in que François n’y preignent mencïon et c’on ne les tenist point en subjectïon, car par dessus les champs du chastel aloit on, et en la ville aussi bien venir pouoit on, et en la hault mer pour entrer ou donjon. Pour ce fu abbatu le chastel dont parlon par la force et accort du commun de renon, pour vivre plus en paix sans nulle souspeçon. Dequoy un bourjois dist une noble raison a ce noble commun, dequoy nous vous dison : « Seigneurs, dist le bourjois, comment nous cheviron ? Du roy engloys n’avons confort ne garison et François sont venu a noble establisson. Et si au roy nous rendons par aucune façon, grant blasme nous donra par mortelle achoison qu’abatu lui avons son chastel bel et bon. » Le commun respondy : « Oiéz que nous diron. Se nous avons abatu du roy le donjon, nous lui ferons drecier un palais bel et bon en ceste ville cy droitement ou moilon, aussi bon aussi bel et de telle façon comme on pourroit trouver .C. lieues environ. 20346 20365
corr. d’après P : d. chastel o., aloit ajouté corr. d’après P : comment on pourroit t.
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- Episodes français -
Mais en nostre vivant jamais ne souferron c’ou lieve contre nous ne chastel ne donjon. » Et le bourjois respont : « J’entens bien vostre raison. Vous ressembléz cellui, a mon entencïon, qui n’a mercy priant vaillant un baston. » 684
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Quant se vint lendemain c’on vit souleil lever, voient de la Rochelle les bons bourjois sever. A Bourneuf sont venu a noz seigneurs parler. Les seigneurs bien les sceurent prisier et honnourer et les seigneurs leur vont moult grant honneur porter. Et puis ont commaincé lors a parlamenter. Bertrant volu la parolle premierement lever : « Seigneurs. Bourjois, dist il, il est certain et cler que au gré du roy Jehan, que Dieu veille sauver, vousistes au fort roy d’Angleterre encliner. Mais bien vous fu enjoinct, quant ce vint au livrer, que se le roy englois ne vouloit accepter et tenir loiaument sans lui a parjurer la paix si faictement c’on l’ot fait ordonner, que au noble roy Charlon vous fauldroit retourner. Et vous savéz que Englois nous ont volu fausser. Et nous avons pieça volu admonester que voussisséz o nous bons François retourner. Vous nous vousistes lors a un jour assener de vous rendre au bon roy qui France doit garder se le fort roy englois ne vous venoit tencer. Or est ce jour venu, vous le veéz passer. Si vous voulons prier et aussi commander que vous veillez tenir convenant sans fausser. Et se nous vous voyons envers nous meserrer et que a la leur de lis ne veilléz retorner, nous vous jurons sur Dieu qui tout a a garder, que la ville ferons tout en feu embraser : maison ny demourra ou on puisse habiter, forteresse ne mur que ne façons raser.
[248r]
- Prise de La Rochelle -
[248v]
Oÿ, se dist Bertrant, vous ne porréz durer, car tout aussi on voit le souleil qui luit cler, la verriere passer, luyre et estinceler, porréz veoir Françoys parmy voz murs passer. Se le souleil du ciel puet en vostre ville entrer, point n’ay doubte que tost ne m’y doie bouter. –Sire, dist le bourjois, point ne vous fault doubter. Ja il ne vous fauldra contre nous estriver, mais que un don nous veilléz donner et octroier, sans le roy amendrir et sans vous empirer. –Hé, Dieu, se dist Bertrant. Je sçay tout au cler quel chose ne quel don vous voulez demander : vous vouléz franchement nostre ville gaigner, sans nulle invencïon ne servage paier. –C’est voir, dist le bourjois. Le voléz accorder ? –Nous en aurons conseil. » se dist Bertrant le ber.
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685 « Sire, dist le bourjois, encores vous dirons. De tenir du bon roy grant volunté arons, ain que franchement tant maintenu soions ainsi que saint Loÿs maintint ses legïons. Et se voulons aussi avoir certains pardons de toutes le besoignes la ou mespris avons, car nostre bon commun, ja ne le celerons, ont les murs abatu, la tour ne les donjons d’un chastel qui estoit d’un ouvrage moult bon : ny a mur en estant pour loger deux colons. Se nous avons mespris, moult bien l’amanderons, car un noble palais en ce lieu referons, ou meilleu de la ville moult bien l’establirons. Mais cretel n’y aura ne nulz fosséz parfons, ne porte coulisse pour les defensïons. Mais volons vivre en pais sans nulle souspeçon et paier l’argent ce que nous devrons. Qui plus demandera, nous le debatrons, 20414
corr. d’après P : i. ne servage demander
20417 20419 20421 20423 20425 20427 20429 20431 20433
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- Episodes français -
et qui nous assaudra, nous nous defendrons. La noble leur de lis de loial cuer amons. Et pour ce, s’il vous plaist, nous y retournerons. » Dist le duc de Berry : « Moult bien vous entendons. Vous faictes tout aussi en voz condicïons comme cellui qui dit au plus fort : “Nous tenons”. » 686
20441 20443 20445 20447 20449 20451 20453 20455 20457 20459 20461 20463 20465
Ne sçay que vous iroie longuement devisant. Touz noz seigneurs françois s’alerent accordant a ce que les bourjois alerent demandant. Assez leurs font d’onneur, bel don leur vont donnant. S’aucun seigneur qui la fu furent moult dolant du chastel qui fu la rué jus en estant, si ne l’alerent ilz pas en ce jour monstrant. Mais de telz en y ot que ne vont pas riant, en disant tout basset et en murmurant que encores viendra un jour ens ou temps cy avant que le commun ira ce mefait amandant et c’on remectra ce chastel en estant. Et les bourjois s’en vont en leur ville entrant, qui distrent au commun tout le convenant comment a tousjoursmais ilz doyvent estre franc, le pardon du chastel c’on ala pardonnant parmi ce que un palais on ira restorant. Joieux fu le commun quant ce fu escoutant. Et vont a joinctes mains Jhesu regracïant, en disant : « Fleur de lis, amie bienvegnant. Doulce leur espanie, odorable et lairant, meulx faictes a priser que ce lupart rampant, car lupart ne va que ourgueil signifïant. En la leur de lis est humilité manant. Et Jhesu het ourgueil et abat son bobant, et ame humilité et le va essaucant. »
20444
corr. d’après P : a. leurs fons d’onneur b.
[249r]
- Prise de La Rochelle -
601
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[249v]
En la Rochelle ot grant joye demenee. N’y ot bourjois oncques, ne bourjoise louhee, qui ne fust resjoÿ en cuer et en pensee. Moult font noble apparail en la ville louhee pour recevoir des Frans la trés noble pensee. Quant ce vint lendemain, si que a terce sonnee, vindrent la les seigneurs de France la louhee, de Berry le bon duc qui tant ot renommee, de Bourgoigne le duc, un terre louhee, et le duc de Bourbon a la brace quarree, le conte de Saussorre qui bien fery d’espee, et Bertrant du Guesclin qui moult ama meslee, Olivier de Cliçon et Jehan de l’Estree, cellui de Rochefort et de Rays la muree de Vïenne y estoit Jehan chiere doubtee et tant mains chevaliers dont ne foys devisee. Oncques homme ne vit si gentille assemblee, voyres, de pou de gent qui la fu aünee. S’ilz furent deux mil, ce fu tout la jornee. Mais ceste gent estoit si tres bien aünee comme ce fust pour entrer en mortelle meslee. De toutes armes fu ceste gent adoubee, mains penons desployé, maintes banieres levee, et mainte trompe y ot a cellui jour sonnee, et mains aultz instrumens sonnéz a la volee. La n’y avoit seigneurs de aulte renommee qui sa tunicle n’ait en son dos endossee, ainsi que en un tournois ou en jouxte criee. Grant noblesse a veoir estoit celle journee. Et quant de la Rochelle approcherent l’entree, la commune ont veü, qui dehors fu sevree, sans armeure porter, coutel ne espee, en presentant les clefz de la ville louhee, voient les leurs de lis en painture notree, et bacinés qui lors furent de soye ouvree, et tunicles roiaux dont l’euvre fu paree,
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- Episodes français -
oyent trompes sonner a moult aulte alenee. Adont ont par tenreur maintes lermes plouree et dient aultement « Fleur de lis esmeree, vous soiéz par deça moult trés bien retournee, trop mieulx que ce luppart estez de nous amer. » Les pluseurs a genoilz se mectent en la pree, plourent si tendrementet par telle destinee c’oncques n’y ot seigneur françois en l’assemblee qui joye et pitié n’ait pleuré la jornee. 688
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Le bon duc de Berry et le duc de Bourbon, et le duc de Bourgoigne et Berry et Cliçon, quant ilz deurent entrer en la ville de nom, la y ot un abbé et bourjois a foison qui avoient tendu par noble establiçon de soye un petit ille, menu fu le coron. Et dirent aus seigneurs dequoy nous vous dison : « Bien veignent noz seigneurs de France le royon qui sont icy vennuz de par le roy Charlon a qui sommes rendu par tel condicïon que bien et loiaument touz nous servirons de corps et de chatel, si en est besoign. Mais soions tenuz en paix sans rançon, sans subside paier ne imposicïon, neent plus c’on paioit en icelle saison que saint Louÿs regna qui moult estoit proudon. Et que garant nous soit le roy de Monlaon contre ceulx qui vouldroient amurdrir vostre nom. » Dist le duc de Berry : « Ainsi vous recevons. » Droit la it sacrement, si que faire doit on, et aussi it le duc du païs bourgoignon, et aussi en jura le bon duc de Bourbon, et Bertrant ensement, le connoistable bon. Adont parla Bertrant et dist en sa raison : « Seigneurs, bourjois, se dist Bertrant cuer de lÿon. 20505
corr. d’après P : d. aultement furent de l., furent cancellé et leur suscrit.
[250r]
- Prise de La Rochelle Ce il de soie la que ainsi tendu voit on, pourquoy y est il mis ne pour quelle raison ? Il n’y est pas mis sans signiicacïon. » Se dient les bourjois : « Par le corps saint Symon. C’est signe que la ville tout sans divisïon veult obeÿr au roy par telle condicïon c’on ne veult contre lui clorre porte ne pont, mais obeïr du tout a lui et a son bon. – Par ma foy, dist Bertrant, vous estez touz proudon. » Lors entrerent leens en chantant te deum. Droit la vint le clergie a grant processïon. La veïsséz bourjoises, femmes et enfançon devant les bons seigneurs cheoir en panison. De joye et de pitié plouroient les baron.
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[250v]
Moult furent les seigneurs esjoïz durement. Quant virent le commun de tel estorement,* les nobles leurs de lis sur l’azur qui resplent qui es tunicles sont ouvrees noblement et es banieres qui baloient contre vent, et l’arroy des seigneurs et le contenement, lors pristrent a crier si hault c’on les entent : « Bien veignent noz seigneurs de France proprement. Et bien veigne la lour de lis qui dignement fu tremise du ciel au roy Clovis le gent, doulce leur odorable, sentant bien souëfment. Bien devons l’eure amer et le jour ensement que visiter venéz vostre dolente gent, qui en grande cremour a vescu longuement en l’ombre d’un lupart qui nous monstre la dent. Bien devons aourer le roy du irmament quant a nostre droit seigneur en tornons ensement. » Ainsi dient la gent con vous oiéz present. Et furent a genoulz, les mains jointes souvent ainsi que en un moustier devant le sacrement.
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- Episodes français -
Et les enfans crioient par certain sentement « Monjoie. Roy Charlon. » en criant aultement, dequoy touz les seigneurs qui la furent present prirent a amer et conjoïr la gent. 690
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Je sçay que vous vous vouldroie longuement deviser, car se tout vous vouloie le certain recorder de l’onneur des bourjois, des dons c’on veult donner, et des presents c’on voulu aus barons presenter, le bel digner c’on it et le noble soupper, bien sçay je vous pourroie trop longuement tenner, car le roy Alixandre, dont on sieut trop parler, ne fu meulx receü deça ne dela mer que furent les seigneurs dont vous m’oéz compter. La volurent cappitaine eslire et ordonner pour la ville garder et a droit gouverner. Mais quant noz seigneurs virent la place bien a cler, ou le chastel seoit c’on a fait araser, moult en furent dolans, si le vont regreter. Tel y ot qui ne dit pas tout son penser. La volurent les François .xi. jours reposer. Lors y ot un bourjois qui moult it a louher, qui au duc de Berry ala un don rouver sans lui ne son honneur de riens avaluer. Et le duc lui ala sa demande accorder. « Sire, dist le bourjois, je ne vous quiers celer. Il y a un chastel c’on fait Bonnom nommer, qui n’est pas loign decy : trop nous pourra grever car mains Englois y a qui font a redoubter. Pour Dieu, ne veilléz pas en France retorner si auréz fait de Bonnom le chastel araser. Avec vous irons pour les murs aÿver. A .xx. lieues entour n’y puet on habiter que a peine et a meschief en doubte de iner. 20571 20577
corr. d’après P : l ; enfans croient par c. corr. d’après P : d. c’on vous veult d., vous supprimé.
[251r]
- Prise de Bonnom Ceulx de leens ont fait mon frere deiner et si m’ont par deux foiz fait du mien rançonner tant que je n’ay vaillant de meuble .i. souler. Mains hommes ont apovry et fait truans clamer. » Dist le duc de Berry : « Il nous y fault aler. » A Bertrant du Guesclin commanda sans tarder chascun soit tout prest pour demain cheminer. Or porréz vous oÿr de un assault recorder, ains de plus merveilleux vous n’oïstes compter.
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691 Or sont de la Rochelle les bons barons party, le bon duc de Bourgoigne et le duc de Berry, et le duc de Bourbon, le conte de Joigny, le conte de la Marche qui le cuer ot hardy, et Bertrant du Guesclin et Cliçon le gentilz, et tant mains chevaliers dont je me tayray cy. Envers Bonnom s’en vont, le chastel seignory. En ce chastel avoit mains Englois endurcy de guerre demener et le may et l’avril. Moult eurent autour d’eulx le païs apouvry, sur la marche aus François faisoient moult d’ennuy. Au Castal de Beuf fu le chastel gentilz. Cappitaine y avoit, c’on appelloit David, qui onc n’ama François puis ce di qu’i nasqui, ne les Françoys de France ne prisoit un espy. Si advint que a un jour, droit a un vespry, entra en lor chastel une espie, Henry.** Devant le cappitaine a genoilz se lechy. « A, sire, dist le més, véz nous cy bien honny. La Rochelle est rendue au fort duc de Berry, et au duc de Bourgoigne, a Bertrant de Guesclin. Je les y vi entrer, pour certain vous dy. François s’en venent cy appresté et garny de vous livrer assault a force et a estry. Sur vostre garde soiéz, mestier est aujourduy. » Et quant le cappitaine ce parler entendy,
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- Episodes français -
dolent en fu au cuer et moult lui desplaisy. Oiéz dont s’avisa le lerres maleÿ. Six compaignons y ot qui furent avec lui, de la Rochelle néz estoient et norry, qui la estoient demouréz bien un an et demy et servent le Castal sans penser a nul sy. En tel point furent mis les .vi. dont je vous dy, c’on leur coppa le nés, les oreilles aussi, et chascun une main on leur coppa parmy. Et puis le cappitaine leur a dit a ault cry : « Faictes legierement et vous partéz decy. A la Rochelle iréz, leur diréz de par my qu’ilz font comme traïtres et touz foy menty. Et se prandre les puis, ainsi serront bailly que ja pour rançon n’auront autre mercy. » Adont se sont party du chastel seignory, vers la Rochelle vont courroucié et marry. La ville maudissent quant oncques se rendy. Tant alerent les .vi. dont vous avéz oÿ qu’ilz ont trouvé François qui venent a arry. Tantost furent amené au bon duc de Berry. Leur estat demanda, ilz lui ont tout gehy. Grande pitié en ont les seigneurs agensy. Et jurerent touz la mort que Dieu soufry qu’ilz iront asseger Bonnom et par tel fy que mais n’en partiront ne de may ne d’avril, si auront a leur vouloir les Englois maleÿ. » Dist cellui de Cliçon Olivier le hardy : « Et je louhe a Jhesu qui de mort surrexi, se vous les me livréz du tout a mon octry, par moy seront touz decoléz et octis. » Ainsi dit Olivier qui onques n’en menty, ainsi con vous orréz, se j’en puis estre oÿ.
20647 20668
u. main v on l., v exponctué. s. vous n les m., n exponctué.
[251v]
- Prise de Bonnom -
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[252r]
Tant alerent François et les nobles barons que a Bonnon sont venuz, ou a noble donjon. Environ l’ont assis et François et Berton. Au cappitaine ont fait parlement et sermont voir s’il rendroit par aucune achoison. Mais ilz distrent que non, moult fu ier le respond : riens n’y vault menacier ne assault ne tençon. Droit la se sont logiéz gens d’armes et pietons* et si font leurs logeis de branches de buissons. N’eurent pas la esté trois jours, bien le savons, quant du chastel yssi .xii. fers compaignons arméz et abilléz pour commaincer tençon. Ainsi que a une nuyt que chante le cop bon,* a un coron de l’ost s’en entrent a bandon et ferent sur François a guise de grifons. L’enseigne du Castal crient en leur raisons et dient aus François : « Touz vous octirons. » Et quant François oÿrent que distrent telz raisons, bien cuidoient aucuns qu’ilz fussent foisons. Les autres ont monstré bonne defenson. Et l’autre disoit : « Je lou que nous fuions, car au cry des Englois assez bien entendons que le Castal vient cy a ii.M. barons. »
20673 20675 20677 20679 20681 20683 20685 20687 20689 20691 20693
693 Ainsi furent Englois estourmy malement. Mais le gait de la nuit sourvint la vistement, envers la noise vont et on ot le content. La eurent fait Englois de mal grandement, si eurent pris et nafré Giefroy c’on dit parent. En reculant s’en vont retraient laidement. Giefroy Paien estoit navré moult malement. Aus Englois depria et leur dist doulcement : « Seigneurs, Englois, dist il, je vous pri bonnement laisséz moy reculer a l’ost seürement 20679
corr. d’après P : : g. d’armes et peyrons
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- Episodes français -
pour moy mediciner et bender fermement, car je suis moult navré et doleureusement. Je vous jure sur ma foy et sur mon sacrement demain reviendray cy a vostre commandement. Raençon paieray tant et si largement comme il vous devra suire plainement. – Sire, dient Englois, ne nous celéz noient. Comment avéz vous nom par vostre serement ? – Giefroy Paien ay nom, dist il, certainement. Si suis de noble sang, estrait de noble gent. Et si a Olivier, de Cliçon proprement, trente hommes ay soubz moy a mon commandement. Par mon corps commainça l’assault et le content dequoy Sainte Severe fu prise plainement, car ma hache cheÿ ou foussé pleinement, et par ce commainça l’assault moult ierement. Vous n’avéz pas failli a cest anuytement, car vous auréz de moy assez or et argent. – Sire, dient Englois, Damedieu vous cravent. De vous ne prandroions tout l’or de Bonnivent, ains morréz a douleur assez prochainement en despit d’Olivier de Cliçon proprement, qui d’Englois mectre a in prent son esbatement. » Lors ierent les Englois sur Giefroy tellement qu’ilz l’ont mort et octis a dueil et a torment, et puis s’en sont rentré en leur chastel present. Olivier de Cliçon venoit moult puissanment a falos, a brandons, o lui hommes .v.C.. En sa voye trouva Giefroy c’on dit parent, qui fu mort et octis sur l’erbe qui resplent. Quant Olivier le voit, au cuer en fu dolant, car moult ama Giefroy ; a regreter le prent. 694 Dolant fu Olivier, oncques mais ne fu cy.* Quant il vit Giefroy mort qui fu son bon ami, 20737
corr. d’après P : Rollant fu Olivier o.
[252v]
- Prise de Bonnom assez le regreta, doulcement le pleigny. Par son comandement fu bel ensevely. Hé, Dieu, Con Olivier les Englois enhaÿ. La jura Damedieu qui oncques ne menty, que en toute l’annee, ne main ne avespry, ne prendra Englois, se dit il, a mercy, ains les menera a mort s’il les voit devant luy. De ce ne menty pas Olivier dont je dy. Celle nuyt se passa, tant que jour esclarcy. La ne furent noz gens point .ii. jours et demy, quant ilz orent conseil qu’ilz orent assailly le chastel de Bonnom qui bien estoit garny. En tout l’ost de noz gens, dont vous avéz oÿ, n’y ont que .xiii. eschielles pour commaincer estry. Mais ilz ont des mineurs et des picques aussi. François se sont esmeu, maintes trompes ont bondy. A l’assault sont couru qui mieulx mieulx y fouÿ ; ains de plus ier assault nul a parler n’oÿ.
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695 [253r]
Moult fort fu assailli le chastel de Bonnom. Es fosséz sont entréz noz François de renon, vont s’en au pié du mur a force et a bandon. Le premier qui monta Barriere ot a nom et tenoit en sa main un moult noble penon. Englois quant l’ont veü en orent marrisson. D’une pierre de fays qui pesoit a foyson fu adonc ravalé par tel condicïon qu’il se trouva au font du grant fossé parfont, son penon delay luy, dont l’ouvrage fu bon. Adont irent Englois moult grande huïsson et disoient en hault en criant a ault son : « François, raléz vous en par dedens vostre maison. Tenir ne vous savéz par dessus l’eschiellon. Ne vous aventuréz pour recevoir tel don con ce premier montant a prins en guesredon, 20767
corr. d’après P : E. moult garde huisson
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- Episodes français -
car a tel aumosne tel presse ne vit on. » Ainsi dient Englois, mais lé ber Bourgoignon minoient d’autre part les fors murs a bandon et irent mains grans croux par ou passer povoit on. Diray de l’omme d’armes qui gist en pamison son penon delay lui. La vint un compaignon c’on appelloit Ymbert de Kulec en son nom. Tantost le releva et saisi son penon, et monta de l’eschielle le derrier eschiellon en recevant mains cops et mains iers horïon, et en lui revenchant comme ier champpïon. Le penon estoqua sur le mur dont dit on. Lors montant aprés lui des François grant foison. Et d’autre cousté sont Bourgoignons et Berton qui orent tant miné par leur commandison qu’ilz sont leens entré a leur commandison, en criant aultement : « Touz y morréz, larrons. » Quant Englois ont veü telle destructïon, en la tour sont fouÿ, d’ancïenne façon. La se sont enfermé, touz plains de souspeçon. En la basse court sont François et Bourgoignon. « Seigneurs, se dist Bertrant, a la clere façon, ceste basse court cy point ne demandion, ainçois vous demandons ce noble danjon. – Hé, Dieu, dient François, véz cy euvre a foison. Tant que Bertrant soit vif, jamais repoux n’aurons. » 696
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Or sont Engloys retraiz dedens la noble tour. Bertrant les appella et leur dist : « Traïtour. Rendéz vous au bon roy de France la majour, si vous pendra on chascun a un aubour. » Et dient les Englois : « Vous parléz de folour. Bien rendre nous volons au riche roy françour, sauf la vie, sans nous empirer d’une leur, et sauf noz biens qui sont aussi en ceste tour. Ainsi nous en irons par dedens no tenour.
[253v]
- Prises de Surgieres, de la tour de Bron et de Monsterueil-Bonin – Nenny, se dist Bertrant, ainçois auréz mal jour. Du vostre n’emporteréz la monte d’un tabour. Et si vous rendréz sans faire autre clamour au vouloir du bon roy et du prince d’onneur, ou nous ferons miner et abatre la tour. » Dolans furent Englois, les grans et les mineurs. Bien veoient que durer ne povoient jusques au ters jour, si sont assenty a rendre au derrier jour, a venir a mercy bellement, par loysour, chascun la hart au col a loy de bosaour.
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[254r]
Olivier de Cliçon, quant le certain parçoit que chascun des Englois ainsi se rendroit, aus seigneurs depria et pour Dieu requeroit qu’il peust des Englois faire tout ce que desiroit. Et on lui actorda, ne savent qu’il pensoit. Et quant Olivier vit que le don en avoit, une hache saisi, a son col la gictoit, moult et moult grant pesant et durement tailloit ; vint a l’uys de la tour, les Englois actendoit. Le premier qui yssi de sa hache feroit, a un cop seulement la teste lui fendoit. Le second et le ters a la terre abatoit. A .xv. cops de haches .xv. testes coppoit. Ains n’y remet Englois en vie la endroit. La mort Giefroy Paien malement leur vendoit. – Dieu, dient les seigneurs, dont mains en y avoit, Englois n’en pouent mais, par le corps saint Benoist. » Si l’appellent bouchier Olivier la endroit.
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698 Ainsi se divisoient les François en riant. Olivier de Cliçon en vont araisonnant : « Olivier, beaux amis, aléz vous refroidant. Trop estez exchaufé en l’oice faisant. Que n’avéz vous commis ou vallet ou sergent
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- Episodes français -
qui eüst decolé ces Englois maintenant ? L’oice n’appartient a baron si puissant. – Seigneurs, dist Olivier, je n’y acompte un gant. Voir, s’il en y avoit en vie encores autant si les iroie touz maintenant delivrant, mais ne deporteray Englois en mon vivant. » Aprés touz ces faiz cy dont je vous voys comptant alerent a Surgieres, si comme dit le rommant. Leens estoit la dame de Surgieres la grant, et maintes dames o lie de noble convenant que les Englois tenoient du tout a leur commant. Se ne fust pour l’amour des dames dont je chant, touz les Englois eüssent esté octis au brant. Mais on les depporta et mist on a garant pour les dames avoir qui ont doulx le semblant. Entre ces Englois la en y ot un puissant, Bernart du Vast ot nom, se nous dit le rommant : ce fu cellui qui ot prins ens ou temps de devant la dame de Bourbon par son faulx convenant. Cellui fu delivré qui s’en ala courant droit a la tour de Bron au cappitaine Hermant. François vindrent entour la tour dont je vous chant. Et y ot parlement ; par droit actort faisant la dame de Bourbon alerent delivrant pour .x.M. lorins con leur ala baillant. Si avoient accordé que l’iroient delivrant la grosse tour, mais lors ilz n’en irent neent. Quant le duc de Bourbon va sa mere advisant, vous pouéz bien savoir moult la va honnourant. Et puis en son païs cellui l’ala renvoient. Depuis en la Guïenne se vont François boutant, tout parmy le Poictou se vont aventurant. Saint Jehan d’Angely s’ala a nous rendant et Saintes en Poictou la ville souisant. Puis eurent a conseil noz François souisant qu’en Bertaigne s’en iront, le païs aventurant, car le duc y estoit et si aloit mandant qu’i iroit a Paris au riche roy vaillant,
[254v]
- Siège de Chisec a certain jour nommé a Paris la devant. Ainsi l’ot le fort duc aus barons convenant. Et pourtant les François alerent retournant, contes, ducs et barons se vont la departant. Mais Bertrant en Poictou mena barnage grant, et Monterueil Bonnim ala tost conquestant. Puis ala a Chisec un grant siege mectant, la ou il ot bataille et destructïon grant, ainsi comme vous orréz recorder cy avant.
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[255r]
Aprés ce que Bertrant qui tant par fu hardy, ot esté o grans gens a Monsterueil Bonnin, a Chisec s’en ala, le chastel seignori. Bons combatans y ot en ce chastel joly. Robert Miton ot nom le chastellain gentilz, de Guistemore fu Vastequin avec luy, cent Englois combatans furent tout fervesty. Et Bertrant fu devant qui son siege basty, et a .vic . combatans, preux et amenevy. Le conte d’Alençon y fu, je vous afy, et Alain de Beaumont, Olivier de Manny, et Jehan de Beaumont et de Manny Henry, le viconte d’Aunay au courage agenty, et Pietres d’Anegron ne si mist en oubly, de Rochefort y fu le seigneurs seignory, et messire Morise qui du Parc fu saisi, et cellui de Monfort en Bertaigne basty, et Guillaume des Bordes le chevalier norry, et mains bons chevaliers dont je me tairay cy ; Giefroy de Barimel qui moult Englois nuysy, Yvon y fu apris et Convreine aussi, Guis le Baveux y fu, .i. chevalier hardy. Ceste gent mirent siege a Chisec dont je dy. N’y furent pas longtemps, a ce que dire oÿ, quant un gentilz ayraut a tunicle genty vint par devant Bertrant, a genoilz se lechy
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- Episodes français -
et dist ce : « Damedieu qui de mort surrexi, veille garder le roy de France l’enrichy, et touz ceulx qui voulent garder l’onnour de luy, et son bon connoistable de France enrichy, et messire Olivier de Cliçon le gentilz, qui pour honneur du roy m’a envoié droit cy. » 700
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« Sire, dist le heraut, mon seigneur Olivier et le viconte aussi de Rohen au corps ier, celluy de l’Avangnon qui tant fait a priser, cellui de Vinguegnen, o le couragie ier, la Roche Sur Ion ont volu assegier, et n’ont mie talent de ce siege laisser si leur sera rendu le chastel fort et ier. Or vous mandent touz les seigneurs droiturer, car leur semonce font Englois, au mien cuider, a Nÿort droitement, ou il a bel moustier. A .viiic . combatans les puet on expriser, gens d’armes suisans, si y a mains archiers. Mais dire ne vous sçay, au vray signifïer, quel part Englois iront pour François empirer. Monseigneur de Cliçon c’on appelle Olivier ne scet si Englois viendront sur lui pour batailler ou s’ilz viendront droit cy pour vous guerroier. Sur vostre garde soiéz et mains et anuitier. C’est ce que monseigneur vous fait signifïer. –Amis, se dist Bertrant, Dieu vous gart de dangier. Or me recommandéz Olivier le princer et touz les compaignons, que Dieu gart d’emcombrier. » A ce heraut donna Bertrant un bon destrier. Et le heraut le prist de gré et voluntiers, vers Roche Sur Ion a prins a repairer. Or diray de Bertrant qui tant fait a priser. Ses gens a fait enclorre et devant et derrier de palis, de merriens et en terre drecier 20939
Amis d se, d exponctué.
- Siège de Chisec -
[255v]
a la in que sourprins ne soient les princier. Si ordonnerent bon guet pour fermement gaiter. Puis appella Bertrant un joly messagier. Un mois envoia dire et bien signifïer, ainsi comme vous orréz maintenant declairer.
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701 A ce temps que Bertrant, dequoy nous vous dirons, estoit devant Chisec, le chastel de renon, avoit en cellui temps Olivier de Cliçon assiegé de prés la Roche Sur Ion. Et d’autre part y ot un siege, se dit on, par devant Linehon, une forte maison. La estoit Cressonnelle ens ou maistre donjon qui contre noz François gardoit bien son coron. Et cellui qui cappitaine fu des François de nom, voir, il est nevu Alain cellui de Beaumon, et avoit nom Alain, le jeune le clamon. A cestui cy demanda Bertrant cuer de lÿon que sur sa garde fust, car Englois a foison s’asemblent a Nÿort, une ville de nom, mais l’on ne scet quelle part vorront faire tençon. Et quant du mandement oÿ telle lesson ainsi comme Bertrant ot fait celle saison, ainsi tenent troys sieges noz François de renon. Mais d’estre ensemble eüssent bien besoign car Englois a Nÿort s’asemblerent foison a .viiic . combatans, ainsi les nombroit on, voires, touz les meilleurs pour esmouvoir tençon c’on peüst recouvrer la ou on croit Jhesom, car c’estoit d’Engleterre la leur, se me dit on, de la Guïenne aussi, de Bourdelois en son. Or porréz vous oÿr d’un grant estour felon qui fu devant Chisec, le chastel bel et bon. 702 Or fu devant Chisec Bertrant du Guesclin.
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- Episodes français -
Contre ceulx du chastel irent la maint hustin, mais on n’y conquesta vaillant un angevin. Bertrant it parlement au cappitaine in : de vendre son chastel lui faisoit maint doctrin et lui eüst donné adont un muy d’or in, mais Englois ne vouloient entendre son latin, ains deprisoient moult de François le commun. Et disoient en hault : « Escoutéz Franchequin. Aléz boyre a Paris la choppine de vin, et la souppe humer et roustir le boudin, car vous ne valéz riens a maintenir hustin, ny a gesir vestu en hauberc doubletin, ny a manger le pain sec, boyre l’eaue ou bacin : vous y pourroiéz bien prendre le mal saint Quentin. » Ainsi dient Englois qui a ourgueil sont enclin. Mais ilz ne diront pas ainsi bien trés matin : mieulx seront prins au brain qu’aloé au matin. 703
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Or fu devant Chisec le noble Bertrant. Et a Nÿort se vont les Englois assemblant. Mains cappitaines y ot, de noble convenant : cellui d’Agor premier nommoit on au devant, et messire Jehan de Breves le vaillant, et puis Jaquemon Fé qui fu bon assaillant, et Janequin Hasquet qui ot le cuer puissant, et Jaconnelle aussi, a l’aduré semblant. Si fu le cappitaine qui Mortain la fu gardant et Janequin Arton qui moru sur le champ devant Chisec la ou la bataille fu grant. Ainsi devant Nÿort vont Englois assemblant tant qu’ilz se sont trouvé bien .vc . combatant. Puis s’en vont a conseil lé cappitaine grant pour ouvrer par conseil ou iront chevauchant, s’ilz iront a Chisec qui Bertrant va gardant ou Roche Sur Ion ilz iront dessegent, que Olivier de Cliçon va de prés contreignant,
[256r]
- Arrivée arrosée des Anglais à Chisec ou s’ilz iront veoir par dedens le Guehant Cressonelle qui va le chastel defendant contre Alain de Beaumont le jeune combatant, qui avoit assegié o lui maint homme franc. Ainsi sont les François troys sieges maintenant, sans ceulx qui sont en mer qui le pas vont gardant. Se dist Jehan de Brenes : « J’en diray mon semblant, qui croyre me vouldra, par Dieu le tout puissant. Premierement irons sur ce deable Bertrant, car s’il puet estre prins ou octis sur le champ nous ne devons doubter que un pou le remanant. »
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[256v]
Aprés Jehan de Brenes, dont cy compté vous ay, se dreça Jaconnelle, cappitaine de Civray, et leur a dit : « Barons, oiéz que je diray. Nous irons sur Bertrant, ainsi en pensé l’ay. Je veu a Dieu le pere et a saint Micholay que ou meilleu de sa gent par force le prandroy et par dedens Nÿort droit cy le rameneray. Se je ne l’ay tout vif, a mort le mectray. Bien mile aulnes ou plus de ine toile ay : qui s’en vouldra vestir, je lui abandonray. Dessus mes armeüres vestir je m’en vouldray, et une croiz vermeille a deux léz porteray. Droit devant et derriere moult bien me croiseray saint George au regarder moult bien ressembleray. » Se dist Jehan de Breine : « Comme vous je feray. » Dist Jennequin Hasquet : « Ainsi m’adouberay. » La furent touz d’accort Englois dont dit vous ay que de toyle seront vestu sans nul delay. La menacent François en demenant grant glay.
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705 Quant Englois furent prest pour partir et sevrer et que les blans abbis eurent fait ordonner, lors ont fait instrumens et trompectes sonner.
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- Episodes français -
De Nÿort sont partiz, mais n’y sauront rentrer. Oiéz de Jaconnelle qui tant it a doubter. Aucuns de ses subgitz qui volurent demourer a commandé c’on face sa chambre bien parer et c’on face vitaille pour manger atourner pour Bertrant du Guesclin haultement honnourer. Avec lui le vouldra, se dit il, amener ou jamais ne pourra, se dit il, retorner. Et estoient d’actort les demaines et les per des Englois dont je dy c’on feroit ainer François sans rançon a nul homme donner, hors mis trois chevaliers que je sçay bien nommer : Bertrant du Guesclin doys le premier compter, et messire Morisse du Parc, cuer de sangler, Giefroy de Karismel qui fait bien a doubter. Ces trois voldront de mort, se dient, depporter pour avoir d’eulx .iii. en raençon mains deniers. D’avoir les troys barons ont tant a desirer* et les autres vouldront octire et decopper. Ainsi volurent Englois de Nÿort dessevrer, vont s’en vers Chisec pour noz François grever. De ce ne savent riens au vray François compter, fors tant que Cliçon leur avoit fait mander que de nuyt et de jour se vousissent garder. Bertrant faisoit bon gait nuit et jour ordonner, et ot fait de palis ses gens bien ordonner et ain que on ne les puisse sousprendre ne enchanter. Et diray des Englois qui tant volurent errer que en un grant boys ront ilz alerent entrer. Et vont en leur chemin deux charrectes trouver, chargees de bon vin c’on en doit bien mener a l’ost devant Chisec pour François conraer. Moult furent les vins bons dont vous m’oéz compter. De Monterueil Bellay les it on amener : a si bonne vinee ne scet on assener en tant que Poictou puet au travers durer. 21066
corr. (voir note) : t. barons on tant a
[257r]
- Arrivée arrosée des Anglais à Chisec Englois font les vaisseaux des charrectes verser, et puis les vont sur bout tout en l’eure lever, et pour boyre du vin les vont touz desfoncer. A coifes, a bacins et a chappeaux de fer vont puiser de ce vin et tant en vont humer que le vin leur a fait la cervelle trocter. En boyvent vont François menacer de tuer, car le vin fait souvent dire mains foulz parler : si s’en doit bien garder qui ne le puet porter.
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[257v]
Ainsi furent Englois ens ou boys qui resplent. La boyvent le bon vin faisant repposement. Or diray de ce Bertrant a l’aduré talent. Un Berton eurent prins les aucuns de sa gent qui ot esté Englois .iiii. ans tout pleinement. Mais ce fu mal gré lui tout au commaincement : pour sa vie sauver ot Englois convenant que servir les vouldroit de cuer legierement. Sur ce point fu reprins de cuer envers no gent et livré a Bertrant a l’aduré talent. Si lui pria mercy et lui dist son errement, et lui dist des Englois tout le demainement comment sur lui ilz vindrent moult eforceement. Et quant Bertrant oÿ le Berton sappïent, adont lui pardonna tout son maltalent. Depuis fu bon François et regna loiaument. Et les Englois felons venoient ierement et furent a une dimee lieue seulement* du siege des François, que Dieu gart de torment. Et furent arresté au conseil seulement. Et donnoient conseil les aucuns bellement qu’en ce boys fussent la jusques l’anuytement et que sourpris seroit Bertrant, lui et sa gent. 21088
e. a aba chappeaux d., aba exponctué.
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corr. (voir note) : f. a un dimee l.
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- Episodes français -
Adont parla Jehan de Brenes aultement, et dist un ier parler moult ourgueilleusement : « Seigneurs, se dit adonc, oiéz mon errement. Dire voulent François tout communement qu’Englois n’osent ferir aventureusement en eulx, fors que en querant avantage souvent pour sourprendre et traïr malicïeusement. Et je le dy pourtant, ne le celeray neent, que nous sommes icy plenté de bonne gent, touz hardiz, exprouvéz en bataille, en content, et sommes bien .viiic . combatans en present, et bien deux cens archiers de bon estorement. Et François ne sont pas .vic ., mon escïent. » Si sera pou d’onneur a nous certainement et ne sera tenu a nul bon hardement se de nuit assaillons les François tellement. Et on dit a la foy : “ Meulx vault honneur que argent”. » 707
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Aussi tost que Jehan ot dit sa volunté, touz les Englois se sont a ce fait actordé et dient : « Alons en sur Bertrant l’aduré. A nous ne durera mais quant nege en esté. Nous avons de bon vin le cervel estonné, si en serons plus fors dedens l’estour mortelz. » Adont ont les Englois courours ordonné pour aler descouvrir dessus nostre barné, voir en quel estat nous serons ordonné, car Englois ont paour, ja ne vous sera celé, car se François avoient leurs convoys atourné, que sans estour livrer n’aient le dos tourné. Car bel sont a veoir et si estoient plenté si avoient .C. combatans en Chisec la freté, qui sont touz pourveüz, garny et appresté d’issir sur noz François aus champs dessus le pré quant assailli seront des Englois a plenté. Ainsi comme Bertrant, au joly cuer notré,
[258r]
- Chisec : provocation des Anglais a touz les bons barons a son conseil mandé pour deviser comment se seront ordonné, virent deux coureurs qui furent blanc paré, et puis en revint deux courans touz abrivé. Au logis du hourdis ont frappé et hurté, disans : « Or sus, François, venéz dessus le pré. Bataille auréz briesment, si tant estez osé. » Atant se sont retraiz qu’ilz ne soient bersé. Et aussi tost qu’ilz furent un petit retorné vit on Englois venir renger et ordonné, a pié tout seulement et sery et serré, les archiers tout devant, chascun l’arc entesé, et gens d’armes aprés a mains penons levé, chascun la lance ou poign et l’espee au costé, banieres et penons au vent desveloppé. Ceulx bacinetz y vont gictant grant clarté. De blanche toyle sont touz vestu et paré. Noble chose estoit voir, en verité. La furent des François longuement regardé. Tel faisoit semblant au devant de grant ierté qui plus simple devint que un reclus enfermé.
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[258v]
Quant François ont veü des Englois la maniere qui ont .iic . et plus de celle gent archere, et .viiic . bacinetz, gens d’armes droituriere, et voient mains penons et mains grande baniere, et maintes lances aussi plus royde c’un oysere que ce semble a veoir une forest pleniere, et de toyle vestue estoit celle gent iere* et a une croiz vermeille devant et deriere., se François eurent fait au matin bonne chiere, aussi basse la font et s’embruchent deriere et dient bellement : « La virge trezoriere a honneur aujourduy nous gict de la gaschiere. » L’un se souhaide a huy et l’autre a masïere. 21179
corr. d’après P : vers supprimé, voir note
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- Episodes français -
709 Quant Bertrant a veü les François acoyser et regarder Englois et la teste baisser, « De vous souvent a Dieu le pere droiturer, leur a dit aultement, veilléz vous commander. Je voys que honneur moult grant nous vient cy approchier. Aujourduy aurons d’onneur le recouvrier. il nous convient viser, penser et sommiller* comment nous nous porrons ordonner et rengier, que jamais ne vouldray ne boyre ne mangier si me seray volu contre Englois assaier. Veéz les paremens pour Englois enseigner : de toyle sont vestuz que je voys blanchoier. Ce nous donne a entendre et fait signiier que ne nous voulent point seulement tant priser que de point d’armeüre descouvrir aient chier. Vraiment, grant ourgueil leur a fait enserchier, et oncques Jhesucrist n’eu homme orgueilleux chier. Je vous octroie touz les membres a trenchier se vous ne veéz tost leur ourgueil tresbuchier. Qui n’est bien adoubé, si se voise appareiller. Une bataille aray, je iray tout premier. Et une elle ferons a mon destre appointier : Giefroy de Karismel le saura bien guier, et Alain de Beaumont, mon cousin que j’ay chier, et Morisse du Parc le gentilz chevalier, A senestre sera, o lui mains escuier. Et nous lerrons droit cy pour ce chastel plenier Jehan qui de Beaumont porte son nom entier. Avec lui demourrons .iiiixx . soudoier ain que les Englois du chastel sur rochier ne nous puissent grever ne nuire par derrier. » A ce conseil icy se vont touz appaier. Atant es .un. heraut englois qui vint crier :* « Bertrant du Guesclin, pou faictes a prisier, qui faictes noz seigneurs se longuement joquier. 21193
Une lettre diicilement lisible est cancellée entre nous et nous.
- Chisec : attaque française -
[259r]
Faictes nous assavoir tantost sans detrier se combatre voléz ou la place laisser. » Et Bertrant respondi : « Penséz du repairer. Assez tost nous verréz de voz gens approcher. » Aus Englois s’en rala le heraut sans targier et leur dist de Bertrant qui cuer ot de guerrier, qu’il se paine forment de sa gent appointer. Englois par leur ourgueil et par oultrecuider se vont dessus le pré asseoir et plaquier, et puis croysent les jambes ainsi que cousturier. De telz en y avoit qui eüssent mestier de dormir car le vin qu’ilz beurent ou ramier leur avoit esmeü un pou le haneppier. Noz François si les voldront assez tost reveiller, ainsi comme vous orréz ou livre retraiter.
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710 Ainsi comme je vous dy se sont Englois assis sur le champ, actendant noz François seignoris. Et quant de noz François furent Engloys choisys, bien virent que Englois sont de grant ourgueil espris. Bertrant dist aus François : « Or avant, mes amis. Issons hors de ce part, abatons ses palis, et alons courir sur noz mortelz ennemis. Enqui par leur ourgueil seront touz au bas mis. » Adont issi Bertrant tout hors du paleteis. Hors du clos sont issu noz François agentiz et puis se sont rengéz dessus les préz loris. Aussi paisiblement et de aussi bon advis comme si les Englois fussent enfans petis, ne se daignent lever des champs ou sont assis tant que prés d’eulx seront noz François seignoris. Or oiéz des Englois, du chastel de ault pris. Du chastel sont issu pour commaincer estris. Et tant furent hasty d’issir, m’est advis, qu’ilz furent touz mors atrappéz et pris ains que Bertrant se fust aus Englois aaty.
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- Episodes français 711
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Hors du chastel issirent les Englois a bandon. Ilz vindrent ou logeis des François de renon, mais noz François trouverent a ce jour si felon qu’ilz furent mors ou pris a leur divisïon. Tristant Engoulement, a la clere façon, y prist Robert Miton a sa divisïon, qui cappitaine fu du chastel de renon. N’y a cellui qui n’ait prison pour rançon. A Guesclin si fu dit qui fu sur le sablon, que les Englois estoient yssu hors du danjon et qu’ilz sont desconiz, si est pris Robert Miton. « Hé, Dieu, se dist Bertrant, du cuer vous aouron. » A noz François a dit : « Or soiéz tous proudon. A Dieu le veu. Englois briesment desconiron. S’ilz estoient .ii. tant, ne les prise un bouton. Ja sont ilz extrené a leur confusïon : c’est signe que en la in auront maleïçon, car voir perte ne vient pas seule, par raison. 712
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Bertrant du Guesclin a ordonné sa gent et leurs dist mains parlers pour prendre hardement. Quant tout fu appresté pour commaincer content, et véz vous .i. hayraut englois qui aultement escria a Bertrant si trés hault qu’il entent : « Sire, quant auréz prest, par le saint Sacrement ? A vous ordonner mectéz trop longuement. Poy priséz noz seigneurs, dont chascun vous atend, ou vous avéz paour de commaincer content. Se vous vouléz paiser sans combatre noient, a noz seigneurs l’iray dire tout leement. – Nenny, se dist Bertrant, par le mien serement. De concorde de paix n’ay ores nul talent. Ce que j’ay atendu tant et si longuement c’est pour l’eure passer car le livre defent, car jour deveé est aujourduy proprement.
[259v]
- Chisec : combat entre les deux armées -
[260r]
Et l’eure est tournee sur voz gens laidement, car touz sont desconfy ceulx du chastel present, et si est Robert Miton prisonnier vrayment : c’est signe que victoire nous donra Dieu briesment. Aléz faire lever sur les piez vistement vos gens qui seent sur l’erbe qui resplent : ne deigneroions a eulx faire assemblement s’ilz ne sont en estat apresté gentement. – Sire, dist le heraut, vous parler noblement. » Aus Englois retourna et crioit aultement : « Or sus, seigneurs, dist il, levéz sus vistement. Assailléz ces François qui ourgueillesement ont ja ceulx du chastel desconfyz laidement. Le cappitaine est pris et octise sa gent. Ainsi feront François de vous certainement, se ne vous defendéz bien et hardiement. » Lors se levent Englois en criant aultement : « Saint George, oubliéz vous voz gent ensement. » Adont ont fait tromper une trompe d’argent. Ja y aura debat et merveilleux content. Tel y cuida gaigner qui perdy grandement.
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713 Or sont drecié Englois vistement en estant et vont contre noz gens pas a pas cheminant, et noz gens encontre eulx, a qui Dieu soit garant. Englois avoient mis arbalestriers devant qui traoient tellement et par tel convenant que des leches sembloit que a l’aer vont volant ainsi que une nuee qui bien ala visant. Et quant dessus François vont les leches cheant dessus ces bacinés qui sont cler luisant, irent tel cliquetis en noise demenant que ce sembloient fevres sur enclumes forgant. Mais ce trait ne greva noz François un seul gant. D’une part se sont traiz les archiers dont je chant, et gens d’armes se vont bellement approchant.
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- Episodes français -
Par les rens s’en aloit Jehan d’Eures courant et disoit aus Englois : « Aléz moy escoutant. Si tost que vous irer les François enferrant et qu’ilz feront pousséz puissament en poussant, voz glaives par compas a terre aléz mectant et puis leurs couréz sus a la hache et au branc. Les glaives qu’ilz tenront nous irons decoppant. Touz seront desconfy par cestui convenant. » A ce fait cy se vont les Englois actordant. A noz François se vont ierement assemblant. Fier fu l’estoquis quant se vont approchant. Chascun la lance ou poign se vont fort estoquant et de corps et de pis, l’un sur l’autre boutant. A ce primier enpoint dont je vous voys parlant alerent noz François les Englois si poussant qu’ilz les font reculer .xx. piéz, mon escïent. Dolant en fu Bertrant, si se va escriant : « A, mes amis, pour Dieu, aléz vous arrestant et penséz de bouter de la glaive poignant. Chascun en son endroit se teigne pié estant, et vous verréz Englois maintenant recreant. » Adont s’en vont Englois contre François ichant, qu’aussi roy c’une tour se vont contre eulx tenant. Arbalestriers avoient noz François ne sçay quant qui sur Englois traoient, plusieurs en vont versant. Et vallés par derriere vont grans pieres gictant. La n’y ot si petit ne vaussist un Rollant. 714 Seigneurs, moult longuement dura le batys,* car moult par fu pesant et ier l’estoquis. Englois furent foyson, courageux et hardis, et tenent pié a terre en fort boutant tousdis. Adont ont les Englois, touz grans et petis, mises les glaives jus, a leurs piéz les ont mis. Espoies et espoy sacherent a devis et haches et faussars d’acier clers et brunys, pour les glaives copper de noz François norrys.
[260v]
- Chisec : combat entre les deux armées Atant véz vous Bertrant qui s’escrie a ault cris : « Tenéz bien vous glaives, pour Dieu, mes bons amis. Et vous verréz Englois maintenant desconis, car a destre nous vient une eschielle de pris. Ne laisséz point cheoir voz glaives, mes amis. Tenéz vous roit et ier en boutant par advis. » Lors bouterent François Englois par tel devis qu’ilz les font reculer .xii. piéz acompliz. Les Englois voluntiers reussent leurs glaives pris, mais ce fu pour neent, tost en auront le pis. Englois par leur ourgueil se verront entrepris : ourgueil ne monta oncques, ains ravale tousdiz.
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[261r]
En ce point que François leurs grans lances tenoient, encontre les Englois moult vaillemment poussoient ; estoient courroucéz Anglois qui reculoient. De cuer et voluntiers leurs lances reprendroient, mais plus ilz ne les eurent car ilz les eslongerent. Et d’autre part François a deux elles venoient, a destre et a senestre sur Englois acouroient. Et de haches qu’ilz ont tellement les batoient que testes et espaules et les brafs leur coppoient, les bacinétz luisants des testes abatoient, et les aucuns d’espois et de dagues frappoient, et pour les vifz trouver es armeures feroient. Et les Englois puissant moult fort se defendoient, mais tant sont appressé que fouÿr ne pourroient. Voluntiers s’ilz peüssent ilz se ralïeroient, mais François a touz léz si fort les appressoient et de haches puissans si grans cops deschargoient que a terre ont tresbuchié tout quant qu’il ataignoient. « Monjoie », « Saint Denis » et « Guesclin » ault crioient. Et les Englois puissans saint George reclamoient. La n’ont mie trouvé ce qu’ilz requeroient.
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- Episodes français 716
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Forte fu la bataille, merveilleuse et puissant, mais elle n’ala pas trop longuement durant. Depuis que les .ii. elles dont je dy devant alerent sur Englois en la bataille assemblant, plus tost furent rué a terre sur le champ c’on ne seroit alé trois trefz d’ars en courant. La peüst on oÿr un martelis pesant. Giefroy de Kalemel s’i ala bien portant, et Alain de Beaumont ; ces .ii. dont je vous chant avoient a garder la destre elle puissant. Et Morise du Parc et Rochefort le grant la senestre elle avoient a conduit sur le champ. Et Guillaume des Bordes ne s’i va oubliant, et de Chasteauleraut le viconte puissant, le viconte d’Aunay a l’aduré talent, le sire de Montfort en Bertaigne seant. Et Jehan de Beaumont y vali un Rollant. Chascun abat le sien d’une ache trenchant. Englois furent espars et se vont defouchant. Et Françoys en entrerent en eulx esparpillant, d’un cousté et d’autre se vont entremellant. L’un crie « Rançon. », l’autre va combatant, et l’autre regarda par ou iroit fuiant. Bertrant du Guesclin va son enseigne criant, a destre et a senestre va sur Englois ferant. Jaconnelle le voit, un Englois souisant. Bien et hardiement assembla a Bertrant, d’une dague qu’il tint le va fort estiquant. Et Bertrant contre lui se va bien defendant. Bertrant par la visere va l’Englois saisissant, un pou le soubzleva, sa dague y va boutant : tellement le fery que un oeil lui va crevant. Et puis ala Bertrant « Guesclin. » fort escriant. A sa gent escria, que entour lui vit tant : 21399 21425
a. trois d trefz d’a., d cancellé. l. fery co que u., co exponctué.
[261v]
- Conquêtes de Nyort, Civray, Janssay et Lezignen « Tuéz moy ce ribaut qui me va appressant. » Adont fu assailli et deriere et devant. De grans haches pesans le vont Bertons servant, comme char a mesel le vont tout decoppant. Ce Jaconnelle avoit louhé ou temps devant que a Nÿort ramenroit Bertrant a son talent, mais folie et ourgueil l’en ont fait dire tant, de vantise de fol va plenté demourant.
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[262r]
Ne sçay que vous iroie longuement devisant. Englois sont desconis laidement sur les champs. La en y ot de mors entre .iiii. et .vc ., des archiers s’en fouÿ assez et largement, pris furent les plus grans en vie sauvement. Pris fu Jehan de Brene tout primierement, et cellui d’Angeuses qui regna puissanment ; cincq en y ot sans plus de noble convenant, mains autres chevaliers, escuiers ensement. N’y a cellui de noz vallés n’y autre gent qui n’eüst prisonnier a son commandement. Combatre se vouloient l’un a l’autre en present pour les bons prisonniers, dont ilz ont largement. Mais Bertrant du Guesclin leur it commandement chascun son prisonnier octist a torment. Et il fu ainsi fait, n’osoient autrement. Touz furent mis a mort assez vilainement, si ne furent aucuns des plus grans proprement. Et puis vers le chastel alerent noz gent qui tost leur fu rendu a leur commandement. Ainsi eurent Chisec nostre françoise gent. Lors commanda Bertrant a l’aduré talent que chascun avec lui s’en voyse hastivement : a Nÿort s’en ira, se dit, certainement, et souppera leens a son commandement.
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Seigneurs, oiéz, pour Dieu, dont François s’aviserent. Les vestimens de toyle que Englois y apporterent prirent pour eulx parer, les Englois despouillerent. Dessus les armeüres moult bel les endosserent. Et puis sur les chevaux isnellement monterent et prist chascun sa lance, leurs bacinetz lacerent, banieres et pennons des Englois ault leverent, vont s’en envers Nÿort, les bons chevaux brocherent. Et tant ont cheminé que Nÿort adviserent. « Saint George. » vont criant, Englois les escouterent : que ce fussent Englois moult bien ilz le cuiderent. Leurs portes vont ouvrir et si les defermerent. Et noz gentils François dedens Nÿort entrerent. Et quant ilz furent ens, « A la mort. » escrierent. Englois furent sourprins, que un petit ne durerent : qui raençon demande, de mort le deporterent, et qui se defendy, a la mort le livrerent. Ainsi prirent François Nÿort et conquesterent. Puis conquerent Cyvray ou grant avoir trouverent, et Janssay ensement par leur force gaignerent, et Lezignen aussi, ou fort chastel trouverent. Le bers Carenlouet, que François tant amerent, estoit devant Nÿort, car Englois l’ainerent. Du païs de Poictou les Englois demourerent, a force et a vertu dehors les enchasserent. François par bon accort seneschal ordonnerent de Alain cellui de Beaumont ; en Poictou le laisserent. Et puis a Pont Urson vistement s’en alerent, ou le duc de Bertaigne moult bien trouver cuiderent. 719
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Seigneurs, or escoutéz, pour Dieu le ilz Marie. Aprés ceste adventure que je vous signiie, que Poictou nectement ot esté acquitee, alerent noz François a Pont Urson l’antie, et par my la Bertaigne qui de biens est garnie,
- Bretaigne, Paris, Perregort -
[262v]
car le duc de Bertaigne ot convent une fye qu’il viendroit a Paris la cité bien garnie pour acorder au roy et moustrer druerie. Mais point n’y fu venu, dont il it grant folie, car qui fait ce qu’il doit, il ne forvoie mie. Noz François en Bertaigne irent telle aramie qu’ilz convint a la in le duc tornast en fuye. En Engleterre ala par la mer ressongnie, et en Flandres fu il a privee maisnie. Et noz François estoient a noble baronnie. En Bertaigne qui lors estoit moult bien garnie, aus François obeïrent mainte ville jolye. Les plusieurs prirent terme, par raison establie, d’eulx retorner François ains l’eure de complie, se du fort duc n’avoient confort et bon aïe. François s’en retournerent en France la garnie. A Paris vint Bertrant, a la chiere hardie. Le roy le festia et it grant courtoisie. Puis n’y demoura pas longtemps, je vous aie, que au gré du roy de France et de sa commandie le riche duc d’Anjou it une chevauchie par devant Perregort, comme l’istoire crie. Avec lui assembla moult belle compaignie. Bertrant du Guesclin y ala sans detrye, Yvain cellui de Gales ou moult ot vaillandie, Thibaut du Pont y fu, a la chiere hardie, le gentilz mareschal de Sausorre l’antie, et Pierre de Villiers, plain de bataillerie, et mains bons chevaliers que je ne nomme mie. Quant assemblee fu la noble baronnie, a un chastel alerent dont la tour est antie entre le Limosin et Perregort l’antie : la Bernardiere ot nom celle tour bataillie. Planté y ot Englois et de malvaise maignie. Mais si tost qu’ilz oÿrent dire par une espie que le duc d’Anjou vient o Bertrant chiere lie, dela se sont fouÿ car paour les agrie et bouterent le feu parmy la manandie.
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- Episodes français -
Leurs prisonniers ardirent par leur oultrecuiderie car le feu les souprist, dont il ne me pleu mie. Et un prestre y fu mort, comme l’istoire crie, qui depuis fu trouvé ; sa main estoit garnie d’un calice d’argent, dont l’euvre reslambie. Dont grant pitié en ot nostre chevalerie. 720
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Aprés ceste adventure que les Englois irent et que la Bernardiere de male lamble arderent, vindrent la noz François qui pou y conquirent. A Condac sont venuz noz François et l’assirent. Mais par force de temps moult de maulx y soufrirent. Droit par un samedi un grant assault y irent, mais par force de temps dela se retraierent.* Touz ceulx qui sont vivans tel orage ne virent. Noz gens bien cent chevaux par orage y perdirent. Mais lendemain tout droit le chastel assaillirent, moult bien et puissament noz François l’assaillirent. Tant gicterent d’angins et tant d’assaultz y irent qu’au duc d’Anjou Englois en la in se rendirent, voyres, sauf leur vie, car dela se partirent. A Bergerac s’en vont, ou telz nouvelles distrent dont ceulx de Bergerac bien pou se rejoÿrent. 721
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En ceulx de Bergerac n’y ot que couroucer. Le païs leur ont tolu les François droiturier et mains assaultz y font et main et anuitier. En la in se rendy Bergerac sans dangier. Le chastel de Livec se rendi de legier, aussi i Saincte Foy, ou les murs furent ier. Puis ne demoura guerres, si comme j’oÿ noncier, que au riche duc d’Anjou se rendy un princier : Berducas de l’Abret l’appellent les guerrier. Et .xxvii. chasteaux tout en son héritier 21542
corr. d’après P : F. et laisserent.
[263r]
- Siège de Chasteau Neuf de Randon -
[263v]
rendi au noble duc tout a son desirer. Le sire de Duras qui estoit prisonnier volu au bon duc d’Anjou de sa foy denoncier qu’il vouloit devenir François sans varïer. Mais il faussa sa foy ains que venist l’iver. A Bordeaux s’en rala pour Englois festïer. le duc d’Anjou le sceu, en lui n’ot qu’aïrer. Chasteillon se rendy et la tour Engelier. Par devant Saint Maquaire s’ala le duc logier, o lui le connoistable Bertrant le bon guerrier, et Yvain qui deüst les Galois justicier. Le gentilz Perceval ne s’i volu oublier, et la vint de Concy le sire droiturier, qui de France amena mains nobles guerrier. Un pou de Saint Macquaire vous voldray noncier, du siege que François y volurent commaincer.
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722 Droit devant Saint Maquaire le bon duc se logea, er Bertrant avec lui qui noblement regna. Plusieurs villes, chasteaux se rendirent droit la, et Saint Maquaire aussi a noz gens s’actorda. Ainsi le duc d’Anjou en Guïenne regna. Depuis le noble duc vers Touraine rala, et a toutes ses os le congié il donna. Et Bertrant s’en revint a Paris par deça. Puis ne demoura guerres, si comme on me compta, que Bertrant le gentilz en Guïenne rala pour tel convenant que puis ne retorna, car Bertrant y moru, du siecle trespassa, ainsi comme vous orréz qui oïr le vouldra.
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723 Oiéz, seigneurs, pour Dieu qui soufry passïon. Se de Bertrant disoie sa grant regnacïon, touz les faiz ou il fu par sa poccessïon, et nommer les chasteaux et les villes de nom
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- Episodes français -
que ja conquist Bertrant, ce seroit ravison. Et pourtant vous di en la conclusïon que tant ala Bertrant, puis aval et amon, conquerant sur Englois, si comme nous vous disons, qu’il vint logier devant un chastel bel et bon, qui par non est nommé Chasteau Neuf de Randon. La mist siege Bertrant entour et environ. Avec lui avoit maint nobles baron, chevaliers, escuiers, gens d’armes a foison. Au chastel est venu Bertrant dont nous parlon. Le chastel demanda au cappitaine de nom, et qui rendy le fort au riche roy Charlon, ou il l’assegera par tel divisïon que jamais n’en partira en icelle saison, si aura le chastel a sa divisïon. Le cappitaine respond une belle raison et dist : « Sire, Bertrant, oiéz que nous dirons. Voir est qu’il est bien en vostre possessïon de nous cy assegier entour et environ, et les vivres tollir, dont on fait norrisson, car vous estez plenté et de gens a foison. Et si estez le plus preu et de plus grant renon comme qui a present puisse chausser esperon, et si avéz a seigneur, de certain le savon, un roy le plus puissant qui soit en tout le mont, si que vostre pouoir point ne despriserons. Plus que a homme vivant grant honneur vous doit on aprés le sang roial, de certain le savon. Mais se encores avoiéz plus grande regïon et fusséz aussi fort comme le fort Sanson, et aussi puissant comme le roy Salmon, n’auroiéz vous pas ainsi nostre chastel de nom si ne savons par quoy et par quelle raison, car nous sommes garny de noble garnison 21629
p. ainsi vostre nostre c., vostre exponctué.
21620
corr. d’après P : p. puisse chausse esperon
[264r]
- Mort de Bertrant et si avons bon chastel et de noble façon, et si sommes plenté pour la defensïon. Ne fait ne nous avéz assault ne contencion : si ainsi nous rendoions, foy que doy saint Symon, le roy englois pourroit bien dire par raison que vers lui nous auroions ouvré de traïson. Si que l’omme qui vault vivre sans souspeçon, il se doit bien garder de faire traïson. »
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724 Quant Bretrant entendy les motz du cappitaine, adoncques en jura la sainte Magdalene dela ne partira de l’an ne de sepmaine, si aura a son vouloir le bon chastel demaine. En son tref retourna qui n’estoit pas de layne. Un assault it Bertrant ains que fu la .xve ., mais il n’y conquist riens et sa gent y formaine. Dolans en fu Bertrant qui prouesce demaine. Et tant fu la Bertrant, le ilz de chastelaine, qui la mort qui a touz est et sera prochaine, l’assailli tellement qu’il n’ot ne cuer ne vaine qui ne fust amorty ains la sepmaine plaine.
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[264v]
Bertrant du Guesclin, quant malade se sent qu’il ne se puet aider ainsi ne autrement, adont se it coucher en un lit bel et gent. La s’adreça le bers moult bien et dignement, pour la mort recevoir s’adreça bonnement. Moult bien se confessa, receu son sacrement, et disoit mains regréz et si piteusement qu’il faisoit les barons plourer piteusement. Souvent disoit Bertrant a l’aduré talent : « A Dieu commant m’amie, ma mouiller au corps gent. Ainsi comme je l’ay servy trés loiaument me face Jhesucrist pardon entierement. 21663
f. Jhesucrist b pardon e., b exponctué.
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- Episodes français -
Hé, Noble duc d’Anjou, Dieu vous gart de torment. Et vous, duc de Berry. A Dieu ma bonne gent. A Dieu duc de Bourgoigne, ou tout honneur comprent. A Dieu duc de Bourbon, gentilz prince excellent. A, doulce France, amie, je te lerray briesment. Or veille Dieu de gloire par son commandement que si bon connoistable aiéz prochainement, dequoy vous vailléz mieulx en honneur pleinement. » Ainsi disoit Bertrant qui le mal de mort sent. Devant lui it venir sans nul arrestement le gentilz mareschal de Sausorre present. Et lui pria pour Dieu, le pere onnipotent, que au cappitaine voit parler hastivement et lui face entendant que Bertrant proprement a juré et vouhé a Dieu onnipotent que jamais de par lui, ne son assentement, ne le fera prier de nul accordement ; ains l’aura bien briesment par force et autrement. Si le fera morir et encroer au vent, et touz ceulx de leens decoler laidement. « Or leur dictes ainsi, que le mien corps m’aprent qu’ilz se rendent a moy ains mon desinement et que Jhesu le pere, a qui le mons appent, me fera cest honneur a mon trespassement. » 726
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Voir est que les Englois du chastel garité ne se vouloient rendre a homme qui ne fu né, duc, prince ne baron, tant par fust redoubté. Et eurent les Englois touz ensemble juré de rendre le chastel dont je vous ay compté. Lors se sont les Englois entre eulx touz accordé, mais que Bertrant voyse la qui tant est redoubté. Atant le mareschal s’est a eulx amonstré, de rendre le chastel leur a moult sermonné. Ilz dient : « Aiéz vous Bertrant cy amené ? A ce respondrons qu’il aura demandé. »
[265r]
- Mort de Bertrant Se dist le mareschal : « Bertrant en a juré : ne vous enparlera en jour de son aé, ains vous destruira tost, ainsi l’a en pensé, dont je suis a mon cuer dolant et couroucé. Cuidéz vous dont qu’il m’ait tramis ne envoié a venir par deça ? Nenny, en verité. Mais j’ay d’entre vous touz grant pitié, qui avéz puissanment comme bonne gent regné, que conseil ne creéz pour vostre sauveté. Se vous voléz les clefz emporter en son tré, vostre honneur garderay, selon ma poesté. » Et Englois a ce faire ce sont touz actordé. Du chastel sont issu et aval avalé. A Bertrant sont venu et lui ont presenté les clefs de leur chastel qui estoit bien fondé. Quant ilz virent Bertrant a son lit agitté, les pluseurs si se tindrent a cellui jour a trompé. Et les pluseurs ont dit : « Dieu, doint Bertrant santé. Plus lui aiert d’onneur c’on ne lui a porté. Pas ne sommes rendu a bregier rassoté mais a plus preu qui fu a cent ans né. » Or oiéz de Bertrant dont il s’est advisé. L’espee demanda, que le roy couronné lui livra quant il fu connoistable nommé. Le gentilz mareschal a tantost appellé. « Je vous baille a garder de France le barné et ceste espee cy qui est d’acier trempé, rendréz au bon roy de France l’erité. Mareschal, dist Bertrant, oiéz ma volunté. Et si vous pri que a lui me aiéz recommandé, et a touz les barons de France le regné. Et priéz touz pour moy, car mon temps est alé. Et soiéz bonne gent, aiéz l’un l’autre amé, et servéz loiaument nostre roy couronné. » 21719
q. fu sain s a c., sain exponctué, s cancellé
21730
corr. d’après P : et prie touz p.
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- Episodes français -
La it mains beaux regréz Bertrant au corps membré. Puis ne demoura guerres, se dit l’auctorité, que Bertrant trepassa, Jhesu en ait pitié, car preux fu et loiaux tousjours en son aé. 727
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Ainsi moru Bertrant qui tant fu de hault pris. Dont moult furent dolant les barons de hault pris, et touz les soudoiers, les grans et les petis. Oncques ne fu tant plaint homme de mere vy. Et quant le bon roy sceu que Bertrant fu feny, ains ne fu si dolant, si comme dit l’escript. Assez le regreta le bon roy que je dy. Et commanda le roy que Bertrant le gentilz soit mis et enterré tout droit a Saint Denis, droit au pié de la tombe ou il doit estre mis. Adont fu aporté Bertrant dont je vous dy. Mais on ne l’apporta mie parmy Paris, pour cause que le peuple, dont Bertrant fu chery, eüssent demené et grans pleurs et grant criz. A Saint Denis tout droit, l’abbaïe de pris, fu Bertrant enterré, a qui Dieu soit amis. Et Charles le bon roy guerres ne demoura puis, et fu a Saint Denis enterréz, ce m’est vis. Aprés fu couronné Charles son ainé ilz. Depuis fu Olivier connoistable esliz, cellui qui de Gliçon maintient les ediiz. Dieu lui doint si regner, le pere Jhesucrist, que ce soit a l’onneur de France le païs. Cy ine de Bertrant, a qui Dieu soit amis. Dieu le pere nous doint paix et paradis et il veille amander touz noz ennemis. 728
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Explicit du bon connoistable de France messire Bertrant du Guesclin sans doubtance, qui enterré fu a Saint Denis en France.
[265v]
- Mort de Bertrant Et fu achevé sans aucune faillance Le quinzesme jour de fevrer, l’an quarante mil quatre cens, c’on disoit par toute France.*
639
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Pièces Lyriques
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- Pièces lyriques -
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I. Touz les vaillans et les preuz de jadis Touz les vaillans et les preuz de jadis, Toux les presens et toute creature, Cesar, Hector, Alixandre et David, Artus et Charles et moy qui suis Nature, Godefroy et Machabee, Et tout homme qui a hault honneur bee Doivent de pleurs faire riviere et onde, Car par la mort est la terre troublee Du plus vaillant qui fust en tout le monde.
[266r]
Comment sera son noble corps assis, Ne qui fera si noble sepulture Entre les dieux deüst estre ravis, Corporelment et en sepulture. Soit la proesce louhee Ain que touz sachent sa renommee, Car dessus touz en faiz d’armes habonde, Tant que la mort soit en touz lieux plouree Du plus vaillant qui soit en tout le monde. De touz ceulx que je formay et feis Estoit la leur et la droite esliture, Qui en pou de heure a plus de faiz fornis Et qui mieulx a serchie toute aventure, Et par qui acheminee Estoit d’armes la trés doulce contree Qui pour sa mort en grant doleur redonde ; Las, aujourduy est France desnuee Du plus vaillant qui soit en tout le monde.
21786
s. en l tout l., l exponctué.
21780
corr. d’après P : Estre les Dieux
21769 21771 21773 21775 21777
21779 21781 21783 21785
21787 21789 21791 21793 21795
644
- Pièces lyriques -
II. Estoc d’onneur et arbre de vaillance
21797 21799 21801 21803 21805
21807 21809 21811 21813 21815
21817 21819 21821 21823 21825
Estoc d’onneur et arbre de vaillance, Cuer de lÿon espris de hardement, La leur des preux et la gloire de France, Victorieux et hardy combatant, Sage en bons faiz et bien entreprenant, Souverain homme de guerre, Vainqueur de gens et conquestour de terre, Le plus vaillant qui oncques fust en vie, Chascun pour vous doit Dieu requerre. Plouréz, plouréz, leur de chevalerie. Las, Bertaigne, pleure ton esperance. Normendie, fay ton enterrement. Guienne aussi. et Auvergne, or t’avance. Et Languedoc quier lui son monument. Picardie, Champaigne et Octident Doivent pour pleurs requerre, Tragiduis, Arcusa requerre, Que en eaue fu par pleurs convertie Ain que a touz de sa mort le cuer serre. Plouréz, plouréz, leur de chevalerie. Hee, Gens d’armes, aiéz en remenbrance Vostre pere, vous estez ses enfant. Le bon Berton qui tant ot de puissance, Il vous amoit trés amoureusement. Guesclin crioit : « Priéz devotement. » , Qui puet paradis conquerre Qui dueil n’en fait et qui n’en prie, il erre, Car du monde est la lumiere faillie. De toute honneur estoit la droite serre. Plouréz, plouréz, leur de chevalerie.
[266v]
- Pièces lyriques -
645
III. Touz chevaliers qui aléz par le monde Touz chevaliers qui aléz par le monde Et qui fuyéz le mestier honnourable, Plouréz la mort du vaillant connoistable. Son grant renon par le siecle habonde, Ce fu Guesclin le vaillant connestable. Touz chevaliers etcetera Oncques n’ot tel a la table ronde Car touz ses faiz sont grans et merveillable, et quant ilz sont plus que d’autre loiable. Touz chevaliers etcetera
21827
21829 21831
21833 21835
IV. Bien doit plourer chevalerie Bien doit plourer chevalerie Puis que mort est cellui qui tant l’ama, Le plus proudons, Bertrant qui en sa vie Les grans faiz d’armes tousjours continua, Et qui partout ses ennemis mata Ou il fu chief, c’est verité prouvé, En mer, en mine, en champ combatu a, Et par son fait Espaigne conquestee. Ha, Chevaliers, escuiers qui envie Avéz d’onneurs querre, qui vous menra ? Qui fera mais a pouvre gent aÿe, Ne qui chevaux ne harnois leur donra ? Qui dira bien des bons, qui le dira ? Puis que la char est en terre boutee Du preux Bertrant qui France recouvra Et par son fait Espaigne conquestee.
[267r]
21840 21850
q. partout touz chevaliers ses e., touz chevaliers cancellé. d. preux p B., p cancellé
21837 21839 21841 21843
21845 21847 21849 21851
646
21853 21855 21857 21859
21861 21863
- Pièces lyriques Ha, doulce France, que dure departie Du vaillant homme qui tant vous honnoura Et qui gardé vous a vostre seignorie Dés que la prist et que tenue l’a. S’envie ne fut qui jamais ne morra, d’Alebien l’ordre fausse couvee Vous eust vengé qui l’aigle noir porta Et par son fait Espaigne conquestee. Prince, je pri a Dieu qui tout crea, Qu’en paradis soit l’ame couronnee Du preux Bertrant qui d’armes tout passa Et par son fait Espaigne conquestee.
V. L’escu d’argent a un aigle de sable 21865 21867 21869 21871
21873 21875 21877 21879
L’escu d’argent a un aigle de sable A .ii. téz et a un roge baston Portoit le preux et vaillent connoistable, Le bon Bertrant du Guesclin en surnom. De Bertaigne fu né le bon baron, Fier et ardi, courageux comme un tor, Qui tant ama de loial cuer et bon L’escu d’azur a trois leurs de lis d’or. A lui n’estoit chevalier comparable De prouesce son vivant, ce scet on, Ne qui tant fust en armes convenable Pour vaincre gens a baniere ou penon. Or est il mort, Dieu lui face pardon. C’or pleust a Dieu qu’il vesquist encor Pour defendre de ce liepart felon L’escu d’azur a .iii. leurs de lis d’or. Pour ses grans faiz soit escript en la table
[267v]
- Pièces lyriques Machabeus et des preux le renon, de Josué, David le raisonnable, d’Alixandre, d’Ector et Cezaron, Artus, Charles, Godefroy de Billon, et soit nommé le dixesme des or Bertrant le preux qui servi con proudon l’escu d’azur a trois leurs de lis d’or.
647 21881 21883 21885 21887
VI. En l’an de l’Incarnation En l’an de l’Incarnacion Mil trois cens quatre vingts ans Six, en grande confusïon, Mardi, assez prés de Conlans, Pastureaux dont les plus dolans Disoit aus autres haultement : « Plourons honneur et hardement, Foy, loiauté et courtoisie, Et eur de chevalerie, L’amour, l’amant sans point d’amer, Le bon, le large pour donner, Qui desconit mains grans assault. Plouréz, menestriers et heraut, cellui qui largement donnoit et qui de loial cuer amoit tout honneur et toute vaillance. Toutes ces vertuz cy avoit le bon connoistable de France. » De Gadifer, de Handïon : « Est il mort le noble Bertrant, Cil du Guesclin, cuer de lïon, Qui tant amoit le roy des Frans, Qui si estoit entreprenans Qu’il ne doubtoit pluye ne vent, 21891
corr. d’après P : a. prés des C.
21889 21891 21893 21895 21897 21899 21901 21903 21905
21907 21909 21911
648
21913 21915 21917 21919 21921 21923
21925 21927 21929 21931 21933 21935 21937 21939 21941
21943 21945
- Pièces lyriques Qui travailloit songneusement, Qui ne redoubtoit mort ne vie, Assault, bataille ne envaÿe Faicte sur terre ne sur mer, Qui tant faisoit a redoubter, Qui tousjours avoit le cuer baut D’assaillir, ardant et si chault Que les couars hardiz faisoit. Nulz homs ne savoit que c’estoit de son bien et de sa puissance. Mais je ne croy point que mors soit Le bon connoistable de France. » « Si est, se dit Ammarion. Trespassé est le bon Rollans. Perdu ont un vray champïon Les pouvres pastoureaux des champs, Car ains Alixandre le grant Ne regna plus hardiement, Car en toute hardie gent Fu adéz son enseigne drecie. Adéz contre forte partie Vouloit sa baniere lever. Et s’il aloit pour conquester Un chastel fort et puissant et hault, Il disoit “C’est quant qu’il me fault”, Et qu’a la nuyt s’i logeroit. Et con cilz qui tient une roiz Pour prendre oiseaux a sa plaisance, Ensement disoit et faisoit Le bon connoistable de France. » Princes, Dieu qui tout scet et voit, Un connoistable nous envoit Si bon et de telle ordonnance Qu’il soit au prouit de France.
[268r]
- Pièces lyriques -
649
VII. Plouréz princes, ducs et barons Plouréz princes, ducs et barons, Touz chevaliers, escuiers et bourjois. Plouréz Normans, Angevins et Bertons La mort du preux connoistable françoys, Le bon Bertrant du Guesclin. Plourons, soions tretouz a Dieu enclin Pour son ame prier, c’est bien raison, Car loiaument defendi de cuer in Les leurs de lis du leupart felon.
[268v]
Hardy estoit et ier comme lÿon Le valereux chevalier et courtoys. Sa banere et ses nobles penons Trés ierement demoustroit sur Englois. Il les mectoit a declin Par sa valeur. Or luy soit Dieu a in, Et nous octroit avoir tel champion Qui garder puist par prouesce et engin Les leurs de lis du leupart felon. Soit enterré entre les roiaux bons Son vaillant corps par honneur, c’est bien drois, Car puis le temps des neuf preux, plus proudons En fait d’armes ne fu, si comme je croy. Tousdiz vray et enterin, A son seigneur estoit le palazin. Bien y appert a ses faiz de renon. Or veille Dieu garder, le trés begnin, Les leurs de lis du lieupart felon. Deo gracias
21957
sa p banere e., p cancellé.
21947 21949 21951 21953
21955 21957 21959 21961 21963
21965 21967 21969 21971 21973
Table des Matières La Chanson de Bertrand du Guesclin
5
Enfances 6 La converse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Prison . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 Tournoi de Resnes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 Guerre de Bretagne Origines du conlit . . . . . . . . . . . . . . . . . . Engagement de Bertrant . . . . . . . . . . . . . . . Adoubement merveilleux . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Forgeray . . . . . . . . . . . . . . . . . . Siège de Resnes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Siège de Dinant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Bescherel . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bertrant otage des Anglais . . . . . . . . . . . . . Retour à Guinguamp . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Pestien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Accusation de Felleton . . . . . . . . . . . . . . . . Mariage de Bertrant et Thiphaine . . . . . . . . . . Prise de Meulun . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Mante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bataille de Cocherel . . . . . . . . . . . . . . . . . Couronnement de Charles V . . . . . . . . . . . . . Siège de Valongues . . . . . . . . . . . . . . . . . Siège du Pont de Douve . . . . . . . . . . . . . . . Bataille d’Alroy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Négociations après la défaite . . . . . . . . . . . . Traité de paix entre Charles V et Charles de Navarre
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Episodes espagnols Enchantement de Pietres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Plainte de la reine d’Espagne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Afrontement de Pietre et Henry à Burs . . . . . . . . . . . . . . . . 651
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19 19 23 24 28 35 65 83 87 89 92 102 103 106 113 125 148 150 158 161 190 193
196 . 196 . 200 . 201
Mort de la reine d’Espagne . . . . . . . . . Révélations des origines d’Henry . . . . . . . Exil d’Henry . . . . . . . . . . . . . . . . . Bertrant recrute les grandes compagnies . . La Grande Compagnie à Paris . . . . . . . . Mort du roi de Chyppre . . . . . . . . . . . La Grande Compagnie à Avignon . . . . . . La Grande Compagnie en Arragon . . . . . . Pietres renforce ses possessions . . . . . . . La Blanche Compagnie prend Mangulon . . Prise de Bourges . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Bervesque . . . . . . . . . . . . . . Dam Pietres à Burs . . . . . . . . . . . . . Pendaison des bourgeois à Burs . . . . . . . Fuite de Pietres à Toulecte . . . . . . . . . Négociations à Burs . . . . . . . . . . . . . Couronnement d’Henry à Burs . . . . . . . Libérer Grenade ou tuer le tyran ? . . . . . . Fuite de Pietres à Cordonne . . . . . . . . . La table de Pietres . . . . . . . . . . . . . . Reddition de Toulecte . . . . . . . . . . . . La Grande Compagnie à Cordonne . . . . . Négociations entre Pietres et Henry . . . . . Fuite de Pietres et prise de Cordonne . . . . Négociations de Daviot et Turquant à Sebille Trahison de la juive . . . . . . . . . . . . . Fuite de Pietres à Lessebonne . . . . . . . . Prise de Sebille par la Grande Compagnie . . Pietres à Lessebonne . . . . . . . . . . . . . Mahieu de Gournay à Lessebonne . . . . . . Noces et tournoi à la cour du Portiugal . . . Joute contre Labaire . . . . . . . . . . . . . Combat entre Daviot et Turquant . . . . . . Arrivée de Pietres à Bordeaux . . . . . . . . Accord entre Pietres et le prince de Galles . Semonce de l’armée anglaise à Bordeaux . . Les Anglais quittent la Grande Compagnie . Semonce à Sebille de l’armée d’Henry . . . . 652
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205 208 210 212 218 219 221 230 235 236 240 242 248 249 250 254 259 264 268 269 270 273 274 277 279 281 284 285 288 292 294 299 304 309 311 317 320 322
Arrivée de l’armée anglaise en Espagne . . . . . . . Rencontre des deux armés à Nadres . . . . . . . . . Embuscade de Bertrant à Reze . . . . . . . . . . . Bataille de Nadres . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bertrant prisonnier des Anglais . . . . . . . . . . . Un banquet morbide . . . . . . . . . . . . . . . . . Le prince et Pietres en route vers Burs . . . . . . . Henry de retour à Tristemare . . . . . . . . . . . . Pietres et le prince reprennent Burs . . . . . . . . . Le prince de Galles et son armée quittent l’Espagne Pietres reprend Toulecte . . . . . . . . . . . . . . . Un noble pèlerin à Palpegant . . . . . . . . . . . . Visite d’Henry à Bertrant prisonnier à Bourdeaux . . Henry rend visite au duc d’Anjou . . . . . . . . . . Henry et le duc d’Anjou à Avignon . . . . . . . . . La mise à rançon du Besgues de Villaines . . . . . . Retour d’Henry en Espagne . . . . . . . . . . . . . Siège de Toulecte par Henry . . . . . . . . . . . . . Mise à rançon de Bertrant . . . . . . . . . . . . . . Bertrant quitte Bourdeaux . . . . . . . . . . . . . . Siège de Tarrascon . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bertrant vient en aide à d’autres chevaliers . . . . . Bertrant paie sa rançon . . . . . . . . . . . . . . . Siège de Toulecte . . . . . . . . . . . . . . . . . . Arrivée de Pietres et son armée à Toulecte . . . . . Le cheval de dam Pietres . . . . . . . . . . . . . . Bataille de Toulecte . . . . . . . . . . . . . . . . . Fuite de Pietres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Henry et son armée à la poursuite de Pietres . . . . Embûche en forêt . . . . . . . . . . . . . . . . . . Pietres traverse la mer en solitaire . . . . . . . . . . Retour au siège de Toulecte . . . . . . . . . . . . . Visite de Pietres à Bel Marin . . . . . . . . . . . . Les pèlerins à Monssussanc . . . . . . . . . . . . . La plan de Pietres dévoilé . . . . . . . . . . . . . . Bataille de Toulecte . . . . . . . . . . . . . . . . . Bataille de Moncel . . . . . . . . . . . . . . . . . . Capture de Pietres . . . . . . . . . . . . . . . . . . 653
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324 329 331 336 356 357 359 362 362 367 371 373 376 383 385 386 388 391 392 403 405 413 420 422 428 429 431 433 435 438 442 445 447 451 455 456 463 481
Convocation de Bertrant à la cour de Charles V Prise de Toulecte . . . . . . . . . . . . . . . . Rappel de Bertrant à la cour de Charles V . . . Prise de Sorie . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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Episodes français Plainte du comte de Foys . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bertrant en Pierregort . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bertrant à Paris . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bertrant est nommé connétable . . . . . . . . . . . . . . . . . Bertrant demande une aide inancière au roi . . . . . . . . . . Bertrant fait fondre sa vaisselle . . . . . . . . . . . . . . . . . Halte de l’armée française au château de Ville . . . . . . . . . L’armée française chevauche de nuit . . . . . . . . . . . . . . Embuscade de Pont Vallain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Assaut de Vaulx . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Saint Mor . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Bressiere . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Problèmes à La Rochelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bertrant de retour à Paris . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Reddition de La Rochelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bataille du pont de Lussac . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Mort de Jehan Chando . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Chastelayraut . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise d’Ussel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Saincte Severe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le Castal rencontre les Anglais vaincus . . . . . . . . . . . . . Conseil des Français avant la bataille . . . . . . . . . . . . . . Visite des Français à Anglé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise des quatre châteaux de Chauvigny . . . . . . . . . . . . Prise de Poictiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Poictiers : conseil des bourgeois . . . . . . . . . . . . Prise de Poictiers : négociations . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Poictiers : assault du château . . . . . . . . . . . . . Prise de Saint-Maixent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de La Rochelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prise de Bonnom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prises de Surgieres, de la tour de Bron et de Monsterueil-Bonin 654
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489 491 496 497
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498 . 498 . 500 . 504 . 512 . 515 . 516 . 520 . 524 . 528 . 531 . 533 . 534 . 537 . 539 . 540 . 542 . 554 . 556 . 560 . 561 . 573 . 576 . 579 . 580 . 584 . 586 . 588 . 592 . 594 . 596 . 605 . 611
Siège de Chisec . . . . . . . . . . . . . . . . . Assemblée des Anglais à Nyort . . . . . . . . . Arrivée arrosée des Anglais à Chisec . . . . . . . Chisec : les Anglais décident de livre bataille . . Chisec : provocation des Anglais . . . . . . . . Chisec : attaque française . . . . . . . . . . . . Chisec : premiers prisonniers anglais . . . . . . . Chisec : combat entre les deux armées . . . . . Conquêtes de Nyort, Civray, Janssay et Lezignen Bretaigne, Paris, Perregort . . . . . . . . . . . . Conquête des cités périgourdines . . . . . . . . Siège de Chasteau Neuf de Randon . . . . . . . Mort de Bertrant . . . . . . . . . . . . . . . .
Pièces lyriques
Touz les vaillans et les preuz de jadis . . Estoc d’honneur et arbre de vaillance . . Touz les chevaliers qui aléz par le monde Bien doit plourer chevalerie . . . . . . . L’escu d’argent a un aigle de sable . . . En l’an de l’Incarnation . . . . . . . . . Plouréz princes, ducs et barons . . . . .
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Delphine Demelas
Sur un air épique, sur un air lyrique : célébrer le bon connétable Edition critique et commentaires du manuscrit 428/(306) de la bibliothèque municipale d’Aix-en-Provence contenant La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier suivie de pièces lyriques. Volume III : Notes, glossaire et index
Thèse présentée en vue de l’obtention du titre de Docteur Université d’Aix-Marseille 24 juin 2016
Sommaire Apparat critique
7
Notes
7
Glossaire
55
Index des lieux et personnages
295
Répertoire des proverbes
395
3
Apparat critique
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Notes p.5) 10 La forme ayve semble d’un usage très rare. Plusieurs textes en ancien français comme La Chanson des Saisnes de Jean Bodel ou Le Couronnement de Louis présentent la forme aive. Une occurrence d’ayve est répertoriée par le DMF dans Le Cartulaire de Saint-Victeur de l’abbaye du Mont Saint-Michel. J. Pignon relève la forme dans la région de Parthenay et de Poitiers (J. Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), Editions d’Artey, 1960). Elle est sans doute volontiers archaïsante dans ce prologue qui reprend les techniques des plus anciennes chansons de geste. Il s’agit sans doute ici d’un trait d’écriture du copiste du codex d’Aix-en-Provence. Le manuscrit P utilise la forme eaue. p.5) 25 Le sujet du verbe faire est ici Cuveliers. p.5) 30 Sire est-il employé comme adjectif ? Il est possible de voir ici une construction en apposition, car sire est en moyen français un synonyme de pocesseur. Il pouraît également être l’épithète du substantif pocesseur avec pour sens « puissant ». Le premier cas semble plus probable, aucun exemple dans le DMF ne faisant état de l’usage de sire en tant qu’adjectif et une seule occurrence étant répertoriée par le Gdf. p.6) 56 Les quatre adjectifs font référence à la laideur légendaire de Bertrand et non à ses qualités morales. L’attribut gentilz utilisé dans la laisse suivante au vers 75 annule le sens moral de malostru et meschant. Le narrateur renverse l’image négative du chevalier que dessinent les personnages qui gravitent autour de lui dès sa plus tendre enfance, à commencer par ses parents. La syntaxe du premier hémistiche du vers 75 insiste d’ailleurs sur ce point. L’attribut et le sujet ne sont pas séparés par le verbe être placé en tête du vers. Le groupe le enfant gentilz se ressent alors visuellement et oralement comme un substantif accompagné d’une épithète. Ainsi, le chevalier et ses qualités morales deviennent inséparables. p.7) 78 La mention de l’Ascension n’indique pas ici une date mais bien le 7
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caractère sacré du jour où la converse annonce son destin à Bertrant. La version du manuscrit d’Aix insiste plus sur la comparaison que les autres versions. P donne pour ce vers : avint a .i. haut jour comme l’Ascension. L’emploi du conditionnel seroit dans le manuscrit A éloigne la date de son application tangible et fait écho à l’outil comparatif comme pour faire de ce jour une date comparable à celle fêtée par la religion chrétienne et non une référence calendaire. La présence du verbe au conditionnel renseigne également sur l’évolution de la prononciation. La diérèse n’est plus possible pour ascension alors qu’elle était nécessaire pour la variante du manuscrit P. Comme se prononce en une seule syllabe, alors que le comptage du vers du codex P en nécessite deux. p.7) 82 La position de Bertrand renseigne sur la préférence de ses parents pour ces deux autres frères. Alors qu’il est installé seul sur un fauteuil bas, la place des ses deux frères est sur un siège élevé (vers 84). Cette vue suit à la converse pour comprendre le rejet dont soufre le jeune enfant. p.7) 86 L’élision de ne est ici nécessaire à la lecture d’un vers de douze syllabes (n’en). p.7) 97 L’adjectif épithète jeune dans le second hémistiche indique la perte du sème de jeunesse du mot valeton, le substantif étant ici à entendre au sens générique, en opposition à un enfant de sexe féminin. p.8) 102 Par l’emploi du discours narrativisé, les manuscrits A et P. s’opposent ici à la version éditée par J.C. Faucon où les paroles sont rapportées au discours direct. p.8) 107 Le substantif phizonomie est d’un emploi assez rare dans les textes épiques médiévaux. La converse pratique assez bien cette science puisqu’elle devine dans les traits de Bertrand son avenir. p.9) 146 Les adjectifs honnouré et prisé se construisent avec l’auxiliaire avoir du vers précédent en incidence sur les deux vers. Pour d’autres exemples de cette construction, voir la partie syntaxe de l’étude grammaticale. p.10) 187 Le sens de croire est ici à entendre au sens le plus proche de son étymon latin credere, c’est à dire « prêter une somme d’argent à quelqu’un ». La traduction suivante peut alors être proposée : « Celui qui m’accorde un prêt sera remboursé dans les plus brefs délais » p.10) 191 Par l’emploi de l’expression droit sentement, le vers illustre cette vieille idée que la vérité sort de la bouche des enfants. p.10) 194 La compréhension de ce vers peut s’avérer diicile. Il peut s’entendre ainsi : « et de connaître la gloire grâce à des débuts prometteurs ». p.10) 197 Le sens et la syntaxe de cette expression proverbiale restent assez obscurs. Les composantes de la phrase peuvent être replacées de la manière
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suivante : on dit souvent que on (le) voit a l’oÿe quant poindre doit l’ortie que nouvellement point. La traduction peut être la suivante : « on dit souvent qu’on perçoit ostensiblement le moment où l’ortie qui renouvelle sa croissance, doit bourgeonner ». La comparaison est ici faite entre Bertrand et l’ortie porte sur les capacités manifestes de l’enfant à être un chef de guerre qui transparaissent à travers son comportement aussi nettement que les bourgeons d’une ortie. p.11) 219 La coupure du mot neenplus pose problème. Le manuscrit semble séparer ne et enplus, ce qui n’est pas valable sémantiquement. Le codex P donne comme variante pour ce vers : neent plus que le plus meudre qui ou champ soit. L’expression ne ... neant plus que est très fréquente en moyen français, comme l’attestent les nombreux exemples donnés par le DMF. La chute de la prononciation des consonnes inales ainsi que la concaténation avec plus ont pu provoquer la chute du -t inal de l’adverbe neent. Le choix de joindre ne et enplus a été fait en dépit de ce que propose le manuscrit A ain de conserver visuellement l’expression. Les vers peuvent alors se traduire ainsi : « qu’on ne le ménage pas au moment du combat//pas plus que le meilleur qui soit sur le champ de bataille ». p.13) 273 Ce vers et le suivant peuvent être traduits ainsi : « Il faut, et c’est justice, que jeunesse se fasse // car il faut la traverser, peu importe comment ». p.13) 303 Le sujet de faisoit est ici le père de Bertrand qui, comme le montrent les paroles qu’il prononce, considère son ils comme un bon combattant. p.14) 307 Le pronom pluriel les n’a pas de référent direct exprimé dans le texte. Il renvoie aux pièces de vêtement que Bertrand a découpées dans sa robbe ain de les donner aux pauvres. L’analogie avec la légende de saint Martin découpant son manteau pour le donner à un pauvre transi de froid est assez transparente. p.14) 322 Le système de comptage vicésimal est utilisé dans tout le texte. Il faut réaliser une petite multiplication pour obtenir le nombre approximatif de chevaliers présents, comme l’indique la traduction suivante : « ils sont cette fois près de cent ou cent vingt » (6x20). Ce système de notation des chifres se trouve tout au long du texte. p.15) 349 La correction de soit en seoit est nécessaire pour la cohérence sémantique du vers. Le manuscrit P ajoute un vers de plus entre celui-ci et le précédent : il est trop mieulx tailléz de servir .i. bouvier. L’ajout de ce vers n’est pas nécessaire, la traduction du passage pouvant se faire ainsi : « on dirait un berger qu’il ne convient pas de voir dans un tournoi ». p.16) 377 Des traces d’encre rouge sont présentes sur se mais le mot ne semble pas cancellé dans le texte. p.17) 417 Le découpage syllabique du vers indique que le mot deshëaumees
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contient un hiatus. Ceci est conirmé par la variante de P deshyaumees, où le -y est surmonté d’un point pour indiquer qu’il se prononce comme voyelle et non comme semi-consonne (pratique redondante dans ce codex). p.18) 448 Le sujet du verbe crever est Bertrand. p.18) 462 Le vers est hypométrique. Le manuscrit P donne comme variante pour le premier hémistiche comment il a a nom. Nous n’apportons aucune correction car le sens du vers est conservé malgré l’absence de préposition. De plus, l’expression utilisée plusieurs fois dans le manuscrit est toujours amputée de la préposition a (avoir nom et non plus avoir a nom), l’haplologie s’expliquant par la redondance de a lorsque l’expression en employée au présent. p.18) 464 Ce vers est un des premiers d’une longue série de vers hypométriques causés par l’élision de l’article déini masculin devant un substantif commençant par une voyelle (l’escuier). Les manuscrits plus anciens conservent la forme li devant voyelle, entraînant la prononciation d’une syllabe supplémentaire. L’utilisation systématique de la forme plus moderne le dans A provoque un déséquilibre entre les hémistiches. Le manuscrit donne pour ce vers la forme lescuier. Faut-il voir ici une forme à développer ? Certains vers marquent le maintien et la prononciation du -e de l’article le devant voyelle, comme pour le enfant au vers 75. Le choix a été fait de proposer au lecteur une version au plus proche du codex en conservant l’élision et par conséquent de n’apporter aucune correction. Pour plus de précisions, voir la partie grammaticale consacrée à la morphologie des articles. p.19) 481 Le sujet du verbe avoir est ici le père de Bertrand qui a hâte de défendre son honneur face au chevalier anonyme qui a porté un terrible coup à un homme de son camp. p.19) 483 L’emploi de lent en tant qu’adverbe est assez rare. Deux occurrences seulement sont répertoriées par le Gdf. On trouve un vers très proche dans la chanson d’Aymeri de Narbonne : Le destrier broche qui ne vait mie lent (Aymeri de Narbonne, ed. par Hélène Gallé, Champion, Paris, 2007, p. 361, vers 1906). p.19) 489 Le sujet du verbe cuidier est le père de Bertrant et non un sujet indéini non exprimé. Le manuscrit édité par J.C. Faucon ajoute un vers avant celui-ci qui supprime l’ambiguïté : quant li peres le vit retourner vistement (vers 754 p. 20). p.19) 489 Le vers devient ici hypométrique suite à la réduction du verbe feist (variante de P.) en ist. Faut-il alors, comme pour l’article déini, envisager un développement de la forme contractée quil en que il ? La forme élidée présente sur le manuscrit A été conservée pour donner au lecteur une vision du texte au
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plus proche du codex. p.19) 494 L’emploi de l’article le en tête de vers se retrouve également dans la variante du manuscrit P, entraînant la disparition de la préposition en. Pourtant, les cas d’enclise ne sont pas rares dans le texte qui utilise la forme ou comme résultat de la somme de en+le. Les deux manuscrits s’accordant sur la forme le, il est diicile d’y apporter une correction. p.19) 499 La prononciation poitevine des formes françaises pose un problème d’hypométrie. L’aboutissement de la diphtongaison spontanée de [ĕ] latin n’est pas [yę] mais [ę]. On passe alors dans cette zone géographique de laetus à léz et non liéz. Cette évolution particulière dans le manuscrit d’Aix provoque la perte d’une syllabe. Le scribe semble privilégier la compréhension de son public poitevin plutôt que l’harmonie métrique du texte. p.19) 501 Le vers inaugural de cette laisse donne une assonance diférente des vers qui le suivent, en [ẹ] au lieu de [i]. Le manuscrit P donne une même version de ce vers. Peut-être que la forme prisie semblait-elle trop désuète pour le public visé ? p.19) 505 La chute du -t inal du substantif par peut occasionner des diicultés de compréhension. Il s’agit du substantif féminin part, glosable par « partie, joute ». Atie est une forme du participe passé du verbe aatir, qui signiie « disputer ». Il faut entendre ici : « jusqu’au moment où Bertrand disputerait une joute parfaite ». p.21) 543 Le passage fait référence à l’un des événements déclencheurs de la Guerre de Cent Ans. L’armée anglaise du roi Edouart III se rend à Tournay ain d’assiéger la ville pour poursuivre la conquête du territoire français. Pour faire face, Philippe VI, roi de France, réunit son armée non loin du siège, à Bouvines, lieu symbolique par excellence. La bataille n’aura pas lieu et les négociations entre les deux camps aboutiront à la trêve d’Espléchin. Pour plus de détail voir G. Minois, La guerre de cent ans : naissance de deux nations, Tempus, Paris : Perrin, 2008, p. 88-89. p.22) 578 La construction en asyndète ne rend pas facile l’identiication des deux héritiers qui se disputent la terre de Bretagne. Les deux rivaux sont l’épouse de Charles de Blois (une dame) et le comte de Monfort. p.22) 591 L’expression le conte gentilz fait référence au comte de Monfort. p.22) 597 La construction en parataxe peut rendre diicile l’identiication du référent de la proposition relative du second hémistiche qui n’est autre que la Bretagne (retorna en Bertaigne (qui) tant fu de grant empris). p.23) 626 Le sens du verbe laisser est ici celui d’«abandonner». Le vers peut se traduire ainsi : « la première ville s’accorde à lui, la seconde l’abandonne (au
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proit du comte de Monfort) ». p.23) 644 Il s’agit ici de la première mention des capacités de Bertrand à chevaucher de nuit. Ce vers est à mettre en relation avec l’épisode de la traversée d’une tempête nocturne laisses 603 et 604. p.24) 671 L’adoubement merveilleux de Bertrand ne se trouve pas dans la version de la chanson éditée par J.C. Faucon. p.25) 698 La syntaxe de ce vers est un peu diicile. De malle est le COI du verbe trousser. Il faut ici entendre : « et un serviteur chargé de très nombreuses malles ». p.26) 735 Une correction est apportée à ce vers pour conserver une cohérence grammaticale. Le verbe hausser employé dans le codex aixois ne peut accepter l’ininitif desglicier comme complément. Il est nécessaire de rétablir la tournure aler + ininitif qui signale le mouvement (R. Martin et M. Wilmet, Syntaxe du moyen français, Editions BIERE, 1980, § 54). p.27) 780 Il s’agit de l’unique mention du territoire de la famille de Bertrand dont découle leur patronyme. p.29) 824 La mention du roi Arthur comme fondateur de la ville de Forgeray est assez étrange. L’auteur cherche sans doute à plonger le lecteur dans une Bretagne littéraire plus que réelle en donnant au lieu un passé merveilleux et mythique. p.29) 834 Le nom propre Monfort est ici à la fois complément du nom conte et conté. Le manuscrit d’Aix semble corriger là une erreur que l’on retrouve à la fois dans les manuscrits P et Nh qui donnent tous deux pour variante dans le même contexte de rime en [ẹ] : au conte de Monfort le conte. p.29) 842 Il faut comprendre ici : « pour capturer les Anglais à chaque fois qu’ils quittent la ville ». Ainsi, le valet qui divulgue le départ de Branborc à Bertrand le fait après avoir été capturé par la milice du héros. La corrélation tant ... que implique que l’armée de du Guesclin a saisi tant d’Anglais que le serviteur n’a d’autre choix que de parler. p.29) 847 Le sujet du verbe veoir est un indéini (« on y vit Robert de Branborc »), alors que le manuscrit P propose la forme vi à la P1. La suite du discours du valet reste à la première personne du singulier. Le codex aixois laisse ainsi entendre une diférence entre ce que le personnage a efectivement vu et ce qu’on lui a raconté. La précision du second hémistiche du vers 849 (je l’ay bien avisé) devient un commentaire qui permet de faire la diférence entre les faits attestés et les rumeurs. Le discours à la première personne complète le discours indéini en apportant une précision sur le départ de l’armée ennemie. p.30) 871 L’euphémisme est très poussé. Bertrand signale qu’il prendra bien
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plus qu’un bouton, c’est-à-dire tout. p.30) 876 Le verbe voye est une forme d’aler au subjonctif présent dans une périphrase très fréquente en moyen français : aler+ participe présent (parcevant) . La tournure est d’ailleurs reprise au vers 880 avec un verbe au futur : iront parcevant. p.31) 897 La construction du complément du verbe faire en emploi indirect rend la compréhension diicile. Les manuscrits P et Nh comportent le même vers. L’édition de J.C. Faucon donne pour variante : En .IIII. pars se sont mis et par chose ordenee. Il faut entendre que les compagnons de Bertrand se sont séparés en quatre groupes diférents pour entrer en catimini dans la cité de Forgeray. p.31) 910 Le vers est hypermétrique. Le passage de la construction directe de cilz devant dans les manuscrits P et Nh à une tournure indirecte avec la préposition de cause un déséquilibre métrique dans le second hémistiche, Le scribe semble faire le choix de la compréhension plutôt que de l’archaïsme. Les formes anciennes des démonstratifs sont sans cesse remplacées dans le codex aixois par des formes plus modernes (voir la partie grammaticale de l’édition concernant la morphologie des démonstratifs). p.32) 922 Le vers est hypermétrique. Le manuscrit P donne pour variante celle busche ens laisser. Le passage de ens à ceans fait gagner une syllabe au second hémistiche, Nous n’apportons aucune correction car les deux adverbes sont synonymes, le sens est alors conservé. p.32) 935 La forme voit est le verbe aler à la P3 du présent de l’indicatif. Il s’agit là d’une variante poitevine du verbe (voir la partie phonétique et graphie de l’introduction grammaticale). Les autres manuscrits donnent ist comme variante pour ce vers. p.32) 946 L’emploi du verbe savoir se fait en dépit de la rime en -ier et des autres manuscrits qui donnent tous sachier pour variante. Le verbe sachier n’est pas étranger au codex aixois puisqu’on le trouve dans de nombreux vers (cf glossaire). Le choix de ce savoir plutôt que sa variante est donc volontaire et non fautif. Le sens du verbe peut être proche d’une acception proposée par le Gdf : « avoir le goût de ». Cette signiication est encore présente en moyen français puisque l’ouvrage donne comme exemple un passage du Mirroir de mariage d’Eustache Deschamps. Le vers peut s’entendre ainsi : « il y a ici du bon vin, il n’est besoin que de boire ». p.33) 973 Le substantif pennetrie désigne au Moyen Age l’acte de fabriquer le pain ou le lieu de fabrique. Par métonymie pour les besoins de la rime, il désigne dans ce vers « l’ouvrier fabriquant ou distribuant du pain ». Le glissement de sens est évoqué par la coordination du substantif avec d’autres noms d’artisans de la
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nourriture comme les cuisiniers (queux) et les échansons (boutiller). p.33) 976 La compréhension du vers peut être diicile. La traduction suivante peut être proposée : « ils donnèrent de nombreux coups de pilons et de broches à rôtir ». p.33) 981 Le sujet fait ici référence à des hommes de Bertrand restés à la porte de la cité pour s’assurer que les Anglais ne fassent pas un retour inattendu, d’où la question qui suit au discours direct. L’emploi du pronom ceulx est cataphorique puisque le référent est explicité dans la proposition relative du second hémistiche, p.34) 1001 Le second hémistiche contient une proposition dont le verbe n’est pas exprimé. Il s’agit de faire en incidence sur les deux parties du vers. Les deux substantifs ne peuvent être coordonnés car esploit est compris dans une construction en corrélation avec si...que ; ce n’est pas le cas pour parc. Il faut également voir une progression temporelle et spatiale entre les deux hémistiches. Tout d’abord, le chevalier libère de l’espace autour de lui ain de se dégager de l’emprise des ennemis. Ensuite, il se fraye un chemin si long au milieu de la bataille qu’il lui permet de rejoindre Bertrand. p.34) 1006 Cette version de la chanson ne contient pas le passage décrivant les soins apportés à Bertrand lorsqu’il est conduit en dehors de la bataille. Le texte édité par J.C. Faucon est plus explicite par l’ajout de quelques vers : « ly uns le vot bender, li autre l’essuoit,//mais il fu si dolans de ce qu’hon le tenoit//qu’i ne vouloit soufrir le bien qu’on lui faisoit ». p.34) 1008 Il faut voir dans ce passage deux actions parallèles. L’entrée des renforts dans la cité et le sauvetage de Bertrand par un chevalier de sa troupe se déroulent simultanément. Ainsi, lorsque les Français parviennent au lieu de bataille, les défenseurs de Frogeray ont déjà été décimés par Bertrand et ses cinquante compagnons. C’est ce qu’implique la répétition du verbe venir au vers 1007. La traduction du vers 1007 et 1008 peut être la suivante : « Mais quant les renforts, qui étaient parvenus au château, arrivèrent sur le lieu de la bataille,//les habitants étaient déjà morts depuis longtemps ». p.36) 1059 Dans Le Petit Livre noir, compilation d’archives de la ville de Périgueux entre le XIVe et XVe siècle, le nom de James Dandelee apparaît dans la liste des cousins du roi Edouard d’Angleterre qui acceptent les accords de Calais. Il semble que ce soit l’unique mention de ce personnage dans des archives françaises. Une transcription de ce précieux recueil est consultable sur internet à l’adresse suivante : http ://www.perigordoccitan.fr. L’original est conservé dans les archives de Dordogne sous la cote BB 13. p.36) 1062 Le verbe moustrer présente une construction à double objet
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direct, cité et talon. Le sujet n’est pas exprimé, il s’agit du duc de Lencloistre. Cette construction se retrouve assez fréquemment en moyen français, comme le relève R. Martin et M. Wilmet dans La Syntaxe du moyen français, § 295. Ils ne citent cependant pas monstrer comme verbe qui peut accepter cette tournure. p.36) 1069 Le pronom adverbial y du second hémistiche a pour référent la ville de Rennes, dans laquelle Bertrand est déçu de ne pas être parvenu à entrer avant la mise en place du siège. p.36) 1080 Le manuscrit A présente une forme agglomérée du nom de famille : duguesclin. Les manuscrits P et Nh donnent comme variante de Guesclin/Glaequin. Le codex aixois présente un état plus tardif où le nom du connétable commence à se lexicaliser et à se détacher de son origine territoriale bretonne. L’expression partitive de ceulx indique que Bertrand fait partie de la famille Du Guesclin et non plus qu’il est un de ceux originaire du village de Guesclin. Voir l’index des lieux et personnages pour l’unique mention du nom propre Guesclin en tant que territoire dans le texte. p.36) 1088 La substantivation du participe passé du verbe chargier ne fait l’objet que d’un seul exemple dans le DMF, extrait du vocabulaire juridique. Le sujet du verbe faire ne peut être que Bertrand, comme pour les verbes des vers précédents et suivants (venir et atorner). p.36) 1092 L’hypométrie du vers est causée par le passage constant de trestouz dans les autres versions à touz dans le manuscrit A. p.37) 1107 L’adverbe si ouvrant le vers a pour sens jusqu’à ce que, acception attestée par le DMF. On peut traduire le passage ainsi : « il ne quittera pas les lieux jusqu’à ce qu’il plante son drapeau sur les créneaux de pierre ». p.37) 1118 Le verbe prins présente un signe suscris au dessus de la lettre p alors qu’il est développé entièrement dans le manuscrit. p.38) 1133 Que signiie l’adjectif franche ? La compagnie de Bertrand est afranchie de toute hiérarchie puisqu’ils opèrent en mercenaires, le mot signiierait donc « libre ». Les hommes qui ont rejoint le futur connétable doivent également être d’un certain rang social, si petit qu’il soit, ain de maîtriser l’art du combat. L’adjectif revêt alors le sens de « noble ». Enin, il peut s’agir du féminin de franc au sens gentilé de « français ». Le manuscrit Nh donne d’ailleurs pour variante à cet adjectif le complément de France. L’adjectif est à entendre de manière polysémique, le contexte ne permettant pas de trancher pour un sens en particulier. p.38) 1139 L’expression foy et iance n’est répertoriée dans aucun des dictionnaires consultés. Elle apparaît dans un poème de Charles d’Orléans dans les vers suivants : Auquel vueilliez donner foy et iance//En ce que lui ay chargié
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en creance//De vous dire plus plainnement de bouche (Songe en complainte, LXXI, v523/25). Dans le poème du duc, l’expression atteste également de la vérité d’un propos et demande la coniance de l’interlocuteur. Le narrateur de la chanson tente donc de certiier de l’authenticité de la capture des Anglais et sollicite la coniance de son public. p.40) 1224 L’hypermétrie du vers est due au choix du verbe apparcevoir plutôt que choisir comme l’attestent les variantes de P et Nh. Le sujet du verbe est l’ensemble des habitants resté dans la ville de Rennes, le COD les ayant pour référent les Anglais qui approchent. p.41) 1240 Le verbe regreir n’est attesté que dans les manuscrits A, P et Mn. Le codex de New Haven donne une variante intéressante : nous n’avons nul secours pour estre regaris. Il faut voir peut-être dans le codex aixois une forme de regerir ayant subi une métathèse du -r. p.41) 1243 Le sujet de verbe avoir est le substantif païs, présent au vers précédent. Le vers peut être traduit ainsi : « et il est juste que la région reçoive perpétuellement de l’aide ». p.41) 1252 Une syllabe est manquante dans ce vers. Ceci peut s’expliquer par la perte graphique d’un -e de soutien dans le verbe plandray, lettre présente dans P (plainderai). Pour le développement d’un [œ] entre consonne et -r en poitevin, voir la partie phonétique et graphie de l’introduction. p.42) 1281 Le vers est assez elliptique en ne marquant pas le changement de sujet. Le vers précédent montre les habitants assiégés dans Rennes faire diversion pour laisser sortir le bourgeois (vont fermant). Ici le sujet de vont arrestant n’est plus les habitants mais les troupes anglaises venues combattre aux portes de la ville et capturant le bourgeois. Les Anglais sont encore le référent du pronom leur au vers suivant (leur dist). p.43) 1325 Le vers est hypermétrique. La version aixoise ajoute le verbe seront alors qu’il ne igure pas dans les variantes des manuscrits P et Nh (« et li courous devant »). p.44) 1333 L’expression a la in est le premier élément d’un système corrélatif avec que présent au vers suivant qui peut être traduit par « ain que ». p.44) 1364 Le vers est rendu hypermétrique par le choix de l’adverbe tantost plutôt que tost proposé par le manuscrit P. p.47) 1438 La rime du vers ne correspond pas à celle de la laisse. Le manuscrit P propose comme variante la forme commin, la lecture de ce mot étant assurée par une barre de nasalité sur la lettre -o. Cette forme ne semble pas attestée dans d’autres textes. Le codex Nh propose un changement de rime en -ier pour ce vers et le suivant (f. 10r) : en saillissent avant pour avoir le men-
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gier//ains aloient fuians tout ainssi comme pouchier (pouchier=s.f. : poussière). Le vers présente une forme poitevine de nasalisation. Dans le manuscrit Aixois, le choix d’un substantif se terminant par le son [œ̃] plutôt que [ẽ] peut témoigner d’une certaine proximité entre le produit de la nasalisation de [i] et celui de [ü] (voir partie grammaticale). p.48) 1499 Le vers est hypermétrique. Les manuscrits P et Nh n’emploient pas le verbe voir dans le premier hémistiche (es vous pour Nh, et vous pour P). p.51) 1575 Le verbe dire est employé au sens de « parler ». Il faut ainsi comprendre : « ne lui adressez pas la parole, si ce n’est avec beaucoup de courtoisie » p.52) 1630 Les paroles de Bertrand peuvent être traduites de la façon suivante : « Je veux, dit Bertrand, que beaucoup soient tués ://au moins, les survivants auront le butin ». Le chevalier sous-entend qu’il est préférable d’être moins nombreux pour partager les biens. p.54) 1695 La conjonction de subordination que au second hémistiche est abrégée sur le manuscrit. Le choix a été fait d’un développement en que pour respecter la tendance générale du texte. En efet, le codex aixois présente plusieurs cas de que écrit entièrement mais qui s’élide phonétiquement devant voyelle (voir notre partie grammaticale dédiée à l’étude du pronom on). Les manuscrits P et Nh présentent comme variante la forme contractée con que l’on peut transcrire par c’on. L’élision du -e inal de la conjonction est marquée dans ces deux autres témoins. p.56) 1751 Le dictionnaire du français médiéval de Takeshi Matsumura répertorie sous l’entrée glayve le sens d’ « unité de mesure ». Le duc interdit à quiconque de s’avancer à une certaine distance des chevaliers, même si l’un d’entre eux est grièvement blessé. p.57) 1801 Le vers conclusif de la laisse peut s’entendre ainsi : « si vous poursuivez le combat contre moi, vous encourez de gros ennuis (vous risquez l’enfer) ». p.58) 1813 Bertrand frappe sur le hoqueton de son adversaire qu’il a troué dans la laisse précédente aux vers 1784/85. p.58) 1834 La conjonction qui peut s’employer pour que dans le manuscrit A. Voir pour d’autres exemples la partie syntaxe de l’introduction grammaticale. p.59) 1862 Le vers est hypermétrique. Les manuscrits P et Nh proposent tous deux comme variante pour le second hémistiche venir pour conforter, élidant ainsi le pronom complément. Aucune correction n’est apportée compte tenu que la présence du pronom n’altère en rien la grammaticalité du vers. p.61) 1938 L’expression faire de .ii. sols denree est à rapprocher de l’ex-
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pression faire de la livre sou, c’est-à-dire « perdre son argent, payer trop cher, se faire voler » selon le DMF. Le vers signiie que les habitants de Rennes font passer le peu de vivres qu’ils ont pour une immensité de nourriture. p.62) 1966 Le lieu énoncé par Bertrant n’a pas été corrigé malgré l’incohérence narrative qu’il provoque. En efet, même avec une monture très rapide, il est peu probable que Charles de Blois parvienne du sud de la France à rejoindre Dinant assez vite pour aider les assiégés au bord de la famine. Le manuscrit Nh donne pour variante Jugon, village des Côtes d’Armor non loin de Rennes, P donne Vignon. L’erreur du copiste de P vient certainement de la confusion des jambages initiaux dans le manuscrit de copie. La forme iiigon peut s’entendre à la fois comme jugon ou vigon. La inale gnon du mot vient certainement d’une analogie avec oignon à la rime précédente. Aucune trace de ville nommée Vignon n’a pu être trouvée sur le territoire français. Le scribe du manuscrit A retranscrit donc Avignon pour retrouver une ville dont le nom est familier ou bien par l’agrégation sur le manuscrit de copie de a+vigon (aiiignon). La forme n’a pas été corrigée car elle donne une indication sur le lieu de copie. La mention de la cité des papes en plein milieu du territoire breton implique que le scribe et son public ne sont familiers ni avec la géographie bretonne ni avec la géographie provençale, incapables de retrouver Jugon et peu choqués par la proximité d’Avignon et de la Bretagne. p.66) 2100 Le pronom locatif i ne semble renvoyer à aucun référent. De plus, le vers est hypermétrique. Il semble diicile d’apporter une correction. Le manuscrit P donne comme variante pour ce second hémistiche qui de nouvel s’i ert mis, Nh donne qui de nouvel s’est mis. Le sens est toutefois conservé dans la version aixoise. p.67) 2130 Le vers marque le second élément de la corrélation formée de a la in ...que, dont la première partie se situe au vers 2227. p.67) 2138 Le pronom pluriel les se retrouve également dans le manuscrit P. Il renvoie à un accord au sens, puisque plusieurs décisions ont été prises et doivent être annoncées par les crieurs publics. Le vers qui ouvre la laisse suivante présente d’ailleurs le mot treves au pluriel. Le manuscrit Nh donne la forme le qui se réfère au substantif respit du vers précédent. p.67) 2139 Il manque l’ornementation de la première lettre de la laisse, laissant apparaître un a d’attente. p.67) 2142 L’emploi du substantif lieu à la rime rompt l’harmonie graphique des ins de vers. Rompt-elle l’harmonie phonique ? Le choix est plutôt curieux puisque la forme léz est utilisée à plusieurs reprise dans le texte. Nh et P présentent tous deux léz. Lieu et léz ont certainement dans le codex aixois une
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prononciation proche, sinon identique. p.67) 2153 La lecture de seuléz n’est pas assurée. La lettre inale ne correspond pas au -z inaux utilisés par le scribe. Le manuscrit P conforte cependant la lecture par l’emploi de esseulez à la rime de ce vers. p.68) 2176 L’expression muer le sang désigne ici un sentiment de peur plutôt que de colère. Les vers suivants viennent expliciter ce ressenti peu commun chez un chevalier. Il n’y a pas à s’en étonner (merveilles) étant donné la disproportion des forces. p.69) 2194 La locution a bandon s’applique-t-elle au verbe regarder ou bien au jeu de paume ? Deux interprétations sont possibles. La première serait que Bertrand ixe le jeu avec discrétion. La seconde serait qu’il assiste à un match de paume qui se joue de manière libre, c’est-à-dire dans la rue et non pas dans un lieu dédié à la pratique, comme cela était fréquent au Moyen Age. L’expression jeu de paume a bandon n’a cependant pas été trouvée dans les corpus et dictionnaires consultés, l’emploi du motif étant peu fréquent dans la littérature médiévale. p.69) 2220 Il ne faut pas voir dans ce vers une faute d’accord mais un emploi impersonnel du verbe s’assembler. p.70) 2249 Le vers est hypermétrique. La présence de l’article indéini un, contrairement aux versions des manuscrits P et Nh, entraîne l’ajout d’une syllabe supplémentaire. Aucune correction n’est apportée, la cohérence grammaticale étant conservée. p.70) 2256 Le vers est hypométrique. Le manuscrit P donne la même leçon. Nh présente au premier hémistiche l’adjectif biaus épithète de seigneurs, rétablissant un vers de douze syllabes. Aucune modiication n’a été faite, le vers étant parfaitement juste au niveau grammatical. p.71) 2263 La forme du substantif per au singulier pose problème. L’expression li baron et li per est fréquente en ancien comme en moyen français pour indiquer un ensemble de personnes. La locution se retrouve dans les variantes de P et Nh. Peut-il s’agir alors d’une forme de pluriel ? L’absence d’un -s du substantif per peut laisser penser que le scribe a voulu conserver l’harmonie graphique de la laisse en -er. Le texte présente quelques cas d’article pluriel sans -s inal. Cependant, le passage de li a le peut marquer une volonté de faire de ce deuxième élément du second hémistiche un singulier. Le substantif désignerait alors Bertrant. Le chevalier français se tient seul dans la tente du duc de Lencloistre entouré des meilleurs soldats de l’armée anglaise. L’opposition de nombre entre barons et per marque alors le déséquilibre des forces illustré par la scène précédente, ainsi que le courage du Breton se tenant seul contre tous. Mais le vers suivant regroupe sous un même pronom pluriel les personnes mentionnées
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dans la locution : ilz eurent beü. Il semble alors plus logique que l’expression les barons et le per désigne entièrement les Anglais présents qui demandent du vin et le donnent ensuite à Bertrand. L’accent a donc été placé sur l’article pour en faire un déini pluriel sans -s (voir la partie morphologie de l’introduction pour d’autres exemples). p.71) 2276 Le vers est hypométrique. P donne comme variante : li chavaliers si fu orgueilleux plain d’aver, Nh, li chevaliers fust ier, orgueilleux, plain d’aver. Aucune correction n’a été apportée car la cohérence grammaticale est conservée. p.73) 2332 L’adverbe doulcement s’applique au ton de voix du personnage et non au volume de celle-ci. En efet, l’intensité sonore est marquée par le gérondif oyant et l’expression tout en hault au vers suivant. p.73) 2348 Le vers est hypométrique. Le manuscrit P ajoute au premier hémistiche tout ainsi fu il fait. Le vers est conservé tel quel car l’absence du verbe faire n’altère en rien la grammaticalité de la phrase. p.73) 2352 Le mot iens renvoie bien à du fumier, revêtement des terrains de combat à la in du Moyen Age. Comme le précise Evelyne van den Neste à propos de la région des Flandres : « le revêtement le plus employé pour les lices est le fumier appelé ”iens” dans les comptes. Il provient directement des étables de la ville à Valenciennes ou du Rivage (quai de la Deûle) à Lille. Il est normalement utilisé par la ville comme fumure pour les terres communales où vont paître les bêtes des bourgeois (....) Aux bourgeois, plus économes et plus rustiques, le fumier suit, aux chevaliers, plus prodigues et plus rainés, seul le sable peut convenir. », E. van den Neste, Tournois, joutes, pas d’armes dans les villes de Flandre àla in du Moyen Age (1300-1486), Ecoles des chartes, 1996, p. 74. Le tournoi a donc lieu dans des conditions précaires, contrairement à celui de Rennes qui a lieu sur le sablon (vers 1816). p.75) 2411 Les manuscrits A et P ofrent le même vers hypométrique. S’agit-il d’un oubli commun aux deux témoins ? Le manuscrit Nh complète le vers par le substantif nom à la rime. L’expression venir de son n’est attestée dans aucun dictionnaire consulté. L’utilisation de l’article possessif son sans substantif étant contraire aux usages grammaticaux, une correction à été apportée par l’ajout du substantif nom en in de vers. p.75) 2412 La fonction de de dans le second hémistiche n’est pas claire. Il peut s’agir d’une forme de l’article pluriel indéini des sans -s inal. On peut également voir de comme une préposition marquant le complément du nom. Chevaliers devient alors le complément du nom foyson. L’expression foyson de est très fréquente en moyen français. L’ajout de cette particule rend toutefois le vers hypermétrique. L’emploi adverbial de foyson ne semble plus intelligible pour
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le copiste du manuscrit d’Aix, qui, par l’ajout de la préposition, fait le choix d’une expression courante à l’époque, peut-être mieux perçue par ses contemporains au détriment de la versiication. p.77) 2461 Le vers est un décasyllabe. Le complément de faire bataille est complément à la fois du verbe desirer et de l’expression estre grant de. La locution du second hémistiche ne correspond pas à celle donnée dans les dictionnaires. Le DMF propose estre en grant de. Le texte utilise une variante de cette expression sans en. P et Nh donnent un vers de douze syllabes : de faire la bataille toujours en est engians. p.77) 2474 Le vers est hypométrique. Le manuscrit P donne pour variante : sans dire nes .i. mot que nulz ne les oÿ. p.78) 2507 Le pronom lui a pour référent le chevalier anglais. p.78) 2510 Le mouvement de Bertrand n’est pas très clair. Il s’éloigne avec son cheval pour ramasser l’épieu que son adversaire a laissé tomber. p.79) 2545 Le développement de es vous (manuscrits P et Nh) en Et véz vous rend le vers hypermétrique. p.80) 2577 Le vers peut se traduire ainsi : « je n’ai aucun seigneur qui ne soit traitre ou meurtrier ». Sire est le C.O.D. du verbe avoir. p.81) 2609 Jean II et Edouard III ont un ancêtre en commun : Philippe III le Hardi. p.81) 2614 L’expression estriver contre l’aiguillon est une métaphore agricole. L’aiguillon désigne l’objet avec laquelle on piquait les bœufs pour les faire avancer. L’expression s’applique à Edouard d’Angleterre qui, selon le texte, va à l’encontre de l’ordre naturel en prétendant au trône de France. p.81) 2616 Il faut entendre par ce vers et les suivants : « Pas plus qu’on ne pourrait monter sans escalier au paradis, alors même qu’on le désire, il ne pouvait arriver à ses ins ». p.81) 2624 Le vers peut se traduire ainsi : « sauf avoir pour efet de perdre des soldats ». La séquence de perdre gens est le complément de mettre a excecucion. p.82) 2663 Le substantif duc se rapporte à Charles de Blois. p.83) 2668 La tempête est la conséquence de la malédiction lancée par Charles de Blois à l’encontre de ses adversaires à la in de la laisse précédente. p.84) 2725 Le sujet du verbe guerroier est ici Rogier David. Il ne peut s’agir du vicomte de Rouen, puisque celui-ci rejoint l’armée de Charles de Blois quelques vers plus loin, à la laisse CIII. p.86) 2784 Le verbe palestier est sans doute une forme de paleter. Elle n’est cependant répertoriée dans aucun des manuels et dictionnaires consultés.
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Le verbe signiie « combattre » p.87) 2820 Le corps est une métonymie pour désigner Bertrand. Il faut entendre ici : «le jour où il pris conscience de cela (du fait qu’il ne combattrait plus) ». p.87) 2823 Le verbe diray rend la rime fausse. Il corrige cependant un problème de conjugaison, puisque P emploie la forme dira pour la P1. p.90) 2905 Le manuscrit Nh donne le même vers hypermétrique. P présente la variante suivante : Bertrant monte ou cheval qu’il ama et tint chier p.90) 2929 Le vers est un décasyllabe en 5/5. Les manuscrits P et Nh présentent un vers de douze syllabes : Aÿ, Sire Bertrant, vous soiéz beneïs. p.91) 2939 Le syntagme nominal le duc a pour référent le futur Charles V, alors duc de Normandie. p.91) 2957 Ce vers et le suivant peuvent être traduits ainsi : « Qu’il soit maudit de Dieu, qui créa le monde, celui à qui je dois quelque chose et qui ne vient pas me le réclamer. » p.92) 2974 Le rire de Bertrand est à interpréter comme un signe de son léchissement face à la requête des bourgeois. Les manuscrits Nh et P utilisent le verbe atenrir pour décrire la réaction du chevalier (Nh le cuer li atenrie ; P le cuers li atenrrie). p.92) 2992 Le faulx chevalier est Rogier David et non le châtellain de Pestien. p.95) 3087 La seule autre occurrence connue du substantif charpentiz se trouve dans le roman de Mélusine de Jean d’Arras datant du XIVe siècle : La noise fu grant du charpenteis des espees, des haches, des brans, du bruit et du cry des abatuz et navrez et du son des trompettes (cité par le DMF). Le sens donné dans le dictionnaire est celui de « heurt, coup ». Dans la chanson, le sens se rapproche plus de de l’étymon latin carpentum signiiant « char, voiture à roues ». Un glissement de sens par métonymie de la partie vers le tout a certainement donné l’acception « ensemble des voitures suivant une armée ». Le vers suivant développe le contenu du charpentiz composé de charretes et de charriotz. Ainsi, le substantif suit la même évolution que charroi en ancien français, dont il est dans ce texte un synonyme. p.96) 3134 L’adjectif pendéz semble bien l’équivalent de bendéz, variante du manuscrit P. Voir également pour l’équivalence sonore entre -p et -b la ville de Pestien et Bestien. p.96) 3135 Le sens des substantifs huis et fenestres est obscur. S’agit-il de pièces d’armement ? C’est ce que laisse penser la variante de P : grans huis qui sont bendéz. De plus, ils sont coordonnés avec escuz. Il pourrait également
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être question de parties de demeures arrachées pour se protéger des jets de pierres. La signiication de l’expression huis bendéz/pendéz devient alors diicile à cerner. Les manuscrits présentant l’épisode de la prise de Pestien n’ofrent aucune variante pour ces deux vers. Les vers 17075 et 17115 semblent également utiliser le substantif fenestre ain de désigner une pièce défensive de l’armure des chevaliers, puisqu’il se trouve coordonné avec le substantif targe au vers 17115. p.104) 3384 La forme bel est corrigée dans le manuscrit P par une main postérieure en escuier, privilégiant ainsi la rime plutôt que l’assonance. Nh propose li ber. Nous n’apportons aucune correction, l’assonance et la grammaticalité restant parfaitement juste. p.105) 3433 L’ennemy d’enfer est le diable, jugé responsable de la discorde entre les belligérants. p.106) 3464 La syntaxe du vers est assez alambiquée. Le manuscrit P donne la variante suivante : car Guillaumes aloit a Bertrant sus mectant. La locution mectre sur a qqun que est désolidarisée dans la version aixoise, rendant ainsi la compréhension plus diicile. p.107) 3500 Le copiste utilise un trait de plume vertical ain de séparer eurent et adont. p.107) 3504 Le l, première lettre de ce vers, est une initiale rouge utilisée pour marquer un début de laisse dans le manuscrit. Il semble cependant que ce soit une erreur de l’enlumineur, la lettre l qui apparaît nettement sous l’encre rouge ne possède pas la taille d’une lettre d’attente mais bien d’une majuscule de début de vers. La rime en [i] se poursuit, n’indiquant pas un changement de laisse. Le manuscrit P n’indique pas de changement de laisse à cet endroit. Nous avons donc choisi de ne pas marquer de séparation dans notre édition. p.107) 3516 Les soldats venus de Saint-Malo sont chargés, avec l’armée du duc de Bretagne, de lancer des assauts partout où le chateau est renforcé ain de le fragiliser. p.108) 3543 Le duc désigne le futur Charles V, se lamentant en voyant ses soldats massacrés dans cet assaut. Il semble déjà être entré dans la forteresse avec son armée puisqu’il s’appuie à une fenestre pour déclamer sa complainte. Ou bien est-il toujours dans la premiere ville et regarde la bataille depuis un point élévé ? p.109) 3579 Le verbe couvoyter est une forme de coveter, dérivée du verbe médiéval acoveter. La présence du digramme oy s’explique par le développement en poitevin d’un [w] après labiale devant [ẹ] (voir la partie phonétique dans l’introduction grammaticale). p.111) 3625 Fiens semble bien désigner ici le fumier, comme le conirme la
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variante fumier du manuscrit Nh. Pourquoi Bertrand est-il jeté dans un tas de fumier alors qu’il est inconscient ? La précédente occurrence du substantif nous renseignait sur l’utilisation militaire du fumier, ce qui ne semble pas être le cas ici. L’article indéini semble plutôt insister sur la présence fortuite de cet engrais naturel sur le champ de bataille. Il peut cependant constituer une indication temporelle quant à la période où se déroule la bataille. Le Rustican du labour des champs, traduction du Ruralium commodorum opus de Pietro de Crescenzi commandée par Charles V nous apprend que l’épandage est efectué par les paysans au mois de février. La présence de fumier sur le champ de bataille peut ainsi indiquer que l’engrais a ini d’être répandu. Le combat aurait donc lieu au mois de mars, période propice à la guerre. p.114) 3747 Le verbe coller n’est pas un dérivé du latin colla mais de collum, le cou. Le manuscrit Nh donne pour variante acollés, le manuscrit P acoléz. La forme coler n’est répertoriée que dans le Gdf et la notice ne comporte que deux exemples. Il existe cependant de nombreuses occurrences dans les textes de la forme acoller. Le préixe a disparu de la version aixoise, comme plus haut pour le verbe couvoyter. p.115) 3760 Il s’agit ici de l’unique occurrence dans la littérature du substantif besterie avec le sens concret de « bétail », acception proche de son étymon latin besta. p.115) 3788 L’instrument appelé turelure ne semble pas être une cornemuse mais plutôt une vesse. La vesse ou veze est un instrument à vent dont la hanche est contenue dans un sac en vessie (la plupart du temps de porc) qui sert de réservoir d’air. Il n’a pas été possible de déterminer si le substantif turelure était une appellation régionale. La glose du texte, comparant l’instrument à un cornet, témoigne d’un emploi restreint du mot puisqu’il est besoin de l’expliciter. Seul le manuscrit Nh n’apporte aucune explication à ses lecteurs : Olivier de Manny a la chiere membree//ce fut li tiers qui ist en la grant porte entree//et puis la turelure fut en l’eure sonnee//que Guillaume en a bien la vois escoutee.. p.116) 3808 Le vers peut s’entendre ainsi : « lorsqu’un homme meurt, on ne peut plus compter sur lui ». p.119) 3908 Le vers contient un euphémisme qu’il faut entendre de la manière suivante : « on pourrait trouver de nombreux châteaux bien pires. » p.123) 4057 Il s’agit du futur Charles V, encore duc de Normandie jusqu’à son couronnement quelques vers plus loin. p.124) 4073 Le manuscrit P semble fautif en début de laisse. L’enlumineur a noté un -p majuscule alors que la lettre d’attente qui apparaît est clairement un -a. Le début de vers passe dans P de a roen fu à pro en fu. Le manuscrit Nh
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donne comme variante a Rouen pour cette ouverture de laisse. Le codex aixois suit pour cette laisse un dérivé de P puisque la mention de la ville disparaît complètement. p.125) 4116 Le verbe fault est une forme du verbe failloir. Le vers peut se traduire ainsi : « à la guerre, il faut autant de sagesse que de force au combat ». p.126) 4134 Il est diicile de savoir à quel mont fait référence le texte. Cocherel est situé dans le département de l’Eure, une région essentiellement constituée de plaines dont le point culminant s’élève à peine à 250 mètres. L’expression fait peut-être référence à ce relief plat en suggérant que le mont est si peu escarpé que l’on peut y monter sans aucune diiculté. p.126) 4136 Le vers pose problème à la rime. On peut voir sur le manuscrit P qu’une main postérieure a ajouté l’auxiliaire ay pour retrouver un participe passé (dont je vous ay parlé). Aucune correction n’est apportée puisque la phrase reste grammaticalement juste. p.126) 4145 La ville du couronnement est bien sûr Reims, dont le nom est altéré par une métathèse du -i. p.130) 4265 La rime pose problème. Le manuscrit P utilise plois, plus fréquent au Moyen Age que la forme moderne pli. Le manuscrit Nh donne pour variante plais, forme du substantif plaid. L’expression tenir le pli, « se maintenir en rang », est plus logique dans le contexte que tenir le plaid, « discourir », emploiée dans le manuscrit Nh. Dans A, l’équivalence graphique entre le digramme oi et la lettre e est la conséquence de la prononciation poitevine, ce qui conduit à l’emploi de la forme pléz dans le texte (voir pour plus de détail la partie grammaticale de l’introduction consacrée à la diphtongaison conditionnée de [ŏ] par yod). p.130) 4270 L’adjectif coyt renvoie à l’immobilité des troupes anglaises qui refusent de descendre la colline pour attaquer les Français restés dans la vallée. L’adjectif ne peut indiquer une attitude silencieuse puisqu’il est dit au vers précédent que les Anglais poussent de grands cris. p.130) 4280 L’expression contre deux n’est attestée dans aucun des ouvrages consultés. Le texte paraît vouloir insister sur le déséquilibre entre les forces françaises et anglaises lors de la bataille. P et Nh donnent tous deux pour variante la formule li pires deux contre un. La disproportion des forces entre les deux armées est un fait historique puisqu’on compte 3000 soldats dans le camp français contre 6000 dans le camp anglais. p.133) 4390 Le manuscrit présente à ce vers un trait vertical séparant pié et tourner. p.134) 4405 Les participes passé et eslongié se rapportent à Bertrand. La
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syntaxe distendue implique qu’un auxiliaire est sous-entendu. La variante du manuscrit P ofre plus de clarté : quant il virent Bertran passé et eslongié. Le manuscrit Nh transforme les participes passés en ininitifs qui deviennent alors des compléments du verbe veoir : quant ilz virent Bertrant passer et esplaingiers. p.135) 4435 L’acception « sommet » du substantif destroit n’est pas attestée dans les diférents ouvrages consultés. Elle pourrait dériver du sens « lieu resserré », majoritaire en ancien et moyen français, et désigner la pointe de la montagne, endroit plus étroit que la base. Il peut insister aussi sur la diiculté pour les Français d’accéder à l’endroit où se trouve l’armée anglaise, postée sur le haut de la colline. Froissart utilise le substantif pour décrire le relief de Roncevaux : il ne pooient entrer ne aler en Espagne fors par son pays et les destrois de Raincevaus. (FROISSART (Jean).- Chroniques, t. 6 : 1360-1366, Luce (Siméon), Paris, Société de l’histoire de France, 1876, cité par le DMF sous l’entrée détroit). Le substantif désigne le célèbre col des Pyrénées, endroit élevé et diicile d’accès. Cependant, l’application de cette acception au relief de Cocherel semble diicile, la région étant constituée essentiellement de plaines. La surélévation du terrain a déjà été évoquée précédemment avec la mention du mont au vers 4134. Le texte construit alors une image littéraire de la bataille de Cocherel, utilisant une mise en scène de combat présente dans d’autres légendes épiques. p.135) 4443 Le vers ne présente pas un complément du nom au cas régime absolu. Bertrand est le sujet du verbe sonner et la trompecte son complément d’objet. Le pronom le au vers suivant implique que cette construction est la seule possible. En efet, le pronom masculin ne peut renvoyer qu’à Bertrand, annulant ainsi toute possibilité d’un sujet féminin qui serait trompecte. Les manuscrits P et Nh s’accordent ici avec le codex aixois. Au contraire, le vers d’ouverture de la laisse suivante présente bien un cas régime absolu par l’usage d’une tournure passive : la trompecte Bertrant fu haultement sonnee. p.135) 4458 Le vers peut s’entendre ainsi : « mais ils n’en eurent pas le temps, tout s’était déroulé trop vite » p.136) 4463 Le chifre cent est loin de celui des six mille Anglais traditionnellement considérés comme présents à la bataille de Cocherel. Soit les paroles du Castal sont la preuve d’un euphémisme extrême, soit les chifres oiciels sont faux. Le manuscrit Nh présente comme variante pour cet hémistiche : nous sommes plus de gens. Cependant, le chifre semble choisi pour créer une rime interne en [ã] plutôt que pour dénombrer précisément les combattants sur place. p.136) 4478 Arnaud de Cervole, noble du Périgord, est connu pour avoir pris la fuite lors de la bataille de Cocherel après une négociation avec les Anglais. Le texte essaye ici de justiier ce mouvement de retrait à travers le questionnement
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de Godefroy d’Annequin. Les vers qui suivent les paroles du chevalier indiquent qu’Arnaud a été appelé à l’avant de la bataille pour aider à la défense des hommes en première ligne et que ses troupes sont restées à l’arrière. La conjonction mes au vers 4484 induit tout de même une nuance dans les propos du narrateur en indiquant que le mouvement de fuite est initié par les soldats de l’Archiprêtre et non par le seigneur lui-même. p.139) 4565 Une correction a été apportée transformant le participe passé combatuz en participe présent. La forme en ant convient bien entendu mieux à la rime de la laisse. Le contexte suggère également que le combat est sur le point de se dérouler et non l’inverse. Les autres témoins utilisent également le participe présent. p.142) 4673 Le verbe estre a été ajouté au second hémistiche en accord avec la variante du manuscrit Nh : tant fu iers ses bobans. Le manuscrit P présente également cette même défaillance grammaticale qui se traduit par un vers hypométrique dans ce codex et celui d’Aix. Nous avons cependant restitué le verbe dans notre édition par la forme avec t inal, majoritairement présente dans le texte. p.142) 4678 Le scribe a visiblement eu du mal à recopier l’expression atant es vous caractéristique des textes épiques du Moyen Age. Le et a été supprimé et remplacé par atant pour créer la formule atant véz cy qui remplace majoritairement la tournure archaïque dans la copie aixoise (voir par exemple le vers 4225). p.144) 4740 L’article qui accompagne le nom du Castal depuis sa première apparition dans le texte disparaît petit à petit jusqu’à l’annonce de sa mort. Le même phénomène apparaît dans le manuscrit P tandis que l’article déini est conservé dans Nh. La forme Castal devient ainsi un nom propre qui se détache du titre de captal de Buch auquel elle correspond à l’origine. p.145) 4796 L’oubli d’un vers à cet endroit par le copiste de A est manifeste. La corrélation onques...qui se trouvait amputée du dernier membre, mettant alors en jeu la compréhension du passage. Le vers entre crochets a donc été ajouté en accord avec P ain de rétablir la grammaticalité de cette in de laisse. p.146) 4803 Le manuscrit Nh est plus explicite sur les actions du chevalier : encores dist l’istoire qui le voir en dira/que en .I. melin entra qu’en sa voye trouva/et descousi un sac que a .I. meunier osta./Quant il ot descousu, a son col le geta,/son abit encouvri que on ne l’avisa ja./Quant au chastel revint, son capitaine trouva. p.149) 4896 Le substantif croix est représenté sur le manuscrit par le dessin d’une croix. Le mot a été développé par la forme majoritaire qui se trouve dans
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le manuscrit. p.149) 4915 L’adjectif bonne antéposé au nom France n’est pas présent dans les autres versions. Les manuscrits P et Nh proposent une autre leçon : P = fu a Rains li bons roys de France la jolie/Nh= fu a Rains li bons rois de France la jolie. L’accord de l’adjectif au féminin dans le codex aixois témoigne d’une volonté de le rattacher à France. En efet, si le copiste avait simplement oublié le substantif roy, il n’aurait certainement pas modiié l’ordre des mots ou l’accord du vers des manuscrits antérieurs. Les changements semblent donc conscients ou témoignent d’une copie établie à partir d’un autre manuscrit que P ou Nh. Par conséquent, aucune correction n’est apportée. p.149) 4919 L’archeprestre n’est pas ici le même personnage qu’Arnaud de Cervole cité lors de la bataille de Cocherel. D’abord, la précision temporelle du vers 4916 le mydy devant indique que la bataille a eu lieu le jour précédant le couronnement. Il semble impossible que le personnage ait parcouru les quelques 235 kilomètres qui séparent Cocherel de Reims en un temps si court. Ensuite, les manuscrit P et Nh proposent l’arcevesque comme variante. Il s’agit donc bien de l’archevêque de la cathédrale qui participe à la cérémonie. Les titres dénotent tous deux des grades éminents au sein de la hiérarchie ecclésiastique et semblent interchangeables dans le texte. p.153) 5038 L’emploi du substantif iens renseigne sur un autre emploi du fumier au Moyen Age. En efet, celui-ci peut servir à renforcer les brèches des murs en cas d’attaque ennemie. C’est ce que nous indique A, Salamagne : « Christine de Pisan conseillait de masser de la terre haulte comme un gros mur pour recepvoir les cops des pierres et engins. Les défenseurs de Senlis en 1418, remparèrent leur brêches à l’aide de longs pieux enfoncés solidement dans le sol et consolidés avec des fascines, de la boue et de la terre, ceux d’Orléans en 1418 avec de la terre et du fumier (...). Au siège d’Orléans en 1418, une tour quadrangulaire fut remplie de terre et de fumier »A. Salamagne, Construire au Moyen Age : les chantiers de fortiication de Douai, Presses universitaires du Septentrion, 2001, p. 73. p.153) 5039 Le groupe d’engiens n’est pas ici le complément du nom pierres mais le complément d’agent du verbe gicter. La même construction se retrouve à la laisse suivante, au vers 5055. p.154) 5074 Faut-il lire del roy ou d’Elroy ? Le vers fait référence au château d’Alroy où a lieu la bataille suivante. Le vers 2024 annonçant la mort de Charles de Blois au chastel del roy qui en Bretaigne s’estent pose la même question, le mot étant scindé en deux à cet endroit du manuscrit. En revanche, il ne l’est pas au vers 5074 qui ofre la forme concaténée delroy. P a pour variante Alroy, le manuscrit Nh Arroy. Elroy semble donc dérivée d’Alroy, la forme soudée a par
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conséquent été privilégiée. p.154) 5088 Le pronom personnel sujet ilz a pour référent les habitants de Valongues. p.155) 5119 Le délai évoqué par Bertrand dans ce vers est d’une quinzaine de jours. On peut traduire la phrase ainsi : « je n’ai ici en ma possession que six engins, mais j’en aurai deux fois plus avant que ne passe quinze jours ». p.164) 5421 La forme dernier présente à la in du vers est une variante poitevine du verbe desrainier. En efet, on constate dans l’aire linguistique poitevine le développement d’un [œ] entre [r] et consonne (voir Pignon, L’Evolution phonétique des parlers du Poitou (Vienne et Deux-Sèvres), op. cit., p. 494-498). Ainsi, les formes dernier et desrainier se prononcent de la même façon : [dẹrœnyẹ]. Cette proximité entraîne le copiste à choisir l’option dernier plutôt que desrainier. Le manuscrit P donne pour variante le verbe desrainier, le manuscrit Nh desraenier. Nous avons choisi de conserver cette variante telle quelle dans l’édition. Certes, la forme dernier n’est pas une forme attestée du verbe dans les diférents dictionnaires consultés. Cependant, sa conservation permet de témoigner de l’existence de cette variante dans l’aire géographique de copie du manuscrit. C’est toutefois la seule occurrence dans tout le texte de cette forme particulière du verbe. L’ininitif classique desrainier est ensuite utilisé dans la copie (v. 6986, 9921, 17395, 17412). p.167) 5536 Les Distiches de Caton sont une compilation très populaire au Moyen Age de plusieurs maximes attribuées à l’écrivain antique. Les mise en romant les plus copiées à l’époque sont celles d’Adam de Suel et de Jean le Fèvre de Ressons. Le texte peut faire référence à la maxime suivante : Quum dubia et fragilis sit nobis vita tributa, in mortem alterius spem tu tibi ponere noli (« parce que la vie qui nous est accordée est trop fragile et trop frêle, vous ne devez pas mettre votre espoir en la mort d’autrui »). p.167) 5537 Qui est le chevalier qui prend la parole en début de laisse ? L’article déini implique un référent déjà cité auparavant. Or, le personnage qui s’exprime avant lui est l’épouse de Charles de Blois. Elle ne peut constituer le référent de la périphrase déinissant le personnage. Les manuscrits P et Nh donnent tous deux la même leçon. Il peut s’agir d’un emploi cataphorique de l’article déini. Le manuscrit édité par J.C. Faucon ouvre la laisse un peu diféremment : ce dist un chevalier. Cette version préfère pour ce vers un article indéini, ne causant pas de rupture au sein de la narration. p.168) 5556 Dans ce vers, le verbe vouloie est cancellé entre que et voler. Le verbe voyoie est inscrit après la rime et le copiste utilise un signe suscrit pour nous indiquer où le replacer correctement dans le vers.
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p.169) 5597 Un trait vertical du copiste vient marquer la césure dans ce vers entre Auçoyre et ou. p.169) 5607 On peut comprendre le second hémistiche ainsi : « la détresse était causée par cela ». p.175) 5815 Le verbe costier entre crochets dans le vers est un ajout ain de conserver la cohérence grammaticale du passage. Une lacune apparaît à cet endroit dans les manuscrits A et P. Une main postérieure est venue compléter le vide laissé par le copiste de P en utilisant le verbe trepasser. Pour compléter la lacune de A, la variante médiévale de Nh a été préférée à celle reconstruite ultérieurement dans P. Le verbe costier se trouve également dans d’autres versions de la chanson. p.176) 5835 Il manque une lettrine au début de cette laisse, laissant apparaître la lettre d’attente O. p.176) 5839 Le premier vers du folio 73r qui ouvre le cahier n°4 est entièrement cancellé. On peut lire et ilz ont respondu si soit comme vous vouldréz. Il s’agit du même vers qui ouvre le cahier précédent v 3898, f° 49r. p.179) 5940 Le début de laisse n’est ici indiqué par aucune lettrine, seulement par le changement de rime. p.184) 6105 Il est diicile de savoir qui est le bers chevalier cité dans ce vers, cette laisse ni la précédente ne donnant un référent précis. Il pourrait s’agir de Bertrand qui n’est parfois pas cité par son nom mais simplement par des périphrases. p.184) 6118 On peut entendre ce vers ainsi : « lorsqu’il frappait un Anglais, celui-ci n’avait plus besoin de vivre. » p.184) 6119 Le tueur de chiens errants est un ouvrier des villes du Moyen Age. Son action était d’utilité publique puisque les agressions de chiens sur des personnes étaient nombreuses à l’époque (voir J. P. Leguay, La pollution au Moyen Age : dans le royaume de France et dans les grands iefs, Gisserot, 1999, p. 55). p.185) 6123 Le mot seignorie peut être entendu ici dans deux acceptions diférentes : « valeur », puisqu’une défaite entraîne le déshonneur, ainsi que « territoire », l’insuccès de la bataille conduisant à une nouvelle perte de terrain pour le camp de Charles de Blois. p.187) 6221 Le copiste marque la césure de ce vers par une barre verticale entre Bloiz et qui. p.192) 6373 Le narrateur a déjà mentionné deux sœurs sur les cinq que compte la fratrie : la reine d’Espagne et la reine de France. La comtesse de Savoie est donc bien la troisième sœur du duc de Bourbon a être évoquée dans
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le texte. p.192) 6393 Le substantif arrageson n’est attesté que dans un seul autre texte, Le Champion des dames de Martin le Franc sous la forme aragison ou arregeson (cf. DMF et GdF). Le sens de rage, folie semble le même dans A que dans les exemples cités dans les diférents dictionnaires. P donne comme variante devoison et le manuscrit Nh deraison. p.193) 6409 La correction est efectuée selon une variante du manuscrit Nh, le manuscrit P donnant une version égale à A. La correction est nécessaire pour conserver la cohérence grammaticale du passage. En efet, l’usage de la conjonction et dans les codex A et P implique un rapport de coordination alors que c’est un lien subordonnant qui est attendu à cet endroit (complétive) développant les conditions de l’accord de paix, ce que conirme la variante de Nh. Le passage peut se traduire ainsi : « Seigneurs, il arriva en ce temps-là qu’un accord fu trouvé et ratiié stipulant que la femme de Charles de Blois ainsi que les enfants qui lui restaient devaient être otages à Londres, qui est une bonne ville, auprès d’Edouard, le défenseur de l’Angleterre, à l’époque dont je vous parle. » p.197) 6535 L’emploi du substantif harengier pour désigner Dieu est assez surprenant. On le retrouve dans la majorité des manuscrits. Son sens est bien négatif, qualiiant ici la mauvaise attitude de Dieu lorsqu’il a favorisé l’union de Pietres et de la reine. Le mot peut avoir deux origines. Le substantif harengier est bien attesté dans le DMF avec pour sens « vendeur de harengs ». Le substantif serait alors un dérivé de hareng. Cependant, aucune occurrence relevée dans les dictionnaires n’atteste d’une utilisation igurée du terme. Le mot peut également être un dérivé du verbe arranger. Le substantif pourrait avoir pour sens « celui qui dispose bien les choses ». Il serait alors d’un emploi ironique dans le texte. Il est diicile de trancher pour une ou l’autre des hypothèses, l’auteur jouant d’ailleurs probablement sur les deux possibilités. p.201) 6703 Le copiste utilise une barre verticale pour marquer la césure de ce vers entre it et qui. p.202) 6706 Les noms de villes employés dans le manuscrit A sont diicilement identiiables. Les manuscrits P et Nh commencent l’énumération par la ville de Gilbataire qui fait référence à Gibraltar. Sabatayre est un toponyme connu dans la France médiévale occitane pour désigner la rue des savetiers, comme le signale J. Teyssot, « La rue médiévale : un espace nommé et délimité », L’historien en quête d’espaces, 2004, sous la dir. de J. L. Fray et C. Perol, p. 317–328, p. 325. Archala est citée par les trois manuscrits (Nh=Arquala). La où le scribe de A copie Sampis, celui de P écrit Fampis et celui de Nh Clanpis. p.206) 6860 L’expression a grant confusion fait-elle référence au désordre
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causé par l’arrivée de l’Esprit Saint dans la maison où étaient réunis les disciples de Jésus Christ lors de la Pentecôte ? L’épisode est décrit ainsi : « Le jour de la Pentecôte, ils étaient tous ensemble dans le même lieu. Tout à coup il vint du ciel un bruit comme celui d’un vent impétueux et il remplit toute la maison où ils étaient assis. Des langues, semblables à des langues de feu, leur apparurent, séparées les unes des autres et se posèrent sur chacun d’eux. Et ils furent tous remplis du Saint Esprit et se mirent à parler en d’autres langues, selon que l’Esprit leur donnait de s’exprimer. Or, il y avait en séjour à Jérusalem des Juifs, hommes pieux, de toutes les nations qui sont sous le ciel. Au bruit qui eut lieu, la multitude accourut et elle fut confondue parce que chacun les entendait parler dans sa propre langue » Actes 2 :1-6. L’état de confusion renvoie également à un autre épisode biblique : celui de la tour de Babel (DMF confusion § 3 ; FEW confusio p. 1046 b-§3), évoquant à la situation d’incompréhension linguistique dans laquelle se trouvent les hommes après avoir subi la colère de Dieu. Le texte reprend ici le vocabulaire médiéval propre à cet événement et l’applique à celui de la Pentecôte, élément de résolution de la péripétie babélienne. Les apôtres se trouvent efectivement en capacité de parler d’autres langues, tout comme les premiers hommes punis par Dieu, cette fois non à cause d’un châtiment mais pour aller difuser la bonne parole. Une autre acception de confusion peut également motiver son utilisation dans ce vers : celle de désordre. Le texte biblique indique que la venue de l’Esprit Saint provoque un vacarme qui attire la foule extérieure. La grant confusion peut ainsi faire référence à cet élément de la scène. Ainsi, toute la polysémie du mot est convoquée dans ce vers, de son application concrète à son acception biblique. p.207) 6908 Le référent du pronom cellui est le juif mentionné au vers 6904. p.208) 6930 Aucun dictionnaire consulté ne fait état d’un emploi de l’adjectif long comme adverbe. Il était donc nécéssaire d’ajouter le substantif temps pour conserver une cohérence grammaticale. La leçon est conirmée par le manuscrit Nh. p.209) 6972 Qui est le Charlon mentionné dans ce vers ? Le couronnement de Pierre ayant eu lieu le 26 mars 1350, il ne peut s’agir de Charles V, couronné bien plus tard le 19 mai 1364. Il faut peut-être voir ici une évocation de Charles de Navarre, dont les possessions sont voisines de la Castille. Seuls les manuscrits A et P citent un nom dans cet hémistiche, les autres témoins ofrent la variante car on le couronna. p.215) 7179 Cette dernière réplique ne peut être prononcée par le groupe des chevaliers de la Grande Compagnie. L’emploi de la première personne suggère un locuteur singulier (me). La réplique est plutôt attribuable à Bertrant qui de-
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mande aux chevaliers de le suivre. L’hémistiche qui croyre me vouldra se retrouve d’ailleurs quelques vers plus haut dans les paroles du connétable (vers 7175). Le vers ne se trouve que dans les manuscrits A et P. Le discours s’achève dans les autres versions au vers précédent. p.221) 7399 Le romant auquel le texte fait référence est sans doute le récit de la prise d’Alexandrie par Guillaume de Machaut, texte à peine antérieur aux premières versions de la chanson dédiée au connétable (pour l’édition la plus récente du texte, voir : G. de Machaut, La Prise d’Alexandrie, sous la dir. de R Barton Palmer, New York et London : Routledge, 2002). Cette chronique rimée retrace les exploits de Pierre 1er de Lusignan, considéré comme le nouveau Godefroy de Bouillon par ses contemporains. Son assassinat en 1369 a suscité une vive émotion dans les cours d’Europe et contribué à la popularité du texte. p.222) 7405 Le verbe devorer a ici le sens de « tuer avec violence », sens attesté par le DMF et le Gdf. p.222) 7422 Il faut entendre par ce vers : « car il n’y avait eu meilleur chevalier depuis bien longtemps », la préposition a construisant la locution a long temps étant rejetée en in de vers. p.224) 7492 Le pronom personnel sujet il est le sujet d’un verbe employé dans une tournure impersonnelle. L’hémistiche peut alors se traduire par : « depuis déjà longtemps ». p.224) 7493 Il faut entendre par ce vers : « ils ont causé dix fois plus de maux au royaume de France que », tant étant ici un substantif avec le sens de « fois ». p.227) 7605 La répitition du vers 7601 a Villeneusve vindrent logier, se m’est advis oblige le copiste à modiier la structure du vers suivant. Les manuscrits P et Nh enchaînent avec et si le voit fourrer en ce païs/et amener en lor ost vache, moutons, brebis. Le copiste de A se voit contraint de transformer l’ininitif amener en amenoient ain de le coordonner avec vindrent. p.229) 7674 Le copiste marque la césure de ce vers par l’ajout d’une barre verticale entre Bertrant et en. p.230) 7698 Le substantif chier est une forme dérivée de carrus. Voir la partie phonétique consacrée à l’évolution particulière que ce mot a pu subir dans le domaine poitevin dans l’étude de la langue du manuscrit. p.231) 7717 Sur les manuscrit, le l du pronom personnel sujet il est accolé au verbe avoir (laloit). Le problème vient de la présence d’un éventuel pronom COD du verbe aler. Si nous avions conservé la forme du texte qui l’aloit, le texte signiierait alors que ce sont les chevaliers qui mènent Bertrand auprès d’Henry, qui devenant un pronom relatif avec pour antécédent chevaliers. Le contexte
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invite à entendre le contraire, Bertrand étant à la tête de la compagnie qu’il mène combattre en Espagne. Nous avons donc rétabli un il ain de conserver la cohérence narrative du passage. p.233) 7783 Le début de laisse n’est pas signalé par une initiale rouge mais simplement par le changement d’assonance. p.235) 7859 La forme trectellee semble bien être une variante de l’adjectif cretelé. Le manuscrit P présente trettellé tandis que Nh ofre pour variante crevellée, adjectif attesté seulement par une occurrence du DMF. Voir le paragraphe consacré à l’équivalence de c et t dans l’étude grammaticale de l’introduction. p.235) 7866 Le participe passé aprestee s’accorde en genre avec le sujet toutes leurs gens mais pas en nombre ain de conserver l’harmonie visuelle de l’ensemble des inales de la laisse. P et Nh utilisent dans ce vers un sujet au singulier : trestoute sa gent. La syntaxe est un peu distendue, l’auxiliaire et le participe passé étant présents aux deux extrémités du vers. Le vers peut se traduire ainsi : « que leurs troupes soient toutes préparées pour partir. » p.237) 7915 Est-il nécessaire d’apporter une correction au second hémistiche du vers ? Les manuscrits P et Nh proposent pour variante « les murs vont rehaussant ». Le codex aixois présente un verbe se terminant par la séquence -ent plutôt que -ant. La confusion entre les deux inales marquant le son [ã] étant peu fréquente dans le manuscrit d’Aix, il peut s’agir là pour le copiste d’une façon d’indiquer son choix d’un verbe conjugué à la P6 plutôt que l’utilisation d’une tournure aler+participe présent. Aucune correction n’est apportée, même si le vers est hypométrique et l’harmonie des inales de la laisse est mise à mal. p.238) 7972 Le COD du verbe amener est manquant. Le manuscrit Nh présente la variante suivante : « et puis par dedens l’ost les amenoient par mons ». Ce vers comportant le COD est cependant hypermétrique. L’emploi absolu du verbe amener au sens de « transporter qqch » est attesté par le DMF (amener, C, §1). Le manuscrit P s’accorde avec le codex aixois, aucune correction n’est ici apportée. p.245) 8208 L’ajout d’une préposition (de) s’avère nécessaire pour conserver la fonction complément du substantif marriens. Le manuscrit P présente une faute commune avec A. La correction est exceptionnellement apportée en accord avec la version du manuscrit Nh : mais de marrien peusent sur les crenaux possés. p.249) 8327 Le copiste marque la césure de ce vers entre argent et ne par une barre oblique. p.250) 8366 Le sens du participe passé venuz est diicile à saisir. Il pourrait s’agir d’un marqueur temporel. Les parlers venuz désigneraient alors les paroles prononcées directement avant celles de Pietres, donc celles des bourgeois. Le
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verbe venir peut, selon le DMF, signiier l’origine. Par l’expression parlers venuz, on désignerait alors les locuteurs d’où émanent de telles paroles, on sous-entend alors venuz des bourjois. Le manuscrit P n’est pas d’un grand secours : on trouve à la in de ce vers un trou rempli par le participe venuz manifestement ajouté par une main postérieure. Le manuscrit Nh donne pour variante parlers vendus, qualiiant ainsi les dires des bourgeois de paroles de traîtres. p.250) 8380 Le statut syntaxique du syntagme et son frere Henry peut sembler ambigu. Les variantes des manuscrits P et Nh aident à la compréhension. En efet, ils présentent l’hémistiche suivant : et ses freres Henris. La déclinaison indique qu’il s’agit d’un cas sujet singulier. La perte de la déclinaison dans la copie aixoise brouille les pistes grammaticales. Le verbe assaillir au vers précédent conjugué à la P3 est en incidence sur le vers suivant. Il a pour sujet le bers Bertrant et son frere Henry, bien qu’il reste conjugué au singulier par un phénomène d’accord au voisinage fréquent dans le manuscrit. Il n’y a donc pas ici d’anacoluthe. p.251) 8386 La présence du verbe conseiller conjugué à la P6 de l’imparfait de l’indicatif rend le vers hypermétrique. Les manuscrits P et Nh donnent tous les deux une forme du verbe au singulier. Cependant, il semble grammaticalement logique que ce verbe soit au pluriel en réponse au pronom les COD dans le second hémistiche du vers. Le codex aixois opte pour la logique syntaxique plutôt que de conserver la métrique. p.252) 8448 Le déterminant possessif sa renvoie à Pietres et non à Ferrant de Castre comme le suggèrerait la syntaxe de la phrase. En efet, Ferrant est le beau-frère de Pietres comme l’indique le texte aux vers 8295/96. Il est par conséquent impossible de mettre un point après le verbe ia au vers précédent, au risque de séparer le possessif de son référent. p.252) 8450 Le sujet du verbe aler ne peut être ici que Pietres, dont la chevauchée vers Toulectes est reprise aux vers suivants. p.253) 8459 Le pronom complément les fait référence au substantif lectre du vers précédent, même si celui-ci est au singulier. Le DMF remarque que lettre est souvent au pluriel lorsqu’il s’agit de missives oicielles. C’est le cas dans le codex aixois, où le mot est fréquemment au pluriel (unes lectres) ou ressenti comme tel. p.256) 8569 L’importance du rituel des iançailles dans le processus matrimonial est bien une réalité à la in du Moyen Age. Selon Geneviève Ribordy, : « Dans la pratique, les iançailles ont un tel pouvoir fondateur que les chroniqueurs ont parfois bien du mal à distinguer un couple iancé d’un autre dûment marié. (...) La survie du mariage par verba de futuro, carnali copula subsecuta constitue
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une preuve supplémentaire du rôle central des iançailles dans la conclusion du mariage laïque. En efet, certains couples des XIVe et XVe siècles considèrent les iançailles assez liantes pour les faire suivre immédiatement de relations sexuelles et ainsi consommer le mariage, sans passer par l’étape des épousailles. C’est donc dire qu’ils jugent les iançailles suisantes pour la fondation du mariage et de la vie commune. Même la doctrine de l’Église admet la possibilité d’un tel processus matrimonial puisque dans le droit canon, les relations sexuelles à la suite des iançailles viennent transformer les promesses de mariage en une union indissoluble. C’est ce qu’on a appelé le matrimonium praesumptum. », G. Ribordy, « Les iançailles dans le rituel matrimonial de la noblesse française à la in du Moyen Age : tradition laı̈que ou création ecclésiastique ? », Revue historique 4.620, 2001, p. 885–911, url : www.cairn.info/revue-historique2001-4-page-885.htm. p.256) 8570 La signiication du substantif druerie est diicile à déceler dans ce vers. Le sens de « compensation inancière » peut dériver d’une acception attestée par de nombreux exemples dans le Gdf : « marque, témoignage, enseigne, gage d’amour, cadeau galant, bijou, ornement de toilette ». Le terme désigne par métonymie l’objet donné en échange. Le manuscrit Nh donne d’ailleurs pour variante le substantif symmonee (« simonie »). p.256) 8572 Le référent du pronom personnel complément le ne peut être que Pietres et non Henry, comme le laisse penser la syntaxe. L’évêque ne peut logiquement pas demander de rejeter Henry puis vouloir lui conier le gouvernement de l’Espagne selon l’usage ancien. Au contraire, le référent du pronom le dans le vers suivant est bien Henry. Le manuscrit Nh donne pour variante le verbe recevons au lieu de refusons, présentant ainsi une syntaxe moins complexe. p.260) 8720 Une correction du vers est nécessaire. Le verbe alie à la rime requiert un sujet singulier. Ce sujet ne peut donc qu’être prouesce, seul substantif singulier du vers. Or, la conservation de la préposition en aurait fait de prouesce un complément et non un sujet. A et P présentant une faute commune, c’est vers le manuscrit Nh que nous avons dû nous tourner ain d’obtenir une leçon satisfaisante. p.262) 8793 Le copiste a placé un trait vertical entre face et merir. p.263) 8821 Le narrateur reprend ici la parole pour clôturer la laisse, comme le prouve le décalage temporel créé par l’utilisation soudaine du passé simple. De plus, le vers de clôture s’adresse à un public ictif, il est alors impossible qu’il puisse être prononcé par la troisième sœur d’Henry. p.267) 8950 L’expression est sans doute une variante du proverbe celui qui sert et ne parsert, son loyer perd relevée par le DMF sous l’entrée du verbe
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parservir, que l’on peut traduire comme ceci : « celui qui fait son travail sans aller jusqu’au bout, il ne mérite pas son salaire ». p.275) 9228 Le sens du vers est diicile à saisir. L’expression sans or et sans argent paraît à première vue contradictoire avec les promesses de Pietres. Il semble vouloir dans un premier temps participer à l’efort de guerre contre le roi de Grenade en fournissant des soldats, puis refuserait ensuite de inancer l’entretien des troupes. Cet énoncé paraît contradictoire dans le cadre d’une négociation de paix où Pietres fait tout son possible pour contenter Henry. Il faut plutôt comprendre par cette expression « sans contrepartie inancière » de la part de la Grande Compagnie. Pietres propose de procurer des hommes à Henry sans que celui-ci ne lui verse en échange le moindre denier, efort qui va alors dans le sens des déclarations du roi espagnol. p.276) 9271 La femme mentionnée dans le vers n’est autre que Maria de Padilla, maîtresse attitrée de Pietre avec qui il eut quatre enfants, dont Constance de Castille, future épouse du duc de Lencastre. Contrairement à ce qu’airme le texte, les amants n’ont jamais été mariés. p.283) 9511 La correction de ce vers a été faite exceptionnellement à partir de la variante du manuscrit Nh, le codex P présentant la même erreur que A. p.284) 9538 L’emploi du substantif brume est plutôt rare en ancien et en moyen français. Les manuscrits Nh et P semblent proposer bruine. Le copiste du manuscrit A n’utilise pour ce mot aucune barre oblique pour diférencier la lettre -i des autres jambages, contrairement à son habitude (voir par exemple le substantif chemin deux vers plus loin). Quoi qu’il en soit, bruine et brume sont deux substantifs synonymes en moyen français, tous deux évoquant le « brouillard ». p.288) 9685 Dans la tradition épique française du Moyen Age, Rubion est le nom d’un roi sarrasin tué par diférents héros comme Guillaume d’Orange, Gui de Bourgogne ou Vivien. Une liste presque exhaustive de ses apparitions se trouve dans le répertoire des noms propres des chansons de geste (A. Moisan, Répertoire des noms propres de personnes et de lieux cités dans les chansons de geste françaises et les oeuvres étrangères dérivées, t. 2, tome I, Genève : Droz, 1986, p. 854). p.291) 9777 Le surnom du personnage est Le Besgues et non pas son patronyme de Villaines comme le laisse penser la syntaxe. La igure historique derrière le personnage littéraire n’est autre que Pierre de Villaines qui fut nommé grand écuyer de France sous le règne de Charles VI. Il était en efet surnommé le Bègue par ses contemporains. p.306) 10305 La non discrimination de -s et -z par le scribe brouille les référents du discours. Le choix a été fait d’harmoniser tout le discours à la P2
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en s’appuyant sur la présence des pronoms toy et te. Par conséquent, les formes soiez sont laissées sans accent. Cependant, il n’est pas impossible que les paroles de Bertrand soient le relet d’une utilisation simultanée de la deuxième et la cinquième personne, fait fréquent dans les textes du Moyen Age. p.311) 10477 Le sujet d’incliner est Pietres. Le verbe se construit directement avec pour COD le prince. p.312) 10493 Une correction aurait pu être apportée en début de vers changeant au en du, en accord avec P et Nh. Cependant, il est possible que le manuscrit A désire indiquer le lieu du couronnement plutôt que le territoire gouverné par Henry. La cérémonie d’investiture s’est déroulée à Burs, au nord du royaume. De plus, la proposition participiale voyant ma baronie renvoie bien au moment précis de l’investiture d’Henry, ce qui vient corroborer l’utilisation de la préposition a. Le passage peut se traduire ainsi : « il s’est fait sacrer roi devant l’ensemble de mes barons en Espagne, qui est un territoire qui m’appartient. ». p.314) 10577 Le substantif exchange est-il une forme du mot échange ou bien une forme particulière du substantif escheance ? Le manuscrit P donne pour variante eschange tandis que Nh présente la forme eschance. Le sens reste sans aucun doute celui de « ce qui revient à quelqu’un par héritage ». P et A ne présentent pas d’autre cas de confusion phonétique entre [s] et [z̃]. On peut alors avancer l’hypothèse d’ajout d’une nouvelle acception au mot eschange, causé par un problème sur le manuscrit de copie. p.315) 10605 Le pronom lé est une forme poitevine pour le féminin indirect. Voir les parties morphologie et syntaxe de l’introduction p.315) 10617 Edouart de Woodstock, dit le Prince Noir, aurait en efet lors de son passage en Espagne contracté une maladie dont il mourut en 1376. p.316) 10635 Pour le pronom lé féminin voir note vers 10605 p.316) 10642 La Chanson de Guion de Tournant a aujourd’hui disparu. Elle est évoquée par diférents textes, comme le résume la iche la concernant sur le site internet Arlima : « Chanson de geste aujourd’hui perdue mais qui est évoquée dans La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier, dans la version en prose de Garin de Monglane imprimée par Trepperel et, au XVIIe siècle, par quelques historiens de la langue française, notamment Pière de Caseneuve qui en extrait quelques vers comportant des termes intéressants du point de vue lexicographique » (source : www.arlima.net, La Chanson de Gui de Tournant, consulté le 09/08/2014). p.316) 10648 La préposition a revêt ici le sens de « avec » (< apud). Le prince de Galles indique qu’il occupera l’Espagne avec Pietres. Nh (ainsi que l’édition de J.C. Faucon) donne pour variante du vers précédent je renderai,
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faisant de la préposition a la marque du complément d’objet indirect. p.318) 10693 Le préposition sur présente aux vers 10693 et 10694 signiie « sous peine de ». On peut alors traduire le passage ainsi : « Ils abandonnèrent Henry et Bertrand le vaillant sous la menace de perdre tous leurs biens de valeur et d’être bannis d’Angleterre ». p.318) 10702 Le scribe a certainement commis ici une erreur de copie du même au même, le second hémistiche au hardy convenant se répétant sur deux vers. P et Nh donnent à lire pour variante au vers 10702 au corage sachant. Aucune correction n’est cependant apportée, la leçon restant correcte. p.323) 10897 Le passage peut s’avérer diicile à comprendre. On peut le traduire ainsi : « le Besgues de Villaines, un chevalier renommé pour sa bravoure, comme le dit la chanson, et parce qu’il se vit conier ce jour-là le commandement de l’avant-garde ». p.324) 10921 La préposition rex est, dans A, une variante de res. Tous les autres manuscrits utilisent léz. On retrouve cette même forme au vers 18966 dans la locution rex a rex signiiant « au niveau de ». La préposition léz ne semble pas utilisée par le scribe du codex aixois, seul l’usage du substantif masculin léz signiiant « côté » persiste (cf glossaire). p.329) 11083 Les trois troupes auxquelles fait référence le premier vers de la laisse sont sans doute celle menée par le prince de Galles, celle menée par Felleton contrainte de courir le pays à la recherche de nourriture et celle d’Henry avec Bertrand à sa tête. Nh ainsi que l’édition de J.C. Faucon donnent pour variante le chifre .ii.. P s’accorde avec A. p.335) 11291 Le copiste a tracé un trait vertical à la césure du vers entre Bertrant et qui. p.336) 11342 Le référent du pronom lui est le substantif ost au vers précédent. Le vers peut alors se traduire ainsi : « comme cela a déjà été dit, la faim les menaçait ». p.337) 11372 Le vin est pour l’occident médiéval une des bases de l’alimentation. La consommation moyenne est de trois litres par personne et par jour, la boisson contenant tout de même un pourcentage d’alcool bien moindre qu’aujourd’hui (voir D. Alexandre-Bidon et P. Mane, La vin au Moyen âge, Paris : Association des Amis de la tour Jean sans Peur, 2012). Les Anglais n’ayant pas à leur disposition cette denrée indispensable sont donc placés en grande diiculté. p.341) 11514 Chando est le seul héraut dont le texte précise le nom. Il s’agit certainement d’une référence au poète Chandos le héraut (Chandos Herald en anglais) qui composa vers 1380 une chronique en anglo-normand consacrée au
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Prince Noir. Deux éditions modernes de ce texte sont consultables : C. Herald, Le Prince noir, poème du Héraut d’armes Chandos, sous la dir. de F. Michel, London et Paris : J. G. Fotheringham, 1883 ; Chando Herald, La vie du Prince Noir, sous la dir. de Diana B. Tyson, Tübingen : Max Niemeyer, 1975. p.341) 11515 Le verbe estre pose le même problème qu’au vers 10305 (voir note). Il est diicile de déterminer s’il s’agit d’une forme de P2 dont -z serait la désinence ou une forme de P5 dont le -e serait alors à accentuer. La présence du pronom t’ marquant la deuxième personne en début de vers fait pencher la balance vers le tutoiement. Le verbe est donc laissé sans accent. p.343) 11591 Le nombre de vingt mille soldats est atteint en ajoutant au bataillon de Bertrand la troupe des dix mille soldats espagnols mentionnés à la laisse précédente. p.344) 11618 Le verso du folio 140 est entièrement raturé. La marge supérieure gauche porte la mention vacat tout également cancellée. Au dessous de cette mention se trouve l’inscription bonum est invitant à garder tout de même cette partie du texte. Pour plus de renseignements, voir la partie de l’introduction consacrée à la description du manuscrit A, p.346) 11701 Pour le passage du folio 141r au folio 142r, voir la partie de l’introduction consacrée à la description codicologique du manuscrit A. p.355) 11986 Une correction s’avérait nécessaire pour le maintien d’une logique grammaticale. Le verbe tenoient au vers suivant attend bien un sujet au pluriel. Or, le groupe le bon chevalier tel qu’on le trouve dans A ne peut qu’exprimer un singulier. P indique li bon chevalier, cas sujet pluriel. La suppression des marques de déclinaison a amené le scribe de A à une confusion. Le pluriel a été rétabli en fonction des formes majoritairement apparentes dans le texte, comme par exemple l’expression touz les bons chevaliers vers 473. p.356) 12015 Le verbe principal de la phrase est avoir dans le groupe a belle chevauchie, qu’il ne faut pas confondre avec la préposition a signiiant avec. p.356) 12034 Le passage peut se traduire ainsi : « [Le Besgues] fut placé en sureté, ainsi il ne fut pas capturé, du moins pas tout de suite ; mais avant la in de la soirée il fut livré au prince qui en fut fort réjoui. » p.357) 12053 Le vers 12053 est-il celui qui marque le début du discours de Pietres, ou bien est-il un complément du verbe venir au vers précédent ? P donne pour variante de ce passage : Li rois Pietres s’en vint au prince souisant/et li dit « Noble prince pour Dieu je vous demant/le mareschal de France et le vassal Bertrant ». Nh propose également d’intervertir les vers 12053 et 12054, intégrant également le premier dans le discours de Pietres. L’absence de la préposition a construisant le complément du verbe comme au vers 12052 empêche de voir des
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compléments coordonnés, même si elle pourrait être en incidence sur les deux vers. Pour toutes ces raisons, le vers 12053 a été intégré au discours de Pietres. p.363) 12255 La forme on est une forme de la préposition en, parfois graphiée avec un o sous la plume d’un scribe poitevin au Moyen Age (cf introduction grammaticale). p.371) 12540 La forme soient est ici le participe présent du verbe soier qui signiie « découper ». Elle est le noyau de la proposition participiale qui occupe le second hémistiche et peut se traduire ainsi : « retournons à Bordeaux découper les porcs gras ». Le manuscrit P propose comme variante le verbe pronominal s’aions, Nh donne ce qui semble être la préposition selon, diicilement lisible suite à un efacement de l’encre. p.373) 12635 Le nombre de personnes accompagnant Henry a été corrigé selon la leçon de P. La raison n’est pas métrique, bien que la présence d’un accompagnateur de plus rendait le vers faux, mais narrative. En efet, à la laisse suivante vers 12675, l’Arragonnais discutant avec Henry précise bien que le roy est escorté par « deux compaignons ». Le chifre trois a donc été rétabli ain d’assurer la logique du passage. p.375) 12685 L’antécédent du pronom relatif qui est le substantif roy au vers précédent. p.384) 13009 On peut entendre ce vers et le précédent ainsi : « Mais Fortune et Chance ont fait progresser la situation d’une manière qui nous a été défavorable ». p.384) 13014 Il s’agit d’une référence au traité de paix de Brétigny-Calais signé par Jean II de France et Edouart III roi d’Angleterre en 1360, prévoyant une trêve de neuf ans entre les deux royaumes. p.385) 13021 Dent est un adverbe signiiant « ici, là ». p.385) 13021 Le verbe mesprendre était répété deux fois dans le vers. Nous avons donc supprimé la seconde occurrence, la répétition étant manifestement due à une erreur de copie. p.386) 13051 La tonalité négative de ce vers résonne étrangement en ce début de laisse. L’adjectif meschant redoublé par l’adverbe malement insinuent que le duc d’Anjou n’est pas ravi à l’idée de faire don de sa vaisselle au roi Henry, alors que ses paroles précédentes laissent entendre le contraire. Le même vers se retrouve dans P. Nh ainsi que l’édition de J.C. Faucon proposent une toute autre perspective avec la variante suivante : le duc d’Anjou en fu grandement mercians. Le sujet du verbe être n’est plus le duc mais Henry qui remercie le généreux donateur. Cette variante ne rompt pas avec la logique induite par les deux premiers vers de la laisse insistant sur la joie d’Henry. Il faut certainement
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entendre dans notre version meschant au sens de « pauvre, démuni » plus que « malheureux ». En efet, le vers suggère alors que le duc ofre à Henry toute sa fortune pour soutenir l’efort de guerre et se retrouve sans ressource. La tonalité est alors plutôt positive puisque le roi d’Espagne, malgré sa défaite, possède toujours des amis puissants et idèles capables de lui céder la totalité de leur richesse ain d’assurer son succès. p.390) 13194 Le changement de laisse n’est pas marqué par une lettre rubriquée mais seulement par le changement de rime. p.391) 13240 La référence aux deux frères de Henry présents au siège de Tolède reste bien mystérieuse. Il est diicile de savoir à qui exactement le texte fait allusion parmi la liste des huit ils illégitimes d’Alphonse XI de Castille. Tous les manuscrits s’accordent sur le titre de conte d’Auçoyre, sauf le codex de Montpellier édité par J.C. Faucon. Il donne pour variante le conte d’Ansenne, elle aussi énigmatique. Il en est de même pour le comté d’Au évoqué dans le passage. Il s’agit certainement d’une invention du scribe pour donner du relief aux personnages qui accompagnent Henry dans sa reconquête du territoire ibérique. p.405) 13738 Le nom Arle le Blanc semble venir des mémoires de Joinville qui aurait nommé la ville ainsi après qu’au XIIIe siècle aucun cas d’hérésie n’a été à déclarer dans l’enceinte de la ville. p.405) 13746 La réponse des soldats à Bertrand peut paraître étrange lors d’une première lecture. Voléz est la P5 du verbe vouloir et non du verbe voler. Il semble plus logique que le connétable œuvre pour le bien des hommes du duc d’Anjou et ne cherche pas à extirper des fonds à l’armée, quand bien même que le duc propose de payer une partie de sa rançon. p.407) 13797 Les Anglais ne sont pas présents au siège de Tarrascon. Les manuscrits P et A comportent tous deux la même erreur. Nh a donc été exceptionnellement utilisé ain de rétablir la logique du passage. p.410) 13903 La lettrine est manquante en début de vers, laissant apparaître un l d’attente. p.422) 14321 Il manque l’ornementation de la première lettre de la laisse, laissant apparaître un e d’attente. p.425) 14406 L’antécédent du pronom relatif que est le substantif gens situé au vers précédent. Il s’agit du contingent envoyé par le roi de Bel Marin dont se charge l’amiral. p.425) 14407 La préposition de indique ici la provenance et non les bénéiciaires du secours. On peut traduire le vers ainsi : «dix mille hommes venaient en renfort par la mer ». p.426) 14442 La syntaxe de cette phrase pose quelques diicultés de com-
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préhension. On peut la comprendre ainsi : « après tout ceci, je vous diray qui nous pousse à vous être hostile et de quelle façon il s’y prend ». Les manuscrits P et Nh donnent pour variante au second hémistiche du vers 14442 vous dirai en present. p.427) 14496 La syntaxe de cette phrase est complexe. Il faut voir dans le qui du vers 14495 un pronom relatif ayant pour antécédent Bertrant. La forme qu’ du vers 14496 est une conjonction de subordination ouvrant une proposition subordonnée complétive. Celle-ci est un second complément du verbe mander du vers 14495, le premier étant son estat. La proposition relative placée ainsi entre les deux compléments directs du verbe mander vient perturber la logique du passage. p.431) 14610 La forme estourdie est considérée par le Littré et le TLF comme la première attestation du mot en tant qu’adjectif. Le texte en présente également une autre occurrence au vers 2745 dans l’expression a la chiere estourdie. La glose que propose le TLF, « qui est fait sans rélexion, à la légère », ne semble cependant pas satisfaisante dans ce contexte. Le texte insiste sur le caractère violent de la bataille, thème qui est d’ailleurs développé par les deux vers suivants décrivant les nombreux chevaliers qui gisent à terre après l’assaut. Le sème de « violence » attaché à l’adjectif est corroboré par l’expression du vers 2745. Le texte décrit dans ce passage les principales igures de l’armée anglaise que Bertrand doit afronter. Il est plus logique que le texte insiste sur le caractère cruel de Gaultier Huet, chevalier à qui s’applique la description, plutôt que sur son côté léger ou irréléchi. De plus, le sens de « brutalité » que véhicule l’adjectif est en rapport direct avec les sens premier du verbe estourdir en moyen français, dont il dérive directement. Le DMF donne comme sens premier du verbe : « ébranler qqun (physiquement), lui faire subir une violente commotion (par des coups, des violences, du tapage...) ». Le rapport avec la violence devient alors évident. Le manuscrit du Mans admet pour variante l’adjectif oultrageuse (ed. J.C. Faucon, partie « variantes ») qui insiste également sur le caractère excessivement brutal de l’afrontement. p.431) 14623 La syntaxe du vers est diicile. Despit est la P3 du présent du verbe despiter et par grant une locution adverbiale. La phrase peut alors s’entendre ainsi : « chacun maudit grandement l’endroit où il est venu ». p.432) 14641 Le sujet du verbe veoir est Henry. p.436) 14783 Le FEW relève comme sens pour le substantif commandise : « droit payé au seigneur pour sa protection » (948 a, I. 1). Cette acception considérée comme normande a pu donner par métonymie dans une région plus méridionale le sens de « demeure, lieu qui paye un tribut pour obtenir la protection
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d’un seigneur ». Le manuscrit P donne pour variante manandise, substantif qui a le sens plus général de « maison ». p.438) 14854 La correction a été apportée en suivant la variante du manuscrit Nh, P présentant la même faute que A. L’article déini n’était pas satisfaisant si on tient compte de la suite du texte. La prise de parole un peu abrupte qu’on trouve au vers suivant ne peut être attribuée au maistre de Tartaire, ce que laissait entendre l’article déini. De plus, la logique narrative du passage s’en trouvait atténuée puisque le maistre se répondait alors à lui-même. Il est plus sensé de trouver Pietres répartissant les contingents entre ses hommes plutôt que le contraire. Nh introduit un vers entre celui-ci et le début du discours direct « et leur a dit « Seigneurs, penséz de cheminer » ». Cette variante conirme que le locuteur est dans ce passage le roi Pietres. p.439) 14882 La forme les n’est pas à entendre comme l’article déini accompagnant Espaignolz mais comme un pronom personnel complément direct de virent, désignant la troupe de Carenlouet (quant Espaignolz les virent). p.439) 14893 La forme eunoy pose quelques problèmes d’identiication. P donne pour variante le substantif aunoy, dérivé de alnoy « lieu planté d’aulnes ». Eunoy peut être donc une forme de ce substantif, avec afaiblissement du a initial. Cependant, Nh ofre pour variante l’expression a .i. en voit. Puisque dans A les lettres -u, -n et -v ne sont pas discriminées, le dernier mot du vers pourrait alors se lire envoy en accord avec Nh. L’expression en voit peut être un dérivé de en voie signiiant « un lieu éloigné ». Le DMF admet comme forme possible du substantif voie la forme voiz, d’où peut peut-être découler la forme de Nh. Le DMF contient une entrée envoie, adverbe signiiant « loin ». C’est la proximité des deux codex qui nous conduit à retenir l’hypothèse d’une dérivation directe de la variante du manuscrit P pour l’édition et le glossaire. La question n’est cependant pas fermement tranchée. p.451) 15304 Et de destruyre France est coordonné à a aider loiaument du vers 15297. Tous deux sont des compléments de l’expression avoir en convent du vers 15296. p.451) 15317 Les deux pèlerins sont sujets du verbe aloient. p.454) 15409 Les Sarrasins seront prêts dans quinze jours, selon les dires du pèlerin. p.460) 15627 Le référent du pronom ly est Henry. p.466) 15839 Une correction du vers s’avère nécessaire. On trouve dans P comme variante en début de vers : et .i. autre. Le passage de .i. à la forme développée un dans A découle manifestement d’une erreur du copiste. En efet, le référent de .i. est le substantif bataille au vers 15835. Il aurait fallu alors transcrire
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la forme une. Nous avons donc rétablit la forme féminine. Aucun autre témoin ne présente de forme développée. p.469) 15942 Le référent du pronom relatif qui est Paiens du vers précédent. p.469) 15949 Il manque l’auxiliaire avoir dans le second hémistiche qui accompagnerait le participe passé trespercie. Le passage peut se traduire ainsi : « sa lance a traversé de part en part (le corps de Ruin) ». p.470) 15961 De toute la tradition manuscrite, seul Nh semble donner une variante satisfaisante pour ce vers. L’édition de J.C. Faucon retient le vers a Aletaire fu raconté du perssant. La forme du implique un article déini le, alors que le personnage n’a jamais été mentionné auparavant. Ce potentiel emploi cataphorique de l’article fait déduire à l’éditeur que le substantif perssant ne déinit pas l’origine géographique du personnage mais désigne « un haut dignitaire sarrasin, pareil à l’almazour de La Chanson de Roland » (J. C. Faucon, La Chanson de Bertrand du Guesclin, t. 1, Éditions universitaires du Sud, 1991, p.117). Le vers du manuscrit Nh pousse à y voir simplement un problème de copie, d’un se transformant en du par l’oubli de quelques jambages. De plus, la transformation de raconter en rencontrer dans les manuscrits A et P brouille d’avantage l’intelligibilité du passage. Malgré les diférents dictionnaires, grammaires et manuels consultés, il n’a pu être établi que le verbe rencontrer puisse admettre une proposition complétive (vers 15962) comme complément. La formule de Nh a donc été retenue pour apporter une correction satisfaisante à A. p.471) 16008 Aucune occurrence de la préposition de employée comme intensif n’a été réperée dans les diférents dictionnaires et grammaires consultés. Le manuscrit P présentant le même oubli que A, l’ajout de tant a été réalisé en accord avec Nh. p.475) 16144 La syntaxe de cette phrase est un peu diicile. Le référent du pronom qui est en fait le roy de Bel Marin. Il est également l’actant du gérondif gouvernant. Cette hypothèse est conirmée par la variante de Nh : ly ilz du roy qui fu Bel Marin gouvernens. Le vers peut se traduire ainsi : « le ils du roi qui gouvernait Bel Marin ». p.482) 16369 Le sujet du verbe appeler est le Besgues. p.482) 16371 Une correction de l’usage du pluriel s’imposait. Le texte du manuscrit A n’indique qu’un seul locuteur, Moradas de Ronille. Le manuscrit P introduit un autre personnage à la suite de Moradas : Moradas de Ronille va o lui appelant/et l’autre ot nom Copin, son escuier vaillant/quant la frainte ont oÿ de Pietre le tirant/au Besgue de Villaines sont venuz maintenant. L’entreprise de singularisation menée par le copiste de A n’est pas allée jusqu’à son terme. Le
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groupe verbal est bien passé au singulier, mais pas l’incise du vers 16371, toujours au pluriel. La correction vient donc faciliter la compréhension du passage, bien qu’elle ne s’appuie sur aucune variante existante. p.482) 16393 L’image de la Russie comme pays riche et prospère se retrouve dans de nombreuses chansons de geste françaises. Au-delà de l’opulence relevée, le texte insiste sur l’origine païenne de la fortune de Pietres, qui semble inépuisable. Pour comprendre comment cette terre pourtant chrétienne depuis le bas Moyen Age reste dans l’imaginaire une contrée paienne, voir G. Lozinskij, « La Russie dans la littérature française du Moyen Age : la population et ses richesses », Revue des études slaves 9.3, 1929, p. 253–269, url : http://www.persee. fr/doc/slave_0080-2557_1929_num_9_3_7445. p.483) 16426 Nullement a dans ce vers une valeur positive. Le vers peut se traduire ainsi : « si vous me résistez de quelque manière que ce soit ». p.486) 16528 Le vers peut s’entendre ainsi : « mais par un pur hasard car Dieu me tenait éveillé ». p.488) 16584 La forme verbale comoras est-elle un dérivé altéré de commovere ? Le FEW relève comme dérivé en ancien provençal la forme escomoure. On trouve aujourd’hui le verbe commoure en langue catalane. La forme du texte pourrait donc avoir été inluencée par une variante occitane. Le même hémistiche se trouve dans le manuscrit P. Les autres témoins donnent pour variante : car son corps convoitas. L’expression commouvoir en le corps de qqun signiierait donc littéralement « remuer dans le corps de qqun ». Cette deuxième partie du vers ofre donc au lecteur une image grivoise plutôt que l’explication de la décapitation du père de Lucas exprimée par les autres témoins. p.489) 16627 La forme leur (< lumen) peut s’expliquer par une dérivation à partir de l’acception médicale du mot en moyen français. En efet, le DMF admet une seconde entrée du mot leur avec comme sens premier « menstrues ». Le glissement de « lux de sang » à « cours d’eau » a pu avoir lieu par le sème du ruissellement. A et P semblent les seuls témoins de l’utilisation du mot comme masculin singulier (P=lour). Le manuscrit Nh donne la forme lu, dérivée de lun. p.491) 16709 L’expression jardin des clefs se trouve dans plusieurs manuscrits de la tradition (A, P et Pn). Nh donne une variante qu’a conservée J.C. Faucon pour corriger son édition : le jardin descloux. On peut cependant trouver une explication à cette image qui se retrouve dans de nombreux témoins. Le substantif clef possède un sens particulier relevé par le DMF, celui de « lieu commandant l’entrée d’un territoire, d’un pays ». Cette acception peut être celle employée par le texte dans cette expression. Le mot jardin serait utilisé pour
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désigner un « vaste territoire ». L’expression peut alors se traduire par « l’ensemble de points d’accès au territoire français » que les Anglais fragilisent par leurs attaques successives. Le texte joue donc avec la métaphore de la serrure par l’emploi au vers suivant du verbe refermer. Pour ces raisons, aucune correction n’est apportée. p.496) 16871 La présence de dignement pose un problème d’intelligibilité du vers. Seul le dictionnaire de Takeshi Matsumura relève des occurences de dignement comme substantif masculin. Le scribe de P laisse un vers dont il manque la rime : Jhesus vous croisse honnour par son digne. Nh donne une variante plus complète : Jhesus vous croisse honneur par son divin commant. Le scribe de A a peut-être tenté de combler l’oubli de P ou d’un manuscrit apparenté en transformant l’adjectif digne en un substantif ain de rétablir la rime manquante. p.501) 17043 La relative accompagnant le nom frere est construite en parataxe. Il faut entendre ici : « non pas le vrai comte mais son frère qui fut là ». p.502) 17067 La lecture de la forme convent pour couvent est assurée par la présence sur le manuscrit d’une barre de nasalité sur -co. Plusieurs exemples sont attestés dans le DMF à l’entrée couvent. p.505) 17200 La première occurrence du substantif vole dans le sens de « jeu de cartes » est répertoriée dans le TLF comme étant celle utilisée par Rabelais dans Gargantua en 1534, dans la liste des jeux du protagoniste. Il semble que la version de la chanson donnée par les manuscrit A et P en donne une attestation antérieure. L’expression a/en la vole désigne une manière de remporter un jeu de cartes en gagnant toutes les autres cartes du jeu, passe qui se nomme « faire capot » dans le vocabulaire du jeu de la contrée. Ainsi, le passage pourrait alors se traduire de cette façon : « Mais si Dieu aide Bertrant qui jamais n’a aimé l’école, il vaudrait mieux pour eux que la chance soit de leur côté ». L’expression a pu désigner le degré maximum de chance qu’un joueur puisse obtenir à un jeu, puis par élargissement le degré maximum de chance en général. Nh donne pour variante il leur vaussist mieux tous estre en mole, les autres témoins ofrent pour second hémistiche estre trestous a la karolle. p.509) 17317 Si le sens de gappi semble s’imposer dû à la coordination avec le participe passé dérobé, l’identiication de la forme est quant à elle moins aisée. Le FEW présente sous vappa (v.14, p. 168a) l’adjectif gappi utilisé dans toute la zone frontière entre langue d’oc et langue d’oïl, de la Suisse au Limousin. Le sens premier est celui de « pourri » qui est attesté jusqu’à Rennes. L’acception du texte dérive certainement de celle attestée dans la région du Limousin et du Périgord : « cuit lentement ». On trouve, toujours selon le FEW, dans la région
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alpine, le sens d’«aliments qui ont soufert sur le feu » à travers la forme féminine gapina. Dans le texte, l’idée de terre « dévastée par le feu » après les pillages successifs découle donc des acceptions occitanes de l’adjectif et ses dérivés. Ce terme est une preuve de plus que la copie a été réalisée sur un territoire où langue d’oc et d’oïl étaient en contact permanent. p.510) 17367 La forme ampierere est employée seulement par le scribe du manuscrit A. Les autres versions du texte utilisent la variante emperere. p.523) 17823 La forme clement est-elle ici un adjectif ou bien un nom propre ? Le DMF et le Gdf ne retiennent qu’un exemple sous l’entrée dédiée à la forme adjectivale, l’expression prince clement extraite de l’œuvre de Christine de Pizan ou de Villon. Cependant, la fonction « recherche plein texte » oferte par le DMF permet de trouver d’autres exemples de l’utilisation de la forme en tant qu’adjectif. Elle semble surtout employée pour qualiier Dieu (O crëateur du irmament, Puissant, sapïent et clement), mais peut être également utilisée en contexte plus laïc où elle est coordonnée à un autre adjectif de sens proche, comme piteable ou debonnaire (Je suis clement et piteable aux meschans ; comme clement et debonnaire pere). Toutefois, les exemples relevés s’appliquent tous à des personnages détenant un certain pouvoir, une certaine forme d’autorité. Or, le héraut peut diicilement être considéré comme une igure de pouvoir. De plus, la consultation de toute les occurrences classées dans le DMF et le Gdf démontre que le terme est utilisé majoritairement en tant que nom propre. Le choix a donc été fait de lui donner une majuscule, la probabilité pour que le texte cherche à mettre en avant la magnanimité du heraut étant faible. p.534) 18174 La forme a présente dans le vers est le verbe avoir conjugué au présent de l’indicatif à la troisième personne. p.536) 18240 Les manuscrits A et P présentent le verbe demourer conjugué à la quatrième personne. L’utilisation du discours direct semble impossible en raison de l’absence d’un verbe introducteur d’une parole. Un commentaire du narrateur porteur d’un nous communautaire ne paraît pas non plus être une solution envisageable dans le contexte syntaxique de coordination avec les décisions de Bertrand et d’Olivier de Clisson. La correction, en accord avec Nh, en un verbe à la sixième personne permet de rétablir une cohérence syntaxique. La faute pourrait, dans A, venir de l’équivalence phonétique entre [ã] et [õ] dans le domaine poitevin (voir la partie phonétique de l’introduction grammaticale). p.536) 18270 Un trait vertical du copiste vient marquer la césure dans ce vers entre Vienne et ou. p.537) 18274 A et P présentent la même confusion du terme gentilé employé. La faute est d’autant plus surprenante que le nom du peuple ennemi est
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accompagné de l’article possessif noz. Une correction a été apportée selon Nh ain de rétablir la cohérence narrative du passage. p.539) 18358 La correction du vers est apportée selon une variante présente dans P. En efet, le codex P possède la même répétition du substantif oice. Celui-ci est cancellé et une main postérieure a suscrit le mot argent. Cette leçon se retrouve également dans la version du texte éditée par J.C. Faucon. p.539) 18373 A et P présentent un problème de copie du même au même. Il semble curieux que les bourgeois ravagent la région de la Rochelle. La leçon de Nh a été préférée ain de rétablir la cohérence narrative du passage. p.540) 18406 P et A présentent le même problème d’accord du verbe porter. Une correction a été apportée en accord avec la leçon de Nh ain de conserver l’harmonie grammaticale de la phrase. p.546) 18598 Les vers et Chando d’autre part a ses Englois monstra/le ber Karenlouet, car moult bien l’avisa sont répétés après le vers 18598. Ils ont été supprimés en accord avec P et Nh. p.556) 18958 Les soldats ayant rejoint Carenlouet à la Roche Posay sont au nombre de quatre cent : 4x10x10. Le manuscrit P propose une autre multiplication au lecteur ain de trouver le bon compte : .iix iix , soit (2x10)x(2x10). Le manuscrit Nh opte pour une notation plus classique : .iiiic . Le nombre total n’en reste pas moins le même dans ces trois témoins. p.557) 18976 La locution un poix de signiie «beaucoup de ». Le vers peut se traduire ainsi : « de nombreuses fortiications constituées de pieux dressés ». p.557) 18980 L’outil décrit dans le passage est certainement une scie passepartout. Elle est composée d’une grande lame comportant à ses extrémités deux poignées verticales. L’utilisation de cet objet demande la présence de deux personnes qui tirent la lame à tour de rôle. p.557) 18985 Le passage peut s’entendre ainsi : « ils scièrent les pieux dont je vous parle à ras de terre ». p.560) 19072 La Vienne sépare le camp anglais du camp français. Le pont et les tours de Châtellerault devaient se situer sur la rive face à la ville. Ceci devait permettre aux Anglais de rejoindre Poitiers sans encombre, la ville se trouvant sur cette même rive de la Vienne face à Châtellerault. p.568) 19365 Aucune attestation de la forme rescours comme participe passé du verbe rescourre n’a été trouvée dans les diférents dictionnaires et manuels consultés. Le copiste a sans doute confondu ici le participe passé avec le substantif rescours signiiant « aide ». Une correction a été apportée ain de garantir la grammaticalité de la phrase. p.571) 19442 La phrase peut se traduire ainsi : « chacun aurait préféré être
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vêtu d’un simple caleçon et iler tout droit en Avignon qui fut gouverné jadis par Dame Aye ». p.573) 19520 La phrase peut se traduire ainsi : « il vaut mieux que nous récupérions leurs vêtements plutôt qu’il pourrissent là-haut ». Le manuscrit P donne les éléments dans un ordre plus canonique : mieulx vaut qu’aions les draps qui porrissent lassus. p.574) 19546 La forme ameneis n’est pas attestée dans les diférents dictionnaires consultés. Le FEW relève ameneït comme forme du verbe amanevir (516a, 3). La forme du participe passé du texte s’explique par la chute de la consonne intervocalique au XIVe siècle. Le hiatus qui en découle permet de conserver le nombre de syllabes attendu. Tous les manuscrits apportent la même leçon sauf Nh qui donne pour cet hémistiche : de traire menevis. Cette variante utilisant un dérivé d’amanevir conirme le fait qu’ameneis est bien une forme de ce verbe. p.574) 19558 P et A comportent la même erreur : l’oubli du -t inal du verbe à la P6. La correction a donc été établie selon la leçon de Nh. p.574) 19569 La région évoquée par le Castal est certainement celle de l’Aunis, région entourant la ville de La Rochelle. L’étymologie du toponyme découlerait du substantif aulne et ferait donc référence à une contrée où cet arbre se rencontrait en grande quantité. L’expression fourests de l’Anis renverrait donc à un endroit où la densité de végétation rendrait le lieu hostile. (Voir J.-M. Cassagne et S. Seguin, Origine des noms de villes et villages de Charente, Bordessoules, 1999, p. 9.). p.575) 19580 Le début d’une nouvelle laisse n’est pas indiqué par une lettre rubriquée mais seulement par le changement de rime. p.575) 19604 Quant est une conjonction signiiant « puisque ». El est un adverbe qui a pour sens « autrement ». Le passage peut alors se traduire ainsi :« que peut-on y faire, puisqu’il ne peut en être autrement ». La question réthorique de Mansnel concerne les événements de Sainte-Severe présentés plus haut par le Castal. p.588) 20055 Le substantif amulaine avec le sens de « monture » ne se trouve que dans les diférents témoins de la chanson. Le Gdf glose le mot en « cheval précieux », tout comme J.C. Faucon dans son étude. La démarche d’humilité entreprise par Bertrand ain de convaincre les habitants de Poitiers de rejoindre le camp français a tendance à amoindrir la valeur du cheval qu’il choisit. Le chevalier se présente aux Pictaviens muni d’une branche leurie, sans casque et accompagné seulement d’un page ain de prouver sa volonté de conclure la paix. La scène fait écho à l’entrée à Jérusalem réalisée par le Christ où Jésus monté
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sur un ânon est accueilli par la foule brandissant des rameaux ou encore celle du roi Salomon à Gihôn sur une humble monture (Rois 1,38-40). La démarche de Bertrand n’implique donc pas le choix d’un coursier luxueux mais au contraire d’une bête de peu de valeur, symbole de sa démarche paciique. Le mot mule contenu dans amulaine renforce cette idée, c’est la glose qui a été choisie pour cette occurence. p.590) 20109 L’assemblée des bourgeois doit statuer sur deux problèmes (deux causes). Le premier concerne le groupe envers qui ils jureront idélité, les Français ou les Anglais. Le second problème découle du premier et concerne leurs biens et leur personne. Soit ils restent sous domination anglaise, auquel cas ils seront pendus et leurs biens conisqués ; soit il font le choix de redevenir Français et ils seront saufs de corps et de biens. L’alternative proposée par Bertrand ne laisse en vérité pas vraiment de marge de manœuvre au conseil. p.590) 20112 Il n’a été trouvé aucune occurrence de respondre employé comme substantif. Une correction a été apportée grâce à la leçon de P. Cependant, la forme responce présente dans ce codex a été modiiée en response, seule forme du substantif utilisée dans le manuscrit A vers 9266 et 20112. p.594) 20240 Le manuscrit présente à ce vers un trait vertical séparant ville et aussi. p.594) 20253 Le substantif clavel à pour acception « anneau du haubert » (Gdf). Par métonymie, il ne désigne plus ici la partie mais bien le tout, le haubert lui même. p.595) 20271 A et P comportent tous deux le verbe esmaier pour clore le vers. Aucune attestation du sens de « dénombrer » n’a pu être trouvée pour ce verbe dans les diférents dictionnaires consultés. On trouve cependant dans le Gdf le substantif esmaillee signiiant « mesure de terre rapportant une maille ». Le verbe utilisé dans le codex aixois peut être une forme dérivée de cette unité de mesure et non du verbe latin exmagare. Nh donne pour variante : a iim et vc les aloit nombrant, mais le vers est alors hypométrique. Pour ces raisons, la leçon de A et P est conservée. p.596) 20299 Trois vers sont répétés après celui-ci : Place, ville y avoit, moutier assez vaillant.//A deux lieues dela, se nous dit le rommant,//estoit dessus la mer une ville seant. La répétition n’apparaît dans aucun des manuscrits consultés. La probabilité d’une erreur de copie s’avérant élevée, les vers ont donc été retirés du corps du texte. p.603) 20552 Le verbe virent conjugué au pluriel est ici le résultat d’un accord au sens avec le substantif commun, accord qui se poursuit dans la proposition principale régie par le verbe pristrent au vers 20557.
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p.605) 20629 Le manuscrit présente à ce vers un trait vertical séparant une et espie. p.605) 20629 Le nom propre Henry est-il le nom de l’espion ou du seigneur auquel il est soumis ? L’expression ressemble fort à un cas régime absolu, tournure fréquemment employée dans le texte (cf partie grammaticale de l’introduction). Cependant, il n’est fait nulle mention d’un seigneur anglais qui aurait pour nom Henry avant cette scène. Est-ce alors une erreur ? La même leçon se retrouve dans tous les témoins médiévaux connus hormis le manuscrit Nh qui donne pour variante : .i. espie hardy. De plus, le cas régime absolu espie Henry n’est pas utilisé dans le texte, formulation qui aurait pu entraîner les précédents copistes à commettre une erreur. La leçon est conservée, avec certaines réserves sur sa validité. p.607) 20679 La forme peyrons employée dans le codex aixois n’est attestée dans aucun des dictionnaires consultés. Une correction a donc été apportée grâce à la variante de P. Nh propose une leçon plus lointaine : d’armes et Bretons. p.607) 20684 L’indication temporelle désigne certainement le petit matin, au premier chant du coq. L’expression n’a toutefois pas été relevée ailleurs que dans notre texte. p.608) 20737 La lettre rubriquée ouvrant cette nouvelle laisse est sans ambigüité un -r majuscule et non un -d. Un -r minuscule d’attente est d’ailleurs visible à l’intérieur de l’initiale ornée. De plus, le doublement de la consonne -l en milieu de mot indique bien que le copiste a confondu le prénom Rollant avec l’adjectif dolant, ce dernier ne présentant jamais dans le manuscrit aixois de double consonne. La proximité avec le prénom Olivier a dû engager le copiste vers la piste du fameux couple de héros, variante peut être déjà présente dans le manuscrit de copie. Une correction a été apportée ain de fournir un sens à la phrase. p.618) 21066 Une correction du vers est nécessaire. La conservation de on, pronom sujet, pose problème. Le vers ne contient alors pas de verbe pour le pronom. La forme a ne peut en aucun cas être l’auxiliaire avoir. Elle ne peut être qu’une préposition pour régir l’ininitif desirer. P et Nh ne nous sont d’aucun secours, le premier comportant la même leçon que A et le second une variante totalement diférente. Nous nous sommes donc tourné vers l’édition de J.C. Faucon ain d’obtenir une leçon satisfaisante pour ce vers. Nous trouvons dans l’édition : D’avoir les chevaliers ils ont grant desirer. L’emploi du verbe avoir à P6 semble plus logique. La proposition est ainsi coordonnée avec le vers suivant ofrant le verbe vouldront, également conjugué à P6. Le sujet est donc toujours les demaines et les per des Englois exprimé aux vers 20057-58. Nous avons donc ajouté
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un -t a on ain de conserver une cohérence grammaticale. p.619) 21111 On retrouve le même phénomène qu’au vers 15839. La présence de la notation de l’article indéini en chifre romain dans le manuscrit de copie (P=.i.) conduit le scribe de A à transcrire un sans l’accorder avec le substantif qu’il accompagne. Nous avons donc accordé l’article avec le substantif féminin lieue. p.621) 21179 Le vers 21178 que ce semble a veoir une forest pleniere est répété entre les vers 21179 et 21180. Syntaxiquement, le maintien de ce vers aurait apporté une rupture dans la coordination entre les substantifs toile et croiz. Sémantiquement, il semble plus logique que ce soit l’abondance des lances pointées vers le haut qui donne l’impression d’être devant une épaisse forêt plutôt que les vêtements des soldats anglais. Pour ces diférentes raisons, le vers n’a pas été conservé. p.622) 21192 L’acception « penser, réléchir » pour le verbe sommiller n’est attestée dans aucun des dictionnaires consultés. P donne la même leçon. Ce verbe pourrait être une variante de sommer, « faire le compte de », avec ajout d’un suixe -iller. Nh donne pour leçon soutillier, « imaginer, concevoir », plus à même de faire partie de la coordination avec penser et viser. p.622) 21218 L’article indéini un est entouré dans le manuscrit de deux points à la manière des chifres romains. Cette particularité a été conservée dans l’édition. p.626) 21352 Le substantif batys est une forme du mot bateis recensé par le FEW p. 292. p.632) 21545 L’ininitif retraier est attesté dans le dictionnaire de l’anglonormand (AND) ainsi que par un exemple de la Chronique de Jean le Fèvre relevé dans le Gdf. p.639) 21768 Le style de France utilisé par le copiste pour dater de in de la composition du manuscrit ramène selon le comput actuel au 15 février 1441.
Glossaire Une attention toute particulière est portée dans le glossaire à relever des expressions caractéristiques du moyen français ou des acceptions non répertoriées par les diférents dictionnaires consultés (voir notre bibliographie). Nous avons placé un astérisque à la suite des entrées dont la forme n’est pas attestée dans des dictionnaires ou à la suite des formes ininitives reconstituées. Les verbes sont rapportés à l’ininitif. Les substantifs sont donnés au cas régime singulier et les adjectifs au régime masculin singulier, sauf mention contraire. Lorsque qu’un mot présente plusieurs formes diférentes, nous avons choisi comme entrée la forme de la première occurrence du mot dans le texte. Les numéros de vers en gras correspondent aux formes qui difèrent de celle de l’entrée. Les variantes graphiques des mots relevés sont placées entre parenthèses à la suite de l’entrée principale. Les numéros de vers en italique correspondent aux termes placés dans le glossaire qui appartiennent à une leçon venant d’un autre manuscrit utilisé pour corriger le manuscrit de base. Nous avons donné pour certaines entrées le sens général que revêt le mot en moyen français puis les sens dérivés de cette acception dans les diférents vers du texte. Ce sens général est repérable dans le glossaire car il n’est pas suivi d’un chifre indiquant un vers du texte. Les gloses suivies d’un point d’interrogation indiquent que l’expression et/ou le sens du mot dans le texte n’ont pu être trouvés dans aucun des dictionnaires consultés. Les locutions sont reportées entre parenthèses, le terme correspondant à l’entrée est représenté par un tiret à l’intérieur de celle-ci (–). Les abréviations suivantes ont été utilisées : vb. : verbe ; adj. : adjectif ; s. f. : substantif féminin ; s. m. : substantif masculin ; adv. : adverbe ; vb. trans. dir. : verbe transitif direct ; vb. trans. ind. : verbe transitif indirect ; vb. intr. : verbe intransitif ; vb. imp. : verbe impersonnel ; prép. : préposition ; conj. : conjonction ; plur. : pluriel ; p. p. : participe passé ; part. prés. : participe présent ; P+numéro pour indiquer les personnes des verbes. 55
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Aati : adj. : animé d’une grande ardeur (– de combatre) désireux de bataille, 4547 (– de mal faire) animé de mauvaises intentions, 17315 (venir –) arriver avec fougue, 19547 Aatie : s. f. : déi (faire grant –) manifester de l’animosité ?, 10859 (mettre qqun a grant –) mettre qqun en diiculté ?, 2973 Aatir : vb. pron. : se provoquer, 2473 vb. pron. : s’attaquer (ains que Bertrant se fust aus Englois –) avant que Bertrant ne se soit attaqué aux Anglais, 21255 Aatis, voir Aati Abaisser : vb. trans. dir. : humilier, 6328 (sans mon prince abesser) sans porter atteinte à mon seigneur, 1702 Abandonneement : adv. : impétueusement, 17980 Abandonner : vb. trans. dir. : conier, 7810, 11347 vb. pron. : se précipiter (dessus les Englois se vont abandonnant) ils se précipitent sur les Anglais, 18051 Abay : s. m. : cri, provocation, 1266 Abesser, voir Abaisser Abevrer, (abruver) : vb. trans. dir. : abreuver (faire – qqun) servir à boire à qqun (et touz les assaillans face bien abevrer) et qu’il serve à boire à tous les combattants, 19285 (servir de + inf) s’employer à +inf (qui servirent ce jour François d’abevrer) qui s’employèrent ce jour-là à donner à boire aux Français, 19270 p. p. : imprégné (et la char monseigneur sousprise et abruvee du venin) et la chair de mon mari séduite et imprégnée du venin, 6673 Abrisser : vb. trans. dir. : abaisser (abrisser le pont) abaisser le pont-levis, 930 Abrivé : adj. : rapide, 21155 (courant et –) à vive allure, 19919 (la venue –) la venue imminente, 18453 (venir –) arriver à vive allure, 14498, 20016 Abruvee, voir Abevrer (p. p.)
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Abusement : s. m. : tromperie, 7029 Abuser : vb. trans. dir. : induire en erreur, 5555 Abusion : s. f., (regner en –) demeurer fou, 6836 Accordement : s. m. : accord, 21680 Accuser : vb. trans. (– qqun à qqun) : dénoncer ? (et l’accusa au conte) et il le dénonça au conte, 3335 Acerin : adj. : fait d’acier (l’espee acerine) épée d’acier, 18933 Acertisfier : vb. trans. dir. : reconnaître (je vous acertiie) je vous reconnais, 514 Achapter : vb. trans. dir. : acheter, 2945, 5102, 13510, 15045 Acheminer : vb. pron. : se mettre en route, 7869, 8245 Achevement : s. m., (faire son –) achever son entreprise, 12223 Achever : vb. intr. : parvenir à ses ins, 15382 Achie, voir Hachie Achison, voir Achoison Achoison, (achison, actoison) : s. f. : raison, motif, 2418 (a petit d’–) sans tarder, 20022 (bien y a achoison) il existe bien des raisons à cela, 12706 (male –) mauvaise circonstance (véz cy male actoison) voici une bien facheuse nouvelle, 8887 (mortelle –) peine de mort ? (grant blasme nous donra par mortelle achoison) il nous punira par la mort, 20358 (or vous lerray un pou de ceste achoison) je ne vous entretiendrai pas plus de ces événements pour l’instant, 12609 (par aucune –) pour quelque raison que ce soit, 12735 (par aucune –) pour quelque raison que ce soit, 20676 (A Bertrant depria que par nulle achoison ne parte d’avec lui) il supplia Bertrant de ne pas l’abandonner pour quelque raison que ce soit, 16714 (par l’– de qqun) grâce à qqun ? (par vous ce sont rendu et par vostre achoison) ils se sont rendus grâce à vous, 13932 (un juif convert avoit dit les achisons) un juif converti au christianisme avait rapporté les événements, 7791 Aclarrier : vb. trans. dir. : éparpiller, 18735 Acliner : vb. pron. : abonder (ou tout honneur s’acline) en qui l’honneur abonde, 6585
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Acointer : vb. trans. dir. : fréquenter, 6946 (– de+inf) s’employer avec soin à (qui n’acointa aus gens tuer toute sa vie mais qu’ilz fussent Engloys de son adverse partie) qui dédia toute sa vie à tuer des gens si ce n’est des Anglais du camp adverse, 13387 (– qqch à qqun) informer qqun de qqch (je vous veil acointer que) je désire vous informer que, 12667 vb. pron. : fréquenter (au prince de Galoys m’en iroie acointer) j’irai me lier d’amitié avec le Prince de Galles, 9757 (de lui m’acointeray) je me lierai d’amitié avec lui, 9769 (des grans et des petis tellement s’acointa) il s’entoura aussi bien des grands que des petits, 6624 Acoiser, voir Actoiser Acoler : vb. trans. dir. : saisir, 1772, 10115, 10320, 11452 Acommuniement : s. m. : communion, 17976 Acompaigner : vb. trans. dir. : unir (un bon et un malvait ensemble acompaigna) il unit une bonne personne et une mauvaise, 6536 Acompter, voir Aconter Acomtenance : s. f., (par tel –) en telle manière, 1131 Aconter, (acompter) : vb. trans. ind. : tenir compte, 17004, 17143, 18346, 20843 (– petit de qqch) accorder peu d’importance à qqch, 6543 (je n’y acompte .i. dé) je n’y accorde la valeur d’un dé, 15822, 16787 (n’–riens nee) ne tenir compte de personne, 261 (n’y acontoit la montance d’un denier) il n’accordait même pas à cela la valeur d’un denier, 6894 (n’y acontons nÿent) Nous n’avons pas peur de ceci, 7962 (nous n’y acomptons neent) nous ne craignons rien de cela, 17090 (pou y acomptoit) il n’y accordait que peu d’importance, 256 (quant sang de lui yssoit, n’en acontoit nyent) de se vider de son sang, il n’y prêtait aucune attention, 173 vb. trans. : compter, 18494 Acordement : s. m. : décision, 2861 Acorder, (actorder) : vb. trans. dir. : (– qqch) être d’accord avec qqch (Et se j’ayme Bertrant, droit le veult actorder) : et puisque j’apprécie Bertrant, je suis bien d’accord avec ceci, 10809
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vb. trans. (– a qqch a qqun) s’accorder sur qqch avec qqun, 2459 Acorer : vb. intr. : arracher le cœur, 19804 (le boucher est venu dont seréz acoré) le boucher est venu qui vous arrachera le cœur, 18149 (qui aura prisonnier, tost le voise acorer) celui qui aura un prisonnier, qu’il lui arrache le cœur sur le champ, 18862 Acort, voir Actort Acoucher : vb. pron. : s’aliter (le gentilz mareschal d’Odrehan s’acoucha d’une telle maladie) une si violente maladie obligea le maréchal d’Odrehan à garder le lit, 18279 (estre – de qqun) avoir mis au monde qqun, 8556 Acouter : vb. intr. : être au coude à coude (en un conroy estoit tellement acouté que) les rangs étaient tellement resserrés que, 11732 Acquerre, voir Aquerre Acquité : p. p. : délivré, 21492 Acraventer : vb. trans dir. : écraser (le corps Dieu vous acravent) Que Dieu vous terrasse, 1354, 12945 Acreanter : vb. trans. dir. : certiier (je le vous acreant) je vous le garantis, 1302, 4202, 4214, 5764, 6291, 6919, 12069 (je vous acreant que) je vous garantie que, 4465, 18985 Acroire : vb. trans. : prêter de l’argent (si decy endroit l’un a l’autre acreons) : à partir de maintenant, si l’un de nous deux prête de l’argent à l’autre, 10787 Acrouppy : p. p. : accablé, 16286 Actenant : part. prés., (estre –) être parent avec, 5381 Actendant : part. prés., (estre –) être en position d’attente de l’ennemi ? (et regardent François qui furent actendant) ils regardèrent les Français qui attendaient l’arrivée de l’ennemi, 5799 Actoiser, (acoiser) : vb. trans. dir. : calmer, 19403, 21186 p. p. : calmé, apaisé, 9302 Actoison, voir Achoison Actorder, voir Acorder Actort, (acort, actort) : s. m. : avis (quant Charles a ouÿ l’attort de ses barons) lorsque Charles a entendu l’avis de ses barons, 5487 (avoir d’– que) faire le pacte que, 9297
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(d’–) d’une seule voix, 8611 (estre d’–) agir ensemble, 1182 (estre d’un – de) se mettre d’accord de, 9388 Actouppler : vb. trans. dir. : attacher ensemble (Bertrant les it touz lier et actouppler) Bertrant les it ligoter tous ensemble, 19469 Acueillir : (– sa voye) se diriger, 8500, 8732, 14214, 14282 Adaigner : vb. trans. dir. : traiter avec égard (Robin Canolle qui ne m’a adaignié) Robin Canolle qui ne m’a témoigné aucun respect, 17176 Adenté : p. p. : renversé le visage en avant (le ber Carenlouet qui gisoit adenté) le seigneur Carenlouet qui gisait face contre terre, 18812 Adés : adv. : aussitôt, 312, 8949, 10634, 12207, 12502, 13376 (tout –) tout de suite, 15018 adv. : sans cesse (l’euvre desordonnee qu’il maintient tout adés) les actions insensées qu’il poursuit sans relâche, 6686 Adeser : vb. trans. ind. : attaquer (le premier qui huysmais lui aura adesé) à partir de mantenant, le premier qui lui portera un coup, 18821 Adevancer : vb. trans. dir. : devancer, 18579 Adevin, voir Adeviner, p1 prés. ind. Adeviner : vb. intr. : faire des suppositions (ne doubtéz qu’adevin) ne craignez pas que mes paroles soient sans fondement (idée que les paroles du narrateur ne sont pas de pures suppositions), p1 prés. ind.=adevin, 16 p. p. : fait de mensonges ? (faicte de vérité, n’est pas adevinee) qui rapporte la vérité qui n’est pas juste basée sur des suppositions, 9799 Adjornement : s. m. : lever du jour, 11247, 11457, 15502 Adjorner : vb. intr. : assigner à comparaître (fu adjorné encontre Felleton) il comparut au tribunal contre Felleton, 4021 vb. imp. : faire jour, 11561 Adjouster : vb. trans. dir. : uniier (et les troys loys a une adjouster) et rassembler les trois religions en une seule, 11070 Admiral, voir Amiral
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Admirant, (amirant) : s. m. : chef militaire chez les peuples musulmans, voir aussi Amiral, 4569, 9044, 10680, 14505, 14519, 14622, 15973, 16147, 16424, 17335 s. m. : chef de la lotte ?, 18048 Admonnester : vb. trans. : exhorter, 20387 (qui vous vient de lui servir admonnester) qui vient vous inciter à le servir, 20096 Adommagier : vb. trans. dir. : ruiner, détruire, 3437 Adonc, (adont) : adv. : à ce moment-là, 3643, 6941, 8470, 8621, 9125, 11652, 12230, 12383, 12750, 13078, 14721 (a l’–) à cet instant ?, 4595 Adont, voir Adonc Adosser : vb. trans. dir. : tourner le dos à (qui volurent le duc adosser) qui voulurent fausser compagnie au duc, 19466 Adoubé : s. m. : chevalier ? (Charles de Bloy vient a .v. milles adoubé) Charles de Bloy arrive accompagné de cinq mille chevaliers, 1320 Adouber : vb. intr. : préparer, 8136 vb. pron. : se préparer, 18513, 21042 p. p. : décoré ? (et a bon ars tourquois richement adoubéz) il possède un arc turc décoré avec luxe, 14814 p. p. : pourvu en armes, 14501 (dont commainça le trait qui bien fu adoubé) alors commançèrent les jets du lèches qui furent nombreux et intenses, 3090 p. p. : préparé au combat, 10941, 14487 p. p. : revêtu, 14812 Adoubs : s. m. : équipement militaire, 10466 Adrecer : vb. intr. : atteindre son but ? (se je sçay adrecier) si je parviens à mes ins ?, 17392 Adrecer, (adrecier) : vb. intr. : atteindre son but ? (– qqun a bon port) aider qqun à atteindre ses objectifs, 12488 vb. pron. : s’engager (de la partie de Françoys s’adreça) il s’engagea auprès des Français, 641 vb. pron. : se préparer, 21655 vb. pron. : se redresser, 3045, 21656 p. p. : bien engagé (en bataille adrecie) au plus fort de la bataille, 3419
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Adrecié : adj. : engagé, 11487 Adrecier, voir Adrecer Aduré : adj. : endurci, 672, 5065, 5176, 5857, 5871, 6235, 8118, 9266, 9283, 13810, 14940, 15834, 16562, 17334, 17687, 17690, 17817, 18111, 18165, 18313, 18421, 19342, 21408 adj. : rude, 14312 adj. : tenace, 6682 adj. : éternel, 4238 (pour avoir assez sen et honneur aduree) pour avoir raison et honneur éternel, 276 Adveiller : vb. intr. : réveiller, 3071 Advis : s. m. : intention, 788 (gicter son –) décider de faire en sorte que, 3712, 19188 (par –) avec application, 3509, 9830, 10477, 21366 (par –) comme il semble, 19182 (prendre un –) prendre un décision, 15131 s. m. : rélexion commune, 1234 s. m. : sagesse, 4116, 12794 Adviser, voir Aviser Advohé, (advouhé) : s. m. : défenseur, 1622, 3006, 6412, 13088, 13144, 14477 Advouhé, voir Advohé Aé : s. m. : vie, existence, 6443, 6783, 9281, 10542, 15397, 16567, 20018, 21700, 21736 Aer : s. m. : air, 2514, 15519, 18709, 21316 Afaiter : vb. pron. : se préparer, 10103 Aferant, (aferant) : part. prés., (estre –) convenir (comme est aferant) ainsi qu’il convient, 16365 (si comme est aferant) ainsi qu’il convient, 18026 (si qu’il est aferant) ainsi qu’il convient, 18571 Affaitié : adj. : menteur, faux, 4409, 17181 Afferant, voir Aferant Afferir : vb. trans. ind. : ressembler, 1730 (plus lui aiert d’onneur c’on ne lui a porté) il lui revient bien plus d’honneur que nous lui en avons témoigné, 21717 vb. intr. : convenir, 14100, 18991 (estat qui aiert malvaisement) une situation qui ne convient pas du tout, 8519
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(qui n’aiert a amer) qu’il convient de détester, 15036 vb. pron. : convenir (a moitie d’argent et demi paiement qui a rançon s’aiert) la moitié de la somme qu’il convient pour régler la rançon, 18643 Afficher : vb. pron. : prendre appui (es estriers s’aicha) il chaussa les étriers, 1773, 1791, 10114 vb. pron. : s’évertuer (de trayre ferement chascun bien s’aicha) tous s’appliquèrent à tirer avec force, 11354 Affiner, voir Ainer Affliction : s. f. : révérence, inclination en signe de respect, 95, 8666, 10134, 10478, 10573, 12410, 12608 (en grant –) en signe de respect, 6494, 16949 Affoler : vb. trans. dir. : blesser, estropier, 6173, 18636 vb. trans. dir. : rendre fou (qui ainsi l’afola) qui de cette manière lui it perdre la raison, 6547 vb. trans. dir. : tourmenter (et le quart par gehine un proudomme afole) et le quatrième tourmente un homme par la torture, 17197 vb. trans. ind. : blesser (qu’il ne les convenist des membres afoler) qu’il leur était impossible d’être blessés, 19264 p. p. : blessé, 615, 5168, 6247, 8242, 9840, 13760, 14982, 18233 Affyer, (aier) : vb. trans. dir. : certiier, 10600, 16886, 16888, 16896 vb. trans. dir. : promettre, 7651, 10483, 14769, 16398 vb. trans. ind. : faire coniance, 1567 vb. trans. ind. : promettre, 21513 vb. trans. : promettre, 2826, 3367, 4076, 5673, 6721, 6730, 7156, 17752, 20897 vb. pron. : faire coniance (la ou du tout m’afy) : en qui je place toute ma coniance (il s’agit ici de Dieu), 12244 vb. pron. : (s’– de) se risquer à, 10049 Afier, voir Afyer Afiner, (ainer) : vb. trans. dir. : tuer, 6838, 7409, 10608, 21058, 21483 Afoler, voir Afoler Afondrier* : vb. trans. dir. : couler, 11871 Afranchi : adj. : libre, 8577, 8728
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Agasti : p. p. : pillé, ravagé, 16905 Agenci, (agensy, agenti, agenty, aggensy) : adj. : agréable, 4921 adj. : noble, 5417, 17303, 19654, 20900, 21245 adj. : vaillant, 15623, 19541, 20661 Agensy, voir Agenci Agenti, voir Agenci Agenty, voir Agenti Aggensy, voir Agenci Agitté : p. p., (estre – a son lit) : être alité, 21714 Agramir : vb. pron. : se témoigner de l’agressivité (les deux champions se sont bien agrami) les participants au tournoi ont tenté de s’intimider, 2471 Agrapper : vb. trans. dir. : accrocher, 8000, 8225 Agreer : vb. intr. : payer autant que ce que l’on a reçu, 15063 Agrier* : vb. trans. dir. : accabler, 4182, 21531 (La jouxte commainça aprés l’aube esclairie, droit a souleil levant pour le chault qui agrie) Le combat commança juste au lever du jour, dès les premières lueurs de l’aube à cause de la chaleur qui était accablante, 10064 vb. trans. dir. : attaquer, 14375 vb. trans. : incommoder (que ce Castal m’agrie) que ce Castal m’insupporte, 4658 Agu : adj. : aiguisé, 1758, 2508, 3191 Aguet : s. m. : embuscade (estre en l’–) se tenir en embuscade, 3730, 3810 (quant Carenlouet vit que le aguet venoit) lorsque Carenlouet vit se rapprocher la troupe l’attaquant par surprise, 14870 Aguillon : s. m., (estriver encontre l’–) se rebeller contre l’ordre établi (le roy d’Engletterre qui Edouart ot nom, vouloit trop estriver encontre l’aguillon car il se disoit roy de France) le roi d’Angleterre qui se nommait Édouart, voulait aller à l’encontre de l’ordre établi en se disant roi de France, 2614 Agusié : adj. : taillé, 975 Ahan, voir Hahan Aherdre : vb. trans. dir. : saisir (Un Engloys l’aherdy) un Anglais la saisi (la banière), 18259 Ahonté : adj. : honteux, 1991 Ahonter : vb. trans. dir. : insulter, 5165, 9071
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Aidant : s. m. : allié, 6979, 7714, 14518 Aider : vb. trans. ind. : soutenir qqun, 4900 (ne se pouvoir –) : ne plus pouvoir bouger, 5207, 21653 Aïe, voir Aÿe Aillie : s. f. : ail, 17957 Ainsi : adv., (tout – que) pendant que, 8255 (– que) pendant que, 10562 (– que) presque, 9214 Aïré : adj. : en colère, 8405, 9171, 14675 Aïrer : vb. pron. : se mettre en colère, 6782 Aïrer, (aÿrer) : s. m. : colère, 1188, 3559, 3822, 6174, 14562, 21571 Ajornee : s. f. : point du jour, 14756 Ajornement : s. m. : point du jour, 1348, 1715, 1723, 17815, 18639 Alargir : (– qqun de qqch) faire don de qqch à qqun ? (de .x. mille doubles d’or elle l’alargiroit) elle le ferait plus riche de vingt mille doubles d’or, 13628 Alayne : s. f., (retrouver –) retrouver son soule, 4823 Alé : s. m. : allié (et lui feroit hommage et tiendroit loiaulté ... au riche roy de France et y seroit alé) elle rendra hommage au puissant roi de France et deviendra son allié, 6425 Alee : s. f., (bel –) cadeau qu’on reçoit au moment du départ (si auréz vostre bel alee a mon pouoir paiee) vous recevrez une récompense aussi grande que mes moyens le permettent, 16409 Alenee : s. f., (a moult haulte –) à pleine voix, 1504, 4227, 12596, 13713, 13816, 14636, 20503 (a basse –) à voix basse, 9464 (par moult simple –) avec des paroles simples (le duc a encliné par moult simple alenee) il a salué le duc de manière franche (sans prétention), 13719 Alentir : vb. intr. : s’attarder, 18246 vb. pron. : s’attarder, 12911, 16464 (sans point de l’–) sans délai ?, 8777, 8783 Aler : vb. intr. : partir, 4389 (– avant) avancer, aller plus loin, 9521 (comment nous/vous va ?) qu’est qu’il nous/vous arrive ?, 7829, 7840 Alier : vb. trans. dir. : rassembler, 7014 vb. pron. : s’attacher
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(Et les chevaliers plusers, ou prouesce s’alie) et la majorité des chevaliers, en qui la prouesce abonde, 8720 Aloé : s. f. : alouette (mieulx seront prins au brain qu’aloé au matin) il seront plus faciles à capturer qu’une alouette au matin, 20997 Aloer, (alouer, alouher) : vb. trans. dir. : dépenser (une somme d’argent), 9121, 13362 vb. pron. : se placer, 6903 Alosé : adj. : renommé, 3129, 3141, 5006, 5043 Aloser : vb., (– envers qqun) être estimé de qqun ? (meulx vaussist que vous fusséz envers moy alosé) il aurait mieux valu pour vous que je vous porte dans mon cœur, 4633 Alouement : s. m. : alliance (de son alouement) de son camp, 19090 Alouer, voir Aloer Alouher, voir Aloer Aloyé : p. p., (estre – a qqun) s’allier à qqun, 15778 Alumé : p. p. : atteint de colère, 14679 Alye : s. f. : fruit de l’alisier, idée d’une valeur dérisoire, 3240, 13191, 14389, 19992 Amande : s. f. : punition, 15090 Amandement, (amendement) : s. m., (avoir –) avoir le dessus lors d’une bataille, 176 (avoir –) obtenir réparation, 13029 (mettre –) apporter une aide (se le prince de Gales n’y met amandement) si le prince de Gales ne m’apporte pas son soutien, 10450 Amander : vb. trans. dir. : améliorer, perfectionner, 3402, 7242, 13108, 13311, 15060, 19973 vb. trans. dir. : corriger, réparer, 10801, 20427, 20451, 21762 vb. trans. dir. : dédommager (Je suis ycy venu pour vous reconforter et vous devéz vers moy ce fait cy amander) je suis venu ici pour vous aider, vous devez maintenant me dédommager pour ceci, 12328 vb. trans. : payer les conséquences de ses actes ? (oncques bastart ne i si grande desruerie que chier ne l’amandast a l’espee fourbie) jamais personne n’a commis un tel outrage sans en payer le prix à l’épée, 10534
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vb. pron. : s’améliorer (pour ce ne s’amenda de riens le roy Peyron) pour autant, le roi Pietre n’en devint pas meilleur, 6833 Amant : s. m. : allié (DMF : rare), 69, 5781 Amantir : vb. trans. dir. : manquer, faillir, 2121 Amasser : vb. intr. : rassembler ses troupes ? (je vouldroie qu’il fust bien ailleurs amassé) je préférerais qu’il aille rassembler ses troupes ailleurs, 1098 vb. pron. : se rassembler, 3966 p. p. : rassemblé, réuni, 8606 Ame : s. f., (avoir – avec qqun) être du côté de qqun ? (tant que le Guesclin ait l’ame avec ly) aussi longtemps que Guesclin sera de son côté, 15627 Amendement, voir Amandement Amendrir : vb. trans. dir. : diminuer, 20410 vb. trans. dir. : rabaisser, 20074 p. p. : diminué, 7595 Ameneïs, voir Amenevy Amenevy, (ameneïs) : p. p. : préparé, 20896 (de trayre amaneïs) prêts à tirer, 19546 Amenuser : vb. intr. : s’afaiblir, 6186 Ami : s. m., (estre de moult grans –) avoir beacoup de relations ? (Et s’estoit marié ... a une noble dame qui fu de moult grans amis) il s’était marié avec une noble dame qui possédait beaucoup d’alliés, 5343 Amiral, (admiral) : s. m. : chef militaire chez les peuples musulmans, voir aussi Admirant, 14643 (– de mer) chef païen de la lotte, 14340 s. m. : chef de lotte, 17601 Amirant, voir Admirant Amitié : s. f., (par –) par amour, 9276 (estre de – de qqun) : être ami avec qqun ? (la nuit s’appareilla et cellui de s’amité) la nuit il se prépara, ainsi que celui qui était son ami, 9282 Amoderé : adj. : tempéré, 7480 Amonrir : vb. trans. dir. : amoindrir, 4250 Amonstrer : vb. trans. dir. : faire apparaître, 16053 vb. pron. : se présenter, 18432, 18573 p. p. : présenté, 7336, 18359, 21695
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Amort : s. m. ? : attachement, afection, forme pour amour ?, 6652 Amorty : p. p. : anéanti, sans vie, 21651 Amour : s. m. : amitié fondée sur une estime respective, 70, 9791, 10791, 10792, 12405 (faire –) donner des marques d’amitié, 5124 Amoureusement : adv. : en grande amitié, 13655 Ampierere : s. m. : empereur (voir note), 17367 Amulaine : s. f. : mule (voir note), 20055 Amurdrir : vb. trans. dir. : afaiblir, 20529 Ancesserie : s. f. : ancienneté, 2729, 19989 s. f. ancêtre, 8729, 10495 s. f. lignée, 9365 Anciseour : adj. : ancien, 19329 Ançois : adv. : d’abord, 9749 (– que) plutôt que de, 13615 (– que) plutôt que (Je iray Dieu renoier ainçois oultre la mer que je laisse ensement mon roiaume gaster) : je renierai Dieu plutôt que de laisser dévaster mon royaume outre mer, 9720 Angevin : s. m. : petite pièce de monnaie frappée par les comtes d’Anjou, 20982 Angoisse : s. f. : douleur physique violente, 10125 Annee : s. f., (entre en bonne –) avoir de la chance, 4601 (entrer en male –) passer un mauvais quart d’heure, 6088 Ante : s. f. : tante, 263, 265, 313, 1453, 1736, 1737, 7807 anter, voir Hanter Anti : adj. : ancien, antique, 1556, 2731, 2737, 3868, 4082, 4931, 5394, 8574, 10663, 10834, 14304, 14386, 14729, 15479, 15944, 19995, 21493, 21521, 21525, 21526 ajd. : célèbre (adont fu de Toulecte la chose si antie de petis et de grans ... que) à Tolède, la rumeur se répandit partout ... que (la chose fut connue de tous), 13182 Antour : prép : autour (et fort lieu grant antour a) et il possède autour un très vaste domaine, 3382 Anuitement, (anuytement) : s. m. : tombée de la nuit, 19109, 20721, 21115 Anuytement, voir Anuitement
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Anuyter : s.m. : tombée de la nuit (que le bon duc d’Anjou trouva un anuyter) qu’il rejoignit le bon duc d’Anjou à la tombée de la nuit, 17027 Anuytie : (toute nuyt –) toute le durée de la nuit, 1398, 11969 Anuytie : s. f. : nuit, 19976 Anuytie : p. p., s. f. : nuit, 19965 Anuytier : s. f. : nuit, 6889, 20937, 21557 Aonny : p. p. : aplani, 19299 Aorné : p. p. : paré, orné, 3083 Aouré : adj. : saint, 14815 Aourer : vb. trans. dir. : adorer, 6542, 15219, 16059, 19471, 20566, 21267 Apaier, (appaier, apoier, appouer, appouher) : vb. trans. ind. : s’appuyer, 3538 (– encontre qqun) se placer contre qqun (dans le contexte d’un combat) (encontre les deux cens est venu apoier) il est venu faire face aux deux cents combattants, 14931 vb. intr. : appuyer, 13590 vb. pron. (s’– a un conseil) suivre un conseil ?, 9763, 21217 p. p. : appuyé (à une fenêtre), 3543 Apaiser, voir Apaisier Apaisier, (apaiser, apayser) : vb. pron. : retrouver son calme, 3779 (– contre qqun) se réconcillier avec qqun ? (se Charles vouloit contre moy apaisier) si Charles voulait se réconcillier avec moi (calmer sa colère envers moi), 5450 (s’– a qqun) se réconcillier avec qqun, 16320 (au conte d’Ermignac vous feray apaiser) je vous réconcillierai avec le conte d’Armagnac, 17005 Apayser, voir Apaisier Apendre, voir Appendre Apercevoir : vb. intr. : percevoir les conséquences de qqch (je en feray tant que en la in vous en apercevréz) j’accomplierai tant de prouesces dont inalement vous entendrez parler, 7688 Aplanir : vb. trans. dir. : caresser, 17366 Aplenier : vb. trans. dir. : caresser, 16402 vb. trans. ind. : latter (en lui apleniant et en lui menacent) tantôt en le lattant et tantôt en le menaçant, 18192 Aplonc : adv. : perpendiculairement, 18980
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Apoier, voir Apaier Apostole : s. m. : pape, 7529, 7667 Appaier, voir Apaier Apparail : s. m. : préparatifs, 15291 Apparaitre : vb. pron. : se montrer (le jour s’apparu cler) la lumière du jour apparut, 19029 Apparant : adj : qu’on voit clairement (monde –) monde tangible, par opposition au monde céleste, 63 (s’ilz n’y voient leur plus bel apparant) s’ils ne voient pas clairement leur supériorité, 20265 (savoir l’–) réaliser ce qui est en train de se passer, 3024 Apparant, (apparent) : adv. : clairement, 7490 (on le voit –) on le voit bien, on le voit clairement, 5071 Appareillement : s. m. : préparatifs, 13034 Apparent, voir Apparant Appariller, (appareiller) : vb. trans. dir. : préparer, 2984, 3014 vb. trans. dir. : soigner, 8090 (– que) se préparer à, 5141 vb. intr. : préparer, 3015 vb. intr. : préparer des troupes, 3513, 3875, 5789, 5821, 7974 vb. intr. : préparer, 3938, 8158, 8977, 10841, 13854, 13984, 14075, 14925 vb. pron. : se préparer, 3924, 5734, 7416, 7967, 8047, 9282, 9519, 9583, 9982, 10001, 11344, 11571, 12633, 12853, 14368, 15420, 21205 Apparoir : vb. intr. : apparaître, 3777 Appartement : adv. : manifestement, aux yeux de tous, 487 appartenant : adj. : juste, 13058 (bien est –) ceci est bien à propos, 13349 (il n’est pas –) cela n’est convenable, 10636, 12055 appartenant : s. m. : personne proche, allié, 2703, 3454, 7398, 10718, 10728, 10734, 13784 (le sien appartenant) son proche parent, 9209 Appartenir : vb. imp. : convenir, 7189, 10036, 11539 Appartir : vb. trans. : partager, 19579 Appel : s. m, (estre de faulx –) : ne pas tenir parole ?, 15756 Appeler : vb. trans. dir. : intenter un procès à qqun, 3372 (– o soy) s’adresser à qqun à haute voix, 16369
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vb. intr. : engager une procédure judiciaire, 3378 Appendant : s. m. plur. : dépendances (je tiendray Espaigne et touz les appendans) j’occuperai l’Espagne ainsi que tous les royaumes attenants, 10647 Appendre, (apendre) : vb. trans. ind. : appartenir, dépendre, 193, 1424, 3844, 9395, 12228, 12962, 13014, 13028, 13434, 13836, 15522, 15863, 15876, 17684, 18650, 18658, 18774, 19086, 20227, 21686 vb. trans. : témoigner ? (n’y avoit que.xxm ., comme l’istoyre appent) il n’y avait que vingt mille combattants, comme l’histoire l’atteste, 15842 vb. pron. : dépendre (pour grande richesse liesce ne s’appent) l’argent fait pas le bonheur (la joie ne dépend pas de la richesse), 12214 vb. pron. : s’appuyer ? (or nous dit la matiere ou nostre livre s’appent que) les sources sur lesquelles s’appuit notre ouvrage raconte que, 19100 apper : vb. trans. dir. : voler, 6241 Appert : adj., (en –) à découvert, 18517 Appertement : adv. : promptement, 167, 1726, 3841, 5287, 7019, 14427, 18663, 19371 Appointer, voir Appointier Appointier, (appointer) : vb. trans. dir. : régler, arranger, 2561, 4504, 5465 vb. trans. dir. : décider, 17415 vb. trans. dir. : préparer, 21227 vb. trans. dir. : réunir, 5463 vb. trans. dir. : terminer ? (laisséz moy ma bataille appointer) laissez-moi terminer le combat, 2553 vb. pron. : se préparer, 3520, 4565, 5844 vb. pron. : (s’– +inf) se préparer à, 7013 (estre – de) être prêt à (si ne seroit il pas de vous rendre appointié) il ne sera pas disposé à se soumettre à vous, 3068 Apporter : vb. trans dir. : transporter, 3624 vb. trans. dir. : produire, réaliser, 19266 vb. pron. : se déplacer (au léz devers Cordonne l’issue s’apporta) la troupe se déplaça du côté de Cordoue, 14357 Appouer, voir Apaier
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appouher, voir Apaier appouher : vb. trans. ind. : appuyer, 16760 Apprement, (asprement) : adv. : vivement (et parlant apprement) qui s’exprime avec énergie, 1680 adv. rapidement, 3681 Appresser : vb. trans. dir. : harceler qqun sans lâcher prise, 6181, 11567, 21386, 21388, 21428 vb. trans. dir. : accabler, 7414 Appresté : adj. : prêt, 3125, 3737, 14017, 14848 Apprester : vb. trans. dir. : préparer, 1379, 1851, 5878, 6065, 7866, 11201, 17669, 17670, 21276 (estre – de) être prêt à, 6432 (estre – de) être à deux doigts de ? (que le plus grant y est de famine apresté) que même le plus riche est ici proche de la famine, 11296 vb. pron. : se préparer, 2392, 5059, 8471, 9490, 15770, 18153 p. p. : chargé (d’un message) (Qui fera le message ? Qui en est appresté) Qui livrera le message ? Qui en est chargé ?, 9192 Approchement : s. m. : approche, 716 Approcher, (approchier) : vb. trans. dir. : vaincre ? (et ainçoys qu’il soit nuyt je vous appprocheray) avant que la nuit tombe je vous vaincrai ?, 2290 vb. trans. dir. : obtenir, 12508 vb. trans. dir. : traduire en justice, 3379 vb. trans. ind. : menacer (la fain lui approcha) la faim les menaçait, 11342 vb. trans. : toucher (sans approchier Bertrant estoit entour alé) il s’était positionné à côté de Bertrant sans le toucher, 2524 Approchier (vb.), voir Approcher Approuver : vb. trans. dir. : mettre à l’épreuve vb. trans. : conirmer (que ce soit verité nous le vous approuvons) nous vous certiions que ceci est la vérité, 7799 Approuver : vb. trans. ind. : mettre à l’épreuve (véz cy mon gage prest que pour lui approuver en un champ de bataille) voici mon gant prêt pour le mettre à l’épreuve sur un champ de
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bataille, 2282 vb. trans. ind. : prouver sa valeur (s’ilz ne voulent croyre nostre parlement, apouver nous fauldra a l’acier qui resplent) s’ils ne cèdent pas à nos menaces, il faudra prouver notre valeur à l’épée, 16635 apresser : vb. trans dir. : accabler (mais en l’autre an aprés itel mal l’apressa) mais l’année d’après une telle maladie l’accabla, 571 vb. trans. dir. : harceler de coups (et les autres Françoys l’apressoient forment) les autres Français le harcelaient vivement de coups, 4747 Apris : adj., (estre bien –) être bien éduqué, 2083, 2088, 3506, 5723, 6703, 9593, 9929, 10471, 13581 Aprochier : s. m., (a l’–) au moment de la rencontre, 7722, 11206, 11210, 16027 Aproprier : vb. trans. dir. : associer (si comme l’estournel le nomme et aproprie) on le nomme étourneau et le considère comme tel, 6736 Aquerre, (acquerre) : vb. trans. dir. : acquérir, obtenir, 341, 342, 519, 13448, 15072, 15324 Arabïoys : adj. : arabe, 15224 Araisonner : vb. trans. dir. : interpeller, 4112, 4295, 12767, 17949, 20837 Aramie, (aremie, erramie) : s. f. : combat, 11641, 19212, 21500 (par –) : avec impétuosité, 14985 Aramy : p. p. : engagé, 15619 Araser : vb. trans. dir. : raser, 20587, 20600 Arbalestree : s. f. : distance d’un trait d’arbalète, portée d’arbalète, 13893 Archevé : s. m. : homme d’église ?, 13146 Archie : s. f. : unité de mesure , valeur de la portée d’un arc, 15955, 18000 Archier : adj. : qui utilise un arc (le Besgues de Villaines sur celle gent archiere i fere tellement) le Besgues de Villaines frappa tellement sur cette troupe d’archers, 11999 Ardement, voir Hardement Ardoir : vb. trans. dir. : brûler, 143, 1865, 7299, 7566, 9256, 9416, 9431, 10249, 17326, 21533 p. p. : brûlé, 3155, 4002, 7256, 10360, 10367, 19445 Aremie, voir Aramie Argent : s. f. : monnaie
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(l’argent fort) la monnaie qui est de grande valeur, 759 Argorisme : s. m. : arithmétique, art du calcul, 9024 Argu : s. m. : reproche, 394, 4494, 19515 (par tel –) en telle manière ?, 19737 Arguer : vb. trans. ind. : argumenter à propos de, 5550 vb. int. : se disputer, 15439 p. p. : harcelé, 15374 Arierbanc : s. m., (crier –) convoquer l’arrière-banc, 15699 Arme : s. f. : âme (et jura Damedieu et l’arme de sa taie) il jura sur Dieu et sur l’âme de sa grand-mère, 19434 armer : vb. trans ind. : porter les armoiries de qqun, 5897, 6052 vb. pron. : se pourvoir d’armes, 10003 vb. pron. : prendre les armes pour entrer en guerre, 2809, 2854 Arnoys, voir Harnois Aroissement : s. m. : aspersion (et pleut malement en aroissement) il pleut violemment et à torrent, 17839 Arouter : vb. pron. : se diriger vers, 7418 vb. pron. : se mettre en route, 20275 Arpent, voir Harpent Arrageson : s. f., (être en –) devenir fou, perdre la raison, 6393 Arragon : s. m. : cheval originaire de la région d’Aragon, 17913 Arragon : s. m. : cheval originaire de la région d’Arragon, 11169 Arraisonner : vb. trans. dir. : interpeller, 11608, 11610 Arrest : s. m., (tendre a l’–) vocabulaire de la chasse ? tendre un ilet ? (Tiebaut, se dist Bretant, nous tendons a l’arrest) Tiebaut, dit Bertrant, nous tendons un piège, 4440 Arrestee : s. f., (sans plus d’–) sans plus attendre, sur le champ, 431 (de l’–) tout de suite, aussitôt, 5304 (sans point de l’–) sur le champ, 5329 (sans pointe d’–) sans aucun délai, 892 Arresteement : adv. : résolument, 2069 Arrester : s. m. : délai, 1368, 1582, 1593, 2267, 2776 Arrester : vb. intr. : séjourner, 9417 (estre – a) : être opposé à ? (aux Espaignolz ce jour fu Chando arresté) Chando fu opposé ce jour-là aux Espagnols, 11723 (estre arresté a) : s’attarder à, 21113
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Arrestison, (arristoison, arritezon) : s. f. : délai, 4012, 6848, 8865, 11160, 11402, 19718 s. f. : pause, arrêt, 2192 Arriere : (estre – de) être retardé pour ? (et si en fust arriere de son departement) et il aurait été retardé, 12952 Arrieré : p. p. : empêché, 6522 Arristoison, voir Arrestison Arritezon, voir Arrestison Arriver : vb. pron. : parvenir, arriver, 1999 Arrogant : adj., (estre – contre qqun) être en colère contre qqun ? (aléz vous bien gardant que les Crestiens si sont contre vous arrogant) faîtes attention à vous car les chrétiens sont en colère contre vous ?, 9483 Arroi : s. m. : manière, façon, 18613, 19782, 20556 (en –) en arme ? (si bien en arroy) richement armés ?, 14159 (en –) en ordre de bataille (car si le prince vient en son noble arrois mis) car si le prince arrive bien disposé à combattre (accompagné de ses troupes), 10174 (mectéz vous en arroy) préparez-vous à combattre, 15634 Arrouster, (arrouter) : vb. trans. dir. : réunir, rassembler, 11141, 11512, 11579, 18590, 18691, 19613 Arrouter, voir Arrouster Arroy, voir Arroi Arroyer : vb. pron. : se préparer (du fain destasser chascun moult bel s’arroye pour restraindre le feu) chacun se prépare à disperser le foin ain de contenir l’incendie, 19439 Arry : p. p., (venir a –) accueillir favorablement, dérivé du verbe arire ?, 20658 Ars, voir Ardoirp. p.)3155 Ars : s. m. plur. : arcs, 10990, 14814, 19022, 19067 (plus tost furent rué a terre sur le champ c’on ne seroit alé trois trefz d’arcs en courant) ils furent jetés à terre plus vite qu’on eut tiré trois lèches d’arc, 21399 Arse, voir Ardoir (p. p.) Arser : vb. trans. dir. : brûler, 1408 Art, voir Ardoirp. p.)4002 Artillerie : s. f. : ensemble des armes de jet et de trait, 19209 Asemblee, voir Assemblee Aspre : adj. : violent, 3103
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Asprement, voir Apprement Assaier : vb. pron. : faire une tentative, 21195 Assaier : vb. trans. dir. : goûter, 7203 vb. pron. : faire une tentative, 9899 Assailler : vb. intr. : attaquer, 5241, 19256 Assaillir : s. m. : bataille, attaque (de l’assaillir viser comment et quant) réléchir aux modalités de la bataille, 4118 (a l’–) en combattant, 8333 Assaillir : vb. intr. : mener un assaut, 1840 Assal : s. m. : assaut, 374 Assault : s. m. : combat, 40 (avoir –) être attaqué (je suys asseuré que vous auréz l’assault) je suis persuadé que vous allez être attaqué, 1319 Assaulter : vb. trans. dir. : assaillir (hardement le assault) il se sent rempli d’audace, 10518 Assavoir : vb. trans. dir. : connaître, 4384, 7031, 20003, 21221 (c’est –) c’est-à-dire, 5652 (faire –) faire savoir, 7024, 11538, 17825 Assay : s. m. : combat, 2303 Assemblee, (asemblee) : s. f. : rencontre entre deux armées, 4793, 8147, 8329, 11624 (ce vient a l’assemblee) si on en vient à se battre, 7860 s. f. : rassemblement de troupes, 15403, 15588 Assemblement : s. m. : combat, 481, 3689, 18768, 21296 s. m. : rassemblement, 15533, 15767 s. m. : troupe, 15774, 15856 Assembler : s. m. : combat, 15934, 16066 Assembler : vb. intr. : combattre, 6019, 8966, 11811, 16084, 17972 Assembler : vb. trans. ind. : combattre vb. trans. ind. : combattre vb. intr. : constituer un capital, 13537 vb. intr. : combattre, 218, 4343, 4635, 5990, 6100, 14559, 15816, 15824, 15933, 20263, 20264, 21397 vb. pron. : combattre, 4566, 5562, 5782, 6152, 14942, 21334 (mais bonté sur bonté adonc s’assemblera) les meilleurs chevaliers des deux camps vont alors s’afronter, 5598
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Assener : vb. trans. dir. : frapper, 1782, 1783, 1813, 5948, 5972, 7947, 10137, 11692, 14947, 16761, 18847, 19351 (– a un jour) ixer une date, 20389 (– qqun en haut lieu) établir qqun par le marige dans une famille de haute noblesse, 6370 (estre –a) être frappé par (Dieu, dist le chevalier, a qui suis je assené ?) Dieu, dit le chevalier, par qui suis-je frappé ?, 459 vb. intr. : réussir, 4402 p. p. : frappé (quant la pierre estoit au chastel assenee) lorsqu’une pierre frappait le château, 5050 Assentement : s. m. : consentement, 21679 Assentir : vb. intr. : consentir, 15135 vb. pron. : consentir, approuver, 2876, 8126, 10931, 14446, 15133, 15644, 15838, 16298, 16449, 17319, 18643, 20124, 20131, 20159, 20815 Asseoir : vb. trans. dir. : assiéger, 1237, 3044, 5334, 5604, 6705, 20674 vb. trans. dir. : disposer en ordre de bataille, 10689 vb. intr. : installer, établir, 2096, 4961, 8631 p. p. : installé, établi, 3674 p. p. : situé, 8258 p. p. : soumis ? (Or me juréz ... que vous ne partiréz si auréz vostre congié pris au prince suisant ou vous estez assis) jurez-moi ... que vous ne quitterez pas ce lieu sans avoir révoqué l’hommage que vous avez juré au prince auquel vous êtes soumis, 12099 Asserer : vb., (– environ) assiéger ? (a cité de Tournay environ asserra) il assiégea la ville de Tournay, 542 Assery : adv. : à la tombée de la nuit ?, 17162 Asseur : adj. : assuré, 3058, 8393 Asseuré : p. p. : armé ?, 5868 (estre – de qqun) être protégé par qqun, 11197 Assez : adv. : beaucoup, 34 Assigner : vb. trans. : attribuer, 10781 p. p. : marié (et qui n’ait cuer dolant dont ainsi suis assignee) et qui ne soufre de me voir ainsi mariée, 6667 Assoter : vb. trans. dir. : duper, berner, 1313
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p. p. : devenu fou, 11712 Astronomie : s. f. : lecture de l’avenir dans les astres ?, 3413 Atacher : vb. pron. : s’enfoncer, 1788 Atant : adv. : maintenant ?, 16574 Atargier : s. m., (sans point de l’ –) sans délai, 12880 (sans –) sans délai, 17016 Atemprement : adv. : bientôt, 3856, 8429 Atenant : s. m. : parent, 8188 Atendre : vb. trans. dir. : combattre en position d’attendant (se plus m’attendéz) si vous continuez le tournoi en position d’attendant, 1801 vb. pron. : aspirer, tendre (si fu Robert Secot qui a l’argent s’atent) Robert Secot était présent qui n’a d’autres préocupations que l’argent, 7468 Ati : p. p. : disputé (AND) (tant que Bertrant eüst parfaitte par atie) jusqu’au moment où Bertrant disputerait une joute parfaite, 505 Atirer : vb. trans. dir. : préparer, équiper, 7133 Atorner, (atourner) : vb. trans. dir. : déguiser, 1089 vb. trans. dir. : mettre à mal, maltraiter, 3571, 8037 vb. trans. dir. : préparer, 16247, 21053 vb. pron. : (se faire – de) : se faire équiper de, 2380 p. p. : maltraité, 4636, 14003 p. p. : équipé des ses armes, 6816 Atoucher, (atouchier) : vb. trans. dir. : faire du mal (seigneur, ne m’aler atouchant) seigneurs, ne me faîtes pas de mal, 1282 p. p. : frappé, 460, 6808, 8085 Atouchier, voir Atoucher Atour : s. m. : équipement, 17650 (par tel –) de telle façon, 17656 Atourner, voir Atorner Atrappé : p. p. : pris au piège, 1992 Atrayné : p. p. : amené (a si grande puissance venue et atraynie) elle est venue en si grand nombre, 10972 Atrempance : s. f. : tempérance, 4609 Attenir : vb. trans. ind. : être apparenté (a qui prés attenoit) dont il était un parent proche, 4433
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Aubergon, voir Aubregeon Aubour : s. m. : arbuste du genre cytise, 20802 Aubregeon, (aubergon, haubergon) : s. m. : haubert sans manche, 1812, 3721, 13695, 15557, 15947, 19479, 19558, 20254 Auctoriser, (auttoriser) : vb. trans. dir. : considérer ? (que l’on doit auttoriser pour le plus prince qui monte sur destrier) que l’on doit considérer comme l’homme le plus puissant jamais monté sur un cheval, 9919 vb. trans. dir. : respecter (que chascun les aloit forment auctorisant) que tout le monde les respectait, 16000 vb. trans. dir. : vanter les mérites de qqun (et par devers le roy l’a moult auctorisé) il a vanté ses mérites au roi, 17173 p. p. : acclamé (par quoy auctorisé je soie par leurs criz) pour que je soie acclamé par leurs cris (en référence aux hérauts du vers précédent), 340 Auctorité, (auttorité) : s. f. : texte de référence, 33, 2007, 2151, 4836, 6238, 6441, 6751, 8218, 10218, 19767, 19768 Aucun : adj. : quelque, 5213, 7552, 9670, 15122, 15124, 15164 Aucuneffoiz : adv. : parfois, 15078 Audience : s. f., (donner a qqun – de dire) donner la parole à qqun ? (dist un juif a qui on ot donné audience de dire ce qu’ilz eurent visé) dit un juif à qui ont avait donné la parole pour rapporter leur décision, 8595 (en –) de façon à être entendu (digna devant en audience ceulx qui estoient la) il dînait devant les personnes présentes de manière à être entendu de tous, 14191 Auferrant : adj., (destrier –) cheval de bataille, 17718 Aulne : s. m. : unité de mesure de longueur pour les tissus d’environ trois pieds et sept pouces, soit environ 1,18 mètre, 21035 Aultier, voir Autier Aumosnier : s. m. : personne charitable, généreuse, 357 Auner : vb. trans. dir. : réunir, rassembler, 15698 p. p. : rassemblé, réuni, 853, 4124, 4833, 14493, 20484, 20486 Auquant : s. m. plur. : un certain nombre, 49, 7305, 7390, 8060, 8180, 11047, 16698 Auques : adv., (x personnes et –) environ x personnes (Ainsi furent .xxm . et auques) ils étaient ainsi vingt mille et des poussières,
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11591 Auqueton, (oqueton) : s. m. : veste rembourée servant de protection sous le haubert, 1785, 1813, 4721, 5896, 10298, 10329, 15968, 18848 Aussi : adv. : ainsi, 65, 20439 (– que) autant que (jousta a Bertrant aussi que par envie) qui afronta Bertrant avec autant de zèle (que Bertrant), 508 Aussier : vb. trans. : augmenter (ne sans subvencïon avoir sur nous aussie) sans augmenter nos impôts, 19969 Autel : adj. : pareil, 13729 (– que) tel que, 13111 Autier, (aultier) : s. m. : autel, 12063, 12391, 12785 Autre : adj., (d’–) d’une autre manière, 625 Autreffois : s. f. : prochaine fois, 2687 Autrefoiz : adv. : une nouvelle fois, 13303 Autrement : adv. : d’avantage (Encores est estornel autrement naturant) De plus, (Bertrant) est d’avantage proche de la nature de l’étourneau, 3288 (ainsi et –) d’une manière ou d’une autre, 4752 adv. : d’une manière contraire à la précédente (et quant il ot ce dit, il a dit autrement) aussitôt qu’il eut ini de prononcer ces paroles, il se contredit immédiatement, 12211 Autrier : adv. : (l’–) : l’autre jour, 14037, 16915 Auttoriser, voir Auctoriser Auttorité, voir Auctorité Aval : adv. : plus bas (dans le texte), 19243 Avaler : vb. trans. dir. : baisser, 714, 1214, 4237, 16063 vb. trans. dir. : descendre, 3602, 15079, 15364 vb. trans. dir. : dévaler, 19550 vb. trans. ind. : tomber, 18710 vb. intr. : descendre, 14863, 15052, 16362, 17062 p. p. : descendu, 19325 vb. intr. : efondrer, 4640 vb. pron. : descendre, 4435, 6817, 18983 vb. pron. : se jeter (sur qqun), 14361 Avaluer : vb. trans. dir. : estimer la valeur de qqun (en force et en vertu pour vous avaluer) pour juger votre puissance et votre
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valeur, 5545 vb. trans. dir. : dévaluer (sans lui ne son honneur de riens avaluer) sans porter atteinte à lui-même ou à son honneur, 20593 Avançant : adj. : entreprenant ?, 16666 Avancement : s. m. : réussite (faire –) faire progresser les choses dans une voie donnée (fortune et eur ont fait avancement) Fortune et Chance ont fait avancer les choses, 13008 Avancement : s. m. : succès, 10454, 13002 Avancer : vb. trans. dir. : amener (penséz de secours avoir et avancer) occupez-vous de faire venir du secours, 9014 vb. pron. : prendre des risques, 2172 vb. pron. : se hâter, 9889 Avant : adv., (en –) désormais, 6787 (par –) auparavant, 10239 Avanturer, (aventurer) : vb. trans. dir. : risquer, 11646 vb. trans. dir. : risquer sa vie, 12335 vb. pron. : s’exposer au danger, 70, 4890 Avenir : vb. trans. : advenir, 3412, 6000, 6407, 7192, 7841, 10463, 11024 vb. intr. : parvenir, 3989 vb. imp. : arriver de manière inattendue (Il ne puet avenir) cela ne peut se réaliser, 8322 Aventurant : adj. : téméraire, 4035 Aventure : s. f., (en droite –) par pur hasard, 4427 (avoir l’– pour soi) avoir de la chance ?, 4735 (par droite –) par pur hasard, 16528 Aventurer, voir Avanturer Aventureux : adj. : désireux ? (le plus avantureux de bataille iner) le plus désireux de terminer une bataille, 8811 Aventureux : s. m. : celui qui prend des risques ?, 498 Aver : s. m. : cupidité, 2276 Averir : vb. trans. dir. : s’accomplir (besoigne –) événement qui s’est réalisé, qui est advenu, 3425 (le sors de ma femme averist) la prédiction de ma femme se réalise, 6196 p. p. : reconnu pour vrai
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(c’est des cordeliers d’Avignon averie) c’est attesté par les cordeliers d’Avignon, 6727 Averse : adj. : adverse, 4191 Aversier : s. m. : démon, terme injurieux, 14921 Aversité : s. f. : malheur, calamité, 2009 Avespré, voir Avespree Avespree, (avespré) : s. f. : soirée, 18455, 19685, 19839 Avesprement : s. m. : tombée du jour, 1346 Avesprer : s. m. : approche de la nuit, 8007, 9410, 20090 Avesprer : vb. intr. : commencer à faire nuit, 4140, 5638 Avespry* : s. m. : soir (– et avespry) matin et soir, 14326, 17310, 20743 Avilé : adj. : avilissant (mais tant est foul le roy de maniere avilee) mais le roi fait preuve d’une folie si indigne de son rang, 6684 Aviller : vb. intr. : rabaisser (Fortune le fait ensement aviller) Fortune le fait redescendre de sa roue de cette manière, 10423 Avironneement : adv. : tout autour, 8310, 9397 adv. : aux alentours, 3682, 5294 Avisé : adj. : qui a mûrement réléchi (Et le Besgues respont que trés bien avisé) et le Besgues répondit comme un homme qui a mûrement réléchi, 13084 (estre –) être sur ses gardes ? (Noble roy, or soiéz advisé) Noble roi, restez sur vos gardes, 14677 adj. : sage ?, 14497, 19812 Aviser, (adviser) : vb. trans. dir. : regarder, observer, 106, 486, 849, 1548, 5258, 5986, 7171, 7181, 8460, 10594, 11685, 11703, 15736, 18216 (– bien) faire le bien, 10609 (– son estudie a qqch) consacrer son temps à l’étude de qqch, 6723 (avoir – de +inf.) décider que, 14476 vb. trans. dir. : préparer ? (les seigneurs par dela ont les corps adviséz) les seigneurs ont préparé les troupes de l’autre côté, 11536 vb. trans. dir. : reconnaître, 18597 (ain que l’on ne le peust cognoistre ne adviser) ain que personne ne puisse le reconnaître, 11115 vb. trans. dir. : viser, 10116, 10118
- Glossaire vb. vb. vb. vb. vb.
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trans. dir. : voir, 20868, 21469 trans. ind. : informer, 8023 intr. : voir, 1314, 9540 pron. : calculer son coup, viser, 5658, 11194 pron. : calculer, réléchir, 4364, 5670, 7269, 8045, 8616, 9565, 10256, 13530, 13852, 14962, 15050, 16330, 17576, 17842, 18574, 18843, 18964, 20092, 21461, 21720 vb. pron. : s’afairer ? (Par dela la riviere la Besgues s’avisa) le Besgues s’activait de l’autre côté de la rivière, 13226 vb. pron. : se concerter, 15041 vb. pron. : se remémorer (adont c’est avisé de sa moillier) il se souvint alors de sa femme, 6188 vb. pron. : se rendre compte, 3195, 6193, 15054 vb. pron. : être sur ses gardes ?, 5260 vb. pron. : décider, 13502, 13514, 16292 (ceulx de la cité s’alerent adviser qu’ilz ystroient hors) ceux de la ville décidèrent qu’ils sortiraient hors des murs, 1202 p. p. : vu, 6773, 7474, 11840, 15811, 19356 Avision : s. f. : manière, 2888, 6839, 8875 (par telle –) d’une telle façon, 4716 s. f. : idée, avis, 6404, 10592, 12734, 20338 Avoir : s. m. : butin, 2588 (de corps et d’–) corps et biens, 9932 s. m. : montant ? (En France retourna le riche roy Jehan parmy sa ranson, dont l’avoir fu grant) Le puissant roi Jean retourna en France grâce au paiement de sa rançon, dont le montant fut élévé, 4027 Avoir : vb., (avoir qqun a soy) avoir quelqu’un contre soi ? (que le roy de Navarre ot a luy longuement) car le roi de Navarre fut longtemps en conlit avec lui, 2040 Avoler : vb. intr. : arriver en volant, 4441 (que l’aigle ne soit en Espaigne avolé) que l’aigle ne soit déjà parvenu en Espagne, 6770 Avril : s. m., (le may et l’avril) mois dédiés aux combats, 20621 Avuer : vb. intr. : rendre hommage à son seigneur, 5476 Aydance : s. f. : camp, 1137 Aÿe, (aïe, haÿe) : s. f. : aide, 960, 977, 990, 2965, 3171, 3444, 4647, 8711,
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10512, 10666, 10839, 14207, 14380, 15919, 15941, 15951, 16906, 21509 (estre en –) venir au secours de qqun, 13168 Aÿr : s. m. : colère, 16512 Ayraut, voir Hayraut Aÿrer, voir Aïrer Ayve : s. f. : eau, 10, 3673, 3674, 3677, 3934, 3942, 4367, 5883, 6562, 8063, 11855, 11871, 18548, 18556 Ayver : vb. trans. dir. : abattre (avec vous irons pour les murs ayver) nous partirons avec vous pour détruire les murs, 20601 Azur : s. m. : terme d’héraldique, une des cinq couleurs des émaux, 20553 Bacheler, voir Bachelier Bachelerie : s. f. : ensemble des combattants, 11632 Bachelier, (bacheler) : s. m. : jeune homme, 2266, 7119, 7230, 7986, 16263, 20058 s. m. : chevalier, 19265 Bacin : s. m. : instrument de musique à percussions en métal, 5049 s. m. : partie de l’armure recouvrant la tête, voir aussi Bacinet, 5948, 6143, 17221 Baciné, voir Bacinet Bacinés, voir Bacinet Bacinet, (baciné, bacinés) : s. m. : calote de fer placée sous le casque, 694, 721, 1381, 2382, 2495, 2537, 3605, 5819, 5879, 6023, 6208, 6253, 14759, 15542, 15557, 15801, 15940, 17240, 17671, 17719, 17881, 17997, 18518, 18711, 18741, 19353, 19366, 19371, 19479, 19545, 19921, 20061, 20254, 20501, 21167, 21319, 21382, 21466 s. m. : soldat portant un bacinet, 21175 Bacon : s. m. : chair de porc salée, 1959, 2986, 4723 s. m. : porc, désigne l’animal lui-même (le boys fu trés bien oingt de gresse de bacon) le bois fut enduit de graisse de porc, 4001 Baé : adj. : ouvert, 10074, 14640, 14652 Baildrons, voir Bailler Baille : s. f. : barrière ? (Il est venu aus jeux et les bailles passa) il rejoint le lieu du tournoi et franchit les barrières (délimitant l’espace du combat), 440
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s. f. : fortiication extérieure, 1545, 1987, 2487, 2750, 3045, 3113, 3114, 3950, 3954, 5176, 5683, 7947, 8021, 8170, 13815, 13823, 14372, 14384, 16326, 17216, 18097, 19824 (les bailles ont trenchees et les vont abatant) ils fendent les fortiications à coup d’épée puis les renversent (les lignes de fortiications extérieures étant composées généralement de poteaux de bois), 9640 s. f. : poutre de bois servant à fermer les portes, 1440, 3765, 3768 Bailler : vb. trans. dir. : donner, remettre, 811, 1540, 1695, 2559, 3170, 3326, 3347, 5695, 5839, 5981, 7042, 7234, 7319, 7483, 7519, 7553, 9750, 10335, 10897, 11346, 11494, 12883, 14180, 14231, 17021, 17095, 17241, 17390, 17407, 17683, 17684, 18018, 18770, 19186, 19890, 19946, 20652, 20865, 21724 vb. trans. dir. : mettre à la disposition, 5464 vb. trans. dir. : prendre à son service, 2813 vb. trans. ind. (bailler de) traiter de ?, 17585 vb. trans. : présenter, 10105 Bailli : s. m. : représentant du roi ou d’un grand seigneur exerçant des fonctions judiciaires et administratives dans une circonscription donnée, 20013, 20034 Bailliage : s. m. : circonscription administrative, judiciaire et militaire placée sous la direction d’un bailli, 19848 Baillie : s. f. : autorité, pouvoir, 517, 3249, 3439, 5118, 5754, 7155, 8696, 8716, 9243, 10265, 10529, 10861, 11486, 13171, 14393, 14746, 17479 s. f. : ief, 14222 Balance : s. f., (estre en – de) être sur le point de (la cité vrayment est de perdre en balance) la ville est sur le point d’être prise, 1128 (mectre qqun en –) : mettre qqun en danger ? (bien voit qu’il mectroit ses hommes en balance) il comprend bien qu’il mettrait ses hommes en danger, 18397 Baler, voir Balier Balier, (baler) : vb. intr. : lotter (banieres et pennons contre le vent balier) banières et pennons lotter au vent, 5428 (es banieres qui baloient contre vent) sur les banières qui lottaient au vent, 20555 (tant riche baniere qui balioit au vent) tant de somptueuses banières qui lottaient au vent, 11449
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Banc, (bant) : s. m., (arriere –) : troupes de résesve, 4680, 14531 Bandon : s. m. : charge, 1049 (a –) avec discrétion, 2194 (a –) beaucoup, de nombreuses fois, 1814, 5946, 5959, 11159 (a –) en nombre, 1044, 3662, 3999, 7931, 7939, 10379, 11185, 12421, 12433, 12627, 16937, 17904, 17911, 19633, 19696, 20168, 20685, 20759, 20775, 21256 (a –) vivement, 14604 (a –) rapidement ?, 20330, 20335 (a –) rapidement ?, 10156 (a –) à profusion, 16715 (a force de –) avec beaucoup de discrétion, 1181 (faire a –) agir sans réserve, 10872 (mectre a –) abandonner, 20217 Baneret, (banieré) : s. m. : chevalier chargé de porter la banière lors d’un combat, 18256, 18260, 18264 Bani : adj., (ost –) armée levée par proclamation, 14724 Banieré, voir Baneret Banière : s. f., (en la – de qqun) sous le commandement de qqun, 1102 (a – desploiee) en ordre de bataille, 5432, 5744, 8503, 12018 Bans : s. m. plur. : sièges, bancs (aloient es foussés bans et huches gicter) ils jetèrent dans les fosses des sièges et des cofres, 7987 Bant, voir Banc Bany : s. m. : exilé, 19468 Baptisement : s. m. : baptême, 8120 Baptizé : p. p., (terre baptisie) : terre chrétienne ?, 17740 Barbequanne : s. f. : ouvrage extérieur de fortiication percé de meurtrières et servant à masquer une porte, 3156, 3175, 3178, 8505 Barbieur : s. m. : barbier, 16095 Barnage : s. m. : assemblée de la noblesse, 4873, 7089, 10202, 20266, 20307, 20883 s. m. : assemblée de chevaliers, 4889 Barné : s. m. : ensemble des barons, 10345, 10540, 11509, 13378, 14499, 15252, 15793, 16788, 17459, 19145, 21141, 21724 Baromnie, voir Baronnie Baron : s. m. : titre nobiliaire+ lieu, 3493, 3504 s. m. : mari, 6390, 6868, 16043
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Baronie, voir Baronnie Baronnie, (baromnie, baronie) : s. f. : ief, 2434 s. f. : assemblée de grands seigneurs, 509, 3239, 3250, 3860, 4192, 4912, 4918, 5384, 8502, 9259, 10061, 10280, 10492, 11472, 12397, 13180, 13394, 14741, 15481, 17102, 17748, 17759, 19997, 21504, 21524 s. f. : vaillance, courage, 2738, 5731, 6116, 8174, 11498, 13386, 14205 Bascon : s. m. : bâtard, 3522, 3527, 3540, 3639 Basset : adj., (tout –) tout bas, 20449 Bastardie : s. f., (en fait de –) de manière illégitime, 8553 Basticel* : s. m. : branchages dont on fait des fagots ou des balais, 20235 Bastie : s. f. : château fort destiné à défendre une ville, 15498 Bastir* : vb. trans. dir. : réaliser, 3714, 10194, 15925, 18019 vb. trans. dir. : ixer, 5146, 11912 p. p. : ixé (c’est chose bastie et ordonnee que) La chose fut établie que, 9444 Bataille : s. f. : lieu du combat, 4819 (– rengie) bataille où les deux armées ordonnent leurs troupes face à face, 5401, 6734, 10530, 11978 (percer une –) disperser une troupe ain qu’elle ne puisse plus se rassembler pour attaquer, 6161 s. f. : troupe armée, 5918, 5989, 5993, 6104, 6167, 6172, 7992, 8137, 11111, 11148, 11222, 11345, 11367, 11381, 11388, 11435, 11437, 11444, 11474, 11579, 11680, 11690, 11700, 11762, 11805, 11811, 11885, 14601, 15580, 15836, 15841, 15964, 16084, 16112, 16120, 21206 (Et irent .v. batailles en leur ordonnement) ils divisèrent l’armée en cinq bataillons, 15846 Bataillerie* : s. f. : art du combat (et Pierre de Villiers, plain de bataillerie) ainsi Pierre de Villiers qui maîtrise parfaitement l’art du combat, 21522 Batailli : adj. : fortiié (celle tour bataillie) cette tour fortiiée, 21527 Bataillis* : s. m. : combat, 18679 Batelé : adj. : qui combat ? (la veïsséz monter celles gens bateléz) si vous aviez vu cette troupe de combattants grimper, 3133 Batys : s. m. : grand bruit de métal, 21352
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Bauc : s. m. : poutre, 3992, 19260, 19297, 19915 Baut : adj. : joyeux, 1305, 1872, 4404, 9561, 13351, 13778, 14146, 19314 Baux, voir Bauc Bayser : vb. trans. dir. : témoigner du respect, 69 Beauté : (s’estoit droite –) c’était de toute beauté, 8214 Bee : s. f., (garder la –) rester statique la bouche grande ouverte, 1487 Bel : adj., (son plus –) son avantage (s’ilz n’y voient leur plus bel apparant) s’ils ne voient pas clairement leur supériorité, 20265 bel : adj. : nombreux (la ot si belles gent) il y eut ici un si grand nombre de personnes, 11581 bel : adv. : bien, 7942, 14616, 15757, 15763 (au – que) le mieux que, 17809 Belfroy : s. m. : tour de bois mobile utilisée lors des sièges, 1841 Belfroy : s. m. : tour de bois mobilie utilisée lors des sièges, 1844, 1852, 1863, 1865 Bellement : adv. : sans hâte, doucement, 2881 (a venir a mercy bellement) à se rendre sans se hâter, 20816 Bendé : adj. : recouvert de bandes, 3910 Beneisson : s. f. : benediction, 6850 (a Dieu –) par la grâce de Dieu, 94, 7896, 11425 Beneisson : s. f. : bénédiction (a Dieu –) par la grâce de Dieu, 2895 Benignement : adv. : avec courtoisie, 7470 Benin : adj. : doux, 6588 Ber : adj. : valeureux, 6154, 6362, 7228, 18842 (or chevauche le prince a tout son ber bobant) le prince se met en route accompagné de sa valeureuse armée, 12135 Bercier, voir Berter Bersé, voir Berter (p. p.) Bertechie, voir Breteschie (p. p.) Berter, (becier, berser) : vb. trans. dir. : percer à coup de lèches (et Françoys tout autour lancer, trayre et berter) et les Français autour de lui frapper, lapider et percer avec des lèches, 3561 (il lui it ses armeures bercier) il transperça son armure avec une lèche, 18747 p. p. : percé à coup de lèches, 21159 Berton : adj. : fou ?
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(estez vous si berton que) êtes-vous tellement fou que, 14253 Bertonnant, (bretonnant) : adj. : qui parle une langue celtique, voir aussi Galot, 412, 2110, 2714, 8221, 14213, 15718 Beruier : s. m. : guerrier de valeur, 943 Besant : s. m. : monnaie d’or ou d’argent, 9042 (n’en donner un –) ne porter aucun crédit aux paroles de qqun, 5777 Besoign : s. m., (au –) si nécessaire (le mendre au besoign y valu Rollant) le plus mauvais pouvait valoir un Rollant si nécessaire, 4199 Besoigne : s. f. : bataille, combat, 1082, 4666, 4871 Besoigner : vb. trans. dir. : (– qqun) : s’occuper de qqun ?, 14184 vb. intr. : passer à l’action, agir, 18717 Bestial : s. m. : bétail, 17345, 18506, 18544, 18558, 18564, 18570, 18638, 18691 Bien : adv., (tenir –) estimer ? (nous n’y tiendroions nul bien ne loiauté) nous ne ferons preuve d’aucune attitude favorable à son égard, 8619 Bienvegnant adj. : bienvenu, 20460 Bienvenue : s. f. : réception agréable, bon accueil, 13627 Bis : adj. : de couleur brune, 3491, 5711, 7606, 17850, 18066, 18917 Bisestre : s. m. : malheur, 16683 Blamer, voir Blasmer Blanchoier : vb. trans. dir. : être blanc (de toyle sont vestuz que je voys blanchoier) je vois qu’ils sont vêtus de tissu blanc, 21197 Blasengier : vb. trans. dir. : blâmer, 2567 Blasme : s. m. : déshonneur, 11378, 17755 Blasmer, (blamer) : vb., (faire a –) être critiquable, 2280 (– a qqun pour quoy) questionner qqun à propos de qqch, tout en lui reprochant ce fait ? (que a son frere le roy ... blamast a son secret... pour quoy aus Juifs ot s’amort ainsi monstree) qu’il demanda discrètement à son frère le roi d’expliquer pourquoi il témoignait de l’afection aux Juifs, 6651 p. p. : outragé, difamé, 6799 Blason : s. m. : bouclier, 1809, 10884 Bobant, (bonbant) : s. m. : orgueil, arrogance, 2358, 4042, 4558, 9050, 11070, 14529, 20465 (tant fu fort ses bobans que) tant fu grande son arrogance que, 4673
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s. m. : ensemble de chevalier suivant un seigneur ? (or chevauche le prince a tout son ber bobant) le prince se met en route accompagné de sa valeureuse armée, 12135 Bobu : s. m. : sot, imbécile, 395 Bocquet, voir Boucquet Bohourt : s. f. : joute, tournois, 10993 Boisson, (buisson) : s. m. : arbre en général, 3281 (qui ist de columbier et va sur le boisson) qui sort du pigeonnier et va se poser sur l’arbre, 12170 s. m. : bois, bosquet, 4711 Bombance : s. f. : arrogance, 4608 Bombarde : s. f. : instrument à vent, 4167 Bon : adj. : vrai (c’est bon) c’est vrai, 2870 (estre bon de la –) : être brave au combat, 17932 Bon : adv., (faire – a qqun) plaire ? (qu’il lui faisoit bon) que ceci lui plaisait, 301 Bon : s. m. : volonté, 2423, 5010, 8529, 11400, 20155, 20544 (accomplir son –) : agir à sa guise, 2628 (ce n’est pas pour vostre –) ceci ne joue pas en votre faveur ? (Par ma foy dist le prince, ce n’est pas pour vostre bon) Par ma foi, dit le prince, ceci ne vous est guère favorable, 14248 (faire le – de qqun) faire selon la volonté de qqun, 1805, 6844, 12621, 13933, 15351 (venir a –) convenir (tournure impersonnelle), 4324, 6493, 7580, 10162 Bonbant, voir Bobant Bonbarde : s.f. : machine de guerre servant à jeter de grosses pierres, 10990 Bondie, voir Bondye Bondir : vb. trans. dir. : faire retentir, 4166, 4691, 11139, 11619, 14566, 15926, 20754 p. p. : sonné, 8506 Bondye, (bondie) : s. f. : bruit retentissant, 4641 (a la –) avec un bruit retentissant, 17106 Bonnement : adv. : exactement, 10934 adv. : sincèrement, 14732 Bonté : s. f. : la leur des chevaliers (mais bonté sur bonté adonc s’assemblera) les meilleurs chevaliers des deux camps vont alors s’afronter, 5598
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s. f. : vaillance, qualités au combat (pour la bonté de lui) à cause de ses prouesces au combat, 10896 Bontissant : adj. : retentissant, 4575 Boquet, voir Boucquet Boquetel : s. m. : petit bois, 15758, 19599, 19617 Boquillon : s. m. : bûcheron, 894, 899, 924, 1089 Bosaour : s. m. : traitre, 20817 Boschet (bois), voir Boucquet Boschet : s. m. : boisson faite d’eau, de miel, de sucre et d’épices, 1522 Boteaux, voir Botel Botel : s. m. : petite botte, 19308 Boucle : s. f. : anneau servant à ixer la courroie de l’écu, 10072 Boucquet, (bocquet, boquet, boschet) : s. m. : bois, 2899, 3084, 11141, 19725 Bouguerant, voir Bouquerant Bouher : s. m. : berger, 348 Bouquerant, (bouguerant) : s. m. : mauvaise toile, 8940, 16605 s. m. : grosse toile employée comme doublure de l’armure intérieure, 15968 Bourc : s. m. : bâtard, 13910, 14293 Bourde : s. f. : tromperie, 1308, 13212 Bourdon : s. m. : bâton de pèlerin, 12726, 12941, 15427 Bours : s. m., (faulx –) partie de la ville qui est située hors de l’enceinte, 8740, 9115 Bout : s. m., (lever dessus le –) mettre droit, relever (et face les tonneaux dessus le bout lever) qu’il fasse redresser les tonneaux (pour pouvoir y puiser du vin), 19284 (sur – lever) redresser (et puis les vont sur bout tout en l’eure lever) et ils les redressèrent sur le champ, 21086 Bouteiller, (boutelier, boutiller) : s. m. : échanson, 951, 973, 11376 Boutelier, voir Bouteiller Bouter : vb. trans. dir. : chasser, 6364, 8497 (– oultre) enfoncer, 5973 (– un feu) allumer un feu, 1134, 1863, 1996, 7702, 17182, 18204, 19309, 19433, 19437, 21532 (Cy boutray le feu, ce soit a bonne estraine) j’allumerai un feu à cet endroit, que cela nous porte chance, 19431 vb. trans. dir. : cacher, 16610, 19426
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p. p. : caché, 19033 vb. trans. dir. : frapper, 21337, 21367 vb. trans. dir. : jeter, 18116, 19298, 19310 vb. trans. dir. : sortir, 7990 vb. trans. dir. : (– un corps) enterrer, 4866 vb. trans. ind. : frapper, 2492, 2531, 3193, 4617, 5895, 16072, 21343 vb. trans. : enfoncer, 6805, 21424 vb. intr. : frapper, 21355, 21366 vb. intr. : pousser, heurter, 3182, 4693 vb. intr. : entrer, 20002 p. p. : entré, 19334 vb. pron. : entrer, 896, 19341, 19448, 20406, 20871 vb. pron. : s’avancer, 11621 vb. pron. : s’engager dans la bataille, 4597 vb. pron. : se cacher, 1068, 1143, 14972, 18283 vb. pron. : se mêler, 167, 4643, 5946, 6097, 11126, 11614, 11744, 11938, 17922, 18027, 18222 Boutiller, voir Bouteiller Bouton : s. m. : bourgeon, 9148 Bovel : s. m. : pièce souterraine, 19594 Boydie : s. f. : tromperie, trahison, 19974 Boyel : s. m. : entrailles (voc. médical) (qui estrange boyel nul jour au sien alie) qui fait alliance avec des étrangers (litt. : qui uni ses entrailles avec celles d’un étranger), 16141 Brace, voir Brasse Braie : s. f. : caleçon collant que portaient les hommes, 19441 Brain : s. m., (prendre au –) prendre de force ? (mieulx seront prins au brain qu’aloé au matin) il seront plus facile à capturer qu’une alouette en plein matin, 20997 Braire : vb. intr. : crier, 982, 1216, 1218 vb. intr. : grincer (sens normand ?) (de deux rouhes, la pire c’est celle qui brayra) des deux roues, la pire est celle qui grince, 19883 Branc, (brant) : s. m. : lame de l’épée, 3722, 15730, 16098, 16158, 16382, 16530, 20853, 21330 Brandeler* : vb. trans. dir. : brandir (chascun la lance ou poign saisi et brandela) chacun saisit sa lance et la brandit, 18605
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Brandon : s. m. : torche, 5655, 5795, 5815, 10391, 10572, 11075, 20732 Brant, voir Branc Brasse, (brace) : s. f. : carrure, 4103, 9773, 15404, 16129, 17609, 18440, 19991, 20476 Brasser* : vb. trans. : entreprendre (Bertrant du Guesclin, tout ce brassé m’avéz) Bertrant du Guesclin, vous avez accompli tout ceci pour moi, 4895 (– le chaudel) jouer un mauvais tour (se cel aigle tenoie qui brassa ce chaudel) si je tenais l’aigle qui nous a joué ce mauvais tour, 19596 Bref, (brief, brieves) : s. m. : lettre, 5643, 5661, 8626, 10652, 14473 Bregier : s. m. : berger (Pas ne sommes rendu a bregier rassoté) nous ne nous sommes pas rendus à un bergier idiot, 21718 Bresment : adv. : brièvement, 3596, 3768, 3843, 5014, 12813, 14452, 15552, 15638, 15664, 15776, 15836, 16257 adv. : aussitôt, 15290 adv. : rapidement, 5277, 8956, 12134 Breteche : s. f. : fortiication, 19054 Bretechie, voir Breteschie (p. p.) Breteschie, (bertechie, bretechie) : p. p. : munie de fortiications, de bretèches, 8157, 14726, 19068 Bretonnant, voir Bertonnant Bricon : s. m. : lâche, 10137 Brief, voir Bref Briesment, voir Bresment Brieves, voir Bref Brocher, (brochier) : vb. intr. : piquer des éperons, 443, 747, 14600, 21468 vb. trans. dir. : piquer des éperons, 11165, 11521, 11959 Brochier, voir Brocher Brouetee : s. f. : contenu d’une brouette, 1498 Brouhee : s. f. : bouillon épicé de viandes ou de poisson, 11846 Brouyr, voir Bruir Bruiant : adj. : tulmutueux, 13267 Bruir, (brouyr) : vb. trans. dir. : brûler, 1408, 9416 Bryuant : adj. : agité, tumultueux (la mer bruyante) la mer déchaînée, 2681 Buffoy : s. m. : boufonnerie ?
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(je croy qu’il n’est nul homs ... qui ne fust esbaÿ de veoir leurs bufoys) je crois qu’aucun homme ne pouvait rester de marbre face à leurs boufonneries, 15231 s. m. : bruit ? (sans noise et sans bufoys) sans bruit, 19012 Buisson, voir boisson Buleté, (bullecté) : adj., (farine buletee) farine de grande qualité, 10968, 13201 (leur buletee) farine de grande qualité, 19477 Bullecté, voir Buleté Bureau : s. m. draps épais de laine grossière, 19044 Busche : s. f. : bois de chaufage, 874, 922 (de la busche ont mestier) ils ont besoin de ce bois de chaufage, 881 (la busche porterons) nous apporterons le bois de chaufage, 878 Camail : s. m. : armure protégeant la tête, 368, 694 Camus : adj. : qui a le nez court et plat, fait synonyme de laideur au Moyen Age, 56 Cap : s. f., (de pié en –) des pieds à la tête, 5820 Cappitaine : s. f. : chef militaire chargé de garder et de défendre une ville ou une place forte (semble fém. ds dialecte du Nord, DMF), 13750, 18306, 19485 Caresmau : s. m. : carême, 3309 Carifle : s. m. : calife ?, 15193 Caroler : vb. intr. : danser la carole, danser en rond, 2595 Carreau, voir Quarrel Celee : s. f., (a –) discrètement, 6651 (estre en –) être seul, 9463 Celer : vb. trans. ind. : mentir ? (ja ne vous quiers celer) je ne veux pas vous mentir, 8948 vb. pron. : se cacher, 15321 Celise : s. f. : mensonge ? (Bertrant du Guesclin me nomm’on sans celise) sans mentir, on m’appelle Bertrant du Guesclin, 17096 Celison : s. f., (faire –) cacher qqch., 14251 Celoison : (ne pas faire –) ne rien cacher, 2196, 4322, 10140, 11175, 11180 Celoison : s. f., (ne pas faire –) ne rien cacher, 8893 Cendal : s. m. : tissu de soie souvent teint en rouge, 367, 4256, 15200
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Cep : s. m. : carcan, 14090 Cerchier, voir Chercer Certain : adj. : plusieurs, 2802, 12460, 12462 adj. : loyal, idèle, 5702 Cesser : vb. intr. : partir ? (ains que Bertrant cessast ... furent vingt mille livres ... baillees) avant que Bertrant s’en aille, vingt mille livres furent remises, 14229 (sans –) sans délai, 14867 (.iiii. mille livres leur convient sans cesser) il leur faut quatre mille livres sans délai, 14113 Chaillot : s. m. : pavé, 953, 3099, 3307, 3870, 3923, 8055, 8210, 8225, 14388, 18700, 18708, 18714, 18715, 19253, 19259, 19413 Chalant, voir Chalent Chalemelle : s. f. : chalumeau, 4167 Chalemie : s. f. : lûte rustique, 10975, 11770 Chalenger, (chalenjer) : vb. trans. : revendiquer par les armes, 541, 574, 576, 2020, 2136, 2727, 5325, 5355, 5459, 5828, 6010, 6389, 7875, 7952, 9277, 17396 vb. trans. dir. : mettre en jeu ? (je iray, se je puis, ma vie chalengent) j’irai, si je le peux, au péril de ma vie, 4466 vb. intr. : défendre, 5203 Chalenjer, voir Chalenger Chalent, (chalant) : s. m. : navire, 13264, 14718 Chaloir : vb. impers. : importer (car il ne lui chaudra combien on vende blé) qu’il ne se préoccupera plus du prix du blé, 18823 (ne vous chault d’esmaier) il ne faut pas vous inquiéter, 2915 Chambellain, voir Chambellen Chambellen, (chambellain) : s. m. : majordome, 12815, 12944, 13339, 13347, 14120, 14676, 17357, 18770 Chambre : s. f. : lieu de séjour, 80 (– de retrait) pièce privée permettant de s’isoler, 13286 Chambres : s. f. plur : appartements privés, 10635 Chambriere : s. f. : femme de chambre, 241, 243 Champ : s. m. : bataille, 2337, 2391, 3467, 3468, 4618, 4637, 4639, 10286 (delaisser le –) faire cesser le combat, 2551 (desconire le –) mener la bataille à son terme, 2393
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(faire le –) : livrer un combat singulier, 2330 (tenir les –) mener un campagne guerrière (faictes tenir les champs et le champ fermement) gardez le contrôle du lieu et des troupes ?, 5915 (tenir les –) mener une campagne guerrière, 4032 s. m. : fond du blason, 15812, 15879 s. m. : lieu de bataille, 4557, 4564, 5729, 5845, 7307, 7328, 10352, 11518, 11731, 21249 (tracer le –) : fouiller le lieu du combat, 12083 Champaigne : s. f. : terrain du combat, 6286, 11961, 11962, 18430 Champion : s. m. : rival, 1741 Chantel : s. m., (mettre l’escu en –) porter son bouclier au bras gauche pour pouvoir frapper l’adversaire de sa lance, 15722 Chappe : s. f. : manteau long, 7448 Chappel : s. m. : chapeau, 10475 Chappellain : s. m. : prêtre attaché au service d’une personne, 7442 Chapperon : s. m. : coifure très courante, portée par les hommes et les femmes, comme élément de confort ou de coquetterie : sorte de bonnet enveloppant la tête et prolongé par un pan d’étofe dont on se sert comme d’une écharpe, 5028, 5220, 9669, 13677 (– forréz) signe extèrieur de richesse, par mét. : ceux qui les portent, les classes sociales les plus aisées, 17560 Champpier : vb. intr. : combattre, 1686 Chapple : s. m. : combat, 6124 Chapplement : s. m. : combat, 4972, 18634, 18757 Chappler, voir Chapplier Chapplier, (chappler) : vb. intr. : combattre, 6153, 18293 Chapplisson : s. f. : combat, bataille, 12164 Chargié : s. m., (faire le – de) porter qqch (de busche a son col bien faisoit le chargié) il portait parfaitement des bûches sur son cou (à la manière d’un bûcheron), 1088 Chargier : vb., (– un message) conier un message à quelqu’un pour qu’il le transmette, 4503 Charnel : adj. : intime, 311, 6261 adj. : qui partage le même sang, 6045 Charpentis : s. m. : chargement ? (grant fu le charpentiz que on faisoit a touz lieux) on préparait partout un énorme chargement (voir note), 3087
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Charppenter : vb. intr. : construire ?, 15165 Charretee : s. f. : unité de mesure servant à évaluer le contenu d’une charrette, 1497, 5038 Charreton : s. m. : charretier, 1432, 1456, 1499, 1504, 1511 Charrier : s. m. : charrette, 944 Charrin : s. m. : convoi, voir aussi Charroy, 1430 Charroy : s. m. : ensemble des charriots d’une armée transportant les vivres, 1424, 1454, 3019, 10887, 11298 Chassement : s. m. : ief, domaine, 8539, 11766, 11768, 12222, 17696 Chassier : vb. trans. dir. : repousser, 4188 Chastelaine, voir Chastellaine Chastellain : s. m. : oicier dirigeant une place forte avec des fonctions civiles et militaires coniées par le seigneur du château, 2732, 2749, 2754, 2756, 2763, 2768, 2989, 3001, 3026, 3029, 3033, 3144, 3180, 3185, 3186, 3201, 3203, 3206, 3208, 3238, 3245, 3255, 3903, 3925, 3970, 4007, 4806, 4814, 7883, 9135, 12024, 14739, 15159 Chastellaine : s. f. : maîtresse d’un château, 15335, 15341, 15343, 15356, 15444, 15446 Chastellanie : s. f. : circonscription à la fois administrative et judiciaire placée sous l’autorité d’un chastelain, 14743 Chastier : vb. trans. dir. : punir, 7742, 17321, 17331, 18015 Chatel : s. m., (de corps et de –) de corps et de biens ?, 20523 Chaudel : s. m., (brasser le –) jouer un mauvais tour (se cel aigle tenoie qui brassa ce chaudel) se je tenais l’aigle qui nous a joué ce mauvais tour, 19596 Chaudere, voir Chaudiere Chaudiere, (chaudere) : s. f. : marmite, 8477, 19045 Chault : adj. : intense (de trayre et de gitter fu moult aspre et chault) les jets de projectiles furent violents et intenses, 3103 Chausse : s. f., (donner bonnes – à qqun) ?, 12828 Chaussie : s. f., (maistre –) rue principale ? (feray touz ardoir sur la maistre chaussie) je les ferai tous brûler en place publique, 14383 Chayty : adj. : naïf, 2373 Chazé : adj. : qui est à la tête d’un ief (se touz les nobles princes terriens et chazés) si tous les nobles seigneurs possédant un domaine, 19855
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Cheel : s. m. : chien (sens péjorotif), 15755 Chemin : s. m., (se mectre a –) se mettre en route, 3791, 8861 (prendre son –) se mettre en route, 9294 Cheminer : s. m. : chemin ?, 1136 Cher (adj.), voir Chieradj.)6320 Cher, (chier) : s. m. : charriot, forme pour char (voir note), 3085, 7931, 8479 (a la voie se sont mis les chiers et les sommiers) les chars et les bêtes de somme se mirent en route, 7698 Chercer, (cerchier, sercher, serchier) : vb. trans. dir. : fouiller, 4819, 6285, 19484 vb. trans. dir. : parcourir, 2667, 5200, 14704, 18505 Chevalerie : s. f. : ensemble de chevaliers, 2736, 3869, 4184, 4642, 7161, 7639, 8499, 8710, 9141, 10060, 10825, 13384, 14281, 14778, 15493 (estre de –) être chevalier ?, 10008 (leur de –) l’élite des chevaliers, 3414 s. f. : qualité du chevalier, 6114, 9803, 14385 Chevaucher : vb. trans. dir. : poursuivre qqun à cheval pour l’attaquer (– a qqun) se rendre à cheval chez qqun (il vous fault chevauchier au conte) il faut vous rendre auprès du comte, 3345 vb. intr. : se diriger (Charles de Bloyz d’autre lés chevaucha) Charles de Blois se dirigea vers d’autres lieux, 625 Chevaucheur : s. m. : éclaireur à cheval, 1114, 10654, 10696, 10706, 11037, 11092, 11125, 11131, 11195, 14497, 14845 Chevauchie : s. f. : troupe à cheval, 979, 12015 s. f. : expédition militaire (le lieutenant du roy faisoit la chevauchie) le lieutenant du roi menait l’assaut, 2741 Chevesse : s. f. : ouverture du vêtement qui permet d’y passer la tête, 6804 Chevetaine : s. m. : capitaine, chef, 20033 (Alain de la Hussoie fu du tref chevetaine) Alain de la Hussoie était le capitaine de la tente, 16453 Chevir* : vb. intr. : se tirer d’afaire (comment nous cheviron ?) comment allons-nous nous en sortir ?, 20354 vb. pron. : se sustenter (et lui donray duché dont il se chevira) et je lui donnerai des terres dont il tirera sa subsistance, 16317
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Chief : s. m., (a – de foyz) à plusieurs reprises, 10753 Chier (s. m.), voir Cher (s. m.) Chier, (cher) : adj., (avoir plus –) préférer qqch à une autre, 5168, 19707 (avoir qqch –) désirer qqch, 21200 (avoir qqun –) tenir à qqun, 6320 (avoir qqun –) tenir à qqun, 6035, 6992, 6997, 9002, 9894, 9914, 11799, 12493, 12873, 16988, 17381, 21202, 21209 (tenir qqun –) tenir à qqun, 11792, 14908 Chiere : s. f. : trône royal, 17365 Chiere : s. f., (faire – redoutable) se montrer redoutable (– levee) de manière efrontée, 18425 (– levee) la tête haute, 4447 (a – courroucie) en colère, 10488, 10522 (a – lye) avec plaisir, 7152, 19197 (a la – estourdie) qui a un caractère violent ? (si fu Gaultier Huet a la chiere estourdie) Gaultier huet était présent, au caractère cruel, 2745 (avoir la – dervee de) avoir un désir furieux de (qui s’i combatre la chiere la chiere a bien dervee) qui a une envie folle de combattre ici, 11845 (avoir la – iree) ressentir de la colère, 1484, 4829, 5053, 7848, 7854, 8318, 9333, 9764, 10080, 11256 (faire – doubtee) se montrer redoutable, 4273 (faire – enragie) montrer sa colère, 959 (faire bonne –) faire bon accueil, 6449, 9922 (mener – jolye) se réjouir, 5748 (monstrer bonne –) faire bon accueil, 17359 (montrer bonne –) montrer sa joie, 10891 Chinfonier* : vb. intr. : jouer de la cyphonie, voir Cyphonie, 9983 Choisir, voir Choysir Choys : s. m., (estre au – de qqun) convenir à qqun (et Bertrant le gentilz n’estoit pas a leur choys) et Bertrant n’était pas à leur goût, 4062 Choysir, (choisir) : vb. trans. dir. : observer, regarder, 421, 1115, 1695, 4162, 4243, 5719, 5727, 6128, 7044, 8633, 8776, 8779, 9402, 10384, 10432, 11092, 11283, 11991, 12161, 12230, 12233, 12396, 12895, 13403, 13582, 14829, 15489, 16389, 17159, 17993, 18593 vb. trans. dir. : voir, 10103
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p. p. : vu, 6693, 8764, 9064, 9461, 13585, 18894, 19561, 21238 Choyson : s. f. : résultat, 4004 s. f. : raison, motif, 6852 Cimphonieur : s. m. : musicien jouant de la cyphonie, voir Cyphonie, 9985, 9999 Cisel : s. m. : outil plat, tranchant par un bout, dont on se sert pour travailler les matières dures, 19583, 20239 Claré : s. m. : vin de liqueur, aromatique et pimenté, 10546 Clavel : s. m. : haubert ?, voir note, 20253 Clef : s. f. : point d’entrée dans un territoire donné, voir note, 16709 (estre la – de) être le représentant de, être le plus bel exemple de ? (de touz les chevaliers la clef et la maistrie) de tous les chevaliers le plus bel exemple et le meilleur, 10509 Cler : adj., (dire au –) dire distinctement, 7213 (au –) de façon évidente, 7247, 9724 Clergie : s. f. : instruction, 6728, 8510, 14212 (a un cardinal dist, moult sage de clergie) il dit à un cardinal qui était très érudit, 7431 (sainte –) sainte écriture ? (nous trouvons escript en la sainte clergie) nous trouvons écrit dans les saintes écritures, 8566 s. f. : clergé, 7653, 8722 Clergié : s. m. : ensemble des prêtres, 8668, 8670, 8673 Cliner : vb. trans. dir. : incliner, pencher, 11112 (– le menton) baisser la tête, 8886 vb. pron. : se courber, se pencher, 2481 Clochier : s. m., (ville a –) ville pourvue de tours ?, 17017 Clou : adj. : resséré ? (mais tant se tenent cloux) mais il se tiennent si serrés, 11217 Cognoissant : adj. : illustre, 14670 Cognoistre : vb. trans. dir. : reconnaître (ain que l’on ne le peust cognoistre ne adviser) ain que personne ne puisse le reconnaître, 11115 Coiement, (coyement) : adv. : en cachette, 2892, 6651, 10147 adv. : discrètement, 9284, 9350 adv. : en secret ?, 8765, 9280 (puis a dit coiement que l’on ne le peust escouter) puis il a murmuré de façon à ce que personne ne puisse l’entendre, 12371
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adv. : à voix basse, 8443 Coign : s. m. : droit de frapper la monnaie, 18409 Coignie, (cugnie, cuignie, cunie) : s. f. : grande hache utilisée par les bûcherons, 961, 968, 998, 1571, 3114, 4488, 8170 Cointement : adv. : de manière appropriée (un noble escuier armé moult cointement) un noble écuyer très bien armé, 4771 Cointoyer* : vb. pron. : s’équiper, 10113 Colee : s. f. : coup, 3793, 6072, 6076 Collé : p. p. : accroché au cou (voir note), 3747 Colon, voir Coulon Columbier : s. m. : bâtiment où l’on élève des pigeons, 3289, 3292, 6747, 12170 Combatant : adj. : enclin à se battre, 18973 Combien : adv., (– que) bien que ?, 17472, 20123 (combien que le bon roy de France ... me congia l’autrier hors de ma region) bien que le roi de France m’exila du pays il y a quelques temps, 16914 Combrer : vb. trans. dir. : saisir avec force, 15037 p. p. : brisé (et puis s’en revint six sur la porte combree) puis il en vint six autres par la porte qui était à terre, 3784 p. p. : reçu (de telz y ot qui ont la souppe ou vin combree) certains reçurent de la soupe en vin, 19490 Comission : s. f. : papier oiciel prouvant un droit (commission portant de prandre et d’arrestier le corps et le vaillent) avec l’autorisation oicielle de saisir tous les biens, 1912 Commaincement : s. m., ( a son –) à ses débuts, 1662, 4982 (de mon –) à mes débuts, 13438 Commaincer : vb. trans. ind. : raconter (la bataille d’Alroy vous vouldray commaincer) je vous raconterai la bataille d’Alroy, 5805 Commandement (a son –) à son gré, à sa volonté, 5281, 5290, 8311, 9386, 17092 Commander : vb. trans. dir. : recommander, 10227 Commandie : s. f. : autorité, commandement, 2445, 5122, 12379, 17476, 17486, 18002, 19193, 21514 (a vostre –) a votre gré, 2963, 9240, 15938, 16397
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- Glossaire -
Commandise : s. f. : demeure ? voir note, 14783 Commandison : s. f. : commandement, 18483 (a sa –) à sa demande, 92, 20336, 20788 (par la – de qqun) sur l’ordre de qqun ?, 20787 Commant, (comment) : s. m. : volonté, désir, 1213, 1306, 1471, 1891, 2111, 2133, 2259, 3015, 4203, 4730, 5081, 5757, 7913, 8586, 8935, 9223, 9481, 9658, 11628, 12059, 12073, 14140, 15179, 16379, 17875, 18326, 18342, 20274 (en (son) –) à votre disposition, 9971 (estre au – de qqun) être sous l’emprise de qqun ? (estoient les Juifz si fort a leur commant) les Juifs leur étaient tellement soumis, 10233 s. m. : ordre, commandement, 2243 s. m. : ordre, 1755 Comment (s. m.), voir Commant (s. m.) Comment : adv. : en telle manière, 1683, 19577 (– que) bien que, 14300 Commis : s. m. : responsable (qui y estoit commis) qui en était le responsable (de la Bretagne), 594 Commoras : vb., forme pour comouvoir ? voir note, 16584 Commun : s. m. : tout le monde, le plus grand nombre, 1438, 3738, 16768, 18386, 18389, 20003, 20162, 20987 s. m. : l’ensemble des laïcs ? (la debte est paiee du commun d’Avignon) la dette est payée par le peuple d’Avignon (par opposition aux hommes d’église), 7650 s. m. : peuple, 10682, 20350, 20353, 20423, 20451, 20454, 20458 Communal : adj., (estat –) l’état général (regardons Angloiz et l’estat communal) regardons les Anglais et les alentours, 4248 Commune : s. f. : ensemble des habitants, voir aussi Commun, 3796, 9082, 13881, 20497 s. f. : ensemble des soldats issu du commun, 15699 Communeement, (communement) : adv. : tous ensemble, 13846, 13848, 15769, 17064, 17201, 20229 (touz –) tous ensemble, 4768, 5927, 16636, 19119 Communement, voir Communeement Communs : s. m. plur. : les gens du peuple, ici opposé à gros, 2350 Compaigner : vb. trans. dir. : accompagner, 16855
- Glossaire -
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Compaignie : s. f. : troupe, bande, 3494 (avoir la –de qqun) avoir des relations sexuelles avec qqun, 8565 (d’une –) tous ensemble, 3219 (par –) tous ensemble, 4181, 9248, 9258, 13183 (par bonne/droite –) de manière amicale, 3237, 10768 (tenir qqun en bonne –) se montrer agréable avec qqun ?, 8562 Comparer : vb. trans. dir. : payer les conséquences de ses actes, 45, 6793, 8238, 11897, 19347 (– qqch chierement) payer qqch cher, 19040 (– les façons) être puni pour ses actes ? (cellui qui aura tort comparra les façons) celui qui aura tort en sera puni, 5494 Compas : s. m., (par –) de façon mesurée (voz glaives par compas a terre aléz mectant) vous déposerez calmement vos glaives à terre, 21329 Complie : s. f. : soirée, 3871, 10278, 12034, 18456, 21508 Comprendre : vb. trans. dir. : être inclus (ou tout honneur comprent) en qui l’honneur s’incarne, 2588 Compte : s. m., (tenir grant – de) parler longuement de (de Thiphaine ont tenu grant compte pluseurs gens) de nombreuses personnes ont parlé longuement de Tiphaine, 2589 Compté : s. f. : domaine, territoire, 15887 Compter : vb. trans. : révéler qqch à qqun ?, 3416 Con : conj. : lorsque, forme pour comme, 16362 Conclusion : s. f. : décision, 8646 Concueillir : vb. trans. dir. : rassembler, 16673 Condicion : s. f., (en sa –) en soi-même (avoir en soi telle – que) avoir en soi le désir que ? (assez y en avoit en celle region qui avoient en eulx telle condicion que) nombreux étaient ceux qui en cette région formulaient intérieurement le désir que, 19706 (en voz –) par votre manière d’agir ? (vous faictes tout aussi en voz condicïons comme) vous agissez de la même façon que, 20439 (j’estoie moult dolant en ma condicion) j’ai ressenti en mon âme une grande douleur, 12163 Conduit : s. m., (avoir a –) : avoir sous son commandement, 21405 Sauf conduit, voir Sauf
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- Glossaire -
Conduiteur : s. m. : chef, 17649 Confanon : s. m. : étendard porté lors de cérémonies religieuses, 8667, 8675, 20172 s. m. : étendard militaire, 15800 Confanonnier : s. m. : chef militaire, 17405 Confermer : vb. trans. dir. : rendre durable, 9113 (et le mist en sa main de la paix confermer) il lui donna pour mission d’établir la paix, 6344 vb. trans. dir. : ratiier, 6408, 8609 vb. trans. dir. : recevoir le sacrement de la conirmation, 7668 Confession : (s. f.,) : (savoir de la – de qqun) connaître le secret de qqun, 6398 (dire en –) s’adresser à qqun en toute conidentialité, 12295 Confondre : vb. trans. dir. : maudire, 2664 vb. trans. dir. : détruire, 11069 p. p. : détruit, anéanti, 3545 Confort : s. m. : aide, 16906 Confortant : s. m. : celui qui apporte une aide, 4033, 5518, 7503, 10655, 10724, 14506, 14711, 16193, 16868 (en –) en aide, 13976 Confortement : s. m. : aide, soutien, 14438 Conforter : vb. trans. dir. : soutenir, apporter une aide, 606, 610, 1386, 1862, 2018, 3572, 4473, 5377, 5676, 6163, 6256, 6861, 7100, 7387, 7801, 8705, 9547, 9850, 9949, 10727, 10762, 10799, 12252, 12902, 13961, 14259, 15461, 15912, 17894, 18693 vb. trans. dir. : apporter une aide matérielle, 12846 vb. trans. dir. : consolider, 7914 p. p. : aidé (nous leur avons la cité confortee) nous avons défendu la ville, 1506 Confrarie : s. f., (estre d’une –) être uni par un lien commun (ici le meurtre de la reine), 10266 Confusion : s. f. : possibilité de parler plusieurs langues (voir note), 6860 s. f. : ruine, perte, 8897, 10381 (a la – de qqun) au grand dommage de qqun, 21271 (avoir – de qqun) connaître des troubles à cause de qqun, 7067, 15353 (estre en grant –) subir une situation honteuse ?, 8898 (faire –) causer la perte ?, 12924 Conger : vb. trans. dir. : inir, 3112
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Congié : s. m. : autorisation, 583, 3369, 3847, 5180, 17187, 19529 (faire – a qqun) dire aurevoir à qqun ? (que congié lui it on) lorsqu’on lui dit aurevoir, 10146 (prendre – a qqun de qqch) demander l’autorisation à qqun de faire qqch (sans prendre nul congié a Pietre de partir de la ville) sans demander l’autorisation à Pietre de quitter la ville, 9283 Congier : vb. trans. dir. : duper, 3073 Conjoÿr : vb. trans. dir. : traiter avec respect, 526, 2928, 4949, 12896, 14842, 20193, 20574 Connaitre : vb. trans. dir. : reconnaître, 7118, 8163, 9906, 9911, 11734, 12162, 12232, 12976, 13710, 14083, 14803, 19201, 19733 Connestable, voir Connoistable Connestablie, voir Connoistablie Connoistable, (connestable, conoistable) : s. m. : commandant suprême des armées royales, 9, 26, 37, 2071, 7485, 16353, 16696, 16697, 17392, 17395, 17455, 17456, 17469, 17518, 17603, 17684, 17699, 17734, 18245, 19089, 19136, 19244, 19623, 19874, 20534, 21574, 21670, 21722, 21756, 21763 Connoistablie, (connestablie) : s. f. : troupe sous les ordres d’un connétable, 16908, 17482, 17505 Conoistable, voir Connoistable Conquerre : vb. trans. dir. : conquérir, 866, 8419, 10200, 11016, 11458, 11582 vb. intr. : assaillir, 3857, 7941, 8924 Conquest : s. m. : butin, 16228, 16234, 18236, 19050, 20237 Conquester, voir Conquester Conquester, (conquister) : vb. trans. dir. : obtenir, acquérir, 1203, 1369, 1383, 1699, 1926, 3386, 3700, 3710, 6356, 6706, 8007, 8496, 8812, 10209, 11278, 13650, 13739, 14131, 14464, 14748, 14750, 14901, 16756, 16882, 16924, 17015, 17103, 17343, 18639, 19031, 19039, 19058, 19077, 19474, 19925, 20884, 21478 vb. trans. dir. : vaincre, 12076 vb. intr. : gagner, 4861 p. p. : conquis, 8333, 8341 Conquister, voir Conquester Conraer : vb. trans. dir. : accueillir (pour François conraer) ain d’accueillir les Français, 21080 vb. trans. ind. : disposer
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- Glossaire -
(de bons vins vous feray servir et conraer) je vous ferai servir et mettrai à votre disposition des bon vins, 19280 vb. pron. : s’équiper, 18137 Conrayer : vb. pron. : se préparer, 17971 Conroi, voir Conroy Conroy, (conroi, conrroy) : s. m. : troupe, 1022, 1309, 3948, 4058, 5439, 10983, 11732, 15199, 18553, 19781 (mettre qqun en –) mettre qqun en ordre de bataille, 14871 (se mettre en –) se mettre en ordre de bataille, 1774, 11424, 15839 (tenir un –) tenir les rangs ?, 5832, 5909, 11410, 11979, 15208 Conrroy, voir Conroy Conscentir : vb. trans. dir. : (– qqun) obéir à qqun ? (et si ne conscentéz ne en faiz ne en diz la roÿne de Napples) et si vous n’obéissez ni en parole ni en acte à la reine de Naples, 13858 Conscience : s. f. : volonté ? (et si lui doint vouloir, conscience et advis de me pardonner) et qu’il lui donne l’envie et la force morale de me pardonner, 788 Conseil : s. m. : délibération, 1271 (appeler –) convoquer le conseil, 1250 (avoir a – que) prendre la décision de, 1898, 5313, 8913 (declairer son –) tenir son conseil ? (a autre gens ne veult son conseil declairer) il ne veut tenir son conseil avec d’autres personnes qu’eux, 7005 (estre au – comment) délibérer, débattre (la furent au conseil comment sera ouvré) ils délibérèrent sur la manière d’agir, 19932 (mectre a un –) réunir, rasssembler, 7596 (prendre –) délibérer, 1234, 5304, 12442 (se mettre au – pour) réunir un conseil pour (pour Mante conquester ... se mistrent au conseil) ils se réunirent un conseil ain de déinir comment conquérir Mante, 3701 s. m. : aide, 4727 s. m. : assemblée délibérante, 8467 s. m. : intuition, 1924 Conseiller : vb. pron. : se concerter, délibérer, 921, 1896, 4525, 5094, 8982 Consentement : s. m., (d’un –) d’un commun accord, 9387 Considerer : vb. trans. dir. : observer, 107 Consistoire : s. m. : assemblée de cardinaux présidée par le pape, 13055
- Glossaire -
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Consolacion : s. f. : situation agréable, 8746, 12408, 16954 s. f. : soulagement, 20180 Consuire : vb. trans. dir. : atteindre en frappant, 11748 vb. trans. dir. : atteindre, 18547 Conté : s. f. : comté, 834 Contencion : s. f. : bataille, 3667, 21634 Contenement : s. m. : attitude, 2019, 3675, 5841, 5852, 5910, 7465, 11242, 11743, 12210, 12219, 13109, 13112, 15293, 15503, 18775, 20556 s. m. : allure, 704 s. m. : territoire, 13843 Content : s. m. : combat, 11469, 15907, 17202, 17213, 17698, 17711, 17806, 17987, 18628, 18762, 19376, 19384, 19399, 20697, 20717, 21126, 21276, 21282, 21309 Contour : s. m. : comte, 19320 Contraire : adj. : hostile, 3492, 14432 Contraire : s. m. : aliction, contrariété, 2690 (touner a –a qqun) faire du tort à qqun, 16268 Contralier* : vb. intr. : attaquer, 14387 Contre deux : s. m. : déséquilibre dans une bataille, indique qu’il y aurait un combattant pour un camp contre deux dans le camp adverse ? (le pire contre deux y auroions ceste jornee) nous aurions le pire combat à un contre deux en ce jour, 4280 Contree : s. f., (– franche) territoire exempt d’imposition, 18404 Contremont : adv. : vers le haut, 1923, 4249, 8226, 8310 Contrester : vb. trans. dir. : s’opposer à, 19459 (sans point de –) sans manisfester de résitance, 9853 vb. intr. : résister, 6162, 10810, 11886 Contreval : adv. : le long de, 4819, 16142 adv. : vers le bas, 8505 Convenance (avoir –) convenir, décider, 5136 Convenancer* : vb. trans. dir. : garantir, promettre, 7412 Convenant : s. m. : situation, 1222, 6910, 14535, 15546, 16204, 18055, 18345, 18647, 18978, 20454 (avoir a qqun en – que) demander à qqun que ? (eulx de la cité eurent en convenant au roy Pietres ... qu’il assemblast secours) les gens de la ville demandèrent au roi Pietres d’assembler du secours, 13256 (de noble –) de haute noblesse ?, 21443
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(faillir de –) manquer à sa parole, 1720 (par (un) tel –) de telle sorte, 170, 2679, 3217, 3603, 5272, 5521, 5673, 5691, 9216, 9478, 9977, 10122, 11439, 11771, 13638, 13648, 15729, 18980, 21315 (par bon –) de la bonne manière, 12058 (par cestui –) de cette manière, 21332 (pour tel –) en telle manière, 21591 s. m. : attitude, 2698, 3679, 10701, 10702, 11588, 11627, 15430, 15789, 18314, 18572, 18788, 19005, 20850, 20859, 21000 s. m. : disposition, 9621 s. m. : message ? (dictes vostre convenant) dites votre message, 17727 (quant Pietres oÿ le certain convenant que) lorsque Pietre entendit de source sûre que, 15743 s. m. : promesse, 1970, 13968, 17804, 20130, 20394 (avoir – a qqun) promettre à qqun (ainsi l’ot le fort duc aus barons convenant) le puissant duc it cette promesse aux barons, 20880 (avoir a qqun en – que) garantir, certiier à qqun que, 5267, 9381, 15853, 19783, 19886, 21100 Convenir : vb. imp. : être nécessaire, falloir, 1868, 3976, 6989, 6990, 7842, 9739, 9847, 10185, 11854, 11889, 11934, 12311, 12312, 12829, 13415, 13803, 13950, 14174 (.iiii. mille livres leur convient sans cesser) il leur faut quatre milles livres sans délai, 14113 vb. imp. : être possible ? (qu’il ne les convenist des membres afoler) qu’il leur était impossible d’être blessés, 19264 Convent : s. m. : couvent (voir note), 17067 Convent : s. m. : promesse, 8651, 11334, 12521, 13477, 13645 (avoir (en) –) garantir, promettre, 172, 1269, 1349, 1668, 1708, 1798, 1934, 2853, 3169, 3694, 7031, 7103, 7216, 7275, 7543, 8127, 9368, 9523, 9755, 11454, 11601, 12519, 12807, 13042, 13838, 14342, 14735, 15296, 18880, 21495 (avoir Dieu en –) prendre Dieu pour témoin ?, 10924, 11304 (avoir qqun en –) faire coniance à qqun ?, 13441 (Amis, se dist le roy, je vous ay en convent que je vous ay veü avec Bertrant souvent) ami, dit le roi, je vous fait coniance car je vous ai souvent vu avec Bertrant, 12788
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(defaire son –) rompre sa promesse, 14435 (faillir de –) ne pas tenir ses promesses, 12526 (faire – que) promettre que, 11545 (mettre en son – que) faire la promesse de (a la in que Françoys mistrent en leur convent que) ain que les Français fassent la promesse de, 3855 s. m. : assemblée, réunion, 11464, 15872 (tout le –) tout le monde, 13847 s. m. : attitude, 15535 (par tel –) en telle manière, 494, 4767, 5920, 8049, 8304, 8651, 11224, 11753, 15969 Converse : s. f. : femme convertie au christianisme, plus particulièrement juive, 88 Converser : vb. intr. : exister (le meilleur roy qui fust par dela conversant) le meilleur roi qui ait jamais vécu en ce monde, 7389 vb. intr. : demeurer, 7505, 9132 Convert : adj. : converti, 7791 Convine : s. m. : disposition (qui fu de male convine) qui était plein de méchanceté, 6589 Convoier : vb. trans. dir : accompagner, escorter, 7764, 9516, 9519, 11791, 11851, 12674, 13655, 14421, 15486, 16872 (– qqun arrier) abandonner qqun ? (par malvaisement paier et convoier arrier) en les payant chichement et en les laissant tomber, 17554 (sans moy convoier) sans bénéicier d’aucune escorte, 3350 vb. trans. dir. : conduire, 15566 Convoiteux : adj. : cupide, 13017 Cop (a (tout) ce –) à ce moment-là, 5975 Cop : s. m. : coq, 20684 Cop : s. m., (a (tout) ce –) à ce moment-là, 4429 Coquart : s. m. : imbécile, 60 Cor : s. m., (– sarrazinois) instrument païen, 10975 Cordelier : s. m. : religieux de l’ordre de saint François d’Assise, 6727, 8625, 8628, 8635, 8638, 8658 Corne : s. f. : cor, instrument à vent, 5817 Corner* : vb. intr. : souler dans un instrument à vent, 919, 5721, 5847, 11624
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Cornet : s. m. : instrument à vent, 3787, 15803, 18530 Coron, (couron) : s. m. : extrémité, 20517, 20685 (Et puis gictent sur luy une coute ... et a chascun coron pendirent un mourtier) ils jetèrent sur elle une couverture ... et ils pendirent un poids à chacune des extrémités, 6885 (a ce –) de cette façon, 1180 (a un –) d’un seul tenant, 4003 (garder son –) garder son coin, 20960 (nul –) rien du tout ? (vous pourroiéz bien vouloir...que de ce paiement n’eüssez nul coron) vous pourriez bien consentir à ne recevoir rien de cette somme, 14252 (savoir le –) connaître la vérité ? (il y envoiera pour savoir le coron) il y enverra quelqu’un ain de connaître la vérité, 12923 (venir a –) parvenir à ses ins (il n’en pouoit issir ne venir a coron pour) il ne pouvait en sortir ni trouver un moyen pour, 2880 (venir a –) venir à bout, 7582 s. m. : troupe ? (et les Normans aussi a un autre coron vindrent a Roleboyse) les Normands parvinrent également à Roleboyse accompagnés d’une autre troupe, 3663 Corps : s. m., (de – et d’avoir) corps et biens, 952, 9932 (aviser les –) préparer les troupes ? (les seigneurs par dela ont les corps adviséz) les seigneurs ont préparé les troupes de l’autre côté, 11536 (de – et de pis) de tout son être ?, 10120, 14878 (preu de son –) : courageux au combat, sur le modèle de preu de la main ?, 17897 (rendre son –) se constituer prisonnier (de rendre leurs corps leur furent semmonans) ils les incitèrent à se rendre, 16154 Corrouser : s. m. : colère, 5216 Costé, (cousté) : s. m. : famille, lignage, 15245, 15259 Costier : vb. intr. : se rapprocher, 15960 Costier, (coustier) : vb. trans. dir. : longer (a force de chevaux vont la mer costiant) avec de nombreux chevaux ils longèrent la mer, 14717
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(la haulte mer costie) il longe la côte, 14996 vb. trans. dir. : approcher, 17539 vb. trans. dir. : marcher aux côtés de, 15997 (A senestre les mist ainsi que en coustiant les .xm . premiers) il les plaça à sa gauche de sorte qu’il marchait aux côtés des dix mille premiers, 11589 Costiere : s. f. : rivage, littoral, 1110 Costoier* : vb. intr. : avancer près de (si viendront costoiant) ils s’avanceront près de nous, 881 Cote : s. m., (– de gris) manteau de fourrure, 13397 Couhe : s. f. : queue, 11922 (qui ne prisent Englois la couhe d’un siron) il ne considère les Anglais pas plus que la queue d’un microbe, 18500 Couher : vb. trans. dir. : couver, 4428 Coulisse, voir Porte coulisse Coulon, (colon) : s. m. : pigeon, 3291, 6749, 6753, 8359, 12169, 20426 Coulpe : s. f. : péché, 7512 (batre sa –) reconnaître ses fautes, 6213 Cour, voir Cours Couragie* : s. m. : courage ?, 20923 Courcier : s. m. : cheval, 738, 4529, 11802 Coureur, voir Courour Coureur : s. m. : cheval ? (Bertrant les pourvey d’armes et de coureur) Bertrant leur fournit des armes et des chevaux, 17651 Courir : vb. trans. dir. : couler (le sang lui couroit si fort qui l’aveugla) son sang coulait si fort qu’il en fut aveuglé, 5977 (– dessus qqun) attaquer, 10723 (– sur qqun) attaquer, 21242 (– sus qqun) attaquer, 5753, 11302, 11306, 11519, 11540, 18447, 21330 (– sus) pourchasser, 8994 (– une lance) efectuer une joute à la lance, 425 Couron, voir Coron Couronné : p. p. : tonsuré (et des clers couronnéz) et des éclésiastiques tonsurés, 7667 Couronnement : s. m. : royaume (il a prins d’Espaigne notre –) : il nous a ravi la couronne d’Espagne, 10437
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Couronner : vb., (se – de) se faire couronner roi d’un territoire (et si c’est couronné voyant ma baronie du roiaume d’Espaigne qui vient de ma partie) et à la vue de mes hommes il s’est fait sacrer roi d’Espagne qui est un territoire qui m’appartient, 10492 Courour : s. m. : éclaireur [var. coureur], 1325, 1326, 1397, 4121, 4183, 5822, 11116, 11146, 11147, 14703, 14845, 14920, 15704, 15712, 15742, 21140, 21154 Courroucer : vb. trans. dir. : inliger une correction à qqun, 211 Courroucier : s. m. : colère, 10422 Cours, (cour) : s. m. : galop, 17919, 18536 Coursu : adj. : vigoureux, 17275 Courtil : s. m. : jardin fermé, 2932, 17833, 18235 Courtoisie : s. f. : présent, cadeau, 4886 (faire –) se montrer généreux, 2753, 4933, 4938, 5124 Cousin : s. m. : marque d’afection, de proximité, 422 Cousté, voir Costé Coustelle : s. f. : sabre à deux trenchants, 10300, 10324, 10326, 10341 Coustier, voir Costier Coustiere : s. f. : lanc, 11985 Coustume : s. f. : habitude, 155 Coute : s. f. : couverture, 6883 Coutume : s. f., (fausse –) impôt injuste, 14738 Couvertement : adv. : de manière cachée, 3695, 14426 Couvoyter : vb. pron. : se couvrir (voir note) (et a prins un escu dont il se couvoyta) et il a pris un bouclier avec lequel il se protégea, 3579 Coyement, voir Coiement Coyt : adj. : immobile, 4270 Coyvre : s. m. : cuivre, 6495 Crameillie : s. f. : tison (a celluy jacques noir comme une crameillie) avec un costume noir comme un tison, 1569 Craventer : vb. trans dir. : écraser, 10439, 11884, 12199, 13452, 14557, 20723 Creance : s. f., (de bonne –) qui est digne de coniance, 4613 (avoir – en) avoir coniance en, 7329 Creancé : adj., (par foy –) en jurant sur sa foy, 18426 Creant (estre –) être rassuré, 66, 15751
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creanter : vb. trans. dir. : assurer, 10812, 11020, 11042, 12333, 13195, 13204, 13638, 13779, 13975, 14315, 18340 (je le veil creanter) je vous l’assure, 13540, 15047 (ce fait a –) ceci est bien certain ?, 7115, 8961, 9406, 9433, 11138, 11898, 12696, 14857 Cremir : vb. intr. : craindre, 4696 Cremour : s. f. : peur, 20564 Cremu : adj. : redouté, 3546, 8369, 10459, 19745 Crenel : s. m. : créneau, 19595, 19610, 20005, 20245 Crestien : adj. : chrétien, 6509, 8085, 8124, 15376 Crestien : s. m. : chrétien, 8248 Crestienement : s. m. : membres de la communauté chrétienne ?, 7528 Crestienné : adj. : chrétien, 6653, 9331, 12600, 15243 Crestienné : s. m. : chrétien, 42, 15835 Crestienner : vb. intr. : bâptiser, 3002 vb. pron. : se convertir à la religion chrétienne, 6960 p. p. : converti au christianisme, 4795 Crestienté : s. f. : chrétienté, 7621, 7625, 15810 Creté : adj. : qui porte une crinière, 1634, 4635, 5885, 11208, 11731, 18119 Cretel : s. m. : créneau, 15753, 20430 Crever : vb. trans. dir. : tuer (a l’aube crevant) au lever du jour, 1901, 3753, 14147 (par telle maniere que le cheval creva) de telle façon qu’il tua le cheval, 448 aparaître, 1847, 4358 p. p. : répandu, 17735 Crié : adj. : annoncé publiquement (une feste criee de joustes) on avait annoncé publiquement une fête avec un tournoi, 315 Criee : s. f. : clameur, 4788 Crier : vb. trans. : annoncer publiquement, 1899, 2138, 8981 (– arierbanc) convoquer l’arrière-banc, 15699 vb. intr. : proclamer, 3218, 3427, 3438, 4646, 5132, 5733, 7638, 8164, 10669, 11630, 11649, 12031, 14229, 21516, 21535 p. p. : annoncé, 3078 Crierie : s. f. : clameur, tumulte, 980, 1399, 15936 Croire : vb trans dir. : accorder un crédit inancier à qqun, 187 (ne me creéz ja se) n’accordez plus aucun crédit à mes paroles si ce que je dis ici n’est pas vrai, 4411
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(ne me creéz ja se) n’accordéz plus aucun crédit à mes paroles si ce que je dis ici n’est pas vrai, 5259 Croistre : vb. trans. dir. : poursuivre (sa route) ? (ainsi vont noz François et leur route croissant) ainsi nos Français avancent et poursuivent leur route, 20270 Croix : s. f. : monnaie sur laquelle est frappée une croix, 14247 Croizer : vb. pron. : s’engager pour la croisade, 7400 Croux : s. m. : trou, forme pour creux (et irent mains grans croux par ou passer povoit on) et ils creusèrent de nombreuses et larges cavités par lesquelles on pouvait passer, 20776 Cry : s. m. : cri de guerre, de railliement, 40, 13867, 13874 Cuder, voir Cuider Cuer : s. m. : courage, 11487 (a son –) intérieurement ? (a son – s’en aloit moult durement gabant) : il eu un grand rire en lui même (après avoir entendu les musiciens), 9986 (avoir le – grant de qqch) avoir une réelle envie de faire qqch ?, 5758 (avoir son – a) placer sa coniance en, 9545 (de –) : volontiers, 21101 (dire –) : parler en toute franchise, 15075 (du bon du –) du fond du cœur, 2969 (porter le – de) avoir les caractéristiques de, 16536 Cugnie, voir Coignie Cuider, voir Cuidiers. m.)11804 Cuider, (cuder) : vb. intr. : douter ?, 4512, 5441, 5833, 6013, 8993, 9023, 9893, 12666 (Ainsi ne demoura guesres, ce sachéz sans cuider) il n’y demeura pas longtemps, n’en doutez pas, 3312 (–+inf.) tenter de, chercher à, 7739 vb. intr. : croire à tort, 4370, 5903, 5975, 6779, 7387, 7498, 8094, 8096, 8181, 10104, 11197, 12439, 13732, 13733, 14346, 14414, 14415, 15658, 21471, 21489 vb. intr. : penser ?, 10777 Cuidier, (cuider) : s. m. : avis, opinion, 7699, 7735, 11804, 17767, 20928 Cuignie, voir Coignie Cuisant : adj. : qui provoque une douleur (et ventoit un froit vent qui fu froit et cuisant) et il soulait un vent qui était froid et piquant, 17863
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Cuissere : s. f. : partie de l’armure protégeant les cuisses, 5927 Cunie, voir Coignie Cur : s. m. : cœur, 8184, 9591, 12084 Cuvri : p. p. : protégé, défendu d’une attaque ennemi, 19988 Cuvrier : vb. trans. dir. : accabler, tourmenter, 1564, 2967, 4039 Cy (par tel –), voir Sy Cy : forme verbale pour issir ? (l’evesque de Toulecte hors d’une chambre cy) l’évêque de Tolède sortit d’une chambre, 12248 Cyphonie : instrument à vent ou plutôt de tambour percé dans le milieu comme un crible et qu’on frappait des deux côtés avec des baguettes, 9981 Dangier : s. m. : obstacle (avoir a –) éprouver des diicultés, 360 (en la in se rendy Bergerac sans dangier) au inal, Bergerac se rendit sans opposer de résistance, 21558 s. m. : pouvoir (mais quant il sceu qu’il fu yssu de son dangier) mais lorsqu’il apprit qu’il avait échappé à son contrôle, 3327 s. m. : responsabilité (il est en nostre dangier) il est sous notre autorité, 2562 Danjon : s. m. : tour, 3140 Dart : s. m. : arme de jet à manche court, munie d’une pointe de fer ou durcie au bout, 8481, 10880, 11066, 11113, 11204, 11594, 11752, 14374, 14620, 14813, 14949, 15543, 15558, 16183 Deable : s. m., (le deable y sera) : vous risquez de gros ennuis, 1801 Debailler : vb. trans. dir. : découvrir (s’il avoit tout le monde a debailler) s’il devait partir explorer le monde, 17404 Debat : s. m. : combat, bataille, 3807, 7817, 20237, 20311, 21309 s. m. : querelle, dispute, 9296 (mettre –) semer la discorde, 4546 Debatant : s. m. : diférent ? (que la duché qui est cause de ce debatant) que le territoire qui est la cause de ce diférent, 5520 Debatu : p. p. : vaincu ? (de l’assault qu’ilz ont fait et ses gens debatuz) de l’assault qu’ils ont
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réalisé et de la défaite de ses soldats, 8374 Debaut : s. m. : combat (mais on les repoussoit par merveilleux debaux) mais on les repoussait par de prodigieux assauts, 19303 Debout : s. m. : extrémité (qu’au debout de l’acier de son chief lui ousta) qu’il lui ôta de la tête avec la pointe de son épée (le heaume), 10119 Debouté : p.p. : rejeté, 61 p. p. : chassé, 6442, 8624 p. p. subst. : rejeté (que les plus deboutéz estoient les plus grant) ceux qui sont les plus rejetés deviennent les plus grands, 64 Deça : adv. : par ici, 46, 5824, 7664, 7830, 8355, 8444, 9523, 10612, 11338 (– ne dela) d’un côté ni de l’autre, 9539 adv. : de ce côté-ci, 2824, 5548, 5787, 6317, 7191, 8810 adv. : de l’autre côté de, 4470, 9325 (au lieu –) le pays d’en face, ici la France (qu’il ne partiroit ja de nous au lieu deça) qu’il ne nous quitterait pas pour se rendre en France, 3368 Decevance : s. f. : tromperie, ruse (les bourjois retournerent sans nulle decevance) les bourgeois s’en retournèrent sans mauvaise surprise, 18388 Decevrance : s. f., (a celle –) au départ (quatre chevaliers prinst a celle decevrance) il captura quatre chevaliers au début de cette attaque, 1138 Decevrer, voir Descevrer Dechasser : vb. trans. dir. : chasser brutalement, 6988, 7804, 7843 Declinacion : s. f. : distance entre un astre ou un point quelconque du ciel et l’équateur céleste, mesurée sur le méridien céleste (mais le sort est sur vous en declinacion) les astres montrent que la prophétie vous concernant va bientôt se réaliser, 8899 Decliner : vb. trans. dir. : mener au déclin, 15108 vb. intr. : partir, 6171, 14133 Decliquier, (desquicler) : vb. trans. dir. : lancer (quant Chando a choisi les chaillos descliquer) lorsque Chando vit lancer les pavés, 18715 Decliquier, (desquicler, descliquer) : vb. trans. dir. : lancer, 18739, 18746 Decoler : vb. intr. : décapiter, 5027, 8282, 12278, 16579, 20669, 20841, 21683
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Decopper : vb. trans. dir. : tailler en pièces (les glaives qu’ilz tenront nous irons decoppant) nous mettront en pièces les glaives qu’ils tiendront dans leurs mains, 21331 Decouste : adv., (par –) le long de, 10635 Decryer : vb. trans. dir. : humilier ? (et se je vous en mens, faictes moy decryer) si je vous mens, faîtes-moi humilier publiquement, 1377 Dedens : prép. : pendant (– + date) dans un délai de, 5581 (que dedens quatre jours nous le combatrons) que nous l’afronterons d’ici quatre jours, 5503 (a lui seront renduz dedens la terce jornee) ils se rendront à lui durant la troisième journée, 9467 Deduire : vb. intr. : se déplacer (de moult hault instrument jouer en deduisant) de très bons instruments jouer en marchant, 17717 vb. pron. : se divertir, 2902, 9963, 13341 Deduisant : adj. : charmant, 7303 Defait : adj. : réduit en un état misérable (car le visage avoit d’un moult hydeux semblant, tout mesel et defait) car son visage s’en trouva déiguré, tout entier attaqué par la lèpre et diforme, 2701 Defencion, (defension, defenson) : s. f. : protection, 13796 s. f. : défense, 20431, 20691, 21633 (faire – contre qqun) résister à qqun ?(veilléz faire contre eulx bonne desfensïon) veuillez vous défendre vaillament contre eux, 7890 (qui de son frere ot fait a lui defension) qui avait pris la défense de son frère contre lui, 6835 Defendant : s. m. : celui qui combat contre l’appelant, 478 Defendement : s. m. : résistance, 19390 Defendre, (defendre, desfendre) : vb. pron. : résister à l’ennemi (sujet inanimé) (et bonne fermecté qui bien se desfendy) et une solide forteresse qui résista bien à l’ennemi, 5230 p. p. : qui fait l’objet d’une interdiction (le nous a defendu sur les membres copper) il nous l’a interdit sous peine d’avoir les membres coupés, 8030 (mais il est defendu, si que plus n’y viendra) il a été banni, il ne reviendra
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plus, 9068 part. prés. : (estre defendant encontre qqun) résister à qqun, 16426 Defension, voir Defencion Defenson, voir Defencion Deffaé, voir Desfaé Deffendre, voir Defendre Deffensable : adj. : puissant, capable de se défendre, 17057 Deffermer, voir Desfermer Deffier : vb. trans. dir. : assaillir (ourgueil le deie) il s’emplit d’orgueil, 10518 Deffiner, (deiner) : vb. trans. dir. : tuer, 8032, 19445, 20604 Deffoucher : vb. pron. : se disperser, 21412 Definement, (desinement) : s. m. : mort, 15549, 21685 Definer, voir Deiner Definir : (– un procès) donner les conclusions d’une procédure judiciaire (qu’il n’eüst contre lui au procés deinant) qu’une sentence soit retenue contre lui, 581 Degabé : p. p. : tourné en riducule, 5183 Degré (de – en –) de génération en génération (et mes hiers ensement de degré en degré) et mes héritiers également de génération en génération, 10543 Dela : adv. : de l’autre côté, 2867, 3362, 3585, 5748, 5823, 6031, 6096, 6316, 7191, 7201, 7833, 9933, 9994, 10007, 10018, 10083, 10101, 11558, 11659, 13105 (deça ne –) d’un côté ni de l’autre, 9539 Delaier : s. m. : délai, 6872 Delaier : vb. pron. : tarder, 18021 Delaisser : vb., (– le champ) faire cesser le combat, 2551 Delay, (delays) : adv. : à côté, forme pour deléz, 2899, 4264, 11516, 11722, 12107, 20766, 20778 Delayement : s. m. : délai, 7041 Delayer : vb. intr. : tarder, 16534, 17166 Delays, voir Delay Delit : s. m. : joie, 8826, 20202 Deliter : vb. trans ind. : s’amuser ? (a ses deux autres freres un pou se delita) elle joua un peu avec ses deux autres frères, 112 Delivre : adj. : libre, 3357
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Delivrement : adv. : rapidement, 15545 Delivrer : vb. trans. dir. : remettre, 1517, 2760, 4812, 4840, 5169, 5690, 7234, 8222, 8323, 9120, 9300, 12116, 12572, 13512, 13880, 14121, 14231, 14324, 14854, 15043, 18194, 19946, 20866 (– le pas de qqch) dégager le passage ? (Or tost, se dist Henry, delivréz en le pas) ôtez le tout de suite de ma vue, 16589 vb. trans. dir. : livrer, 9399 vb. trans. dir. : mettre à rançon (la eust été roy Pietre délivré) Pietre aurait été mis à rançon, 14696 vb. trans. dir. : sauver (pour cellui delivrer qui en avoit mestier) pour sauver celui qui en avait besoin, 3344 vb. trans. dir. : éliminer, tuer, 20845 vb. trans. ind. : libérer qqun de qqch, 2987 vb. intr. : accoucher, 6961, 15367 vb. intr. : raconté (si que fu delivré, la fain lui approcha) comme nous l’avons raconté, la faim les menaçait, 11342 vb. pron. : (se – de qqun) se séparer de qqun, 9975 p. p. : mis à mort ? (en ceste place fu ceste gent delivree) l’ensemble des soldats fu mis à mort ici-même, 13894 Delivroison : s. f. : delivrance (en sa –) en son pouvoir, 12160 Delivroison : s. f. : délivrance, 2429 Demaine : adj. : qui appartient à un seigneur, 21643 Demaine : s. m., (les – et les per) les grands vassaux de la couronne, 21057 Demainement : s. m. : situation, état, 12999, 21105 Demander : vb. trans. dir. : parler de ? (a qui est le chasteau que vous me demandéz ?) à qui appartient le château dont vous me parlez ?, 2988 vb. intr. : prendre conseil ? (J’en voldray demander) je voudrai en discuter, 5475 Demanoys : adv. : tout de suite, 5611, 19017 Demenement : s. m. : conduite, comportement, 7542 (en vostre –) sous votre responsabilité, 11438 s. m. : chose convenue
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(que on devoit avoir fait tout le demenement) et qu’on devait avoir accompli tout ce qui était convenu, 2863 Demener : vb. trans dir. : réciter, déclamer, 4106 (Ne sçay a quoy la tençon vous en soit demenee) je ne vois pas pourquoi le débat vous serait rapporté, 12466 (ne sçay c’on vous voussist longuement –) je ne sais pas pourquoi on vous en dirait plus à ce sujet, 9864 Demener : vb. trans. dir. : mener, conduire, 620, 886, 6077, 6242, 20621 (– bonne vie) manifester sa joie ?, 8733 vb. trans. dir. : tourmenter (on ne vit oncques roy tellement demener) jamais on ne vit tourmenter autant un roi, 15049 vb. pron. : s’agiter, 18860 vb. pron. : se comporter, 9543 p. p. : malmené ?, 2015 (la vest on Angloiz ierement demenéz) on vit ici les Anglais rudement malmenés, 4628 Dementir : vb. trans. ind. : faillir, manquer, 4993, 18781 Demeurant : s. m. : reste, 9220 (de –) de reste, 1209, 13845 (estre – de) être le garant de, 9279 s. m. : le reste des habitants, 2351 Demeuree : s. f, (faire –) séjourner un long moment, 5330, 9345, 9348 Demeurent, voir Demeurant Demeurer, voir Demorer Demie (denrrïé ne –) rien du tout, 7157 s. f. : petite quantité, 8717 Demonstrer : vb. intr. : se montrer, 3944 vb. trans. dir. : présenter, 11583 p. p. : présenté (plus haultement que nulle qui la soit demonstree) plus haut que toutes celles présentes ici, 11831 Demorer : vb. intr. : se porter garant (cellui qui n’aura dequoy faire son paiement je demorray pour lui) celui qui ne pourra payer, je me porterai garant pour lui, 184 vb. imp. : résulter (si en demeura la ille dont je vous ay compté) il résulta (de cette union) la ille dont je vous ai parlé, 9272
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Demour : s. m. : délai, 16104, 16964, 17654, 17660, 18540 Demourance : s. f. : lieu (que fait l’ost ny en quel demourance) que fait l’armée et à quel endroit, 1124 Demourant : s. m. : reste, 1479, 4981, 7315, 9505, 10448, 18038 Demouree : s. f. : attente, délai, 906, 4271, 7867, 7871, 9781, 12443, 12449, 12464, 18461 (faire –) tarder, 8148 (ne irent commes riens ou chastel demouree) ils ne séjournèrent que très peu au château, 18466 s. f. : séjour, 15352 (faire –) séjourner, 18443 Demourer : vb. intr. : séjourner, 2832 (– de qqch) : se passer de (du païs du Poictou les Englois demourerent) : les Anglais se passèrent de la région du Poitou, 21484 vb. pron. : séjourner, 12432 Demouroison : (sans –) sans tarder, 16939 Demusser : vb. intr. : se cacher (qui s’en veille fouyr comme en demussant) qui cherche à s’enfuir en cachette, 16376 Dener : s. m., (– monnoiéz) monnaie frappée, 2182 Denoncer, (denoncier) : vb. intr. : dire, parler (jusques atant que cellui qui va murmurant en aura raconté par devant moy autant comme dit en aura ainsi que en denonçant) jusqu’à ce que celui qui médit (de moi) raconte la même chose qu’il disait en face de moi, 17513 (– de sa foy que) faire la promesse que ? (volu au bon duc d’Anjou de sa foy denoncier qu’il vouloit devenir François) il voulut faire la promesse au bon duc d’Anjou qu’il voulait devenir Français, 21567 Denoncier, voir Denoncer Denree, (denrrié) : s. f. : valeur d’un denier, 1938 (– ne demie) rien du tout, 7157 Denrrïé, voir Denree Dent : adv. : ici, 13021 Dent : s. f., (monstrer la –) menacer, 1156, 10929 (avoir long –) avoir extrêmement faim, 11307
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(se mectre a la –) se mettre qqch sous la dent, 12198 Denuer, (desnuer) : vb. trans. dir. : dépouiller, 772 p. p. : dépouillé, 18794 Deparçon : s. f. : séparation ? (et la deparçon sera tout par amour) et la séparation se fera en bonne amitié, 10791 Departement : s. m. : départ, 12952, 14958 Departie, (deppartie) : s. f. : départ, 4939, 14754, 16135 (faire la – ) partir, 9263, 10285 (le pappe n’en pourroit faire la deppartie) le pape ne pourrait dissoudre cette union, 8569 (faire la – de qqun) s’éloigner de qqun, 9239 s. f. : séparation, 10796 Departir : s. m. : départ, 813, 2793, 13669 Departir, (despartir) : vb. trans. dir. : partager, 647, 8284, 8931, 9184, 13997, 15435, 15516 (– l’un de l’autre) se séparer ? (ne jamais l’un de l’autre ne departirons) nous ne nous séparerons jamais l’un de l’autre, 7277 vb. trans. dir. : dispaître, 12503 vb. trans. dir. : disperser, 11939, 11941, 18735 vb. trans. dir. : quitter (et les vont departant) et ils s’éloignèrent d’eux, 16143 vb. trans. dir. : éparpiller, 12431 vb. intr. : partir, 6690, 9616, 12126, 13866, 13873, 14536, 16181, 16816, 17145, 19115, 19543 vb. intr. : se séparer ?, 10767, 10778, 10786, 14148 vb. intr. : terminer, inir, 4930 vb. pron. : s’échapper, 244, 251, 2883, 2923 vb. pron. : se séparer de qqch ? (bien m’en puis departir tout a ma desiree) je peux très bien me débarasser d’elle à ma guise, 17638 vb. pron. : (se – de qqun) se séparer de qqun, 10185 vb. pron. : partir, 810, 814, 2761, 4159, 4948, 5147, 8464, 8670, 9440, 9495, 9525, 10629, 10761, 11057, 11085, 11101, 12130, 12512, 12817, 13445, 13634, 15419, 15442, 15493, 16340, 17714, 18368, 18688, 18908, 18955, 20882 p. p. : parti, 9951
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(il le nous fault savoir sans estre –) nous devons savoir ceci avant notre départ ?, 9827 Depecier, (deppecer, deppecier, despecier) : vb. trans. dir. : disperser (qu’ilz les ont depeciéz et rompuz) qu’ils ont fait éclater leurs rangs et les ont mis en déroute, 11225 vb. trans. dir. : rompre, briser, 5210 (ains ont tout le statu despecié et faussé) au lieu de cela ils ont rompu et faussé l’accord, 19952 p. p. : brisé, 988, 3155 vb. pron. : s’éparpiller, 6094 Deplaié : p. p. : couvert de plaies, 11643 Depoignant : part. prés. : mutilé, blessé (et le corps depoignant) et le corps mutilé, 6292 Deport : s. m. : faveur (avoir –) être gracié d’une peine (Ja deport n’en auréz : a mort vous mectray ) vous ne serez jamais gracié : je vous ferai mettre à mort, 2173 (le plus riche homs tousjours plus deport a) le plus riche remporte toujurs toutes les faveurs, 6984 Deporter, (depporter) : vb. trans. dir. : épargner, ménager, 120, 218, 1799, 4841, 8251, 16574, 18861, 20846, 20854, 21064, 21476 (estre –) retenir ses coups ? (Aléz ferir ensemble, ne soiéz depportéz) allez vous battre l’un contre l’autre, ne ménagez pas vos coups, 10315 (se – de) cesser de (Adont de nous gaber vostre corps se deporta) à ce moment là, vous vous gardiez de vous moquer de nous, 11568 vb. intr. : s’éloigner, partir, 11613 p. p. : déplacé (et depportee es boys) et apportée dans les bois, 10966 vb. pron. : s’éloigner, partir, 8971, 11564 vb. pron. : se remettre ? (du cop qu’il ot reçeu dont bien s’est deporté) du coup qu’il eut reçu dont il s’était parfaitement remis, 458 Deppartie, voir Departie Deppecer, voir Depecier Deppecier, voir Depecier Deppercer : vb. trans. dir. : percer, 18682 Depporter, voir Deporter
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Deprier : vb. trans. ind. : prier, 16714, 19979, 20702, 20820 Depuis : adv. : par la suite (– que) après que, 20150 (on y est bien .vii. ans que depuis en ist on) on y reste bien sept ans qu’ensuite on en sort, 12174 Derobé, (desrobé) : p. p. : pillé, 19751 (car le païs estoit derobé et gappi) car le pays était entièrement pillé et ravagé, 17317 Derompre : vb. trans. dir. : fendre, 1000, 11758, 11900, 11903 vb. trans. dir. : briser, 10072 vb. trans. dir. : disperser (Mais véz cy qui les it derompre) mais voici celui qui les it se disperser, 11219 vb. trans. dir. : lacérer, 14898 Derraé : p. p. : poussé hors du rang (Par une fole dame suis ainsi derraee) ainsi par une femme folle je suis démise de mes fonctions royales (voire répudiée ?), 6668 Derrier : adj. : dernier, 20781 (s’i sont assenty a rendre au derrier jour) ils ont consenti à se rendre le dernier jour, 20815 Derrier : adv. : derrière, 21216 Derrision : s. f. : folie ? (partout se fait haïr par sa derrisïon) il est partout haï à cause de ses actions déraisonnables, 12629 Derubent, (desrubent) : s. m. : ravin, précipice, 4209, 7302 Derué, voir Desrué Dervé : adj. : cruel, 6518, 15395 (avoir la chiere – de) avoir un désir furieux de (qui s’i combatre la chiere la chiere a bien dervee) qui a une envie folle de combattre ici, 11845 Dés : prép., (– ce que) aussitôt que ?, 12345 Desbareté, voir Desbarreté Desbarreté, (desbareté) : p. p. : mis en déroute, 11301, 15833 Descendre : vb. pron. : se diriger vers le bas (si se sont descenduz enmy le pré lory) ils sont descendus au milieu du champ, 4178 Descevrer, (decevrer, dessevrer) : vb. trans. dir. : partager, 2791, 15692 vb. trans. dir. : tuer ?
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(et sachiéz s’il puet, il vous decevra) sachez bien que, s’il le peut, il vous tuera, 14457 (gardéz vous du roy Pietres, il vous decevra) protégez-vous du roi Pietre ou il vous tuera, 14450 vb. intr. : partir, 8013, 8860, 9185, 11140, 21068 vb. pron. : partir, 11188, 14681, 18369 vb. pron. : se séparer, 17038 Descevrer, (desevrer) : s. m. : départ, 5091, 10803, 10815, 14118, 14589 (au –) : au moment du départ, 10796 Descharger : vb. trans. dir. : assener (et de haches puissans si grans cops deschargoient) et ils assénaient des si grands coups de fortes haches, 21389 vb. intr. : se débarasser de son chargement, 883 Descliquer, voir Decliquier Descobilaz, voir Descobiller Descobiller* : vb. trans. ind. : couper la gorge à, forme p5 pr descobilaz, 16578, 16580 Desconfir, voir Desconire Desconfire, (desconir) : vb. trans. dir. : mettre en déroute, 2337, 2369, 3423, 3426, 4380, 4424, 4551, 4704, 4800, 6002, 6096, 6197, 6266, 6708, 6711, 6718, 6734, 7844, 9940, 11106, 11293, 11322, 11388, 11976, 12010, 12047, 12078, 13273, 13374, 14709, 14734, 14839, 15529, 15664, 15857, 15860, 17923, 18033, 18038, 18053, 18057, 18064, 21266, 21269, 21291, 21302, 21363, 21437 (de bataille venéz contre vous desconie) vous venez d’une bataille qui a tourné défavorablement pour vous, 15008 (estre – de) être anéanti par (que de famine fu le peuple desconfy) que le peuple fut anéanti par la famine, 12516 p. p. : découragé, 4481 p. p. : terminé (quant la bataille fu desconite et matee) quand la bataille fut achevée, 4781 p. p. : vaincu, 4789, 4967, 4980, 5352, 6123, 14960, 15127 Desconfiture : s. f. : défaite, 12009, 16196 Desconforté : p. p. : découragé, abattu, 12582, 13373 Descoucher : s. m. : lever du jour ? (le Besgues se leva quant vint au descoucher) le Besgues se leva au lever
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du jour, 14418 Descouchier : vb. intr. : se lever de son lit, 3047 Descouvrir : vb., (– dessus qqun) débusquer qqun ?, 21141 Desdire : vb. trans. dir. : refuser, 7159 vb. trans. dir. : contredire, 15646, 15689, 16208 Desert : adj. : pillé, ruiné (si vous en trouveréz desers et touz gastéz) vous vous retrouverez complètement ruinés, 20025 Deservir : s. m. : moment où l’on lève la table ? (Et aprés le disner ... ançoys le deservir) après dîner, avant que la table soit débarassée, 13043 Deservir : vb. trans. dir. : mériter, 17667 vb. trans. dir. : récompenser, 8794 p. p. : mérité, 3229, 10129, 11929, 11930, 13987 Desesperance : s. f. : désespoir, 15176 Desesperer : vb. trans. dir. : tourmenter, aliger (a peine que ne voys mon corps desesperant) il en faut peu pour que je sombre dans le désespoir, 1291 Desevrer, voir Descevrer Desfaé : adj. : troublé, 3794 (a chiere –) avec violence, 4589 Desfaé, (defae) : adj. : troublé adj. : inidèle, mécréant, 11823 (et Juïfz ensuyvent, une gens desfaé) et les juifs également, un peuple d’inidèles, 9332 Desfendre, voir Defendre Desfermer, (defermer) : vb. trans. dir. : ouvrir, 932, 5297, 7659, 8280, 9110, 9408, 9428, 12118, 12119, 19453, 19484, 20108, 20109, 21472 vb. trans. dir. : faire sortir qqch du lieu où il est enfermé (ceulx de la contree eurent si la vitaille mucie et defermee) les gens du pays eurent tant caché et fait sortir de la ville les provisions, 10965 Desfinement, voir Deinement Desfoquier : vb. trans. dir. : défaire une formation en troupe (la presse depart et les va desfoquant) il fendit la foule et it disperser les troupes, 11939 vb. trans. ind. : se disperser, 5832 Desfouer : vb. trans. dir. : se deterrer, 2662 Desglicier : vb. trans : glisser, 735
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Desheaumer : vb. trans dir. : retirer le casque, 465 Désiré : adj. : redouté ? (qui est le chastellain qui tant est desiré ?) qui est le châtelain qui est tant redouté ?, 2989 Desirer : s. m. : volonté, désir, 5452, 6130, 12501 (a leur –) à leur guise, 3833, 8079, 11566, 14401, 17006, 17023, 21565 (en moult grant –) avec ardeur ?, 5442 (chevauchent envers Mante en moult grant desirer) ils chevauchent vers Mante avec beaucoup d’ardeur, 3815 Desjuner : vb. pron. : se nourrir, 19763 Deslaner : vb. pron. : se délacer, 2526 Desloer : vb. trans. dir. : désapprouver (de rendre la cité je ne desloe mie) je ne désapprouve pas l’idée de rendre la ville, 19963 Deslogier : vb. trans. : éloigner (et qu’il avoit Bertrant fait de lui deslogier) et qu’il avait permis à Bertrant de s’éloigner de lui, 3336 Desloiaux : adj. : hors norme ?, sens positif, 19291 Desmangier* : vb. trans. dir. : ronger ? (si auroient desmangié la char salee) ils préfereraient plutôt ronger la viande salée (épuiser les vivres), 13198 Desmonter : vb. intr. : descendre de cheval, 11206, 14859, 17883, 18602 Desnoyé : p. p. : détrempé ? (et le siege laissé car trop fu desnoyé) et il aurait abandonné le siège car tout était inondé, 1879 Desnuer, voir Denuer Desobeir : vb., (– l’un contre l’autre) se battre les uns contre les autres ?, 8399 Desoler : vb. trans. dir. : ravager, 17195, 20088 Desordonner : vb. intr. : ne plus se tenir en ordre de bataille ? (la bataille eslongier et eulx desordonner) l’armée se disperser et ceux-ci rompre les rangs, 6172 p. p. : dégradant, immoral, 6521 Despartir, voir Departir Despecier, voir Depecier Despendre : vb. trans. dir. : dépenser, 13361, 13424, 19746 vb. trans. ind. : payer, 378 Despendre : vb. trans. dir. : expliquer (forme poitevine pour despondre)
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(a Thomas de Grantson fu le fait despendus) Le fait fut rapporté à Thomas de Grantson, 17281 Despit : adj. : misérable, 16507 Despit : s. m., (faire –) faire subir un afront, 6712, 9845, 20146 (en – de qqun) avec l’intention de provoquer qqun, 14423, 20726 Despiter : vb. trans dir. : déier, 3676, 14498 vb. trans. dir. : maudire ?, 14623 p. p. : méprisé, traité avec dédain, 6763 Despris : p. p. : dépouillé (et tellement du sien despris) et dépouillé de tous ses biens, 18794 Desquicler, voir Decliquier Desraé : adj. : égaré, 11270, 11843 adj. : farouche, 18122 Desrainier : vb. trans. dir. : défendre, 6986, 17395 (Charles de Bloiz pour son droit desrainier) Charles de Blois pour défendre son droit, 5421 vb. trans. dir. : expliquer, 17412 vb. trans. ind. : s’entretenir (il est venu a vous parler et desrainier) il est venu s’entretenir avec vous, 9921 Desraison : s. f. : folie, 12738 Desranger : vb. trans. dir. : renverser les rangs de l’adversaire (s’en vont vers Espaignolz a force desranger) ils se dirigent vers les Espagnols pour renverser bon nombre de leurs rangs, 11803 Desreé : adj. : égaré qui se trompe de voie, 3004, 14819 Desreer : vb. pron. : se séparer, 19002 Desreiglé : adj. : anormal ? (il ne fait a nul mal ne chose desreiglee) il ne fait de mal à personne, 277 Desrobé, voir Derobé Desrubent, voir Derubent Desrué, (derué) : adj. : qui a perdu le sens de l’orientation, 3800, 11210, 11272, 11306, 11941 (d’une chiere –) à la manière d’une bête sauvage qui a perdu le sens ? (voir la comparaison avec un chien de chasse au vers suivant), 6080 adj. : qui a perdu la raison, 14804, 15807, 16755, 16769 Desruerie* : s. f. : outrage ? (oncques bastart ne i si grande desruerie) jamais un bâtard ne it un outrage si grand, 10533
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Desseger, voir Dessegier Dessegier, (desseger) : vb. trans. dir. : libérer d’un siège (s’en vont pour les chasteaux pour Englois dessegier) ils s’en vont pour libérer les châteaux de leur siège pour le compte des Anglais, 17777 (ou Roche Sur Ion ilz iront dessegent) ou bien ils iront libérer la Roche-sur-Yon de son siège, 21014 Dessembler : vb. trans. dir. : séparer, 18858 vb. pron. : se séparer, 6093 Dessevrer, voir Descvrer Dessirer : vb. trans. dir. : grifer, 14897 p. p. : vêtu de guenilles, 221, 14005 (quant Bertrant revenoit de celle compaignie navré et dessiré) lorsque Bertrand quittait sa troupe et rentrait blessé et les vêtements déchirés, 199 Dessolé : p. p. : déferré (que dessolé en sont .iic .) que deux cents d’entre eux furent déferrés, 17909 Dessus : prép., (estre au – de qqch) avoir qqch sous sa domination, 12422, 19897 (– la nuit) pour toute la durée de la nuit ? (et que dessus la nuit fu sa gent houstelee) et que son armée fut hébergée pour la nuit, 18423 Destasser : vb. trans. dir. : disperser (du fain destasser chascun moult bel s’arroye pour restraindre le feu) chacun se prépare à disperser le foin ain de contenir l’incendie, 19439 Destinee : s. f., (a bonne –) à la bonne heure, 280, 13728 (par male –) d’une manière dommageable, 4786, 9337 (par quelle –) par quel moyen, 5031 (par telle – que) de telle façon que ?, 9769, 12456, 12590, 17614, 20509 Destoquer* : vb. intr. : se disperser ?, forme pour destochier (et se tenent serréz, ne destoquent mie) ils se tiennent serrés, ils ne se dispersent pas, 16117 Destornement : s. m. : endroit éloigné, 1145 Destorner : vb. trans : dissuader (Ne me vien destornant) ne cherche pas à me dissuader, 2357 Destors : p.p. : déplié, 20172 Destourbance : s. f. : dommage, 4611 Destourber (vb.), voir Destoubier, (vb.) Destourber, (destourbier) : s. m. : contrariété, 2916
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- Glossaire -
s. m. : dommage (quant pour nous deux fauldra avoir tel destourber) qu’il faudra pour nous deux subir tant de dommages, 5444 s. m. : tourment, trouble, 3324, 7690, 7703, 19228 Destourbier (s. m.), voir Destourber, (s. m.) Destourbier, (destourber) : vb. trans. dir. : contrecarrer (pour avoir alïence pour France destourbier) : ain de sceller une alliance qui mettra à mal le royaume de France, 9733 p. p. : troublé, 19122, 19123 Destourner (– qqch a qqun) voler qqch à qqun ? (pour un bastart m’avéz ma terre destournee) vous m’avez volé ma terre pour le compte d’un bâtard, 11835 Destrier : vb. trans. dir. : troubler, 3207, 7641 vb. pron. : se détourner, 5128, 13169, 15911 Destroi : adj. : triste, 4071, 15194, 15204 Destroit : adv. : avec autorité, fermeté, 224 Destroit : s. m. : recoin, 1144 s. m. : détresse, tourment, 5607, 5616, 18557, 20318 s. m. : sommet ? (voir note) (or se sont avaléz les Anglois du destroit) les Anglais ont dévalé la montagne, 4435 Desvé : adj. : décousu, 270 adj. : égaré, 9543 Desveer, voir Deveer Desviter* : vb. trans. : couper en morceaux (de desbiter ?) (en l’eure incontinent sa robbe desvitoit) il découpait sur le champ sa tunique, 306 Detirer : vb. trans. dir. : tirer, 7838 (– a chevaux) écarteler à l’aide de chevaux, 887 Detrenchier : vb. trans. dir. : abattre ? (d’une cugnie iert sus les bailles roiaux et lé it detrenchier) à l’aide d’une hache il frappa sur les fortiications et les abattit, 3115 vb. trans. dir. : trancher, 4940, 5219 Detrie (sans faire nul –) sans tarder, 7439 (sans –) sans délai, 21518 Detriement : s. m. : délai, 1671 Detrier : s. m. : délai, 5460 Detrier : vb. trans. dir. : retarder, 12380, 14296
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(– qqun de qqch) empêcher qqun de qqch, 14744 vb. trans. ind. : se détourner de qqun, 13172 vb. trans. : (– qqch a qqun) enlever, retirer qqch à qqun, 10516 vb. intr. : tarder, traîner (rem. DMF : vieilli au XVe siècle), 728, 16705, 16898, 17780, 21221 vb. pron. : s’arrêter ?, 2903, 15421, 17009 vb. pron. : se séparer, 985 vb. pron. : tarder, 7164, 12389 Detry : s. m. : délai, 1636, 1652, 5226, 11098, 11906, 13989, 15638, 16289, 17749, 19659 Deuement : adv. : dûment, 8535, 10907 Devaler : vb. pron. : descendre, 14363 Devant : adv. : auparavant, 1190, 4916, 6905, 9514 (aller –) avoir la prééminence, 578 (au temps cy –) auparavant, 5763 (au temps de –) au temps jadis, 3927 (de – et derrier) en tous lieux, partout, 3516 (par –) auparavant, 5790 (trop plus que –) bien plus qu’auparavant, 4927 (venir – a qqun) attaquer qqun, 7729 Devant : prép. : avant, 9492 Deveé (jour –) jour de trève, 21289 Deveer : vb. trans. ind. (deveer a qqun) : défendre qqun, 7874 Deveer, (desveer) : vb. trans. ind. (deveer a qqun) : défendre qqun vb. intr. : refuser, 430, 8132, 9458, 12120, 15593 (jour –) jour maudit (Mais Bretrant s’avisa a ce jour proprement qu’il estoit deveéz contre lui durement) mais Bertrant se rendit compte que ce jour-là ne lui était en rien favorable (selon la prophétie de sa femme), 6194 Devier : vb. intr. : mourir (comment Pietres fu pris, commment il devia) comment Pietres fut capturé et comment il mourut, 16350 Devin, voir Deviner Deviner : vb. intr. : raconter, forme p1 ind [devin], 6573, 8348 Devis : s. m. : avis, 2075, 16484 (a son –) à sa guise, 3715, 4956, 5353, 8278, 9592, 9937, 10195, 12544, 18070, 18073, 18249, 18878, 18907, 19545, 20140 s. m. : discours, 18903
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Devise : s. f. : coutume ? (Entre ceulx du chastel et de la ville aussi avoit une devise) les habitants du châteaux et de la ville avaient une coutume, 14322 Devisee, (divisee) : s. f. : récit, 4222, 4787, 5045, 6645, 8757, 9335, 10075, 12588, 20482 (a sa –) à sa volonté, 9792 Deviser (faire –) faire tracer les plans vb. trans. dir. : répartir, 4126 Deviser, (diviser) : vb. trans. dir. : (– une lectre) rédiger, 4869 (– le jour) ixer une date, 9435 vb. trans. dir. : décider, 16786, 20127 vb. trans. ind. : parler à, 19872 vb. trans. : dire, 1592 vb. trans. : penser, envisager, 108, 8326, 12348, 21153 vb. trans. : raconter, 616, 820, 2926, 3360, 3742, 5778, 7835, 7968, 8854, 8859, 9022, 9191, 9595, 16163, 16240, 16836, 17761, 18242, 20076, 20441, 20575, 21436 vb. intr. : discuter, 5147, 16653 vb. intr. : raconter, 19001 vb. pron. : discuter, 15717 vb. pron. : se parler, 20836 (faire –) faire tracer les plans, 2802 Devision, voir Division Devist : s. m., (a son –) à son gré, 612 Devocion : s. f. : désir, envie, 2938, 6837, 7076, 12618, 12740, 13705, 14249, 15325, 15343, 16720, 16941 Devoir : vb. trans. dir. : imposer qqch (il y trouveroit maintes bestes sauvages car le lieu le devoit) il y trouverait de nombreuses bêtes sauvages car le lieu l’imposait, 9131 vb. trans. : signiier ? (je ne sais que ce doit) je ne sais pas ce que cela signiie, 11512 vb. intr. : exiger ? (je seray bien paié et devray assez) je serai bien payé et exigerai beaucoup (d’argent ?), 14276 vb. pron. : être redevable ? (or me doys tout partout ou je doys regarder) je dois être redevable de tout ce que je vois autour de moi, 15062 Devorer : vb. trans. dir. : attaquer une proie, 5565
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vb. trans. dir. : tuer (car son frere le roy tua et devora) car il assassina son frère le roi, 7405 Dex : s. m., (ne doubter qqch la montance de deux –) ne pas du tout craindre qqch, 3143 Diappre : s. m. : drap de soie, 16489 Dignement : s. m. : dignité, 16871 Digner : s. m. : dîner, 8847, 9865, 17594, 17613 Digner : vb. intr. : dîner, 2894, 5311, 7320, 9436, 12704, 13285, 14119, 14190 (– sur soy) prendre son dîner sur ses genoux ?, 14844 p. p. : reçu à table avec faste, 7363 Digner : vb. trans. dir. (– + inf.) consentir à, accepter de, 16035 (– a qqun qqch) traiter qqun de qqch, 3329 (– cuer) parler en toute franchise, 15075 (– de) parler de, 9400, 11276, 12266, 15097 (Dy va) : allons, interjection, 14431, 14804 (– en confession) s’adresser à qqun en toute conidentialité, 12295 (oncques n’oÿ compter que Bertrant se dignast de place distorner) je n’ai jamais entendu dire que Bertrant avait consenti à abandonner le lieu du combat, 4394 vb. trans. ind. : parler à qqun, 11949 vb. intr. : oser ? (je croy ne dignerréz) je crois que vous n’oseriez pas, 3062 vb. intr. : parler, 1575, 3559, 5417, 8252, 10934, 11535, 11590, 11788, 12210–12212, 12439, 12710 Dimee : adj. : demie (dimee lieue) demie lieue, 21111 Dire : vb. trans. dir. : prédire ? (Vous me disoiéz trés bien ce grant encombrement) vous m’aviez prédit précisément ce grand malheur, 12188 Discencion, voir Discension Discension, (discencion) : s. f. : désacord, discorde, 3652, 6387 (nous mectrons a paix ceste distension) nous règlerons ce désacord, 2424 Discorder : vb. trans. dir. : être en désacord avec qqun (et que vostre conseil soions discordé) et que nous soyons en désacord avec votre aseemblée, 8600 Disnee : s. m. : repas du milieu du jour, 11457 Dissolu : adj. : dépravé, débauché, 8361
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Distorner : vb. trans. dir. : quitter, s’éloigner (oncques n’oÿ compter que Bertrant se dignast de place distorner) je n’ai jamais entendu dire que Bertrant avait consenti à abandonner le lieu du combat, 4394 Dité : p. p. : dicté, 13882 Ditresse : s. f., (sans faire –) sans se faire prier ? (ne m’aléz gignant car sans faire distresse je diray en oyant) ne me torturez pas, car sans me faire prier je dirai à voix haute, 10262 Diver : adj. : mauvais (ne fu si divers temps) on n’avait jamais vu un aussi mauvais temps, 17840 Diviner : vb. trans : parler de qqch à propos de qqun (Mais s’il vouloit sur moy riens diviner que j’aye chose faite dont je face a blasmer) s’il veut raconter à propos de moi que j’ai commis un acte dont je serais à blâmer, 2279 Divisé : adj. : ixé, décidé ?, 1919 Divisee, voir Devisee Divisement : s. m. : condition, 8529 Diviser, voir Deviser Division, (devision) : s. f. : désir, volonté, 1828, 2617, 2887, 4334, 5025, 7587, 7929, 8583, 10387, 11164, 12916, 13801, 13919, 15651, 15666, 16013, 16026, 17238, 17245, 19698, 20158, 20171, 21261, 21612 (a sa –) à sa guise, 4000 (par tel –) en telle manière, 4720, 14601, 21610 s. f. : discours, 4386, 15685 Doctrin : s. m. : demande ? (de vendre son chastel lui faisoit maint doctrin) il lui demanda de nombreuses fois de vendre son château, 20984 Doctriner : vb. trans. ind. : instruire, 1603, 5656, 9067 vb. pron. : s’instruire, 18927 p. p. : instruit, 7479 Doler : vb. intr. : plaindre, 12316 Doloir : vb. pron. : se plaindre, 10489 Dominacion : s. f., (estre en – a) être en possession d’un territoire ? (estre en – pour) accroître, donner plus de prestige à qqch ? (c’est huy pour mon honneur en dominacion) aujourd’hui, ceci ne fait qu’accroître mon honneur, 11392 (mectre qqun en –) placer qqun au pouvoir ? (mectront vostre frere en dominacion) ils placeront votre frère au
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pouvoir, 8884 (qui estoit a Bourdeaux en dominacion) qui était en possession de Bordeaux, 6470 (revenir en –) revenir au pouvoir ? (car encores reviendréz en dominacion) car vous reviendrez de nouveau au pouvoir, 8904 Dommage : s. m, (c’est – dont) : c’est un grand malheur que, 15086 Dommegier : vb. intr. : causer du tort, 5212 Domon*, (dromon) : s. m. : navire rapide, 15019, 15323, 15523 Don : s. m. : somme d’argent ?, 13488 s. m. : montant ? (et quant je aray oÿ la demande et le don) et quand je saurai la demande et le montant, 13500 Donnee : s. f., (faire la – de qqch) faire don de qqch, 9794 Donner : vb., (– de) pousser à (Henry lui a donné du – hardement) Henry le pousse à se comporter vaillamment, 15886 Doncques : conj. : donc, 4121 Dont : adv. : d’où, 223, 13040 adv. : ensuite ?, 7813 Doresmais : adv. : désormais, 15985 Dormant : s. m. : sommeil, 889 Dos : (au –) à proximité (avoir le – tourné) : être parti (que sans estour livrer n’aient le dos tourné) qu’ils ne s’en aillent sans livrer bataille, 21145 (bien les arrouta une rivere au dos) il les rassembla à côté d’une rivière, 11580 Double : s. m. : monnaie valant deux deniers, 13523, 13528, 13534, 13560, 13577, 13619, 13628, 13633, 13727, 13731, 14038 Doubletin : adj. : doublé, 20992 Doublier : adj. : à double tissu de mailles, 5818 Doubtance : s. f. : crainte, 1134, 21764 Doubtant : adj. : craintif, appeuré, 2453, 10305 Doubte : s. f. : crainte, 3136, 5653, 13490, 18142, 18328 Doubté : adj. : craint, redouté, 2997, 5899, 7372, 7673, 9275, 10213, 10216, 13075, 15385 (faire chiere –) se montrer redoutable, 4273
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Doubter : vb. trans. dir. : craindre, 16, 2155, 2849, 3139, 3143, 3926, 4420, 6966, 7107, 7135, 7486, 7880, 7892, 7916, 8101, 8331, 8411, 10013, 10550, 11154, 12583, 13492, 14200, 14593, 15624, 15665, 15918, 18157, 18598 (faire a –) : être redoutable, 1591, 2403, 5075, 5537, 6180, 6369, 7917, 9097, 9849, 9886, 11868, 11885, 13276, 16265, 17889, 18289, 18668, 18680, 18694, 21050, 21063 (se – que) redouter que, 9513 vb. intr. : avoir peur, 4460 vb. pron. : s’inquiéter, 1719, 3727, 5793, 5997, 6350, 6680, 9405, 9498, 10175, 10178, 13979, 14678, 15862, 15895, 18154, 18595 vb. pron. : (se – de qqun) avoir peur de qqun, 5481 Doué : p. p. : doté (de cest an n’en sera le roy Charles doué) le roi Charles ne recevra aucune rémunération cette année, 19683 Doulant : s. m., (faire le –) jouer l’homme plaintif (oncques, se croy, nul homme ne it si le doulant) jamais, je crois, aucun homme ne feignit aussi bien la douleur, 1289 Doulcement : adv. : avec tendresse, 8109 adv. : de manière agréable, 15505 Doutablement : adv. : avec crainte, 15318 Doys : s. m. : trône, 15227 Doys : s. m., (tenir qqun parmy les –) tenir la main à qqun ? (lors vindrent pucelles tenant parmy les doys) les jeunes illes arrivèrent en se tenant par la main, 15222 Drap : s. m. : vêtement, 171, 6252, 8828, 19520, 19559 Droit : adj. : juste, vrai, 3413, 5906, 15095 (aler –) dire vrai ? (Bertrant, vous aléz droit) Bertrant, vous dites vrai, 13482 Droit : adv. : précisément, 4047, 9538 (estre sur le –) estre juste, conforme au bon droit ? (Se ce fust sur le droit, vous avéz bien conquis) si ceci avait été conforme au droit, vous auriez mener une belle conquête, 9938 adv. : immédiatement, 7121 Droit : s. m., (a –) à juste titre, 9289 (de son –) selon les règles en vigueur ? (estoit Cordes nommee adont de son droit) (la ville) était appelée Cordes en ce temps là selon l’usage de l’époque, 9125
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(estre de –) estre juste, conforme au bon droit, 7790 Droitement : adv. : exactement, 11153, 11782, 13853 adv. : directement, 12390 Droiture : s. f. : bon droit, 3371 s. f. : justice (droiture si octroye) il n’admet ici que la justice, 4946 Droiturer, (droiturier) : adj. : juste, 3531, 7790, 12487, 12511, 12656, 13610, 14095, 17411, 17418, 17432, 17774, 20927, 21175, 21556, 21577 (seigneur –) souverain légitime, 9005 adj. idèle ? (Au besoign cognoist on son ami droiturer) on reconnait ses amis idèles lorsqu’on est dans le besoin, 18728 Droiturer, (droiturier) : s. m. : le bon, 2554, 5804, 7689, 9755, 11986, 14074, 16994, 17542, 17789 Droiturier, voir Droiturer Dromon, voir Domon Dru : adj. : vigoureux, 8358 Dru : adv. : fréquemment, 156 Dru : s. m. : ami, 8353, 17282 Druerie : s. f. : amitié, 11493, 21497 (faire sa –) contribuer à son plaisir ?, 8568 (par –) en grande amitié (emploi ironique dans ce vers) ?, 11640 (par fait de –) en échange d’une compensation ? voir note (non s’il ne le faisoit par fait de druerie) sauf s’il le fait contre de l’argent, 8570 Discort : s. m. : désaccord, 2042 Dueil : s. m. : tristesse, chagrin, 4619, 4860 s. m. : colère, 19841 Dure : adj., (eave –) eau qui permet le passage de l’armée ?, 4131, 4470 Duree : s. f. : vie, existence, 268, 279, 428, 433, 1490, 1921, 1925, 6525, 6528, 7855, 9346, 9771, 9777, 15575, 18472 (a la –) continuellement ? (Et si voulent ainsi ouvrer a la duree) et s’ils veulent agir ainsi sans discontinuité, 8340 s. f. : longueur ? (de trois leues et plus avoit l’ost duree) l’armée s’étendait sur plus de trois lieues, 10953
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s. f. : somme d’argent ? (Mais encores me fault il autelle duree) mais j’ai encore besoin d’une pareille somme d’argent (pour payer la rançon), 13729 Durement : adv. : intensément, 830 adv. : énormément, 5262, 8099, 8293, 10033, 10444 Durer : vb. trans. ind. : résister, 21137 (– contre qqun) résister à qqun, 19576 (– encontre qqun) résister à qqun, 19803 (– fortuneeement a qqun) être défavorable à qqun ?, 13009 vb. intr. : résister, 11307, 19451, 19462, 20041, 20401, 20814, 21475 vb. intr. : vivre, 1528, 6546, 8039, 8970, 9674, 15086, 16294, 18227, 19458 Dy : s. m. : jour, 110, 527, 4856, 15643, 16239, 20626 Eave (– courant) eau tumultueuse, 59, 9204 Eave : s. f., (– courant) eau tumultueuse (– dure) eau qui permet le passage de l’armée ?, 4131, 4470 Edeffié : p. p. : renforcé (un bâtiment) ? (la ville ont bien fermé et bien edeiee) ils ont bien fortiié et consolidé la ville, 8504 Efforceement : adv. : avec violence, 2061, 11437, 11769, 15289, 18777, 19103 Efforcement : s. m. : force armée, 12183, 12224, 13129, 13466, 15314, 15319 (a grant –) à grands renforts ? (le secours venist a grant eforcement) le secours arrivait à grands renforts, 1336 (par son –) en employant toutes ses forces, 2065, 19364 Efforci : adj. : violent, 10066 adj. : puissant, 17477 Effort : s. m. : troupe, armée (et de l’efort qu’il va amenant avec luy) et de l’armée qu’il amène avec lui, 15610 Effraer, voir Esfraer Ehardre : vb. trans. dir. : saisir vivement (a deux brasz l’ehardy) il le saisit des deux bras, 4745 Ehur, voir Heur El : adv. : autrement, 19604 Elle : s. f. : aile, 11383, 21207, 21378, 21396, 21403, 21405
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Embarré : p. p. : enfoncé, 19353 Embatre : vb. pron. : se jeter, s’engager, 4611, 11097, 15977 Emblant : adj. : qui va à l’amble, au trot, 9568 Embler : vb. intr. : voler, 7263, 7571 (et absolucion vous iray impectrer de touz voz pechiéz de tuer et embler) et vous irez chercher l’absolution de tous vos péchés de meutre et de vol, 7238 Embracer, voir Embracier Embracier, (embracer) : vb. trans. dir. : saisir, 6027, 14930 Embrucher, voir Embuscher Embusche : s. f. : embuscade, 4779, 14361, 14535, 14701, 15732 s. f. : cachette, 14921, 14926 Embuschement : s. m. : embuscade, 4977, 14864 Embuscher, (embrucher) : vb. trans. dir. : cacher, 14923 vb. intr. : cacher, 14699 vb. intr. : se cacher, 15708 vb. pron. : se cacher, 748, 3725, 11190 (aussi basse la font et s’embruchent deriere) ils font proil bas et vont se cacher, 21182 Emchasser : vb., (poindre d’–) piquer des éperons, 949 Emcombrier, voir Encombrier Emer* : vb. trans. dir. : dénombrer (L’ost dam Pietres ont trouvé, bien fu qui les ema) ils ont trouvé l’armée de dam Pietres ; celui qui peut les dénombrer est très fort, 15707 Emforcier, voir Enforcer Emmy : adv. : pendant (je l’ay ainsi songié emmy en mon dorman) je l’ai rêvé pendant mon sommeil, 889 Empainte : s. m. : assaut, 15508 Emparlé, voir Enparlé Emparler vb. trans. dir. : adresser la parole, 21700 vb. trans. ind. : interpeler (Il est venu a lui ierement emparlé) il est venu l’interpeler violemment, 2154 Empectrer, voir Empetrer Emperere : s. m. : empereur, 6481 Emperour : adj. : souverain ?, 19319 Empeschement : s. m. : obstacle, 8517, 15507
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Empetrement : s. m. : requête pour obtenir une aide militaire ?, 15312 Empetrer, (empectrer) : vb. trans. dir. : rendre ? (– qqch à qqun) causer qqch à qqun ? (Bien cuidoit le roy Pietres empetrer vilonnie au noble roy Henry) le roi Pietre croyait bien causer du tort au noble roi Henry, 16394 vb. trans. dir. : obtenir (grace te empetreray) j’obtiendrai ta grâce (auprès du roi), 10307 vb. trans. dir. : tenter d’obtenir qqc. à la suite d’une requête (car un secours s’en va aus paiens empectrer) car il va tenter d’obtenir du secours auprès des païens, 15106 vb. intr. : obtenir (et je iray empetrer tant que) et j’irai obtenir tant de chose que, 12836 Empirer : vb. trans. dir. : blesser, 953, 4524, 6176, 10414, 10962, 13316, 13802, 17548, 18716, 18721, 20136, 20410, 20805, 20933 vb. trans. dir. : endommager, 3565, 13096, 16069, 18741 vb. trans. dir. : faire du tort (le grant n’y empira) il ne it ici aucun tort aux meilleurs, 18269 Emploier : vb. trans. dir. : asséner (Tellement y a fait son grant cop emploier que) il lui assène un si grand coup que, 6025 (–qqch en qqun) destiner qqch à qqun (car l’oice ne puet meulx estre emploïe en chevalier qui soit en cest mortel vie) la tâche ne peut mieux être attribuée à un chevalier qui soit en ce monde, 16910 Empoesti : adj : puissant (dérivé de poestif ?) (Grant fu ceste guerre et moult empoestie) cette guerre fut grande et intense, 2726 Emprandre, (emprendre) : vb. trans. dir. : entreprendre, 643, 5279 (– la voye) prendre la route, 7456 (– que+inf ?) décider que ? (que sur les Sarrazins aquerre sauvement avoions en noz propos enprins parfectement) nous avions justement décidé lors d’une discussion d’obtenir le salut de nos âmes sur les Sarrasins, 13449 Emprés : adv. : ensuite, 12602 Emprés : prép. : prés de, 5737, 9149, 18121, 18362 Empris : s. m., (estre de grant –) être de grande valeur ? (tant fu de grant empris et garny de chasteaux) (la Bretagne) était d’une très grande valeur et remplie de châteaux, 597
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Enamer : vb. trans. dir. : se lier d’amitié avec qqun, 4855 Enbourcer : vb. trans. dir. : empocher, 5109 Encaucher, (enchausser) : vb. trans. dir. : poursuivre, 2494, 16190 Enceller : vb. trans. dir. : seller, 2886 Encesserie : s. f. : ascendance, 3442 Enchanter : vb. trans. dir. : tromper, 21075 (mais Bertrant dont je vous di les a si enchantéz que) mais Bertrant dont je vous parle les a tant dupé, 1091 p. p. : ensorcellé, 16793 p. p. : trompé (Sire, nous sommes enchanté) Sire, nous nous sommes fait avoir, 14165 Encharger : vb. trans. dir. : porter (sans nulle armeure vestir ne encharger) sans revêtir ni porter une armure, 2911 vb. trans. : supporter (Vous avéz huy pour moy grande peine enchargie) vous avez supporté aujourd’hui pour moi bien des tourments, 11489 Enchasser, (enchassier) : vb. trans. dir. : pousuivre, 971, 1867, 15180, 16194 vb. trans. dir. : chasser, 6995, 7781, 10406, 16032, 21485 p. p. : chassé, 9344 p. p. : chassé, 8751 Enchassier, voir Enchasser Enchausser, voir Encaucher Encherir : vb. trans. dir. : aimer, 16288 Enclin : adj., (estre – de) être disposé à, 6594 (estre – a) être soumis à (et fu Espaigne encline a ce conte Henry) et l’Espagne fut soumise à ce comte Henry, 6607 Enclinee : s. f., (faire –) saluer, s’incliner en signe de respect, 421, 12601, 13711 Encliner : vb. trans. dir. : saluer respectueusement, 7724 (s’– en la terre) tomber au sol, 5566 vb. trans. dir. : saluer respectueusement, 10477, 12841, 12977, 13405, 13719 vb. trans. ind. : s’allier à qqun ? (vousistes au fort roy d’Angleterre encliner) vous aviez voulu vous allier au puissant roi d’Angleterre, 20380 vb. pron. : s’incliner en signe de respect, 7174, 7722, 10482, 14126, 18939,
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18940 vb. pron. : se pencher, 12786, 18926 (et dit le roy Henry qui se volu encliner) le roy Henry dit tout en se rapprochant de son interlocteur (ain de ne pas être entendu par les autres), 12698 Enclois : p. p. : assiégé, 1067 Encloure : vb. trans. dir. : encercler, 4788 p. p. : encerclé, 972, 2489, 14364 Encloÿrent, voir Encloure Encombrement : s. m. : malheur, 2027, 3850, 8515, 12188, 13026, 14436, 15783 s. m. : dommage, 5921 s. m. : ennui, 7054 Encombrer, voir Encombrier Encombrier : vb. trans. dir. : accabler, 14408 Encombrier, (emcombrer, emcombrier) : s. m. : malheur, soufrance, 1696, 5806, 6870, 9756, 10409, 14089, 17772, 18046, 20941 (mettre qqun en mortel –) mettre qqun en danger de mort ? (L’avangarde fu mise a mortel encombrier quant) l’avant-garde était en danger de mort quand, 14935 Encontre : prép. : à l’égard de, 4025 (bien furent .iim. arméz encontre lui) ils étaient bien deux mille à s’être armés pour lui, 14851 prép. : contre, 5240 Encontremont : adv. : en haut, 3162, 3175, 19444 Encontrer : vb. trans. : attaquer, 2149, 10120, 14878 Encore : adv : longtemps, 126, 131 (Et se j’ay fait des maulx, bien vous pouéz compter d’estre mes compaignons encores de passer) si j’ai commis des crimes, vous pouvez bien espérer être mes compagnons de voyage pour longtemps, 7251 adv. : avant la in de, 19748 adv. : à ce moment là, 7531 Encreté : adj. ier, 2140 Encroer, (encroier, encroyer) : vb. trans. dir. : pendre, 10925, 13181, 14422, 18105, 18649, 19316, 19473, 19508, 19915, 21682 p. p. : installé en hauteur (ne chastel ensuyvent ne tour hault encroee) ni une tour haut perchée, 8343
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Encroier, voir Encroer Encroyer, voir Encroer Endoctrniné : adj. : élevé, 1615, 8756 (estre bien – de qqch) estre bien instruit de qqch, 13383 Endoctriner : vb. trans dir. : informer, mettre au courant, 2205, 15378 Endormyr : vb. trans. dir. : assomer (tellement l’endormy ... que oncques puis ne se leva) il l’assoma si fort que jamais plus il ne se releva, 963 Endroit : adv. : ici-même, 3594, 3706, 4619, 9286, 9615, 10044, 10202, 14171, 14700, 14886, 14901, 19228, 19795 (en touz –) en toutes choses, 6510 Endurer : vb. trans. dir. : entretenir ? (bonne table tenir, bonnes gens endurer) ofrir de bons repas, entretenir mes bons vassaux, 15071 Enfançon : s. m. : enfant, 7264, 13918 Enfentement : s. m. : accouchement, 8115 Enfermer : vb. trans. dir. : recouvrir entièrement (et les mist es chemins et son ost enferma) il les mit au milieu des chemins et recouvrit son armée, 13229 vb. pron. : (s’– un lieu) assiéger un lieu ? (roy Henry s’enferma la cité de Toulecte) le roi Henry assiégea la cité de Tolède, 13234 Enferrer : vb. trans. dir. : transpercer d’une arme, 13160, 21327 p. p. : enchaîné, 14012 Enffler, voir Enler Enflember : vb. trans. dir. : enlammer, embraser, 10109 Enfler, (enler) : (avoir la teste –) être gonlé de colère (que ne prenéz le vin, j’en ay la teste enlee) cela me met en colère que vous ne buviez pas de vin, 19496 (estre – de) être plein de, 19841 Enforcé : adj. : fortiié, 3064 Enforcement : s. m. : renfort, force armée, 13030 Enforcer : vb. trans. dir. : fortiier, 3817, 3904, 3922, 3962, 4014 Enforcer, (emforcier, enforcier) : vb. trans. dir. : fortiier vb. trans. dir. : rendre plus puissant, 5440, 14919, 15496, 19973 vb. intr. : se renforcer, 4677, 19289 Enforcier, voir Enforcer Enfusté : p. p. : engourdi, 13409
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Engendrement : s. m., (faire – de) donner naissance à, 8110 Engigné : p. p. : trompé, 19055 Engignerie : s. f. : tromperie, ruse, 10497 Engin : s. m. : machine de guerre, 1191, 2122, 3390, 3704, 3874, 5042, 5046, 5118, 5120, 13767, 15165, 17078, 17081, 18147, 21550 (– gictant) machine de guerre qui lance des projectiles sur l’ennemi ?, 8183 (gicter pierre d’–) catapulter des blocs de pierre à l’aide de machines de guerre ?, 5039 (lever –) mettre en place des machines de guerre, 13742 Enginement : s. m. : ruse, 3691 Engrant : adj. : empressé, 8190 Enhanter : vb. trans. dir. : garnir d’un manche, 17673 Enhaÿr : vb. trans. dir. : prendre en haine, 2810, 13188, 15191, 20741 Enherbé : p. p. : empoisonné (Doubtéz vous que vostre char ne soit cy enherbee) craignez-vous que votre nouriture soit empoisonnée, 19497 Enherdre : vb. trans. dir. : saisir (enherdy le faulx roy ierement par les lans) il saisit le cruel roi par la taille, 16411 Enhorter : vb. trans. dir. : réveler, 16325 Enjamber* : vb., (– sur qqun) empiéter sur le territoire de qqun, 19953 Enloigner : vb. pron. : se détourner, 6653 Enluminer : vb. trans. dir : répandre sa lumière sur, 12302 p. p. : orné (une bonne chansson de bien enlimunee) une chanson de valeur parée d’honneur, 4220 Ennemy : s. m., (estre –) être contre qqch ? (Dont furent les bourjois touz a un conseil pour trouver cel avoir, mais il fu ennemy) les bourgeois se rassemblèrent en un conseil ain de trouver l’argent, mais ce conseil fut contre cette idée, 7597 (c’est bien l’–) c’est le contrairemble (idée de ce qui est contraire à l’entendement ?), 13575 Ennoier, voir Ennuyer Ennoy : s. m. : trouble, ennui, 5612, 13000 Ennuyer, (ennoier) : vb. trans. ind. : ennuyer, 5983 vb. trans. ind. : tourmenter, 2821, 2856, 9323 vb. impers. : peiner, aliger, 6319 vb. impers. : être impatient
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(Et véz cy Bertrant, a qui moult ennuya) et voici Bertrant qui brûlait d’impatience, 2221 Ennuyeux : adj. : désagréable, 117 Ennuyt : adv. : le jour même, 399, 867, 915, 1324, 4535, 5638, 15344, 16821 Enparlé, (emparlé) : adj. : à l’aise avec la langue, 1307, 14059, 17587 Enpenné : adj. : décoré d’une plume, 5657 adj. : qui a des ailes, 14974 Enpenser : vb. trans. dir. : projeter, penser, 15821 Enpoindre : vb. trans. dir. : frapper, 18846 Enpoint : s. m. : assaut, attaque, 21338 Enppresent* : adv. : en personne, présent ? (A certain jour nommé trouverent enppresent le bon du de Berry) à la date décidée ils trouvèrent présent le bon duc de Berry, 19085 Enprendre, voir Emprandre Enqui : adv. : maintenant, 21243 Enragerie : s. f. : rage, 992, 10490 s. f. : folie furieuse (provoquée ici par la faim), 14391 Enrichy : adj. : puissant ?, 20915, 20917 Ens : prép. : pendant, 8577 Enseigne : s. f. : cri de ralliement, 11642, 14362, 14671, 16102, 20687 (en trés bonnes –) avec certitudes ? (En trés bonnes enseignes vous porréz avancier que) vous pourrez avancer avec certitude que, 12882 s. f. : drapeau, 14657 Enseigner : vb. trans. dir. : annoncer, 21196 vb. trans. ind. (– de qqun) annoncer qqun, 9913 Enseller : vb. trans. dir. : harnacher, seller, 6818 Ensement, (ensuyment) : adv. : de cette façon, 364, 394, 4871, 5926, 6669, 7881, 9329, 9384, 9721, 10049, 10423, 10543, 11325, 11788, 11861, 13247, 14171, 14272, 18859, 19098, 20567, 21307 (– comme) en même temps que ? (Ensement comme le Besgues fait pendre celle gent) au moment où le Besgues fait capturer ces soldats, 14424 (– que) alors que, 2944 (– que) de la même manière que, 2556 (– que) en même temps que ? (Ensement que Bertrant fu en la court alé) pendant que Bertrant fut parti à la cour, 14261
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adv. : également, de la même manière, 4290, 10443, 10515, 10833, 11289, 11333, 11433, 11456, 11595, 11633, 11741, 11762, 12117, 12190, 12411, 12804, 12940, 13115, 13121, 13439, 13471, 13558, 13632, 14528, 14752, 14959, 15313, 15536, 15628, 15766, 15844, 15869, 15976, 16608, 16859, 17671, 17702, 17967, 18641, 19117, 19380, 19789, 20534, 20562, 21444, 21480 (et mon pere ensement du service Charlon) et à mon père également du temps où vous serviez Charlon, 12166 adv. : également, 9676 Ensenchir* : vb. trans. dir. : embaumer ? (Et ceulx qui furent mors furent ensenchy) et ceux qui furent morts furent embaumés, 17137 Ensentir : vb. pron. : avoir conscience de (le jour que a cecy fait son corps s’ensenty) le jour où il s’en rendit compte, 2820 Enserchier : vb. trans. ind. : mettre en mouvement ? (grant ourgueil leur a fait enserchier) l’orgueil démésuré les a fait venir ici, 21201 Ensus : adv. : à l’écart, loin, 2510, 11761 Ensuyment, voir Ensement Ensuyvant : adj. : qui suit, à venir (garnie fu la tour pour un an ensuyvant) la tour fut pourvue pour l’année suivante, 3959 Ensuyvant, (ensuyvent) : adv. : ensuite, 2981, 3444, 3665, 3858, 4979, 5138, 5908, 6202, 6606, 7281, 7579, 7859, 8064, 8303, 8312, 8343, 8654, 9267, 9332, 9507, 11236 adv. : de cette manière, ainsi ?, 1480, 3559, 3882 adv. : également, 9216, 10564 Ensuyvent, voir Ensuyvant Ent : adv. : de ce lieu, 12797 (aléz vous ent) allez-vous en, 12939 Entailli : adj. : sculpté, 16403 Entalenté : adj. : plein d’impatience, 14492, 15794 Entencion : s. f. : opinion, 2415, 4319, 5012, 6854, 9688, 12417, 12429, 12620, 15669, 19707, 20369 (avoir – en qqun) avoir coniance en qqun ? (Et Dieu nous aidera, ou j’ay entencïon) et Dieu nous aidera, en qui j’ai coniance, 15678
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(par nulle –) : en aucun cas, 2417 s. f. : but, 1829, 2618, 7563 (en trés grant souspecton comment venir pourroit a son entencïon) en rélichissant à comment il pourrait atteindre son but, 12748 s. f. : disposition, 5966 s. f. : volonté, 12435 Entendement : s. m. : but, intention, 15294 Entendre : vb. trans. ind. : écouter, 17, 1310, 3723, 5687, 8403, 8911, 11532, 13751, 14264 (– que) comprendre, 3278 Entente : s. f. : intention, 795 (– onnye) conviction sans faille ? (ainsi bien comme je croy de vraye entente onnye que) aussi bien comme je crois avec une conviction sans faille que, 5413 Enterin : adj. : pur, irréprochable, 6572 Entesé : p. p. : tendu (les archiers tout devant, chascun l’arc entesé) les archers au devant, chacun avec son arc tendu, 21163 Entier : adj., (porter son nom –) : mériter sa réputation ?, 21213 Entierement : adv., (trestouz –) tous sans exception, 5295 Entonner : vb. trans. dir. : (– qqun de fait d’instrument) divertir qqun grâce à un instrument de musique ? (Ainsi font les adveugles et les pouvres truant de ce fait d’instrument les bourjois entonnant) les aveugles et les pauvres bandits divertissent les bourjois avec cette mélodie, 9993 Entortillie : s. f. : coup cinglant (de hastiers, de petaux ont mainte entortillie) ils donnèrent de nombreux coups de pilons et de brôches à rôtir., 976 Entouaillier : vb. pron. : se mêler (L’une bataille en l’autre s’est si entouaillie que) un bataillon s’est tant mélangé à l’autre que, 16122 Entour : adv. : à proximité, 2524 (– et environ) en tous lieux, 6832, 8883, 10873, 12412, 12606, 13484, 14597, 19693, 21604, 21616 adv. : autour, 3922, 12046, 13135 adv. : à proximité, 11263 Entraconter : vb. pron. : se heurter (puis s’en vont aus espoix entracontant) puis ils s’entrechoquent à l’aide
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d’épieux, 2501 Entremesler : vb. pron. : se mêler, 21414 (et eureux de ce dont se veult entremesler) et chanceux dans les afaires auxquelles il désire se mêler, 17898 Entreprendre : vb., (– un plait) engager un procès, 3462 (– qqun de) engager qqun à (Si ont les Sarrazins de combatre entrepris) ils ont engagé les Sarrasins à la bataille, 9598 (estre – d’un braf) être privé de l’usage d’un bras ?, 10167 p. p. : embarassé, 21371 Entrer : vb., (quant le temps enterra) quand le temps sera venu [enterra fut. ind. p3] (a l’– d’un lieu) au moment de pénétrer dans un lieu, 5768 Entrer : vb., (quant le temps enterra) quant le temps sera venu [enterra fut. ind. p3], 128 Entreulx (– que) pendant que, 19903 Entreulx : adv., (– que) pendant que, forme pour entruès (Cellui se prist a crier entreulx qu’il s’en alloit) celui-ci se mit à crier pendant qu’il fuiait, 252 Envaïe, voir Envaÿe Envaïr : vb. intr. : attaquer, 4693 Envaÿe, (envaïe) : s. f. : attaque, 956, 2742, 3153, 3866, 3867, 4188, 4652, 5395, 5751, 6106, 11214, 11478, 11490, 11645, 11982, 12022, 14394, 15954, 17107, 19198, 19210, 19985 Envenimé : adj. atroce (Vous en mourréz touz de mort envenimee) vous mourrez tous d’une mort atroce, 11836 Envie : s. f. : zèle (jousta a Bertrant aussi que par envie) qui afronta Bertrant avec autant de zèle (que Bertrant), 508 Environ : adv. autour, 10311 (entour et –) en tous lieux, 6832, 8883, 10873, 12412, 12606, 13484, 14597, 19693, 21604, 21616 Envis, (envys) : adv. : diicilement, 1718, 15133 (se tenir – de) s’abstenir de ? (se tiendront ilz de mal faire souvent) ils s’abtiendront souvent de mal agir, 7532 (voluntiers ou –) bon gré mal gré ?, 18061
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adv. : à contre cœur (Je le voldroie envis) je m’y accorde à contre cœur, 10179 Envoier : vb. trans. dir. : mettre en route, 14344 vb. trans. ind. (– a qqun) transmettre un message à qqun ?, 16878, 16884 Envys, voir Envis Equippolent : s. m. : équivalent, 1164 Erbour : s. f. : prairie, 16100 Erité, voir Herité Eritier, voir Herité Ermier : s. m. : or pur, var. orth pour ? ormier (Se Pietre eüst eu une dague a ermier) si Pietre avait eu une dague en or pur, 16555 Errament : adv. : aussitôt, 148, 163, 4991, 16601, 17066, 17798, 19083 Erramie, voir Aramie Errant : adv. : sur le champ, 10244 Errant : adv. :sur le champ, 1212, 1287, 9489, 10708, 14149, 15426, 16703, 17529 Errement : s. m. : erreur ? (Si lui pria mercy et lui dist son errement) il lui demanda pardon et lui confessa son erreur, 21104 s. m. : avis ? (oiéz mon errement) écoutez mon avis, 21119 Errer : s. m. : voyage, 18286 Errer : vb. intr. : faire du chemin, 15795, 21076 (– par dessus qqun) mener une campagne militaire contre qqun ? (que vous veilléz en riens par dessus moy errer) que vous désirez mener une campagne militaire contre moi, 12353 Errour : s. f., (estre en –) être en diiculté ? (qui menoit une guerre dont il fu en errour) qui menait une guerre qui ne tournait pas à son avantage, 16970 Esbahyr : vb. trans. dir. : efrayer, 3310 vb. pron. : prendre peur, 17965 vb. pron : s’étonner, 1635 p. p. : efrayé, 327, 2372, 4537, 4542, 5262, 6694, 9289, 15128 p. p. : pris de panique, 5238 Esbandyr : vb. pron. : se renverser, en parlant d’un liquide (forme pour espandyr ?) (le vin s’esbandy) le vin se renversa, 5258
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Esbanier : vb. pron. : se divertir, 2899, 13395 Esbanoy : s. m. : divertissement, 15229 Esbanoyer : vb. pron. : s’amuser, se divertir, 502, 2146, 3756, 5747, 6737, 13339 Esbat : s. m. : fête, 2596 (aller a l’–) aller librement ? (ains aloit a l’esbat de tout a son plaisir) au lieu de cela il allait librement tout à sa guise, 2817 Esbatant : adj. : joyeux ?, 2251 adj. : en mouvement ? (aussi tost qu’il s’esmeut et qu’il est esbatant) aussitôt qu’il bouge et qu’il s’en va, 3282 Esbatement : s. m. : bruit, tapage ?, 1337, 12590 s. m. : plaisir, 20727 Esbatre : vb. intr. : se divertir, 2893, 9210 vb. pron. : produire un divertissement, 9964 vb. pron. : se divertir, 13340, 16367, 17045 Esbaudir : vb. pron. : s’enhardir, 4690 p. p. : réjoui, 618, 15913 Escartelier : vb. trans. dir. : mettre en pièces, 16067 Eschaler : vb. trans. dir. : escalader, 5653, 18993 Eschalon : s. m. : escalier, 2616 Eschançon : s. m. : oicier chargé de servir à boire, 19281 Eschantillon : s. m. : pièce de bois, 3991 Eschapper : vb. intr. : se sauver (Ainsi comme je vous dy roys Henry eschappa) Le roi Henry s’échappa comme je vous l’ai raconté, 12966 vb. intr. : se sortir d’une situation diicile ? (car qui a de l’argent tousjours eschappe et ine) car qui a de l’argent s’en sort toujours et parvient à ses ins, 18925 Escharboucle : s. f. : pierre précieuse aux vertus merveilleuses, 9039, 9042, 9567, 9570, 10390, 10571 Eschars : adj. : avare (eschars prince n’y a ja honneur conquerant) un prince avare ne conquiert jamais d’honneur, 17535 Eschauffer : vb., (– de) avoir une grande envie de (dont veïsséz noz gens de combatre eschauféz) vous auriez vu nos soldats désireux de se battre, 4622
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Eschegaiter, voir Escheguester Escheguester, (eschegaiter) : vb. trans. dir. : protéger par une sentinelle, 5809, 11339, 14358 Escheoir : vb. imp. : arriver (qu’il n’eschiet a cellui qui assault le premier) qu’il n’arrive rien de bon à celui qui attaque le premier, 5834 Eschiele, (eschielle) : s. f. : bataillon, 15900, 15901, 15959, 15978, 15985, 21364 Eschielle, voir Eschiele Esciant, voir Escient Escient, (esciant, essiant) : s. m. : avis, 4299, 6283, 7320, 7495, 9232, 10711, 11151, 13270, 15861, 16149, 16438, 17530, 19114, 21129, 21340 (a –) en connaissance de cause, 11030 (oultre mon –) au-delà de l’entendement ? (J’ay guerrié long temps oultre mon escient) j’ai combattu longtemps au-delà de ce que ma raison m’autorisait, 6217 s. m. : esprit ?, 7385, 8531, 10915, 11241, 12187, 15300 Esclairer, voir Esclayrer Esclarsir : vb. trans. dir. : (– qqun) apporter la lumière à qqun, 8790 Esclayrer, (esclairer) : s. m. : lever du jour, 5811, 5816, 14411, 17409 Esclis : s. m. : embrun (aus vens et es esclis) dans le vent et les embruns, 10168 Escoler : vb. trans. ind. : instruire, 17193 p. p. : instruit, 2317, 14028 (Partir it deux bourjois que bien ot escoléz) il it partir deux bourgeois qu’il avait bien préparé, 9197 Escommuniement : s. m., (vivre en –) vivre selon des préceptes contraire à la religion, 17089 Escon : p. p. : couché, forme pour escondre (ainçois que lendemain soit le souleil escon) avant que le soleil ne soit couché le lendemain, 20337 Escondi : p. p. : rejeté, 335, 602, 4955, 18250 Esconduit : p. p. : disculpé (Chevalier, dist le roy, j’en dois estre esconduit) Chevalier, dit le roi, je dois être disculpé, 9953 Esconser, (esconsser) : vb. intr. : se coucher (ains qu’esconsse le soilaux) avant que le soleil se couche, 19914
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vb. pron. : s’incarner ? (la venue de Dieu qui en virge s’esconsa) la venue de Dieu qui s’incarna en la vierge, 6633 Esconsser, voir Esconser Escorchier : s. m. : abattage ? (comme fait un bouchier le beuf quant il est temps de l’escorchier) tout comme le boucher abat un bœuf lorsque le moment de l’abattage est venu, 6127 Escot : adj. : écossais, 7070 Escot : s. m. : part à payer pour un repas (que mon escot seroit suisamment paié) je crois que j’aurais suisamment payé ma part, 3054 Escou : p. p. : essoré ? (et ont leurs draps escouz en tortant fermement) et ils ont essoré leurs vêtements en les tordant fermement, 17970 Escouter : vb. trans. dir. : entendre, 5163, 7186, 7207, 8040, 8227, 8443, 14969, 21470 Escouvillon : s. m. : torche faite de paille tordue attachée autour d’une perche, 5624 Escremie : s. f. : combat, 3205, 16114 Escript : s. m., (être en les – de qqun) être dans les petits papiers de qqun ?, 10189 Escu : s. m. : bouclier, 406, 2479, 3020, 3083, 3604, 3910 Escueillie, voir Escuellye Escuellye, (escueillie) : s. f. : élan, 16405 (d’ –) avec élan, 19203 Escuier : s. m. : synonyme de chevalier ? (Dist l’escuier de Monfort) Le chevalier de Monfort dit, 6271 Escuierie : s. f. : ensemble d’écuyers, sur le modèle de chevalerie, 5388, 14221 Esforceement : adv. : de toutes ses forces, 720, 5271 Esforcer : vb. pron. : se renforcer, 5967 vb. pron. : reprendre des forces, 16553 p. p. : violé (eforcees les dames et arses les maisons) les dames violées et les maisons brûlées, 7256 Esforciement : adv. : avec violence, 3857 Esfraer, (efraer) : vb. intr. : efrayer, 854, 5546, 7355, 14160
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p. p. : agité, 14637 p. p. : troublé, 3778, 4831, 5793, 7861, 9468 Esfrondé : adj. : dont le front est cassé (maint teste esfrondee) de nombreux crânes fracassés, 4587 Esgarder : vb. trans. dir. : regarder, 14665 vb. pron. : s’examiner, se regarder avec insistance, 9146 Esgaré : p. p. : dispersé, 3799 (avoir chiere –) être troublé, perdu, 6057 p. p. : exilé (en Engleterre fu prouvé et esgaré) il fut reconnu coupable et exilé en Angleterre, 6445 Esjoyer : vb. trans. dir. : rendre heureux, 7657 vb. pron. : se réjouïr, 2340, 7754 Esjoÿr : vb. pron. : se réjouïr, 2587, 9394, 10921 Esleu : adj. : parfait, excellent, 1762, 3553, 17288, 19736 Eslever : vb., (– la pree) ravir le bétail ?, 18507 (la pree ont eslevee, le païs vont fustant) ils ont volé le bétail, ils ravagent le pays, 11005 Eslire : vb. trans. dir. : évaluer ? (ne le sauroient pas eslire ne priser) ils ne sauraient pas l’évaluer ni estimer son prix, 9025 Eslis : adj. : excellent, 4968, 8271, 9811, 12048, 18918, 21756 Eslonger, voir Eslongier Eslongier, (eslonger) : vb. trans. dir. : disperser, 6172 vb. trans. dir. : déposer au loin, 21377 vb. trans. dir. : refuser, 10527 vb. trans. dir. : se soustraire (Sa vie lui feray mal gré lui eslongier) je lui ferai abandonner cette vie (de guerrier) malgré lui, 12500 vb. trans. dir. : se tenir loin de (Bien va a sa nature, ne le puet eslongier) il correspond parfaitement à son lignage, il ne peut s’en débarasser, 7003 vb. trans. dir. : traverser ? (Or s’en vont les Engloys, France vont eslongent) les Anglais s’en vont, ils traversent la France, 17324 vb. trans. dir. : écarter, 6945 vb. trans. dir. : éviter, 12491 vb. intr. : s’éloigner, 4405, 4478, 10316
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vb. pron. : s’éloigner, 16189 Esmaier : vb. trans. dir : troubler, inquiéter, 919, 1277, 5205 vb. trans. dir : dénombrer ? voir note, 20271 vb. intr. : troubler, inquiéter, 3063, 3529, 11252, 13589, 17031, 19440 (ne vous chault d’esmaier) il ne faut pas vous inquiéter, 2915 vb. pron. : s’inquiéter, craindre, 928, 2329, 2675, 2962, 5999, 8986, 9077, 9541, 9564, 10356, 10757, 13488, 15468, 15475, 16123, 17956 Esmaux : adj. : ? (Or avant, bonnes gens, soiéz iers et esmaux), 3110 Esmay : s. m. : peur, 1256 Esmayé : s. m. : étonné (Ne faictes l’esmayé) ne faites pas l’étonné, 4414 Esmeré : adj. : in, 19044 adj. : doux (Fleur de lis esmeree) douce leur de lys, 20505 Esmolu : adj. : inement aiguisé, 14620 Esmouvoir : vb .trans. dir. : déclencher, engager (un combat), 20974 (Et les autres dix milles, ordonné et baty au cousté senestrier pour esmouvoir estry) et les dix mille autres rangés et placés à gauche pour engager le combat, 11913 (que la guerre esmeut moult fort) car il avait déclenché la guerre très violemment, 6465 vb. intr. : se mettre en mouvement, 1744, 1754, 4780, 11706, 14622 vb. intr. : se soulever, 3554 vb. pron. : s’agiter, 3821 vb. pron. : se mettre en mouvement, 1746, 4056, 11606, 14546 (s’esmeurent compaignies) les compagnies s’en allèrent, 12558 Esmoye, voir Esmaier, p1 Espaigneux : adj. plur. : qui sont originaires d’Espagne, 6695 Espandre : vb. trans. dir. : propager, 8372 vb. trans. dir. : disperser, 12431 vb. trans. ind. : jaillir de, 6144 vb. pron. : se disperser, 17322, 17346 vb. pron. : se répandre, 5264, 17740 Espani : p. p. : épanoui (Doulce leur espanie) douce leur épanouie, 20461 Espaontement : s. f. : peur, crainte, 489 Espaonter : s. m. : peur, 18838
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Espaonter, (expaonter) : vb. trans. dir. : efrayer, 18151 vb. intr. : avoir peur, 3137, 3590, 14039, 19450 vb. pron. : s’efrayer, 1193, 2404, 3568 p. p. : efrayé, 8252 p. p. : surpris, 14260 Espargnier, voir Esparigner Esparigner, (esparigner) : vb. tans. dir. : économiser, 9897 vb. intr. : ménager, 3527 vb. pron. : se ménager, 941 Espars : p. p. : éparpillé, 21412 Espaulee : s. f. : charge de bois portée sur l’épaule, 898 Espauler : vb. pron. : se démettre l’épaule, 14691, 17253 Espautrer : vb. trans. dir. : fracasser, briser, 5568, 6170, 7999 p. p. : fracassé, 14638 Espee : s. f., (rendre l’–) capituler, se rendre, 18052 Esperon : s. m. : insigne du chevalier, 11166 (a pointe d’–) à toute vitesse, 7822, 8864, 9152, 11165, 11689, 11851, 14600 Espés : adj. : sérré, 5212 Espie : s. f. : espion, 1354, 1397, 3028, 3034, 3254, 3257, 4075, 4186, 4773, 5436, 7822, 7824, 7827, 8981, 8982, 13747, 14533, 14547, 14553, 14768, 15482, 15601, 15612, 21529 Espie : s. f. : épieu, 3191 Espier : vb. intr. ind. : (– a qqun qqch) guetter pour le compte de qqun ? (je vous viens espier l’ost a Charles de Bloiz qui vous vient approchier) j’ai surveillé pour vous l’armée de Charles de Bloys qui s’approche de vous, 5436 Espine : s. f., (avoir en la in un grand feu d’–) mourir sur un bûcher, 6600 Espirer : vb. trans. dir. : égaler ? (Vostre grace et vostre non ne puet nul espirer) nul ne peut égaler votre grâce et votre renom, 17030 Espis : s. m. : épi, 3504 Esploicter : s. m. : accomplissement (Penséz de l’esploicter) concentrez-vous sur le résultat, 14910 Esploit : s. m. : chemin (a –) avec ardeur, 4445 (faire mal –) agir mal, 253 (un parc it entour lui et un si grant esploit que) il libéra de l’espace autour
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de lui et se fraya un si grand chemin que, 1001 Esploitant : adj. : eicace, 8194 Esploiter, (esploitier, exploicter, exploictier, exploiter, exploitier, exploitter) : vb. trans. dir. : accomplir, mener à bien, 7739 (faire –) mettre en route ses troupes, 5425 vb. intr. : faire énormément d’eforts, 13263 vb. intr. : réussir, 4533, 12865, 18729 (que, s’il puet exploicter, Charles lui rendra) que, s’il réussit sa mission, il lui livrera Charles, 832 vb. intr. : s’empresser, se hâter, 7170, 7825, 8451, 9074, 9509, 12816, 14924, 15773, 15795, 17349, 17570 vb. intr. : se démener, 18030 vb. pron. : se démener, faire énormément d’eforts, 2765, 5632, 5726, 7231, 7345, 14470, 14825, 17008, 18734 Esploitier, voir Esploiter Espoie : s. f. : épieu, 2501, 2507, 2513, 2515, 2531, 10990, 11729, 14619, 14949, 19558, 21358 Espoiee : s. f. : épée, 10990 Espoir : adv. : peut-être (Espoir que voulent atendre que souleil soit torné ?) peut-être veulent-ils attendre que le soleil soit couché ?, 11513 Espois, (espoy) : s. f. : épieu, 11233, 18654, 19023, 19343, 19558, 21358, 21383 Espoit : s. m. : épieu, 14875, 14881 Espousé : p. p., (estre – a) être marié avec (véz cy la dame a Henry espousee) voici l’épouse d’Henry, 8766 Espousee : s. f. : épouse, 2324, 6642, 6945, 8748, 9965 (de loial –) de mère légitime (véritable épouse du roi, contrairement à la mère d’Henry) ? (Véz cy vostre seigneurs de loial espousee) voici votre seigneur né d’une mère légitime, 11844 Espoy, voir espoy Espris : p. p. : brûlé, 10360, 10551 (estre – de tonnerre) être brûlé par la foudre, 10362 p. p. : atteint de colère, 14679 p. p. : enlammé, 11718 Esprouver : vb. trans. dir. : vériier (pour esprouver le fait de ses questions) pour connaître la vérité sur ces
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questions, 7792 p. p. : qui a fait ses preuves, 4105, 9349, 11268, 11812 vb. pron. : se distinguer, 8212, 16073 Esroiller* : vb .trans. dir. : rouler, 7837 Essaier : vb., (– son nom) vériier si on peut être reconnu (alerent querre aumosne pour essaier leur nom) ils allèrent demander l’aumône pour tester leur couverture, 15333 Essaucer, (essaucer) : vb. trans. dir. : élever en honneur, 830, 837, 6323, 9896, 11665, 13097, 14410, 16533, 17003, 17025, 17391, 17393, 17406, 20466 p. p. : accompli (et qui resuscitas par miracle essaucie) et tu ressuscitas grâce à l’accomplissement d’un miracle, 8699 p. p. : réalisé, 10048 Essaucier, voir Essaucer Esselee : s. f. : clôture ? (qui me tient ensement de sa grant esselee) qui me détient ainsi par sa grande clôture, 6669 Essiant, voir Escient Essillement : s. m. : exil, 7527 Essiller, voir Essillier Essillier, (essiller, exiller) : vb. trans. dir. : chasser, exiller, 7015, 8987, 11657, 14414, 14569, 16061 vb. trans. dir. : afaiblir, 3515 vb. trans. dir. : gaspiller (fors de la garnison essillier) mis à part gaspiller les provisions, 5187 vb. trans. dir. : mettre à sac, 7693, 7702 vb. trans. ind. : mettre à sac, 7076 vb. pron. : se cacher ?, 14972 vb. pron. : se vider ? (C’est la terre d’entour de touz biens essillee si que) la terre à proximité s’est vidée de tous ses biens si bien que, 11263 p. p. : esseulé, 9286 Essuer : vb. trans. dir. : sécher (bon fera essuer) on vous fera bien sécher, 5116 Establer : vb. trans. dir. : placer un animal à l’étable, 14030 Establiçon, voir Establisson Establie : s. f. : situation ?
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(faire bele –) placer ses troupes avec excellence ?, 5730 (je le mectray ja en si bonne establie que l’on le porra voir) je le placerai si bien qu’on pourra le voir, 3167 Establisson, (establiçon) : s. f. : disposition, 5629, 10399, 10877, 11422, 16948, 16955, 19697, 20356, 20516 (en celle –) en telle manière ?, 1182 (faire – de) convenir de, 8665 (les autres deux estoient en hault establisson) les deux autres étaient placés en hauteur, 84 s. f. : troupe, 11382, 11406, 16007 (faire –) se mettre en ordre de bataille, 14609 Estache : s. f. : poteau de supplice, 9168 Estaindre : vb. trans. dir. : tuer par etoufement, 10241, 10248 Estal : s. m. étalage, 383, 1906 (Sur le marchié de Resnes voit dames a estal) sur le marché de Rennes, il voit des dames arrêtées devant des étalages, 366 (– royal) cérémonie de couronnement, par l’idée d’étalage de biens et de nourriture ?, 4255 (levé en –) placé en vue ? (Quant Bertrant la baniere choysi ... hault levee en estal) lorsque Bertrant aperçut la banière placée en hauteur pour être vue, 4244 (mettre a –) placer en vue ? (que on mist a estal ... tout char, pain et poisson) d’exposer toute la viande, le pain et le poisson, 1905 s. m. : poteau, 4258 Estant : s. m., (en (son) –) en position verticale, 8679, 10259, 15984, 18976, 20291, 20426, 20452, 21311 (en –) ici même, 5055, 10704, 10759, 11041, 15156, 20446 (remectre en (son) –) remettre debout (pour remectre la leur de lis en son estant) pour redresser le royaume de France, 17876 (se lever en –) se mettre debout, 9927, 13345 (se tenir pié –) ne pas bouger (Chascun en son endroit se teigne pié estant) que personne ne bouge de l’endroit où il se trouve, 21344 Estat : s. m. : situation, 2686, 11284 (avoir son – ?) vivre selon sa position sociale ?, 9705 (donner son –) rétribuer ?
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(vostre estat vous donrray a loy de chevalier) je vous donnerai un salaire digne d’un chevalier, 7011 (estat –) l’état général (regardons Angloiz et l’estat communal) nous regardons les Anglais et les alentours, 4248 (véz cy estat qui aiert malvaisement) voici une situation qui ne convient pas du tout, 8519 s. m. : accoutrement, 704 s. m. : festin (La trouva belle feste et estat bien plenier) il trouva ici une grande fête et un vaste festin, 9903 s. m. : identité (Et Bertrant son estat lui dist et recorda) Bertrant lui révéla son identité, 19873 s. m. : mode de vie religieux (car cy sont .iii. estaz) car ici sont trois religions, 8520 s. m. : proposition, 5516, 8593 s. m. : résolution, 5146 Estendre : vb. pron. : se situer (devant chastel del roy qui en Bertaigne s’estent) devant le château du roi qui se situe en Bretagne, 2024 (estre – a) être ouvert jusqu’à (il y fu estendu a une vayne) (le mur) fut ouvert jusqu’à une cavité souterraine, 19424 Ester : vb. intr. : être debout, 9402, 18852 (comment lui esta ?) comment se porte-t-il ?, 12648 (laisser –) laisser tomber, 1204, 5480, 5567, 5570, 10805, 11131, 12238, 12319, 15096, 18865 (laisser qqun –) laisser qqun tranquille, 13507 vb. intr. : séjourner ? (Vous savéz de la ville tout le convenant car vous avéz esté et derriere et devant) vous connaissez la ville par cœur car vous avez séjourné en divers endroits (de la ville), 9622 vb. pron. : rester qq. part, 19667 Estiquer, voir Estiquier Estiquier, (estiquer) : vb. trans. dir. : frapper à l’aide d’une arme pointue, 11863, 16547, 16551, 16601, 21421 vb. trans. ind : frapper à l’aide de, 18731
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vb. intr. : combattre ? (et sont enmy le champ, ou bel fait estiquier) et ils sont au milieu du champ, où il fait bon combattre, 17773 Estoc : s. m. : coup, 966, 5932 Estoffe : s. f., (gens d’–) hommes d’armes, 10684 (d’–) de grande qualité, 11654 Estoffé : p. p. : pourvu, 10942, 15254, 19135 Estoir : s. m. : un oiseau de proie (signe d’–) augure ?, 8895 Estole : s. f. : ornement sacerdotal porté autour du cou, 17194 Estonné : p. p. : assomé, 3606, 3616, 6073, 10123, 21138 p. p. : attaqué par surprise ? (Est la ville estonnee) la ville est attaquée, 3795 (si ont la ville estonnee) ils ont attaqué la ville par surprise, 3798 Estonneement : adv. : avec violence, 485, 4749 Estoquier : vb. trans. dir. : planter ? (Le penon estoqua sur le mur) il planta le pennon dans le mur, 20784 vb. intr. : frapper à l’aide du tranchant d’une lame, 2491, 5429, 6132 vb. pron. : se heurter ? (Chascun la lance ou poign se vont fort estoquant) tous se heurtent une lance à la main, 21336 Estoquis : s. m. : combat, 21335, 21353 Estorcion : s. f. : blessure ? (tant du fays de jouster que de l’estorcïon) autant de la tâche de combattre que de sa blessure, 17254 Estorement : s. m. : camp, 480 (par tel –) en telle manière, 18786 s. m. : ensemble des armes d’un soldat, 696, 10911, 17208, 19097, 20552, 21128 s. m. : troupe, 15288, 17077 Estorer : vb. trans. dir. : construire, 2957, 8641, 9075, 9881, 11061, 16280, 19034 p. p. : fait, construit, 8763 Estoupper : vb. trans. dir. : boucher les trous dans les murs causés par l’attaque (Et les Espagnols sont venuz pour estoupper) et les Espagnols sont venus bloquer le passage, 7996 Estour : s. m. : combat, 166, 1278, 4630, 4671, 4677, 4707, 5439, 6031,
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6115, 6117, 6218, 11648, 11672, 11810, 12031, 12130, 14671, 15582, 15763, 15794, 15956, 16085, 16086, 16092, 16106, 16114, 16164, 16167, 16967, 16971, 17388, 17400, 17698, 17711, 18068, 18550, 18620, 18678, 18762, 18816, 18991, 19291, 19657, 20173, 20243, 20251, 20261, 20273, 20978, 21139, 21145 s. m. : troupe, 16974 Estour : s. m. : tout ce qui est nécessaire (tant qu’il ot cincq cens hommes arméz de bon estour) tant qu’il eut cinq cents hommes armés d’équipements complets, 16965 s. m. : apparence ? (Assez cogneu Chando qui fu de bel estour) il reconnut parfaitement Chando qui était de belle apparence, 18537 Estourdi : adj. : violent ? (La commainça bataille d’estourdie façon) la bataille débuta de manière violente, 14610 (a la chiere –) qui a un caractère violent ? (si fu Gaultier Huet a la chiere estourdie) Gaultier Huet était présent, au caractère cruel, 2745 Estourmie, (estournie) : s. f. : tumulte, 3173 s. f. : combat (Pietres contre Henry maintint bien l’estournie) Pietres menait bien le combat contre Henry, 16113 Estourmy : p. p. : troublé, 20695 Estournie, voir Estourmie Estraction : s. f. : lieu d’origine (et avec voz amis de vostre estraction) et avec les amis de votre pays, 2420 s. f. : famille, lignée, 6867, 7558, 7787, 15336, 16929, 18486 Estraindre : vb., (– les dens) serrer les dents, 7837 Estrange : adj. : inhabituel (ne tant d’estranges mois servir a la volee) ni servir rapidement autant de plats hors du commun, 17618 Estrayne, (estreine) : s. f. : cadeau qui marque le début du règne (se sera son estrayne a son estal royal) ce sera son cadeau lors de sa cérémonie de couronement, 4255 (a bonne –) sous de bons auspices (Cy boutray le feu, ce soit a bonne estraine) j’allumerai un feu à cet endroit, que cela nous porte chance, 19431 s. f. : chance, 11316
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Estre : vb. intr. : régner ? (Seigneurs, en icellui temps et en icelle saison... estoit le roy Jehan) Seigneurs, en ce temps là ... régnait le roi Jehan, 2605 (– a par soy) être isolé, être tout seul, 83 (– a qqun) être au sevice de qqun (Ceulx du chastel d’Alroy ... estoient a Charlon) les habitants du château d’Alroy étaient au service de Charlon, 5365 (– en) faire preuve de ? (Tousjours avéz esté en prouesce fournie) vous avez toujours fait preuve d’un grand courage, 17739 Estreine, voir Estrayne Estrenner, (extrener) : vb. intr. : récompenser, 4894, 21271 Estri, (estrip, estris, estriz, estry) : s. m. : combat, 614, 2943, 4544, 5141, 5340, 11913, 15615, 15625, 17834, 17853, 18237, 18881, 19575, 19650, 19657, 19662, 20148, 20752, 21252 (a –) avec violence, 5232, 20636 (par –) avec force, 2476, 5721 s. m. : débat, 17854 Estriner : vb. intr. : rétribuer, 11255, 11283 Estrip, voir Estri Estris, voir Estri Estriver : vb. trans. ind. : combattre, afronter, 16654, 19845, 19985, 20408 (– encontre l’aguillon) se rebeller contre l’ordre établi (le roy d’Engletterre qui Edouart ot nom, vouloit trop estriver encontre l’aguillon car il se disoit roy de France) le roi d’Angleterre qui se nommait Édouart, voulait aller à l’encontre de l’ordre établi en se disant roi de France, 2614 vb. trans. ind. : se quereller avec, 19866, 19882 vb. pron. : se confronter, 13659 p. p. : défendu ? (faisons que sa couronne lui soit bien estrivee) faisons en sorte que sa couronne soit bien défendue, 4594 Estroit : adv. : étroitement, 17592 Estry, voir Estri Estryne : s. f. : combat, 6609 Estudie : s. f. : attention, intérêt, 503 (aviser son – a qqch) consacrer son temps à l’étude de qqch, 6723 (selon mon –) selon mon avis, après avoir étudié la question, 10860
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s. f. : volonté (telle est nostre estudie) telle est notre volonté, 3231 Esveillé : adj. : gai, joyeux, 10288 Eunoy* : s. m. : lieu planté d’aulnes, forme pour aulnoi ? voir note, 14893 Eur, voir Heur Eure, (heure) : s. f., (tout en –) sur le champ, 2522, 10340, 21086 (en l’–) sur le champ, tout de suite, 121, 1587, 9047 (n’avoir qqch – ne demie) n’avoir pas une once de qqch (qui concience n’ont heure ne demie) qui n’ont pas une once de conscience, 7445 Euree : s. f. : lisière, 15708 Euvre : s. f., (ne pas laisser –) ne pas démériter ?, 15713 Evigouré : adj. : remarquable, 4598 Excecucion : s. f., (mectre a – de) avoir pour efet de (fors que de perdre gens mectre a excecucion) sauf avoir pour efet de perdre des soldats, 2624 (faire maintes –) commettre de nombreux massacres, 7564 Exchange : héritage ? (qui me vient par – de mon pere) que j’ai reçu de mon père en héritage, voir note, 10577 Exchauder : vb. intr. : chaufer à l’aide de bois (qu’ilz se deurent tenir touz pour exchaudéz) qu’ils crurent tous avoir assez de bois pour se chaufer, 1092 Exercer : vb. trans. dir. : assumer une charge (ne que bon chevalier ne peüst excercer) et que je ne peux désormais plus être considéré comme un bon chevalier, 2281 Exiller, voir Essillier Exillier : vb. trans. dir. : ravager, piller (COD : maisons), 3225 Exmanché : p. p. : emmanché, 18980 Expaonter, voir Espaonter Exploicter, voir Esploiter Exploictier, voir Esploiter Explois (a –) avec empressement, 10988 Exploiter, voir Esploiter Exploitier, voir Esploiter Exploitter, voir Esploiter Expriser : vb. trans. dir. : estimer, 16035, 20930 Extrener, voir Estrenner
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Façon : s. f. : manière, 8890, 10160, 10164, 16950, 17242 (cellui qui aura tort comparra les façons) celui qui aura tort en sera puni, 5494 (compter une –) rapporter un fait ? (j’ay en entencïon d’aler devers le prince compter ceste façon) j’ai l’intention de me rendre devant le prince pour lui faire part de cette nouvelle, 12922 (par aucune –) de n’importe quelle manière que ce soit, 20357 s. f. : action, fait ? (Et quant son escuier apparceu la façon) lorsque son écuyer vit la situation, 17267 (compter une –) rapporter un fait ? (car le portier ira sans point d’arrestizon aus chevaliers du prince compter ceste façon) car le portier ira sans délai rapporter ces faits aux chevaliers du prince, 12932 (savoir la –) posséder des connaissances dans un domaine ? (qui d’astronomie savoit bien la façon) qui possédait des connaissances en astronomie, 8892 s. f. : délit ? (gardéz vous qu’il n’y ait souspeçon en ceste gent icy ne malvaise façon dequoy avoir peusséz nulle octasion) faites attention à ce que ces personnes ici présentes n’aient aucun soupçon ni qu’il n’y est aucun délit pour lequel vous puissiez être poursuivi en justice, 12929 s. f. : comportement, 17234 (de –) de bonne compagnie, 10874 s. f. : apparence, 10145 (de –) de bonne qualité, 16021 s. f. : visage, 4020, 5621, 7788, 9168, 10371, 12441, 12725, 13676, 15032, 15335, 16006, 16734, 18491, 20794 (voir qqun en sa –) voir qqun en face, 16729 (en sa propre –) en personne, 6858 Faé : adj. : magique, merveilleux, 1485 adj. : possédé ? (C’est une homme tout faé) c’est un homme possédé, 13375 Faictement, voir Faitement Faillance : s. f. : défaut, manque, 21766 Faillir : vb. trans. dir. : manquer, 12436 vb. trans. ind. : abandonner, 2968, 3445, 5401, 8715, 8970, 9288, 9515, 9707
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vb. trans. : manquer, 1732 vb. intr. : manquer, 1232, 1249 vb. intr. : terminer, inir, 524, 15935 vb. pron. : s’achever, 2865 vb. pron. : se dérober, 983 Failly : adj. : lâche, 1951, 10169 Fain : s. m. : foin, 14031, 19428, 19439 (fain et ieurre qu’ilz ont leens a grans monceaux) du foin et de la paille qu’ils possèdent ici en grande quantité, 19307 Faindre*, (feindre) : vb. pron. : se dérober, 965, 5386, 6113, 10365, 16126, 19219, 19320 Faintis, (fainty) : adj. : lâche, 9591, 9815, 16509, 20204, 20213 Fainty, voir Faintis Fainy : p. p. de faindre ? (mais les plus si s’en vont qui ont les curs fainys) mais la plupart s’en vont qui ont le cœur lâche ?, 12084 Faire : vb., (– mal esploit) agir mal, 253 (– comme) agir comme, se comporter comme, 4573 (– en x pars) se séparer en plusieurs contingents ?, 897 (– que) agir comme (si feront que senéz) ils agiront comme des hommes sages, 18382 (comment le faictes vous ?) comment allez-vous ?, 13722 Fait : s. m. : événement, 3584 (– d’instrument) : morceau de musique (connotation négative ?) (Ainsi font les adveugles et les pouvres truant de ce fait d’instrument les bourjois entonnant) les aveugles et les pauvres bandits divertissent les bourgeois avec cette mélodie, 9993 (– de + inf) charge, mission de (tant du fays de jouster que de l’estorcïon) autant de la tâche de combattre que de sa blessure, 17254 (de – et de pensee) autant dans les actes que dans l’esprit ?, 8338 (de –) efectivement, 1037 (par – de) en faisant preuve de, 5914 Faitement, (faictement) : adv. : en telle manière, 213, 524, 1153, 1678, 2026, 6200, 14125, 14976, 20384 (estre si –) se dérouler ainsi (Et ainsi comme le siege estoit si faytement) alors que le siège était ainsi mis, 3678
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Faitis, (faytys) : adj. : bien fait, beau, 332, 336, 3704, 4548, 6699, 19168 Faitissement adv. : joliement, 15884 Faiz : s. m. plur. : exploits, 23 Falloir : vb., (il ne – que + inf) il n’est besoin que de + inf. (il ne fault que savoir) il n’est besoin que de boire (le vin), 946 Fallot, (falot) : s. m. : grosse lanterne portative emmanchée au bout d’un bâton, 5815, 20732 Falot, voir Fallot Famine : s. f., (par rage de –) par une si forte sensation de faim, 11308 Faucement, voir Faulcement Faucon : s. m., (livrer pour berger un –) donner un loup pour berger ?, 10153 Faulcement, (faucement, faussement) : adv. : de manière déloyale, 3865, 6209, 9672, 11896, 12656, 13453, 15550, 16273 Faulte : s. f., (par – de qqun) en l’absence de qqun, 8217 Faulx : adj. : cruel, 2288, 2291, 2359, 2439, 2992, 3002, 3222 adj. : qui fait preuve de traîtrise, 3864, 6692 Faussart : s. m. : arme d’hast à hampe, dérivée de la faux, dont le fer aigu présente un tranchant convexe pourvu d’une pointe ou d’un crochet, 14620, 14813, 15543, 16183, 21359 Faussement, voir Faulcement Fausser : vb. trans. dir. : déformer, 11216 vb. trans. dir. : tromper, 20386 vb. intr. : mentir ? (Dictes moy sans fausser) parlez-moi sans mentir, 12710 vb. intr. : se dérober, 20394 (– sa foy) défaire une promesse ? (il faussa sa foy ains que venist l’iver) il renia sa promesse avant l’hiver, 21569 Fays : s. m., (pierre de –) projectile pour canon, 19258, 20763 Faytys, voir Faitis Feaulté : s. f. : engagement féodal, 10541, 19926, 19940 s. f. : loyauté, 19945 Feindre, voir Faindre Fel : adj. : vaillant, 2484, 18497 adj. : cruel, 5035 Felonnessement : adv. : avec fureur, 7020 Felonnie : s. f. : fureur, 11647 Fenestre : s. f. : partie défensive de l’armure ? voir note, 3135, 17071, 17111
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Fenir : vb. intr. : mourir, 4698 p. p. : mort, 21741 p. p. : tué, 8282, 12103 Fer : adj. : féroce, cruel, 858, 5324 adj. : éclatant ? (Charles au fer jouvent) Charles à la jeunesse écaltante, 2044 Ferir : vb. trans. ind. : se jeter sur (et ferent sur François a guise de grifons) et ils se jetèrent sur les Français pareils à des grifons, 20686 (que la pasion –) que la peste les emporte, 17373 (sans cop –) sans rien faire, 2665 vb. intr. : combattre, 10315 vb. pron. : se frapper, 17249 vb. pron. : se jeter, 4673, 5954, 11224, 11833, 12031, 14883, 15506, 16092, 17125 Fermé : adj. : fortiié, 1997, 2004, 3693, 5227, 6644, 7858, 7873, 7901, 8133, 8334, 8736, 9330, 9446, 9766, 10206, 12579, 13806, 13899, 15553, 15565, 19789 Fermecté, voir Fermeté Fermement : s. m. : univers, forme pour irmament, 10457, 10909, 17695, 18640, 19120 Fermer : vb. trans. dir. : fortiier, 8246, 8504, 9377 vb. intr. : enfermer, 5173, 13322 Fermeté, (fermecté) : s. f. : place forte, forteresse, 851, 2305, 3739, 4994, 5225, 5235, 6752, 8254, 9587, 18148, 19032, 19052, 19678, 19844, 20023 s. f. : enceinte fortiiée, 5230, 13738 s. f. : fortiication, 18976 s. f. : quartier séparé des autres par des fortiications ? (Seigneurs, a icelle ville troys fermectés y a) seigneurs, il y a à l’intérieur de cette ville trois quartiers séparés, 9324 Fermeure : s. f. : prison, 2816 s. f. : forteresse, 4010 Ferré : adj., (chemin –) route empierrée, 9287, 14798 Fers : adv. : fortement ? (car véz cy les François, fers vestiz et arméz) voici les Français, solidement vêtus et armés, 3914 Fervesti : p. p. : vêtu de fer, armé, 8256, 10187, 11088, 11909, 17307,
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17828, 19166, 20894 Fervesti : s. m. : soldat en armure ?, 19177 Festier : vb. trans. dir. : recevoir dignement, 2919, 4949, 7762, 8725, 8735, 9311, 9925, 12271, 12404, 12877, 12948, 13624, 13777, 14226, 14353, 17028, 17571, 18339, 18851, 21512, 21570 (faire a –) être digne d’un bon accueil, 9922 Festoyer : vb. trans. dir. : accueillir chaleureusement, 8453 Festu : s. m. : brin de paille, 393, 19742 Fevre : s. m. : forgeron, 18712, 21321 (proprement les enclumes ou les fevres ont ouvré) même les enclumes sur lesquelles les forgerons ont travaillé, 19048 Fevrer : s. m. : mois de février, 21767 Fiance : s. f. : coniance, 4620, 15469, 15575, 15669, 18395 (et foy et –) expression qui atteste de la vérité du propos ? voir note (et en prinst au dehors l’ost et foy et iance), 1139 Fiancer : vb. trans. dir. : promettre le mariage, 6931, 8109, 8564 vb. trans. dir. : promettre, 20075 vb. trans. ind. : certiier, 831 p. p. : garanti (et la place juree, nommee et iancie) et l’endroit juré, nommé et garanti, 17751 vb. intr. : promettre, 15379, 16996, 17024, 17403 Ficher : vb. pron. : se précipiter, 21346 Fie, voir Fye Fiens : s. m. : fumier (voir note), 2352, 3625, 3626, 5038 Fier : adj. : fort, résistant, 21560 Fierement : adv. : violemment, 4978 Fierté : s. f. : violence, 10321, 19359 Fieurre* : s. f. : paille, forme pour feurre (fain et ieurre qu’ilz ont leens a grans monceaux) du foin et de la paille qu’ils possèdent ici en grande quantité, 19307 Filer : vb. intr. : couler (parmy le hasterel lui est le sang ilé) le sang lui coula sur le visage, 2541 Fille : s. m. : il, 20517 Filleresse : s. f. : ileuse, 13551 Fin : s. f. : mort, 4 (mectre qqun a –) tuer qqun, 14518 (mettre a –) mettre à mort, 18803
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(mettre tout a –) s’emparer de (Bertrant mist tout a in, a ses gens en donna) Bertrant s’empara de tout et en donna à ses hommes, 654 s. f. : rançon (Combien vous conviendra ensemble reporter pour vostre in acomplir ains que puissez iner ?) combien vous faut-il réunir pour atteindre la somme de votre rançon avant de pouvoir payer ?, 14110 (D’avoir legiere in auroit trés bien mestier) il aurait bien besoin d’une rançon peu élevée, 12497 (la mone de leur in commaincent a nombrer) ils commancèrent à évaluer le montant de leur rançon, 14112 (se parmy ceste in vous me vouléz quicter) si grâce à cette rançon vous désirez me libérer, 13535 Finance : s. f. : argent, 767 (faire –) : se procurer des fonds, emprunter, 13131 (faire la – de qqun) procurer à qqun l’argent de sa rançon, 12864 (mettre qqun a –) obliger qqun à payer une rançon, 12491, 12770, 12822, 13120, 14092, 18914, 19553 (se mettre a –) ixer le montant de sa rançon, 13559, 13562 Finement : s. m. : mort, 13469 (mectre a –) tuer, 16633 (prendre –) mourir, 8113 s. m. : paiement ? (le Besgues s’en revint aprés son inement) le Besgues revint après avoir payé sa rançon, 13124 Finer : s. m. : mort, 18853 Finer : vb. trans. : tuer, 380, 6039, 6158, 6777, 8036, 8423, 9415, 9726, 15894, 16236 (– du siecle) disparaître, mourir, 8820, 13100 vb. trans. dir. : acheter, 19274 vb. trans. ind. : payer, 17557 vb. intr. : inir, terminer, 3627, 3628, 4822, 5331, 5519, 6520, 6853, 8811, 9735, 15412, 18068, 18921 vb. intr. : mourir, 1527, 7246, 12312, 12362, 16354, 18695, 20231, 20603, 21760 vb. intr. : parvenir à ses ins (car qui a de l’argent tousjours eschappe et ine) car qui a de l’argent s’en sort toujours et parvient à ses ins, 18925
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vb. intr. : payer une rançon, 12770, 12773, 12821, 12823, 13324, 13501, 13529, 13734, 13955, 15171 (Combien vous conviendra ensemble reporter pour vostre in acomplir ains que puissez iner ?) combien vous faut-il réunir pour atteindre la somme de votre rançon avant de pouvoir payer ?, 14110 vb. intr. : payer, 190, 14114 p. p. : brisé ? (chascun lança .ii. cops ains que fussent iné) chacun donna deux coups avant qu’ils ne se brisent (les écus), 10323 p. p. : ini, terminé (Et si lui a le roy sa ille ordonnee et la doit espouser aprés guerre inee) le roi lui a promis sa ille en mariage et il doit l’épouser une fois la guerre terminée, 15407 p. p. : mort, 19924 p.p. : payé, 18924 Fis : adj. : sûr, certain, 5344, 8862, 9821, 10176, 12095, 13567 (il puet estre tout is la teste lui trencheray) il peut être certain que je lui trancherai la tête, 12533 Flairant : adj. : parfumé, 20461 Flairer : vb. intr. : sentir, 17796 Flaireur : s. f. : odeur, 16282 Flambeer : vb. intr. : étinceler, 10058, 10481, 11937, 15940, 17050 Flamble : s. f. : lamme, 21540 Flas : s. m. : chute, 19014 Flati : p. p. : renversé, 17852 Flechyr, voir Flexir Fleur : s. f. : farine (leur buletee) farine de grande qualité, 19477 Fleur : s. m. : leuve ?, voir note, 16627 Fleur, (lour) : s. f., (– de) l’élite d’un groupe, 3414, 13902, 17657 Flexir, (lechyr) : vb. trans. dir. : incliner (Et quant Bertrant l’oÿ, si lexi le menton) quant Bertrant l’entendit, il baissa la tête, 12933 vb. pron. : s’agenouiller, 15612 Florie : adj. : blanche, 10664, 11475, 11500, 12019, 19990 Flour, voir Fleur Flu : s. m. : leuve, 16768 Forcené, voir Forsené
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Folement : adv. : de manière incensée, 2066 Foleur, voir Folour Folie, voir Follie Folier, (follier) : vb. intr. : agir avec déraison, 4413, 11499, 12965 Follie, (folie) : s. f., (penser a –) agir déraisonnablement ?, 7150 (sans –) sans action déraisonnable ?, 10514 (sen ou – ) par raison ou par folie ?, 10526 Follier, voir Folier Folour, (foleur) : s. f. : folie, 16109, 17195, 17645, 19890, 20803 Fondé : p. p. : établi, 2323 (estre – de qqch) être l’héritier de qqch (qui vous toust le roiaume dont vous estez fondé) qui vous ravit le royaume dont vous êtes l’héritier, 15241 p. p. : attaché ? (tu as juré Dieu, ou nous sommes fondé) tu as juré sur Dieu, en qui nous sommes croyant, 10333 p. p. : construit, 4784 p. p. : fortiié ?, 3906, 4996, 21713 p. p. : instruit, 2320, 17588 p. p. : établi, 17448 Fondre* : vb. trans. dir. : s’écrouler, s’éfondrer, 1187, 5245 Fons : s. m. plur. : (sains –) fonts baptismaux, 6951 (lever qqun de –) être le parrain/la marraine de qqun, 8555 Forain : adj. : qui est à l’extérieur (Tant sont bien ordonné celle gent foraine) ceux qui sont à l’extérieur sont si bien rangés en ordre de bataille, 20050 Forby, voir Fourbir Force : s. f. : autorité ?, 16617 (a –) en nombre, 1044, 1171, 1223, 3662, 3831, 3999, 5232, 7939, 10379, 11185, 11803, 12421, 12433, 12627, 14706, 20759 (mectre – de) s’eforcer de ? (dist que force mectra de vivre ou de mourir ou honneur conquerra), 10110 (par –) par obligation ?, 12130 Force : s. f. : grands ciseaux (mais force pait le pré) avec de grands ciseaux on parvient à tondre un pré, 14890, 20221 Forceler* : vb. trans. dir. : dissimuler
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(et si personne y a qui le aille forcelant) et s’il y a quelqu’un qui dissimule (ses biens), 1908 Forceneement : adv. : avec folie, 12793 Forconseiller* : vb. trans. dir. : donner de mauvais conseils, 6801 Forel : s. m. : fourreau, 19590 Formainer, voir Formener Formener, (formainer) : vb. trans. dir. : tourmenter, 5575, 18704 (et sa gent y formaine) et ses hommes y sont malmenés par sa faute, 21646 vb. pron. : s’échiner, se démener (tellement se formenne que) il se démenne tant que, 19423 Forment : adv. : en nombre (sont ilz forment) sont-ils beaucoup ?, 11150 Forni, (fourni) : adj. : considérable, 4917, 16129, 16132, 17739, 19991 adj. : robuste, 14771, 14780 Fornir : vb. trans. dir. : entretenir (a nourir, a fornir, a donner a mangier) à nourrir, à entretenir et à faire manger, 5448 Forré : adj. : doublé, 14045 Forrer, voir Fourrer Forrier, voir Fourrier Fors : prép., (– que) sauf, mis à part, 1575 (– puis que) : pas depuis que, 15373 Forsconté : p. p. : qui s’avère impossible à compter ? (qu’il a a cheoir les eschelons forscontéz) qu’il doit dévaler les innombrables barreaux, 3607 Forsené, (forsenné) : adj. : enragé, 6067, 6087, 6679, 6811, 10223, 10316, 10344 Forsenné, voir Forsené Fort : adj. : de grande valeur (l’argent fort) la monnaie qui est de grande valeur, 759 adj. : diicile (Il est a prendre fort) il est diicile à conquérir, 5071 adj. : fortiié, 8396 adj. : impénétrable ? (entre vous et Bertrant auréz forte prison) vous et Bertrant, à tous les deux vous aurez une cellule impénétrable, 12168 Fort : adv. : très
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(et fort lieu grant antour a) et il possède autour un très vaste domaine, 3382 adv. : beaucoup (Bertrant fait fort gicter au chastel) Bertrant fait jeter sur le châteaux de nombreux projectiles, 5054 Forte : s. f. : force, puissance (Et si avoit moutré forte et poccession) il avait fait preuve de sa force et de sa supériorité, 2619 Fortifier : vb. pron. : devenir plus fort, 16680 Fortuné : adj. : personne favorisée par le sort, 15077 Fortuneement : adv. : d’une manière malheureuse, 13009 Fortuner : vb. trans. dir. : favoriser, 15058 (et Fortune et Heur ... se estre veult pour nous et estre fortunant) si la fortune et la chance veulent être de notre côté et nous être favorable, 10751 Forvoier : vb. int. : s’égarer (qui fait ce qu’il doit, il ne forvoie mie) celui qui accomplit son devoir ne s’égare pas du droit chemin, 21499 Fouchiere : s. f. : fougère, 11998 Fouhir, (fouyr) : vb. intr. : fuir, 4495, 4981, 6226, 7036, 7842 Fouillie : s. f. : branchage (de remplir les fosses de terres, de fouillie) de remplir les fossés de terre et de branchages, 17109 Foul : adj. : fou, 6684 (de foul –) de folles pensées, 10521 Foullé : p. p. : fatigué (et leur chevaux foulléz et lassez grandement) et leurs chevaux extrêmement exténués, 17968 Four : adj. : forme pour fort ?, 3382 Four : s. m. : foule (fu l’abbé dedens le four bouté) l’abbé fut entré dans la mêlée, 19334 Fourbir, (forbir) : vb. trans. dir. : polir, 17672 p. p. : poli, 2477, 2483, 3247, 3420, 3722, 5753, 9359, 10534, 15939, 16909, 19987 Fourches : s. m. : plur. : colonnes de pierre, en haut desquelles se trouve une traverse à laquelle on suspend les criminels condamnés à mort, 3150, 9416, 11893, 14420 Fourni (adj.), voir Forni, (adj.)
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Fournir, (furnir) : vb. trans. dir. : achever, 3985 vb. trans. ind. : témoigner par ? (Et la furent .viii. jours en bonne amour, fournie au semblant qu’il faisoit, en quoy il s’umilie) ils demeurèrent ici huit jours en bonne amitié, confortée par l’attitude dont il faisait preuve par laquelle il témoignait du respect, 12405 vb. intr. : mener à bien une mission, 12890 p. p. : accompli (et l’absolucion seellee et fournie) l’absolution est achevée et administrée, 7643 Fourrer, (forrer) : vb. intr. : piller, ravager, 7603, 9354, 11105, 11127, 11145 Fourrier, (forrier) : s. m. : celui qui, attaché à une personne ou un groupe de personnes, est chargé d’assurer le logement au cours des déplacements, 10402, 10404 (des – envoia pour prendre maison) il envoya des oiciers ain de lui trouver un logement, 10386 Foussoier : vb. trans. dir. : couper du monde par des fossés (et si feray la ville foussoier) et je ferai isoler la ville par des fossés, 5114 Fouyr (fuir), voir Fouhir Fouyr : vb. intr. : creuser, 3983, 20755 Foy : s. f. serment de idélité s. f. : histoire, source du texte ? (ne l’archeprestre aussi, ce tesmoigne la foy) ni l’archiprêtre non plus, les sources l’attestent, 4064 (et le foy que avéz fait la noble leur de lis) et le serment que vous avez fait au roi de France, 12097 (de –) de coniance, 7276 (donner – a qqun) accorder sa coniance à qqun, 8769 (et – et iance) expression qui atteste de la vérité du propos ? voir note, 1139 (fausser sa –) défaire une promesse ? (il faussa sa foy ains que venist l’iver) il renia sa promesse avant l’hiver, 21569 Foy, (fois), voir Fye Franc : adj. : noble, 4219 (contree –) territoire exempt d’imposition, 18404 Franchement : adv. : avec exemption de toutes charges, 20413, 20419
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Franchise : s. f. : privillège, 8128 Frere : s. m. : personne proche, 6318 Frete : s. f. : ouverture, fenêtre (et tantost par la frete a bien fait tantost crier que) et il a fait tout de suite crier par la fenêtre que, 2396 Freté : adj. : solide, robuste, 2994, 21147 Friant : adj. : au goût agréable, 3928, 7226, 7304 Frisson : s. f. : tremblement qui précède un accès de ièvre (la dame l’a mandee pour avoir garison d’aucune maladie ou d’aucune frisson) la dame l’a faite venir pour obtenir la guérison de quelque maladie ou d’une quelconque ièvre, 90 Froissie, voir Fruissé Froy : adj. : qui manque d’hardeur au combat ? (mais pour tenir bataille tous temps sans estre froys) mais pour mener le combat en toutes circonstances sans jamais manquer d’ardeur, 10996 adj. : frais, 15228 Fruissé, (froissié) : p. p. : rompu, 2480 (maintes testes froissies) de nombreuses têtes fracassées, 3154 Fuite (trouver la –) prendre la fuite ? (es Espaignolz se mist, si a la fuite trouvee) il se mélangea aux Espagnols et trouva une échapatoire, 11842 Fumere : s. f. : fumée, 17375 Furnir, voir Fournir Fusel : s. m. : bout de bois (mais tout ce n’y valu la monte d’un fusel) tout cela ne valut rien du tout, 20244 Fuster : vb. trans. dir. : piller, ravager, 7870, 8005, 11005, 11051, 15320, 18373, 19030, 20293 Fuye : s. f., (torner en –) prendre la fuite, 21501 Fuyte : s. f., (se mectre a –) s’enfuir, 11226 Fy : s. f., (de –) certainement ?, 906 (dire – de qqun) traiter qqun avec mépris, 11921 (par tel –) en telle manière ?, 20663 Fye, (ie) : s. m. : foie, 967, 15948 Fye, (foy) : s. f. : fois, 2975, 4654 (a celle –) cette fois-ci, 4934, 5385, 6739, 10662, 10835, 11631, 12030 (a la –) de temps en temps, parfois, 3433, 4428, 17713 (a la –) parfois, 5420, 17508, 21133
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(les plus a la foy vont victoire perdant) les plus nombreux perdent parfois la bataille, 5779 (a la –) souvent, 10870 (a une –) tous ensemble, 957, 1413, 3159, 4183, 4914, 8573, 8723, 10068, 11634, 11636, 15487, 17108, 17203 (donner une –) donner entièrement ? (comment que le roy Henry lui donnast une fye) bien que le roi Henry lui avait donné (la cité) entièrement, 14300 (moult de foy se seigna) il se signa à de nombreuses reprises, 14185 (par –) une nouvelle fois ? (Or voys je bien que Henry par foy me maine guerre) je vois bien qu’Henry me livre bataille une nouvelle fois, 16271 (ne se recommainçast par foy de rebeller) ne s’avise une nouvelle fois de se révolter, 13282 Fyois : forme de pour fuir ? (Touz fussent mors ou pris, s’ilz n’en fussent fyois) tous furent morts ou capturés s’ils ne s’étaient pas enfuis, 19025 Gabelle : s. f. : impôt sur les denrées, 19970 Gaber : vb. trans. : se moquer, 5166, 5478, 11568, 15018 vb. intr. : rire, 13527 vb. intr. : se moquer, 14034 vb. pron. : se moquer, 203, 9986 Gage : s. m. : gant tendu à l’adversaire en signe d’appel à un combat singulier, 2285, 2288, 3347 (véz cy mon gage prest que pour lui approuver en un champ de bataille) voici mon gant prêt pour le mettre à l’épreuve sur un champ de bataille, 2282 Gagnon : s. m. : bête cruelle, 6397 Gaigner : vb. trans. dir. : engendrer, 17053 (car de la riche dame qui le roys tant ama fu Henry engendré, car le roy le gaigna et troys illes) Henry fu né de la noble dame que le roi aima tant, il l’engendra ainsi que trois illes, 7779 vb. trans. dir. : cultiver, 20413 vb. intr. : gagner (temps est de –) L’heure est venue de remporter la bataille, 3811 Gaister : vb. trans. dir. : surveiller (La nuyt gaisterent l’ost a mians brandons) il montèrent la garde pour
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l’ensemble des troupes à l’aide de nombreuses torches, 11075 Gait : s. m. : sentinelle, voir aussi Gueste et Gaite, 1149, 1393, 16364, 18996 s. m. : ensemble des personnes chargées de la surveillance, 20696 s. m. : fait de monter la garde, 9142 Gaite : s. f. : sentinelle, voir aussi Gueste et Gait, 18995, 19001, 19009, 19014 Galice : s. m. : calice, 7572 Galie : s. m. : char de parade ? (Pleines sont les galies ... d’anges, d’intrumens aussi, de maintes fees) les chars sont remplis d’anges, d’instruments et de nombreuses fées, 12588 (galies furent contre sa venue menee a or et argent noblement painturee) des chars très bien décorés à or et à argent furent placés sur sa route, 12585 s. m. : navire, 16867 Galot : adj. : qui utilise la langue française (en Bertaigne galot) partie de la Bretagne qui parle Français, 824 Gappi : adj. : brûlé (voir note) (car le païs estoit derobé et gappi) car le pays était entièremet pillé et ravagé, 17317 Garant, voir Garent Garantir : vb. trans. dir. protéger, 13863, 18901 Garçon, voir Garson Garde : s. f. : fait de garder (n’avoir – de) ne pas craindre qqch, 3231 (se donner – de) se méier de, 6716, 15507 (se donner –) prêter attention, être sur ses gardes, 3591 (se donner –) se méier, 11708 s. f. : personne chargée de la surveillance, 5048 s. f. : poste de garde, 3780 Garder : vb. trans. dir. : protéger, défendre, 8033, 9425, 16992, 16997 (– que + ind.) prendre garde à ce que, 9346 (– contre) protéger, défendre, 5693 vb. pron. : se protéger, 4778, 8395, 9465, 9482 vb. pron. : se ménager, 1319 Garder : vb. trans. dir. : (– qqun) se méier de qqun, 14508 Garent, (garant) : s. m. : protection, 3804, 11019, 11603 (a –) en sureté, 769, 3802, 5767, 7057, 11956, 12033, 14688, 16177, 16217, 16358 (estre – à qqun) protéger qqun, 12285
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(faire –) protéger, 4213, 9511, 13258, 14710 (mettre a –) mettre à l’abri, 20854 (se mettre a –) se mettre à l’abri, 1469, 11891, 11908, 11919 s. m. : caution, garantie, 11034 s. m. : défenseur ?, 12142 Garentir : vb. trans. dir. : sauver, 8792, 10818 p. p. : protégé, 9947 Garet : s. m. : terrain en friche, 18526 Gariter : vb. trans. dir. : pourvoir de défense, 3904, 3964, 4014, 5007, 18139, 19769 p. p. : fortiié, 21688 Garni : adj. : puissant, 1560, 3409, 3441, 4155, 4923, 5418, 6107, 7428, 8166, 8730, 10055, 10827, 13174, 14297, 14331, 14723, 16128, 16884, 16887, 17961, 21496, 21505, 21510 adj. : muni, pourvu, 3699 Garniement : s. m. : équipement, 15540 Garniment : s. m. : vaurien, 1169 Garnir : vb. trans. dir. : équiper, 3716, 3907, 5222, 5333, 5345, 7879, 7913 Garnison : s. f. : provision, 1332, 5187, 5699, 12427, 19701, 21631 s. f. : corps de troupes en mouvement, 13492 Gars : s. m. : lâche, 15832, 15904, 17119 Garson, (garçon) : s. m. : personne au comportement grossier, 60, 6831, 8885 s. m. : domestique ?, 4378, 7925, 7981, 8643, 13674 Garté : adj. : gardé, 5032 Gary : p. p. : sauvé, 16292 Gaschiere : s. m. : terre labourée ?, 1114, 11984, 11992, 21184 Gascon : s. m. : cheval de Gascogne, 16017, 17925 Gaster : vb. trans. dir. : ravager, dévaster, 3479, 7678, 9721, 9831, 13834, 16061, 17325, 18465 vb. trans. dir. : piller, 12317 p. p. : dévasté, 9344, 11290 p. p. : fatigué, 17967 p. p. : ruiné (si vous en trouveréz desers et touz gastéz) vous vous retrouverez complètement ruinés, 20025 Gavelot : s. m. : lance courte, 10318 Gayter : vb. intr. : suveiller, monter la garde, 981, 4358
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Gehyne : s. f. : torture, 17197 (mettre qqun a –) soumettre qqun à la torture, 14011, 14091 Gehyr : vb. trans. dir. : raporter, raconter, 11091, 12897, 15611, 20660 Geline : s. f. : poule, 8848 Gelouzance : s. f. : désir (car de jour et de nuyt n’ot autre gelouzance) il n’eut d’autre désir de jour comme de nuit, 18418 Genel : s. m. : petit cheval d’origine espagnole, 11592 General : s. m., (en –) en présence de tous (Le viscoins de Beaumont a dit en general) le vicomte de Beaumont dit en présence de tous, 4246 Generalement, (generaument) : adv. : sans exception, 19081 (et toutes les bourjoises vindrent generalement) et toutes les bourgeoises vinrent sans exception, 2593 Generaument, voir Generalment Genoillon (a –) à genoux, 20176 Genoillon : s. m., (a –) à genoux, 8870, 12936 Gent : s. f. : armée, ensemble des toupes, 4807 Gentil : adj. : qui a des qualités intellectuelles et morales, 75 Gentil : s. m. : celui qui est noble de naissance (et puis le rendray au gentilz de Guimgamp) et il le rendra au noble de Guimgamp, 6273 Gentise : adj. fém. : jolie, de belle apparence, 53, 3410, 9255 Gerarchie : s. f. : ordre et subordination des neuf choeurs des anges, 7437 Germain : adj. : né de même père et de même mère, 2273, 6583, 7398, 7404, 17934 Gerra, voir Gesir Gesir : vb. trans. dir. : tomber, 3995, 20992 (– la nuytie qq. part) passer la nuit qq. part, 14995 vb. trans. ind. : coucher avec qqun, 8568, 16041 vb. intr. : dormir, 18078 vb. intr. : accoucher, forme fut. ind. p3 gerra, 6943 Geste : s. f. : lignée, famille (mal ressembléz les gens dont vostre geste est nee) vous ne ressemblez pas aux personnes de votre famille, 271 Geteour : s. m. : soldat chargé d’actionner les machines de trait ?, 13743 Getter : vb. trans. dir. : expulser vb. intr. : lancer des projectiles, 5046
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Getter, (geter, gicter, gitter) : vb. trans. dir. : expulser (Dix mille Crestiens de Sebile gicta) il it expulser dix mille chrétiens de Séville, 14343 (estre – de prison) être délivré de prison ? (parmy la ranson fu de prison gicté) grâce au paiement d’une rançon il fut délivré de prison, 6433 vb. intr. : lancer des projectiles, 3103, 5233, 17108 p. p. : outrepassé ? (car il fault, comment que soit, getee) il faut traverser (la jeunesse), peu importe comment, 274 Gibet : s. m. : potence placée à l’entrée de la ville (Au dehors de Poictiers, assez prés du gibet) aux alentours de Poitiers, assez près de la potence, 18525 Gicter, voir Getter Giet : s. m. : pluie de lèches, 17112 Gigner* : vb. trans. dir. : soumettre qqun à la torture judiciaire pour le faire avouer (ne m’aléz gignant car sans faire distresse je diray en oyant) ne me torturez pas, car sans me faire prier je dirai à voix haute, 10261 Ginguelet* : s. m. : cheval de combat (DEAF), forme pour gringalet, 18532 Giron : s. m. : partie de la tunique, 2155, 18700 Glacier : vb., (la hache glace) le combat commence ?, 19217 Glay : s. m, (demener –) faire grand bruit, 21045 Glayve : s. f. : lance, javelot, 1666, 1772, 1788, 1792, 1809, 2387, 2473, 11113, 14881 s. f. : arme tranchante, 1758, 1812, 2381, 2477, 2480 s. f. : partie du tournoi, synonyme de lance ?, 1795 unité de mesure (qu’il ne soit homme vivant, soit armé ou nu qui aprochent les .ii. de .xx. glayves) qu’il ne soit nul homme vivant qui soit armé ou non qui approche les deux combattants de vingt glaives, 1751 Gloser : vb. trans. ind. : tirer des conclusions de, interpréter, 15092 Glouton : s. m. : traitre, 1295, 15029 Gorgere : s. f. : gorge, 1119 Goule : s. f. : couleur rouge des armoiries, 15813, 15883 Gouter : vb. trans. dir. : couler goutte à goutte, 8332 Gouvernement : s. m., (en son –) sous sa tutelle, 10919 Gouverner : vb. trans. dir. : assurer la subsistance, 1461, 8478, 12825
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vb. trans. dir. : commander, être le chef militaire de, 8034, 8137 vb. pron. : se comporter, 5995 Gracier : vb. trans. dir. : remercier, 4884, 17034 Graille : s. m., (les gros, – et longs) les gros, les maigres et les grands, expression qui désigne une totalité, 8642 Grailler, voir Greiller Grandement : adv., (il n’y a pas –) il n’y a pas si longtemps, 14433 Grans : s. m. plur. : personnes de la haute société, opposé ici à menuz (oncques si beau disner, se croy, ne fu veü que je feroie ennuyt des grans et des menuz) jamais un si grand dîner comme je ferai n’aura été vu autant par les riches que par les pauvres, 399 Grant : adj. : nombreux, 11384 (estre – de) être désireux de ?, 2461 (estre en – de) être désireux de (Et sachiéz que nous sommes pourveüz et en grant de vous faire mourir) sachez que nous sommes en position et que nous somme désireux de vous tuer, 10721 Grant : s. m. : élite d’un groupe ? (le grant n’y empira) il ne it ici aucun tort aux meilleurs, 18269 (les – Juïfz) les personnes les plus importantes de la communauté juive, 9434 Gravanter : vb. trans. dir. : détruire, 8956, 11246, 11253 Grayne : s. f. : couleur écarlate, 20047 Gré : s. m. : permission, 7359 (acomplir les – de qqun) obéir aux désirs de qqun, 7342 (au –) à la manière de ?, 717 (avoir mal – que) ne pas être satisfait de, 7025 (de –) volontairement, 4851 (faire touz les – de qqun) donner satisfaction à qqun, 6440, 19810 (savoir –) être reconnaissant envers qqun, 6255, 10043, 13478 (venir a –) convenir, 7352, 8605, 15828 (venir en –) convenir, 15249 Gregois, voir Gregoys Gregoys, (gregois) : adj., (feu –) mélange de salpêtre, de poix et de soufre diicle à éteindre, 1850, 15163 Greillier, (grailler) : vb. trans. dir. : faire sonner un instrument, 5197, 5817 Grenon : s. m. : moustache, 8868 Grenu : adj. : à long crins, 386
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Greppinon* : s. m. : échine ? (Tel cop lui a donné dessus le greppinon) il lui donna un tel coup sur l’échine, 12935 Gresillons, (grezillon) : s. m. plur. : attaches de fer primitivement en forme de gril, que l’on met aux mains des prisonniers, 13696, 14012, 18329 Grevance : s. f. : dommage, soufrance, 1127 Grever : vb. trans. dir. : blesser, nuire, 645, 710, 1205, 1236, 2219, 2743, 3224, 3437, 3967, 3969, 4040, 4844, 4898, 4962, 5549, 5991, 6008, 6042, 6164, 6348, 7137, 7232, 7989, 7995, 9728, 9876, 10015, 10441, 10445, 10447, 10824, 10853, 10927, 11350, 11427, 13007, 13082, 13091, 13316, 13472, 13758, 14587, 14590, 15777, 16341, 16868, 17438, 17469, 18266, 18271, 18322, 18681, 18713, 19184, 19742, 19780, 19840, 20320, 20597, 21069, 21216, 21322 vb. trans. dir. : assiéger, 1854, 3092, 3262 vb. pron. : se battre ? (contre le roy d’Espaigne qui se vouloit grever) contre le roy d’Espagne qui désirait se battre, 14586 Greve : s. f. : jambière de métal faisant parti de l’armure, 2380 Greveté : s. f. : dommage, 4842 Grezillon, voir Gresillon Grief : adj. : douloureux, pénible, 7512 Griesté : s. f. : dommage, préjudice, 13736, 14008, 14823, 15372 Griffon : s. m. : oiseau de proie, rapace, 5950 Grigneur, (grignour) : adj. : plus grand, 16087, 16097, 17641, 17659, 18544, 18551, 19072, 19325 Grignour, voir Grigneur Gris : adj., (moyne –) moine franciscain, 19703 Gris : s. m. : fourrure de couleur grise, 5151, 17163 (cote de –) manteau de fourure, 13397 Gros : s. m. plur. : les personnes de haut rang social, par opposition à communs, 2350 (les –, grailles et longs) les gros, les maigres et les grands, expression qui désigne une totalité, 8642 Guecte, voir Gueste Guef* : s. m. : gué, 5649 Guementer : vb. intr. : se lamenter, 18859 Guerpir : vb. trans. dir. : abandonner, 10849, 11962 Guerre : s. f., (estre de –) faire la guerre à, 3448
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(prendre – a) faire la guerre à, 7279 Guerredon, (guesredon) : s. m. : récompense, 9162 s. m. : contrepartie, 10584 Guerredonner*, (guesredonner) : vb. intr. : récompenser après une bataille, 565 p. p. : récompensé, 4897 Guerriement : s. m. : guerre, 9693 Guerrier : vb. trans. dir. : afronter, 6294 vb. trans. dir. : combattre, 7401 vb. intr. : combattre, 6217 Guerroier : s. m. : combat (a la in que jamais il n’y eust que guerroier) ain que plus jamais il n’eut de combat, 3887 Guerroieur : s. m. : combattant, 16096 Guesmenter : vb. intr. : se lamenter, 656, 3620 Guesredon, voir Guerredon Guesredonner, voir Guerredonner Gueste, (guecte) : s. f. : guetteur, sentinelle, voir aussi Gait et Gaite, 902, 919, 3756, 5056 Guischet s. m. : petite porte pratiquée dans une plus grande, 3764, 9408, 19929 Guyer : vb. trans. dir. : conduire, 4648, 5993, 11474, 14286, 21208 Habité : s. m. : territoire ? (pourtant quant oÿ dire que en leur habité) car je l’ai entendu dire en leur territoire, 15375 Habiter vb., (– a qqun) avoir un raport sexuel avec qqun (s’il habite a lui) s’il a des relations sexuelles avec cette personne, 6936 Hache : s. f., (la – glace) le combat commence ?, 19217 (la – cheit) le combat commença ?, 19240 Hachie, (achie) : s. f. : supplice, 12014, 13173, 13187, 14379, 19975 Hachiere : s. f. : soufrance, tourment, 11995 Hahan, (ahan) : s. m. : tourment, 7301, 8203 Haïr : s. m. : colère, 10109 Hanepier, voir Hannepier Hanier : s. m. : laboureur, 249, 250 Hannepier, (hanepier) : s. m. : crâne, 754, 942, 6143, 11865, 21233 Hanner : vb. trans. dir. : labourer, 249
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Hanter, (anter) : vb. trans. dir. : fréquenter (Tu ne veulx que Juïfz et Sarrazins anter) Tu ne veux fréquenter que Juifs et Sarrasins, 16054 (car qui hante les bons a honneur vient touz diz) qui fréquente des personnes honnêtes en retire toujours de l’honneur, 796 vb. intr. : séjouner, 6644 vb. intr. : venir (Qui vous fait cy hanter ?) qu’est-ce qui vous amène ici ?, 1360 Happer : vb. trans. dir. : capturer, 842, 14555, 14860, 15038 vb. trans. dir. : attraper, 2285 p. p. : soumis (Comment pouroit estre prise Bervesque ne happee ?) comment Bervesque pourrait être prise et soumise ?, 8320 Harbergerie : s. f. : logement, 2977 Hardement : adv. : hardiment, 165 Hardement, (ardement) : s. m. : audace, 139, 3699, 3840, 4051, 4742, 4775, 5282, 5846, 5914, 10453, 11156, 11243, 15301, 15504, 17700, 18585, 18632 (car le bon vin fait homme a ardement parer) car le bon vin rend l’homme prêt à toutes les audaces, 19275 (hardement le assault) il se sent rempli d’audace, 10518 s. m. : courage (avec son hardement estoit Bertrant soubty) Bertrant était à la fois sage et courageux, 17164 Harder : vb. trans. dir. : enhardir, 6122 Hardyr : vb. pron. : (se – a) attaquer qqun ? (et se hardy a Jacob) et il attaqua Jacob, 6803 Harengier : s. m. : mauvais marchand ? au sens premier = marchand de hareng (Or fu Dieu harengier quant il les assembla) Dieu it une mauvaise afaire quant il les assembla, 6535 Harnachier : vb. pron. : se munir de tout ce qui est nécessaire, 2573 Harnois, (arnoys, harnoix) : s. m. : armure, 424, 2945, 3910, 4267, 10763 s. m. : bagage, 3909, 7670, 8473, 8977, 10987, 12475 s. m. : charrette, 8978 s. m. : écurie, 326 Harnoix, voir Harnois Harpent : s. m. : mesure de longueur, 11761, 12204, 14964
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Hart : s. f. : corde pour pendre un condamné (chascun la hart au col a loy de bosaour) chacun la corde au cou à la manière des traitres, 20817 (sur la –) sous peine d’être pendu, 16226 (sur peine de la –) sous peine d’être pendu, 20004 Hasteement, voir Hastement Hastement, (hasteement) : adv. : aussitôt, 456, 4773, 5289 Hasterel : s. m. : nuque, 2497, 2541, 20249 Hastier : s. m. : brôche à rôtir, 976 Hasty : adj. : préssé (Et tant furent hasty d’issir) ils furent tant pressés de sortir, 21253 Hauberger, (haubergier) : vb. pron. : revêtir un haubert (ja ne me verréz armer ne hauberger contre les leurs de lis) vous ne me verrez jamais prendre les armes contre les chevaliers français, 17002 p. p. : revêtu d’un haubert, 16018 Haubergié, voir Hauberger (p. p.) Haubergon, voir Aubregeon Haucer : vb. trans. dir. : remonter, 18152 vb. pron. : se renforcer, 17838 Hault : adj., (– jour) jour solennel, vocabulaire liturgique, 78 Hautain : adj. : noble, 17457 Haye : s. f. : portion de forêt réservée au seigneur et circonscrite par une clôture, 4711, 4714, 4728 Haÿe, voir Aÿe Hayne : s. f., (avoir a – qqun) haïr qqun, 7053 Hayraut, (ayraut, heraut) : s. m. : oicier chargé des annonces publiques, 339, 453, 530, 1538, 1543, 1548, 1550, 1551, 1554, 1556, 1558, 1567, 1572, 1586, 1588, 1590, 1688, 1710, 1834, 4225, 4313, 4315, 4319, 4337, 4339, 4500, 4502, 4509, 5466, 5845, 8851, 11522, 11523, 11531, 16313, 16323, 16325, 16332, 16344, 17723, 17733, 17761, 17811, 17812, 17823, 17985, 18935, 21225 Hayre : s. f. : chemise de pénitent, 2087, 6292 (soufrir –) soufrir mille morts, 16269 Haytié : adj. : en bon état, 5137 Hé : s. f., (prendre en –) prendre en haine, 18798 Heanner* : vb. trans. dir. : semer ? (Encores ay je .x. chevaux, dont je heanne les bléz) je possède encore dix cheveaux avec lesquels je sème du blé, 14042
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Heer : vb. trans. dir. : haïr, 7026, 9698, 10444, 10928, 16290, 20465 Heeur, voir Heur Henap, (hennap) : s. m. : grand vase à boire, 188, 11461, 16850, 17116 Hennap, voir Henap Heraut, voir Hayraut Herbergier : vb. trans. ind. : séjourner (Mais tant comme vous vouldréz avec moy herbergier) mais tant que vous voudrez rester auprès de moi, 7010 Herbois : s. m. : prairie, 18558 Herbu : adj. : verdoyant, 1747, 19514 Herital : s. m. : héritage, 378 Herité, (eritier, heritier) : s. f. : domaine, territoire, 1627, 2013, 2168, 2579, 5903, 7629, 7678, 9285, 9918, 12653, 13737, 14169, 15240, 15263, 17442, 17768, 19679, 21564, 21726 (en toute –) en tous lieux, partout, 43 s. m. : héritage, 15391 Heritier, voir Herité Herminé : adj. : dont le blason est à fond d’argent avec mouchetures, 6006 Heur, (ehur, eur, heeur) : s. m. : chance, 1811, 2971, 10017, 10750, 13008 (la verra on l’ehur sur qui il retrayra) on verra bien qui aura la chance de son côté, 5599 s. m. : réussite, 6018, 10461 Heure, voir Eure Heuvre : s. f. : œuvre ? (On deüst bien a cel heuvre mener) on aurait dû pour mener à bien cette entreprise, 19273 Hier, (hiere, hoir, oyr) : s. m. : héritier, 575, 624, 5453, 5523, 10515, 10543, 12332, 20102 Hiere, voir Hier Hoe, voir Houhe Hoir, voir Hier Honneur, (onneur) : s. m. : ief, territoire (sauf mon –) avec tout le respect que je vous dois, 1702 (sire de Portiugal, de l’onneur qui y pent) roi du Portugal et du territoire qui en dépend, 7022 Honnir : vb. trans. dir. : blesser (et les faisoit garder que l’on ne les puet honnir) il les faisait surveiller ain que personne ne puisse leur faire du mal, 3984
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Honnourance, (onnourance) : s. f. : honneur, 4612, 4615 Honnouree : s. f. : renommée (Et l’Anglois avoit si trés grant honnouree) et l’Anglais jouissait d’une telle renommée, 10085 Honny : adj. : uni (ou païs honny) partie du territoire qui ne subit pas la guerre ?, 17156 Honteer : vb. pron. : ressentir de la honte, 6012 Horion, (orion) : s. m. : coup violent, 1810, 6392, 10136, 17244, 18758, 20782 Horribleté : s. f. : comportement révoltant, 4853 Houe, voir Houhe Houhe, (hoe, houe) : s. f. : instrument aratoire dont la lame triangulaire perpendiculaire au manche sert à labourer la vigne ou aérer le sol, utilisé ici comme arme, 3952, 5211, 7993, 8057, 19060 Hourdis : s. m. : palissade, 21156 Houstau, voir Hostel Houstel, (houstau, ostéz, oustel) : s. m. : logis, 221, 291, 298, 320, 3111, 5005, 5110, 7125, 7127, 10429 Housteler, (houstoler, ousteler) : vb. intr. : héberger, 3131, 4863, 5110, 8740, 9114, 9430 vb. intr. : loger, 3975 vb. pron. : se loger, 3965, 12745 Houstoler, voir Housteler Huche : s. f. : cofre, 651, 7987, 19481 Hucher, (huchier) : vb. trans. dir. : crier, 3819, 3820, 8078, 11642, 14913 Huchier, voir Hucher Huee : s. f. : clameur, 418, 1491, 4269 (avoir grant –) être très renommé, 4097 Huer : vb. intr. : crier, 1226, 1991 Huisson : s. f. : tumulte, 20767 Humer : vb. trans. dir. : boire, 20990, 21089 Humilier, (umilier) : vb. pron. : s’incliner en signe de respect, 6742, 7174, 10482, 12286, 13179, 19871, 19880 (Et la furent .viii. jours en bonne amour fournie au semblant qu’il faisoit, en quoy il s’umilie) ils demeurèrent ici huit jours en bonne amitié confortée par l’attitude dont il faisait preuve, par laquelle il témoignait du respect, 12406 vb. intr. : s’incliner devant qqun en signe de déférence ?, 8674
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Hurter : vb., (– un cheval) éperonner un cheval, 443 (– a une fenestre) frapper à une porte pour en demander l’ouverture, 12697 Hustin, voir Hutin Hutin, (hustin) : s. m. : assaut, 20981, 20991 (maintenir –) diriger le combat, 15 Huys, (uys) : s. m. : porte, 20207 (L’un se souhaide a huy et l’autre a masïere) l’un souhaite être à la sortie, l’autre à la muraille, 21185 (avoir qqun a l’–) avoir qqun à proximité ? (que j’ay saint Pere a l’uys) puisque j’ai saint Pierre sur le pas de ma porte, 15480 s. m. : piece défensive de l’armure ?, 3134, 17071 Huysmais : adv. : désormais, 18821 Hydeusement : adv. : horriblement, 3827, 4985 adv. : avec agilité ? (ainsi comme un cinge rampe hideusement), 8309 Hye : s. f., (a –) en grande quantité, 19202 Impectrer : vb. trans. dir. : tenter d’obtenir (absolucion vous iray impectrer de touz voz pechiéz) je tenterai d’obtenir l’absolution de vos péchés, 7237 Imposicion : s. f. : impôt, 19970 Inclinacion : s. f. : révérence ? (et vint devers le roy par tel condicion que par trés bonne paix it inclinacion) il se présenta devant le roi en telle manière qu’il it une révérence en signe de paix, 6491 Incontinent : adv. : tout de suite, 1208, 2135, 2238, 2258, 3202, 4870, 5079, 5275, 7954, 8069, 8297, 9660, 9970, 10263, 10433, 10691, 11031, 11309, 15160, 15656, 17822, 20279 Incrediblement : s. m. : personne qui a renié sa religion ? (car il est mescreans et incrediblement) car c’est un mécréant et un renégat, 8540 Indifferent : adj. : indiférencié (car cy sont .iii. estaz, .iii. loys indiferent) car trois religions sont présentes ici, trois cultes qui partagent le même lieu, 8520 Infortuné : adj. : malchanceux, 2084 Infortuneement : adv. : malheureusement, 12200 Ingromance : s. f. : magie noire, 9070
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Irascu : adj. : courroucé, 384, 3539, 8351, 8370, 14624 Irer : s. m. : colère, 6148 Irer : vb. intr. : se mettre en colère, 13306 Ireur : s. f. : colère, 7838 Isneaux, voir Isnel Isnel : adj. : rapide, 16116, 19295, 19584, 19602, 19616, 20252, 20258 Isnellement : adv. : rapidement, 1423, 1531, 1538, 1581, 1679, 1711, 2208, 2265, 2512, 3576, 3745, 3785, 7520, 9391, 11429, 11900, 13677, 13822, 13830, 13991, 15453, 16324, 17819, 17821, 18197, 18625 adv. : aussitôt, 14121 Issir : s. f. ? : sortie (a l’issir de la ville) à la sortie de la ville, 10146 Issue : s. m. : troupe armée sortie d’une ville assiégée ? (Droit sur le point du jour l’issue regarda) au lever du jour il aperçut la troupe sortie de la ville, 14359 (Mais un jour en issirent pour venir par dela ; au léz devers Cordonne l’issue s’apporta) mais un jour quelques-uns sortirent pour venir de l’autre côté ; la troupe se déplaça du côté de Cordoue, 14357 Itant (a –) alors, 5062 Iveure : s. f. : ivoire, 10040 Jacobin : s. m. : moine dominicain, 6 Jacques : s. m. : costume court et serré, 1569, 3721, 18519, 18849, 18899 Jaserant, voir Jazerant Jazerant, (jaserant) : s. m. : côte de mailles, 1892, 10687, 11010, 13782, 15967 Ja : adv. : rien, 113 Jeux : s. plur. : lieu du tournoi ? (Il est venu aus jeux) il parvint au lieu du tournoi, 440 (quant il fut sur les jeux) lorsqu’il fut sur le terrain de joute, 441 Jeune : adj. : jaune, 3283 Joiel : s. m. : bijou, 5627, 19581, 19586 Joly : adj. : paré, 792 adj. : joyeux, 2101 Joquier : vb. intr. : attendre (qui faictes noz seigneurs se longuement joquier) vous qui faîtes tant attendre nos seigneurs, 21220 Jornee : s. f., (prendre la –) ixer une date, 1918
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(aler la –) s’acheminer, voyager, 9357 (avoir – de bataille) choisir une date pour combattre ?, 11267 (avoir male –) formule d’imprécation, 9774 (c’est tout la –) c’est le bout du monde ?, 20485 (la – passee) le temps d’une journee ?, 8336 (mainte –) à de nombreuses reprises ? (et la reyne aussi lui dist mainte jornee) et la reine lui répétait maintes fois, 6654 (venir a la –) remporter la victoire ?, 6061 Jouher : vb. intr. : jouer, 156 Jour : s. m., (toute – ajornee) toute la journée, 5048, 8747, 13809 (deviser le –) ixer une date, 9435 (l’autre –) le lendemain, 13754 Jouste, (jouxte) : prép : près de, 752, 3183, 5852, 9336, 15984, 18852 (de – qqun) à côté de qqun, 6101, 7321 Jouster : vb. trans. ind. : courir ? (Pietres vint ou cheval qui lui vint droit jouster) Pietres s’approcha du cheval qui galopa tout droit vers lui, 14574 Jouvent : s. m. : jeunesse, 5854 (Charles au fer jouvent) Charles à la jeunesse écaltante, 2044 s. f. : famille ? (C’est vostre meilleur cousté de sang et de jouvent) c’est la meilleure branche de votre famille et de votre lignée, 13457 Jouxte, voir Jouste Joyant : adj. : heureux, 1284, 1305, 2350, 2506, 4681, 6267, 7323, 9561, 9969, 10042, 10288, 13351, 13778, 14146 adj. : réjouissant ?, 4877 Joyaux : s. m. plur. : richesses, biens (et prenoit des joiaux là ou il en trouvoit) il prenait des biens partout où il en trouvait, 287 Joÿr : vb. intr. : se réjouïr, être heureux, 236 Jugement : s. m. : avis, opinion, 135 Jugier : vb. trans. dir. : décider, ixer ? (la bataille juga le bon vassal Bertrant) le bon Bertrant décida de combattre, 10287 (la fu des deux Juïfz la bataille jugie) le combat des deux Juifs fu décidé, 10284 Jugier : vb. trans. dir. : gouverner, 3320
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vb. trans. dir. : dire (ainsi l’oÿ jugier) comme j’ai pu l’entendre dire, 6141 vb. trans. dir. : (– qqun a) condamner qqun à un châtiment, 8083 Juifverie, voir Juïfzerie Juise : adj. fém. : juive, 91 Juiserie, voir Juïfzerie Juppon : s. m. : pourpoint qui protège l’homme d’armes du contact de la maille ou des plates, 6253 Jurer : s. m., (mettre a son –) présenter devant un jury pour un procès ? (et qu’il seroit prison et mis a son jurer) et qu’il sera mis en prison et jugé, 13299 Jurer : vb. intr. : conclure un accord, 3854 (et leur diray comme jurer pourray) je leur dirai comment je pourrai conclure un accord (avec les Anglais), 1254 vb. pron. : (se – a qqun) promettre à qqun de revenir payer sa rançon ? (si sont remonstré a leurs maistres mesmes ou s’estoient juré) ils sont revenus voir leurs maîtres, ceux-ci même à qui ils avaient promis de reverser une rançon, 14156 Jus : adv. : hors de, 446 (la –) là-bas, 8357 adv. : en bas, à terre, 452, 487, 882, 1765, 3536, 4268, 4804, 5260, 10349, 10475, 14611, 16396, 17062 (mectre qqun –) chasser qqun, 17280 adv. : à ras, 739 Jusques : prép. : avant, 3946 Justement : adv. : comme il convient, 143 Justicer, voir Justicier Justicier, (justicer, justisser) : vb. trans. dir. : gouverner, diriger, 354, 6336, 6996, 7737, 17047, 17550, 21575 vb. trans. dir. : condamner (de justicier proudomme sans faire jugement) de condamner des hommes bons sans jugement, 8544 Justisser, voir Justicier Juvant, voir Juvent Juvent, (juvant) : s. m. : jeunesse, 186, 9070, 19387 s. m. : personne (moult fu hardy Bertrant et de trés fort juvent) Bertrant était courageux et une personne très puissante, 6184
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Juïfzerie, (juifverie, juiserie) : s. f. : religion juive, 8162, 9363 s. f. : quartier juif, 8213, 8245, 9526 La adv., (– ou) pendant que (la ou le roy Jehan ... estoit en Engleterre) pendant que le roi Jean était en Angleterre, 2626 Labourer : vb. intr. : agir (que aujourduy nous convient labourer fermement pour avoir a manger et a boyre ensement) il nous faut agir aujourd’hui fermement ain d’avoir à boire et à manger, 11455 (Penséz de labourer) occupez-vous de combattre, 19278 Laidanger : vb. trans. dir. : maltraiter, 6942 vb. trans . dir. : insulter, 16544 vb. trans .ind. : contredire ? (Par trois foyz volu le Besgues ces paroles noncier mais nul ne s’avança de lui a laidanger) Le Begues prononça ces paroles par trois fois mais personne n’osa le contredire, 16532 Laidement : adv. : rudement, avec violence, 160, 3676, 8307, 14001, 14003 Lainer, voir Lanier Laisser : vb. trans. dir. : abandonner le service d’un seigneur au proit d’un autre, 626 (– ceans) laisser entrer ? (il nous convient [...] celle busche ceans laisser) il nous faut faire entrer ce bois de chaufage, 922 vb. trans. dir. : empêcher (le roy le veult ainsi, on ne le puet laisser) ainsi le veut le roi, on ne peut l’empêcher, 6873 vb. pron. : se terminer, 17943 part. prés., (aprés le jeu –) une fois le morceau terminé, 9987 Lait : (mener – vie) passer un mauvais moment, 18012 Lance : s. f. : manche (courir une –) efectuer une joute à la lance, 425 (jouster une –) efectuer une manche d’un tournoi, 1716 s. m. : soldat armé d’une lance, 11202 Lancer : s. m. : cavalier armé d’une lance, 6133 Lancer, (lancier) : vb. trans. dir. : frapper d’une arme, 5970, 10903, 17108 (– d’une lance) combattre à l’aide d’une lance, 12029
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(et Françoys tout autour lancer, trayre et berter) et les Français autour de lui frapper, lapider et percer avec des lèches, 3561 vb. trans. ind. : frapper qqun d’une arme, 14375 vb. trans. ind. : percer (que de deux glayves fu lancé parmy les lans) que ses lancs furent transpercés de deux glaives, 4674 vb. pron. : se frapper, 11215 vb. pron. : se précipiter, 5214, 17169 Lancier, voir Lancer Lancier : s. m. : jet de projectiles (La conquesta Brandonne au traire et au lancier) il conquit Bradonne à l’aide de lèches et de projectiles, 17015 Lange : s. m. : vêtement de laine, 19481 Lanier, (lainer) : adj. : lâche, 3337, 6871, 11849, 11866, 16541 (pensee –) arrière-pensée ? (Puis le prist par la main sans pensee laniere) il lui prit la main sans penser à mal, 17361 Lardé : adj. : élevé pour produire du lard ?, 14043, 20031 Larder : s. m. : garde-manger, 19477 Lardéz : s. m. : porcs ?, 3148 Larray, voir Layer Larris, voir Larrys Larron, (lerre) : s. m. : voyou, 2990, 5705, 6399, 6823, 7079, 7823, 7887, 9673, 9681, 10246, 14522, 20640 s. m. : voleur, 7262, 7263, 7268 Larrys, (larris) : s. m. : terrain en friche, 5716, 8628, 12083, 17832, 18230, 19550 Lart : s. m., (donner – avec de la porree) jouer un tour à qqun (Bertrant nous a donné lart avec notre porree) Bertrant nous a joué un mauvais tour, 4453 Las : s. m. : prison, lieu ou l’on est attaché ? (dérivé de ilet ?) (en mes las te tiendray en bien breve saison) d’ici peu tu seras enfermé dans ma prison, 16030 (qu’elles ne me vousissent hors de voz las gicter) car elles voudraient me sortir de votre prison, 13553 Lasser : vb. pron. : s’épuiser, 12342 Latin : s. m., (entendre le – de qqun) : écouter la requête de qqun ?, 20986 Lay : s. m. : laïc
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(les clers et les lays) les laïcs et les clers, 1264 Layer : vb. trans. ind. : laisser (Or vous larray de lui) je ne vous parlerai plus de lui, 9059 Lé : adj. : vaste, étendu, 411, 1922, 4226, 5034, 5301, 5322, 6640, 6664, 7857, 9353, 9779, 9793, 10076, 10955, 12446, 13194, 14317, 17590, 18430 adj. : large, 15581 (du long et du –) de long en large, 16777, 19686 Leans, voir Liens Leement : adv. : avec joie, 288, 492, 1329, 1345, 1707, 1721, 2583, 5457, 8105, 10431, 11147, 11435 Leens, (leans, liens) : adv. : ici, 1071, 5039, 5040, 5248, 5251, 5606, 5644 Legier : adj. : facile, 5481, 5540, 12310, 12706 (de –) facilement, 363, 6326, 7009, 17551, 17563, 21559 adj. : rapide, 4502, 10879, 16263 Legierement : adv. : rapidement, 164, 20649, 21101 adv. : facilement, 687 Lent : adv. : lentement, 483 Lerre, voir Laron Lés, voir Léz Lesir, (loysour) : s. m. : temps (avoir –) avoir le temps, 4458 (descendi vistement, n’y actendi lesir) elle descendit rapidement, elle n’attendit pas une seconde de plus, 8778 (par –) en prenant son temps (a venir a mercy bellement, par loysour) à se rendre sans se hâter, en prenant leur temps, 20816 Let : adj. : horrible, 13591, 13592 Leue : s. f. : lieue, unité de mesure, 8774, 14799 Leur : s. m. : leur bien (voir aussi sien et vostre), 19709 (qu’ilz prenoient du leur de tout leur vaillent) ils prenaient tous les biens qu’ils possédaient, 10234 Levé : adj. : édiié, construit (un chasteau hault levé) un château construit avec des murs élevés, 3000 (que je le truisse ores en ma tente levee) que je le trouve dès maintenant en ma tente dressée, 1489 Levee : s. f. : bruit fait pour provoquer un rassemblement, 903 s. f. : foule ? (de Bertons bertonnant fu grande la levee) les Bretons celtiques étaient
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venus en nombre, 412 s. f. : unité de mesure (Quant il ot cheminé aussi que une levee) quant il eut parcouru l’équivalent d’une levée, 18422 Lever : vb. trans. dir. : redresser (et face les tonneaux dessus le bout lever) qu’il fasse redresser les tonneaux (pour que l’on puisse y puiser du vin), 19284 (lever un –) intenter un procès (ainçoys en parlement va un procés levant) mais il intenta un procès devant le parlement, 3473 (– engins) mettre en place des machines de guerre, 13742 vb. trans. dir. : réquisitionner ? (et couru le païs et la proye leva) il parcourut le pays et réquisitionna le bétail, 9076 (– la parolle) prendre la parole ? (Bertrant volu la parolle premierement lever) Bertrant voulut s’exprimer en premier, 20377 (ainçoys en parlement va un procés levant) mais il intenta un procès devant le parlement, 3473 Levre : s. m. : lièvre, 4467 Léz, (liéz, lie, lié) : adj. : joyeux, 433, 434, 499, 522, 681, 1872, 1914, 2362, 3055, 4404, 4437, 5145, 7296, 9398, 10288, 13778, 17189, 19510 forme lie pour le féminin, 1734, 17368 Léz, (lés) : s. m. : côté, 1067, 1074, 1800, 1971, 2191, 3136, 10311 (aus – devers) du côté de ?, 3941 s. m. : lieu (Charles de Bloys chevaucha d’autre –) Charles de Blois se dirigea vers d’autres lieux, 625 Liain : s. m. : obstacle (passer ses –) dépasser un obstacle, surmonter une diiculté (Mais ainsois qu’il eust touz ses liains passéz) mais avant qu’il eut surmonté les obstacles qui se présentaient à lui, 29 Lie, voir Léz Lié, voir Léz, (adj.) Liement : adv. : de bon cœur, 12947 Lieu : s. m. : logis (Et ses hommes s’en vont en leurs lieux repairant) et ses hommes s’en retournent chez eux, 12557
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s. m. : domaine (et fort lieu grant antour a) et il possède autour un très vaste domaine, 3382 (avoir – plenier) être vaste ? (au chastel Jousselin, ou il a lieu plenier) au château Jousselin, où il y a beaucoup de place, 5424 s. m. : côté (au – par de deça) de ce côté-ci, 7747 (en tout –) de tous côtés, partout, 3121, 3124 Liéz, voir Léz Lignie : s. f. : lignage ? (Je sauray vostre lignie) Je inirai bien par découvrir qui vous êtes, 15007 Lin : s. m. : lignage, parenté, 1437 Lis : s. m., (estre des leurs de –) faire partie de la famille royale de France, 8857, 10555, 17001 (et le foy que avéz fait la noble leur de lis) et le serment que vous avez fait à la couronne de France, 12097 Lisant : adj. : lettré, 5360, 6914, 7331, 7489, 8073, 10652, 15158 Lité : adj. : décoré de bandes, 5895, 9782, 13716 Livrer : s. m., (venir au –) advenir ? (quand ce vint au livrer) lorsque ceci se produisit, 20381 Livrer : vb., (– la voye) liberer le chemin ? (que la voye lui fust par son païs livree pour aler en Espaigne commaincer la meslee) qu’il libère les chemins de Navarre pour aller commancer les combat en Espagne, 10957 Livreson, (livroison) : s. f. : correction, 1821 (en avoir assez pour sa –) en avoir pour son grade, 1819 (faire –) faire des provisions ? (ses forriers envoia pour faire livroison) il envoia ses oiciers de ravitaillement chercher des provisions, 10402 Lizon : s. m. : petit fauteuil, 82 Lober : vb. intr. : latter (ainsi que aucun traïtre va a la foy lobant) à la manière du traitre qui cherche parfois à tromper, 17508 Loer (vb.), voir Louher, (vb.) Logeis, voir Logis Loger : s. m. : habitation temporaire, 816 Logié : p. p. : installé dans le château assiégé, 3067 (se par force vous prens et je soie logié) si je m’empare de votre château et
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que je parviens à m’y installer, 3060 Logis, (logeis) : s. m. : camp militaire, 21156, 21257 s. m. : logis, 20680 Loail : adj. : légitime (car il ne fu pas né d’une loial moillier) car il n’est pas né d’une épouse légitime, 6999 Loiauté : s. f. : engagement (Non pourquant il me falt tenir mes loiautés) cependant, il me faut tenir mes engagements, 1994 (estre en ses – disant) dire la vérité ? (Plus avons de creance et sommes aians en ce que vous seroiéz en voz loiautés disans que en trestouz les prelaz) Nous croions plus en la vérité de vos paroles qu’en celle des prêtres, 7330 (tenir –) respecter ses obligations (nous n’y tiendroions nul bien ne loiauté) nous ne ferons preuve d’aucune attitude favorable à son égard, 8619 Loié : p. p. : lié, attaché (lui irent aporter loié comme un larron) ils le menèrent (à Charles) attaché comme un criminel, 6399 Lombart : s. m. : usurier, 12863, 12878, 12891 Long : s. m., (les gros, grailles et –) les gros, les maigres et les grands, expression qui désigne la totalité, 8642 Longon : s. m. : longueur ? (troys trefz d’arc d’un longon) d’un longueur de trois traits d’arc, 4327 Longtemps : adv., (a –) depuis longtemps, 13666 Louher : s. m. : salaire ? (a touz ceulx qui viendront donray je bon louher) je donnerai un bon salaire à tous ceux qui viendront, 17549 (il le doit bien servir, s’il reçoit son louher) s’il reçoit son salaire, il doit le servir convenablement, 16990 (ja ne servira bien qui n’aura bon louher) personne ne servira correctement sans un bon salaire, 17537 Louher, (loer) : vb. trans. dir. : être d’avis que (Je louhe que la moitie s’en voye fors saillant) je suis d’avis que la moitié d’entre nous sorte, 9613 (faire a –) être digne de louange, 2797 vb. pron. : proposer ses services (qui se venent louher pour gaigner leur jornee) qui viennent proposer
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leurs service ain de gagner leur journée, 3775 vb. pron. : (se – de qqun) faire l’éloge de qqun, 10143 vb. pron. : être satisfait de (que chascun s’en porroit au departir louher) que chacun pourra en être satisfait, 2793 Lourt : adj. : stupide (Et est nisse et lourt) il est idiot et stupide, 122 Lousengier : adj. : trompeur, peride (Oncques rat en fu si bien prins a la ratiere que furent Espaignolz, telle gent lousengiere) les Espagnols, ce peuple peride, furent faits comme de rats, 12007 Louzengerie* : s. f. : fourberie, 15483 Loy : s. f. : religion, 8520, 8598, 8615, 10849, 11070, 11665, 15250 (estre en la –) vivre conformément à la doctrine chrétienne, 6935 (fausser sa –) agir contre sa religion, 9342 (que un crestien ne vault riens ... puisqu’il fausse sa loy et qu’il a meherré) qu’un chrétien ne vaut rien lorsqu’il a trahi sa religion et qu’il a commis des péchés, 8613 (jurer sa –) jurer sur sa foi, 9300 s. f. : manière (a – de) à la manière de, 61, 773, 3528, 3717, 3729, 4165, 5533, 5796, 5820, 5995, 7011, 7974, 9867, 9900, 10241, 10344, 10722, 12725, 12852 (a –) comme il convient ? (la bonne chastelaine qui a loy se moustra) qui se présenta selon l’usage, 15446 Loysour, voir Lesir Luyte : s. f. : combat au corps à corps, 232, 6028, 10344 Luyter : vb. trans. ind. : combattre, 6155 vb. intr. : combattre, 232, 10348 Lye : s. f., (vin sur –) vin qu’on a laissé reposer pour que la lie tombe au fond du tonneau, 17116 Lyois : s. m. : pierre blanche (que dessus les crenaux qui furent de lyois) car dessus les créneaux qui furent en pierre blanche, 19020 Maberin : adj. : fait de marbre (celle tour maberine) cette tour de marbre, 18923 Macis, (massis) : adj. : massif
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(a vray perles –) en perles véritables, 10476 (qui sont d’or macis) qui sont en or massif, 774 Maginois : adj. : riche (a sa court le manda ou palais maginois) il l’appela à sa cour, au riche palais, 15196 Mahon : s. m., (le serement –) serment sans valeur, 1968 Maïgner : vb. trans. dir. : blesser, 1869 (il ne se partiroit, pour estre maïgner) il ne partira pas même s’il doit risquer d’être bléssé, 1881 p. p. : réduit ? (Et regarda sa gent qui moult est maïgnie : ne furent que .iic .) il regarda son armée qui fu considérablement réduite : ils n’étaient plus que deux cents, 17946 Maignye, (maisnie, masnie) : s. f. : ensemble des serviteurs du château, 974, 14061, 19213 (a privee –) accompagné d’une troupe restreinte, 13647, 13709, 14224 s. f. : ensemble des apôtres (en samblance de feu confortas ta maisnie) sous l’apparence du feu tu aidas tes apôtres, 8705 s. f. : famille (chacune au roy supplie qu’il veille avoir pitié de la soue maisnie) chacune supplie le roi de bien vouloir avoir pitié de sa famille, 12386 s. f. : l’humanité ? (et qu’il resuscita et sauva sa maisnie) et que (Jhesu) résuscita et sauva l’humanité, 5411 s. f. : troupe, armée, 1406, 1570, 2734, 3211, 3751, 4081, 5389, 7166, 7432, 7442, 8163, 9252, 12016, 14219, 14388, 14551, 14734, 14765, 15010, 15937, 16391, 17113, 17485, 17764, 17945, 17991, 17999, 19196, 19204, 21503, 21528 Mailler : vb. intr. : porter des coups (Et le conte d’Auçoyre moult fort y iert et maille) le comte d’Auçoyre y frappe avec violence, 5939 Maillie : s. f. : valeur d’une maille, rien du tout, 7655, 14231 Main : s. f. : main (– a –) l’un après l’autre, 2595, 4547, 12994, 13061, 15936, 17806, 18122, 19324, 19342, 19379, 19386 (estre bon de la –) : être brave au combat, 17932 (mettre en sa – de) conier qqch à qqun, donner pour mission de, 19876
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(en la – de) au pouvoir de qqun, 5296 (mettre en sa – de) conier qqch à qqun, donner pour mission de, 6344 Main : s. f. : matin, 15484, 18371, 19685, 19839, 19965, 19976, 20090, 20743, 20937, 21557 (– et avespry) matin et soir, 14326, 17310 Maindre : vb. trans. ind. : résider, demeurer (Or verra on proesce et en qui celle maindra) On verra des prouesses et en qui elles résident, 5593 vb. intr. : demeurer, 786 Mainné, (mainsné) : adj. : puiné (Olivier de Manny n’y doit mie estre oublyé et Yvon de Manny, son frere lui mainné) On ne doit pas oublier Olivier de Manny ainsi qu’Yvon de Manny, son frère né après lui, 5865 (et suys frere Bertrant, je suis de lui mainsné) je suis le frère de Bertrant, je suis né après lui, 2159 Mainsné (adj.), voir Mainné, (adj.) Mainsné : s. m. : cadet, 6612, 7369 Maintenent : (maintenent+futur) traduit l’idée d’un futur immédiat (ainsi perdrons nous nostre temps maintenent) nous allons perdre notre temps, 4303 Maintenir : vb. trans. dir. : gouverner (qui maintient les Gascons) qui gouverne les Gascons, 7280 vb. intr. : se comporter (ne si bien maintenir par vertu esprouvee) ni si bien se comporter en faisant preuve de courage, 6079 vb. pron. : se comporter, 6701, 14193, 14616, 15539 Maintien : s. m. : conduite, comportement, 299, 16053 Mais : adv. : désormais ? (la ou je peusse mais de secours recouvrer ?) la où je pourrais désormais trouver du secours ?, 9719 Mais : conj., (– que) à condition que, 5126, 9842, 12115, 12695, 12828, 13724, 13781, 14018 (ne – que) seulement (si n’ont mais que gicter pour defendre present) il ne leur reste maintenant plus qu’à jeter des projectiles pour se défendre, 19394 (tousjours –) à tout jamais, 6689 Maisnie, voir Maignye Maison : s. f., (grande –) famille noble, 19628
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Maistrie : s. f. : puissance, 504, 2441, 2971, 3416, 6110, 10050, 10844, 19986 (estre la – de) être le meilleur de ? (de touz les chevaliers la clef et la maistrie) de tous les chevaliers le plus bel exemple et le meilleur, 10509 (par –) de manière excellente, 2733, 3163, 4643, 6740, 14374 (par soutille –) avec ingéniosité, 17997 s. f. : ruse ? (Comment, se dist Mahieu, ne par quelle maistrie ?) Comment, dit Mahieu et par quelle ruse ?, 9371 s. f. : troupe armée (queroit parmy l’estour avec se maistrie le noble Bertrant) il cherchait dans la mêlée avec ses soldats le noble Bertrant, 6115 Maistrier, (mestrier) : vb. trans. dir. : gouverner, 4922, 7149, 10674, 13175, 13253 vb. trans. dir. : exceller dans un domaine (Et Bertrant du Guesclin qui prouesce mestrie) et Bertrant du Guesclin qui excelle en prouesse, 8169 Mal : adj. : mauvais, 15207, 17128 (estre – venu) être en mauvaise posture (fussent mal venuz et de corps et de vie) leurs vies euent été en danger, 978 (faire – esploit) agir mal, 253 (le – saint Quentin) hydropisie, 20994 (tenir le – saint Martin) être ivre, 17824 adj. : funeste, 2207 Maladerie, voir Maladrie Maladrie, (maladerie) : s. f. : léproserie, 11522, 12008 Malefaçon : s. f. : délit, mauvaise action, 7574 Maleïçon, (maleïsson, malicïon) : s. f. : malédiction, 7573, 9682, 16737, 16934, 19704, 21272 (Le roy la it mourir a sa maleïçon) le roi la it périr pour son plus grand malheur ?, 6842 Maleïs, voir Maleois Maleïsson, voir Maleïçon Malement : adv. : cruellement, 1492, 3481, 16176 (aller – à qqun) aller mal, 6198, 9711, 10435, 10449 adv. : extrêmement
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(Bertrant et Henry se hastent malement) Bertrant et Henry arrivent rapidement, 15771 Maleois, (maleïs, maleÿ, maleoit) : adj. : maudit, 9834, 12525, 15195, 15205, 19227, 20640 (si auront a leur vouloir les Englois maleÿ) ainsi ils disposerons de ces mauvais Anglais comme bon leur semble, 20665 Maleoit, voir Maleois Maleuré : adj. : infortuné, 14977 Maleureseument (tenir –) traiter mal, 138 Maleÿ, voir Maleois Malfait, voir Malfé Malfé, (malfait, maufé) : s. m. : démon, 1075, 8226 (Il a donné tel cuer a ces villains malfaiz que) il a donné tant de courage à ces vilains démons que, 3146 Malice : s. m. : peridie, 16356, 16526 s. m. : ruse, 17353 Malicïon, voir Maleïçon Maloustru : adj. : diforme, 56 adj. : mal élevé qui fait preuve de mauvaises manières (estre – a qqun) faire preuve d’un comportement inconvenant à l’égard de qqun (qui nous est maloustru) qui n’agit pas comme il le devrait envers nous, 3548 Maltalent : s. m. : conlit, 2039 (porter – que) être en colère contre qqun ? (et portons maltalent que le bastart Henry) et nous somme en colère contre Henry le bâtard, 7025 s. m. : chagrin ? (Et quant Pietres les vit de maltalent rongie) lorsque Pietres les vit rongées de chagrin, 12388 s. m. : mauvaise attitude ? (adont lui pardonna tout son maltalent) il lui pardonna sa mauvaise conduite, 21108 s. m. : rancœur (pour l’amour des seigneurs ou il ot maltalent) pour l’amour des seigneurs envers qui il (G. de Lonnoy) éprouvait de la rancœur, 3696 Malvaisement : adv. : diicilement (véz cy estat qui aiert malvaisement) voici une situation qui ne convient pas du tout, 8519
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Malvaité : s. f. : méchanceté, 18810 Malveillant : s. m. : ennemi (auquel lieu les Angloys et noz malveillant pourront estre trouvéz) en quel lieu nous pourront trouver les Anglais et nos ennemis, 4114 Manandie : s. f. : demeure, 8161, 21532 Manandise : s. f. : habitation, 17100 Manant : adj. : riche, opulent (riches et bien manans) très riches et fortunés, 7907 adj. : qui réside à un endroit ? (Dictes a voz bourjois et a voz gens manans) Dites aux bourgeois et à vos soldats qui résident ici, 8397 Manant : s. m. : habitant, 18575 (que touz ceulx de la ville, touz bourjois et manant) que tous ceux de la ville, tous les bourgeois et tous les habitants, 1900 Mancion, voir Mansion Mandement : s. m. : demande, 3360, 18390 Mander : vb. trans. : faire connaître par un envoi, 10151, 16813 (Quant il oÿ comment son chastellain mandoit) quant il entendit ce que son oicier demandait, 2768 (et manderent au roy ... la besoigne) ils envoyèrent au roi une lettre raportant la bataille, 4870 Mangier : s. m. : repas, 3885 Maniere : s. f. : apparence, 11840 (regarda la maniere de lui) elle regarda son allure, 106 s. f. : catégorie, sorte, 7069 s. f. : cour ? (en Angleterre vindrent, la ou estoit appresté la maniere du roy) il vinrent en Angleterre, là où la cour du roi était réunie, 2654 Manifesté : s. f., (faire –) se faire remarquer en mal ? (Oncques bon crestïen ne it manifesté) un bon chrétien n’agit jamais mal, 8614 Manoir : s. m. : demeure, habitation, 8631, 16775, 18563 Manoir : vb. intr. : demeurer, rester, 10635, 16170, 16425, 17460, 20464 vb. intr. : se situer (un point qu’il avoit ... de son pere Douart qui maint oultre la mer) un ief qu’il tenait de son père Edouart qui se situait de l’autre côté de la mer, 13281 Mansion, (mancion, mencion) : s. f. : demeure, 87, 1177, 5015, 5022, 7072,
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7555, 8889, 10589, 16956, 20344 Mant : s. m. : message, 13259 s. m. : ordre (Et Bertrant vers le roy s’en ala a son mant) Bertrant s’en alla vers le roi sur son ordre, 18352 Marchander : vb. intr. : négocier, 5101 (– de qqch) conclure un marché à propos de qqch, 7407 Marche : s. f. : région, pays, 20623 Marché : s. m. : endroit (et si ce it mener ou marché ou le champ on ot fait ordonner) et il se it accompagner à l’endroit où la bataille fut décidée, 2388 s. m. : en place publique (chascun sur le marché eu la teste coppee) chacun eut la tête tranchée en place publique, 5310 Maree : s. f., (avoir grande – de qqch) avoir grande quantité de qqch, 12592, 15573, 19476 Mariement : s. m. : mariage, 10052, 15298 Mariner : s. m. : marin, 14718, 15007, 15011, 15023, 15026, 15035, 15040 Marle : adj. : masculin (si n’est oyr marle) si ce n’est un héritier de sexe masculin, 20102 Maroys : s. m. : marais, 4263 Marrien, (merrien) : s. m. : pieu, 8208, 10871, 18115, 20947 Marrison, voir Marisson Marrisson, (marrison) : s. m. : trouble, aliction, 1170, 5953, 6820, 7882, 7891, 8903, 10150, 12149, 12727 Martelis : s. m. : bruit des armes qui s’entrechoquent (La peüst on oÿr un martelis pesant) on pouvait entendre ici le fort bruit des armes qui s’entrechoquent, 21400 Martir : vb., (– en+ lieu) être voisin de, être frontalier de ?(car si chastel estoient en France martissant) car ces châteaux étaient frontaliers de la France, 3452 Martire : s. m., (livrer qqun a –) livrer qqun au supplice, 9432 Masiere : s. m. : muraille (L’un se souhaide a huy et l’autre a masïere) l’un souhaite être à la sortie, l’autre à la muraille, 21185 Masnie, voir Maygnie Masse : s. f., (porter la – de qqun) se battre pour qqun ? (De la court du roy suis pour sa masse porter) je fais partie de la cour du
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roi, je me bats pou lui, 12692 Massis, voir Macis Massonné : adj. : inventé ?, 13212 Massonner : vb. trans. dir. : creuser, endommager ? (Moult volunters alassent prés des murs massonner mais les pierres d’en hault les irent reculer) Ils eurent été bien volontiers près des murailles pour les endommager mais les pierres jetées d’en haut les irent reculer, 3562 Mat : adj. : abattu, découragé, 1496 Maté, (mathé) : adj. : vaincu, 4138, 4789, 13374, 14960 adj. : terminé (quant la bataille fu desconite et matee) quand la bataille fut achevée, 4781 Mater : vb., (– le champ) mener la bataille à son terme, 2393 Mathé, voir Maté Matiere : s. f. : histoire, 12227 Matin : s. m. : chien de garde, 1435, 6578, 16444 Matin : s. m., (a un – s’en vint) un jour arriva, 247 Mauffé, voir Malfé May : s. m., (le may et l’avril) mois dédiés aux combats, 20621 Mectre : vb. trans. dir : (– qqun sus) aider qqun à prendre le pouvoir ? (– sur a qqun que) accuser qqun de, 3464 (pour Henry la bastart aider a mectre sus) pour aider Henry le bâtard à prendre le pouvoir, 8363 (y – trop) en faire trop ? (Rendéz vous, vous y avéz trop mis) Rendez-vous, vous en avez trop fait, 12045 vb. pron. : s’assener des coups, 5291 vb. pron. : (se –+inf.) entreprendre de faire qqch, 2100 (se – a la voie) se mettre en route, 7698 (se – sus de soy) se placer plus haut que ce que l’on est ? (et outéz ces Juifs et sus de vous mectéz) chassez ces Juifs et agissez selon votre rang royal, 6760 Mediciner : vb. pron. : se soigner (pour moy mediciner) pour me soigner, 20705 Mehaigner, (mehayner) : vb. trans. dir. : blesser, 3524, 3560, 4520, 5445, 8063 Mehayner, voir Mehaigner
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Meisel : s. m. : tourment ? (la perte, le meschief, le doleureux meisel) la perte, le dommage, le douloureux tourment, 19601 Mejour : adj. : plus grand (en deux lieux ou en plus est des mejour rasé) ils sont remplis par les plus grands sur deux lieues ou plus, 3128 Membre (sur les – copper) sous peine d’avoir les membres coupés ? (Et si nous a bany, sur les membres copper) il nous a banni en menaçant de nous couper les membres, 9419 (le nous a defendu sur les membres copper) il nous l’a interdit sous peine d’avoir les membres coupés, 8030 Membré, voir Menbré Membru, voir Menbru Menacer : (– qqch a qqun) faire craindre qqch à qqun, 13334 Menbré, (membré) : adj. : sage, 429, 2308, 5679, 5873, 6659, 10954, 13080, 13706, 13718, 14275, 16789, 17610, 19486, 19836, 21733 (aler chiere –) faire preuve de maîtrise au combat, 6058 Menbru, (membru) : adj. : renommé, 404, 8373, 14626, 17276, 17289, 19521 Mencion, voir Mansion Mencion : s. f., (estre – de) qqch est évoqué (quant il sceu de vray qu’il en fu mencïon) quand il fut certain que la rumeur se répandait, 9151 Mendre : s. m. : le moins bon combatant (Et quant mendre de vous vous veult suspediter) et lorsqu’un moins bon combattant que vous veut vous soumettre, 5542 (le mendre au besoign y valu Rollant) le plus mauvais pouvait valoir un Rollant si nécessaire, 4199 (neenplus que le plus mendre qui ou champ soit) pas plus que le plus petit qui soit sur le champ de bataille, 219 Mener : vb. trans. dir. : diriger une armée, 2781 (– laide vie) passer un mauvais moment, 18012 (estre fort –) être blessé ? (Quant le cheval senti qu’il estoit fort menéz) lorsque le cheval sentit qu’il était blessé mortelement, 2532 vb. trans. dir. : traiter (c’est grant pitié dont ainsi suis menee) la manière dont je suis traitée est aligeante, 6672
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vb. pron. : se comporter, 294 Menestrer, voir Menestrier Menestreus, voir Menestrier Menestrier, (menestrer, menestreus) : s. m. : menestrel, 339, 530, 5720, 8850, 8851, 9904, 9964, 9968, 9971, 15229, 17812 Mensongier : adj. : menteur, 5438 Mentir : vb. trans. ind. : être contredit par les événements, 19348 (– sa foy envers qqun) manquer à ses engagements envers qqun, 20651 vb. intr. : failir, 3993, 20670 (– sa foy envers qqun) manquer à ses engagements envers qqun, 12400 Menton : s. m., (qqch pent au nes et au – de qqun) qqch menace d’arriver à qqun, 10593 Menuz : s. m. plur. : les gens du peuple, opposé ici à grand (oncques si beau disner, se croy, ne fu veü que je feroie ennuyt des grans et des menuz) jamais un si grand dîner comme je le ferai n’aura été vu autant par les riches que par les pauvres, 399 Mer : s. f., (la haulte –) la côte (la haulte mer costie) il longe la côte, 14996 Merci : s. m., (avec ses –) avec son autorisation ? (Or me juréz ...que vous ne partiréz si si auréz vostre congié pris au prince suisant ou vous estez assis et que avec nous vendréz avec ses merciz) Jurez-moi ... que vous ne quitterez pas ce lieu sans avoir révoqué l’hommage que vous avez juré au prince auquel vous êtes soumis et que vous nous accompagnerez avec son consentement, 12100 (venir a –) se soumettre (a venir a mercy bellement) à se rendre sans se hâter, 20816 Mercier : s. m. : marchand, 383 Mercïer (ce fait a –) formule de remerciement ?, 12721 Mercïer : vb., (ce fait a –) formule de remerciement ? (Sire, dist le roy Henry, ce fait a mercïer) Sire, dit le roi Henry, mille mercis, 12680 Merdaille : s. f. : ensemble de personnes méprisables, 5934 Merencolier : vb., (– comment) réléchir à qqch (Ainsi comme Bretrant va merencolient comment prise seroit la cité) Bertrant réléchissait à la manière dont la cité pouvait être prise, 16655 Merir : vb. trans. dir. : récompenser, 3236 (Je pris cellui Dieu ... que l’onneur que me faictes il vous face merir) Je prie Dieu ... qu’il vous récompense pour l’honneur que vous me témoignez,
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8793 Merrien, voir Marrien Merveiller : vb. pron. : s’étonner, 1524, 10408 vb. pron. : se demander, 4477 Més : s. m. : messager, 20631 Mesaise : s. f. : soufrance (en mesaise endurant) supportant les soufrances, 17348 Mesavenir : vb. imp. : arriver malheur, 9088 Meschance : s. f. : malheur, infortune, 4462 Meschant, (meschent) : adj. : qui a une santé fragile, 56 adj. : mauvais, 15005 adj. : misérable, 61, 2253, 16173, 16201 (faire qqun –) rendre qqun misérable ?, 4044 Meschent, voir Meschant Mescheoir : vb. imp. : arriver du mal, forme P3 fut. ind. [mescherra], 6003, 10231, 10336 Mescherra, voir Mescheoir Mescheÿ, voir Mescheoir Meschief : s. m. : méfait, mauvais coup, 1292, 1873, 3449, 10361, 10933, 13000, 16683, 17552 s. m. : dommage, 4664, 5768, 11324, 17348, 17908, 19115, 19117, 20603 Meschin : s. m. : jeune homme, 5 Mescreant : adj., (ne pas estre – de qqch) ne pas douter de qqch ? (n’en soiéz mescreant.) soyez-en certain, 16427 Mescroire : vb. trans. dir. : mettre en doute (ne le mescreéz ja) ne mettez jamais cela en doute, 2948 Mesel : adj. : attaqué par la lèpre (car le visage avoit d’un moult hydeux semblant, tout mesel et defait) car son visage s’en trouva déiguré, tout entier attaqué par la lèpre et diforme, 2701 Mesel : s. m. : boucher (comme char a mesel e vont tout decoppant) il le découpe comme un boucher découperait de la viande, 21431 Meserrer, voir Mesherrer Mesfaire : vb. trans. ind. : blesser (ne lui mesit neent) il ne lui it aucun mal, 718 vb. trans. ind. : faire du tort à qqun (si ne m’ont riens mesfait .i. denier seulement) ils ne m’ont causé aucun
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tort, 9696 vb. intr. : causer des dégats (par quoy pierres d’engin qui liens sont gictees ne mesfacent leans une pomme pelee) par quoi les pierres qui sont jetées des catapultes ne fassent aucun dégat à cet endroit, 5040 vb. intr. : commettre une faute (car qui fait ce qu’il doit, j’ose bien dire au cler que de riens ne mesfet) car celui qui fait son devoir, j’ose dire clairement qu’il ne commet jamais de faute, 18869 vb. pron. : commettre une faute (Si Henry s’est mesfait, si lui en donnéz pardon) si Henry a mal agit, pardonnez-le, 6826 Mesherrer, (meserrer) : vb. intr. : pécher (que un crestien ne vault riens ... puisqu’il fausse sa loy et qu’il a meherré) qu’un chrétien ne vaut rien lorsqu’il a trahi sa religion et qu’il a commis des péchés, 8613 vb. intr. : commettre une faute, 20395 (Et puis qu’ilz ont mespris et qu’ilz ont meserré) et puisqu’ils ont commis une faute et qu’ils ont mal agit, 19955 Meslé : adj, (la barbe –) la barbe poivre et sel ?, 12445 Meslee : s. f. : combat, 2306, 3792, 4585, 5324, 6055, 6059, 7880, 8328, 10958, 11821, 13884, 15589, 15596, 17606, 17634, 18435, 20478, 20487 (avoir grant – de qqch) avoir qqch en grande quantité ? (de vins et de bochers y avoit grant meslee) il y avait du vin et des poissons en grande quantité, 1936 s. f. : poursuite du gibier (comme le chien assault le serf en meslee) tout comme le chien attaque le cerf lors de la chasse, 6081 Mesler : vb. pron. : se battre, 9882, 9956, 11727 (et si se voudroit bien pour moy mesler) : il voudra bien combattre pour moi, 9732 (se – entre qqun) semer la discorde entre des personnes, 3433 vb. pron. : se préocuper (d’aler en Engleterre ne vous convient –) ne vous préocupez pas d’aller en Engleterre, 9739 vb. pron. : (se – de qqun) s’occuper de qqun, 12308 Mesprendre* : vb. trans. ind. : commettre une faute envers qqun, 789,
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3366, 3470, 19954, 20069 (– vers qqun) mal agir envers qqun, 13021 vb. intr. : commettre une faute, 9824, 16473, 16487, 20128, 20422, 20427 (Et puis qu’ilz ont mespris et qu’ilz ont meserré) et puisqu’ils ont commis une faute et qu’ils ont mal agit, 19955 vb. pron. (se – de qqch) se fourvoyer en qqch, 12104 Mesprison : s. f. : action blâmable, faute, 6394, 8873, 18510, 19716 (sans –) d’une manière honnête, 12439 Message : s. m. : messager, 2763, 3318, 3811, 3911, 5001, 7037, 7041, 9390, 10708, 14472 Mestier : s. m. : occupation (Bien y avoit mestier Bertrant) Bertrant y avait beaucoup à faire, 4959 (avoir – (de) avoir besoin de, 2930, 3344, 3883, 4519, 5220, 5420, 5697, 6034, 7745, 8979, 9006, 9414, 9574, 9693, 10839, 12260, 12475, 12497, 12872, 13569, 13668, 14139, 14403, 14816, 15548, 16556, 16675, 17926, 18666, 20137, 21231 (avoir –) avoir l’habitude, 923 (estre –) être nécessaire (Sur vostre garde soiéz, mestier est aujourduy) soiez sur vos gardes, ceci est indispensable aujourd’hui, 20637 (estre –) être utile (bien mestier en seroit) ceci serait bien utile, 16663 (faire –) apporter son aide à qqun, 17791 (faire –) jouer d’un instrument (Trompes et chalemies ... faisoient mestier) ils faisaient sonner trompettes et chalumeaux, 11771 (jouer de –) agir avec ruse (Si aussi bien je savoie jouer d’aucun mestier) si je savais agir avec ruse aussi bien que, 17558 :(gens de –) personnes qui exercent une profession manuelle de type artisanal (toutes gens de mestier et bourjois seignoris) tous les artisans et les puissants bourgeois, 13579 Mestrier, voir Maistrier meudre : adj. sup. : meilleur, 17477 Mier : adj. : pur, 759, 6883, 16993, 17421, 17422, 17555, 18741 Mine : s. f. : trou sous un édiice pour le faire tomber, voir aussi Minere, 1108, 1181, 1185, 1187, 3983, 3985, 3986, 4000, 5058, 5243, 5246, 5256,
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5289, 5290 Minement : s. m. : action de miner, 5279 Miner : vb. trans. dir. : creuser sous un édiice pour en provoquer l’efondrement, 1171, 3566, 3889, 3897, 3988, 5059, 5060, 5245, 5247, 5260, 5268, 5269, 5271, 19205, 19254, 19321, 19329, 19332, 19373, 19375, 19378, 19420, 19423, 20775, 20787, 20812 vb. trans. dir. : creuser, 1180 Minere : s. f. : trou sous un édiice pour le faire tomber, voir aussi Mine, 1103, 1126 Mineur : s. m. : ouvrier creusant une mine, voir Mine, 1172, 1184, 1189, 3896, 3983, 3985, 3993, 5058, 5274, 5287, 5292, 20208, 20753 Miracle : s. f. : événement qui se produit par l’intervention de Dieu, 2674 Mire : s. m. : médecin, 3572 Missodour : s. m. : cheval de prix, 16098 Moiller, voir Moillier Moillier, (moiller, molier, mouiller, mouillier, moulier, moullier) : s. f. : femme, épouse, 2020, 3319, 4020, 5415, 5453, 5528, 5532, 6139, 6188, 6388, 6531, 6942, 7007, 7223, 7712, 7741, 8984, 9271, 9276, 9340, 9726, 9895, 10850, 11971, 12652, 14274, 14306, 14513, 16055, 17501, 17643, 21661 (car il ne fu pas né d’une loial moillier) car il n’est pas né d’une épouse légitime, 6999 Moillon, (moilon) : s. m., ((en) ou –) au centre, 10390, 20363 (Si fu l’escharboucle assise ens ou moillon) L’escarboucle était placée en son centre, 10571 Moilon, voir Moillon Moilon : s. m. : tas (et ruerent tout jus la pierre et le moilon) et ils jeterrent plus bas les pierres et le tas de gravas, 20343 Moinel : s. m. : sorte de petit cor, 19612 Mois : s. m. : forme poitevine pour mets (ne tant d’estranges mois servir a la volee) ni servir rapidement autant de plats hors du commun, 17618 Mois : s. m. : forme poitevine pour més, messager (Un mois envoia) il envoia un messager, 20951 Moitie : adv. : de beaucoup (Mais Bertrant faisoit pis lendemain la moitie) mais Bertrant faisait bien pire le lendemain, 212
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Mole : s. f., (se mettre en –) se mettre en train (A mal faire pluseurs se mectoient en mole) plusieurs d’entre eux commencèrent à mal agir, 17198 Molé : adj. : bien fait, 9269 Molier, voir Moillier Mon : adv., (si a –) c’est bien vrai, 13597 Monceaux, voir Moncel Moncel : s. m. : tas, amas (fain et ieurre qu’ilz ont leens a grans monceaux) du foin et de la paille qu’ils possèdent ici en grande quantité, 19307 Mondain : adj. : de grande qualité ?, 15247 (que les bourjois qui sont en la porte mondaine) car les bourgeois qui sont à la porte principale (la plus forte ?), 20051 Monde : s. m. : société, 552 Monnoié : adj., (dener –) monnaie frappée, 2182 (or –) pièce de monnaie en or, 19042 Mons : s. m. : monde, 193, 8641, 9395, 13434 Monstrer : vb. trans. dir. : passer en revue (une troupe), 11142 (– la cause) défendre qqun juridiquement ? (Et aprés cellui temps Guillaume s’en ala pour delivrer Bertrant et la cause monstra) après ceci Guillaume s’en ala pour libérer Bertrant et il plaida sa cause, 2848 (– talon) fuir, 17270 (jamais la cité ne monsterroit talon jusques atant qu’il auroit mis dedens son penon) il ne fuira pas pas jusqu’à ce que celui-ci ait planté son étendart à l’intérieur, 1062 Mont : s. m. : tas (contre le –) : vers le haut, 17110 (en un –) en une seule fois ( je ne puis penser que vous peusséz en un mont assembler) je ne peux croire que vous puissiez rassembler (la somme) en une seule fois, 13537 (mettre en un –) faire un tas (Le chastel et la tour ... mistrent tout en un mont) Ils détruisirent le château et la tour, 20342 (par –) en grande quantité (Et taillerent es boys et arbres et buissons et puis par dedens l’ost amenoient par mons) ils abatirent des arbres et des buissons qu’ils amenaient dans le camp en masse, 7972
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Montance : s. f. : valeur, montant, 1698, 3143, 4583, 6894, 11914, 15974, 16228, 19951 Monte : s. f. : valeur, 4258, 5019, 10649, 11394, 11867, 12436, 12736, 14112, 17004, 17103, 17449, 19702, 19715, 19992 Montee : s. f. : monture, 10944 Montelet : s. m. : petit monticule, 18529 Monter : vb. trans. dir. : procurer une monture à quelqu’un, 648, 1086, 4829, 14115, 14811, 14852 vb. trans. ind. : propulser en haut de l’échelle sociale (Et tant fu ce Bertrand par Fortune monté que) et Bertrand fut tant favorisé par Fortune que, 36 vb. intr. : s’élever à un certain montant (Je ne sçay que ce monte) je n’en connais pas la somme exacte, 10784 vb. pron. : s’acheter une monture (harnoix it achapter et moult bien se monta) il se it acheter une armure et il se procura une bonne monture, 2945 p. p. : pourvu d’une monture, 11191, 18370 Morel : s. m. : cheval, 15760 Morelet : adj. : brun, 18521 Morine : s. f. : mort (n’eüst cure comment elle fust mise a morine) il lui importait peu de savoir comment elle mourrait, 6591 Mort : s. f., (avoir –) tuer, 4695, 6047, 6048, 15396, 20729 (avoir la – juree) condamner à mort ? (mais ceulx de Normendie ... qui furent Navarroys eurent la mort juree) mais ceulx de Normandie avaient décidé la mort de ce qui furent de Navarre, 5309 (male –) mort cruelle, 3223, 8083, 12004, 12362 (trayre qqun a la –) : tuer qqun, 16272 Mortal : s. m., (voir –) assister à la mort de quelqu’un (Mais se vivre puis tant que le voye mortal) mais si je vis assez pour que je puisse le voir mourir, 377 (faire –) tuer (et ferons touz a noz ennemis mortal) et nous tuerons tous nos ennemis, 4253 Mortalité : s. m. : massacre, 8235 Mortalité : s. m. : épidémie (planté de grandes guerres et de mortalités) beaucoup de grandes batailles
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- Glossaire -
et d’épidémies, 2008 Mortel : adj. : qui mérite la mort (De mortel traÿson a Paris le suyvy) il le poursuivit en justice pour trahison qui mérite la mort, 11095 Mortier, (mourtier) : s. m. : vase solide pour piler des aliments, 3823, 19305, 19396 s. m. : mélange de sable et de chaux délayé dans de l’eau, servant à lier les pierres d’une construction, 17014 s. m. : poids ain d’éviter que la couverture ne se relève ?, 6885 Mosnier : s. m. : meunier, 347 Mouche : s. f. : abeille, 9169 Mouiller, voir Moillier Mouillier, voir Moillier Moulier, voir Moillier Moullier, voir Moillier Mourtier, voir Mortier Mouteplier : vb. trans. dir. : accroître (La prinst le nom Bertrant si a mouteplier que) La renommée de Bertrant commença tant à s’accroître que, 17020 Moyne : s. m., (– gris) moine franciscain, 19703 Moys : s. m., (des –) longtemps, 15226 Mucier, voir Musser Muer : vb. trans. dir. : basculer (A piques et a hoes ont un pillier mué) à l’aide d’armes ils ont fait basculer un pillier, 19060 (– de coleur) changer de visage, 13525 (– son semblant) changer de visage, 9229, 9486, 10738 (le sang mue a qqun) avoir peur de qqch ? voir note (Quand Olivier le voit, le sang lui est mué) lorsqu’Olivier voit ceci, il est efrayé, 2176 (le sang mue a qqun) son sang ne fait qu’un tour, 2952, 4814, 7516, 7836, 9421, 10024, 13145, 14459, 14685, 15462, 16252, 16344 vb. intr. : bouger (Quant le prince le vois, ne puet muer ne rire) lorsque le prince le vit, il ne put bouger ni rire, 13399 Mur : s. m., (gros –) : mur porteur, 19106 Mur : vb. intr. : subj prés P1 morir (je te monteray bien se je ne mur) tu verras bien si je meurs d’ici peu, 689
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Murail : s. m. : rempart, 3105, 6512 Murdre : s. m. : meurtre, 10252 Murdrier : s. m. : assasin, 7223, 10309, 16557 Murdrir : vb. trans. dir. : tuer, 6854, 7007, 7268, 7501, 8545, 9254, 9340, 10267, 10608, 10850 p. p. : assassiné, 8855 Muré : p. p. : fortiié, 11825, 20480 Murmurer : vb. trans. ind. : parler en mal de qqun (jusques atant que cellui qui va murmurant) jusqu’à ce que celui qui médit (de moi), 17511 Murois : s. m. : muraille, 19019 Muser : vb. intr. : jouer de la musette, 5721, 5847 Musser, (mucier) : vb. trans. dir. : dissimuler, 893, 4530, 10965, 10966 (et qu’il ne monstre tout sans aller riens mussant) et qui ne montre pas tout sans rien cacher, 1909 vb. pron. : se cacher, 245, 2673 Mut : adj. : silencieux, 1756 Muy : s. m. : unité de mesure, 20985 Mynuyt : s. f. : milieu de la nuit, 3744 Myrouer : s. m. : miroir, 9072 Nacion : s. f. : origine, 6843, 7069 (vostre nacion ... avéz assez regné contre ce qu’il monstra) : vous avez renié vos origines malgré tout ce que saint Thomas vous enseigna, 10020 s. f. : famille (bourjoises et bourjois et les grans nacïons) les bourgeoises et les bourgeois ainsi que les nobles familles, 8644 s. f. : peuple, 6849, 12420 Naffrer, voir Navrer Nager : vb. intr. : naviguer sur une nef, 14405, 15309 (En Bel Marin s’en va le roy Pietre nagent) le roi Pietres naviga vers Bel-Marin, 15152 (Par mer s’en vont nagent a l’aer et au vent) ils naviguèrent à l’aide de l’air et du vent, 15519 Narracion : s. f., (sans –) sans grands détails, 1051 Naturant : adj. : de nature ? (Encores est estornel autrement naturant) De plus, (Bertrant) est d’avantage proche de la nature de l’étourneau, 3288
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Naturau (adj.), voir Naturel, (adj.) Naturau : s. m. : noble, 3113 Nature : s. f. : famille, lignage (Bien va a sa nature) il est attiré par ses origines, 7003 (porter de la – de qqch) posséder les qualités de (et que de la nature d’un oysel porteroit) et qu’il possèderait les qualités d’un oiseau, 3274 Naturé : adj. : de bonne nature, 6051, 7475, 8240, 8422, 9195, 9198, 11196, 11725, 12781, 13140, 19918 adj. : grand ? (né est l’estornel o naturé portans) l’étourneau de ce grand présage est né, 3277 Naturel, (naturau) : adj. : d’origine noble, 19765, 19816, 19832, 19902, 19906, 20238 (bourjois –) bourgeois depuis la naissance ?, 8401 Naturellement : adv. : de naissance (et furent de Gascoigne tout naturellement) ils étaient nés en Gascogne, 15284 Navie : s. f. : navire, 18321 (a –) par bateau, 10676 Navire : s. f. : lotte (la navire fu preste) la lotte fut prête, 15270 Navré : s. m. : blessé, 6243, 8242 navrer, (nafrer) : vb. trans. dir. : blesser, 18748 vb. intr. : blesser, 199, 221, 1422, 1753, 1816, 2672, 3122, 4552, 4564, 4623, 4637, 4638, 4675, 4739, 4810, 4820, 5445, 6207, 8211, 18753, 18755, 20699, 20701, 20706 p. p. : blessé, 6205, 8331, 9840 Neant : s. m., (– contre –) de refus en refus ? (Et tant ala la chose neant contre neant) les négociations allèrent de refus en refus, 18187 Nectement : adv. : complètement, 21492 Nee, s. f, (n’acompter riens –) ne tenir compte de personne ?, 261 (il n’en sera riens –) il n’en sera rien, ceci ne peut se réaliser ?, 7856 (ne valoir chose –) ne valoir rien du tout (les Portugalois ne valent chose nee) les Portugais ne valent rien, 10084 (quant l’omme est mort, on n’y compte riens –) lorsqu’un homme est mort, on ne peut plus rien en faire, 3808
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Neé, voir Neer neenplus (ne ... neenplus que) ne ... pas plus que (voir note), 219 Neer : vb. intr. : noyer, 260, 11810, 11911, 18334 Nef, (netz) : s. f. : navire, 3934, 15270 s. f. : pièce de vaisselle en forme de navire, 16850 Nervé : adj. : solide, 3135, 15801 Nés : adv. : même (toute morte en son lit sans nés .i. recouvrier) morte dans son lit sans même un recours possible, 6892 Nés : s. m., (qqch pent au – et au menton de qqun) qqch menace d’arriver à qqun, 10593 Netz, voir Nef Nic : s. m. : nid, 20183 Nisse : s. m. : sot, idiot, 60, 122 Nobileté : s. f. : noblesse, 9273 Noblesse : s. f. : maniicience, faste, 12591, 12594 Noier : s. m. : noyer ? (Bertrant fu en l’aguet par dessus maint noier) Bertrant se tenait en embuscade au dessus de noyers, 3810 Noier, (noyer) : vb. trans. dir. : nier, 9003 vb. trans. ind. : mentir, 17394 (Or me dictes, paumier, ne me veilléz noier) parlez-moi, pèlerin, ne me mentez pas, 12663 Noif, (noys) : s. f. : neige, 15220 (il y fu tant par noif et par gelee que Toulecte afama) il y resta tant malgré la neige et le froid qu’il afama Tolède, 13207 Nom : adv : non, 16044 Nom : s. m., (de –) de renom, réputé, 4015, 7557, 8866, 10158, 10895, 12630, 15329, 15331, 15668, 16025, 16721, 16944, 17257, 17914, 18502, 20161, 20163, 21608, 21629 (en son –) personnellement, 17237 (porter son – entier) : mériter pleinement sa réputation ?, 21213 Nombrer : vb. trans .dir. : évaluer, 9027, 14112, 15564, 15845, 16008, 17012, 17433, 17879, 18024 vb. trans. dir. : identiier ? (Le roy Pietre nombrerent qui est sur le preel) il reconnurent le roi Pietre qui était dans le pré, 15759 Nombrer : vb. trans. dir. : évaluer
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vb. pron. : s’incarner ? (pour nous te nombras en la virge Marie) pour nous tu t’incarnas en la vierge Marie, 8697 Non (s. m.), voir Nom, (s. m.) Non : adv., (– si) sauf si, excepté si ? (ne jamais l’un de l’autre ne departirons, non si le roy de France ne prent guerre aus Engloys) nous ne nous séparerons jamais l’un de l’autre, sauf si le roi de France entre en guerre contre les Anglais, 7278 Noncier, (nuncier) : vb. trans. dir. : annoncer, 3343, 3353, 16225, 17566 vb. trans. dir. : annoncer qqun, 5434, 9912, 10405 vb. trans. dir. : dire (Par trois foyz volu le Besgues ces paroles noncier) Le Begues prononça ces paroles par trois fois, 16531 vb. trans. dir. : raconter, 14922, 16223, 18014 vb. trans. ind. : parler de, 12664 vb. intr. : raconter, 2898, 4509, 12651, 21561, 21579 Nonpourquant : adv. : cependant, 82, 2625, 4431, 5706, 6687, 15136, 16322, 16418, 16821 Nonpourtant : adv. : cependant, 15317, 15969, 17969, 18399 Norrisson : s. f. : lignage, famille, 7263 (combien que soiéz en vostre norrisson) bien que vous êtes entouré de vos proches, 2419 Norry : adj. : puissant, 20905, 21360 (– de) originaire de, 2814, 5236 Noter : vb. trans ind. : signaler, 1483 (– sur qqch) ixer son attention sur qqch (sur ce fait cy endroit commainça a noter) il porta son attention sur ce fait, 13305 (loy notee) religion consignée par écrit ? (que j’aroie es paiens de nostre loy notee) que j’aurais en les étrangers à notre religion qui est attestée par écrit, 15578 p. p. : prononcé (Et quant elle entendi celle chose notee) lorsqu’elle entendit ces paroles, 9453 p. p. : retenu, mémorisé, 4232 Notré : adj. : du pays, 20500 (Au .iiiie . chastel vont noz barons notréz) nos chevaliers se rendent au quatrième château, 19821
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(le prince notré et le roy Edouart ... devoient l’ordonnance tenir en seürté) le roi de France et le roi Edouart devaient assurer le respect du traité, 19947 adj. : noble ? (Ainsi comme Bertrant, au joly cuer notré) alors que Bertrant, au cœur noble, 21151 Nous : art. poss. plur. : nos, 5138 Nouvel : adj. : nouvellement, 20 (de –) depuis peu, 19522 Nouvelle : adv. : récemment ?, 4782 Noyent, (nyent) : adv. : rien, 4875 (quant sang de lui yssoit, n’en acontoit nyent) de se vider de son sang, il n’y prêtait aucune attention, 173 (ne ... –) ne ... pas, second élément de négation (et vont disant comment ilz n’ont trouvé noyent le ber Charles de Bloiz) et ils racontèrent comment ils n’avaient pas trouvé Charles de Blois, 6280 Noyer, voir Noier Noyer : vb. intr. : nager (poissons noyans y ot grande maree) il y eut grande quantité de poissons qui nageaient, 12592 Noyr : adj. : hideux, 56 Noys, voir Noif Noyse : s. f. : bruit, 3746, 4160, 17471 Noyser : vb. intr. : crier, 3827 Nu : adj. : sans arme ni armure, 407, 1750 (il voit qu’il estoit mal monté et tout nuz) il vit qu’il avait une mauvaise monture et qu’il était sans arme ni armure, 388 Nullement : adv. : si peu que ce soit, valeur positive en contexte de forclusif, 16426 (Je iray parler a lui, se je puis nullement) j’irai lui parler, si je peux, 12814 Nulluy : pron. : personne (a nulluy fors a vous) à personne d’autre que vous, 17407 Nuncier, voir Noncier Nuyre : vb. trans. dir. : causer du tort à qqun (Giefroy de Barimel qui moult Englois nuysy) Giefroy de Barimel qui causa grands torts aux Anglais, 20907 Nuysant : adj. : hostile, 3709, 4029
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(et mains Angloiz aussi qui moult furent nuysant au duc Charles de Bloys et au noble Bertrant) et également beaucoup d’Anglais qui furent ennemis du duc Charles de Blois et du noble Bertrant, 2715 Nuysant : s. m. : ennemi, 7383, 9485 Nuytie : s. f. : nuit, 1394, 5739, 9370, 13635, 15484, 17992 (gesir la – qq. part) passer la nuit qq. part, 14995 Nyent, voir Noyent O : prép. : avec (tout aussi comme le chien assault le loup o les dents) à la manière d’un chien qui attaque un loup à l’aide de ses dents, 168 Obeissant : s. m. : serviteur ? (Toute vostre volunté et vostre commant volons faire touz comme vray obeissans) nous voulons accomplir votre volonté comme de vrais serviteurs, 8587 Obliger : vb. trans. dir. : donner qqch en garantie (que je oblige mon corps ... que on me face ardoir en un feu justement si cellui enfant ne vient a honneur grandement) que je mets mon corps en gage ... et qu’on me fasse brûler en un bûcher si cet enfant n’acquiert pas les plus grands honneurs, 142 Octasion : s. f. : poursuite en justice, querelle, (Gdf) (gardéz vous qu’il n’y ait souspeçon en ceste gent icy ne malvaise façon dequoy avoir peusséz nulle octasion) faîtes attention à ce que ces personnes ici présentes n’aient aucun soupçon ni qu’il n’y ait aucun délit pour lequel vous puissiez être poursuivi en justice, 12930 Octire : vb. trans. dir. : tuer, 5980 Octision : s. f. : meurtre, 7260 s. f. : massacre, 1185 Octroier : vb. trans. dir. : accorder, 1685, 4383, 5457, 7162 (ce fait a –) ce fait est bien certain ?, 9013 vb. trans. dir. : admettre, consentir (droiture si octroye) il n’admet ici que la justice, 4946 vb. trans. dir. : autoriser (car bon fait obeÿr la ou raison l’octroie) car il est bien d’obéir à ceux que la raison autorise, 4943 vb. pron. : consentir (Se, dist le chastellain, faire je m’y octroie) si, dit le châtelain, je consens à le faire, 3216
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vb. pron. : s’accorder, 5461, 7158 (ma volunté s’octroye qu’il n’aie garde de mort) ma volonté s’accorde à ce qu’il n’ait pas à craindre la mort, 3230 vb. pron. : se dévouer à qqun (Qui laisse son seigneur et a autre s’octroie) qui délaisse son seigneur et se dévoue à un autre, 4944 Odorable : adj. : qui possède une odeur agréable, 20461, 20561 Oïl : adv. : oui, 1770, 3035 Oirre : s. m. : voyage (Lors apprestent leur oirre tout communeement) il préparèrent leur voyage tous ensemble, 16636 Oiseux : adj. : paresseux, 15016 Oliffant : s. m. : cor d’ivoire, 3022 Oncques : adv., (– mais) jamais, 6266 Onneur, voir Honneur Onnice* : adj. : serrée (d’une maille onnice meulx que ne saroie dire) d’une maille serrée d’une façon indescriptible, 11480 Onnourance, voir Honnourance Onnye : adj., (entente –) conviction sans faille ? (ainsi bien comme je croy de vraye entente onnye que) aussi bien comme je crois avec une conviction sans faille que, 5413 Oppinion : s. f. : manière d’agir (avoir – contre qqun) agir contre qqun ? (jamais encontre vous n’aray oppinion) je n’agirai jamais conre vous, 12624 (et Pietres qui regna en male oppinion) et Pietres qui gouverna d’une très mauvaise façon, 6637 (par telle –) en telle manière, 17905 s. f. : intention (Et les felons Juifs de faulce oppinion) et les méchants Juifs remplis de mauvaises intentions, 6846 Oqueton, voir Auqueton Or : adv. : maintenant (Nous avons bel parlé comme gens bien sachant, or nous convient de fait ouvrer en combatant) nous avons bien discuté comme des gens savants, il nous faut maintenant agir en allant combattre, 5766 Oraine : adj. : fait d’or, 20048
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Oratoire : s. m. : pavillon ouvert sur le côté et dressé temporairement dans une église pour un roi ou un seigneur, 12991 Ordenance, voir Ordenance Ordonnance, (ordenance) : s. f. : disposition, 4610 (d’–) par un édit royal, 18399 s. f. : accessoire ? (parmi les ordonnances que la mule auroit) grâce aux accessoires que la mule portera, 10039 s. f. : accord (le prince notré et le roy Edouart ... devoient l’ordonnance tenir en seürté) le roi de France et le roi Edouart devaient assurer le respect du traité, 19949 Ordonné : adj. : habile (Or vous diray comment il estoit ordonné) je vous parlerai de son habileté, 3096 adj. : de bonne facture ? (Adont le it armer d’armeüre ordonnee) il le it armer d’une armure bien faite, 10097 adj. : loyal ? (ce doit faire proudons s’il est ordonné) un homme de bien doit faire ceci s’il est loyal, 13098 adj. : équipé, 14159 (Je seray en l’aguet richement ordonnéz) je me tiendrai en embuscade très bien armé, 3730 Ordonnee* : s. f. : préparatif (Mais grande fu contre sa venue ordonnee) les préparatifs furent nombreux pour sa venue, 12584 Ordonnement : s. m. : ensemble des armes ? (vous me sembléz englois a vostre ordonnement) vous ressemblez à un Anglais à votre accoutrement, 708 s. m. : préparatif, 17076 s. m. : troupe ?, 17212 (Et irent .v. batailles en leur ordonnement) ils divisèrent l’armée en cinq bataillons, 15846 (Le plus pouvre qui soit en nostre ordonnement sera riche a tousjours) le plus pauvre de notre troupe sera à jamais riche, 15786 Ordonner : vb. trans. dir. : établir, 2826 (– les vers) rédiger correctement, 25
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(–+ titre + de qqun) nommer qqun à un poste (seneschal ordonnerent d’Alain) : il nommèrent Alain sénéchal, 21486 (ordonner qqun a qqun) ofrir qqun en mariage à qqun ? (Et si lui a le roy sa ille ordonnee et la doit espouser aprés guerre inee) le roi lui a promis sa ille en mariage et il doit l’épouser une fois la guerre terminée, 15406 vb. trans. dir. : placer en ordre de bataille, 5590 vb. trans. dir. : prendre des décisions sur le sort de qqun (si sont mes prisonniers et par bon convenant j’en saray ordonner) ils sont mes prisonniers et je saurai parfaitement décider de leur sort, 12059 vb. intr. : placer en ordre de bataille, 5800, 11511 vb. pron. : se placer en ordre de bataille, 5780, 6098, 8482 p. p. : préparé, 3907, 3916 Ores : adv. : maintenant, désormais, 1489, 17439 Orfroys : s. m. : broderie en bordure, exécutée en ils ou lamelles d’or, d’argent, de soie, 10980, 15200 Orgueilleux : adj., (estre – contre qqun) : être hostile à qqun, 14443 Orine : s. f. : origine (Les barons du païs qui sont de bonne orine) les barons du pays qui sont issus de familles nobles, 6601 (Pietres, roy d’Espaigne, en haÿ la roÿne qui donné lui fu de sa loial orine) Pietres, le roi d’Espagne, haïssait la reine qui lui fut donnée en mariage à cause de ses origines nobles, 6582 (ce conte Henry qui fu de grant orine) ce comte Henry qui fut d’origine noble, 6608 Orion, voir Horion Orisflambe : s. m. : orilamme, 7483 Os : s. m. plur. ? : armées, 622, 11083, 12152, 15705, 21587 Oscurté : s. f. : obscurité, 3748 Osé, voir Ousé Osiere : s. f. : rameau d’osier (Quant il choisi noz gens aussi droit que une osiere) quand il vit nos soldats droits comme des piquets, 11991 Ost, (os, oust) : s. m. : armée, 1074, 1124, 1133, 1134, 1139–1141, 1251, 1274, 1303, 1313, 1314, 1329, 1352, 1371, 1392, 1401, 1406, 1409, 1414, 1436, 1461, 1467, 1473, 1481, 1597, 1858, 1864, 2197, 2212, 2668, 2669, 2676, 5063, 5142, 5425, 5437, 5697, 5726, 6050, 8478, 8499, 8629, 9391, 14570
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(– banie) armée levée par proclamation, 14724 Ostéz, voir Houstel Otri s. m., (a son –) pour en disposer librement (Chevalier vous feray et vous donray aussi terre et grant avoir de tout a vostre otry) je vous ferai chevalier et je vous donnerai également des terres et des biens dont vous pourrez disposer librement, 1641 Ou : pron., (la –) pendant que (la ou le roy Jehan ... estoit en Engleterre) pendant que le roi Jean était en Angleterre, 2626 (– que) là où, 19400 Oubly : s. m., (mectre en –) oublier, 15614 (les .xx.M. lorins ne mist pas en oubly) il n’oublia pas les vingt mille lorins, 13992 Ouffrir : vb. pron. : se donner en sacriice (Et s’il ne advient ainsi, je me oufre que me facéz ardoir en feu vilainement) et s’il n’en advient ainsi, je me donnerai en sacriice pour que vous me fassiez brûler sur un bûcher, 150 Oultrageux : adj. violent, 5035, 14658 Oultrecuidant : s. m. présomptueux, 10755 Oultrecuidé : adj. : présomptueux, 18633 Oultrecuider : s. m. : arrogance, 21228 Oultrecuiderie : s. f. : audace, 4418 s. f. : arrogance (et me dueil et me plains de l’outrecuderie du bastart oultrageux) je viens me plaindre de l’arrogance de ce violent bâtard, 10489 s. f. : présomption, 10521, 21533 Oultreement : adv. : gravement ?, 18755 Oultremer : adv. : en Orient ? (j’ay le cuer desirant de passer oultremer ou nom Dieu le puissant et combatre aus paiens a l’espee trenchant) j’ai le désir de traverser la mer (vers l’Orient) au nom de Dieu le puissant et de combattre les Sarrasins de mon épée afûtée, 7098 Ourgueillir : vb. trans. dir. : inspirer de l’orgueil à qqun (quant Ourgueil lui fait faire son gré en ourgueillant) lorsque Orgueil lui fait faire ce qu’il désire en lui insulant la vanité, 10754 Ousé, (osé) : adj. : téméraire, 2178, 3118, 3132, 5654, 6803, 10091, 14983, 18815, 21158 Oust, voir Ost
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Ouste : s. m. : maître des lieux, 7127 Oustel, voir Houstel Ousteler, voir Housteler Ouster, voir Outer Outer, (ouster) : vb. trans. dir. : chasser (et outéz ces Juifs et sus de vous mectéz) chassez ces Juifs et agissez selon votre rang royal, 6760 (avoir la teste –) être décapité (Et Mahieu de Gournay aura la teste oustee) Mahieu de Gournay sera décapité, 9775 Outrecuderie, voir Oultrecuiderie Ouvrage : s. m. : ornement réalisé par un orfèvre, 693 Ouvrer : s. m. : travail, ouvrage, 5275 Ouvrer : vb. trans. dir. : accomplir, réaliser (– de fait) agir par des actes concrets (Nous avons bel parlé comme gens bien sachant, or nous convient de fait ouvrer en combatant) nous avons bien discuté comme des gens savants, il nous faut maintenant agir en allant combattre, 5766 (– de) faire preuve de ? (le roy Englois pourroit bien dire par raison que vers lui nous auroions ouvré de traïson) le roi anglais pourrait bien dire justemet que nous avons fait preuve de trahison envers lui, 21637 (au dimanche devoient ceste besoigne ouvrer) ils accompliraient cette tâche le dimanche, 9439 vb. intr. : agir, 655, 5763, 6209, 8340, 9423, 14868, 20072 Ouvrie : s. f. : ouverture ? (a l’ouvrie de la porte) sur le pas de la porte, P=ouvrir, 3732 Oux : s. m. plur. : os (on ne y trouva nulz – que tout ne fu ardant) : on ne trouva aucun os qui ne fut entièrement brûlé, 10363 Oy : adv. : aujourd’huy, 4662 Oÿe : s. f. : tempe, 962 (voir à l’–) percevoir ostensiblement (littéralement : voir avec ses oreilles), 197 Oyr, voir Hier Oysere : s. m. ? : branche d’osier, 21177 Paennine* : adj. fém. : païenne
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(vostre bataille menéz contre gent paennine) vous mènerez vos troupes contre les paiens, 15922 Pagre, (pasgre) : s. m : page, 6240, 11237 Paiement : s. m., (avoir son –) avoir son compte, en avoir assez, 177 Paier : vb., (– un cop) donner un coup (D’une dague qu’il tint lui va .iii. cops paier) il lui donna trois coups à l’aide d’une dague qu’il tenait, 16546 Paille : s. f. : balai en paille ? (la pouldre va levant plus tost que ne fait paille) elle enlève la poussière plus vite que ne le fait un balai, 5938 Paille : s. m. : riche tissu de soie, 4804 Painture : s. f. : banière, enseigne (en painture notree) portant nos couleurs, 20500 Painturé : p. p. : décoré, 12586 Paire : s. m. : compagne, 16273 Païs (plat –) la campagne, par opposition aux places fortiiées, 15655, 15694, 18373 Païs : s. m., (plat –) la campagne, par opposition aux places fortiiées, 13602 Paiser, voir Paisier Paisier, (paiser) : vb. trans. ind. : négocier la paix (a Bertrant ont paisié par certaine inance) ils ont conclu la paix avec Bertrant moyennant inance, 18408 vb. trans. ind. : faire la paix (Se vous vouléz paiser sans combatre noient) si vous voulez conclure la paix sans combattre, 21283 Paistre, voir Paitre Paitre, (paistre) : vb. trans. dir. : tondre (mais force pait le pré) avec de grands ciseaux on parvient à tondre un pré, 14890, 20221 Paix : s. f., (faire –) faire silence, 17, 4160 (faire sa –) conclure un accord de paix, 9298 (mettre a –) apaiser une tension (nous mectrons a paix ceste discension) nous règlerons ce désacord, 2424 (mettre la – a qqun de qqun) réconcillier qqun avec qqun ? (Le roy Pietres vous mande ... que vous mectéz la paix a Henry le puissant et de lui ensuyvant) le roi Pietres vous demande ... de le réconcillier avec le puissant Henry, 9215 Pal : s. m. : pieu, 975
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Palestier, voir Paleter Paleteis, voir Paletis Paleter, (palestier, palleter) : vb. intr. : combattre, 2117, 18496 (Sur la rivere vont les pluseurs palestier) la majorité partit combattre dans la rivière, 2784 Paletis, (paleteis) : s. m. : combat sous les murs d’une ville, 3677 s. m. : endroit clos (par métonymie) ? (Adont issi Bertrant tout hors du paleteis) Bertrant sortit hors du camp, 21244 Palis : s. m. : palissade, 20947, 21074, 21241 Palleté : p. p., (– d’argent) orné de paillettes d’argent, 4803 Palleter, voir Paleter Pameson, (pamison, panison) : s. f., (estre en –) être évanoui, 10130 (cheoir en –) s’évanouir, 20549 (gesir en –) être évanoui, 20777 Pamison, voir Pameson Panison*, voir Pameson Pannetier, (pennetier) : s. m. : oicier chargé de le distribution du pain, 356, 11376 Paour : s. f., (avoir – de qqch) avoir peur pour qqch (Turquant et Daviot eurent paour de leur vie) Turquant et Daviot craignirent pour leur vie, 9360 Par, (part) : s. f. : partie (– grant) beaucoup ?(chacun par grant despit la place ou est venuz) chacun maudit grandement l’endroit où il est venu, 14623 (– soy) soi-même ? (Leur ville ont par eulx fermee fermement) ils ont eux-même fortement fortiié leur ville, 9377 (par eulx proprement) de leur propre initiative, 9378 (a –) autour, 6276 (de –) au nom de, 131, 595, 629, 1592, 2020, 2721, 2733, 2740 (estre a – soy) être isolé, être tout seul, 83 (tant que Bertrant eust parfaitte par atie) jusqu’au moment où Bertrant disputerait une joute parfaite, 505 (traire qqun a une –) isoler qqun de la foule, 5529 Paraux : s. m. : plur. : égaux (je croy que nul jour ne vit homs ses paraux) je crois que nul homme ne vit jamais son pareil, 19292
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Parc, (part) : s. m. : grande étendue de terres et de bois clôturée, où l’on garde et élève en liberté des animaux pour la chasse, réserve de chasse, 5736, 5742, 5774, 5789, 5813 (un parc it entour lui) il libéra de l’espace autour de lui, 1001 s. m. : camp militaire (faire un –) délimiter une zone de combat ?, 10311 s. m. : camp militaire, 21241 Parcevoir : vb. trans : voir, apercevoir, 876, 880, 4888, 10633, 12549 Parcie, voir Percer Parçon, (parson) : s. f. : part (Oncques n’en fu demandé par vous parsons) vous n’avez jamais réclamé votre part, 10773 (avoir qqch en sa –) avoir sous son contrôle ? (La .iie . bataille auréz en vostre parçon) la deuxième troupe sera sous votre commandement, 11381 (avoir qqch en sa –) posséder qqch ? (Sarrazins et Juïfz y avoit a foyson qui avoient leur fort chascun en sa parçon) il y avait beaucoup de Sarrasins et de Juifs qui possédaient chacun leur fort, 7903 (en avoir sa –) en avoir sa part (Seigneurs, dist l’englois, j’en ay bien ma parçon) Seigneurs, dit l’Anglais, j’ai accompli ma part du travail, 10135 (mener en sa –) diriger ? (la .iie . bataille mena en sa parson) il dirigea la seconde troupe, 10899 s. f. : camp, côté (Et n’y aura cellui de ceulx de nostre parson qui) il n’y aura personne de notre camp qui, 860 (avoir qqch en sa –) avoir sous son contrôle ? (Juïfz et Crestiens avoit en sa parçon) il avait des Juifs et des chrétiens sous ses ordres, 16009 Pardevant : s. m. : devant ?, 19094 (Ja leurs coureurs avoient tramis au pardevant) ils avaient déjà envoyé leurs éclaireurs au devant, 18581 Parement : s. m., (de –) d’apparat (sur un lit sont assis qui fu de parement) ils s’assirent sur un lit qui était d’apparat, 12998 Parent : adj. : de belle apparence, 20699, 20733 adj. : légitime ? (deux hiers qui se disoient estre les mieulx parent) deux héritiers qui
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pensaient être les plus légitimes, 575 Parent : s. m. : apparence (Les deables le font tenir a ce parent) il doit son apparence aux démons, 1154 Parenté : s. f. : famille, 470, 1080 (entrer en –) intégrer une famille par un mariage ? (Par dedens Sarmarant ... fu dam Pietres le roy entré en parenté) à Samarant ... le roi Pietres entra dans la famille (royale), 15234 Parer : vb. trans. ind. : préparer à (car le bon vin fait homme a ardement parer) car le bon vin rend l’homme prêt à toutes les audaces, 19275 (estre – de qqun) être accompagné de qqun (noblement paree de chevaliers hardiz) très bien accompagnée de vaillants chevaliers, 8836 p. p. : pelé (homme n’y puet trouver une pomme paree) personne ne pouvait rien y trouver (littéralement : pas même une pomme pelée), 11264 Parfondir : vb. trans. dir. : creuser, 3307, 7915 vb. trans. dir. : fracasser, estropier ? (Lors Bertrant d’une hache le cappitaine fery, decy jusques aus dens tout lui parfondy) Bertrant frappa le capitaine avec une hache, il lui ouvrit le crâne jusqu’aux dents, 17139 Parfont : adj. : profond, 14400, 20430, 20765 Parfourni : p. p. : achevé, mené à son terme (Et ainsi demoura ceste paix parfournie) ainsi se conclut cette paix, 12401 Parisi, (parysy) : s. m. : monnaie de Paris, 12520, 12903, 13996, 16285 (priser deux –) ne prêter aucune valeur à, 6225 (qui en lui demourra vaillant .i. –) : qu’il ne lui restera plus rien, 9832 (valoir deux –) ne rien valoir du tout, 18232 Parjur : s. m. : menteur, 19508 Parjuré : adj. : qui viole son serment, 19939 Parjurer : vb. pron. : violer un serment, 20383 Parlamenter : vb. trans. ind. : négocier avec qqun (Je viens du roy Henry pour vous parlamenter) je viens de la part du roi Henry ain de négocier avec vous, 9426 Parlement : s. m. : discours, 152, 1714, 2470, 3685, 3688, 4984, 13119 (estre en –) discuter (Bertran et Olivier furent en parlement) Bertrant et Olivier discutaient,
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2581 (remettre un –) prendre une descision (Et adont fu remis .i. certain parlement pour realer en Espaigne) et on prit la décision de retourner en Espagne, 13128 (tenir –) discuter, 473, 2750, 5265, 7455, 9380 s. m. : assemblée (et fait un parlement d’evesques et d’abbéz) on it une assemblée d’évêques et d’abbés, 2642 (faire –) tenir un conseil, 8523 Parler (s. m.), voir Parlier Parler : vb., (faire – qqun) obliger qqun à répéter ? (et ne m’en fais parler) et ne m’oblige pas à le répéter, 14122 Parlier, (parler) : s. m. : dicton, proverbe ?, 6558, 6629, 10462 s. m. : parole, 8352, 8366, 8796, 12535, 21092 s. m. : rumeur, 13318 Parmy : prép. : grâce à, 3880, 10039, 13535, 13645 (En France retourna le riche roy Jehan parmy sa ranson) Le puissant roi Jean retourna en France grâce au paiement de sa rançon, 4027 (parmy la ranson fu de prison gicté) grâce au paiement d’une rançon il fut délivré de prison, 6433 prép. : au milieu, 20647 Paroir : vb. imp. : apparaître (Bien pert a ton maintien) ceci transparaît à travers ton comportement, 16053 (Or y parra comment chascun s’i mectra) on verra bien comment chacun se comportera, 11377 (or pert il clerement que) il apparaît clairement que, 6195 (or y –) nous verrons bien, 11704 Paroler : vb. trans. ind. (– de qqch) tenir compte de qqch ? (je vous dy pour vray qu’il en y a gramment qui d’absolucion ne parolent noyent) je vous certiie que la plupart d’entre eux n’a que faire de l’absolution, 7524 vb. trans. ind. : parler de, 7397 Parolle : s. f., (lever la –) prendre la parole ? (Bertrant volu la parolle premierement lever) Bertrant voulut s’exprimer en premier, 20377 Parservir : vb. intr. : servir jusqu’au bout (qui sert et ne parsert, il ne puet prouiter) celui qui fait son travail sans
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aller jusqu’au bout, il ne mérite pas son salaire, 8950 Parson, voir Parçon Part (s. f.), voir Par Part (s. m.), voir Parc Partant, voir Pourtant Parti : s. m. : état (Aujourduy le verray ... et mectre en tel parti que mais ne se ousera devant prince monstrer) aujourd’hui je le verrai ... dans un état si misérable qu’il n’osera plus se montrer à la vue d’un prince, 4402 Partie : s. f. : camp, 3243, 3430, 4191, 4424, 5130, 5732, 5746, 5861, 6104, 6122, 8160, 10848, 10856, 11629, 13167, 13388, 14377, 15909, 15915, 15917, 15927, 16112, 16118, 16125, 16893 (d’une – et d’autre) d’un côté comme de l’autre, 3456 (en droit de sa –) au nom des siens, 7153, 7160 (en sa –) en sa possession, 5402 (estre de la – de qqun) être du côté de qqun, 12032 (que a Tristemare voyse qui est de ma partie) qu’elle aille à Tristemare qui est de mon côté, 11972 (se faire –) prendre partie contre quun (s’i en irent partie ainsi comme en tesmoignant) il s’opposèrent à eux comme s’ils avaient été témoins (du meurtre de la reine), 10243 (se mettre en une –) s’assembler, se réunir ? (Lors se sont les chevaliers mis en une partie) les chevaliers se rassemblèrent, 8719 (venir de la – de qqun) appartenir à qqun ? (et si c’est couronné [...] au roiaume d’Espaigne qui vient de ma partie) il s’est fait sacrer roi en Espagne qui est un territoire qui m’appartient, 10493 s. f. : bataille (pour bataille livrer et trés iere partie) pour livrer bataille et un violent combat, 15910 s. f. : partie adverse dans un procès, 20000 s. f. : pays, 3273, 5121, 5387, 5392, 6722, 6724, 7433, 8560, 8727, 13465, 14210, 15477, 15488, 16902, 17098 s. f. : région, 7833, 12245, 14301, 19972 s. f. : suite ? (se mecte a garant elle et sa partie) qu’elle se mette à l’abri, elle et sa suite, 11973
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s. f. : troupe (et irent reculer Pietres o sa partie) ils irent reculer Pietres et son armée, 16119 s. f. : épouse (il ne it pas le sen de sa partie) il n’écouta pas les prédictions de sa femme, 3428 Partir (au –) s m., au moment du départ, 10795 Partir : vb. trans. dir. : partager, 5202, 5312, 5521, 8788, 10775, 12284, 19042, 20237 (– d’avec qqun) abandonner qqun (A Bertrant depria que par nulle achoison ne parte d’avec lui) il supplia Bertrant de ne pas l’abandonner pour quelque raison que ce soit, 16715 (– sa route) quitter un lieu, 17878 (estre parti en qqch/qqun) être localisé en qqch/qqun (huy verra on le preux, ou bonté est partie) aujourd’hui on verra l’homme courageux, en qui la bonté réside, 15953 vb. trans. dir. : séparer en deux, 158 (– a moitie) partager en deux, 7598 vb. pron. : se séparer, 687, 17167 p. p. : récompensé ? (Menestriers et hayraux y furent bien partis : chascun receu beaux dons) ménestrels et hérauts furent bien récompensés : chacun reçut de beaux présents, 8851 Parysy, voir Parisi Pas : s. m, (– pour –) rapidement (son eschiele conduit pas pour pas bellement) il mena sa troupe très rapidement, 15900 Pas : s. m. : passage, accès (garder le –) bloquer le passage à l’ennemi ?, 2113, 16892, 18317, 20316, 21021 (et si aloient touz les pas de Saine si gardent) ils bloquaient tous les passages vers la Seine, 3480 (que nul n’alast le pas veer) que personne n’aille bloquer le passage, 5828 (tenir le –) contrôler le passage, 3653 s. m. : passage, accès, 4129, 16382 Pasgre, voir Pagre Passer : s. m. : voyage ? (Et se j’ay fait des maulx, bien vous pouéz compter d’estre mes
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compaignons encores de passer) si j’ai commis des crimes, vous pouvez bien espérer être mes compagnons de voyage pour longtemps, 7251 Passer : vb. trans. dir. : dépasser (x ans a passé) depuis x années (.vc. ans a passéz) depuis cinq cents ans., 8417 (touz les chevaliers du monde passera) il surpassera tous les chevaliers du monde, 1529 (– de tout honneur) surpasser quiconque en honneur (Vous estez le faulcon de tout honneur passer) vous êtes le faucon qui surpasse tout le monde en honneur, 5571 (– dessus) se ruer (Si peüst, son cheval fust dessus lui passé) s’il avait pu, son cheval se serait rué sur lui, 2530 vb. intr. : traverser la mer, 15299 p. p. : mort (se vante a ses gens que vous este passé) il se vante de votre mort devant ses hommes, 6049 Passion : s. f. : peste (que la – iere) que la peste les emporte, 17373 Pasteïs : s. m. : berger, 333, 1241 Paulme : s. f., (batre ses –) applaudir, 10127 Paulx : s. m. plur. : pieux, 18976, 19011 (et seerent les paulx dont je vous voys parlant en terre rex a rex) ils scièrent les pieux dont je vous parle à ras de terre, 18984 Paumier : s. m. : pèlerin, 12650, 12663 Pavie* : s. f. : chaussée ? (Chascun a deux genoilz estoit sur la pavie) elles étaient toutes agenouillées sur la chaussée, 12384 Pavoix, voir Pavoys Pavoys : s. m. : bouclier servant à couvrir les arbalétriers, 3083, 3519 Peine (prendre plus de –) redoubler d’eforts (mectre – ) s’eforcer, 17487 Peine, s. f., (prendre plus de –) redoubler d’eforts, 8236 Pelerin : s. m. : individu, sans connotation particulière (le vaillant pelerin qui tant fu redoubté) cet homme de grande valeur qui était tant craint, 9 Pen : s. m. : partie tombante de l’armure, 742 Penart : s. m. : couteau à deux tranchants, 15543
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Pendant : s. m. : ruban (Ceulx furent ordonnéz ainsi que en un pendant) ils étaient placés de manière à former un ruban, 11596 Pendre : vb. intr. : dépendre (qqch – au nes et au menton de qqun) qqch menace d’arriver à qqun, 10593 (sire de Portiugal, de l’onneur qui y pent) roi du Portugal et du territoire qui en dépend, 7022 Peneant : s. m. : pénitent, 15423 Pener, (penner) : vb. pron. : se donner du mal, 758, 840, 2568, 2844, 3388, 4938, 7609, 7613, 7699, 8150, 15142 (– qqun au vent) pendre qqun ?, 8317 p. p. : mutilé, blessé, 1505, 6083, 15362 p. p. : tourmenté, 8233 Penner, voir Pener Pennetier, voir Pannetier Pennetrie : s. m. : boulangers ? (de queux, de boutiller et de penneterie) de cuisiniers, d’échansons et de boulangers, 973 Pennon, voir Penon Penon, (pennon) : s. m. : étandart, 1381, 3166, 4009, 5215, 7975, 8222, 10885, 11014, 11450 (jamais la cité ne monsterroit talon jusques atant qu’il auroit mis dedens son penon) les habitants de la cité ne fuiront pas jusqu’à ce que celui-ci ait planté son étendart à l’intérieur, 1063 Pensant : adj.,f (être – de) être attentif à (Sire, si soiéz pensant de vostre vie sauvéz) sire, pensez à sauver votre vie, 2455 Pensé : s. m. : pensée, 19937, 19943, 21030, 21701 Pensee : s. f. : discours ? (avoir – que) avoir à l’esprit que, 425 (de fait et de –) autant dans les actes que dans l’esprit ?, 8338 (de toute sa –) de tout son cœur ?, 9452 (n’y aiéz ja –) n’en ayez aucun doute, 8745 (Et l’autre a dit, qui oÿ sa pensee) l’autre répondit, lui qui avait entendu ses paroles, 3773 Penser : s. m. : pensée, 14917 (de foul –) de folles pensées, 10521 s. m. : avis, 20589
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Penser : vb., (– de) prendre soin de, 1261, 2906, 2917, 2920, 3985, 5201, 5361 (– que+subj.) faire en sorte que ? (si pensons qu’il soit prins) faisons en sorte que (ce château) soit conquis, 5084 (estre – d’avoir) être très riche, 264 Per : s. m. : compagnon, 1595, 2263, 8822, 17466 (les demaines et les –) les grands vassaux de la couronne, 21057 s. m. : égal (La commainça estour nul hons ne vit son per) ici commença la combat dont personne ne vit son pareil, 18678 (n’avoir –) n’avoir d’égal, 16057 Percer, (parcier) : (– une bataille) disperser une troupe ain qu’elle ne puisse plus se rassembler pour attaquer, 6161 (leur bataille ont parcie) ils ont éparpillé leur troupe, 16120 Perche : s. f. : bâton, 975 Perdicion : s. f. : ruine, 2601 s. f. : perte humaine (car receü avoit grande perdicïon pour ceste ville avoir en sa poctession) car il avait perdu beaucoup d’hommes pour conquérir cette ville, 13925 s. f. : perte, 18508 Perre : s. f. : grêlon, 2669, 2671 Pert, voir Paroir, P3 prés. ind. Perte : s. f. : défaite (Tost auroie rescous ma perte) j’aurais alors vengé ma défaite, 12225 Pesance : s. f. : aliction, 4619 Pesant : adj. : accablé, 8205 Pesant : s. m. : poids (ne se y combatist pour d’or in son pesant) il ne l’afronterait pas même pour gagner son poids en or in, 3472 s. m. : trouble, ennui, 12131 Pestaux, voir petel Pestel, voir Petel Pestiler : vb. trans. ind. : (pestiller de) frapper avec qqch, 16558 vb. intr. : se battre, 2493 vb. pron. : se donner des coups, 2497 Pestiller, voir Pestiler Petaux, voir Petel
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Petel, (pestaux, pestel, peteaux) : s. m. : pilon, 976, 3823, 19305 (Il en aura plus tost que un pestaux n’est lavé) il aura tout ceci plus vite q’un pilon n’est lavé, 14047 Petit : adv. : peu, 649 (ne donner de qqun se trés bien petit non) ne donner pas cher de qqun ?, 10860 Petitement : adv. : mal, 13018 Peuple : s. m. : armée ? (mais Henry assembla un peuple fort et grant) Henry rassembla une très grande armée, 6902 Picque, (pique) : s. f. : arme d’hast, plus courte que la lance, dont le bout est garni d’un fer plat et pointu, 3952, 5211, 7993, 8057, 19060, 19205, 20753 Pié : adv. : forme poitevine pour pis, voir partie phonétique et graphie, 1025, 1093, 10761, 11303, 14365, 15831 (que – n’en demoura) qu’il ne resta plus personne ?, 4800 Pié : s. m., (se mectre en –) descendre d’une monture, 5885 (– a –) à la suite, 11684 (de –) en marchant, 14896 (estre mis a –) mis en diiculté ?, 16815 (tourner –) revenir sur ses pas ?, 4390, 11001 Pieça : adv. : depuis longtemps, 123, 3265, 3377, 3582, 5600, 6935, 7194, 7402, 7766, 9533, 10005, 11261, 11369, 11571, 12869, 13660, 14458, 17057, 20387 Piece : s. f., (a –) depuis longtemps, 13409 Pieur : adj. : pire (il n’a pieur homme) il n’existe pas d’homme pire que lui, 15031 Pillage : s. m. : butin ammassé lors d’une attaque (Le pillage party et l’or in monnoié) il partagea le butin et les pièces d’or, 19042 Pille : s. m. : butin, 14247 Piment : s. m. : boisson composée de vin, de miel et d’épices, 17813 Pique, voir Picque Pis : adv, (aler au –) tourner au plus mal (Mais ceste guerre ala contre Charlon au pis) mais cette guerre tournait très mal pour Charles, 2081 (avoir –) subir une peine, 9957 (avoir du –) subir des dégats, 7860
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(avoir du –) subir le plus de mal possible (je me doubte forment que vous aréz du pis) je redoute grandement qu’il vous arrive malheur, 10175 (avoir le –) subir le plus de dégats possible, 21370 (estre – a qqun) peser à qqun (ne pis ne m’en sera en jour de mon vivant jusques atant que) ceci me pèsera chaque jour de mon existence jusqu’à ce que, 17510 (valoir – que) valoir moins que, 9942 (valoir –) ne rien valoir, 6720, 16518, 19556, 20152 Pis : s. m. : pic ? (qui pour les murs percer feroient de leurs pis) qui pour percer les murs frappent à l’aide de pics, 20209 Pis : s. m. : poitrine, 16826, 19555 (de corps et de –) de tout son être ?, 10120, 14878 Pitié : s. m. : spectacle (Oncques telle pitié si ne fu regardee) jamais on n’avait vu un tel spectacle, 12598 (estre –) être regrettable (pitié seroit par Dieu ... si) cela serait regrettable de la part de Dieu ... si, 3233 Place : s. f. : terrain de bataille s. f. : endroit, lieu, 5464, 5473 (oncques n’oÿ compter que Bertrant se dignast de place distorner) je n’ai jamais entendu dire que Bertrant avait consenti à abandonner le lieu du combat, 4394 (livrer –) livrer un combat ?, 4326 Plaider : s. m. : plaidoirie, 17413 Plain : s. m. : plaine, 17935 (Devant les plains de Nadres) devant les plaines de Nadres, 11981 Plainement : adv. : sans réserve, 490 Plait : s. m. : discours, 6237, 7358, 9196, 19761 (entreprendre un –) engager un procés, 3463 s. m. : traité, 10194 Plait : s. m./f. ? : potence/chemin ? voir note, 9576 Planté : p. p. : retenu en prison ? (j’ay despendu puis que je fu planté) j’ai dépensé de l’argent depuis que je suis emprisonné, 13361 Planté, (plenté) : adv. : beaucoup, 647, 833, 851, 2737, 2779, 4146, 4845,
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4876, 4960, 4970, 5253, 7354, 7612, 7930, 10547, 18134, 18136, 18217, 18588, 18623, 19202, 19283, 20007 Plaquier : vb. pron. : s’arrêter (se vont dessus le pré asseoir et plaquier) ils s’assirent dans le pré et s’arrêtèrent, 21229 Plate : s. f. : pièce d’armure d’acier que l’on pose sur le haubert et qui épouse les formes du corps, 2380, 5881, 5896 s. f. : plaque de métal (coutel de plates) couteau composé de plusieurs couches de métal., 2517 Playder* : vb. trans. ind. : parler de qqun (on playdoie plus de lui et de ses cruautés que l’on ne fait de touz ceulx de ses heritéz) on parle plus de lui et de ses méfaits que de tous ceux qui vivent dans ses iefs, 2167 Plege : s. m. : personne laissée à l’ennemi en guise de garantie, 2798, 2861, 2867, 5710, 9385 Plegerie : s. f., (entrer en une –) se porter garant ?, 9250 Pleinement : adv. : entièrement (et l’eauve de fosséz tolue pleinement) il retira entièrement l’eau des fosses, 19104 Plenier : adj. : vaste, grand, 2896, 3342, 3514, 3521, 6031, 6124, 6993, 7705, 8082, 9746, 9903, 17370, 21178, 21212 adj. : épais, 8997 Plenté, voir Planté Plenter : vb. trans. dir. : poser (Mais sur une fenestre l’un son pot plenta) mais l’un d’eux posa son verre au bord d’une fenêtre, 5255 Plessé : s. m. : terrain clos, 17186 Plevi, (pluvi) : p. p. : promis en mariage, 7789, 8567, 16040, 17637 p. p. : promis, 17742, 19981 Plez : s. m., (tenir les plez) se maintenir en rang, voir note, 4265 Ploy : s. m. : contour (en mon noble royaume dont tolu m’ont mes ploys) dans mon noble royaume dont ils m’ont volé les frontières, 15209 s. m. : bras (Paiens les amenoient en tenant par les ploys) les païens les irent venir en les tenant par les bras, 15223 Plus : adv., (sans –) exactement (les chemins sans plus ou vitaille viendra) sur le chemin exact par où le
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ravitaillement passera, 13230 (de –) depuis que ? (Je ne vous vy de plus...que) je ne vous ai plus vu depuis que, 14078 (ne en – que) pas plus que ?, 13557 Plus : s. m. plur. : les plus nombreux (les plus a la foy vont victoire perdant) les plus nombreux perdent parfois la bataille, 5779 Pluver : vb. trans. dir. : pleuvoir, 18709, 18714 Pluvi, voir Plevi Poccesser, (poctesser, possesser, pottesser) : vb. trans. dir. : posséder, détenir, 5551, 6178, 6354, 9880, 12331, 12712, 20101 vb. intr. : dominer ?, 20078 Poccession : s. f. : royaume ?, 2611, 12124 s. f. : pouvoir ?, 21615 s. f. : supériorité, domination ? (Et si avoit moutré forte et poccession) il avait fait preuve de sa force et de sa supériorité, 2619 (estre par la – de qqun) être sous le contrôle de qqun ?, 21596 Poctesser, voir Poccesser Poesté : s. f. : pouvoir, 4143, 19128 (avoir – sur qqun) avoir le dessus sur qqun ?, 18801 (selon ma –) : en fonction de ce qui est en mon pouvoir, 21709 s. f. : force, 5002, 10324 Poestis, (poesty, postis) : adj. : puissant, 604, 1947, 2942, 3502, 4957, 5142, 5335, 5349, 6221, 6449, 6719, 7592, 8273, 10170, 10473, 13861, 18248, 19539 Poesty, voir Poestis Poignant : adj. : tranchant, 21343 Poindre : vb., (– d’emchasser) piquer des éperons, 949 Point s. m. : moment, 9059 (sur ce –) : immédiatement, 21102 adv. : en quelque manière (Auront ilz point iné) devront-ils payer quoi que ce soit ?, 12770 s. m. : moment, 12264, 12265 (a ce –) à ce moment là, 8524 (en ce –) à ce moment là, 3688, 6816 (sur le – de) au moment de, 9436 (en –) prêt à faire qqch ?
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(pour assaillir Meulent en point les verréz) vous les trouverez prêts à attaquer Meulent, 3915 (en –) en telle manière ?, 1235 (en tel –) en tel état, 3720, 12723 (par ce –) de cette manière, 8254 s. m. : ief ? (un point qu’il avoit ... de son pere Douart) un ief qu’il tenait de son père Edouart, 13280 Pointe : s. f. : lance, 4736 Poitouine : s. f. : monnaie du Poitou, 6596 Poix : s. m., (un – de) beaucoup de (un poix de fermeté) de nombreuses fortiications, 18976 Pomme : s. f., (– paree) rien du tout (homme n’y puet trouver une pomme paree) personne ne pouvait rien y trouver, 11264 Ponee : s. f. : audace ?, 9772, 9776 (demener grant –) démontrer sa puissance, 11816 (mener grant –) démontrer sa puissance, 15568 Pongneis : s. m. : combat (Je croy que vous venéz d’aucun ier pongneïs) je crois que vous revenez d’un violent combat, 19568 Pongneour : s. m. : combattant, 16101, 16973, 18546, 19069 Pontelet : s. m. : petit pont, 18527 Porcion : s. f. : quantité de nourriture, 1967 Port : s. m., (adrecier a bon –) mener au salut ?, 12488 Portant : s. m. : présage (né est l’estornel o naturé portans) l’étourneau de ce grand présage est né, 3277 Porte coulisse : s. f. : herse, 20431 Porter, (portier) : vb. trans dir. : mener (un assaut), 3632 vb. trans. dir. : soutenir, aider, 9328 vb. trans. dir. : supporter, 21093 (– de la nature de qqch) posséder les qualités de (et que de la nature d’un oysel porteroit) et qu’il possèderait les qualités d’un oiseau, 3274 (– le cuer de) avoir les caractéristiques de, 16536 (– son nom entier) : mériter pleinement sa réputation ?, 21213 vb. pron. : se comporter, 375, 2003, 4578, 4646, 4649, 4710, 5969, 5984,
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6103, 6246, 6476, 8493, 10346, 11365, 11719, 11883, 13242, 15266, 15957, 15994, 16003, 20212, 21401 (Henry lui a donné du – hardement) Henry le pousse à se comporter vaillamment, 15886 (Pierre de Saquainville y fu moult bien portans) Pierre de Saquainville s’y comporta brillamment, 4571 (Richement se porta la bataille Charlon) la troupe de Charles se comporta vaillamment, 5963 Portier, voir Porter Portiere : adj. : que l’on garde pour la reproduction (Cellui fu aussi prins que une brebiz portiere), 1118 Porton : s. m. : porte dérobée, 17235 Possessant : s. m. : possesseur, 2724 Possesser, voir Poccesser Posson : s. m . : pot, 3101, 7980 Posterne : s. f., (fausse –) porte dérobée, 9401 Postis (adj.), voir Poestis, (adj.) Postis : s. m. : poterne, 8280 (faulx –) porte dérobée ?, 15139 Pot : s. m. : verre (Mais sur une fenestre l’un son pot plenta) mais l’un d’eux posa son verre au bord d’une fenêtre, 5255 Poton : s. m. : petit pot, 19304 Pottesser, voir Poccesser Pouldre : s. f. : pousière (la pouldre va levant plus tost que ne fait paille) elle enlève la poussière plus vite que ne le fait un balai, 5938 Pouoir : s. m., (au – de qqun) selon les moyens de qqun, 6103, 13090 (du petit – de qqun) autant que les faibles moyens de qqun le permettent, 13089 (faire son –) faire de son mieux, 17037 Pouoir : vb., (n’en – mais) n’y être pour rien, 20834 Pour : prép., (– tant) pour cela, 2372 (– une jornee) en une journée, 8321 (pour+inf.) : sous peine de (après proposition nég.) (il ne se partiroit pour estre maïgner) il ne partira pas même s’il doit risquer d’être bléssé, 1881 Pourchasser : vb. trans. dir. : chercher
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(A Sebile m’en iray le secours pourchasser) j’irai chercher du secours à Séville, 9007 vb. trans. : (– qqch sur qqun) inliger qqch a qqun ? (le doleureux meisel que pourchassé leur ont noz François) le douloureux tourment que leur ont inligé nos Français, 19602 vb. trans. : (– qqun de qqch) menacer qqun de qqch ? (et son frere Henry qui lui fu pourchassant de tolir son roiaume) et son frère Henry qui le menaçait de voler son royaume, 8380 vb. trans. : (– qqch sur qqun) chercher à obtenir qqch contre qqun ? (car il veult pourchasser heritage sur nous) car il cherche à obtenir mon héritage, 7691 Pourparlé : p. p. : discuté (car sans ceulx du chastel n’estoit paix pourparlee) car sans les habitants du châteaux la paix n’était pas discutée, 14319 Pourpris : s. m. : enceinte, 619, 2933, 10196, 13583, 15126, 16479, 18244 s. m. : jardin, 784, 19529 s. m. ensemble des champs cultivés à proximité d’une ville pour en nourrir les habitants ?, 3719, 12514 Pourpriz : p. p. : occupé, investi, 8837 Pourscevoir* : vb. trans. dir. : apercevoir, 17341 (Le roy Pietres poursceu) il aperçut le roi Pietres, 16022 Poursuir : vb. trans. ind. : s’adonner assiduement à une pratique, 529 (qui de nouvel s’i estoit mis aus armes poursuir) qui s’était mis depuis peu à la pratique des armes, 2101 Pourtant, (partant) : adv. : à cause de cela, 1890, 2942, 5607, 6014, 6577, 7927, 8111, 9294, 9474, 9944, 14700, 16047, 16587, 16882, 18619, 18983, 19786, 20131, 20881, 21599 (– quant) parce que ? (pourtant quant oÿ dire que) car j’ai entendu dire que, 15375 (– que) du moment que ? (poutant que a vostre vouloir ilz soient obeÿs) du moment qu’ils se plient à vos ordres, 20147 (– que) puisque que, 14963 (– que) puisque, 2590, 2597, 2939, 3644, 6365, 7406, 7786, 9437, 9725, 10897, 12868, 13023, 13459, 14549 Pourtendre : vb. trans. dir. : recouvrir (Et it la nuyt pourtendre ... une chambre ou Bertrant ira la nuyt logier de draps a leurs de lis) et la nuit il it étendre ... dans la chambre où
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Bertrant alait loger des draps aux motifs de leurs de lis, 17419 Pourveance : s. m. : vivres, 15544, 17652 Pourveu : p. p., (– de) préparé à (et tous bons escuiers de jouxtes pourveuz) et tous les bons écuyers prêts au combat, 387 (estre – de) être capable de (pourveuz de defendre si on les vait assaillent) capables de se défendre si on les attaque, 3945 Pouvrier : adj. : pauvre, 361 Poysant : adj. : renforcé ?, 3178 adj. : lourd, 3595 Poyser : vb. pron. : se tourmenter, 2872 Prael, voir Preel Praiaux, voir Preel Praiel, voir Preel Prangiere : s. f., (a heure de –) à l’heure du dîner, 1113 Pré : s. m. : pré (mais force pait le pré) avec de grands ciseaux on parvient à tondre un pré, 14890, 20221 Pree, voir Proye Pree : s. f. : prairie, 1499, 3782, 4224, 4819, 10079, 10951, 12109, 13714, 14647, 20508 Preel, (prael, praiaux, praiel) : s. m. : pré, 15759, 19315, 19613, 20241, 20250 Premier : s. m., (au –) d’abord, 5997 Prendre : vb. trans. dir. : toucher de l’argent, 17667 (se – a) se mettre a, 3564 vb. pron. : s’attaquer, 9844 vb. pron. : se tromper ? (Sire, dit le bourjois, or ne vous prenéz mie) Sire, dit le bourjois, ne vous méprenez pas, 9249 Prés : adv. : presque (mais pour savoir comment ilz estoient prés priz) mais pour savoir s’ils étaient presque pris, 1945 Present : adv. : ici, 18660, 20730, 21674 Present : s. m., (en –) ici même, 1350, 1712, 4732, 4776, 5264, 7522, 7552, 8116, 8125, 10432, 11232, 11453, 11775, 14445, 15509, 15538, 17723, 19379, 19383, 21127
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(a –) à ce moment là, 161, 2594 Presenter : vb. trans. dir. : ofrir en cadeau, 9796, 10575, 10620, 10625, 10804, 12685, 20578 vb. intr. : faire des dons, 15065 vb. pron. : se rendre ? (et puis vint a Mandrie qui a lui se presenta) puis il vint à Mandrie qui se rendit à lui, 13216 Presse : s. f. : foule, 1000, 11783, 11900, 11939 s. f. : troupe armée, 11902 Preu : s. m., (faire bon –) considérer qqun comme vaillant, 303 (– de son corps) : courageux au combat, sur le modèle de preu de la main ?, 17897 (faire mal –) formule de malédiction (mal preu leur puisse il faire) puisse-t-il leur arriver malheur, 16270 Preudon, voir Proudon Preuver : vb. pron. : se distinguer, 415, 6106 Prevosté : s. f. : juridiction du prévôt, 19848 Prier : vb. trans. : (– qqch a qqun) demander qqch à qqun, 7646 vb. trans. : (– qqun pour Dieu) adresser une prière à Dieu en faveur de quelqu’un, 802 Prime : adj., (le – temps) première saison de l’année qui débute en avril, printemps, 10468 Prince : adj. : puissant ? (pour le plus prince qui monte sur destrier) pour le plus fort qui monte à cheval, 9920 Princer, (princier) : s. m. : prince, 1697, 6020, 6033, 6877, 9020, 9753 s. m. : chefs de guerre ?, 12473, 14100, 16998 Princier, voir Princer Prins : s. m. : prisonnier, 5295 Priser : vb. trans. dir. : estimer à un certain prix, 9019 (ne le sauroient pas eslire ne priser) ils ne sauraient pas l’évaluer ni estimer son prix, 9025 Prison : s. f., (tenir –) être incarcéré, 2878 (tenir – fermee) être incarcéré, 4832 Prison : s. m. : prisonnier, 4006, 10774, 11236, 11279, 11284, 12154, 13290, 13299, 13314, 14135, 14158, 14193, 14244, 14254, 15024, 17343, 18543, 18564, 18570, 18588 Privé : adj. : proche, 1071, 9451, 10212, 11189, 13079, 14687, 14808, 16568
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adj. : apparenté a qqun, 5898 adj. : en petit nombre ?, 14976 adj. : français (concitoyen, par opp. à étranger.), 2990 Privé : s. m. : proche, 2006 Priveement : adv. : discrètement, 180, 5247, 11101, 13747 Probacion : s. f., (faire –) prouver, 8902 Prochain : adj. : proche, 1660, 2041, 5666, 17928 Prochainement : adv. : tout de suite ? (a mort te mettray assez prochainement) je te tuerai sur le champ, 713 Procurer : vb. trans. : trouver une solution pour ? (je viens de procurer comment vous et voz biens porréz trés bien garder) je viens de trouver un moyen ain que vous puissiez vous défendre ainsi que vos biens, 9424 Proie, voir Proye Promission : s. f. : promesse, 12434 Propos (avoir qqch en son –) avoir qqch à l’esprit, 7385 Proposer : vb. trans. : prédire ? vb. trans. dir. : relater (On changa les enfans, ce veult on proposer) on échangea les enfants, selon ce que l’on raconte, 16052 Proposer : vb. trans. dir. : prédire ? (mais tout ce qu’elle en dit et qu’elle en proposa advint) mais tout ce qu’elle avait dit et prédit advint, 109 vb. pron. : se présenter, 5471 Proprement : adv. : en personne, 1157, 2020, 3720, 3839, 4976, 7042, 8294, 10462, 10906, 10918, 13035, 13113, 13465, 15282, 15530, 15851, 20558, 20715, 21453, 21677 (par eulx proprement) de leur propre initiative, 9378 adv. : exactement, 291, 2585, 4750, 11468, 11756, 13445, 17940, 19121 adv. : même (proprment les enclumes ou les fevres ont ouvré) même les enclumes sur lesquelles les forgerons ont travaillé, 19048 Proudon, (preudon) : adj. idèle ? (se trouver –) réaliser des exploits lors d’un combat, 3669 (et il n’y a cellui qui ne vous soit preudons) il n’y a personne qui vous ne vous sera pas idèle, 5498 Prouffit : s. m., (faire – a qqun) se montrer agréable envers qqun, 7757 Prouffiter : vb. intr. : recevoir un salaire
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(qui sert et ne parsert, il ne puet prouiter) celui qui fait son travail sans aller jusqu’au bout, il ne mérite pas son salaire, 8950 Prouver : vb. pron. : se comporter (le sire de Hangiers s’i prouva comme proudon) le seigneur de Hangiers se comporta comme un homme de bien, 17251 (estre –) être reconnu coupable (en Engleterre fu prouvé et esgaré) il fut reconnu coupable et exilé en Angleterre, 6445 Proye, (pree, proie) : s. f. : bétail, 3733, 3759, 11248, 11278, 14860, 17345, 18506, 18524, 18588, 18906 (acueillir la –) ravir le bétail, 11081, 11089 (eslever la –) ravir le bétail, 11005 (et couru le païs et la proye leva) il parcourut le pays et réquisitionna le bétail, 9076 Proysme : s. m. : proche, 522 Publier : vb. trans. dir. : annoncer publiquement, 17010 Puis : adv. : ensuite, 66 (– que) depuis que, 7513 (– xe que) x fois plus que (puis .xve . avéz fait d’Engloys esmaier que) vous avez fait peur à quinze fois plus d’Anglais que, 17031 Puissance : s. f. : renfort militaires (pour la bataille avoir a puissance mander) il a demandé des renforts pour livrer bataille, 5328 Pulent, voir Pullent Pullent : s. m. : personne repoussante, 12196 Pullent, (pulent) : adj. : puant, dégoutant, 8542, 15881, 16156 Pure : adj, (en – + art. + subst.) sans rien d’autre que ce que le substantif désigne (en pure la braie) vêtu simplement d’un caleçon, 19441 Purger, voir Purgier Purgier, (purger) : vb. trans. : (– qqun de qqch) pardonner ? (il ne scet qu’il fait, si l’en doit on purgier) il ne sait ce qu’il fait, ainsi on doit le pardonner, 6878 vb. pron. : se laver d’une accusation, 16530 Quant : adv. : combien, 132, 2454, 4036, 7536, 12051, 18652, 19457, 21348 (– que) tout ce que, 1009, 1424, 4813, 6010, 7178, 9218, 10529, 11695,
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12282, 18029, 20000, 21390 (quant qu’ilz vont encontrent trebuchent laidement) tous ceux qu’ils rencontrent tombent violemment, 1415 (ne tant ne –) nullement, 8937 (tant ne –) nullement, pas du tout, 2688, 5534, 12148 adv. : autant ? : (tout quant Dieu fait a) tout ce que Dieu a créé, 12296 Quant : conj. : puisque, 2157, 9488, 19604 conj. : car, 15474 conj. : dès que, 2209 Quantité : s. f. : ressource ? (car chascun en paioit selon sa quantité) car chacun payait (un impôt) selon ses ressources, 7616 s. f. : taille (Selon leur quantité a fait tout delivrer) il les distribua selon leur taille (les joyaux), 9120 Quarantene : s. f. : délai de quarante jours que l’ofensé doit laisser s’écouler avant d’entreprendre les hostilités contre son ofenseur, 19415 Quarreau, voir Quarrel Quarrel, (carreau, quarreau, quarrez) : s. m. : lèche, 3308, 3525, 3526, 3951, 5640, 5657, 5659, 8475, 19294, 19296, 19585, 20246 Quarrez, voir Quarrel Quarriere : s. f. : espace dégagé que parcourent les chevaux, 11993 Quart : adj. : quatrième, 6374 Quarter, (quartier) : s. m. : quartier, 4534 (escu de –) bouclier composé de quatre parties, 5426 Quartier, voir Quarter Que : adv. interr. : pourquoi ?, 16690 Que : conj. : pour que ?, 9946 (Ilz ont fait un hayraut par deça envoier que Charles veille faire son conseil appointier) ils ont envoyé un héraut de l’autre côté pour que Charles réunisse son conseil, 5463 conj. : autant que ?(dix mil Sarrazins qui Juifs envoia) il envoia dix mille Sarrasins et autant de Juifs, 14344 conj. : comme ? (Et le Besgues respont que trés bien avisé) et le Besgues répondit comme un homme qui a mûrement réléchi, 13084 Querir, voir Querrir Querre : vb. trans. dir. : chercher
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(C’est un signe de paix ou de querre respit) c’est un signe de paix ou de recherche d’une trève, 8636 Querrir, (querir) : vb. trans. dir. : chercher, 634, 1961, 2961, 3299, 3807, 6115, 9404 (– + inf.) chercher à + inf., 8784 (– que + subj.) demander que, 9233 p. p. : cherché, forme [quis], 7607, 18900 Queulx, (queulz, queux) : s. m. : cuisinier, 350, 951, 973 Queulz, voir Queulx Queux, voir Queulx Queveustre : s. m. : lien autour du cou servant à fermer le haubert (et du riche haubert le queveustre lui prent) il attrapa le lien du précieux casque, 4746 Qui : pron., (a – que) quelque soit celui à qui (a qui qu’il desagrée) quelque soit celui à qui ceci déplaît, 19485 Quicte : adj. : libréré, 15170 Quictement : adv. : complètement (qu’il tenist le roiaume d’Espaigne quictement) à qui le royaume d’Espagne appartiendrait entrièrement, 8548 Quicter : vb. trans. dir. : libérer, 13561 (se parmy ceste in vous me vouléz quicter) si grâce à cette rançon vous désirez me libérer, 13535 vb. trans. : annuler (tant que sa ranson ... lui quicta proprement le riche roy) tant que le puissant roi en personne lui annula sa rançon, 6456 vb. trans. : ( – qqch a qqun) donner qqch à qqun (jusques en Portuigal tout lui quicteréz) vous lui cèderez toutes vos terres jusqu’au Portugal, 9180 p. p. : (estre –) être tenu pour quitte, 1096 Quintaine : s. f. : poteau servant pour les joutes, souvent surmonté d’un mannequin, 214 Quis (p. p.), voir Querrir, (p. p.) Quis : adv. : librement (Or ne sçay je comment aurons message quis) je ne sais pas comment nous pourrions envoyer un message sans être vu, 1246 Quoistron : s. m. : bâtard, 6824, 8877, 9677, 10586, 12179 Quoy : adj. : calme, silencieux, 1207, 8375 (laisser qqun –) abandonner qqun ?
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(Espaignolz sont si variens qu’ilz nous lerront tout coy si Pietres vient avant) les Espagnols sont si versatiles qu’ils nous abandonneront si Pietres vient par ici, 8944 Rachapter : vb. trans. dir. racheter (pour moy rachapter) pour payer ma rançon, 14124 (pour nous rachapter) pour racheter nos fautes, 8819 Racoiser, (ratoyser) : vb. pron. : se calmer, 351 (le temps se racoisa) la tempête se calma, 17937 Racorder, (recorder) : vb. trans. dir. : raconter, 801, 819, 822, 1097, 1255, 1370, 1589, 1714, 2709, 3298, 4218, 5364, 5509, 5583, 7210, 7494, 7920, 8042, 8177, 8949, 9052, 9440, 9494, 10237, 10598, 12562, 13318, 14129, 14192, 15388, 15393, 15453, 15455, 16784, 19873, 20285, 20287, 20576, 20611, 20887 vb. trans. dir. : lire à haute voix (si le fait recorder car lyre ne savoit) il le it lire à haute voix car il ne savait pas lire, 1600 vb. trans. dir. : rappeler (car on ot recordé l’archeprestre devant) car on eut rappelé l’archiprêtre au devant, 4480 vb. trans. ind. : parler ?, 9740 vb. trans. ind. : parler à qqun ? (Au Castal sont alé les Angloys recorder) les Anglais sont allés parler au Castal, 4391 Rafficher : vb. trans. dir. : abaisser ? (Bertrant raicha sa visiere) Bertrant ferma son casque, 11996 Raffreschir, voir Refreschir Rafreschir, voir Refreschir Rage : s. f., (par – de famine) par une si forte sensation de faim, 11308 Raier : vb. trans. dir. : couler (le sang it raier) il it couler son sang, 18748 Raison : s.f. : vérité, 18, 195, 2322, 6483, 11426, 11431, 13479 s. f. : argument, 7556 s. f. : discours, propos, 102, 3311, 4240, 7885, 8620, 9263, 9407, 9687, 10868, 12614, 12722, 12733, 12927, 13481, 13928, 15684, 16028, 16736, 19998, 20352, 20368, 20535, 20689, 21613 s. f. : engagement ?, 2300 s. f. : langage, 20687
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s. f. : parole, 12909 s. f. : voix, 1823, 1960 (a courte –) à court terme ? (Et vous l’auréz, dist il, a bien courte raison) vous l’aurez, dit-il, dans peu de temps, 11186 (c’est –) c’est justice, 4945, 12173, 15338 (commune –) rumeur ? (pour esprouver le fait de ses questions dont tout partout en coururent les communes raisons) pour connaître la vérité sur ces questions dont on entend partout la rumeur, 7793 (de –) qui convient, 1183, 3998, 12625, 15017 (estre –) être juste, 5707 (faire – a qqun) faire le compte des dettes de qqun (mais je ne doys monnoie qui raison me fera) mais je ne dois pas d’argent quiconque calculera mon compte, 2834 (faire – a qqun) ixer un prix à qqun pour qqch, 13503, 13508 (il y a –) ceci est nécessaire ?, 15030, 15337 (querre me fault inance et il y a raison) je dois chercher de l’argent, ceci est nécessaire, 12425 (mectre qqun à –) mettre qqun au courant, 18170 (mettre a –) adresser la parole (et quant il l’a veu, si l’a mis a raison) lorsqu’il le vit, il lui adressa la parole, 4318 (monstrer la –) avancer un argument, 4277 (par – establie) : par une décision ixée par écrit ?, 21507 (par –) comme il convient, 15674, 21273, 21636 Raler, voir Realer Ralier : vb. pron. : se rassembler, 21387 Ramé : adj. : toufu, 843, 1072, 3084, 3126, 19960 Ramee : s. f. : branche coupée, 894, 11838 s. f. : forêt ?, 10967 (et se sont reculéz dessoubz une ramee) , 14654 (lassus en la montaigne, bien prés de la ramee) là-haut sur la montagne, tout près de la forêt, 4242 Ramenteüx, voir Ramentevoir (p. p.) Ramentevoir : vb. trans. : raconter, 300 vb. trans. : rappeler, remettre à l’esprit (Ceste matiere si vous voys ramentevant) je vous rappelle longuement ces
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faits, 587 vb. pron. : se souvenir, 18565 p. p. : remémoré (et que le bien de lui ramenteüx seroit) et que ses exploits seront racontés, 1012 Ramier : s. m. : branche, 911 s. m. : forêt, 21232 Rampant : adj. : terme d’héraldique, s’applique à un animal quadrupède représenté le corps vertical, dressé sur les pattes de derrière (DMF), 20462 Rampeour* : s. m. : celui qui escalade, 19322 Ramper : vb. intr. : escalader, 8226, 8309, 8310, 15077, 18121, 19449 (montoient noz gens comme cinges va ramper) nos guerriers grimpaient aussi facilement qu’un singe escalade un arbre, 8001 Randon : s. m., (de –) avec impétuosité, 4332, 11167, 16022, 16744, 17252, 18507, 18512 (de –) tout de suite ? (Cellui delivré lui a .iic . frans de randon) celui-ci lui a donné tout de suite deux cents francs, 13698 (de tel – que) avec une telle violence que, 17249 Randonnee, (rendonnee) : s. f., (de –) rapidement, aussitôt, 257, 410, 3791, 4275, 5046, 6082, 10078, 13808, 14648, 18449 Randonner : vb. intr. : courrir (contre Pietre va tant qu’il puet randonner) il s’élança contre Pietre tant comme il put courrir, 16064 Ransonner : vb. pron. : ixer le prix de sa rançon (je me suis ransonné a .lx. mille doubles) j’ai ixé le prix de ma rançon à cinquante mille doubles, 13730 Rapaiser : vb. trans. dir. : calmer, 10614 Raser : vb. trans. dir. : remplir à ras, 19259 (jusques aus murs font les fosséz raser) il remplissent les fosses jusqu’au niveau des murs, 7988 vb. trans. dir. : abattre ? (avoit on noz gens ... de chaillotz raséz) on avait abattu nos soldats avec des pavés, 8210 p. p. : rempli à ras (en deux lieux ou en plus est des mejour rasé) ils sont remplis par les plus grands sur deux lieues ou plus, 3128
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Raseur : s. m. : rasoir, 16095 Rassaillir, voir Reassaillir Rassener : vb. trans. dir. : frapper à nouveau, 1809 Rassoté : p. p. : devenu sot, 272 (Pas ne sommes rendu a bregier rassoté) nous ne nous sommes pas rendus à un bergier idiot, 21718 p. p. : devenu fou, 6790, 13372 Rassouz : p. p. : absous, 17092 Rateaux, voir Ratel Ratel : s. m. : morceau de ferraille censé ralentir l’ennemi ?, 3100 Ratoyser, voir Racoiser Ravain : s. m. : trou dans le sol, 1146 Ravaler : vb. trans. dir. : faire descendre (– aval) tomber, 19262 (avoit on noz gens laidement ravaléz) on avait fait violemment redescendre nos soldats, 8209 vb. trans. dir. : rabaisser (il oÿt dire chose pour moy a ravaler) il entend dire quelque chose pour me rabaisser, 13310 vb. intr. : descendre, 21372 vb. intr. : descendre, 13531, 20764 Ravir : vb. trans. dir. : retirer, enlever (dessoubz les fondement font la terre ravir) ils retirent la terre sous les fondations, 3990 Raviser : vb. trans. dir. : reconnaître, 5978, 7948, 12765, 12976, 14802, 15022, 15448 Ravison : s. f. ? : répétition, ennui ? (ce seroit ravison) ce serait ennuyeux, 21598 Ravoir : vb. trans. dir. : retrouver, 3509 Realer, (raler) : vb. intr. : retourner, 569, 3861, 4958, 21586, 21590 vb. pron. : revenir, 11576, 21225 vb. pron. : s’en retourner, 21570 Reassaillir, (rassaillir) : vb. trans. dir. : attaquer de nouveau, 170, 16110 Rebouter : vb. trans. dir. : reculer, 8004 vb. pron. : se jeter à nouveau, 16106 Rebroy : s. m. : fortiication (il mectront defenses et rebroys) il mettra des défenses et des fortiications, 18562
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Receveur : s. m. : précepteur, 20013 Reclamer : vb. trans. dir. : crier, 14866, 14913 Recompensacion : s. f. : dédommagement, 6492 Recorder, voir Racorder Recorder : vb., (– que) : se mettre d’accord sur ? (nous recorderons que le jour saint Michel) nous nous mettrons d’accord sur le jour de la saint Michel, 5691 Recouvrance : s. f. : secours, 12678 Recouvrement : s. m. : secours, 12207, 12209 Recouvrer : s. m. : fait de revenir en sa position antérieure (par moy auréz ... recouvrer) vous serez rétabli dans vos fonctions grâce à moi, 14105 Recouvrer : vb. trans. dir. : acquérir, obtenir, 4945, 9719, 19267 (– a qqun de qqch) obtenir qqch de qqun ?, 12718 vb. trans. dir. : convenir (trouverons la place qui nous recouvrera) nous trouverons une place qui nous conviendra, 12848 vb. trans. dir. : retrouver, 12222, 14020, 14173 vb. trans. dir. : sauver, 18782 vb. trans. dir. : trouver, 20975 p. p. : redoublé d’intensité (une bataille), 6056 Recouvrier : s. m. : secours, 12489 (sans nés un –) sans remède possible (toute morte en son lit sans nés .i. recouvrier) morte dans son lit sans même un recours possible, 6892 s. m. : récompense ? (Aujourduy aurons d’onneur le recouvrier) nous obtiendrons aujourd’hui l’honneur en récompense, 21191 Recreacion : s. f., (prendre –) avoir du temps libre ? (Mais bien plus prendroions de recreacions) mais nous aurions trop de temps libre, 5701 Recreant : adj. : épuisé, à bout de forces, 3955, 4580, 5772, 9503, 10306, 11602, 13262, 21345 adj. : lâche, 5533, 10722, 11032, 11598, 11604, 16179 Recreant : s. m. : misérable ?, 8925 Recroire : vb. trans. dir. : fatiguer excessivement, 17913 Recueillr : vb. trans. dir. : recevoir, 8627, 9594, 15547, 15639 p. p. : reçu, 8846
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Reculé : p. p. : annulé, 7661 p. p. : repoussé (et furent reculéz jusques a un ennoy) ils furent repoussés jusqu’à une fôrêt, 14893 Redouber : vb. intr. : être en état de se battre ?, 19262 Redoubter : vb., (faire a –) : être redoutable, 9908 Reestre : vb. trans. dir. : repartir de plus belle, 4671 Refaire : vb. trans. dir. : remettre en état, 3308 Reffourbir : vb. trans. dir. : polir à nouveau, 17671 Reffus : s.m., (de –) sans valeur, 402 (estre a –) refuser ? (Adont les it livrer, qu’il n’y est a refus) il les it livrer, il ne le refusa pas, 8367 (estre de –) être pauvre, 392 (faire –) manifester son oppostion, ne pas être d’accord, 17286 Refremé : p. p. : refermé, 3763 Refreschir, (rafreschir, rafreschir) : vb. trans. dir. : reposer, 17966 vb. pron. : se reposer, 17151, 18132, 18137, 18161, 19728 p. p. : reposé, 15651, 19698, 20194, 20236 Refroidir : vb. pron. : se calmer (aléz vous refroidant) calmez-vous, 20838 Refuser : vb. trans. dir. : rejeter, repousser, 8572, 9716, 17629 Regardans : s. m. plur. : public, ceux qui assistent à un événement, 14523 Regardant : adj. : attentif, 2464 Regarder : vb. trans. ind. : étudier (Regardé ont au fait les chevaliers et baron) les chevaliers et les barons ont etudié les faits, 2416 Regiber : vb. intr. : ruer, 2533 Regnacion, voir Renacion Regnant : adj. : celui qui est maître dans un domaine (si it Jehan Joyel qui en ourgueil fu regnans) Jehan Joyel était présent qui était le plus orgueilleux des hommes, 4570 Regne : s. f. : reine ? (Hier estoiéz vous regne, huy n’avéz noyent) hier vous étiez reine, aujourd’hui vous n’avez plus rien, 12202 Regné : s. m. : royaume, 1083, 7344, 12761, 15383, 21729 s. m. : camp ? (dictes moy verité de Bertrant du Guesclin et de l’autre regné) dites-moi
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la vérité sur Bertrant du Guesclin et le camp adverse, 12769 Regner, voir Reigner Regner : s. m. : pouvoir, 21758 Regner : vb. intr. : exister, vivre (– en) habiter, demeurer, 617 Regner : vb. trans. ind. : demeurer, rester ? (– pour) défendre les droits de qqun en combatant ? (En Bertaigne regna Bertrant ... tant pour Charles) Bertrant défendit tant la cause de Charles en Bretagne, 2078 (moult noblement regna) il mena une vie honnorable, 2216 (Daviot reigne o Henry) Daviot resta avec Henry, 9479 (– en abusion) demeurer fou, 6836 vb. intr. : se conduire, 14198 vb. intr. : être tout puissant, 6462, 20078, 21582 vb. intr. : exister, vivre, 528, 10597, 15893, 16845, 18228, 18281, 21109, 21706 (le roy sa vie mal regna) le roy mena une mauvaise existence, 6537 vb. imp. : exister, 15 Regnois : adj. : ennemi ? (la gaite regnois) la sentinelle ennemie, 19014 Regnon : s. m. : royaume ? (Le roiaume d’Espaigne, noble regnon) Le royaume d’Espagne, noble royaume, 9158 Regracier : vb. trans. dir. : rendre gâce à, 20177, 20459 vb. trans. ind. : remercier qqun, 1689 vb. pron. : se faire témoigner de la reconnaissance, du respect, 344 Regreis : p. p. : secouru ? (Nous n’avons nul secour pour estre regreis) nous n’avons pas de secours pour être sauvés, 1240 Regret : s. m. : plainte, 21658, 21733 Rehaitier, (rehayter) : vb. trans. dir. : réconforter, 11597, 15749 vb. pron. ? : se réjouir, 920 Rehausser : vb. trans. dir. : relever (ses hommes sont la venuz pour le rehausser) ses hommes sont venus pour le remettre debout, 16078 Rehayter, voir Rehaitier Reigne : s. f. : reine, 8832, 8933, 8945, 8957, 8962 Reigner, (regner) : vb. trans. dir. : renier
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(et reigné eu la foy il a ja longuement) et il a renié sa religion il y a maintenant très longtemps, 8541 (vostre nacion ... avéz assez regné contre ce qu’il monstra) : vous avez renié vos origines malgré tout ce que saint Thomas vous enseigna, 10022 Relenquyr : vb. trans. dir. : renier, 15779, 19505 Relever : vb. trans dir. : se rebeller, 1427 (– l’alayne) retrouver son soule, 4823 Religion : s. m. :communauté religieuse, 8645 (Et irent assembler mainte religion) ils irent assembler de nombreuses congrégations, 20165 Remanant : s. m. : reste, 8928, 8941, 10361, 12078, 13547, 14143, 14278, 14465, 18863, 18918, 21026 (au –) du reste, au demeurant, 10752 Remede : s. m., (mectre – a) mettre un terme à ? (remede y mectray ains que passe l’an) j’y mettrai un terme avant la in de l’année, 10651 Remenbrement : s. m. : souvenir, 17707 Remener : vb. trans. dir. : reconduire (qui devers Bel Marine les voyse remenant) qui puise les ramener vers Bel Marine, 14719 Remirer : vb. trans. dir. : contempler avec admiration, 1005 Remonter : vb. trans. : pourvoir de nouvelles montures, 14154 (pour nous remonter .iim . nous donna) il nous donna deux mille pour acheter de nouvelles montures, 14181 vb. intr. : se remettre en selle (Or alons remontant) remontons à cheval, 14712 Remusser : vb. pron. : se cacher à nouveau, 3072 Renacion, (regnacion) : s. f. : pays, 91, 6478, 11393, 12612, 18481 s. f. : conquête ? (Se de Bertrant disoie sa grant regnacïon) si je vous racontais toutes les conquêtes de Bertrant, 21595 s. f. : inluence (que vous seréz un temps en la regnacion Nabugodonosor) vous serez brièvement sous l’inluence de la constellation de Nabuchodonosor, 8900 Renc : s. m. : place délimitée pour le combat, 484, 4559, 10069, 10099, 10100 s. m . : troupe, 3108, 11484, 11941, 14607, 14681, 15848 Rendonnee, voir Randonnee
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Rendre : vb. trans. ind. : se rendre, 3068 (– l’espee) capituler, se rendre, 18052 vb. intr. : se rendre ?, 20676 Rengie : adj., (bataille –) bataille où les deux armées ordonnent leur troupes face à face, 5401, 10530, 11978 Rengié : p. p. : en ordre de bataille, 17178 Renoyé : adj. : inidèle, 7093 Renoyer : vb. trans. : abjurer, 7743 Renson (prendre a –) exiger une somme d’argent en échange de la libération d’un prisonnier, 2831 Renté : adj. : doté, 28 Renter : vb. intr. : s’établir de nouveau, 13137 Reon : adj. : rond ?, 19632 Reoster : vb. trans. dir. : retirer, priver, 12344 Repairer, voir Repayrer, voir Repairier Repairier, (repairer) : s. m. : retour, 4531, 12884, 21223 Repairison : s. f. : retour, 13804 Repayrer, (repairer) : vb. trans. dir : demeurer, 6331 part. prés. : logé (quant en un columbier veult estre repayrant) lorsqu’il veut être logé dans un pigeonnier, 3289 vb. trans. dir. (– qqun) retourner auprès de qqun (le roy Henry va arrieres repayrant un chevalier engloiz) le roi Henry retourna en arrière à la poursuite d’un chevalier anglais, 11946 vb. intr. : retourner, revenir, 313, 1016, 1708, 1835, 1870, 2576, 2681, 2685, 2906, 3459, 4522, 7736, 7953, 9526, 11277, 12224, 12262, 12557, 14709, 15115, 15728, 17007, 20944 Reporter : vb. trans. dir. : rapporter, 14109 Reppeu : p. p. : mangé ? (en haste ont reppeu) ils ont mangé en vitesse, 19763 Repposé : adj. : en état de se battre (La nuyt se mist devant le vassal repposé) Le chevalier prêt à se battre se plaça devant la ville, 3077 Repposement : s. m., (faire –) se reposer, 21095 Reprendre : vb. trans. dir. : répondre (l’estat lui demanda et Bertrant lui reprent) il lui demanda la situation et Bertrant répondit, 1713 Repreuver, (reprouver) : vb. trans. dir. : reprocher, 5167
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vb. imp. : reprocher, 13431 p. p. : démontré ?, 4239 Reprins, voir Repris (p. p.) Repris : p. p. : blâmé (de traÿson seront resputé et repris) ils seront punis et blâmés pour trahison, 17856 (estre – de cuer envers qqun) : être de nouveau du côté de qqun (sur ce point fu reprins de cuer envers no gent) il rejoignit immédiatement notre camp, 21102 Reprocher : vb. trans. dir. : blâmer, 11326 Reprouver (vb.), voir Repreuver Reprouver : adj. : sinistre, 3329 Requerir : vb. trans. dir. : solliciter, demander, 18177 vb. trans. : solliciter, demander, 2558, 9004 p. p. : appelé à l’aide, 13572 Resacher : s. m. : action de retirer (Au resacher sa lance ala en .ii. rompant) il brisa sa lance en deux en la retirant, 15725 Resclarcier : vb. trans. dir. : polir, 17671 Rescourre : vb. trans. dir. : sauver, secourir, 14939 p. p. : sauvé, 19365 p. p. : vengé (Tost auroie rescous ma perte) j’aurais alors vengé ma défaite, 12225 Rescous, voir Rescourre (p. p.) Resflambeer : vb. intr. : étinceler, 11479, 17944, 21537 Resongnier : s. m. : crainte, 3523 Respit : s. m. : trêve de courte durée, 2645 (C’est un signe de paix ou de querre respit) c’est un signe de paix ou de recherche d’une trève, 8636 Respiter : vb. trans. dir. : sauver, 15892, 18802, 18870, 19230 vb. trans. : empêcher (se vous me respitéz ma mort) si vous empéchez ma mort, 14445 p. p. : sauvé, 3149 Respon : s. m. : réponse, 5708, 7273, 7964 Respond : s. m. : réponse, 20677 Resputé : p. p. : puni (de traÿson seront resputé et repris) ils seront punis et blâmés pour trahison, 17856
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Ressembler : vb. intr. : rassembler (Vostre bataille est percee ne poéz ressembler) votre troupe est morcellée, vous ne pouvez plus vous rassembler, 6161 Ressongnant : adj. : redouté, craint, 3039 Ressongner : vb. trans. dir. : redouter, craindre, 14417 p. p. : craint, 4920, 5397, 7427, 14997, 16133, 16386, 21502 Ressortir : vb. trans. dir. : reculer, 4694 Ret : s. m. : ilet (que l’on appelle estournel, que l’on prent o un ret) qu’on appelle étourneau, qu’on attrape à l’aide d’un ilet, 3275 Reté : p. p. : accusé (Je octroie que je soie de traÿson retéz) je veux bien être accusé de trahison, 11299 Retel : s. m., (mener grant –) se dissimuler, forme pour recel (qu’ilz iront assegier en menant grant retel) qu’ils iront assiéger en se dsimulant, 19609 Retornee, voir Retournee Retorner, voir Retourner Retournee, (retornee) : s. f. : retour, 4450 (faire – a) reparler de, revenir à, 9800 (faire – avec qqun) s’engager auprès de qqun ? (je doubt en ma pensee que avec les Engloys ne facent retournee) je crains au fond de moi qu’ils ne s’engagent auprès des Anglais, 17630 (faire –) rentrer chez soi ? (Puis ne demourray cy, faire veil retournee) je ne resterai pas ici, je veux rentrer chez moi, 7862 (faire la – a qqun) s’enfuir devant qqun (qu’ilz ont derrere Charles faicte la retornee) qu’ils se sont enfuis pour aller derrière Charles, 6066 (faire la –) sortir du combat ? (la ot un escuier qui i la retornee) il y avait là un écuyer qui revenait du combat, 419 (sans faire –) sans revenir en arrière ? (l’euvre desordonnee qu’il maintient tout adés sans faire retournee) les actions insensées qu’il poursuit sans relâche sans jamais faire machine arrière, 6686 Retourner : vb. intr. : revenir, 12542 Retourner : vb. trans. dir. : doubler ?
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(La nuyt ont bien fait leurs habiz et retornéz) ils ont confectionné et doublé leurs costumes pendant la nuit, 3743 vb. intr. : revenir, 1018 Retourner, (retorner) : s. m. : retour, 9859, 12309, 12837 Retraier : vb. pron. : s’éloigner, voir note, 21545 Retraire : vb. trans. ind. : se diriger vers (a la lour de lis ... lui retraioit le cuer) son cœur tendait vers la leur de lys, 19892 vb. trans. ind. : (– sur qqun) s’en remettre a qqun (la verra on l’ehur sur qui il retrayra) on verra bien qui aura la chance de son côté, 5599 vb. pron. : se mettre à l’abri, 3961, 16267, 18320 vb. pron. : s’éloigner, 3070, 20700, 21159 Retraiter, (retraitier) : vb. trans. ind. : raconter, 352, 17172 vb. intr. : raconter, 21235 Retraitier, voir Retraiter Revel : s. m. : orgueil, 19607 s. m. : joie, 20234 Reveler : vb. pron. : se révolter (Tout le monde se veult sur Engloys reveler) tout le monde veut se soulever contre les Anglais, 20084 Revencher : vb. pron. : se défendre (en lui revenchant) en se défendant, 20783 Revenger : vb. trans. dir. : venger, 732 vb. pron. : se venger, 14928, 20150 Revenir : s. m . : retour, 9523 Reverent : adj. : puissant, illustre, 710, 19087 Reverser : vb. trans. dir. : destituer, 6357 Revertir : vb. intr. : revenir, retourner, 2805 Revestir : vb. trans. dir. : avoir de son côté ? (hayraux et menestreus veil avoir revesty) je veux avoir avec moi des hérauts et des ménestrels, 339 vb. pron. : s’emparer (mais Bertrant du Guesclin si en est revestiz) mais Bertrant du Guesclin s’en est emparé (du château), 771 p. p. : habillé (chascun receu beaux dons et fu bien revestiz) chacun reçut de beaux présents et de beaux vêtements, 8852
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p. p. : vêtu d’habits de cérémonie ? (le clergié revestu en disant oroisons) le clergé en habits de cérémonie récitant des prières, 8668 Revider : vb. trans. dir. : attaquer (et Bertrant du Guesclin nous convient revider) il nous faut afronter Bertrant du Guesclin, 4400 Rex : prép. : à côté de ? voir note (et dam Pietres rex luy) et dam Pietres auprès de lui, 10921 (– a –) au niveau de, voir note vers 10921, 18985 Ribaut : s. m. : terme d’injure, 17118, 21428 Richement : adv. : vaillamment, 5963 Richeté : s. f. : puissance, 15255 s. f. : richesse, bien, 16779 Rien : s. f. : une chose, quelquechose, 12826 (quant on lui dit rien, en l’eure le ferra) lorsque quelqu’un lui adresse la parole, il le frappe sur le champ, 121 Riffler : vb. intr. : manger goulûment, 7143 Rimer : vb. intr. : mettre en vers, 4221 Rimé : p. p. : mis en vers, 20 Ris : s. m. : rire, 4553, 8829 (estre de grant –) montrer un grand sourire ? (Amené ont Bertrant qui estoit de grant ris) ils ont amené Bertrant qui aichait un grand sourire, 13584 (y ot maintes paroles sans soulaz et sans ris) il y eut de nombreuses paroles sans joie et sans rire, 10465 Risee : s. f. : rire moqueur, 5052 Rive : s. f., (se mettre a –) préparer une lotte ?, 1035 Robbe, (robe) : s. f. : tunique (avoir – sans vetement) ?, 7472 (en l’eure incontinent sa robbe desvitoit) il découpait sur le champ sa tunique, 306 s. f. : vêtement, 14223 Robber, voir Rober Robe, voir Robbe Rober, (robber) : vb. trans. dir. : piller, 7569, 7570, 16235, 16238, 19467 vb. intr. : voler, 14162 Roche : s. f. : château fort bâti sur une roche (En une roche sont entré .vii. ou .viii. cent) sept ou huit cents hommes
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sont entrés dans un château, 17983 Roiaulté, voir Roiauté Roiauté, (roiaulté) : s. f., (de toute –) du monde entier, 2992 (prendre sa –) être sacré roi, 4145 Roiaux : s. m. plur. : la famille royale (c’est duc Charles de Bloiz qui des roiaux est né) c’est le duc Charles de Blois qui est issu de la famille royale, 1625 s. m. plur. : soldats de l’armée d’un roi (qui contre les roiaux ceste ville tenéz) vous qui tenez cette ville contre les soldats du roi, 19346 Roidement, voir Roydement Roit, (roy) : adv. : rudement, 14876, 14888, 18107, 19794, 21347, 21366 Rompre : vb. intr. : briser les rangs d’une troupe armée ? (qu’ilz ne pouent entrer ne rompre nullement) qu’ils ne pouvaient y pénétrer ni rompre les rangs, 11218 p. p. : mis en déroute (qu’ilz les ont depeciéz et rompuz) qu’ils ont fait éclater leurs rangs et les ont mis en déroute, 11225 Ronsin, voir Ronssin Ronssin, (ronsin) : s. m. : cheval de somme, 324, 1444, 4545 Rost : s. m. : ensemble des viandes et poissons rôtis, 12917 Rost : s. m. : viandes et poissons rôtis, 14049 Rouhe : s. f. : roue, 12587, 15051, 15055, 19883 Route : s. f. : troupe armée, 18469 (En sa route ot Cliçon moult bonne gent) Cliçon avait au sein de sa troupe de très bons soldats, 5840 Rouver : vb. trans. dir. : demander (qui au duc de Berry ala un don rouver) qui au duc de Berry ala demander un faveur, 20592 Roy, voir Roit Roydement, (roidement) : adv. : rapidement, 679, 10903, 11747, 11873, 17062 adv. : sans ployer, 681, 5925, 14945, 15543, 16599 Royon : adj. : royal, 16024, 17240 Royon : s. m. : territoire, royaume, 2615, 3658, 6475, 6480, 6489, 6830, 7057, 7060, 9672, 10398, 10579, 12151, 12422, 12631, 15033, 20519 Roys, voir Royt Royt, (roys) : adj. : droit, 4063
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adj. : dur, 21177 adj. : prêt ? (mais la lance Henry se tint royde a jouster) mais la lance d’Henry se tint prête à combattre, 16071 Rude : adj. : grossier, 118 Ruer : vb. trans. dir. : frapper, 119 (– jus) faire tomber, 19074, 19505, 20446 Ruhe : s. f. : rue, 329, 332 Ruser : vb. intr. : se moquer (on ne doit pas ruser) il ne faut pas se moquer de nous, 5106 vb. pron. : se moquer, 2377 Ruyre : vb. intr. : faire du bruit, 1216 Sable : s. m. : couleur noire, 15879, 15882 Sablement : s. m. terrain sablonneux, 17833 Sablon : s. m. : terrain de joute, 1816, 1963, 4333, 17243, 17255 s. m. : côte ? (un bon chastel ... qui siet sur la mer assez prés du sablon) un bon château ... qui se situe sur la mer proche de la côte, 15330 s. m. : lieu du combat, du siège ?, 21264 (que Bertrant fu logié par dessus le sablon) que Bertrant était logé de l’autre côté du siège, 16951 s. m. : sable in ?, 2893, 4712, 5949, 6395, 10385, 14602, 17903, 18504 Sablonier, voir Sablonnier Sablonnier, (sablonier) : s. m. : terrain sablonneux, 2557, 5218, 11790, 18742 s. m. : lieu préparé pour engager une bataille ? Voir aussi Sable, 3517 Sablonnoys : s. m. : plaine de sable, 10982 Sachant : adj. : qui connaît les usages et pratiques de la société, bien éduqué, 5379, 5765, 8192, 11953 Sacher, voir Sachier Sachier, (sacher) : vb. trans. dir. : arracher, 19199 (– qqun a un léz) prendre qqun à part ? (dist a Jehan Joyel qu’a .i. léz ot sachié) il dit à Jehan Joyel qu’il avait tiré hors de la foule, 4410 vb. trans. dir. : démontrer ? (sans traÿson penser, sans malice sachier) sans penser à un trahison, sans faire acte de tromperie, 16526
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vb. trans. dir. : retirer (que en l’oure proprement c’on les sache du four) que si on les retire tout de suite du four, 19901 vb. trans. dir. : tirer une arme de son fourreau, 733, 3246, 12021, 13651, 15726, 15989 vb. intr. : arracher, 3175 Sacqua, voir Sachier, p3 p.s. ind. Sacrement : s. m. : baptême, 136, 20707 (faire –) prêter serment ?, 20531 Sagement : adv. : de manière avisée, 15773 Saiecte, voir Saiete Saiete, (saiecte) : s. f. : lèche, 5937, 8475, 11635, 11637 Saignie : s. f., (– de sang) blessure sanglante, 8332 Saignier, voir Seigner Saillir : vb. trans. ind. : (– a qqun) : se jeter sur qqun, 15502 (– a bataille) livrer bataille, 15629 (– en piéz) se mettre debout, 10474 (– fors) sortir (Je louhe que la moitie s’en voye fors saillant) je suis d’avis que la moitié d’entre nous sorte, 9613 vb. intr. : attaquer ?, 15596 vb. intr. : sauter, 10259, 12042, 12044 Saindre : vb. trans. dir. : mettre autour de la taille, 5819, 14759 Saintie : adj. fém. : sainte, 3245, 3406 Saintir : vb. trans. dir. : sanctiier, 10843 Saisine : s. f. : possession, 6603 (Le bers Carenlouet rala en sa saisine) Carenlouet retourna dans son ief, 18922 (estre destruit de vie et de –) ne plus être maître de soi-même (le roi étant ensorcelé) ?, 6599 Saisir : vb. trans. dir. : arrêter, 8781 vb. trans. : (– qqun de qqch) rendre qqun maître de qqch, 16909 Saison : s. f., (a/en icelle –) à ce moment là, 1807, 2600, 2678, 6466, 20969 (a courte –) dans peu de temps, 15354, 15662 (dedens briesve –) dans peu de temps, 16913 (il en est –) le moment est venu, 7941 (la morte –) la saison froide, 2630, 4019, 9170 (nulle –) jamais, aucunement, 16035
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(quant il sera –) quant le moment sera venu, 2894, 7058, 18477 s. f. : vie, existence (inee est ma saison) ma vie est terminée, 6853 Saison : s. f., (a/en icelle –) à ce moment-là, 20526 Salvacion : s. f. : salut, 7795 Samblance : s. f., (en –) sous l’apparence, 8705 Samblant, voir Semblant Sangler, (sengler) : s. m. : sanglier, 8815, 18684, 19288, 21062 Santé : s. f., (donner tel – a qqun que) : mettre qqun dans un tel état que ?, 18822 Sapient, (sappient) : adj. : habile, expert, 717 adj. : sage, 21107 Sappient, voir Sapient Sauf alant, voir Sauf alant et venant Sauf alant et venant : s. m. : autorisation de sortie, voir aussi Sauf conduit, 1594, 2128, 3458, 7718, 20332 (demander le – que l’on n’a trait ne gicté) demander la garantie à ses adversaires qu’ils ne tireront pas de projectile, 5008 Sauf conduit : s. m. : autorisation de sortie, 1534, 1539, 1592, 1600, 3877, 5464, 7113, 7161, 9081, 12269, 13646, 16830, 16837, 18188, 18374, 19877, 19879, 20333 Saultier : s. m. : psaultier, 6891 Saulx : s. m. plur., (les grans –) en toute hâte (bon feroit aler a Poictiers les grans saulx) il serait bon de se rendre à Poitiers à toutes jambes, 19905 Sauvecté : s. f., (a –) en sécurité, 8407 Sauvement : adv. : en sécurité, 1142, 1670, 3973, 4778, 9382 (a –) en sécurité, 4990 Sauvement : s. m. : salut de l’âme, 13448 Saux : s. f. : saule, 19316 Saveur : s. f., (prendre –) prendre du plaisir ? (si ont vitailles assez, ou ilz prenent saveur) ils ont assez de provisions, lesquelles leur apportent de l’agrément, 19070 Savoir : vb. trans. dir. : connaître, 10026 (– de vray) avoir la certitude de, 9151 (– que) savoir si, 4106 (– gré) être reconnaissant envers qqun, 6255, 12837, 13478 vb. trans. dir. : écouter ?
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(Seigneurs, savéz comme il va) Seigneurs, écoutez comment cela va se dérouler, 11373 (– a qqun si) apprendre si qqun va faire qqch ?, 9848 (– a qqun) demander à qqun, 7432 vb. intr. : goûter ? (il a ceans bon vin, il ne faut que savoir) il y a ici du bon vin, il n’est besoin que de le boire, 946 p. p. : repéré (ilz furent sceüz de noble combatant) ils furent aperçus par de valeureux guerriers, 16150 Sceant, (seant) : adj. : situé, 3450, 3477, 3960, 5061 Sceur : adj. : eicace (n’ot meilleur ne plus sceur) il n’en existe pas de meilleur ni de plus eicace), 16091 Scevrer, voir Sevrer Seant, voir Sceant Secourance : s. f. : secours, 18393, 18413 Secourre : vb. trans. dir. : secourir, 13799, 15492 Secours : s. m., (estre au –) : venir en renfort ?, 14407 Secret : s. m. : conseil ?, 8433 (Bertrant, se dist le duc, entendéz mes secréz) Bertrant, dit le duc, écoutez mon conseil, 7675 (a son –) en toute discrétion ? (que a son frere le roy ... blamast a son secret ... pour quoy aus Juifs ot s’amort ainsi monstree) qu’il demanda discrètement à son frère le roi d’expliquer pourquoi il témoignait de l’afection aux Juifs, 6651 Seé : s. f. : scie, 18979 Seel : s. m. : sceau, 10653, 12334 Seer : vb. trans. dir. : scier, 18986, 19012 (et seerent les paulx dont je vous voys parlant en terre rex a rex) ils scièrent les pieux dont je vous parle à ras de terre, 18984 Seigner, (saignier) : vb. trans. dir. : signer, 17975 vb. pron. : se signer, 8695, 9552, 14185 Seignorie : s. f. : valeur, 2431, 2970, 4088, 4419, 4645, 5133, 6123, 7426, 8561, 11491, 12025, 15931, 16127, 17743 (en aulte –) avec faste, 12402 s. f. : autorité féodale, 14216 (faire – a qqun) faire de qqun le seigneur d’un territoire ?, 9373
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s. f. : ensemble des sujets d’un seigneur, 4928 s. f. : pouvoir, puissance, 3411 s. f. : territoire sous l’autorité d’un seigneur, 2433, 3238, 5414, 6735, 8576, 10508, 10513, 10853, 14753, 14792, 16138, 17484, 17988 Seignoriement : adv. : avec dignité, 13041 Seignoris, (segnory) : adj. : puissant, 603, 2361, 3709, 5221, 5713, 6700, 8259, 8634, 9823, 9952, 10186, 12904, 13579, 13580, 15114, 16284, 16468, 16478, 16505, 17299, 17474, 17825, 18074, 18879, 18912, 19533, 19566, 19655, 19994, 20196, 20210, 20619, 20654, 20890, 20902, 21237, 21250 Seignory, voir Seignoris Sejornement : s. m. : séjour, 2682 Sejorner : vb., (– qqun) demeurer chez qqun ?, 9663 Selon : prép. : le long de (Selon .i. boys a fait toute ses gens aler) il a fait marcher ses troupe le long d’un bois, 11114 prép. : en fonction de, 21709 Sembant, voir Semblant Sembel : s. m. : combat, 15765, 20237, 20251 Semblanc, voir Semblant Semblance : s. f. : apparence, 18410 Semblant, (samblant, sembant, semblanc) : s. m. : apparence, 53, 2700, 4461, 4577, 5065, 6288, 6595, 7908, 8684, 9048, 10308, 11045, 11068, 12406, 13061, 16647, 20855, 21005 (avoir faulx –) ne pas montrer son vrai visage, 12407 (d’un –) d’un seul tenant ? (Ainsi furent .xxm . et auques d’un semblant) ils étaient ainsi vingt mille et des poussières en une seule troupe, 11591 (ne faire –) ne rien laisser paraître, 18758 (ne faire nul –) ne rien laisser paraître, 12641 s. m. : avis, 15144, 21022 Semé : p. p., (salle –) salle décorée, 5037 Semmondre, voir Semondre Semonce : s. f. : convocation d’un suzerain à ses vassaux pour l’accomplissement d’un devoir, notamment militaire, 5370, 17548, 17566, 20928 Semondre, (semmondre) : vb. trans. dir. : demander (et de rendre l’espee va le roy semmonant) il demande au roy de lui rendre
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l’épée, 16699 vb. trans. dir. : inciter (de rendre leurs corps leur furent semmonans) ils les incitèrent à se rendre, 16154 vb. trans. : pousser à, 17193, 17260 p. p. : assemblé, 1317, 7287 (estre semons de) être poussé par, 7266 Semonné : p. p. : invité (Et quant Englois perceurent que la fu semonné) lorsque les Anglais s’aperçurent qu’il s’était invité ici, 19354 Semons, voir Semondre (p. p.) Sen : s. m. : discipline, matière (sen d’astronomie), 2317, 6725 (bon –) : discernement, 2320, 12734 (estre en –) retrouver la raison, 6403 (faire –) agir raisonnablement, 4423 s. m. : connaissance dans un domaine, 4118 s. m. : discernement, 122, 391, 11436 (– ou follie) par raison ou par folie ?, 10526 s. m. : prédiction ? (il ne it pas le sen de sa partie) il n’écouta pas les prédictions de sa femme, 3428 (pour le sen accomplir qui a esté cogneu) pour réaliser la prophétie qui a été dévoilée, 8356 s. m. : sagesse, 4419, 4704, 7441, 10865, 15237, 16097 Sené, (senné) : adj. : sage, 3086, 3614, 3890, 4625, 4908, 5175, 5636, 5867, 6750, 7371, 8771, 10215, 10335, 11276, 11282, 12448, 13077, 13352, 13999, 14268, 15792, 18120, 18382, 18439, 19828, 19851 Seneschaucie : s. f. : juridiction d’un sénéchal, 10671 Senestre : s. f. : gauche, 21211, 21379 Senestrier : adj. : gauche, 11807, 11859, 11913 Senestrier : s. m. : côté gauche, 11808 Senestre : adj. : gauche, 5973 Sengler, voir Sangler Senné, voir Sené Sentement : s. m. : jugement, 191, 6189, 12794, 20571 Sentence : s. f. : ce qui est formulé par un texte, 9807 Senter : s. m., (tenir voye ne –) se deplacer sans emprunter les chemins communs ?
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(et s’en va sans tenir voye ne senter) il s’en va sans emprunter les chemins déjà tracés, 14905 Senter : vb. pron. : partir ? (La chastellaine s’est partie et sentee) la châtellaine est partie et s’est retirée, 15415 Sentir : vb. trans. dir. : pressentir, 2590 Seoir : vb. intr. : être assis, 82 (– en/en –) s’asseoir, 12913, 12914 vb. intr. : convenir (– de + inf) convenir, 349 (dist en riant .i. mot qui bien seoit) il prononça en riant un phrase tout à fait à propos, 13630 vb. intr. : séjourner, 11176 Sercher, voir Chercer Serchier, voir Chercer Serement (estre par son – de) faire la promesse que ? (par le – de qqun) par son baptême ? (Comment avéz vous nom par vostre serement) quel est votre nom de baptême, 20712 Serement : s. m., (estre par son – de) faire la promesse que ?, 9388 Serge : s. m. : cierge, 5795 Seri : adj. : harmonieux, 10485 adj. : serein, 21162 Sermon : s. m. : discours, 10782 Sermonner : vb. trans. : parler, dire, 8038 (que veult il sermonner ?) de quoi veut-il me parler ?, 1585 vb. trans. ind. : demander ? (De rendre le chastel leur a moult sermonné) il leur a demandé de nombreuses fois de rendre le château, 21696 Serour : s. f. : sœur, 7782, 7785 Serourge : s. f. : sœur ? corr. ?, 6665 Serpent : s. m. : dragon (avoir un cœur de –) faire preuve d’un grand courage, 1681 Serpentin : adj., (euvre –) potion fabriquée à partir de venin de serpent ?, 6586 (eave –) potion fabriquée à partir de venin de serpent ?, 6592 Sereement : adv. : étroitement, 11785 adv. : vivement, 11969
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Serrer : p. p. : fermé à clef, 8138 Servage : s. m. : service (ou servage du roy) au sevice du roy, 3548 s. m. : redevance due au seigneur, 20414 Servant : s. m. : serviteurs, 7295, 8932 Serventoys : s. m. : serviteurs ? (maintes foys m’ont servy de ses faiz serventoys) les serviteurs m’ont souvent rapporté ses exploits, 18566 Service : s. m. : oice, 4951 (du – de qqun) temps du service de qqun ? (et mon pere ensement du service Charlon) et à mon père également du temps où vous serviez Charlon, 12166 Servir : vb. trans. dir. : s’acquitter d’obligations envers qqun, 7295 (– de + inf) s’employer à +inf (qui servirent ce jour François d’abevrer) qui s’employèrent ce jour-là à donner à boire aux Français, 19270 Servy : s. m. : serviteur, valet ? (il volu estre servy du duc de Normendie) il voulut être au service du duc de Normendie, 593 Seulement : adv. : tout seul, 12226 (esbanoier s’aloit seulement sur les préz) il alla s’amuser seul dans les prés, 2146 Seulet : adj. : seul, isolé, 2153 Seürté : (tenir en –) assurer le respect de ? (le prince notré et le roy Edouart ... devoient l’ordonnance tenir en seürté) le roi de France et le roi Edouart devaient assurer le respect du traité, 19949 Sever : vb. intr. : partir, forme pour sevrer ?, 20372 Sevrer, (scevrer) : vb. trans. dir. : séparer (La venu est dam Pietres qui ses gens a sevree) à cet endroit était venu dam Pietres qui avait réparti ses troupes, 7878 vb. intr. : partir, 842, 6690, 9951, 15598, 19543, 19684, 20497, 21046 vb. pron. : partir, 1986, 5646, 8446, 8454, 18142, 18955 Sextier : s. f. : mesure pour les liquides ou le grain, 17557 Si : adv. : ainsi, 1289, 12306 adv. : jusqu’à ce que, 1107 adv. : longuement ? (Ceste matiere si vous voys ramentevant) je vous rappelle longuement ces
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faits, 587 Siecle : s. m. : monde terrestre, 572, 6039, 7267, 8813, 8820, 8823, 10597, 18598, 21592 (– apparant) monde tangible, par opposition au monde céleste, 63 (iner du –) disparaître, mourir, 13100 Sien : s. m. : son bien (voir aussi vostre), 358, 647, 805, 3883, 7635 Sieve, voir Suyr, p3 prés. subj. Siglaton : s. m. : long manteau cousu d’une riche étofe, 16018 Signe : s. m., (dire le –) : tenir des propos, 18929 Signer : vb., (– joute à qqun) demander le combat, 442 Signet : s. m. sceau (sus nostre – le vous assignerons) nous vous remettrons une reconnaissance de dettes portant notre sceau ?, 10781 Signifier : vb. trans. dir. : conseiller, 3422, 12027 vb. trans. dir. : démontrer ? (car lupart ne va que ourgueil signiiant) car le léopart ne fait preuve que d’orgueil, 20463 vb. trans. ind. : annoncer, 17818 vb. trans. ind. : parler de qqch à qqun, 3404, 5741, 8511, 14468 Simple : adj. : humble (qui plus simple devint que un reclus enfermé) qui devient plus humble qu’un moine reclu, 21172 Simplement : adv. : humblement, 12230 Sire (droit –) souverain légitime ?, 9670, 10186 Siron : s. f. : être vivant minuscule, considéré comme le plus petit qui soit (qui ne prisent Englois la couhe d’un siron) il ne considère les Anglais pas plus que la queue d’un microbe, 18500 Soier : vb. trans. dir. : découper (un animal) (Mais realons a Bourdeaux soient les pors) retournons à Bordeaux découper les porcs, 12540 Soilaux : s. m. : soleil, 19914 Sollier, voir Souler Solt : s. m. : monnaie dont la valeur est inférieure à celle de la livre, 227, 800, 1938 Somier, voir Sommier Sommer : vb. trans. dir. : ixer le prix, 13517 Sommier, (somier) : s. m. : bête de somme, 746, 747, 751, 764, 7931, 8479, 10987, 11123, 14265, 16995, 19695
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(a la voie se sont mis les chiers et les sommiers) les chars et les bêtes de somme se mirent en route, 7698 Sommiller : vb. trans. : réléchir ? (il nous convient viser, penser et sommiller comment) il nous faut réléchir à la façon de, 21192 Son : s. m. : chant, 8850 Son : s. m., (en –) au-dessus, 4014, 4331, 5047, 5948, 20174 Son : s. m., (en –) en nombre, 3651, 10883, 18248, 20175, 20977 (en –) dans sa totalité (Se dire vous vouloye toute la chose en son) si je voulais vous raconter la totalité de l’histoire, 3666 Songier : vb. trans. dir. : inventer (De ce dist voir le roy, point ne l’avoit songié) le roi disait vrai, il n’avait rien inventé, 17180 vb. intr. : se préocuper (Or n’en veilléz songier) ne vous en préoccupez pas, 3352 Songneusement : adv. : avec soin, 13435 Sonner : vb. intr. : faire retentir des intruments, 11139, 15517 Sor : adj. : fauve, 18521 Sorre : vb., (avoir qqun a –) devoir de l’argent a qqun ? (et s’a sorre vous ay, nous le vous rendons) et si je vous dois de l’argent, nous vous le rendrons, 10780 Sors, voir Sort Sort, (sors) : s. m. : prédiction, 3266, 6196, 6716, 8896 (des sors qu’il sortissoit) des prophéties qu’il prédisait, 3264 Sortir : vb. trans. dir. : prédire, 3304 (des sors qu’il sortissoit) des prophéties qu’il prédisait, 3264 vb. intr. : pratiquer la divination (ou temps qu’il sortissoit) à l’époque où il faisait des prédictions, 3271 p. p. : prédit (La jornee est nostre, le fait en est sorty) nous serons vainqueurs, ceci a été prédit, 4556 Sorty, voir Sortir (p. p.) Soubgit, (subgict, subgit) : s. m. : sujet, 1949, 2079, 3488, 6459, 9842, 9945, 9948, 10184, 13859, 19190, 20126, 20142, 21051 Soubtil, (soubty, soutil) : adj. : avisé, 2374, 3711, 12106, 19578 (avec son hardement estoit Bertrant soubty) Bertrant était à la fois sage et courageux, 17164
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(par – maistrie) avec ingéniosité, 17997 adj. : clair, compréhensible ? (Garde ne vous donnéz d’un sort qui est soubtilz) vous ne vous méiez pas d’une prophétie qui est parfaitement claire, 6716 adj. : sage, 16487 Soubty, voir Soubtil Soudant : s. m. : sultan, 7392, 8685, 11069, 16210 s. m. : souverain non chrétien ?, 8389, 12553 Soudee, voir Souldee Soudoiant : adj. : traitre, 14522 Soudoier, voir Souldoyer Soudoierie, voir Soudoyerie Soudoieur : s. m. : combattant, 16094 Soudoyant : s. m. : traitre, 9578, 10241, 16184 Soudoyer, voir Souldoyer Soudoyerie, (soudoierie) : s. f. : ensemble de soldats, 16399, 17117 Souffire : vb. imp. : convenir (Je les iray oÿr quant il vous souira) j’irai les écouter quand cela vous conviendra, 13412 Souffisament, (souisanment, suisanment) : adv. : bien, de manière adéquate, 1710, 1727, 4975, 5835, 8518, 8533, 9446, 11234, 11434 (estre trop –) être trop nombreux, 5913 adv. : avec force ?, 8496 Souffisanment, voir Souisament Souffisant, (suisant) : adj. : de grande valeur, 20, 2683, 3285, 3294, 3446, 4034, 4296, 4481, 4667, 4872, 4880, 5067, 5356, 5382, 5800, 6270, 7310, 7497, 7500, 8197, 8383, 8917, 9567, 9603, 10624, 10684, 10686, 10699, 10714, 11018, 12052, 13261, 15155, 15431, 15957, 15972, 16171, 16216, 16359, 16876, 17203, 17873, 18178, 18308, 18327, 19098, 20874, 20875, 21419 (estre – en la loy de Judée) avoir du pouvoir au sein de la communauté juive ?, 9459 (estre – pour + inf.) être en mesure de + inf., 11015 adj. : important, noble, 331, 1448, 2345, 6911, 8677, 9245, 10502, 11728, 13941, 20302 adj. : puissant, 7593, 13761 adj. : qui excelle dans son art (sont ilz bien souisant ?) : sont-ils de bons musiciens ?, 9988
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Souffrir : vb. pron. : se calmer, se modérer (or vous soufréz) calmez-vous, 6814 Souhaider : vb. pron. : désirer être qq part (L’un se souhaide a huy et l’autre a masïere) l’un souhaite être à la sortie, l’autre à la muraille, 21185 Soulas : s. m. : manifestation de joie (y ot maintes paroles sans soulaz et sans ris) il y eut de nombreuses paroles sérieuses, 10465 Souldee, (soudee) : s. f. : récompense, 6529, 6681, 8350, 8963, 12330, 12462, 15600, 17633, 17667, 19139 Souldoyer, (soudoier) : s. m. : mercenaire, 2094, 2774, 3200, 3335, 3494, 3522, 3820, 3968, 4969, 5033, 5196, 5211, 5213, 5432, 5606, 5662, 5715, 5820, 9909, 10656, 10775, 12715, 13130, 14080, 14283, 14409, 16170, 16305, 16367, 16672, 17011, 17305, 17541, 17683, 17827, 18355, 18736, 21214, 21739 Souler, (sollier) : s. m. : soulier, 20606 (je de moy ne veil la monte d’un –) je considère ne valoir plus rien (je ne donnerai le montant d’un soulier pour moi-même) ?, 8965 Souloir : vb., (– + inf.) avoir l’habitude de, 12700 Souppe : s. f., (– en vin) plat composé de tranches de pain trempées dans du vin, 2297, 4464, 19490, 19816 Sourmonté, voir Surmonter (p. p.) Sourplus : s. m., (au –) d’ailleurs, 19503 Souspeçon : s. f. : crainte, 20333, 20351, 20432, 20792, 21638 Souspeçonnant : part. prés. : (estre – sur) être soupçonné de ? (Et ne serons en riens sur mal souspeçonnans) et nous ne serons pas soupçonnés de mauvaises actions, 7324 Souspecton : s. m. : rélexion ? (en trés grant souspecton comment venir pourroit a son entencïon) en réléchissant à comment il pourrait atteindre son but, 12747 Sousprendre : vb. trans. dir. : attaquer par surprise, 21075 vb. trans. dir : séduire, 6586, 13012, 13017 vb. trans. ind. : prendre, 1677 p. p. : séduit (et la char monseigneur sousprise et abruvee du venin) et la chair de mon mari séduite et imprégnée du venin, 6673 Soutaine : adj. : secret, peu fréquenté, 16457 Soutil, voir Soubtil
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Soutilement, voir Soutivement Soutivement, (soutilement) : adv. : subtilement, 15990 adv. : avec intelligence, 20303 Souvenir : vb. impers. : revenir à la mémoire de qqun, 126, 13342, 20098 Souviner : vb. intr. : tomber à la renverse, 11694, 19261 souëf : adj. : adroit ? (jousté avoit le jour de manière souee) il avait participé ce jour-là aux joutes bien adroitement, 420 souëf : adv. : avec précaution (menacéz tout souëf) tempérez vos menaces, 20026 souëfment : adv. : agréablement, 17796 Soveeement : adv. : inement, 714, 719 Statu : s. m. : accord (ains ont tout le statu despecié et faussé) au lieu de cela ils ont rompu et faussé l’accord, 19952 Subgict, voir Soubgit Subgit, voir Soubgit Subjection : s. f. : territoire où s’exerce l’autorité d’un seigneur ? (plus noblement assez en sa subjection que) beaucoup plus noblement en sa contrée que, 6479 (tenir en –) dominer, exercer son autorité sur un territoire, 6472, 20345 Subside : s. m. : impôt, 20525 Subvencion : s. f. : impôt occasionnel, 19969 Suffire : vb. trans. ind. : satisfaire (si sollempneement que a chascun suira) très solennellement qu’il satisfera tout le monde, 12291 Suffisanment, voir Souisament Suffisant, voir Souisant Suir, voir Suyr Suppediter, voir Suspediter Suppellatif : s. m. : personne la plus puissante, 9833 Sur : prep. : sous peine de ? (sur a perdre tout ce qu’ilz avoient vaillent et sur estre banyz d’Engleterre la grant) : sous peine de perdre tout leurs biens de valeur et d’être bannis d’Angleterre, 10693 (– + indication temporelle) expression marquant la concomitence, 10468 (sur la nuytie) au moment même où la nuit tombe, 5739 Surmonter, (sourmonter) : vb. trans. ind. : vaincre qqun, 20073
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p. p. : qui a franchi la frontière (quant voys mon ennemy qui est si sourmonté) lorsque je vois mon ennemi qui a traversé la frontière jusqu’ici, 5902 Surrexir : vb. trans. ind. : ressuciter, 20667, 20914 p. p. : réssuscité, 8838 Sus : adv., (or –) debout, 1614, 17727, 21157, 21300 (en – de) loin de, 6203 (mettre –) mobiliser une armée, 4489 Suspediter, (suppediter) : vb. trans. dir. : assujétir, 10230, 20099 (Et quant mendre de vous vous veult suspediter) et lorsqu’un moins bon combattant que vous veut vous soumettre, 5542 p. p. : soumis, 17439 Suyant (part. prés.), voir Suyr Suyant : s. m. : personne qui accompagne, 4472 Suyr, (suir) : vb. trans. dir. : suivre, 4876, 11947, 12005, 16210, 16272, 17155, 17401 (Qui amer le vouldra si le sieve briesment) qui l’aime le suive, 17820 vb. trans. ind. : s’adresser, 111 vb. intr. : traîner ? (fu suï tellememnt que en la in fu mis jus) il fu tant trainé qu’il init par tomber, 17280 vb. pron. : se suivre, 3684 Suyvre : vb. trans. dir. : poursuivre en justice (De mortel traÿson a Paris le suyvy) il le poursuivit en justice pour trahison qui mérite la mort, 11095 Sy : s. m., (par tel –) de telle façon, 17158, 17321 (sans penser a nul –) sans penser à mal ?, 20644 (Dont y ot une mine bien faicte par tel sy que) il y avait un mine bien creusée de telle façon que, 5243 Symonie : s. f. : volonté délibérée de vendre ou d’acheter un bien spirituel ou intimement lié au spirituel pour un prix temporel, 11668 Table : s. f., (tenir bonne –) ofrir de copieux repas ?, 15071 Tabour : s. m. : tambour, 20809 Targier : vb. pron. : se couvrir, se protéger, 3519 Taie : s. f. : grand-mère (et jura Damedieu et l’arme de sa taie) il jura sur Dieu et sur l’âme de sa grand-mère, 19434
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Taillent : s. m. : arme tranchante, 877 Tailler : vb. trans. dir. : soumettre à un impôt, 7615 (estre –de + inf.) être capable de (ne si trés bien taillé de la terre gaigner) ni autant capable de conquérir des territoires, 9760 Taion : s. m. : aïeul, 10578 (il le tint le sien pere, aussi it ses taions) il le tient de son père et de tous ses aïeuls, 5505 Talent : s. m. : envie, 4493, 5296, 5758, 9708, 10456, 11465, 12812, 12963, 16383, 16861, 17693, 20925, 21286 ( estre au – de qqun) estre au service de qqun ?, 9695 (s’il vous vient a –) si l’envie vous en prent, 12791 s. m. : avis, 11318, 13045, 17085 s. m. : savoir-faire ? (la porra on veoir de moy le bon talent) ici on pourra voir mon bon savoir-faire, 11330 s. m. : visage, 12232, 17668 Taloche : s. f. : peiti bouclier, 682 Talon (monstrer –) fuir (jamais la cité ne monsterroit talon jusques atant qu’il auroit mis dedens son penon) il ne fuira pas pas jusqu’à ce que celui-ci ait planté son étendart à l’intérieur, 1062 Talon : s. m., (monstrer –) fuir, 17270 Tant : adv., (de – (que) d’autant (que), 4341, 4349, 9258 (– ne quant) nullement, pas du tout, 2688, 5534, 12148, 12546 (– que) aussi loin que, 4373 (– que) jusqu’au moment où, 505 (– que) jusqu’à ce que, 7737 (de – (que) tellement (que), 11262 (en – que) autant que, 21084 (en – que) de sorte que ?, 6249 (en – que) en ce qui concerne (mais en tant que de guerre) : mais pour ce qui est de la guerre, 9708 (en – que) pendant que, 7707, 9615, 10352, 11811, 12262 (ne – ne quant) nullement, 8937 (par – que) parce que, 15334 (x – que) x fois plus que, 7493 (x –) x fois plus
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(et fussent telz deux tant) et même s’ils étaient deux fois plus nombreux, 17634 Tante : adj. : un si grand nombre de (tante banière y ot) il y eut de tant de banières, 10949 Targe : s. m. : employé ici au sens de tissu, mais lequel ? (bien vestues de soye, de targe, de cendal), 367 s. m. : bouclier, 10884, 14730, 14774, 17111, 17120 Targer (sans (point de) –), voir Targier Targier : vb. intr. : tarder, 17428 Targier, (targer) : vb. intr. : tarder (sans (point de) –) sans délai, 931, 1687, 3881, 5194, 5829, 12507, 17562, 18288, 21225 Tarser : vb. intr. : tarder, 2560, 8992 Tart : adv., : (a –) tardivement, 4217 (c’est a –) il est trop tard, 11547 Taster : vb. trans. dir. : frapper, 10331 Tel : adj. : pareil, semblable (chascun portoit telles armes que l’autre porta) chacun portait les mêmes armes que l’autre, 6015 Telle : s. f. : un tel coup (Par dessus son escu lui a telle donnee) il lui donna un tel coup dessus le bouclier, 14649 Tellement : adv. : de cette manière, 13122 (et pour ce que seigneurs l’as nommé tellement) et parce que tu l’as nommé seigneur, 712 (– que) à tel point que, 1730 (– que) de telle manière que, 8524 Temporalité : s. f. : biens d’une communauté ecclésiastique, 19846 Tempre : adv. : tôt, 1763 Temprement : adv. : bientôt, 5280, 7034, 13015, 13780, 14529, 14847, 15768 Temps : s. m., (quant le – enterra) quant le temps sera venu, 128 (le prime –) première saison de l’année qui débute en avril, printemps, 10468 (par force de –) par temps d’orage ?, 21543, 21545 (tout en mon –) toute ma vie ?, 14514 (et que je le peüsse tout en mon temps garder) et que je puisse le garder avec moi toute ma vie, 12833
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(un – a) le temps de ? (En ce point fu le roy un temps a ung yver) le roi resta dans cette situation le temps d’un hiver, 6332 Tenance : s. f. : teneur (Sire, dist le vallet, j’en diray la tenance) Sire, dit le vallet, j’en dirai le contenu, 1125 Tenant : s. m. : seigneur, vassal (et mains bons chevaliers, d’Angleterre tenant) et de très bons chevaliers, seigneurs d’Angleterre, 10705 (en un –) à la suite, 9228, 10258 Tencer, voir Tenser Tençon, voir Tenson Tenement : s. m. : pays, royaume, 709, 7032, 7048, 8107, 10446, 15782, 15852, 15885, 15888, 15905, 17697, 18790, 19116 Teneur : s. f. : ief, 20807 Tenir : vb. trans. dir. : posséder, 500 (– conte) considérer, 62 (– de qqun) relever de qqun, 20418 (– de) disposer, 9178 (– malheureusement) traiter mal, 138 (– prison fermee) être incarcéré, 4832 (– qqun a) considérer qqun comme, 8387, 9212 (– qqun) traiter ? (car il tenoit sa seur trés amiablement) car il traitait sa sœur afectueusement, 8296 (estre tenu a qqun) être soumis à qqun, 3549 (se – a qqun) être idèle à qqun (je me tiens a cellui qui plus de puissance a) je ne suis idèle qu’au plus puissant, 9548 (se – pour) se considérer comme (qu’ilz se deurent tenir touz pour exchaudéz) qu’ils crurent tous avoir assez de bois pour se chaufer, 1092 (se – sur qqun) surpasser qqun ? (et l’autre se tient ... sur touz les assaillans) et l’autre surpassa tous les adversaires, 19326 vb. trans. dir. : consolider (la terre font porter et la mine tenir) ils font acheminer la terre et consolider la mine, 3986
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vb. trans. dir. : diriger, administrer (de la Hussoie fu, qu’il avoit a tenir) il était de la Hussoie, qu’il devait administrer, 4703 vb. trans. dir. : occuper militairement, 10647 vb. intr. : résister, 20440 vb. pron. : s’empêcher, se retenir (ne se tenissent pas de piller) ils ne se privent pas de voler, 16238 Tenner : vb. trans. dir. : ennuyer (bien sçay je vous pourroie trop longuement tenner) je sais bien que je vous ennuierais trop longtemps, 20580 Tenreur : s. f. : tendresse, 20504 Tenser : vb. intr. : résister, tenir, 3394 p. p. : protégé, 9947 Tenser, (tencer) : vb. trans. dir. : réprimander fortement, 2914, 10818, 20391 vb. intr. : pénaliser qqun en lui faisant payer une somme d’argent, 12503 Tenson, (tençon) : s. f. : querelle, dispute, 6382, 10771, 16002, 20331, 20967 (Apaiséz la tençon) cessez de vous disputer, 6825 (octroier une –) déclencher une bataille ?, 11182 s. f. : bataille, 13703 s. f. : combat, 5940, 8876, 11163, 11184, 18496, 20683, 20974 (riens n’y vault menacier ne assault ne tençon) rien ne servit de les menacer d’un assaut ou d’une attaque, 20678 s. f. : débat (Ne sçay a quoy la tençon vous en soit demenee) je ne vois pas pourquoi le débat vous serait rapporté, 12466 Tenu : s. m. : obligé ? (Je suis vostre tenu) je suis votre obligé, 13660 Terce : adj. troisième, 6373, 8814, 9467 Terme : s. m., (prendre – de) ixer un délai pour, 21507 Terre : s. f., (mettre a la –) raser, abattre, 3710 Terrien : adj. : propriétaire d’un domaine, 19855 Terrois : s. m. : territoire, 15206 Terré : s. m. : rempart de terre, 19054 Teste : s. f., (sur la – a trencher) sous peine de décapitation ?, 5827 (avoir la teste –) être gonlé de colère, 19496 (faire une –) n’agir qu’en fonction de ce que l’on a décidé
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(si en i une teste qui en in lui cousta) il n’en it qu’à sa tête et cela lui coûta cher, 9073 Tolir, voir Tollir Tollir, (tolir) : vb. trans. dir. : voler, 1253, 3551, 5903, 8107, 8381, 9778, 10602, 11931, 14821, 15206, 15209, 15950, 21617 vb. trans. dir. : arracher, 16557 (La resne du cheval par force lui toly) il lui arracha de force les rênes du cheval, 11905 vb. intr. : retirer (et l’eauve de fosséz tolue pleinement) il retira l’eau des fosses entièrement, 19104 Toly : adj. : dérobé, caché ? (et prenoient les boys et le chemin toly) ils passaient par les bois et les chemins dérobés, 4163 Ton : s. m., (a hault –) à haute voix, 98 Tonnelle : s. f. : tonneau, 19259, 19297 Tonnerre : s. m. : foudre, 10367 (estre espris de –) être brûlé par la fourdre, 10362 Torment : s. m. : combat, 11778 (a –) avec violence ?, 5292, 18760 Tornier, (tourneer, tournier, tournoier) : vb. intr. : combattre, 4297, 17747 vb. intr. : combattre à un tournoi, 9898 vb. intr. : décrire un mouvement cyclique, 10503 vb. pron. : efectuer une ronde ? (Roy Pietres voit le guet, comment il se tournie) le roi Pietres aperçut le guet et sa façon d’efectuer sa ronde, 16388 Tost, (toust) : adv. : tout de suite, 1208, 2258, 3056, 3593, 3841, 3996, 4542, 4870, 5079, 5275, 5648, 7954, 8069, 8297, 9890, 9970, 10263, 10433, 10691, 11309, 20279 adv. : rapidement, 7934 Touaille : s. f. : morceau d’étofe, 5051, 5057, 19557 Toudiz, voir Tousdiz Tour : s. m. : camp (revint au tour françoys) il revint dans le camp français, 1792 (faire a son droit –) agir convenablement, 16983 (par nul –) d’aucune manière, 14593 (par nul –) en quelque façon, 12782 (revenir a son –) revenir à sa place, 488
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(se remettre a son droit –) reprendre sa place au tournoi, 476 Tour : s. m. : forme pour cours, 18548 Tour : s. m. : petit treuil servant à bander une arbalète, 10990, 19067 Tourbere : s. f. : marécage ?, 1115 Tourneer, voir Tornier Tourner : vb. trans. dir. : rebrousser chemin (Qui les pourroit avoir de cy endroit tournéz) qui pourrait les faire revenir par ici ?, 9187 (– a mal a qqun) arriver malheur à qqun, 6550 vb. trans. ind. : (– a qqun) rejoindre le camp de ? (et touz voz ennemis verrés a vous tourner) et vous verrez tous vos ennemis vous rejoindre, 5484 p. p. : retourné, 14016 Tournier, voir Tornier Tournoiement : s. m. : combat, 158, 166, 11776 Tournoier, voir Tornier Tournoys : s. m. : monnaie, livre valant vingt sous, 4060 Tournye, voir Tornier Tousdiz, (toudiz) : adv. : toujours, 610, 1243, 2084, 2625, 3499, 6704, 12718, 17839, 21355 (a –) pour toujours, 8832 Tousjours (a –) à jamais, pour toujours (– mais) à tout jamais, 6689 Tousjours : adv., (a –) à jamais, pour toujours, 4239 Tousjoursmais, voir Touzjoursmais Toust (adv.), voir Tost Toust (vb.), voir Tollir Tout : adv. : entièrement (j’ay tout perdu mon roiaume de pris) j’ai entièrement perdu mon cher royaume, 12040 (du –) entièrement, 612, 1213, 1891, 1926, 2111, 3715, 4305, 4401, 4730, 4956, 5137, 5326, 5402, 18858, 18907, 20140 Touteffoiz : adv., (– que) lorsque ?, 13422 Touzjoursmais, (tousjoursmais) : adv. : à jamais, 18545, 18697, 20455 Tracer : vb. trans. dir. : suivre les traces, traquer (nature fait tracer le cerf) la nature permet de traquer le cerf, 19960 (– les champs) : fouiller le lieu du combat, 12083 Traerie : s. f. : tir de lèches, 15934
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Train : s. m. : ile de chariots qui suit l’armée avec bagages et ravitaillement, 18946 Traire : s. m. : jet de lèches, 15935, 17015 Trait : s. m. : lèche, 1546, 16761, 18630 s. m. : pluie de lèches, 3090, 3139, 17112, 21322 Traiter : vb., (– que) raconter que, 12671 Traiteur : s. m. : traitre, 7079 Traiteur, (traitour, traitreur) : adj. traitre, 6851, 6871, 7028, 7889, 8316, 8319, 8345, 8878, 9673, 9677, 10169, 10731, 12528, 16107, 16184, 18020, 20187 Traitour, voir Traiteur Traitreur, voir Traiteur Tramectre, voir Tremectre Tramoys : s. m. : mélange de froment, de seigle, d’avoine, de vesce qu’on sème pour être coupé en vert et donné aux bestiaux, 5614 Travail : s. m. : tourment, soufrance, 3104 Travailler : vb. trans. dir. : tourmenter, 5933, 12560, 13007, 14644 p. p. : tourmenté, 6245, 15362, 15492 vb. trans. dir. : torturer, 12299 p. p. : torturé (par les felons Juïfz travailléz et cloéz) par les Juifs perides torturé et cruciié, 6798 vb. intr. : inliger des dégats (Penséz de travailler) occupez-vous de faire des dégats, 5201 vb. pron. : employer tous ses eforts, s’activer, 914, 12342 (se – aus brafs) se battre à l’aide des poings (et que aus brafs qui sont fors s’aloient travaillant) et ils se frappaient de leur poings robustes, 10353 p. p. : épuisé (Pour eulx a refrechir comme gens travaillie) pour se désaltérer comme des personnes exténuées, 5740 Trayner : s. m. : action de traîner un condamné sur une claie ou une charrette comme marque d’infamie avant l’exécution, ou bien à la queue d’un cheval, comme supplice, 5093 Traynie : p. p., (avoir la char –) subir des actes de torture ? (Si en ara chascun de vous la char traynie) chacun de vous sera torturé, 8349 Trayre : vb. trans. dir. : transpercer à l’aide d’un projectile, 3070, 17108 (et Françoys tout autour lancer, trayre et berter) et les Français autour de
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lui frapper, lapider et percer avec des lèches, 3561 (– qqun a la mort) : tuer qqun, 16272 vb. pron. : se diriger (se – a part) se retirer (D’une part se sont traiz les archiers) les archers se sont retirés, 21323 (vers la cité du Mans la se vont ilz traiant) il se drigèrent vers la ville du Mans, 17351 (se – a part) se retirer (Chascun se trait a part bien et secretement) tous se retirèrent discrètement, 8528 Tré, voir Tref Trebucher : vb. trans. dir. : renverser, 10121, 11940, 14602 p. p. : renversé, 8505 Trectellé : adj. : muni de créneaux ? forme pour cretellé ? voir note, 7859 Tref, (tré) : s. m. : tente, 1605, 2188, 2215, 2984, 3081, 3909, 8241, 15798, 16651, 21708 tref : s. m. : trait ? (troys trefz d’arc d’un longon) d’un longueur de trois traits d’arc, 4327 (plus tost furent rué a terre sur le champ c’on ne seroit alé trois trefz d’arcs en courant) ils furent jetés à terre plus vite qu’on eut tiré trois lèches d’arc, 21399 Treillis : adj. : constitué de mailles, 19558 Tremectre, (tramectre) : vb. trans. : transmettre, envoyer, 1523, 5316, 13917, 14337, 16483, 18563, 19674, 20181, 20560, 21703 Trencher, : vb., (sur la teste a –) sous peine de décapitation ?, 5827 Trepasser, (trespasser) : vb. trans. dir. : franchir, 2782, 3199 vb. trans. dir. : transpercer (Bertrant le chevalier fery et assena sur l’escu de son col, oultre le trepassa) Bertrant frappa sur le bouclier qu’il portait au cou et il le transperça, 1784 vb. trans. dir. : traverser, 14607 vb. intr. : aller d’un point à un autre (Tout parmy l’ost s’en vint et prinst a trepasser) il parvint parmi les troupes et commença à les parcourir, 11132 vb. intr. : mourir, 572, 6262, 6590, 6841, 6937, 7413, 8823 Treppeaux : s. m., (par –) en grand nombre, 17903 Trés : prép. : depuis (tout avoient gicter trés le commaincement) depuis le début ils avaient tout jeté, 19395
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(en – que) tant que ? (J’emploieray ma mort en trés que je suis ça) je risquerai la mort tant que je serai ici, 11702 Trespasser, voir Trepasser Trespercer : vb. trans. dir. : détruire ? (La mine ont trespercé) ils ont détruit la mine, 5290 Trestout, (tretout) : adv., (– entierement) tous sans exception, 5295 (non mie si –) du moins pas tout de suite, 12034 Trestout, (tretout) : adv., (– entierement) tous sans exception (estre – premièrement) être le premier (Guillaume Boistel fu tretout premierement) Guillaume Boistel était le tout premier, 4974 Tretout, voir Trestout Treü, (tru) : s. m. : impôt, 10225, 10228, 15187, 15287, 18301, 19739 (de Royneval tenoit les ventes et les truz) il percevait des droits sur les ventes ainsi que les impôts de Royneval, 17277 Trezoriere : adj. : gardienne des trésors spirituels promis aux hommes, 1105, 21183 Triboulement : s. m. : tourment, 12964 Tribouler : vb. trans. dir. : maltraiter, tourmenter, 1076 Tricherie : s. f. : ruse, tromperie, 2439, 3222, 9366, 10857, 14992 Trocter : vb. trans. dir. : ralentir (que le vin leur a fait la cervelle trocter) que le vin leur a amolli la cervelle, 21090 Trompe : s. f. : cor, sorte de trompette, 405, 409, 3016, 3022, 5817, 10975, 11770, 15803, 15899, 15906, 19692, 20754, 21308 Trompecte : s. f. : celui qui sonne de la trompette, 11620 Tromper : vb. intr. : jouer d’un instrument à vent, 5721, 5847, 21308 Tronisie : s. m. : paradis (de saintes et de sains qui sont en tronisie) des saintes et des saints qui sont au Paradis, 7436 Tronsonner : vb. trans. dir. : couper, 4455 Troppel : s. m. : troupe, 20256 Tros : s. m. : trou, 19300, 19310 Troton : s. m. trot, 17919 Troubler : vb. pron. : se battre, 15381 Trousser : vb. trans. dir. : charger, 698, 3088, 5151, 7868, 8977, 9016, 14265, 16304, 18700, 19694, 19695
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- Glossaire -
p. p. : chargé, 5158, 7670 vb. trans. ind. : placer dans des bagages, 16393 vb. intr. : plier bagages, 4388 Trouvé : s. m., (estre le bien –) être le bienvenu, 19687 Trouvé (estre le bien –) être le bienvenu, 1616, 19808 Trouver : vb. trans. dir. : retrouver, 7816 Tru, voir Treü Truant : adj. : qui ne sert qu’aux misérables, 9994 Trufferie : s. f. : baliverne, 3424 Tryner : vb. intr. : trainer, 14163 Tuhé : p. p. : mort, tué, 6047 Tunicle, voir Tunique Tunique, (tunicle) : s. m. : vêtement réservé aux hommes, sorte de bliaut (vêtement typique du hayraut ?), 4500, 7118, 17729, 18937, 20174, 20493, 20502, 20554, 20912 Turelure : s. f. : vesse (voir note), 3788, 3789 Turquois : adj. : turc, 10989 Tyrant : adj. : tyrannique, despotique, 3013, 7086 Umilier, voir Humilier Unité : s. f, (en –) à l’unisson ? (se nous ne sommes touz d’actort en unité) si nous sommes tous d’accord à l’unanimité, 8599 Usage : s. m., (tenir l’–) respecter la coutume ?, 8574 User : vb., (– par qqun) consulter, demander l’avis de qqun ? (et tout le conseil, par qui il doit user) et tout le conseil, par qui il doit passer (avant de prendre une décision), 5472 (– a la vie) passer sa vie (a la vie visons comment usé l’avons) faisons le point sur la façon dont nous avons vécu, 7255 (– d’un conseil) suivre un conseil, 5538 (– par un conseil) agir selon les conseils de qqun, 5578 (– sa vie) passer sa vie (en celle eglise usa sa vie) il init sa vie dans cette église, 6406 Uys, voir Huys Vaillandie : s. f. : honneur, 519, 21519 s. f. : vaillance, 2432, 14751
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Vaillant, voir Vaillent Vaillent, (vaillant) : s. m. : bien, 3958, 4475, 7629, 8588 (de tout leur –) tout ce qu’ils possèdent ? (qu’ilz prenoient du leur de tout leur vaillent) ils prenaient tous les biens qu’ils possédaient, 10234 Vailly : vb., forme pour valoir p3 passé simple indicatif ? (Noz gens assaillerent mais riens ne leur vailly) ils attaquèrent nos troupes mais ils ne les valurent en rien, 5241 Vaincu : p. p. : perdu ? (Vaincue est la bataille) le combat est perdu, 6233 Vaissaulx, voir Vaissel Vaissel : s. m. : piece de vaisselle, 13037, 13047 Valeton, (valleton) : s. m. : garçon, 97, 8117, 8119 Vallé, voir Varlé Vallet, voir Varlé Valleton, voir Valeton Valoir : vb. trans. dir. : rembourser ? (– mieulx) : acquérir plus de valeur, 21671 (j’aray tel chastel qui assez me vauldra) j’aurai un si grand château qu’il me remboursera, 2837 Vantise : s. f. : vantardise, 21435 Varient : adj. : inconstant (Espaignolz sont si variens qu’ilz nous lerront tout coy si Pietres vient avant) les Espagnols sont si versatiles qu’ils nous abandonneront si Pietres vient par ici, 8943 (estre –) être en désacord (L’un vouloit Henry et l’autre Bertrant et le ters le roy Pietres ; si furent varient) l’un voulait Henry, l’autre Bertrant et le troisième Pietres ; ainsi ils furent en désacord, 15441 Varier : vb. intr. : hésiter, 1703, 21568 Varlé, (vallé, vallet, varlet) : s. m. : jeune guerrier, 3085, 3163, 3704, 5196, 18587, 21350, 21445 (– de chevaux) serviteur chargé des écuries ?, 974 s. m. : serviteur, 18704 s. m. : valet, 4388, 18905, 19213, 19511, 19518, 19756 Varlet, voir Varlé Varroquier : s. m. : gaillard, 947 Vayne : s. f. : cavité souterraine
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(il y fu estendu a une vayne) (le mur) fut ouvert jusqu’à une cavité souterraine, 19424 s. f. : famille (Yvain de Gales qui noble vayne estoit) Yvain de Gales qui était issu d’une noble lignée, 20315 Veer : vb. trans. ind. : empêcher (car pas ne viendront cy, la montaigne leur vee) car ils ne viendront pas ici, la montagne les en empêche, 4276 vb. trans. dir. : refuser (que nul n’alast le pas véer) que personne n’aille bloquer le passage, 5828 vb. trans. : refuser, 18220 p. p. : refusé (et que pour leur argent ne fust chose véee) et qu’il ne leur soit rien refusé en échange de leur argent, 10963 Velle : s. f. : voile, 15514 Vendre : vb., (– qqch sur qqch) remettre qqch en échange de qqch ? (dix mille Sarrazins que au roy Pietre vendy sur la loy Jhesucrist) dix mille Sarrasins qu’il ofrit au roi Pietre en échange de sa foi en Jésus Christ, 14334 (– malement) faire payer cher ? (La mort Giefroy Paien malement leur vendoit) il leur it payer cher la mort de Giefroy Paien, 20832 Vengement : s. m. : vengeance, 10452, 13010, 13458, 15866, 15896 Vengeson, voir Vengezon Vengezon, (vengeson) : s. f. : vegeance, 8905, 15686 Venin : s. m. : poison, 6545, 9045 s. m. : péché ? (comment le ilz Dieu vint ouster le venin) comment le ils de Dieu vint ôter le péché, 6568 Venir : vb., (– au dessus) vaincre, 3556, 5577 (– a) parvenir à (comment viendroit aussi un roiaulme a garder) comment parviendrait-on également à gérer un royaume, 20100 (– ensemble) s’attaquer ? (Puis sont venuz ensemble par si grande ierté) puis il se sont combattus avec une si grande violence, 10321 (bien veignent) bienvenue, message d’accueil, 13063 Vennue : s. f. : naissance, arrivée au monde, 48
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Venour : s. m. : chasseur, 18531, 18534 Vent : s. m., (aus – et es esclis) dans le vent et les embruns, 10168 (oÿr le – de qqch) être informé de qqch, 12573, 15305 Ventance : s. f. : parole de vanterie, 18407 Vente : s. f. : droit perçu sur les ventes (de Royneval tenoit les ventes et les truz) il percevait des droits sur les ventes ainsi que les impôts de Royneval, 17277 Venter : vb. pron. : garantir, airmer (Vous estez a Thomas de Grantson, je m’en vent) vous êtes au service de Thomas de Grantson, je peux l’airmer, 17728 Ventiler : vb. trans. dir. : lotter au vent, 11078 Verdelet : adj. : verdoyant, 18524 Verdour : s. f. : herbe (Maintenant descendi a terre a la verdour) à ce moment là il descendit à terre sur l’herbe, 18538 Verité (tenir –) être idèle à ses engagements, tenir parole, 7415 Verité : s. f., (tenir –) être idèle à ses engagements, tenir parole, 4050 Verre : s. m., (boyre au – mon vivant) ?, 8939 Verser, (versier) : vb. trans. dir. : tomber, 169, 6169, 7997 vb. trans. dir. : faire tomber, 21349 vb. trans. dir. : jeter, 6028 vb. intr. : jeter à terre, 6091, 14657 vb. intr. : s’ouvrir ? (jamais ne la verroiéz en vostre sale verser) vous ne verrez jamais (ma table) s’ouvrir dans votre salle, 12376 vb. intr. : tomber, 455, 4739 vb. pron. : se jeter, 14802 Versier, voir Verser Vert : adj. : qui est comestible ? (pour trouver riens de vert avironneement) ils ne trouvèrent rien à manger aux alentours, 11467 Vert : s. m. : fourrure de plusieurs couleurs, 5151 Verti : p. p. : retourné (car j’ay mandé au roy que la seray vertis) car j’ai dit au roi que j’y retournerai, 16813 Vertu : s. f. : miracle, 6402 Veslie : s. f. : ensemble des bêtes contenu dans le parc, dérivé de veele ?, 5742 Vespré, voir Vespree
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Vespree, (vespré) : s. f. : soirée, 837, 1840, 1924, 3716, 4285, 5311, 6678, 7864, 8746, 9445, 9448, 12110, 15417, 18371, 18424, 19225 Vespres : s. m. : soir, 1311 Vespry* : s. m. : soir, 20628 Vesture : s. f. : tenue, vêtement, 204, 3777, 6251 Vetement : s. m., (avoir robbe sans –) ?, 7472 Viaire : s. m. : visage, 12711, 13595, 16547 Vie : s. f. : bruit, 1220 (a sa –) toute sa vie (ainsi qu’Olivier tint loiaument a sa vie) de la même façon qu’Olivier respecta (la coutume) durant sa vie entière, 8575 (demener bonne –) manifester sa joie ?, 8733 (estre en ceste –) être déjà venu au monde ? ?, 6729 (mener laide –) passer un mauvais moment, 18012 Vif : adj. : en bon état (de rendre le chastel du tout haytié) de rendre le château sans aucun dommage, 5137 Vif : s. m. : (le – des armeures) les parties principales de l’armure ?, 15990 Vigour : s. f. : (tenir qqun en –) assurer le pouvoir à qqun ?, 15877 Viguier : s. m. : agent seigneurial ou royal chargé de rendre la justice et de percevoir les droits domaniaux, 8439 Ville : s. f., (premiere –) expression s’opposant ici à cité au vers suivant pour désigner un logement rural, les premiers logements que l’on peut trouver en arrivant aux abords d’une cité fortiiée ?, 3490 (– a clochier) ville pourvue de tours ?, 17017 (bonne –) ville privilégiée, fortiiée, ayant des magistrats jurés, tenant du roi le droit de bourgeoisie avec afranchissement de la taille, représentant une force politique avec laquelle le souverain doit compter et composer (DMF), 18965 (grosse –) ?, 18160 Villennie, (villonnie, villonie) : s. f. : honte, 203, 2448, 4945, 7148, 10511 (sans –) d’une noble façon ?, 5415 s. f. : tromperie, 10496 Villonnie, voir Villennie Vilonnie, voir Villennie Viltance : s. f., (a –) de manière méprisable, 4605 Vilté : s. f. : humiliation, 4151, 4860, 16565 Vin : s. m., (souppe en –) plat composé de tranches de pain trempées dans du
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vin, 4464, 19490, 19816 Vinee : s. f. : vin, 12459 Virecton : s. m. : lèche ou trait d’arbalète armé d’un fer conique, court et cannelé en hélice qui le fait tournoyer dans l’air, 19294 Vis : s. m. : visage, 2367, 4550, 15118, 16739, 19176 Vis : s. m., (se m’est –) il me semble, 15119, 16466, 19186, 21754 Visage : s. m., (faire – vers qqun) se placer face à qqun, 15695 Viscoins : s. m. : vicomte, 4086, 4196, 4246, 5067 Visee : s. f., (gicter sa –) porter son regard, 901, 3771 (gicter sa – comment) réléchir à un moyen pour ?, 5030 (laisser sa –) cesser de regarder, 3779 (mettre sa – en qqch) se préoccuper de qqch, 15595 (ne pas mettre sa – en qqch) ne pas compter sur qqch, 15591 Viser : vb. trans. dir. : décider, 8595 (– pourquoy) réléchir comment, 9847 vb. trans. dir : comprendre, 872 vb. trans. dir. : réléchir, penser, 3383, 3385, 4149, 6179, 8814, 10784, 21192 vb. trans. ind. : (– a qqch) réléchir à qqch (a la vie visons comment usé l’avons) faisons le point sur la façon dont nous avons vécu, 7255 vb. intr. : observer, 4186, 14570 Visiere : s. f. : partie du casque qui laisse entrevoir le visage, 5972, 10073, 21423 (Bertrant raicha sa visiere) Bertrant ferma son casque, 11996 Visiter : vb. trans. dir. : secourir, 12321, 16083, 20086, 20095, 20563 vb. trans. dir. : rendre visite, 17373 Vistement : adv. : rapidement, 929, 4009, 4909, 4940, 4986, 5274, 5301, 6162, 7546, 8458, 8522, 8778, 8990, 9526, 11442, 11458, 11748, 12808, 12942, 12978, 12997, 13044, 15501, 15525, 20696, 21488 Vitaille : s. f. : provisions, 1300, 1385, 1565, 1874, 1931, 2986, 5676, 5697, 7225, 9134, 10965, 11082, 11085, 11128, 12359, 13200 Vitance : s. f. : (a grant –) d’une manière vile, méprisable, 1135 Vituperer : vb. trans. dir. : malmener, blesser (Les ennemis du roy a moult vituperéz) il a grandement tourmenté les ennemis du roi, 41 Vivant : s. m. : habitant ? (Huon de Caurelay, d’Angleterre vivant) Huon de Caurelay, habitant
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d’Angleterre, 9208 Vivier : s. m. : étang, 12592 Voidie, voir Vuider (p. p.) Voie, voir Voye Voir : s. m. : les sources ?, 6497 (ce tesmoigne le voir) les sources l’attestent, 5605 (ce –) c’est vrai, 3778 Voir : vb. pron. : se pésenter ? (Voir ne me ouseroie jamais devant telle gent) je n’oserai jamais me montrer devant ces gens, 18651 Voix : s. f. : rumeur, 17036 Vole : s. f., (estre en la –) avoir de la chance ? voir note, 17200 Volee : s. f., (a la –) rapidement, 17618 Volee : s. f. : (a la –) rapidement, 3770, 4225, 4590, 4790, 6069, 8330, 11818, 11839, 20491 (a moult aulte –) à haute voix ?, 13720 Voler : vb. intr. : se déplacer à grande vitesse (qui perceut trois paiens qui aloient volant) qui aperçut trois païens qui avançaient à toute allure, 15719 (au –) par l’art de la chasse au vol, 5561 Volunté : s. f., (de – hardye) énergiquement, 4655 Volunters : adv. : fréquemment (on voit –) on voit très souvent, 196 Vostre : s. m. : bien, avoir, 130, 6757, 10770, 12720 Vou : s. m. : vœu, 19499 Vouer : vb. trans. dir. : faire le vœux de, 18357 Vouloir : s. m. : intention, 788 Vouloir : vb., (bien – que) consentir à (vous pourroiéz bien vouloir...que de ce paiement n’eüssez nul coron) vous pourriez bien consentir à ne recevoir rien de cette somme, 14251 Vous : s. m. plur. : veaux, 1958 Voyder, voir Vuider Voydie : s. f. : ruse, tromperie, 10275 Voye, (voie) : textits. f., (droite –) chemin le plus court, 727 (acueillir sa –) se diriger, 8500, 8732, 14214, 14282 (faire la –) dégager le passage, 11710 (haster sa –) se mettre en route ?, 3772 (prendre sa –) se mettre en route, 12743, 12802
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(se mectre a la –) se mettre en route, 7698, 14798 (tenir – ne senter) sans emprunter les chemins communs ? (et s’en va sans tenir voye ne senter) il s’en va sans emprunter les chemins déjà tracés, 14905 (tourner sa – vers) se diriger vers, 9460, 13707 Vray : s. m. : personne idèle à ses engagements, 20126 Vray : adv. : (de –) avec certitude, 5704 Vuider, (voyder) : vb. trans. dir. : quitter, abandonner, 3056, 7581, 10407 vb. trans. ind. : (– de) partir quitter (et de la tour vuyder) et partir de la tour, 3879 (tant qu’il convient Henry du roiaulme vuyder) tant que Henry dut quitter le royaume, 6989 vb. intr. : partir, 8989 vb. pron. : s’échapper, 3828 p. p. : parti (de France est voidie) elle a quitté la France, 7429 (a –) à la sortie, 14104 Vy : adj. : vivant (ainsi comme vous orréz, si longuement suys vy) comme vous pourrez l’entendre, si je vis plus longtemps, 3512 Yla : adv. : là, 18283 Yssi : adv. ici, 5338 Yssir : vb. trans. : jaillir (quant sang de lui yssoit) lorsque le sang jaillit de son corps, 173 vb. intr. : sortir, 1203, 1274, 1275, 1314, 1743, 1848, 1903, 2250, 3016, 3327, 3558, 5159, 8361, 8671, 9348, 12509
Index des lieux et des personnages L’index répertorie tous les lieux et les personnes qui igurent dans le texte. Des noms communs comme bourjois ou converse y sont notés pour répondre à une déinition plus large du personnage que le simple nom propre ou gentilé. Tout intervenant dans la iction trouve sa place dans cet index. Il en est de même pour les lieux. L’inventaire n’est pas limité au simple mot portant une majuscule, chaque emplacement où la iction se déroule est inclu, comme la prison ou la tour d’un château. Une entrée est créée pour chaque groupe de personnages accompagné d’un nombre qui en réduit l’acception. Par exemple, on trouvera l’entrée Arbalestriers chaque fois que le substantif est accompagné dans le texte d’un adjectif numéral comme .XX. ou cinq cens. La forme de chaque entrée correspond à la forme de la première occurrence du mot. On peut trouver à l’intérieur d’une entrée toutes les autres formulations faisant référence aux lieux ou aux personnages relevés, comme par exemple ce bon chevalier pour Bertrant ou encore une riche contree pour dénommer l’Espagne, à l’exception des pronoms. Des points d’interrogation viennent marquer les occurrences dont la référence à un personnage ou un lieu n’est pas certaine. Abrahan : un des meurtriers de la reine d’Espagne, 6871 Abrahan : conseiller du roi Pietre, 8385, 8449 Abrahan : personnage qui conseille le roy Pietre, 7839, 7841 le juif, 7854 Abret (celle de –), voir Cinquiesme Abret (seigneur de l’–), 6376
abbaÿe (l’–) : abbaÿe près de la Sousterrine, 19534 icelle abbaie, 19538 l’abbaie, 19535 une abbaie, 19617 Abbé (– la Rochelle), 20515 Abel (roy –), 11662 Abel, 19608 Abilant, 16668 Abraham : personnage biblique, 8702 295
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- Index des lieux et des personnages -
le sire de l’Abret ?, 13385 son nepveu de l’Albret, 11476 Adam : personnage biblique, 8702 Adam, 13849, 17872 Agor (cellui d’–), 21001 Ahynaut, 11361 Aie (Dam’–) : Aye d’Avignon, 19442 Aisnes (le conte d’–), 10834, 10900, 11099, 11168, 11176 le conte, 11181 le conte d’Aisnes, 11194, 11312, 11525 le faulx conte d’Aisnes, 11916 Alain : ?, 14628 Alebien, 21857 Alebret (d’– le guerrier), 11793 cellui d’Alebret ?, 13325 Alemans, 546, 2622, 10658 Alemant (.iii. miles –) : soutien inventé par le bourgeois auprès du duc de Lencloistre lors du siège de Rennes, 1299, 1321 .v. miles adoubé, 1320 Alemant (Glainsement l’–), voir Glainsement Alençon (cellui d’–), 17611 le conte d’Alençon, 20897 Aletaire, 15252, 15568, 15570, 15622, 15851, 15862, 15895, 15961 ilz du roy, 15851 le ilz au fort roy, 15522 le ilz le roy de Bel Marin, 15567 le ilz qui fu du roy Bel Marin,
16144 le jeune paien, 15631 le paien, 15622 son ilz, 15621 Alfon (le roy –), voir Pere (nostre –) Alier (Alixandre d’–), voir Alixandrin Alixandre, voir Alixandrin Alixandre : la ville d’Alexandrie, 6511, 7393, 8176 Alixandrin (le roy –), 12 Alixandre, 7101, 10644, 18472, 21771, 21883 Alixandre d’Alier, 11806 Alixandre le grant, 21928 Alixandre le roy, 10991 le roy Alixandre, 20581 puis le temps d’Alixandre, 10939 roy Alixandre, 6475 Alroy (le chastel d’–), 5323, 5334, 5364, 5434, 5931, 5941, 6298, 6299, 6396 Alroy, 3426, 6302 Alroy, le chastel qui est bon, 5501 Arroy, 5582 au chastel qui Alroy est nommé, 5639 bel joiel, 5627 ce chastel, 5693 du chastel, 5622, 5668, 5718, 5719 la bataille d’Alroy, 5805 la ville d’Alroy, 5602 le bon chastel, 5353, 5642 le bon chastel d’Alroy, 5690
- Index des lieux et des personnages le chastel, 5366, 5603, 5616, 5651, 5665, 5675, 5694 le chastel d’Elroy, 2024, 5074, 5354 le chastel qui tant a de renom, 5626 vostre chastel, 5611 Amant (saint –), 1474, 4477, 16202 Amaurriz, 2364 .i. chevalier vaillant, 2353 fol, 2373 l’escuier, 2364 tel escuier, 2376 Amberoche (Garnier d’–), 11414 Ambonne (Thomas d’–), 11365 Amiral (l’– de mer) : chef de la lotte de Bel Marine, 14340 l’admiral, 14643, 14648 l’admirans, 14505, 14519 l’amiral, 14405 le admirant ?, 14622 Amiral (l– d’Espaigne), voir Espaigne (le mareschal d’–) Amiral : ?, 11073 Amirans (.iii. –) : personnages qui accompagnent Aletaire dans sa fuite, 16147 Amis : ses charnelz amis, amis de Bertrant, 311 Ammarion, 21924 Ancel : capitaine de Saint Maixent, 20247 Anegron (Pietres d’–), 20901 Anequin (Godefroy d’–), 4087 cellui d’Anequin, 4648 d’Anequin, un chevalier
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puissant, 4579 Godefroy, 4113 Godefroy d’Annequin, 4112, 4292 Godefroy d’Anequin, 4669 Godefroy d’Annequin, 4476, 4612 Godefroy d’Annequin, un chevalier joly, 4168 hardy chevalier fu et de bonne creance, 4613 le bon Godefroy, 4479 un chevalier vaillant, 4292 Angeou (le duc –), 7672 le duc, 7675, 7691 Angeuses (cellui d’–) Jehan, 21442 Angevin, 21948 Anglé (le chastel d’–), 19722 Anglé, 19723 au chastel, 19730 ce chastel, 19739 du chastel, 19731 un chastel qui estoit de grant nom, 19721 Angloys (un –) : personnage tué à la bataille de Pierregort, 17214 l’Engloys, 17226 Angloys (un –) : personnage tué à la bataille de Saint Marcel, 17242 l’Englois, 17229, 17235, 17257 l’Engloys, 17247, 17248, 17264 le chevalier, 17271 son maistre, 17234, 17268 Angloys (un –) : personnage tué à la bataille de Saint-Marcel
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- Index des lieux et des personnages -
icellui Englois, 17227 Angloys, 537, 619, 958, 1237, 1839, 1857, 1860, 1884, 2038, 2103, 2110, 2117, 2120, 2369, 2389, 2449, 2652, 2685, 2694, 2931, 2940, 2965, 2973, 3456, 3478, 4053, 4114, 4229, 4259, 4391, 4450, 4640 Anglois, 1277, 1286, 1876, 2140, 3552, 4435, 5087, 7291, 7850, 10004, 10166, 18954, 19544, 21375 Angloiz, 702, 950, 971, 1222, 1266, 1329, 1361, 2345, 2454, 2715, 3123, 3650, 4032, 4127, 4210, 4248, 4269, 4397, 4469, 4605, 4628, 6168 bon Englois, 20142 Englois, 833, 5303, 5350, 9843, 9886, 9910, 9925, 10007, 10011, 10014, 10025, 10190, 11125, 11130, 17052, 17140, 17177, 17181, 17193, 17224, 17314, 17345, 17469, 17488, 17523, 17626, 17640, 17657, 17659, 17679, 17764, 17777, 17781, 17816, 17821, 17831, 17834, 17853, 17922, 17954, 17982, 17999, 18000, 18005, 18007, 18008, 18015, 18023, 18051, 18057, 18064, 18071, 18079, 18085, 18087, 18091,
18093, 18114, 18129, 18156, 18217, 18226, 18262, 18271, 18325, 18345, 18481, 18518, 18555, 18595, 18628, 18710, 18733, 18785, 18824, 18943, 19037, 19069, 19121, 19189, 19233, 19296, 19317, 19348, 19374, 19438, 19451, 19464, 19551, 19631, 19670, 19957, 20006, 20033,
18095, 18119, 18140, 18211, 18222, 18239, 18266, 18298, 18332, 18442, 18500, 18552, 18567, 18596, 18680, 18716, 18773, 18808, 18879, 19018, 19063, 19072, 19142, 19214, 19236, 19304, 19335, 19354, 19379, 19443, 19456, 19467, 19565, 19638, 19672, 19964, 20011, 20039,
18113, 18122, 18151, 18213, 18225, 18248, 18267, 18304, 18334, 18461, 18512, 18554, 18593, 18606, 18683, 18730, 18775, 18811, 18908, 19022, 19064, 19075, 19175, 19221, 19245, 19306, 19342, 19359, 19390, 19450, 19462, 19506, 19599, 19651, 19908, 19982, 20021, 20071,
- Index des lieux et des personnages 20098, 20184, 20246, 20264, 20598, 20695, 20703, 20727, 20744, 20774, 20813, 20826, 20841, 20853, 20907, 20935, 20986, 21009, 21058, 21085, 21100, 21121, 21143, 21173, 21196, 21228, 21248, 21256, 21299, 21314, 21339, 21349, 21363, 21371, 21385, 21412, 21423, 21463,
20125, 20219, 20256, 20312, 20620, 20698, 20711, 20728, 20762, 20790, 20819, 20831, 20846, 20856, 20928, 20965, 20995, 21043, 21068, 21094, 21105, 21135, 21150, 21187, 21215, 21236, 21251, 21265, 21306, 21326, 21345, 21354, 21367, 21374, 21392, 21418, 21437, 21467,
20129, 20228, 20260, 20386, 20693, 20702, 20723, 20741, 20767, 20803, 20821, 20834, 20851, 20894, 20933, 20972, 20999, 21046, 21076, 21098, 21110, 21140, 21161, 21195, 21225, 21239, 21255, 21269, 21311, 21333, 21346, 21356, 21369, 21379, 21397, 21419, 21462, 21470,
299
21471, 21475, 21483, 21484, 21528, 21539, 21551, 21570, 21601, 21688, 21691, 21693, 21710, 21958 Englois d’oultre marine, 18934 Englois felons, 18378 Englois maleÿ, 20665 Engloys, 600, 635, 645, 842, 1025, 1066, 1137, 1172, 1437, 1606, 1718, 1866, 1940, 2029, 2306, 2675, 2800, 3460, 3655, 4071, 4092, 4149, 4256, 4267, 4300, 4313, 4316, 4357, 4369, 4395, 4489, 4551, 4563, 4589, 4611, 4642, 4685–4687, 4689, 4692, 4694, 4699, 4715, 4717, 4725, 4729, 4734, 4738, 4899, 4967, 4980, 5307, 5548, 5602, 5667, 5813, 5835, 5933, 5954, 5964, 5968, 5976, 6031, 6102, 6118, 6125, 7073, 7149, 7279, 7457, 7560, 7577, 7976, 8197, 10049, 10658, 10979, 10985, 11085, 11106, 11109, 11117, 11121, 11185, 11224, 11283, 11428, 11673, 11809, 11902, 11938, 11940, 11997, 12245, 12246, 13388, 16676, 16680, 16692, 16814, 17031, 17068, 17131, 17159, 17201, 17210, 17284, 17324, 17341,
300
- Index des lieux et des personnages -
17349, 17373, 17440, 17548, 17630, 17774, 18010, 18033, 18041, 18045, 18053, 18150, 18229, 18243, 18259, 18294, 18322, 18526, 18614, 18878, 19179, 19581, 20029, 20084, 20799, 21238 Engloyz, 4056, 8148 les fors Engloiz, 16685 Angolesme, voir Engolesme Angoresme, 9051 Angosme (Thomas d’–), 10443 angoulesmeAngoulesme, 9767 Anieres (le bastart d’–), 16568 le bastart, 16571 Anis (les fourests de l’–), 19569 Anjou (duc d’–), 10554, 12219, 12263, 12617, 13044, 13126, 13130, 13158, 13701, 13712, 13725, 13788, 13794, 13807, 13835, 13861, 13883, 13901, 13903, 13915, 13970, 16938, 21530, 21551, 21571, 21585 au bon duc d’Anjou, 12708, 12855, 21567 au conte, 17046 au duc qui d’Anjou est nommé, 13752 au noble duc, 21565 au riche duc d’Anjou, 21562 du bon conte, 17074, 17147 du duc, 13940
du noble duc d’Anjou, 17038 le bon conte, 17042 le bon duc, 17033, 21581 le bon duc ’Anjou, 13439 le bon duc ?, 12900 le bon duc d’Anjou, 12983, 12988, 17027, 20080 le droit conte, 17043 le duc, 12619, 12994, 13003, 13034, 13045, 13051, 13060, 13071, 13716, 13719, 13720, 13733, 13766, 13931, 13942, 17029, 21573 le duc honnouré, 13065 le noble duc d’Anjou, 12996 le riche duc d’Anjou, 21515 noble duc d’Anjou, 21664 sire d’Anjou, 13928 trés gentilz duc, 13916 Annequin (Godefroy d’–), voir Anequin Ansseïs, 19571 Ante : tante de Bertrant Dame, 272 la soue ante, 263 son ante, 265, 1453, 1737 son ante de pris, 313 une ante, 1736 une dame vaillent, 1453 une moult riche dame, 264 Anviller (Pierre d’–), 4857 Apostole, voir saint Pere Apostres (les –), 6863 Aquilee (Mahon d’–), 15570 Arbalestrier (un – qui estoit de Digon) : personnage qui va porter
- Index des lieux et des personnages des nouvelles des Français aux habitants d’Alroy assiégés, 5630, 5635, 5646 cestui arbalestrier qui tant estoit osé, 5654 l’arbalestrier, 5636 Arbalestriers (.xx. –) : arbalétiers qui accompagnent Bertrant lors de la prise de Pestien, 3159 Arbalestriers (cincq cens –) : arbalétriers français chargés de la défense de Rennes, 1851 arbalestriers (cinq cens –) : arbalétriers français assemblés pour la prise de Meulent, 3899, 3936, 3948, 3968 Arcala, 6929 Arcevesque (l’– de Toulecte), voir Toulectes (l’evesque de –) Archala, 6707, 11661 Archedeclin : aux nopces de saint Archedeclin, époux des noces de Cana, 3 Archeprestre (l’– de Normendie), 4033, 4064, 4095, 4207, 4214, 4381, 4480 Archeprestre (l’– de Rains), 4919 Archeprestre : Arnaud de Cervole, seigneur du Périgord dit l’Archiprestre., 4478 Archers (.vc . –) : archers
301
alignés par les Anglais pour la bataille de Nadres, 11353 Archevé (l’–), voir Toulectes (l’evesque de –) Archevesque (– de rains), voir Rains (archevesque de –) Archier : archers de l’armée anglaise, 1437 Archiers (– .ixc . ou .x) : archers qui accompagnent Robert Canoles à la bataille d’Alroy, 5348 Archiers (dix huyt –) : soldat de Carenlouet à Roche de Posay, 18494 les archiers, 18608 Arcusa, 21812 Aridon (Regnault d’–), 13908 Aristac (Faucon d’–), 11419 Arle (– le Blanc) : la ville d’Arles, 13738, 13804, 13944 Arminac, 10978 Arnoul (– d’Odrahan), voir Odrahan (le mareschal d’–) Arragon (roy d’–), 7678, 7693, 7704, 7752, 7783, 7810, 12689, 12690, 12693, 12696, 12710, 12717 au roy, 7042, 7761 du roy, 12692 le roy, 7009, 7039, 7765, 12640, 12684, 12702 le roy noble et ier, 6991 noble roy, 6994 noble roy souisant, 7800 Arragon, 6991, 7017, 7023, 7034, 7056, 7676, 7700,
302
- Index des lieux et des personnages -
7747, 7870, 7928, 8606, 9169, 9218, 10882, 11176, 11383, 12639, 12689, 12710, 12717, 12723, 19694 Aragon, le roiaume puissant, 7708 Arragonne (le conte d’–), 10834 Arragonne, 11525 Arragonnoys (un –) : personnage chargé de lire la lettre du roi Pietre au roi d’Arragon, 7043 Arragonnoys (un –) : personnage qui prend Henry pour un pellerin en Arragon, 12642, 12647, 12649, 12655, 12667, 12673, 12682 Arras, 3660 Arroy, 1997 un chastel grant et fort noblement ordonné, 1998 Arroy, voir Alroy Arton (Janequin –), 21007 Artus, 381, 10644, 10992, 21772, 21884 au roy Artus, 19509 le roy Artus, 13 le roy Artuz, 397 le trezor Artus, 8376 roy Artus, 824 Artuz (le roy), voir Artuz Artuz : soldat de l’armée de France, 14628 Ascension : (jour de) l’Ascension, 78
Au (conte d’–) : frère d’Henry de Trastamare, 13240 Auberoce (Garnier d’–), 11800 Aucerre (conte d’–), voir Aussoure Auciaux (– le Normant), 8195 Auçoyre (conte d’–), voir Aussoure Auçoyre (conte d’–) : frère d’Henry de Trastamare, 13238 Auçoyrre (conte d’–), voir Aussoure Auçoyrre : cri de guerre des Français, 4719 Audrahan (le marechal d’–), voir Odrahan (le marechal d’–) Audrehan : cri de guerre de la Blanche Compagnie, 8229 Audrohan (le marechal d’–), voir Odrahan Aunay (le viconte d’–), 19131, 20900, 21408 Ausseurre (conte d’–), voir Aussoure Aussoure (conte d’–), 3900, 3917 bon chevalier fu, 5984 Conte d’Auçoyre, 5979 le bon conte, 5972 le bon conte d’Asseurre, 4034 le bon conte d’Aucerre, 4094, 4321, 4645, 4775 le bon conte d’Ausseure, 4170, 4289 le bon conte d’Auçoyre, un
- Index des lieux et des personnages chevalier vaillent, 5064 le bon quenx d’Asseurre, 4063 le conte, 5970, 5976 le conte d’Auçoyre, 5597, 5939, 5959, 5968, 5981, 6308, 6434, 17338 le conte d’Auçoyrre, 5375, 5853 le quenx, 5975 un hardy chevalier et plain de son jouvent, 5854 Auvergne, 11, 19094, 21808 Avangon (cellui de –), 20922 Avignon (des cordeliers d’–), 6727 Avignon (le prevost d’–), voir Prevost Avignon (ou palays d’–), 7554 de son palays, 7602 en son palays pavé, 7611 Avignon, 1966, 6727, 7332, 7418, 7547, 7638, 7650, 12616, 12750, 12854, 12982, 12986, 13125, 19442 Avignon, une cité jolye, 7424 Avignons, 7236 la cité d’Avignon, 7586 Aymar (– de Poictiers), voir Poictiers Aymeri, 18842 Aymeris, 18891 un escuier de pris, 18898 Aymerion, voir Pommiers (le sire de –) Aymon (les quatres filz –), 10641 Ayraut (un gentilz –) : messager envoyé par Olivier à Bertrant, 20912, 20920
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ce heraut, 20942 le heraut, 20943 ayraut (un gentilz –) : messager envoyé par les Français à la Rochelle, 20330 Babiloine, 11662 Babilonois, 15217 Baines (le bastard de –), 13231 Baionnois, 19637 Barimel (Gieffroy de –), 20907 Barriere : soldat français combattant à Bonnom, 20760 Bascon (– de Marueil), voir Mareuil (baron de –) Basin, 17559 Baveux (Guillaume le –), voir Baveuz (Guillaume le –) Baveux (Guis le –), voir Baveuz (Guillaume le –) Baveuz (Guillaume le –), 4835 Guillaume le baveux, 18269 Guis le Baveux, 20909 Bavier (les sains de –), 17770 Beaugien (Louys de –), 5393 Beaugien (Phelippe de –), 5392 Beaugien (Phillippes de –), 5873 cellui de Beaugien ?, 7377 le seigneur de Beaugien ?, 8194 le sires de Beaugien ?, 9814 Beaumanoir (Robert de –),
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- Index des lieux et des personnages -
14209, 18292 Beaumanoir (Jehan de –), 2748 Beaumanoir, 6153, 6160, 6166 cellui de Beaumanoir, 6235 cellui de Beaumanoir, a la chiere membree ?, 6058 cellui de beaumanoir, un chevalier puissant ?, 5378 Beaumon (Alain de –), 16928, 16947 Alain de Beaumont, 17123 Beaumon (Jehan de –), 16929, 16947 Jehan de Beaumont, 17124 Beaumont (ceulx de –), 15183 Beaumont (Alain de – le jeune), 20963, 21018 Beaumont (Alain de –), 17606, 18267, 18440, 19168, 20898, 21209, 21402 Alain cellui de Beaumon, 20962 Alain cellui de Beaumont, 21487 cousin germain Bertrant, 18168 de Beaumont le sire Alain, 17931 Beaumont (Jehan de –), 17607, 17932, 18121, 20899, 21213, 21410 Jehan le faitis ?, 19168 Beaumont (Olivier de –), 17149 Beaumont (viconte de –), 4065, 5068 cellui de Beaumont, 4128 le viconte, 4119 le viscoins de Beaumont, 4086,
4171, 4290, 4609, 4668 un chevalier courtoys, 4065 Beaumont : cri de guerre, 4578, 4644, 4719 Beau Voysin, 3655 Bediers, 12969, 12985 Begus, voir Villaines (Besque de –) Belgebus, 9166 Bel Marin (le roy de –), 6708, 14333, 14336, 14451, 14584, 14588, 15198, 15403, 15620, 15944, 16144 a roy de Bel Marine, 9009 au fort roy, 15522, 15567 au fort roy de Bel Marin nommé, 15815 au roy de Bel Marin, 15313 au roy qui est vaillant, 14521 le roy, 15235, 15238, 15457 le roy de Bel Marin, 15227 le roy de Bel Marine, 14507, 15212, 15269, 15308 sire de Bel Marin, 15203 Bel Marin, voir Bel Morine Bel Marine (roy de –), voir Bel Marin (roy de –) Bel Morine, 6605, 9226 Bel Marin, 14331, 14406, 14501, 14510, 15148, 15152, 15172, 15184, 15188, 15297, 15402, 15456, 15522 Bel Marin l’antie, 15944 Bel Marin la lee, 15567 Bel Marin le noble tenement, 15852 Bel Marine, 9501, 9835, 9973,
- Index des lieux et des personnages 13265, 14504, 14521, 14719, 15212, 15233, 15269 Benois (saint –), voir Benoit (saint –) Benoist (saint –), voir Benoit (saint –) Benoit (saint –), 255 saint Benois, 18108 saint Benoist, 20834 Berducas de l’Abret, voir l’Abret Berendart (– de Jency), voir Jency (Berendart de –) Bergerac, 21553–21555, 21558 Berguectes (monseigneur de –), 16896 le ber, 16899 le chevalier, 16903, 16943 le chevalier de nom, 16944 sire de Berguectes, 16901 Bernardiere (la –), 21527, 21540 Berry (duc de –), 13439, 19133, 19494, 19507, 19644, 19958, 20007, 20438, 20592, 20608, 20614, 21665 au bon duc, 19143, 19820, 19878, 19880 au bon duc de Berry, 19799, 19885 au fort du de Berry, 20632, 20659 Berry ?, 20513 de Berry le bon duc, 20474 du bon duc, 19876 du bon duc de Berry, 20045,
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20081 du riche duc cremu, 19745 le bon duc, 19134 le bon duc de Berry, 19086, 19126, 19486, 19531, 19622, 19652, 19775, 20212, 20512, 20530 le bon duc de Berry au gent corps esleu, 19736 le bon duc de Bery, 20308, 20328 le duc, 19466, 19803, 19809, 19813, 19893, 19918, 20594 le duc de Berry au chief blon, 20156 le duc de Berry au cler vis, 19176 le riche duc, 19136 lz duc, 19495 Berry, 19142 (Berry la duché), 19138 Berry le noble païs, 19174 Berry le païs alosé, 19152 Bertaigne (duc de –), 21489, 21495 du fort duc, 21509 le duc, 21501 Bertaigne, voir Bretaigne la duché, 5754 la duché qui est cause de ce debatant, 5520 Bertaigne (Dieu de –), 960 Bertant, voir Bertrant du Guesclin Berton (un –) : personnage capturé par les Français, 21097
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- Index des lieux et des personnages -
le Berton sappient, 21107 Bertons, 21948 Bertons : Bretons, 1042, 1066 Breton, 1054 Bertons : les Bretons, 607, 1172, 6347, 14487, 17929, 19141, 21430 Berton, 20674, 20786 Bertons bertonnans, 412, 2110 Bertons bertonnant, 2714 Bertons encretéz, 2140 bon Breton, 18499 Breton, 1436, 7070 Bretons, 7291, 7560, 7976, 8148, 11611, 19207, 19381 les Bretons, 19026, 19377 Beruiers, 19380 Berruiers, 19466 Beruier, 19383 Bervesque, 7900, 7904, 8378, 8455, 8470, 12118 Bervesques, 8091, 8300, 8320 Bervesque, 8098, 8132, 8157 la vostre ville, 8311 Berry : cri de guerre de l’armée française, 19336 Bescherel, 2713, 2717, 2728, 2746, 2770, 2780 Besgue (– de Villennes), voir Villaines (Besque de –) Besgues (– de Villaines), voir Villaines Besques (– de Villaines), voir Villaines Bestien, voir Pestiens Bethleem (le moustier de –), 15365 Bethleem, 15365
Betune (le moyne de –), 5389, 6169 Beuf (Castal de –), voir Castal Bierne (le Burs de –), 13790 Billon (Godeffroy de –), 9837, voir Godefroy Blaines (Richier de –), 11801 Blanc (Arle le –), voir Arle (– le Blanc) Blanche (la reigne –), 3495 la reyne Blanche, 3639 une dame gentilz, 3495 Blanche Compaignie, voir Compaignie (Grande –) Blois (conte de –), 19088 Blois : ville de Blois, 19082, 19180 Bloiz (Charles de –), 577, 838, 1031, 1625, 2112, 2725, 5077, 5318, 5327, 5332, 5384, 5421, 5437, 5468, 5475, 5515, 5525, 5552, 5578, 5610, 5621, 5625, 5631, 5645, 5664, 5705, 5713, 5722, 5726, 5734, 5797, 5851, 5863, 5908, 5943, 6009, 6021, 6027, 6038, 6047, 6164, 6174, 6198, 6201, 6218, 6221, 6272, 6281, 6287 cellui que on dit de Bloiz, dont l’ame est saintie, 3406 Charles, 629, 832, 1024, 2095, 2705, 3057, 3405, 5404, 5450, 5463, 5487, 5502, 5861, 6012, 6040, 6043, 6054, 6066, 6099, 6207, 6212, 6258, 6277, 6284, 6293, 6298, 6303, 6388,
- Index des lieux et des personnages 6390, 6395 Charles au fer jouvent, 2044 Charles de Bloy, 846, 1260, 1320, 2000, 2011, 2019, 2079, 2780 Charles de Bloys, 632, 710, 1043, 1158, 1966, 2083, 2704, 2716, 2733, 6051 Charles le baron, 5634, 6401 Charles le sien cousin, 6313 Charles leur seigneur, 2134 Charles qui saint est appellé, 5907 Charlon, 864, 1241, 2081, 2093, 2759, 2764, 2765, 2767, 3006, 5365, 5368, 5399, 5417, 5901, 5963, 6053, 6060 Charlon de Bloiz, 2647, 2998, 5983 Charlon de Bloy, 2758 Charlon qui de Bloiz fu nommé, 6409 Charlon, cellui que on dit de Bloy, 2604 Charlon, le noble princer, 6033 du duc, 2798 duc Charles de Bloys, 639 duc de Bretaigne, 5480 le bers chevalier ?, 6105 le bon Charles de Bloyz, 625 le duc, 2005, 2663, 2689 le duc Charles de Bloiz, 5080, 5608 le duc Charlon de Bloy, 2773 le duc de Bretaigne que l’on va Charles nommant, 5510 le duc des Normans ?, 2044
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le faulcon de tout honneur passer, 5571 le noble pasteïz, 1241 le plus proudons qui fust ou siecle vifz, 6223 le prince seignoris, 5713 le saint, 6405 le seigneur qui est mon advohé, 1622 mon cousin, 6320 mon dit seigneur, 1653 mon seigneur reverent, 710 plus gentilz homs estez deça et dela la mer, 5574 votre cousin Charles, 3585 Bloy, voir Bloiz Boistel (Guillaume –), voir Boytel Bonnim (Monterueil –), voir Monterueil Bonnivent, 20724 Bonnom (chastel de –), 20596, 20600, 20750, 20757 Bonnom, 20663 Bonnom,...le chastel seignory, 20619 Bonnon, 20673 ce chastel, 20620 du chastel seignory, 20654 le chastel gentilz, 20624 Bonnon, voir Bonnom (chastel de –) Boquillons : troupe menée par Bertrant et déguisée en bûcherons pour prendre Forgeray, 924 Bordeaux, voir Bourdeaux
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- Index des lieux et des personnages -
Bordes (Guillaume des –), 20905, 21406 Borneuf, 20307 Bourneuf, 20327, 20373 Borru, 20295, 20296 Bouchier (Pierre –), 18740, 18927 Boulenoys, 16677 Bourbon (– la peuplee), 18450 Bourbon (duc d’–), 13441 le bon duc de Bourbon, 13455 Bourbon (duc de –), 18450, 19127, 19177, 19487, 19622, 19645, 19653, 20008, 20083, 20213, 20310, 20512, 20533, 20615, 20868 du bon duc de Bourbon, 18474 duc de Bourbon, gentilz prince excellent, 21667 le bon duc, 18455 le bon duc de Bourbon, 19194, 20157, 20328 le bon duc de Bourbon a la brace quarree, 20476 le duc, 19197 le duc ?, 20877 le fort duc ?, 20880 le noble duc a qui bourbon apent, 20227 Bourbon (la dame de –), 20859, 20864 Bourbon (le duc de –), 4924, 6377, 6533, 6659, 7064 mon frere de Bourbon, 6865 Bourbon, 20046 Bourbon : dynastie des Bourbons,
6845, 7807 Bourbonnois (– le païs), 19654 Bourdeaux (le senechal de –), 11413, 11766 Bourdeaux (le seneschal de–), 11796, 13392 au seneschal, 14164 le seneschal, 14172, 14174, 14185 Bourdeaux, 2031, 2062, 5971, 6470, 8884, 8904, 9740, 9766, 9787, 9873, 10169, 10384, 10396, 10663, 10678, 10742, 10827, 11392, 12354, 12540, 12556, 12665, 12729, 12743, 12967, 13589, 13968, 13994, 14001, 14035, 14089, 14144, 14149, 14155, 14218, 18333 Bordeaux, 10400, 13512, 13620, 13646, 13649, 13672, 21570 Bordeaux la cité, 13574, 13682, 14153 Bourdeaux la cité, 12751, 14116 Bourdeaux la garnie, 13392 la cité qui sur mer est bastie, 14279 Bourdelaines (Briquet le –), voir Briquet Bourdelois, 19637, 20977 Bourdeloys, 4054, 10672, 11001 Bourgeoys : personnage qui accepte de jouer un tour aux Anglais pour sauver
- Index des lieux et des personnages Rennes, 1247, 1251, 1276, 1281, 1288, 1307, 1313 du bourjois, 1345 Fausse espie, 1354 le bourjois, 1353, 1357, 1358, 1362, 1366 le villain, 1486 Bourges (Lÿon de –), 8576, 8730 a Lÿon, 8653 Bourges (le bon duc de –), 10642 Bourges, 7876, 7881, 7897, 8016, 8044, 8051, 19652 Bourges en Espaigne, 7877, 8689, 12568, 12712, 13139, 14749 la ville et la conté, 8087 Bourgoigne (duc d’–), 13440 Bourgoigne (duc de –), 20082, 20309, 20475, 20513, 20614, 20633, 21666 de Bourgoigne aussi le bon duc reverent, 19087 le duc du pais Bourgoignon, 20532 le noble duc de Bourgoigne tenant, 20268 Bourgoigne, 5874 Bourgoigne l’antie, 5394 Bourgoignon, 11161 Bourgois : habitants de Rennes, 1448 Bourgoises : habitantes de Rennes, 1449 Bourguignons, 19639, 20786 Bourgoignon, 20793 lé ber Bourgoignon, 20774
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Bourguignons, 19380 Bourjois (.ii. –) : personnages chargés de transmettre au roi Pietre un pot de vin à Bertrant pour quitter l’Espagne, 9247 les bourjois, 9262 Bourjois (.ii. –) : personnages chargés de transmettre au roi Pietre un pot-de-vin à Bertrant pour quitter l’Espagne, 9193 Bourjois (.ii. –) : personnages chargés de transmettre un pot-de-vin à Bertrant pour quitter l’Espagne, 9197 les bourjois, 9202, 9203, 9211 les bourjois naturéz, 9195 Bourjois (.x. –) : habitants de Tolède qui vont vériier si Pietre est bien mort, 16830 Bourjois (.xx. –) : personnages qui escortent Pietres jusqu’à Bel-Marin, 9513, 9535, 9644 les bourjois, 9576 Bourjois (– de Tarascon), 13759 Bourjois (– de Tarascon), 13822 Bourjois (huit –) : habitants de Burs qui représentent chacun une porte de la ville, 8678 .viii. sergent, 8678 Bourjois (l’autre des –) un des habitants de Bervesques qui apprend au roi Pietre la
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- Index des lieux et des personnages -
réddition de la ville, 8325 Bourjois (l’un des –) un des habitants de Bervesques qui apprend au roi Pietre la réddition de la ville, 8301 Bourjois (les –) habitants de Bervesques qui apprennent au roi Pietre la réddition de la ville, 8289, 8297 ses .ii., 8365 Bourjois (les riches –) : habitants de Rennes qui cachent leurs vivres lors du siège, 1341 Bourjois (quatre –) : personnages qui accompagnent l’évêque de Tolède pour remmettre les clés de la ville au roi Henry, 9102 Bourjois (quatre –) : personnages qui accompagnent la sentinelle de Mante pendant sa sortie, 3757 aux bourjois, 3793 les bourjois, 3767 Bourjois (quatre –) : personnages venant négocier la reddition de Tarascon avec le duc d’Anjou, 13900, 13913 Bourjois (un – de Guimgamp) : personnage qui meurt sous les coups du châtelain lors de l’assaut de Pestiens, 3192 Bourjois (un – de vielle
ancesserie) : bourjois de Poitiers, 19989 le bourjois a la brace fournie, 19991 Bourjois (un –) : habitant de la Rochelle qui demande un don au duc de Berry, 20591, 20595 Bourjois (un –) : habitant de la Rochelle, 20352, 20354, 20368, 20407, 20415, 20417 Bourjois (un –) : personnage qui va aider Henry à reprendre Tolède, 14425, 14434, 14449, 14460 Bourjois (un –) personnage habitant de Burs qui met en garde le roi Pietre à Burs, 8414, 8435 l’Espaignol, 8441 mon viguier, 8439 Bourjois (un des plus sages –) : personnage venant négocier la reddition de Tarascon avec le duc d’Anjou, 13914 Bourjois : habitants de Dinant venus assister au combat entre Bertrant et Thomas, 2310, 2486 les bourjois seignoris, 2361 Bourjois : habitants de Dinant, 2594 Bourjois : habitants de Guimgamp, 2928, 2962, 2982, 2990, 3014, 3221 a ceulx de Guimgamp, 6304
- Index des lieux et des personnages au gentilz de Guimgamp, 6273 aux assaillans loiaux, 3109 bonnes gens, 3110 celles gens bateléz, 3133 celles gens de Guimgamp, 3119 ces bourjois aloséz, 3141 ces vilains, 3152 ces vilains lardéz, 3148 ces villains, 3073 ces villains malfaiz, 3146 ceulx de Guimgamp, 3381 les bourjois de Guimgamp, 3011 les gentilz bourjois, 3219 Bourjois : habitants de Mante, 3841 les riches bourjois, 3852 Bourjoises (les – de Burs) : habitantes de Burs qui rendent hommage au roi Henry, 8683, 8827 les bourjoises de pris, 8830 Bourjoises : femmes présentes au tournoi de Dinant, 2310, 2486 Bourjoises : femmes présentes au tournoi de Rennes bourjoises souisans, 331 nobles bourjoises blanches comme lour de lis, 330 Bourjoises : habitantes de Dinant, 2593 Bourneuf, voir Borneuf Bournonville (Robert de –), 4615 cellui de Bournonville, 4621 Bournonville (Thierry de –), 4100 Bouteiller : sommeliers
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ataquant Bertrant lors de la prise de Forgeray, 951, 973 Bouterel (Henry –), 18492 Bouvines, 547 Boys (Jehan du –), 18257 le bon baneret, 18260 le noble baneret, 18264 ung banieré, 18256 Boys (grans –) : forêt près d’Alroy, 5737 Boys : bois aux alentours de Forgeray, 637, 815, 841, 1085 le boys ramé, 843 Boys : bois aux alentours de Rennes, 1068 les boys raméz, 1072 Boys : bois près de Cocherel, voir aussi ramee, 4262 Boytel (Guillaume –), 4777, 5066, 5386, 5867, 5955, 7991, 8493, 10835, 11040, 11528, 11741, 16126, 16208, 16563, 18438 Guillaume, 4978 Guillaume Boistel, 4974 Guillaume Boitel, 16242 Boyteux (le tort –), voir Tort Brai, voir Bray Braibençons : habitants du Brabant, 545 Brebançon, 2621 Bramborc (Guillaume –) : chevalier anglais, parent de Robert de Branborc, qui combat Bertrand pour la ville de Rennes, 1659 au chevalier, 1672, 1683, 1761
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- Index des lieux et des personnages -
beau sire, 1674 le chevalier, 1748, 1769, 1781, 1787 le chevaliers, 1757 Bramborc (Mencïon de –), voir Brambort Brambort (Mancïon de –), 4409 Mencïon de Bramborc, 4429 un breton afaitié, 4409 Branborc (Robert –), 829, 847, 1023 .i. chevalier angloiz qui grant renon ot ja, 827 Branborc, 1015 Branbort, 1018 capitaine (de Forgeray), 828 Robert Branbort, 1016 Robert de Brambort, 1660 Robert de Branborc, 835 Branbort, voir Branborc Bray (Jacques de –), 13792 Jacques de Brai, 13909 Brayne (le conte de –), 17299 Breban (le duc de –), 4921 Brebençon, voir Braibençons Breines (Jehan de –), voir Brenes (Jehan de –) Brenes (Jehan de –), 7139, 8147, 8200, 8771, 9635, 10189, 11364, 11869, 12020, 13116, 21022, 21027, 21117 Jehan, 21134 Jehan de Breine, 21041 Jehan de Brene, 21441 Bressiere, 18090, 18210, 18216, 18219, 18242
Bressieres, 18214, 18229 Brest, 2113, 2639 Bretaigne, 49, 284, 3431, 3584, 5338, 5402, 5451, 5483, 13666 Bertaigne, 356, 570, 584, 593, 597, 605, 613, 623, 1040, 1627, 2009, 2016, 2024, 2078, 2601, 2632, 2708, 2710, 2728, 2747, 4434, 5513, 6010, 6041, 6199, 6316, 6336, 6343, 6382, 6385, 6389, 6421, 8357, 10090, 12826, 13964, 14002, 14177, 14206, 15183, 15876, 18117, 20876, 21409, 21489, 21494, 21500, 21505, 21806, 21868 Bertaigne basty, 20904 Bertaigne bertonnant, 14213 Bertaigne celle noble duché, 12784 Bertaigne galot, 824 Bertaigne la grant, 574, 14145 Bertaigne la lee, 17590 Bretaigne la garnie, 5418 Bretaigne la lee, 5322 celle noble duché, 12784 de Bertaigne petite, 6730 du païs berton, 6384 la duché de Bertaigne, 2021, 5601, 20085 la duché de Bretaigne qui tant est souisant, 5356 la noble duché, 6418 la petite Bertaigne : partie de la Bretagne qui se situe sur le
- Index des lieux et des personnages continent, par oposition à la Grande Bretagne qui désigne l’île, 3268 ou païs de Bertaigne, 633 Bretaigne : cri de guerre du camp de Monfort, 5900 Bretaigne (chevaliers de –), 2644 Bretaigne (seigneur de –) : icellui qui de Bretaigne est seigneur, prince et duc, 400 Bretons (un – bretonnant) : personnage qui plante le pennon de la Blanche Compagnie sur les crénaux de Bervesque, 8221 Bretueil, 3444 Breves (Jehan de –) messire Jehan de Breves le vaillant, 21002 Briquet (– le Bourdelaines), 8201 Briquet : chevalier anglais faisant parti des grandes compagnies, 7135 Bron (Guillaume –), 5387, 5868 Bron (la tour de –), 20861 la grosse tour, 20867 la tour, 20862 Brut (livre de –), 3263, 6723, 6728 Brye (Antoyne de –), 14288 Buc (Castal de –), voir Castal Buef (Castal de –), voir Castal Buel (Jehan de –), 18436 Buel (– la muree), 18436 Bureau (– de la Riviere), voir
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Riviere (Bureau de la –) Burs (l’evesque de –), 8510, 8530, 8551, 8582, 8593, 8645, 8843, 12269 l’evesque, 8513, 8514, 8536, 8724–8726, 12272, 12274 l’evesque de la ville, 8673 l’evesque vallent, 8669 Burs (le – de Bierne), voir Bierne (le Burs de –) Burs, 6644, 6908, 7845, 7857, 7867, 7905, 8291, 8293, 8392, 8410, 8429, 8445, 8454, 8464, 8466, 8469, 8472, 8498, 8500, 8501, 8503, 8632, 8642, 8664, 8671, 8682, 8683, 8733, 8735, 8736, 8774, 8827, 8843, 8871, 8874, 8880, 8912, 9112, 9181, 9675, 9729, 10697, 10881, 12115, 12127, 12136, 12149, 12184, 12266, 12404, 12408, 12563, 15244 Burs la muree, 11825 celle cité de Burs, 12273 la cité, 8826, 12116 la cité jolie, 12377 vostre roial ville ou vous fustez sacré, 8416 Caien (Jehan de –), 4624 Calais, 16678 Calerant, voir Frere Calon (Loys de –), 5391 Calvaire (mont –), voir Cauvayre (mont –) Cambray (Petit –), 13774
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- Index des lieux et des personnages -
Petit de Cambray, 13906 Canoles (Robert –), 1056, 2218, 2558, 5842, 16681 Canole, 3331, 6032, 17282 Canole, gentilz homs, 5687 Canoles, 6247 canoles aussi, un chevalier hardy, 5347 Canolle, 17703 chevalier suisant : Robert estez clamé, 5686 Robert c’on dit Canole, 18284 Robert Canole, 2414, 2446, 2742, 5076, 5595, 5681, 5703, 5773, 5965 Robert Canolles, 5993 Robert que on dit Canoles, 2412 Robin Canole, 6109, 6309, 16729, 17192 Robin Canolle, 6097, 17176 Canolles (Robert –), voir Canoles Cantorbie, voir (Thomas de –) Capitaine de Forgeray, voir Branborc Capitiane (– de Sainte Severe), voir Gilles (Richart –) Cappitaine (– d’Ordalnay ?) la cappitaine, 18306 Cappitaine (– de Bervesques), 8272, 8275 Cappitaine (– de Bonnom), voir David Cappitaine (– de Bourges), 8023, 8024, 8028 le chastellain, 8038 Vassal, 8025
Cappitaine (– de Bressiere) au cappitaine, 18249 le fort cappitaine, 18220 Cappitaine (– de Chateau Neuf de Randon) au cappitaine de nom, 21608 du cappitaine, 21640, 21676 le cappitaine, 21613 Cappitaine (– de Chauvigny) le cappitaine, 19794, 19805, 19808 Cappitaine (– de Chisec), voir Miton (Robert –) au cappitaine in, 20983 Cappitaine (– de Civray), voir Jaconnelle Cappitaine (– de Dinant), 2394 du bon cappitaine de Dinant, 2435 le cappitaine, 2592 le cappitaine louhé, 2547 Cappitaine (– de Mangulon), 7951 Cappitaine (– de Moncel), 16253, 16259, 16331, 16332, 16338 Cappitaine (– de Montesclaire), 14729 le chastellain ?, 14739 Cappitaine (– de Mortain), 21006 Cappitaine (– de Pierregort), 17084, 17085, 17090, 17093, 17094, 17097, 17104, 17138 Cappitaine (– de Poitiers)
- Index des lieux et des personnages le cappitaine du bon chastel fermé, 20010 Cappitaine (– de Quen) ?, 17715 Cappitaine (– de Saint Maixent), voir Ancel Cappitaine (– de Toulecte), 16759, 16774 le bon cappitaine, 16846 le cappitaine desrué, 16769 le faulx cappitaine, 16787 Cappitaine (– de Vaulx) le cappitaine, 18098, 18125 Cappitaine (– du .iiiie . chastel de Chauvigny) au cappitaine, 19866 le bers senné, 19828 le cappitaine, 19826, 19858, 19867 le portier, 19882 Cappitaine (la – de Tarascon), 13750 le cappitaine, 13824, 13866, 13896 Cappitaine (le – d’Anglé), 19731 cappitaine, 19749 Cappitaines (troys–) : capitaines des châteaux situés dans l’enceinte de Chauvigny, 19782 Cardinal (un –) : interlocuteur de Bertrant lors de sa venue à Avignon, 7431, 7440, 7450, 7460, 7473, 7474, 7516, 7533, 7540, 7546, 7552, 7554, 7582, 7591
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au cardinal qui fu bon clerc lisant, 7489 Carelay (Huon de –), 5237, 5266, 6002 Caurelay, 7186, 8163 cellui de Caurelay, Huon brasse quarree, 9773 de Caurelay Huon, 13390 Hue, 12505 Hue de Caurelay, 10182, 11359, 12017, 12448, 13446, 13654, 17702, 17745 Hue de Caurelay, le gentils et le ber, 11870 Huet de Carualay, 5910 Huet de Caurelay, 8144, 8487, 8769 Huet de Cayrelay, 8281 Huon de Carualay, 5302, 5306, 5923, 6063 Huon de Caurelay, 6110, 7130, 7149, 7181, 7196, 7272, 7293, 7309, 7464, 7978, 8212, 8259, 8968, 9208, 9605, 9633, 9813, 9885, 10216, 10292, 10441, 10701, 10726, 10805, 11244, 11719, 12493, 13076, 14236 le chevalier, 7289 le vassal, 7290 un Enlgoiz d’Engleterre, 5236 Yvon de Caurelay, 10764, 17775 Carenlouet, 7371, 14665, 14862, 14867, 14870, 14876, 14894, 14904, 14909, 14983, 18646, 18744, 18766, 18781,
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- Index des lieux et des personnages 18798, 18800, 18805, 18825, 18826, 18911, 18914, 18917, 18939, 18940, 18948, 18956, 18962, 18972, 19080 ber Karenlouet, 18502, 18510 cappitaine (– de Roche de Posay), 18489 Carenlouet, 18573, 18601, 18612 Carenlouet le ber a la chiere hardie, 16130 Carenlouet le ier, 6136 Carenlouet, un chevalier sachans, 8192 Carnelouet au cuer d’empererour, 19073 du ber Carenlouet, 18515 Karenloet, 5383 Karenlouet, 14294, 14629, 14672, 14873, 16207, 18487, 18565, 18584, 18594, 18619, 18632, 18836 Karenlouet le ber, 18837 Karenlouet, un escuier puissant, 14660 le ber, 18589 le ber Carenlouet, 18522, 18812 le ber Karenlouet, 18268, 18587 le ber marchis, 18915 le bers Carenlouet, 4035, 4096, 8143, 9604, 10215, 18597, 18791, 18922, 18968, 21482 le bers Carenlouet a l’aduré talent, 5857 le bers Carenlouet qui moult
ama ranson, 5960 le bon Carenlouet, 4647 un hardi escuier, 14630 un homme de grant sen et de noble lieu né, 18817 Carenlouet : cri de guerre de l’armée de Carenlouet, 18707 Carualay (Huon de –), voir Carelay Castal (– de Buc), 3646 au Castal, 4278, 4309, 4391, 11674, 11682, 11700 au Castal de Beuf, 4566, 20624 Beau cousin, 11380 bon chevalier fu et maistre de l’espee, 4599 Castal, 4496, 4689, 4740, 4760, 4772, 4785, 11402, 12066 Castal de Beuf, 4539 Castal de Buef, 4898 ce Castal, 4658 chevalier estoit de haulte auctorité, 4849 cousin, 12066 du Castal, 4241, 4243, 11421, 11686, 19561, 20687 du Castal de Beuf, 4534, 19542 homme de grant vaillance, 4602 le Castal, 2057, 4078, 4194, 4271, 4317, 4337, 4338, 4354, 4393, 4399, 4404, 4456, 4459, 4489, 4492, 4501, 4502, 4504, 4506, 4542, 4598, 4602, 4652, 4743, 4748, 4809, 4829, 4847, 4881, 6450, 6453, 10675, 11274, 11379,
- Index des lieux et des personnages 11396, 11411, 11690, 11734, 12065, 12068, 18446, 19237, 19550, 19566, 19580, 19611, 19635, 19687, 20258, 20263, 20644, 20694 le Castal de Beuf, 4039, 4154, 4513, 4859, 10914, 11243, 12092, 12447, 18313 le Castal de Buef, 18425 le Castal soubtilz, 12106 le Castal, le chevalier isnel, 20252 le chevalier isnel, 20252 le noble Castal, 4254 Castre (la dame de –), 6585 Caurelay (Huon de –), voir Carelay Caurelay : cri de guerre de la Blanche Compagnie, 8228 Cauvayre (ou mont –), 12299 le mont de Calvaire ou il a maint degré, 15368 le mont de Cauvaire, 12350 Cecot (Robin –), voir Secot (Robert –) Cent : personnages qui accompagnent Bertrant pour la prise de la ville du Pont de Douve, 5285 Cent et dix : traitres français pendus après la bataille de Sainte-Severe, 19524 Cesar, 21771 Cezaron, 21883 Cezaron, voir Cesar Chaalon, 19642 Chalon (Loÿs de –), 5872
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Chalon sur le Sone, 7117, 7417 Chambellain (un sien –) : subordonné d’Yvon de Lannoy, 18770 Chambellain : majordome de Bertrant lors de son séjour en prison, 13339, 13347 Chambriere : domestique de la reine d’Espagne, 6849 Chambriere : personnage chargé de nourrir Bertrant lors de son séjour en prison étnt enfant, 241, 243 Champaigne, 21810 Champions (les deux –) : Thomas et Bertrant qui combattent devant Dinant, 2471 les champions, 2485, 2488 Chando (Jehan de –), 1058, 2216, 2230, 2235, 2257, 2301, 2432, 2738, 5346, 5585, 5826, 5922, 5998, 6032, 6098, 6114, 6128, 6152, 6230, 6245, 6263, 6264, 6306, 6431, 10410, 10455, 10667, 10916, 11242, 11273, 11443, 11743, 11750, 11761, 12446, 13565, 14235, 18909 .i. chevalier louhé, 13379 .i. homme de grant renon, 2637 Chando, 5841, 6138, 6145, 6148, 6179, 6232, 7372, 10430, 10435, 10449, 10564, 11429, 11430,
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- Index des lieux et des personnages -
11453, 11454, 11572, 11723, 11724, 11746, 11990, 13075, 13379, 13568, 13621, 14295, 18479, 18495, 18508, 18517, 18529, 18534, 18537, 18540, 18552, 18559, 18596, 18611, 18622, 18624, 18631, 18657, 18659, 18663, 18676, 18713, 18715, 18727, 18729, 18737, 18746, 18751, 18753, 18758, 18774, 18835, 18845, 18865, 18870, 18889, 18895, 18896, 18898, 18921 Chando le chevalier louhé, 11510 Chando le combatant, 18576 Chando le gentilz, 10464, 10467 Chando qui tant fu bien apris, 10471 Jehan, 6213 Jehan Chando, 5075, 5455, 5911 Jehan le baron que l’on appeloit Chando, 2637 le ber, 18910 le ber Chando, 18851 le bers Chando, 18872 le chevalier louhé, 11510 mon frere, 18864 un chevalier doubté, 7372 Chando (le heraut –), 11514 le heraut, 11520, 11523, 11531, 11550, 11553, 11556, 11559, 11570, 11575,
11576 Chappellain (un –) : interlocuteur du cardinal lors de la venue de Bertrant à Avignon, 7442 Charenton, 5001, 5224 très bonne fermecté, 5225 Charlemaine (– le grant), 10641 Charlemayne, 10843 Charlemaine, 10992 Charles, 12395, 21772, 21884 Charlon, 11390 Charles (– de Dinant), voir Dinant Charles (– duc de Bretaigne), voir Bloiz (Charles de –) Charles (–) de Dynant, voir Dynant Charles de Valloys : père de Philippe et de sa sœur la comtesse du Haynaut, 554 Charles V au bon roy, 4942, 11994, 16941, 17355 au bon roy de France, 16851, 20801, 21726 au bon roy de France le vaillant, 16865 au bon roy qui France doit garder, 20390 au bon roy qui France gouvernoit, 20321 au duc, 3492, 3497, 3500, 3633, 3640 au duc de Normendie, 3859 au duc ou Normendie appent,
- Index des lieux et des personnages 3844 au duc qui Charles ot non ?, 3645 au duc qui tant est seignoriz, 3709 au duc qui tant fait a louer, 3972 au jeune roy, 4151, 4254 au noble roy, 17154 au noble roy Charlon, 20385 au noble roy de France, 6310 au noble roy de pris, 6453 au riche roy Charlon, 18182, 21609 au riche roy de France, 6425 au riche roy des Frans, 7318 au riche roy françour, 20804 au riche roy vaillant, 20878 au roy, 4870, 6440, 7342, 17309, 17525, 17529, 17583, 17639, 18186, 18359, 18412, 18419, 20087, 20542 au roy ?, 20357 au roy Charles, 6494, 9722 au roy de Françoys, 4842 au roy de Montlaon ?, 16718 au roy de Saint Denis, 13862, 17857 au roy de Saint Denyse, 18006 au roy qui les Françoys maistrie, 4922 Charles de France couronné, 6415 Charles le bon le roy, 21753 Charles le bon roy de France, 16887 Charles, le ilz du roy, duc du
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païs normant, 3475 Charlez le roy, 4891 Charlon, 2034, 6381, 12166 du bon roy, 20811 du bon roy Charlon, 17187 du duc ?, 3681 du duc qui devoit estre roys, 4057 du fort roy Charlon, 6468 du noble roy, 4858 du noble roy Charlon, 16712 du noble roy de France, 7360, 10854, 18390 du roy, 4147, 4912, 7234, 17290, 17573, 18368, 18376, 19875 du roy ?, 20361 du roy a qui doulce France appent, 13836 du roy Charlon, 19708, 20178 du roy de France, 6496, 7481, 10553, 18409, 21514 duc de Normendie, 2035, 2909 gentilz roy, 17530 le bon roy, 21741, 21743 le bon roy Charlon, 6866, 17204 le bon roy de France, 13437, 16351, 16658, 20079 le bon roy de France et de Laon, 16914 le bon roy gentilz, 17427 le duc, 2939, 3488, 3543, 3559, 3580, 3581, 3586, 3588, 3621, 3638, 3642, 4060 le duc de Normendie, 3482, 3513, 3620, 3657, 4066, 4143 le duc normant ?, 5082
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- Index des lieux et des personnages le le le le le le le le le le le le le
le le le le le
fors duc poestiz, 3502 fors roy couronné, 18363 fort roy poestiz, 6449 gentilz roy prisé, 17170 jeune roy, 4660 noble duc, 3490 noble roy, 17514, 18468 noble roy qui France va tenant, 16669 noble roy senné, 4908 riche roy de France, 6381 riche roy de pris, 6456 riche roy savant, 17517 roy, 37, 4839, 4852, 4854, 4876, 4878, 4925, 4928, 4931, 4934, 4939, 4948, 4958, 6312, 6315, 6326, 6332, 6339, 6343, 6346, 6349, 6357, 6360, 6439, 6452, 6490, 7063, 7084, 7096, 7285, 7323, 7336, 7346, 7352, 16662, 16675, 16699, 16701, 16732, 16878, 16884, 16897, 16906, 16913, 17173, 17175, 17180, 17311, 17365, 17380, 17381, 17397, 17423, 17480, 17526, 17538, 18352, 18362, 18364, 18477, 20410, 21497, 21512, 21744 roy Charle, 17470 roy Charles, 19683 roy Charlon, 12619, 16927, 16958, 20137, 20520 roy couronné, 21721 roy de France, 4838, 6319,
6335, 6486, 7278, 9842, 12218, 16884, 17434, 18102 le roy de France Charles le suisant, 6270 le roy de France gentilz, 6702 le roy de France le royon, 6480 le roy de Monlaon, 20528 le roy de Paris, 6464 le roy des Françoys, 34, 20915, 20919 le roy le vaillant, 13974 le roy qui Charles fu nommé, 17436 le roy qui de France tient la terre, 17627 le roy qui France a a garder, 20066 le roy qui France doit garder, 7211, 13548 noble roy, 7097, 7349 nostre roy, 4850, 20072 nostre roy couronné, 21732 roy Charlon, 20572 un lioncel, 19591 un nouveau roy en France, 4593 un roy le plus puissant qui soit en tout le mont, 21622 Charles VI Charles son ainé ilz, 21755 Charlez, voir Charles V Charlon : ?, 6972 Charreton : un des marchands envoyés par Bertrant pour transmettre un message au duc de Lencloistre lors du siège de Rennes, 1504 l’un, 1511
- Index des lieux et des personnages Charretons : marchands forcés par Bertrant à apporter leurs vivres dans la ville de Rennes assiégée., 1499 Charretons : troupe anglaise s’apprêtant à fuir le siege de Rennes avec des vivres et rattrappée par Bertrant, 1432, 1456, 1511 marchant, 1460 villain, 1434 Chastellain (le – de Toulecte), 14313, 14324, 14367, 14386, 15134 Chasteauleraut (le viconte de –), 21407 chasteau Neuf de Randon, 21603 au chastel, 21607 bon chastel, 21632 du chastel, 21711 du chastel garité, 21688 le bon chastel demaine, 21643 le chastel, 21608, 21612, 21692, 21696 le fort, 21609 leur chastel qui estoit bien fondé, 21713 nostre chastel, 21629 un chastel bel et bon, 21602 chasteaux (quatre–) : châteaux situés dans l’enceinte de Chauvigny, 19768 .iiii. chasteaux, 19776 les chasteaux, 19817 quatre chasteaux, 19819
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Chaseillon, 21572 Chastel (– de Toulecte), 13175, 13176, 13200 Chastel (– de la Rochelle), 20340, 20341, 20346, 20349 ce chastel, 20452 du chastel, 20456 le chastel, 20587 son chastel bel et bon, 20359, 20425 Chastel (– de la Rochelle)du chastel, 20446 Chastel (– del roy) : sagit-il du château d’Auray ?, 5077 Chastel (le – de nom) : château de Toulecte, 8866 Chastel (un –) : château conquis sur la route de la Rochelle, 18457 ce chastel, 18462 ou chastel, 18466 Chastel blanc : héritage du roi Henry, 7710, 7746, 7748, 7949 ou chastel, 7750 Chastelayraut (le pont de –) ce pont, 19039 du pont, 19061 le pont, 19037, 19040, 19053, 19058, 19077 Chastelayraut (le viconte de –) le viconte du lieu, 19035 Chastelayraut (tour de –), 19065
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- Index des lieux et des personnages -
celle seconde tour, 19074 la tour, 19068 Chastelayraut, 18966 celle ville, 18975 Chastelairaut, 19028, 19076 Chastelairaut, une ville puissant, 18974 la ville, 18969, 19041 Chastalain (– de Chisec), voir Miton (Robert –) Chastellain (– d’Alroy), 5660, 5661, 5663, 5677, 5685, 5688 Cappitaine, 5703 le chastellain membré, 5679 Chastellain (– de Bescherel) : oicier chargé de garder Bescherel au nom de Charles de Blois, 2732, 2754, 2756, 2768 au gentilz chastellain, 2749 le bon chastellain, 2763 Chastellain (– de Meulent), 3925, 3970, 3974, 4007 Chastellain (– de Monssusanc), 15332 cellui, 15350 Chastellain (– de Mont Jardin), 14780 le chastellain, 14787 Chastellain (– de Nonnencourt), 4806, 4814 Chastellain (– de Pestiens) au chastellain, 3029, 3206, 3345, 3352 au chevalier, 3365 beau seigneur, 3208
cellui chastellain, 3354 cellui faulx chastellain, 3222 Chastellain, 3052, 3074, 3185, 3208, 3238 le chastellain, 3026, 3033, 3036, 3040, 3048, 3055, 3062, 3095, 3140, 3144, 3180, 3186, 3201, 3203, 3204, 3216, 3235, 3245, 3341, 3359 un homme d’armes plain de grant courtoisie, 3232 un messagier, 3340 vassal, 3241 vostre chastellain, 3047 Chastellain (– de Roleboyse), 3675 le chastellain, 3862, 3868, 3875 le ier chastellain, 3685 Chastellain (– de Toulecte), 13174, 13199, 13221, 13253 Chastellain (– de Trie), 12024 le sire de Trie ?, 17963 Chastellain (– de Turgot), 3001, voir Thomelin le plus faulx crestien qui onques fu crestienné, 3002 Chastellain (– de Valongues), 5009, 5010, 5012, 5017, 5023, 5034, 5097, 5101, 5106, 5117, 5125, 5135 beaux amis, 5139 Chastellain : châtellain de Bourges, 7883 Chastellaine (– de
- Index des lieux et des personnages Monssusanc), 15335 dame, 15373, 15399 icelle chastellaine, 15341 la bonne chastelaine, 15446 la chastelaine, 15356 la chastelaine qui est noble et vaillant, 15444 la chastellaine, 15343, 15415 la dame, 15359, 15360, 15371, 15389, 15410, 15425, 15452 la dame au gent corps avenant, 15419 la dame jolie, 15485 la riche dame qui beauté ot foison, 15339 ma dame, 15351 une moult vaillent dame, 15336 Chastel (– de Valongues), 5013, 5024, 5030, 5045, 5061, 5083, 5086, 5091, 5102, 5130, 5136, 5137, 5144, 5146, 5156, 5161, 5169, 5173, 5188, 5218 ce chastel puissant, 5070 du fort chastel, 5095 le chastel, 5184 Chastillon (Gaultier de –), 17332 Chatellon (Gaultier de –), 17302 Chaton : Caton l’ancien ?, 5538 Chaton : Caton l’ancien, 5536 Chauvegris, 18909 Chauvigny, 19660, 19766, 19925 ceste ville, 19799 Chauvigny le noble herité, 19679
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la ville, 19811 Chier Bourc, 3443 Chevalier (.i. – engloys) : chevaliers portent banière du duc de Lencloistre à la bataille de Nadres, 11356 Chevalier (– berton) : chevalier qui prévient Bertrant de la prise en otage de son frère, 2189 l’escuier, 2195, 2201, 2205 Chevalier (le – qui moult fit a doubter) : personnage qui conseille Charles de Blois avant la bataille d’Alroy, 5537 le vassal, 5570 Chevalier (le –) : personnage qui a apporté la table du roi Pietre à la princesse de Galles, 10630 Chevalier (le vert –), 5390, 7159, 7207, 7311, 7469 le Chevalier Vert, 7129, 8193 Chevalier (le vert de –), 5871, 5956, 6135 Chevalier (noble –) : personnage dont on fête les noces au Portugal, 9894 Chevalier (un – angloiz) : chevalier anglais désireux de s’illustrer à la bataille de Cocherel, 4558 Chevalier (un – berton) : chevalier du camp anglais qui reconnaît Bertrant lors du siège de Rennes, 1077 Chevalier (un – d’Epaigne) :
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- Index des lieux et des personnages -
chevalier bléssé par Pietre lors de la bataille de Nadres, 11839 Chevalier (un – engloiz) : pesonnage fait prisonnier à la bataille de Nadres par Henry, 11947 Chevalier (un –) : chevalier français qui propose un plan pour se jouer des Anglais devant Alroy, 5669 Chevalier (un –) : chevalier qui reconnaît le comte d’Auçoyre lors de la bataille d’Alroy et lui demande de se rendre, 5978 Chevalier (un –) : personnage chargé de prévenir l’épouse d’Henry de l’arrivée de cellui-ci à Tristemare, 11968 Chevalier (un –) : personnage qui apprend au prince de Galles que Bertrant a réuni la somme de sa rançon, 14263 Chevalier (un –) : personnage qui explique la situation des prisonniers au sénéchal de Bordeaux, 14176 Chevalier (un –) : personnage qui identiie Bertrant lors de la bataille de Melun, 3582 Chevalier (un –) : personnage qui prévient le duc d’Anjou de l’arrivée d’Henry à Villeneusve, 12990 Chevalier (un –) : personnage qui rattrape l’écuyer de
l’Anglais à Saint Marcel, 17276 Chevalier (un gentilz –) : frère du Besgues de Valaines, 12970 le chevalier, 12975, 12980 le frère du Besgues, 12973 Chevalier de normandie : troisième chevalier qui déie Bertrant lors du tournoi de Rennes un chevalier qui fu de Normandie, 507 Chevaliers (.lx. –) : personnage participant au tournoi organisé à la cour du Portugal, 10067 Chevalier : chevalier anglais prisonnier renvoyé par Bertrant au duc de Lencloistre ain de lui livrer un message, 1159 Chevalier : chevalier qui déie Bertrant lors du tournoi de Rennes, 442, 444, 447, 459, 467, 480 le bon chevalier, 449, 455, 457 Chevalier : chevalier qui vient sauver Bertrant lors de l’attaque de Forgeray, 999 Chevalier : deuxième chevalier qui déie Bertrant lors du tournoi de Rennes un autre chevalier, 490, 493 Chevalier : personnage anglais dont Bertrant prend les armes, 691, 704, 720, 727, 750, 756, 763
- Index des lieux et des personnages au maistre, 740 cellui angloys chevalier, 729 du chevalier de pris, 767 du chevalier faytis, 775 l’engloys, 711 le maistre, 744 mon bon seigneur, 732 son maistre, 747 Chavaliers (.xii. –) : chevaliers que Mahieu de Gournay renverse lors du tournoi à la cour du Portugal, 10102 Chevaliers (.dix. –) : dix chevaliers de Dinant qui se précipitent sur Bertrant pour le féliciter à la suite de son combat avec Thomas dix autres, 2546 Chevaliers (.iic . –) : armée du prince de Galles à la bataille de Nadres, 11446 Chevaliers (.iiii. –) : personnages qui tuent l’Anglais à Saint Marcel, 17272 Chevaliers (.x. –) : dix chevaliers anglais qui se précipitent sur Bertrant pour le féliciter à la suite de son combat avec Thomas, 2545 les nobles chevaliers, 2550 Chevaliers (– dix) : dix chevaliers qui accompagnent le duc de Lencloistre à l’intérieur de Rennes, 1943 Chevaliers (– dix) : dix
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chevaliers qui accompagnent le duc de lencloistre à l’intérieur de Rennes les dix chevaliers, 1988 Chevaliers (dix –) : dix chevaliers de Dinant qui se précipitent sur Bertrant pour le féliciter à la suite de son combat avec Thomas les nobles chevaliers, 2550 Chevaliers (les bon – de France) : personnages présents à la bataille de Nadres., 11986 Chevaliers (quatre –) : personnages avec lesquels Henry quitte la bataille de Nadres, 11960, 11963 Chevaliers (quatre –) : quatres personnages qui partent avec Bertrant comme otages en Angleterre, 2799 Chevaliers (quatre) : chevaliers faits prisonniers par Du Guesclin lors du siège de Rennes, 1138 Chevaliers (un de –) : personnage qui annonce à Bertrant sa mise à rançon, 13352 Chevaliers (vingt et cinq –) : hommes qui accompagnent Pietre jusqu’à Bordeaux, 9789 Chevaucheur (le –) : personnage qui va porter à
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- Index des lieux et des personnages -
Henry une lettre du prince de Galles, 10706 le message, 10708 Chevaucheur : éclaireur envoyé par les Anglais lors du siège de Rennes, 1114 le vallet, 1125, 1131 Chevauchie : troupe qui vient soutenir Bertrant lors de la prise de Forgeray, 979 Chierebourc, 2102, 5149 Chierebourc sur mer, 6355 Chinon, 19050 Chippre, voir Chyppre Chisec, 20885, 20890, 20910, 20954, 20979, 20980, 20998, 21008, 21013, 21069, 21080, 21456 ce chastel joly, 20891 Chisec la freté, 21147 du chastel, 20981, 21252, 21291, 21302 du chastel de ault pris, 21251 du chastel de renon, 21262 Chyppre (le roy de –), 6509 cellui bon roy de Chippre, 7403 cellui roy, 7394, 7399 le bon roy de Chippre, 7500 le meilleur roy qui fust par dela conversant, 7389 le noble roy de Chippre, 7388 le roi de Chippre, 7100, 7218 le roy, 7410 son frere, 7408 son frere le roy, 7405 Chyppre, 6508, 6509 Chippre, 7100, 7218, 7388, 7403, 7500
Chippre le roiaume qui est si souisant, 7497 Cyppre, 7387 Cinquiesme (la –) : sœur de la reine de France et de la reine d’Espagne, épouse du seigneur d’Albret, 6375 celle de l’Abret, 6664 Civray, 21028 Cyvray, 21479 Clement (saint –), 6862, 19407 Clement, voir Heraut serviteur de Thomas de Grantson Clers (les .ii. clers) : cordeliers de Burs, 8633 aus cordeliers, 8658 deux cordeliers, 8635 Cliçon (Olivier de –), voir Clisson Clisson (Olivier de –), 2775, 5944, 6085, 20312 cellui de Cliçon Olivier le hardy, 20666 cellui qui de Gliçon maintient les ediiz, 21757 Cliçon, 5840, 13078, 17960, 19185, 20513 Cliçon le gentilz, 18238, 20617 le ber Olivier de Cliçon, 18288 le bouchier de Cliçon, 18158 Monseigneur de Cliçon c’on appelle Olivier, 20934 Olivier, 5761, 5777, 5990, 6032, 6159, 18290, 18300, 20670, 20735, 20737, 20741, 20746, 20823, 20835, 20838, 20843, 20920, 21756
- Index des lieux et des personnages Olivier a qui Cliçon appent, 18650 Olivier de Cliçon, 6089, 6157, 6246, 13317, 13386, 17602, 17621, 17886, 18167, 18266, 18435, 19167, 20479, 20715, 20726, 20731, 20818, 20837, 20955, 21015, 21071 Olivier de Cliçon le gentilz, 20918 Olivier de Cliçon le noble combatant, 18049 Olivier de Glisson, 5838 Olivier de Gliçon, 5731, 18156 Clovis (– le coronné), 4998 au roy Clovis le gent, 20560 Clovys le baron, 20181 Cocherel, 2056, 4102, 4130, 4175, 4180, 4259, 4584, 4607, 4663, 4809, 4818, 4883, 4917, 4950, 4972, 6451, 11566, 11736, 12072, 19589 Coucherel, 4471 Combatans (.viic . –) : soldats qui accompagnent le mareschal d’Odrehan à la bataille de Pont Vallain, 17879 Combatant (.iic . –) : soldats qui accompagnent Bertrant dans sa chevauchée nocturne, 17860 Combatant (.iiic . –) : soldats qui accompagnent Chando au pont de Lusac, 18577 c .iii ., 18721
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Grande Compaignie, 7429 celle compaignie, 7636, 7754 ceste compaignie, 7561 la Blanche Compaignie, 7924, 7927, 7942, 8879 la compaignie, 7438 une compaignie qui blanche s’appella, 7831 Compaignon, voir Enfans Compaignon : personnage qui accompagne le jeune Bertrant, 674 le vallet, 684 son vallet, 683, 745, 757, 779 son vallet Orriz, 783 Compaignon : soldat de Bertrant assomé lors de la prise de Forgeray, 962 Compaignons (.lx.) : les cinquante hommes qui suivent Bertrant pour la prise de Forgeray, 636, 646, 853, 857, 903, 947, 977 les compaignons Bertrant, 910 Compaignons (.xii. fers –) : personnages qui attaquent l’armée française par surprise lors du siège de Bonnom, 20682 Compaignons (six –) : habitants de Bonnom torturés, 20641 les .vi., 20645, 20657 Composterne, 9285 Concy (Gaultier de –) le sire de Concy, 21577 Concy (Oudart de –), 17333 Condac, 21542 Conflans, 21891
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- Index des lieux et des personnages -
Conoistable (le – d’Engleterre), 17699 Conseil (– au duc) : conseillers de Charles V lors de la prise de Melun, 3500 Converse : personnage qui prédit un bel avenir à Bertrant, 88, 95, 103, 113, 134, 658, 807 la convertie, 208 Convertie, voir Converse Convreine, 20908 Cordeliers (l’un des deux –) : l’un des cordeliers de Burs, 8638 Cordes : ancien nom de Cordonnes, 9055, 9125 Cordonnes, 9054, 9149 Cordonne, 9123, 9308, 9676, 13227, 14357 Cornuaille, 5935 Coucherel, voir Cocherel Courant (le seigneur de –), 13966 Coureurs (dix –) : éclaireurs envoyés par Godefroy d’Anequin pour espionner les Anglais aux abords de Cocherel, 4126, 4183 Coureurs (vingt cincq –) : éclaireurs envoyés par Henry vers Moncel, 15704 des coureurs Henry, 15742 les coureurs, 15717 Courour (un –) : personnage qui part à la poursuite de Pietre à Moncel, 16212 le bers, 16214
Courours : éclaireurs du duc de Lencloistre, 1325, 1397 coureurs, 1326 Courrir : vb. intr. : se déplacer pour attaquer, 642 Courtenay (cellui de –), 19129 Cousin : chevalier qui prête ses armes à Bertrant pour combattre lors du tournoi de Rennes, 422 l’escuier a la chiere membree, 429 son parent l’escuier, 526 Coustantin : région de Normandie, 4961, 4966 Crahon (ceulx de –), voir Craon (ceulx de –) Cran (seigneur de –), 14207 Craon (ceulx de –), 4920 ceulx de Crahon, 6342 Creil, 3656 Cresonele, 17776, 18092 Cresonelle, 18196 Cressonele, 18172 Cressonelle, 18174, 18180, 18184, 18185, 18190, 21017 le gentilz Cressonelle, 18189 Cresoule, voir Cressolle Cresselle : chevalier anglais, 10443, 11366 Cressolle, 17702 Cresoule, 17746 Cressonnelle, 4297, 20959 Crestien, 6553 Crestiennéz : les chrétiens, 42 Crestiens (dix mille –) :
- Index des lieux et des personnages nombre de chrétiens expulsés de Séville par Pietre, 14343 Crestiens, 7911, 8085, 8248, 8424, 8589, 9325, 9483, 9583, 9594, 9596, 9599, 9600, 9609, 9629, 9846, 10378, 14343, 14587, 15186, 15208, 15286, 15288, 15290, 15466, 15559, 15577, 15618, 15668, 15676, 15711, 15754, 15844, 15917, 16009 Creuse, 18967 forte riviere, 18966 Cuveliers, 21 Cyppre, voir Chyppre Damas (le soudans de –), 15257 Damas, 15255 Dame (la – puissant) : personnage dont on fête les noces au Portugal, 9895 est cousine de roy, 9896 Dame (la –) : reine d’Arragon, 7039 Dame (la –) : épouse de Jehan de Chando, 18856 Dame (la belle –) : mère d’Henry, iancée au roi d’Espagne, 6931 icelle riche dame, 6938 la dame, 6933 la mere au roy Henry, 15340 la riche dame, 8562 la riche dame qui belle ot la
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façon, 7788 la riche dame qui le roys tant ama, 7778 ma mere, 8109 Dame (une –) : maîtresse de Pietres d’Espagne, 6539 la femme malvaise, 6544 la folle, 6547 une fole, 6879 une fole dame, 6668 Dame (une noble –) : épouse du comte de Monfort ils, 5343 nee fu d’Engleterre, 5344 Dames : femmes présentes au tournoi de Rennes ces dames de pris, 331 Damiete (le roy de –), 14581 Damiete, 14581 Damoiselle : personnage qui prend la défense de Bertrant auprès de la mère de celui-ci, 662 Dampmartin (le quenx de –), 17294 Dandelee (Jasme –), 1059 Oron, 1059 Danfferrant (– de Castre), voir Ferrant (– de Castre) Danie : ille du roi de Bel-Marin, 15237 David (Jehan –), 4843, 4905 David (Rogier –), 2721, 2991 cellui chevalier doubté, 2997 Rogier Davoit, 3319 un chevalier vaillant, 2721 un des faulx chevaliers de toute roiautés, 2992 David, 21771
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- Index des lieux et des personnages -
David le raisonnable, 21882 David : capitaine de Bonnom, 20625 au cappitaine, 20675 le cappitaine, 20630, 20638, 20648 le lerres maleÿ, 20640 David : conseiller du roi Pietre, 8891 le faulx juif felon, 8909 Daviot : personnage responsable avec Turquant de la mort de l’épouse de Pietre, 9252, 9360, 9386, 9427, 9476, 9479, 9558, 9580, 9591, 9657, 10223, 10232, 10251, 10266, 10269, 10308, 10317, 10328, 10331, 10337, 10349 Davoit (Rogier –), voir David Denis (saint –), 4554, 5140, 9826 Didier (Henry –), 19130 Dignant (Charles de –), 5859 Charles de Dinant, 5992, 6102, 6135, 6142, 6236, 14211 Digon (le bourc de –), 13910 Digon, 5630 Dinant (Charles de –), voir Dignant Dinant, voir Disnant Disnant, 55, 2191 celle ville de pris, 2360 Dinant, 2096, 2097, 2104, 2114, 2131, 2145, 2250, 2344, 2349, 2360, 2394, 2406, 2546, 2547, 2585, 2641, 2764, 2946, 3408, 18056
Dinant la garnie, 2435, 2485 Dynant, 2092, 2326, 2634, 2693, 2712, 2719 la ville gentilz, 2363 une ville de pris, 2092 Dix : personnages qui entrent dans la mine creusée sous la ville du Pont de Douve, 5288 Donjon (– de la Rochelle), 20339, 20348, 20361, 20424 Douart, voir Edouart d’Engleterre Douve (Pont de –), 5226 forte ville, 5227 la ville, 5245, 5279, 5297 la ville loee, 5300 Bretaigne (duc de –), 5906, 6422, 21495 Bretaigne (duc de –) : le duc de Bretagne sous le règne de Philippe de Valloys, 531, 566 ce bon duc puissant, 573 le bon duc de Bertaigne, 549 le gentilz duc, 569, 572 un duc, 532 Duras (le sire de –), 21566 Dynant (Charles de –), 5376 Dynant, voir Disnant Ector, voir Hector Edouart d’Engleterre : roi d’Angleterre, 537, 558, 1038, 2608, 2613, 2628, 2680, 4029, 10713, 13014 au riche roy engloiz, 18392 au roy d’Engleterre, 5588 cellui Edouart qui France
- Index des lieux et des personnages guerroya, 539 Douart, 13281 du fort roy couronné, 19941 du fort roy d’Angleterre, 20380 du fort roy Edouart, 6468 du roy, 2695 du roy d’Engleterre, 1922 du roy englois, 18413 du roy engloys, 20355 du roy qui Edouart fu nommé, 2654 du roy qui nous est maloustru, 3548 Edouart, 18396 Edouart le baron, 2638 Edourt le doubté, 9275 le bon roy d’Engletrerre, 13083 le fort roy englois, 20391 le roy, 1036, 1039 le roy d’Angleterre, 2017, 18855 le roy d’Engleterre, 2613, 2667, 6328, 11362 le roy d’Engleterre ou tant de prouesce a, 13421 le roy d’Engleterre, Edouart le hardy, 6463 le roy Edouart, 9731, 13105, 19948 le roy englois, 603, 20382, 21636 le roy engloiz, 2740 mon pere, 12166 son pere, 13005 Egipte, 8898, 11405 Eglise (celle –) : église où repose le corps de Charles de Blois, 6406 Eglise (sainte –), 7624
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Eglise (– du Pont de Douve), 5228 le fort moustier, 5291 le moustier, 5244, 5250, 5282 Elroy (le chastel d’–), voir Alroy (le chastel d’–) Emerion (Estienne –), 13776 Emerion, 13906 Emerion, homme de grant lignie, 14291 Emerions, voir Pommiers (le sire de –) Emperere (– de Rome), 6481 Enfans : compagnons de jeu de Bertrant étant jeune aux enfans, 231 enfans .xl. ou demy cent, 157, 228 les enfans, 191 les grans, 169 mes compaignons, 180 ses compaignons, 162, 216 Enfans : enfants de Charles de Blois, 6410 Enfer (le roy d’–) : ?, 9066 Enfer (un ennemy d’–) : ?, 9067 Engelier (la tour –), 21572 Engelier : comabatant anglais à la bataille du pont de Lusac, 18724 Engleterre, 537, 611, 1036, 1038, 1972, 2545, 2608, 2613, 2627, 2667, 2680, 2736, 2737, 2852, 3255, 3547, 4049, 5236, 5344, 5348, 5588, 5843, 6328, 6412, 6445, 6463, 7415,
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- Index des lieux et des personnages -
8972, 9275, 9606, 9730, 9739, 9918, 9969, 10009, 10021, 10076, 10412, 10446, 10615, 10713, 11353, 11362, 11482, 11774, 13014, 13083, 13380, 13421, 17699, 18308, 19525, 20976, 21502 Angleterre, 2017, 2653, 3001, 9208, 10705, 20380 Angleterre la lee, 9353 Angleterre sur mer, 18855 d’Engleterre la lee, 1922 Engleterre la grant, 10694, 12145 Engleterre la lee, 5034, 12446 le terre de renon, 2627 Englois (un –) : personnage qui sauve la vie de Carenlouet, 18788 l’Englois, 18793 le bon Englois, 18824 le bon Englois berton, 18809 Engloys (.vc. –) : armée accompagnant le prince de Galles en Espagne, 11004 Engloys (l’–) : personnage qui informe le Castal de la fuite de Français devant Cocherel, 4395 Engloys (un –) : personnage qui blesse le comte d’Auçoyre lors de la bataille d’Alroy, 5976 Engloys (un –) : personnage qui tue Charles de Blois d’un coup de couteau, 6209
Engolesme, 10399, 10403, 12355 Angolesme, 10424, 13617, 19543, 19628 Engoulement (Tristan –), 21260 Ensers (le roi –) ancien roi d’Epagne, 8420 Entache (– de la Hussoye), voir Hussoie (Hentache de la –) Ercent, 20295 Ermignac (le conte d’–), voir Erminac (le conte d’–) Erminac (le conte d’–), 10664, 11475 au conte d’Erminac, 16989 le conte, 16984 le conte d’Armigniac, 16971 le conte d’Emignac, 10915, 11241 le conte d’Ermignac, 16981, 17005 le conte d’Ermignac a la barbe lorie, 12019 le conte d’Ermignac a la barbe meslee, 12445 le quenx d’Emignac, 11258 le quenx d’Ermignac, 11793 Ernoul (– d’Odrahan), voir Odrahan (le marechal d’–) Escoles (– de Toulecte), 9065 celle escole, 9069 Escuier (.i. – senné) : personnage qui relève Bertrant après sa chute lors de l’assaut de Melun, 3614 Escuier (.i. –) : personnage qui
- Index des lieux et des personnages reconnait Mahieu de Gournay lors de la fête au Portugal, 9905 l’Englois, 9910, 9925 l’escuier, 9912, 9916 Escuier (.viii. –) : personnages qui sont hués lors de la reddition de Valongues, 5164 Escuier (.viii. –) : personnages qui sont hués par le Français lors de la reddition de Valongues ceulx, 5181, 5216 eulx huit, 5219 gars, 5191 Escuier (– de Normendie) : jeune soldat qui accepte de porter le pennon de Bertrant au sommet de Pestien, 3164 Escuier (angloiz) : soldat anglais défendant Forgeray tué par Bertrant, 961 Escuier (son –) : écuyer de Monseigneur de Hangiet, 17239 Escuier (un – berton) : éclaireur envoyé par Henry vers Moncel, 15718 l’escuier, 15731 le Breton, 15721, 15729 Escuier (un – de noble convenant) : personnage qui prévient Carenlouet de l’attaque anglaise au pont de Lusac, 18572 Escuier (un – senné) : second
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personnage qui escalade les murs de Vaulx pour combattre les Anglais, 18120 Escuier (un –) : personnage auquel Bertrant donne de l’argent pour payer sa rançon après son départ de Bordeaux, 13674, 13681, 13693, 13700 Escuier (un –) : personnage de la cour d’Arragon qui apprend au roy Henry le sort des prisonniers de la bataille de Nadres, 12765 Escuier (un –) : personnage envoyé par le roi de France pour faire revenir Bertrant d’Espagne, 16657, 16693, 16703, 16707, 16717, 16719 Escuier (un –) : personnage qui accompagne l’Anglais à la bataille de Saint Marcel, 17233, 17267 l’escuier englois, 17279 Escuier (un –) : personnage qui apprend à Mahieu de Gournay qu’il a été trompé lors du tournoi à la cour du Portugal, 10147 Escuier (un –) : personnage qui conseille au prince de Galles d’emprunter de l’argent à sa femme, 14270 Escuier (un –) : personnage qui escalade les murs de Vaulx pour combattre les Anglais,
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- Index des lieux et des personnages -
18117 Escuier (un –) : personnage qui vient prévenir Bertrant de l’arrivée de Guillaume de Felleton lors de la bataille contre l’armée du prince de Galles, 11191 Escuier (un –) : personnage à la cour d’Arragon qui apprend au roy Henry le sort des prisonniers de la bataille de Nadres, 12771, 12787, 12796, 12797, 12802, 12813, 12818, 12820, 12821, 12834, 12849, 12857, 12860, 12888, 12942 l’escuier gentilz, 12839 Escuier (un –) : soldat qui crève l’œil du comte d’Auçoyre lors de la bataille d’Alroy, 5970 Escuier (un –) : soldat qui est abbatu par Olivier de Clisson à la bataille d’Alroy un escuier feri qui estoit de Jugon, 5947 Escuier (un gentilz –) : personnage qui doit venir aider l’armée du Castal près de Cocherel, 4505 Escuier (un gentilz –) : soldat français chargé de garder les clés de la ville de Mante et qui en sera fait châtellain, 3902 tantost fu chevalier et chastellain nommé, 3903
Escuier (un noble –) : personnage qui vient à Cocherel avec des renforts pour aider l’armée anglaise, 4771, 4799, 4808 Escuier : personnage qui accompagne Bertrant lors de sa recherche d’argent, 14067 Escuier : personnage qui accompagne l’Anglais dont Bertrant prend les armes, 696, 730, 739, 744, 764 le maistre, 738 Escuier : personnage qui part demander le nom de Bertrant lors du tournoi de Rennes, 463, 464 Escuier : écuyer de Bertrant bléssé par le chastellain de Pestien, 3181 Escuier : écuyer de Bertrant lors de sa captivité en Angleterre, 2884 le sien escuier, 2897, 2920 Escuiers (.i. – d’Espaigne) : personnage qui accompagne Pietre jusqu’à Bordeaux, 9790 Escuiers (.iii. – vaillant) : personnages tués par Aletaire et ses soldats, 16159 Escuiers (.iiii. – puissant) : Aletaire et ses soldats, 16160 Escuiers (.vi. –) : escorte de Bertrant dans la ville de
- Index des lieux et des personnages Rennes, 1570 Escuiers (quatre –) : quatres écuyers qui accompagnent Thomas de Cantorbie lors de la prise en otage d’Olivier du Guesclin, 2179 Eslye (saint –), 16407 Espaigne (le mareschal d’–), 10898, 11530, 11745, 12155 du mareschal d’Espaigne, 12129 gentilz mareschal, 11760 l’amiral d’Espaigne, 12178, 12661 le mareschal, 11751, 11758 le mareschal ?, 11904 Espaigne, 31, 2065, 6363, 6524, 6530, 6542, 6581, 6607, 6640, 6648, 6683, 6718, 6731, 6770, 6779, 6786, 6830, 6832, 6901, 6928, 6972, 6998, 7014, 7021, 7027, 7035, 7092, 7224, 7374, 7484, 7677, 7701, 7714, 7776, 7821, 7842, 7846, 7877, 7881, 7906, 7934, 7952, 8016, 8051, 8362, 8419, 8431, 8548, 8574, 8577, 8652, 8689, 8716, 8924, 8976, 9124, 9178, 9182, 9188, 9277, 9301, 9334, 9397, 9690, 9738, 9749, 9870, 9880, 9936, 9942, 9945, 10407, 10409, 10413, 10432, 10437, 10454, 10464, 10493, 10527, 10566, 10573, 10583, 10585,
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10601, 10616, 10647, 10696, 10720, 10761, 10826, 10842, 10844, 10958, 11002, 11006, 11083, 11153, 11292, 11524, 11651, 11700, 11755, 11775, 11779, 11789, 12129, 12155, 12178, 12289, 12325, 12326, 12331, 12395, 12402, 12414, 12452, 12525, 12543, 12563, 12568, 12597, 12604, 12653, 12661, 12670, 12795, 13049, 13065, 13129, 13132, 13133, 13137, 13139, 13150, 13163, 13165, 13214, 13221, 13257, 13272, 13418, 13461, 13467, 13469, 13543, 13544, 13576, 13657, 13780, 13985, 14130, 14296, 14310, 14506, 14514, 14554, 14558, 14586, 14749, 14937, 15025, 15192, 15205, 15213, 15239, 15244, 15251, 15318, 15320, 15382, 15391, 15445, 15458, 15459, 15885, 16024, 16352, 16861, 17663, 18336, 21843, 21851, 21859, 21863 celle roiaulté, 6780 du roiaume d’Espaigne, 7804 Espaigne l’onnouree, 9790, 13197
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- Index des lieux et des personnages -
Espaigne la iere, 17371 Espaigne la grant, 7919, 12062, 13954 Espaigne louhee, 8751 icellui païs, 12530 le païs d’Espaigne, 7220 le roiaume d’Espaigne, noble regnon, 9158 le roy d’Espaigne, 10620 mon noble royon, 12422 ou païs d’Espaigne, 18173 ou royaume d’Espaigne, 14014 une contree grant, 18336 une riche contree, 6524 Espaigneulx, 7979 Espaigneux, 8070, 8078 Espaignol (un –) : personnage envoyé par Ferrant de Castre à Pietre, 14800, 14805 Espaignol (un –) : personnage qui prévient Pietre du couronnement d’Henry à Burs, 8860 l’Espaignol, 8864, 8870 Espaignol (un –) : personnage qui suggère la séparation des Juifs, des Sarrasins et des Chrétiens dans la cité de Burs, 8518 Espaignolz (.Lx. mille –) : nombre total de soldats espagnols noyés lors de la bataille de Nadres, 11909 Espaignolz (.iiii. –) : personnages qui portent la table du roi Pietre en cadeau au prince de Galles,
10565 ceulx chevaliers, 10567 Espaignolz (soixante milles –) : nombre de soldats alignés par le prince de Galles contre Henry d’Epaigne, 11007 Espaignolz, 7817, 7989, 7995, 8003, 8100, 8230, 8237, 8243, 8253, 8255, 8263, 8267, 8507, 8608, 8621, 8943, 9227, 9650, 10837, 10856, 10890, 10902, 11061, 11148, 11161, 11177, 11183, 11208, 11370, 11372, 11384, 11397, 11494, 11511, 11578, 11587, 11614, 11636, 11640, 11641, 11681, 11723, 11744, 11763, 11803, 11815, 11842, 11843, 11847, 11849, 11871, 11878, 11883, 11983, 12004, 12007, 12011, 12079, 14375, 14498, 14873, 14882, 14901, 16641, 16931, 18322, 18330 Espagnols, 7996 Espaignols, 8580 Espaignolz d’Espaigne, 11153 Hespaignolz, 8287 les bons Espaignolz, 18339 les nobles Espaignolz, 8665 Espie (un – de Burs) : espion qui prévient Henry du départ de Pietres de la ville de Burs, 8454
- Index des lieux et des personnages Espie (une – Henry) : espion envoyé à Bonnom, 20629 le més, 20631 Espie (une –) : espion qui apprend à Pietre la venue de Bertrant en Espagne, 7822, 7824, 7827 Espie (une –) : personnage qui a localisé Pietre après sa fuite de Monteclaire, 14768 Espie (une –) : personnage qui prévient Pietre de l’arrivée d’Henry à Tolède, 14553 Espie (une –) : personnage qui prévient les habitants de Tarascon de l’arrivée de Bertrant du Guesclin, 13747, 13751 Espie : espion qui annonce au comte de Monfort la venue des Français au château d’Alroy, 5436 Espie : espion à la cour de Bel Marin pour le compte d’Henry, 15598, 15601, 15612 le varlet, 15614 Espie : personnage qui annonce la venue de Du Guesclin à Pestien au châtelain, 3028, 3030, 3034 le vallet, 3035 Espie : personnage qui annonce à Bertrant la venue de renforts anglais à Cocherel, 4773 Espie : personnage qui informe Bertrant du rassemblement
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de Anglais à Evreux, 4075 Espie : personnage qui prévient Pietre de l’arrivée de la Blanche Compagnie à Toulecte, 8981, 8982 Espie : personnage qui prévient le châtelain de Turgot de la prise de Pestiens, 3254, 3257 Espie : éclaireurs du duc de Lencloistre, 1397 Espine (Pierre de l’–), 4625 un escuier senné, 4625 Espousee (son –) : femme d’Henry, couronnée reine d’Espagne dans le texte, 6642 ceste dame, 8799 dame, 13143 icelle dame, 8757 la dame, 8760, 8776, 8779, 8780, 8795, 8800, 8825, 8828, 8934, 12230, 12232, 13145, 13167 la dame a Henry espousee, 8766 la dame gentilz, 8844 la dame, blanche comme une fee, 8775 la franche roynne, 12233 la reigne, 8933, 8945, 8957, 8962, 9136, 12632, 13141, 15494 la reine, 13960 la reyne, 14545 la reyne au beau viaire cler, 12711 la roynne, 12252 la roÿne, 12567, 13156, 14303,
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- Index des lieux et des personnages -
15118, 15443, 15604, 15654 la roÿne d’Espaigne, 13163, 15445 le dame, 8752 ma moullier, 11971 nostre dame, 8832 nostre reigne, 8832 pouvre dame, 8787 sa courtoise espousee, 8748 sa femme, 6990 sa femme au gracieux semblant, 16647 sa moillier, 8984 sa mouiller, 12652 sa moulier, 12257, 12570 sa moulier la roÿne au corps gent, 12229 sa moullier, 14306 très doulce dame, 12201 unedame vaillent et de touz bien amee, 6643 Esquabourne (Nicholas –), 7132 Estree (Jehan de l’–), 20479 Estree (Pietre de l’–), 17611 Estrumel (Robert d’–), 17303 Eures (Jehan –), 21325 Eve, 13849, 13851 Evesque : personnage qui vient négocier la paix entre les Français et les Anglais à Bescherel, 2785 Euvreux (le conte –), voir Navarroys (le roy –) Evreux (Jehan d’–), 7310, 7465 Navarroys suisant, 7310 Evreux, 3441, 3649, 6354
Evreux, celle cité jolie, 4077 Evreuz, 4058 Evreuz, voir Evreux Fagon (le riche roy –), voir Portiugal (le roy de –) Faucon (– d’Aristac), voir Aristac (Faucon d’–) Fauton, 17124 Fé (Jaquemon –), 21003 Feliçon (Guillaume –), 2814, 2850, 10670, 10918, 11003 cellui de Bourdeaux, 10672 cellui Guillaume, 2815 Feleton, 11150 Feleton Guillaume, 11079 Felleton, 3326, 3329, 4021, 11050, 11127, 11159, 11193, 11228, 11249 Guillaume, 2838, 2843, 2847, 2855, 2858, 2870, 2907, 3334, 3337, 3464, 3468, 3471, 11152, 11201, 11229 Guillaume de Felleton le grant, 3463 Guillaume Feleton, 11087, 11137, 11144, 11172, 11187 Guillaume Felleton, 3357, 3364, 3378 Guillaume le sien maistre, 2822 Guillaume que l’on nomoit Felliton, 2879 senechal du Poitou, 10671 un chevalier angloys, 2812 vostre pere, 2916, 2924 vostre pere le guerrier, 2907 Felleton (Guillaume –), voir
- Index des lieux et des personnages Feliçon Felleton (Jehan de –), 10673, 11173 Felleton (Thomas de –), 18314 senechal de Bourdeaux, 18315 Felliton (Guillaume –), voir Felicon Femme (autre –) : seconde épouse du roi d’Epagne, fausse mère de Pietre, 6939 celle reyne, 8557 la dame, 6957 la noble roÿne, 6964 la roynne, 8555 la roÿne, 6966 la roÿne gentise, 6951 sa moillier, 6942 son espousee, 6945 une dame au corps gent, 8114 Femme (sa –) : femme du geolier de Bertrant, 12918, 12925 Femme Charles de Bloiz, 577 la dame, 6420 la femme Charlon, 6409 la mouillier Charles, 6388 ma dame sa femme, 1626 ma moullier, 5415 sa moillier, 2020, 5528 une dame, 576 vostre moillier, 5532 Femme de Charles V : épouse de Charles V, sœur du duc de Bourbon, 4925 Femme de Rogier David : femme de Rogier David, mère du viconte de Rouhen la mere du viconte qui Rouhen
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doit jugier, 3320 la vicontesse de Rouhen, 2994 mere fu au viconte de Rouhen, 2724 une dame, 2993 une dame qui fu de lignage vaillent, 2723 Femmes : personnages féminins qui suivent l’armée française, 4472 mes illectes, 4474 Fermecté (– du Pont de Douve), 5230, 5235 Fermectés (troys –) : les trois quartiers de Seville, 9324 Ferrant (Pietre –), 13236 Ferrant (– de Castre), 8295, 8353, 8448, 9175, 9244, 14808, 14824, 14827, 14840, 14932, 14962 dan Ferrant, 9287 Danferrant de Castre, 8868 de Castre dan Ferrant, 8382 Ferrant, 8354, 8890, 9193, 9278, 14968 Ferrant de Castre le felon, 12607 Ferrant (dam Pietre –), 16860 Fille (la – du roy) : ?, 9071 Fille (sa – au corps gent) : ille du roi d’Arragon, 7040 Fille (sa –) : ille du roi de Bel Marin, 14513 Fille (une –) : ille de Pietre, 9242, 9267, 9272 la belle au corps molé, 9269 Fille (une –) : ille de la reine et
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- Index des lieux et des personnages -
du roi d’Espagne que l’on échange avec Pietre à la naissance, 6964, 6969, 7002 sa ille jolye, 8558 une ille, 8556 une illette, 8116 Fille : femme d’Edouart d’Angleterre, ille de la comtesse de haynaut et nièce du roi Philippe de France la ille de la dame, 559 une moult vaillant dame, 560 Fille : ille du roi de Bel Marin qui doit épouser Pietre, 15406, 15457 Filles (deux belles –) : illes du roi de Bel Marin, 15220 des deux, 15226 les pucelles, 15222 ses illes pleines de grant beauté, 15235 filles (troys – de roy) : illes du roi d’Espagne, sœur d’Henry et de Pietre, 7780 illes, 8115 ses .iii. dames, 7797 ses serours, 7785 ses troys serours, 7782 ses troys seurs, 7794 Filz (son –) : ils du roi d’Arragon, 7040 Filz (son jeune –) : ils du prince de Galles, 10614 cel enfant la, 10615 mon ilz, 12357 Filz (un –) : ils du Besgues de Villaines, 15997, 16004
Filz Guillaume Feliçon, 2891 beaux ilz, 2915 l’enfant, 2895, 2906, 2913 le jeune enfant, 2897 un jeune enfant, 2890 Flamens : les Flamands, 544 Flammens, 2621 Flammens, voir Flamens Flandres (le bastart des–), 19170 Flandres, 21503 Flandres la peuplee, 4098 Floron (Pierre –), 15326, 15348 Fontaines (le sire de –), 17301 Fontenay (– l’abbatu), 20294 Fontenelles (abbaÿe de –), 553 Fonteny (Giraut de –), 5874 Fontigny (Garnier de –), 5394 Forest : forêt près de Cordonnes où se cache le roi Pietre, 9056 ceste fourest, 9147 des bois, 9199 la fourest, 9139 une fourest, 9128 Forgeray : Fougeray, en Bretagne, 701, 770, 833, 845, 956, 1026, 1084, 1661 .i. chastel bel et gent, 1661 le chastel qui resplent, 701 Forgeray : Fougeray, en Bretagne : Fougeray, en Bretagne, 825 Fortune, 36, 8987, 8994, 8995,
- Index des lieux et des personnages 10423, 10750, 15051 Fortune merveilleuse, 12199 Fouqueré : bourjois de Poitiers, 19944 Fourest : bois aux alentours de Forgeray, 637 Fourest : bois aux alentours de Rennes, 1143 Foy (conte de –), 10978, 20086 Foys (conte de –) gentilz conte de Foy, 16987 le bon conte ?, 16969 le bon conte de Foys, 16972 le conte, 16976, 16994 Foys (la conté de –), 16967 France (le mareschal de –), voir Odrahan (mareschal d’–) France (le sire de –), 16697 France, 9, 11, 147, 539, 540, 557, 565, 608, 1037, 1141, 1323, 2027, 2034, 2036, 2043, 2071, 2076, 2615, 2656, 2667, 2908, 2939, 2943, 3409, 3432, 3437, 3452, 3545, 4026, 4040, 4047, 4593, 4603, 4794, 4795, 4828, 4838, 4856, 4915, 5549, 6270, 6310, 6319, 6335, 6372, 6381, 6415, 6425, 6486, 6496, 6534, 6584, 6660, 6702, 6773, 7060, 7062, 7076, 7083, 7137, 7211, 7278, 7332, 7360, 7410, 7421, 7429, 7462, 7481, 7505, 7559, 7736, 7833, 8034, 8361, 8686, 9722, 9733, 9842,
341
9969, 10018, 10028, 10055, 10553, 10854, 11098, 11433, 11482, 11774, 12053, 12218, 13007, 13437, 13445, 13548, 13551, 15151, 15304, 15387, 16057, 16351, 16658, 16669, 16696, 16701, 16720, 16812, 16814, 16851, 16856, 16865, 16884, 16887, 16914, 17324, 17372, 17487, 17627, 18102, 18369, 18390, 18409, 18414, 18467, 18618, 19093, 19874, 19946, 20066, 20079, 20103, 20321, 20390, 20473, 20519, 20558, 20599, 20627, 20915, 20917, 21514, 21578, 21724, 21729, 21763, 21765, 21768, 21794, 21798, 21850, 21905, 21923, 21941, 21945 de France l’erité, 21726 de France la peuplee, 17603 de France le païs, 21759 de France le royon, 6480 Doulce France, 21668, 21852 doulce France, 13836 du royaume de France, 14002 en France actuelle, 13111 France droiturere, 11986 France l’éritier, 17434 France la garnie, 17734, 21510 France la majour, 16963, 20801 France le païs, 7600, 19148
342
- Index des lieux et des personnages -
France le païs droiturier, 13610 France le royon, 3658, 16728, 16918 le païs de France, 7167, 7303, 13108 le plus beau jardin qui fust au irmement, 2046 le roiaume, 5240 le roiaume de France, 16905 le rouiaume de France, 7420 le royaume de France, 16662 mon roiaume, 17447 nostre roiaume, 17438 ou païs de France, 9990 ou roiaume de France, 15381 ou roiaume des Frans, 4037 pour tout l’avoir de France, 1132 roiaume de France, 7493 sa terre jolye, 4661 Françoys (les – renoiéz), 19523 Françoys, 34, 641, 1255, 1396, 2124, 3561, 3632, 3694, 3695, 3812, 3832, 3855, 3864, 3920, 3933, 4055, 4177, 4257, 4260, 4268, 4353, 4392, 4398, 4473, 4608, 4673, 4688, 4690, 4716, 4747, 4769, 4842, 4846, 4922, 5036, 5603, 5619, 5718, 5719, 5744, 5791, 5809, 6016, 6499, 8250, 8411, 9695, 10858, 11041, 11057, 11161, 11610, 16855, 17236, 17858, 18115, 18162, 18348, 18379, 19041,
19539, 19712, 19718, 19723, 19727, 19769, 19773, 20404, 20627, 21413 Franchequin, 20988 François, 1322, 1372, 1413, 1867, 2219, 2743, 3914, 5160, 5730, 5789, 5799, 5831, 5850, 8307, 11155, 11496, 14745, 14839, 14855, 14883, 15151, 16869, 17130, 17206, 17704, 17836, 17845, 18039, 18046, 18054, 18069, 18080, 18113, 18124, 18132, 18142, 18148, 18164, 18231, 18274, 18328, 18382, 18485, 18497, 18499, 18541, 18556, 18560, 18569, 18660, 18671, 18681, 18685, 18721, 18739, 18760, 18763, 18838, 18861, 18866, 18875, 18883, 18886, 18904, 18945, 18978, 18983, 19005, 19021, 19026, 19028, 19038, 19056, 19059, 19072, 19091, 19119, 19122, 19125, 19182, 19207, 19219, 19256, 19258, 19270, 19277, 19287, 19312, 19356, 19364, 19447, 19453, 19549, 19602, 19606, 19619, 19639, 19693, 19696, 19704, 19710, 19815,
- Index des lieux et des personnages 19933, 19938, 19953, 19981, 19993, 20016, 20023, 20026, 20030, 20057, 20229, 20232, 20236, 20242, 20257, 20259, 20262, 20270, 20275, 20293, 20304, 20344, 20356, 20388, 20590, 20623, 20626, 20635, 20658, 20672, 20674, 20686, 20688, 20689, 20754, 20758, 20769, 20785, 20793, 20797, 20836, 20862, 20871, 20875, 20881, 20933, 20960, 20961, 20970, 20987, 21020, 21045, 21059, 21069, 21070, 21080, 21091, 21109, 21112, 21120, 21129, 21132, 21144, 21149, 21157, 21170, 21173, 21181, 21186, 21234, 21240, 21245, 21257, 21268, 21301, 21304, 21318, 21327, 21334, 21339, 21346, 21348, 21360, 21367, 21373, 21378, 21388, 21461, 21473, 21478, 21482, 21486, 21493, 21504, 21506, 21508, 21510, 21541, 21542, 21549, 21556, 21568, 21580 François isnel, 19616 nobles François, 19015 nostre françoise gent, 21456
343
noz François, 21238, 21258, 21322, 21500 noz François seignoris, 21237, 21250 noz gentils François, 18223 Frans, 4037 Frennes (le sire de –), 17396 le bon sire de Frennes, 17398, 17456 Frere (son – germain) : frère du roi de Chypre, 7398, 7404 Frere (son –) : frère de Jehan de Chando, 18859 du fere Chando, 18895 frere, 18865 son fere, 18873, 18896 Frere : frère du duc d’Anjou, 17043 Calerant, 17075 Calerent, 17126 Calerent le frere du bon conte, 17147 le bon frere du bon conte, 17074 le frere au conte, 17046 le sire, 17053 Freres les deux frères de Bertrant les autres deux, 84 ses deux autres freres, 112 ses ilz, 81 Frisons : habitants de la Frise, 2622 Fronteboys (le vassal de –), 4296 Gadifer, 21906 Gait (– de Chastelayraut)
344 la la la Gait
- Index des lieux et des personnages -
gait, 18996 gaite, 19001, 19009 gaite regnois, 19014 (le – de la nuit) : ensemble des sentinelles de Bonnom, 20696 Gait : sentinelle de l’armée anglaise lors du siège de Rennes, voir aussi Gueste, 1393 Gait : sentinelle de l’armée anglaise lors du siège de Rennes, voir aussi Gueste et Gaite, 1149 Gal (le sire de –), 14210 Gales (Yvain de –), 18338, 20315 yvain cellui de Gales, 21519 Yvain qui deüst les Galois justicier, 21575 Gales (prince de –), 2032, 6469, 7192 au prince des Galois, 7280, 9050 Galice, 12606 Galices, 14973 Galles (prince de –), 4855, 5587, 9747, 10851, 11995, 13320, 13331 au bon prince, 12049, 13319 au prince, 9740, 9909, 10469, 10473, 10568, 10575, 10582, 11818, 12035, 12133, 12160, 12490, 13479, 13616, 14157, 19940, 19942, 19945, 20124 au prince de Gales, 14264, 15319
au prince seignory, 13580 au prince souisant, 12052 au prince suisant, 12099, 12109 au riche prince, 11285 ce prince, 10683 cestui prince, 9875 du fort prince, 13079 du prince, 10397, 10859, 10970, 11238, 11341, 11444, 11481, 12158, 12266, 12507, 12932, 13073, 13582, 13623, 13635, 13638 du prince vaillant, 11023 gentilz prince, 11819 le gentilz prince, 10814 le prince, 5588, 9752, 9768, 9879, 10172, 10174, 10184, 10203, 10398, 10401, 10408, 10421, 10424, 10430, 10474, 10477, 10480, 10517, 10537, 10545, 10561, 10606, 10616, 10626, 10628, 10633, 10667, 10678, 10690, 10709, 10742, 10912, 10920, 11251, 11256, 11300, 11338, 11345, 11379, 11380, 11401, 11429, 11430, 11505, 11769, 11776, 11788, 11791, 11799, 11829, 12026, 12036, 12055, 12123, 12126, 12135, 12180, 12183, 12223, 12271, 12286, 12287, 12306, 12365,
- Index des lieux et des personnages -
le
le le le le le le le
12377, 12381, 12389, 12403, 12438, 12443, 12492, 12512, 12522, 12524, 12555, 12778, 12858, 12904, 12922, 13081, 13099, 13109, 13271, 13279, 13285, 13296, 13308, 13327, 13378, 13384, 13394, 13399, 13403, 13406, 13413, 13486, 13514, 13525, 13529, 13536, 13540, 13554, 14189, 14197, 14240, 14248, 14253, 14260, 16868, 18311, 18857, 19939 prince de Gales, 9796, 9874, 9882, 9919, 10170, 10450, 10456, 10594, 10602, 10712, 10765, 10799, 10905, 10954, 11019, 11077, 11472, 11632, 11765, 11814, 11850, 12064, 12088, 12145, 12151, 12190, 12270, 12413, 12415, 12498, 12549, 12662, 12668, 12737, 13002, 13004, 13019 prince de Gales a la clere façon, 12441 prince de Galles, 12494 prince de Galois, 10405 prince de Galoys, 9757 prince de monde qui plus fait a louer, 9741 prince de renon, 14234 prince des Galois, 10840,
345
11483, 12015, 12324, 12473, 13118, 13276 le prince des Galoys, 10563, 10974 le prince gentilz, 12519 le prince membré, 14275 le prince notré, 19947 le prince seignoris, 10186 le prince senné, 14268 le prince souisant, 18308 le princes, 13450 monseigneur le prince, 13355 prince, 12177, 12537, 14246 Galois (prince des –), voir Gales (prince de –) Galois, 21575 Garde : personnage qui essuie les murs de Vallongues après chaque projectile jeté par les Français, 5048 guecte, 5056 Garnier (– de Fontigny), voir Fontigny Gascogne, 13244 Gascoigne, 15284 Gascons, 7292 Gascoins, 10979 Gastine, 18094 Gastinois, 17178 Gaultier (– Huet), 2745, 3333, 6154, 6168, 6248, 7134, 7158, 7199, 7312, 7466, 8146, 8200, 8489, 8772, 8969, 9607, 9631, 9634, 10188, 10703, 11363, 11720, 11862, 12021 au conte le fel Huet, que l’on appeloit Gaultier, 3346
346
- Index des lieux et des personnages -
Gaultier Huon, 6113 Gaultier que on dit Huet, 10445 Gaultier, le sournom de Huet, 3331 Huet, 7200 le bers Gaultier Huet, 11868 le chevalier faulx ?, 3373 un cousin Canole, 3331 un trés bon chevalier, 3333 Gauvaign, 381 Genes, 11065 Gennevieve (Saincte –), 17376 Gennevois, 10977, 10984 Genevois, 10903, 11065 Genevoix, 11592, 11978 Gennevoix, 11008 Gentilz (Olivier –), 15996 Olivier le bon ?, 16004 George (Saint –) : cri de guerre des Anglais, 21470 George (saint –), 10646, 21040, 21307, 21392 Gilles (Richart –), 19410 la cappitaine, 19485 leur capitaine gent, 19398 Gironde, 12556 Gironde : leuve, 2031 Glainsement (– l’alemant), 4697 Glisson (Olivier de –), voir Clisson Godeffroy (– de Billon), voir Billon (Godefroy de –) Godeffroy, 14 Godefroy (– d’Anequin), voir Anequin Godefroy, 21773
Godefroy de Billon, 21884 Godefroy le savant, 10644 le duc Godefroy, 10992 Gonssalle (Pietre –), 13241 Gournay (Mayeu de –), 7131, 10076, 10442, 10702 cellui Englois, 10082 l’Anglois, 10085, 10128 l’Englois, 10101, 10104, 10108, 10113, 10135, 10142, 10164 l’Engloys, 10150 le chevalier engloiz, 10130 Mahieu, 9371, 9391, 9911, 10024, 10025, 10042 Mahieu de Gournay, 9209, 9355, 9358, 9362, 9384, 9441, 9590, 9606, 9632, 9775, 9815, 9851, 9862, 9878, 9899, 9928, 9957, 9960, 9966, 9978, 9984, 9989 Mahieu, le noble chevalier, 9906 Mahyen de Gournay, 8197 un chevalier qui fu d’Angleterre le lee, 9353 Grans, voir Enfans Grantson (Thomas de –), 17228, 17269, 17281, 17701, 17728, 18014, 18036, 18055, 18057 Thomas, 18016, 18017, 18025 thomas, 18061 Thomas cellui de Grantson, 17744 thomas cellui de Grantson, 18021 Thomas de Grantson l’avenant,
- Index des lieux et des personnages 17724 Thomas de Grantson le vaillant, 18042 Thomas qui de Grantson tenoit la seignorie, 17988 Grantville (Guillaume de –), voir Trenchant Grenade (le roy –), 7503, 15461 Grenade (le roy de –), 9225 le felon mescreant, 9225 Grenade (roy de –), 6711, 9010, 9500, 15154, 15260 Grenade, 6519, 6606, 6706, 6711, 7219, 7386, 7496, 7562, 7766, 8915, 8952, 9499, 9685, 9834, 10415, 10579, 13264, 15487 celle noble contee, 6519 ou pais de Grenade, 15524 Grenadoys, 15193 Grijois, 15214 Guef : gué près d’Alroy, 5649 Guehant, 21016 Guerloiz : habitants du pays de Gueldres situé au dessus du Hainaut, 546 Guesclin : territoire appartenant à la famille Du Guesclin ?, 780 Guesclin (Bertrant du –), 292, 771, 836, 1029, 1068, 1110, 1153, 1163, 1350, 1365, 1402, 1421, 1450, 1493, 1507, 1612, 1760, 1837, 1846, 1871, 1951, 1978, 2114, 2494, 2778, 3076, 3151, 3487, 3530,
347
3564, 3574, 3589, 3679, 3698, 3740, 3840, 3860, 3866, 3916, 3965, 3980, 4043, 4067, 4091, 4172, 4287, 4320, 4400, 4576, 4590, 4631, 4774, 4790, 4830, 4895, 4952, 4988, 5062, 5596, 5798, 5933, 5953, 6074, 6151, 6577, 6609, 7096, 7108, 7146, 7423, 7520, 7557, 7617, 7689, 7835, 7844, 7923, 7965, 8002, 8041, 8169, 8273, 8302, 8360, 8468, 8491, 8959, 8983, 9061, 9160, 9173, 9610, 9682, 9772, 9801, 9810, 9826, 9937, 10212, 10277, 10314, 10411, 10439, 10698, 10829, 10855, 10926, 11091, 11110, 11179, 11189, 11198, 11220, 11227, 11246, 11304, 11320, 11333, 11497, 11526, 11577, 11607, 11620, 11703, 11711, 11877, 11899, 11942, 12023, 12042, 12337, 12478, 12658, 12769, 13024, 13112, 13326, 13330, 13714, 13755, 13812, 13821, 13878, 13904, 13927, 13949, 13980, 14036, 14141, 14232, 14298, 14538, 14625, 14633, 14655, 14725, 14818, 14838, 14915, 14936, 14940,
348
- Index des lieux et des personnages 14979, 15301, 15306, 15386, 15429, 15463, 15475, 15536, 15605, 15641, 16124, 16559, 16561, 16651, 16801, 17096, 17312, 17379, 17463, 17564, 17661, 17966, 18096, 18110, 18155, 18165, 19221, 19244, 19276, 19623, 19646, 20214, 20311, 20478, 20609, 20617, 20980, 21054, 21061, 21219, 21274, 21417, 21449, 21518, 21652, 21764, 21867 .i. bon berton, 13485 a vassal redoubté, 1730 au ber Bretrant, 7273 au connoistable, 19136 au gentilz Bertrant, 18182 au noble Bertrant, 16849, 17591 au vassal Bertrant, 8590 au vassal Bretrant, 15151 beau ilz, 514 beau sire, 2236 bers, 2231 Bertant de Guesclin, 3583 berton gentilz, 13594 Bertran, 2581 Bertran du Guesclin, 2231 Bertrand, 36, 43 Bertrand du Guesclin, 8, 46, 257 Bertrand le gentis, 329 Bertrand le noble pasteïs, 333 Bertrand mon ilz, 659
Bertrans du Guesclin, 10303 Bertrant, 26, 48, 82, 85, 97, 100, 103, 124, 125, 161, 192, 198, 210, 212, 213, 229, 230, 237, 242, 245, 251, 253, 256, 261, 266, 3466 Bertrant a l’aduré talent, 17690, 21103, 21457, 21660 Bertrant au cler contenenment, 5852 Bertrant au corps ber, 6362 Bertrant au corps gent, 7384, 17986 Bertrant au corps gentilz, 19663 Bertrant au corps membré, 21733 Bertrant cuer de lÿon, 20536 Bertrant de Guesclin, 20633 Bertrant du Guesclin qui tant fu alosé, 5006 Bertrant l’aduré, 9266, 21136 Bertrant l’enragé, 4411 Bertrant le baron, 2410 Bertrant le ber, 9852, 14106, 15097, 16241, 18951, 20416 Bertrant le bon guerrier, 13603 Bertrant le chevalier, 1580, 14906, 17013 Bertrant le connoistable digne, 18936 Bertrant le courtois, 1690 Bertrant le felon, 8888 Bertrant le fol, 8324 Bertrant le gentilz, 799, 818, 2051, 2296, 4062, 4765,
- Index des lieux et des personnages 6059, 8270, 13936, 21590, 21744 Bertrant le gentilz et le bel, 3384 Bertrant le gentis, 4959 Bertrant le guerrier, 1682 Bertrant le hardy, 3510, 6447, 13564 Bertrant le louhé, 8444 Bertrant le naturau, 3113 Bertrant le noble combatant, 16199, 18350 Bertrant le poesteiz, 2078 Bertrant le poestiz, 4957 Bertrant le preux, 21886 Bertrant le princer, 16998 Bertrant le vaillant, 2055 Bertrant le vaillent, 10692 Bertrant le vassal, 3165 Bertrant qui tant fu de hault pris, 21737 Bertrant, le chevalier louhé, 7366 Bertrant, le ilz de chastelaine, 21648 bon chevalier fu et de bonne lignie, 4090 bon escuiers, 453 Bretran, 2813 Bretran du Guesclin, 2808 Bretrant, 2922, 2929, 3464, 6137, 6193, 7181, 7184, 7195, 7282, 7674, 7731, 7875, 7916, 8278, 8462, 8502, 10161, 10766, 11093, 11096, 11100, 13728, 13934, 14747, 14924, 15689, 15690, 15805,
349
15821, 16655, 16870, 17167, 17367, 17502, 17666, 17873, 18059, 18100, 18245, 18441, 18944, 19206, 19797, 19798, 19917, 21640 Bretrant au corps puissant, 16664 Bretrant du Guesclin, 6307, 6314, 6359, 7651, 7887, 9505, 9619, 9847, 15114, 18941 Bretrant du Guesclin le mal Berton françoys, 15207 Bretrant le baron, 7940 Bretrant le ber, 16659 Bretrant le preux et le courtois, 6506 Bretrant le preux et le gentilz, 7599 Bretrant mon chevalier, 6321 brigant qui les marchans espie, 1573 cappitaine de Pontorson, 3643 ce bon homme d’armes, 3618 ce deable Bertrant, 16293, 16342 ce deable Bretrant, 8355, 18227 ce deable qui a cuer de serpent, 4987 ce felon oisel, 19587 ce noble chevalier, 3613 cel aigle, 19596 cel aventureux, 498 cellui bon escuier de Bertaigne la lee (ref. à Bertrant ?), 411 cellui du Guesclin, 3032
350
- Index des lieux et des personnages cellui enfant, 144, 167 cest enfant, 137 cestui chevalier, 15385 cet aigle, 19588 chetif garson, 201 chevalier, 11926 cil du Guesclin, 21908 connoistable de France, 2071, 17734 connoistable suis, 20067 du ber Bertrant, 15311, 18289 du bon connoistable de France, 21763 du felon Bertrant, 15181 du meilleur qui fu a mon devis, 2075 du noble Bertrant, 7376, 7716, 17352, 18475 du noble Bretrant, 16151 du plus vaillent qui soit en tout le monde, 21786, 21795 du preux connoistable françoys, 21949 du vaillant connoistable, 21828 du vassal, 2076 Enfant, 99 Escuier, 1003 estournel, 3288 frans chevaliers hardiz, 8275 Guesclin, 3293, 6130, 12067, 18222, 19281, 19818, 21264 Guesclin le vaillant connestable, 21830 Gueslcin, 21820 homme de Dieu, 2968, 2975 il est gentilz homs de bon sang engenrré, 471
l’aigle, 7843 l’enfant, 54, 153 l’enfant gentilz, 75 l’escuier, 461, 465 l’estourneau, 3298, 3300 le baron, 12494 le ber Bertrant, 6499, 17725 le bers, 1737, 21655 le bers Bertrant, 776, 1603, 1796, 2797, 3278, 11140, 17941 le bers gentilz, 310 le bers Guesclin, 11898 le bon baron, 21868 le bon Berton, 21818 le bon Bertrant, 11936 le bon Bertrant du Gueslcin, 21950 le bon connoistable de France, 21905, 21923, 21941 le bon rollans, 21925 le bon vassal Bertrant, 14530 le chevalier, 6231, 13338 le chevalier eslis, 12048 le chevalier gentilz, 6228 le chevalier prisé, 3046 le chevalier vaillant, 3293 le connnoistable bon, 20534 le connoistable, 19089 le connoistable ber, 19244 le connoistable Bertrant le bon guerrier, 21574 le connoistable bon, 19623 le conte Bertrant, 8688, 8715, 8912 le Guesclin, 15627 le hardy, 2922 le jeune valeton, 97
- Index des lieux et des personnages le marchiz, 773 le meilleur chevalier qui oncques portast espee, 9802 le noble Bertrant, 1743, 4110, 6116, 6124, 10739, 14135, 15744, 15977, 21907 le noble Bertrant le senné, 15792 le noble Bretrant, 2691, 9608 le noble guerroier, 3339 le noble pongneour, 16973 le plus preu, 21619 le preux, 2922 le preux et le vaillant connoistable, 21866 le sien ilz, 226 le vaillent pelerin, 1446 le vassal, 13620 le vassal Bertrant, 8187 le vassal qui tant fu renommé, 1607 let chevalier, 13591 malvait enfant, 657 mon homme, 3621 pouvre chevalier, 2170 preux conte, 3301 son bon connoistable de France, 20917 un antécris, 17858 un Bertrant qui a nom Du Guesclin, 15875 un chevalier, 13618 un ier vassal, 1680 un let berruier, 13592 un loial chevalier, 12495 un tel chevaliers, 2072 vassal esleu, 1762 vassal gentilz et conquerant, 72
351
villain, 731 Guesclin (Regnaut du –) : père de Bertrant, 52 le pere, 57, 233 le sires du Guesclin, 413 mon pere, 375, 392 son pere, 250, 259, 282, 286, 308, 326, 477, 485, 512, 525 son pere Regnalt, 222 son seigneur, 236 vostre pere, 254, 268 Guesclin (Bertrant du –) le palazin, 21969 le valereux chevallier et courtoys, 21956 Guesclin : cri de guerre de Bertrant, 174, 884, 943, 957, 1117, 1441, 3124, 4577, 4719, 5293, 8227, 11223, 14636, 14656, 14872, 15505, 15992, 18040, 19336, 21391, 21426 Gueste : sentinelle de la ville de Forgeray, 902, 919 Gueste : sentinelle de la ville de Mante, 3756 Guienne (la – gent), 13845 Guienne, 6471, 6484, 7281, 9746, 10661, 10714, 16678, 18310, 18469, 19151, 19627, 20871, 20977, 21585, 21808 Guienne la grant, 16676 Guienne la lee, 9793 Guiennes, 10655 la grant duché, 18311
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- Index des lieux et des personnages -
la grant Guienne, 18946 le duché de Guienne, 4028 un païs bel et bon, 6484 Guiennois, 11428, 18555 Guigneux (Alain de –), 18750 cest archier, 18749 un Berton, 18745 Guillaume de Felicon, voir Felicon Guillaume (– de Lonnoy), voir Lonnoy Guimgamp, 2921, 2927, 2944, 2981, 3011, 3016, 3030, 3042, 3072, 3091, 3119, 3192, 3221, 6400 Guimguant, 5369 Guimgant, voir Guimguamp Guischart (– de Normendie), voir Guischart (– le Normant) Guischart (– le Normant), 10703, 11073 Guischart de Normendie, 10836 Guistemore (Vastequin de –), 20893 Guy (– le Normant), 11039 Halcourt (celle de –), voir Quarte Handion, 21906 Hanequerque (Loÿs de –), 4098 Hangéz (Monseigneur de –), voir Hangiet (Monseigneur de –) Hangiers (le sire de –), voir Hangiet (Monseigneur de –) Hangiet (Monseigneur de –),
17237 le chevalier baron, 17259 le sire de Hangiers, 17251 Monseigneur de Hangéz, 17336 Hanier : laboureur au service de la famille du Guesclin, 249, 250 Hannuers : habitants du Hainaut, 545 Hanuier, 7071 Hennoiers, 2621 Hanuiers, voir Hannuers Harcourt (le conte de –), 6374 Harpedenne : soldat anglais, 2744 Hasquet (Janequin –), 21004, 21042 Haubert (le duc – de Haynaut), 4923 Haye : portion de forêt aux alentours de Cocherel, 4711, 4714, 4728 Haynaut (contesse du –) : comtesse du Haynaut, sœur du roi Philippe de Valloys devenu abbesse de Fontenelles abbasse estoit devenue, 552 ceste dame, 556 la dame, 559 la dame de Haynaut, 563 seur fu au roy Philippe, 554 une vaillant contesse qui en Haynaut regna, 551 Haynaut (le duc Haubert de –), voir Haubert Hayraut (un – englois) :
- Index des lieux et des personnages messager de Chisec, 21277, 21298 Hayraut : messager de Bertrant, 7109, 7120, 7141, 7145 gentilz hayraut, 7151 l’ayraut, 7150, 7163 le heraut, 7124 Hayraut : messager du comte de Monfort qui propose un traité de paix à Charles de Blois avant la bataille d’Alroy, 5462, 5466 Heraut, 5508, 5515 l’ayraut, 5579 le heraut, 5507, 5517, 5583 Hayraut : oicier chargé de transmettre un sauf-conduit à Bertrant lors du siège de Rennes, 1538 ce hayraut, 1584 gentilz hayraut, 1588 hayraut, 1567 heraut, 1574 heraux, 1551 l’ayraut, 1834 le hayrault, 1578 le hayraut, 1550, 1554, 1556, 1558, 1572, 1586, 1590, 1688, 1710 le heraut, 1548 le heraux, 1543, 1826 Hayraut : personnage chargé de porter la demande de bataille des Français aux Anglais devant Cocherel, 4308, 4313, 4315, 4319 Gentilz heraut, 4339 le heraut, 4337, 4347
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Hayraut : personnage qui porte la demande de paix aux Français de la part du Castal près de Cocherel, 4500, 4509, 4512 gentilz heraut, 4528 le bon hayraut legier, 4502 le heraut, 4536 Hayraut : personnage qui prévient les Français de l’arrivée des Anglais près de Cocherel, 4225 Hector, 21771 Ector, 21883 Helayne (saint –), 19430 Helie : bourjois de Poitiers, 19961 Helie : secrétaire de Bertrant, 17758 Heliot : autre nom pour Daviot ?, 9291, 9335 Hendon, 2113 Hennoiers, voir Hannuers Henris, 18890 Henry (– de Pierrefort), voir Pierrefort Henry : roi d’Espagne roy Henry, 12262 Henry : roi d’Espagne, 2064, 6605, 6614, 6619, 6628, 6635, 6644, 6649, 6675, 6690, 6694, 6700, 6721, 6745, 6790, 6794, 6817, 6820, 6826, 6900, 6902, 6927, 6937, 6978, 6982, 6985, 6989, 6993, 7017, 7045, 7046, 7050, 7056, 7713, 7720, 7744, 7779, 7781, 7786, 7800, 7932,
354
- Index des lieux et des personnages 7937, 7947, 7957, 7963, 8020, 8025, 8027, 8033, 8040, 8081, 8102, 8104, 8130, 8131, 8272, 8279, 8287, 8303, 8323, 8380, 8444, 8455, 8502, 8571, 8590, 8634, 8637, 8649, 8667, 8731, 8734, 8741, 8748, 8750, 8755, 8766, 8801, 8803, 8881, 8916, 8954, 9074, 9092, 9116, 9176, 9189, 9217, 9229, 9233, 9251, 9266, 9268, 9299, 9307, 9322, 9392, 9394, 9472, 9478, 9479, 9485, 9504, 9532, 9588, 9646, 9654, 9657, 9695, 9729, 9820, 9876, 9933, 9945, 10211, 10235, 10244, 10280, 10282, 10376, 10692, 10710, 10828, 10838, 10892, 11006, 11029, 11196, 11281, 11422, 11524, 11651, 11681, 11685, 11691, 11708, 11755, 11947, 11959, 11961, 11962, 11975, 12226, 12249, 12260, 12569, 12632, 12633, 12642, 12651, 12666, 12670, 12671, 12763, 12780, 12865, 12893, 12939, 12941, 12990, 13044, 13049, 13065, 13131, 13171, 13178, 13204, 13239, 13246, 13262, 13418, 13460, 13542, 14346,
14373, 14416, 14462, 14542, 14609, 14669, 14837, 14988, 15162, 15440, 15546, 15607, 15742, 15761, 15792, 15877, 15951, 16049, 16076, 16096, 16105, 16115, 16223, 16271, 16319, 16357, 16505, 16544, 16554, 16575, 16589, 16612, 16629, 16646, 16746, 16766, 16809, 16872,
14389, 14427, 14473, 14567, 14641, 14727, 14847, 15103, 15180, 15462, 15587, 15683, 15744, 15764, 15866, 15886, 16016, 16071, 16081, 16097, 16110, 16116, 16224, 16294, 16341, 16496, 16512, 16549, 16569, 16576, 16602, 16615, 16630, 16654, 16760, 16773, 16815, 16925
14414, 14430, 14536, 14590, 14643, 14793, 14987, 15115, 15300, 15535, 15603, 15704, 15746, 15771, 15869, 15914, 16019, 16072, 16088, 16100, 16113, 16197, 16240, 16310, 16346, 16500, 16541, 16551, 16572, 16580, 16609, 16619, 16640, 16713, 16762, 16791, 16842,
- Index des lieux et des personnages au ber Henry, le noble combatant, 6912 au noble roy Henry, 12679, 16395 au riche roy Henry, 16840 au riche roy Henry d’Espaigne, 13197 au roy, 9443 au roy Henry, 9098, 9100, 9648, 9852, 10740, 13191, 13222, 14305, 14368, 14494, 15340, 15599, 15601, 15692, 16345, 16468, 16475, 16556, 16588, 16753 au roy Henry d’Epaigne, 9301 Bastart, 6776, 6785 bastart renoié et traitre larron, 16029 beau sire, 7733 ce conte Henry, 6608 ce faulx bastart, 14517 cellui Henry, 6610 du bastart oultrageux, 10490 du faulx bastart d’Espaigne, 15205 du roy, 13164, 15424, 15425 du roy Henry, 8975, 12610, 15097, 15537 felon bastart, 14560 franc noble roy sachant, 11953 franc roy, 11907 franc roy d’Espaigne, 11292 gentilz roy, 16480 gentilz, noble roy, 11918 Henriz, 8626 Henrry le felon, 7892 Henry, 6782
355
Henry a la clere façon, 16006 Henry au ier contenement, 12210 Henry d’Espaigne, 12795 Henry l’aduré, 15834 Henry le bastart, 8363, 9771, 14714, 15856 Henry le combatant, 8692, 15428, 16848 Henry le droit hoirs, 6973 Henry le membré, 16789 Henry le noble guerrier, 7731 Henry le noble roy vaillant, le large, le courtoys, le doulx et le vaillant, 12143 Henry le nouvel roy, 8688 Henry le pongneour, 16101 Henry le princer, 8086 Henry le puissant, 9215, 16001 Henry le pullent, 15881 Henry le riche roy de nom, 16711 Henry le roy de grant renom, 12742 Henry le roy vaillent, 10697 Henry le savant, 13060 Henry le tirant, 15150 Henry le traitre prouvé, 14817 Henry son frere, 7679 Henry vostre frere le quoistron, 8877 Henry, le bon roy couronné, 15390 Henry, le riche roy de nom, 16025 larron bastart, 14557 le bastart, 10531 le bastart Henry, 7026
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- Index des lieux et des personnages le le le le le le le le le le le le le le le le le le le le le
le le
bastart mon frere, 9673 bastart vostre frere, 8984 bers Henry, 6642, 8655, 8737 bon Henry, 10291 bon roi Henry, 9312 bon roy, 12256 bon roy couronné, 13071 bon roy droiturer, 12656 bon roy Henry, 8498, 9602, 11875, 15696, 16192 bon vassal Henry, 6696 conte, 8459 conte gentilz a la chiere hardie, 8693 conte Henry, 6933, 7013, 8560 faulx bastart, 10497 faulx Henry, 12081 Henry, 15806 noble roy, 8841 noble roy Henry, 13986, 15911 pouvre roy, 12701 riche roy Henry, 12995, 16334 roy, 8844, 8846, 8919, 8963, 9105, 9114, 9117, 9234, 9398, 10199, 10345, 10707, 10738, 11714, 11925, 11936, 12252, 12635, 12740, 12755, 12787, 12788, 12801, 12978, 12986, 12999, 13032, 13035, 13039, 14431, 14459, 14741, 14991, 15448, 16488 roy ?, 9295 roy d’Espaigne, 14586
le roy Henry, 7710, 8659, 8725, 9080, 9103, 9113, 9122, 9809, 9819, 9887, 10156, 10163, 10179, 10191, 10604, 10797, 10820, 10864, 10867, 11108, 11332, 11597, 11645, 11709, 11890, 11903, 11933, 11946, 12185, 12639, 12648, 12650, 12680, 12682, 12688, 12694, 12698, 12700, 12721, 12722, 12751, 12785, 12803, 12811, 12851, 12960, 12972, 12991, 13069, 13137, 13140, 13144, 13223, 13956, 13959, 14132, 14301, 14328, 14387, 14397, 14426, 14446, 14447, 14555, 14615, 14624, 14724, 14730, 14732, 14953, 15165, 15337, 15414, 15612, 15645, 15700, 15805, 15837, 16080, 16231, 16534, 16735, 16782, 16800, 16893 le roy naturé, 12781 le roy, le preux et le senéz, 11282 me noble roi Henry, 8839 mon frere, 6655, 7852 mon frere bastart, 9002 mon frere Henry, 7845 mon frere le bastart, 10436 monseigneur qui roy est appellé, 13087
- Index des lieux et des personnages noble roy, 9108, 16476 paumier, 12650, 12663 Pelerin, 12690, 12761 pellerin, 12643, 12647 Roy d’Espaigne, 13544 roy Henrry, 33 roy Henry, 6363, 8912, 9060, 9107, 9203, 9248, 9426, 9428, 10227, 11703, 12488, 12543, 12636, 12760, 12968, 12984, 12997, 13202, 13214, 13234, 14300, 14617, 14769, 15635, 15757, 15766, 16244, 16515, 16565, 16754, 16922 roy Henry d’Espaigne le noble guerrier, 14937 roy Henry le hardy au heaume luisant, 11948 roy Henry le puissant, 12147 roy souisant, 11944 roys Henry, 12966 Sire de Triste Mare, 7949 son fere, 6835 son frere, 7703, 7774 un bastart, 15240 un frere avoit le roy, 6603 vostre frere, 6815, 6827 vostre frere savant, 16441 Henry : voir note., 20629 Herault (un – joly) : personnage qui appelle à lever le camp de Pont Valain, 18075 Heraut (un – englois) : messager envoyé à Bertrant par les Anglais, 21218
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le heraut, 21225 Heraut (un –) : messager envoyé par le Castal à Bertrant, 18424 Heraut (ung –) : messager envoyer par Bertrant à Carenlouet, 18935 l’ayraut, 18940, 18955 le heraut, 18949 Heraut : oicier anglais chargé de porter le pennon d’Angleterre, 1971 Heraut : serviteur de Bertrant, 17063 Heraut : serviteur de Thomas Grantson, 17723 au messagier, 17793 du heraut, 17798 heraut, 17767 l’ayraut, 17761, 17811 le hayraut, 17733 le heraut, 17770, 17810, 17985 le heraut messagier, 17766 le heraut puissant, 17730 leur heraut Clement, voir note, 17823 messager, 17799 mon heraut, 18018 heraut (le –) : personnage envoyé à Cressonelle par les Français pour exiger la reddition de Saint Mor, 18183 heraut (un –) : personnage envoyé par Henry à Moncel pour négocier avec Pietre, 16323, 16332, 16344 l’ayraut, 16325
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- Index des lieux et des personnages -
Herbon, 2639 Hermant : cappitaine de la tour de Bron, 20861 Hespaignolz, voir Espaignolz Heur, 10750 Holegrene (David –), 17747, 18043, 18062 Homme (un –) : personnage rencontré par Chando sur les rives de la Vienne, 18530 cellui qui fu venour, 18534 le vallet, 18550 homme (ung – d’armes) : personnage qui demande du vin à la bataille de Sainte-Severe, 19272 Hommes (.iiii. mil –) : soldats qui accompagnent Charles de Blois pour la bataille d’Alroy chevaliers, escuiers et souldoiers gentilz, 5715 Honguerie, 13398 Houdain (Henry de –), 17302 Hourselay, voir Orselay (Giefroy d’–) Houste (son –) : personnage qui héberge Mahieu de Gournay lors de son voyage au Portugal, 9868, 9871, 9888 Houstel ( – son ante) : demeure de la tante de Bertrant à Rennes, 1453 son houstel, 1455 Houstesse (son –) : personnage qui héberge Henry en Arragon, 12805 l’oustesse, 12809, 12909
une tres vaillant femme, 12910 Hue (– de Jugon), voir Jugon (Hue de –) Huet (Gaultier –), voir Gaultier (– Huet) Huet (– de Carualay), voir Carelay (Huon de –) Huissel, 19084, 19094, 19107 la ville qui resplent, 19084 Ussel, 19101 Huitasse (– d’Obecicourt), voir Obecicourt (Huitasse d’–) Humandie (le sire de –) de la Humandie le sire au corps cler, 17890 Humandie, 18067 Huon (Gaultier –), voir Gaultier (– Huet) Husoie (Hentache de la –), voir Hentache Hussoie (Alain de la –), 8191, 13775, 13907, 15432, 16453, 16462, 16481 Alain, 16455 cellui de la Hussoie, 14288, 16127 cellui de la Hussoie ?, 8203 Hussoie (Guion de la –), 13907 Hussoie (Hentache de la –), 4702, 4703 cellui de la Hussoie, 6134 cellui de la Hussoye Hentache au corps gent, 5860 cellui de la Hussoye Hentache le sachant, 5379 cellui de la Hussoye qui Entache
- Index des lieux et des personnages ot non, 4706 celluy de la Hussoye qui Hentache ot nom, 5957 Hentache, 4727 un chevalier de nostre gent, 4700 Hussoie (Tristant de la –), 13775 Huy, 18056 Ianee (roi de –) : ils du roi de Bel Marin (Aletaire ?), 15814 Isle (le conte de –), 11416, 11798, 13244, 13391 Israel (du peuple –), 8897 Israel (l’– nacïon), 11405 Jacob (– le mescreant) : conseiller du roi Pietre, 8384 Jacob, 8867 Jacob, 6789, 6803 Faulx Juïfz, 6795 un juif felon, 6815 Jacob : personnage biblique, 8702 Jaconelle, 21005, 21028, 21050, 21419, 21432 cappitaine de Civray, 21028 Jacques (Saint –), 12875 Jacques (saint –), 6861, 12677, 14952, 19630 Janee (roi de –) : Aletaire ? qui est ilz au fort roy de Bel Marin, 15815 Janssay, 21480 Jaquemon, voir Fé Jasme (– Dandelee), voir Dandelee
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(ou livre de –), 8894 (dan –), 14662 (saint –), 6862 : roi de France, père de Charles V au noble roy Jehan, 7411 au roy, 3448 au roy mon pere, 6330 de France le bon roy Jehan, 4047 de roy de France, 2939 du roy de France, 19946 du roy de Françoys, 1255 du roy de Saint Denis, 20121 du roy Jehan, 10031, 20379 le bon roy Jehan, 2028, 7413, 13101 le bon roys Jehan, 2682 le cremus, 3546 le noble, 3546 le noble roy Jehan, 2607 le riche roy Jehan, 4024, 4026 le roy des François qui Jehan est nommé, 1322 le roy Jehan, 2605, 2626, 13013, 18381 le roy mon pere, 3546 le roy qui regnoit, 68 mon pere le roy, 3557 roy en France, 2036 Jency (Berendart de –), 17300 Jeune (Alain le –) cappitaine, 20961 Jherusalem (cellui de –), 15258 Jherusalem, 7397, 9836, 14579, 15282 Jason Jehan Jehan Jehan
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- Index des lieux et des personnages -
la sainte cité ou Jhesu ot son corps travaillé, 15361 Jhesom, voir Jhesu Jhesu, 661, 1451, 2677, 2876, 3405, 4203, 4496, 6295, 6857, 6876, 6880, 7145, 7396, 7644, 7645, 8233, 8637, 8656, 8713, 11486, 11643, 12023, 12298, 12658, 13028, 13396, 14151, 14303, 14791, 15283, 15362, 15366, 15675, 15817, 16059, 16111, 16115, 16134, 16155, 16834, 16870, 16871, 16904, 16921, 17215, 17938, 18713, 19747, 19850, 20019, 20459, 20465, 20667, 21686, 21735 au riche roy Jhesom, 16733 au roy Jhesus, 3555 Jhesom, 16933 Jhesu le roy amant, 2674 Jhesu, le ilz saincte Marie, 5400 Jhesu, le fruit de vie, 5408 Jhesuchrist, 12206 Jhesucrist, 638, 671, 1105, 1471, 1488, 2771, 3570, 4266, 4965, 5404, 6503, 6639, 6855, 7447, 7631, 7743, 7802, 8154, 8231, 8840, 9089, 9235, 9996, 11426, 11955, 12418, 12486, 12487, 12728, 12831, 13177, 14134, 14335, 14339, 14762,
15189, 15859, 16810, 17491, 17855, 18281, 18402, 18509, 18880, 19120, 19643, 19854, 20122, 21202, 21663, 21758 Jhesus, 19502 Jhesucrist, voir Jhesu Joiel (Jehan –), voir Joyel Joigny (le conte de –), 17295, 20615 Josequin, 4698 Josselin, voir Jousselin Josué, 21882 Jouel (Jehan –), 3647 Jousselin (chastel –), 5424, 5433, 5619, 5620 Josselin, 5467 Joyel (Jehan –), 4042, 4156, 4410, 4413, 4417, 4468, 4515, 4570, 4810 Jehan Joiel, 4283, 4865 Jehan que l’on dit Joiel, 4672 Joiel, 4820 Joyel (Pierre –), voir Saquanville Judas : conseiller du roi Pietre, 8385, 8389, 8449 Judee, 9459 Jugon (Hue de –), 6170 Jugon, 5620, 5947 Jugon : ville de Bretagne, près de Dinant ?, 5388 Juif (un –riche et bien puissant) : personnage qui va révéler la vérité sur la naissance du roi Pietre, 6904
- Index des lieux et des personnages le juif, 6925 le Juïfz, 6917 un juif, 7030 un juif convert, 7791 Juif (un –) : personnage qui prédit à la reine d’Espagne qu’elle accouchera d’une ille, 6959 Juif (un –) : porte-parole de la communauté juive de Burs, 8594 Juifs, 42 Juifz, 6552, 6556, 6574, 6692, 6843, 6851, 6870, 6881, 6898, 7004, 7006, 7771, 7902, 7983, 8124, 8217, 8220, 8234, 8240, 8248, 8255, 8262, 8281, 8508, 8620, 8643, 8953, 9254, 9261, 9293, 9296, 9326, 9332, 9356, 9359, 9365, 9376, 9380, 9387, 9402, 9417, 9422, 9434, 9443, 9445, 9454, 9466, 9471, 9480, 9527, 9581, 9587, 9593, 9597, 9600, 9630, 9655, 9658, 9791, 10207, 10222–10224, 10226, 10227, 10229, 10230, 10233, 10236, 10238, 10242, 10268, 10284, 10286, 10295, 10297, 10310, 10316, 10347, 10352, 10358, 10360, 10366, 10380, 13251, 13464, 14382, 15438, 15528, 15562, 15573, 15576, 15617, 15668,
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15711, 15753, 15780, 15811, 15844, 15917, 16009, 16054, 16134, 16191, 16194, 16275, 16798 Juifs, 6652, 6760, 7909, 7960, 8008, 8083, 8159, 8162, 8214, 8238, 8244, 8246, 8249, 8252, 8265, 8522, 8592, 8925, 8927, 9601, 12600, 14344, 15671 Juifs felons, 8062 Juiizes, 8266 les felons Juïfz, 6798 Juïfz (.xxic . –) : personnages qui se convertissent au christianisme après le miracle de Seville, 10373 Juisve (une belle –) : maîtresse du roi d’Espagne, véritable mère de Pietre, 6946 celle convertie, 8557 celle juisve, 6949 icelle convertie, 6963 icelle juisve, 6948 Juifve, 8554 Juise fu la mere, 8121 sa belle illeule, 6960 sa illeule, 6967 une juisve, 7000 Juive (une –) : maîtresse de Pietre qui va lui annoncer l’arrivée de la Grande Compagnie à Seville, 9447 la belle juisve, 9514 la juisve, 9463, 9470, 9473, 9476, 9487 la plus belle juifve qui oncques
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- Index des lieux et des personnages -
mais fu nee, 9449 Juiverie : quartier Juif de Bervesque, 8213 Juizes, voir Juïfz Julien (saint –), 14065 Jument : monture du jeune Bertrant, 678, 726 Jurie : Judée, 8175 Kalemel (Gieffroy de –) : même personnage que Giefroy de Karimel ?, 21401 Karemer (Gieffroy de –), 18294 Karenloet, voir Carenlouet Karenlouet, voir Carenlouet Karismel (Gieffroy de –), 21063, 21208 Kulec (Ymbert de –), 20779 l’Abret (Berducas de –), 21563 l’Abret (Perrigot de –), 11794 l’Abret (le sire de –), 10665, 13077, 13304 cellui de l’Abret, 13312 Labaire, 10089 du Breton, 10161 Labarre, 10093, 10103, 10108, 10149 Labarre de Bertaigne, 10116 le Berton, 10100 un Berton, 10088 Labarre, voir Labaire Laguisart : territoire donné à Bertrant par le roi de France, 35
Laines (le Bourc de –), 7136 Lancelot, 10643 Lances (deux cens bonnes –) : deux centss soldats accompagnant Hentache de la Hussoie lors de la bataille de Cocherel deux cens lances, 4708 sa bonne gent, 4727 ses compaignons, 4709 Languedoc, 12968, 16937, 17009, 21809 Lannay (Guillaume de –), voir Lonnoy Lannoy (Guillaume de –), 5385, 5810, 5866, 7370, 11529, 18439 Lannoy (Yvon de –), 18767 Yvon, 18784 Larmier (les sains de –), 16991 Laval (le seigneur de –), 2777 Lazaron (saint –), 15346 Lencloistre (duc de –), 604, 1035, 1052, 1065, 1095, 1147, 1152, 1168, 1230, 1252, 1468, 1482, 1532, 1668, 1720, 1775, 1861, 1875, 1918, 2106, 2126, 2227, 2268, 2400, 2635, 2698, 5339, 9274, 10676, 10913, 11240, 11346, 11727, 12018, 18312 au bon duc, 1283 au duc, 1161, 1613, 1696, 1823, 1973, 2214, 2559, 2582 au noble duc, 2277 en bon duc de Lencloistre, 2431
- Index des lieux et des personnages le bon duc de Lencloistre, 1591 le duc, 1061, 1075, 1100, 1103, 1170, 1188, 1194, 1196, 1237, 1286, 1304, 1309, 1317, 1394, 1400, 1485, 1500–1502, 1524, 1525, 1537, 1614, 1628, 1632, 1635, 1654, 1655, 1678, 1682, 1749, 1820, 1827, 1887, 1891, 1941, 1947, 1952, 1956, 1969, 1974, 1979, 1984, 1986, 2215, 2226, 2351, 2565, 2580, 11351, 11356, 11359, 11363, 11373 le duc au corps ier, 2570 le duc de renom, 1043 le duc honnouré, 1623 le noble duc, 1689, 2224, 11367 mon doulx seigneur, 1078 noble duc, 1162, 2566 son frere de Lencloistre, 12444 Lessebonne, 9511, 9530, 9662, 9664, 9821, 9855, 9865 Lissebonne, 10048 Lezignen, 21481 Lieutenant (– du roy) : oicier de l’armée d’Angleterre menant l’assaut de Bescherel, 2741 Limoges (Jehan de –), 18932 un archier, 18930 Limoges, 10715 Limosin (Regnault le –), 16860 Limosin (Regnaut de –), 13232 Limosin, 11, 21526 Limosin : habitants du Limousin,
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1436 Limosins, 4055 Linehon, 20958 Lissebonne, voir Lessebonne Livec (le chastel de –), 21559 Lombart (un –) : personnage qui prête de l’argent à Bertrant prisonnier du prince de Galles, 12863, 12878, 12891 Londres, 2033, 4047, 6411 Londres la cité, 7414 Longin, 6569 Longis, 12741, 14187 Longueville : territoire donné à Bertrant par le roi de France, 35, 4954 Lonnay (Guillaume de –), voir Lonnoy Lonnoy (Guillaume de –), 3690, 3697, 3711, 3720, 8190, 8494, 10836, 14290 Guillaume, 3744, 3790, 3819 Guillaume de Lannay, 3797 Guillaume de Lonnay, 5958 le chevalier, 3727 un chevalier, 3689 un chevalier gentilz, 3697 Lonnoy : cri de guerre de Guillaume de Lonnoy, 3819, 3820 Lorens (– de Mascon), voir Mascon (Lorens de –) Louvaux (abbaÿe de –), 5717 l’abbaÿe, 5736 une abbaÿe de pris, 5717 Louys (– de Beaugien), voir Beaugien Louys (saint –), voir Loys (saint
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- Index des lieux et des personnages -
–) Loyre, 17350, 18143, 18175 Loys (– de Calon), voir Calon Loys (saint –), 6379, 6658, 6768, 13292, 13456, 14583, 16056, 20420 du bon roy saint Loys, 20135 saint Louys, 20527 Loÿs (– le membré), 5873 Loyset (Gillet du –), 16466 Gilet, 16491 Gillet, 16467, 16474, 16494 Lucas, 16581 Lusac (pont de –), 18549, 18554 au pont, 18560, 18600, 18611, 18701 ce pont, 18693 du pont, 18624, 18688 le pont, 18601, 18699 le porc de Lussac, 18582 ou pont, 18595 Machabee, 21773 Machabeus (la table –), 21881 Madalent (Arnoul de –), 11746 Magdalene (sainte –), 21641 Mahomet (– le pourry), 15632 Mahon (la gent de –), 15671 ceulx qui croient Mahon, 15672 Mahon, 12305, 14608, 15855, 15863 Maistres (les – de la loy) : hauts dignitaires de la religion juive à Seville, 9411
Malconseil, 3661 un chastel fort et bon, 3661 Malepaie (l’abbé de –), 18271, 19328, 19331, 19432 l’abbé, 19334, 19339, 19357, 19365, 19369, 19437 Malepaie, 19350, 19419 Malepaie nommé, 19357 Malfaire : vb. intr. : mal agir, 19779 Manceaux, 17929 Mancïon (– de Brambort), voir Brambort Mandrie, 13153, 13216 Manecier : soldat du roi Pietre, 8449 Mangulon, 7871, 7897, 7938, 7944, 8017, 8037 Henry (Olivier de –), 17122 Manny (Alain de –), 7369, 13773, 14287, 15606, 16128, 17122, 17934 Alain, 15431 Alain le sien frere, 14628 son frere Alain, 15995 Manny (Henry de –), 14286, 15606, 16206, 20899 Henry, 15431 Henry le vaillant, 15995 leur frere Henry, 16129 Manny (Hervé de –), 13772 Manny (Olivier de –), 4293, 5065, 5224, 5380, 5864, 5994, 7229, 7368, 7467, 8145, 8188, 8485, 8770, 9206, 10832, 10928, 13771, 13895, 13981, 14284, 14484, 14627, 14659,
- Index des lieux et des personnages 14819, 14941, 14944, 14951, 14982, 15098, 15182, 15504, 15606, 15994, 16128, 16152, 16206, 16562, 17121, 17933, 18437, 20898 de Manny Olivier, 14936 Olivier de Manny le vaillent, 16652 Olivier le puissant, 15429 un chevalier playsant, 4293 Manny (Yvon de –), 5381, 5865 Yvon le mainsné, 7369 Manny : cri de guerre d’Olivier Manny, 5996 Mans (la cité du –), 17351 Mansel, 19603 Mante, 3459, 3651, 3665, 3692, 3700, 3713, 3728, 3731, 3754, 3798, 3812, 3815, 3828, 3839, 3859, 3863, 3865, 3901, 3909, 3921 la ville, 3821 la ville jolye, 3755 Marcenail, 17019 Marche (la –) : cri de guerre de la Blanche Compagnie, 8229 Marche (le conte de la –), 7228, 7378, 7463, 7558, 8196, 8492, 8857, 20616 le quenx de la Marche, 7806 Marcilles, voir Marsille Mareuil (baron de –), 3493, 3504 au bascon, 3639 cellui fu de Mareuil ?, 14663 le bascon, 4636, 4641
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le bascon de Mareuil, 3527, 3567, 3598, 4514, 4568, 4629, 4811 le bascon de Marueil, 3522, 3540 le bascon de Maruel, 3591 le chevalier, 3530 Mareuil (bascon de –), voir Mareuil (baron de –) Marie : ille du roi de Bel-Marin, 15236 Marie : la vierge Marie, 1562, 9372, 14791, 16899, 21490 doulce virge Marie, 4659, 5407, 8171, 11965 la mere Dieu, 9546 la mere Jhesucrist, 8840 la vierge honnouree, 13722 la virge honnouree, 269, 275, 423, 6675, 8325, 10093, 10096, 11265, 13210, 13725, 17632, 18429 la Virge louhee, 19495 la virge Marie, 984, 1579, 2438, 2964, 2979, 5117, 8551, 8697, 10279, 10484, 10846, 10864, 12390, 13400, 14735, 15190, 15476, 19962 la virge qui Marie a nom, 6856 la virge saintie, 3245 la virge trezoriere, 1105, 21183 Marie sa mere qui .ix. mois le porta, 12297 mere Dieu, 990 sa mere, 6863, 12302 sa mere vaillant, 15178 saincte Marie, 5400, 15942,
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- Index des lieux et des personnages -
16904 sainte Marie, 210, 3210, 7435, 7644, 9235, 10524, 13177 virge, 6633, 13159, 15367 virge honnouree, 10081 virge Marie, 14988 Marie Magdalene, 7645 Mariner : personnage qui vend Pietre aux paiens, 15007, 15011, 15014, 15023, 15026, 15035, 15047 Maroufle : chambellan de Pietre, 14676 Maroys : marais près de Cocherel, 4263 Marsille, 9036 Marcilles le roy, 9124 Martin (saint –), 17824 Marueil (bascon de –), voir Mareuil (baron de –) Maruel (bascon de –), voir Mareuil (baron de –) Mascon (Lorens de –), 12745 Maugis (– le guerrier), 17559 Melun, 3477, 3483, 3489, 3514, 3535, 3640 le bon chastel de pris, 3498 le fort, 3631 Mencïon (– de Bramborc), voir Brambort Menestriers (deux –) : ménestrel dont se moque Mahieu de Gournay à la cour du Portugal, 9971, 9982 .ii. cimphonieurs, 9999 mere : mère de Bertrant, 57, 111, 220
Dame, 113, 125, 135 la dame, 89, 92, 93, 115, 133, 148, 152, 655, 792, 806 la mere, 235 la mere Bertrant, 79 ma dame, 787 sa mere, 200, 650, 652, 666, 784, 799, 809, 813 une moult gentise dame, 53 vostre mere, 267 Merlin, 3264, 3271, 3399, 10019 Message : messager envoyé à Meulent, 3911 Meschin (le petit –), 13793, 13910, 14293 Message : messager qui porte une lettre de Pietre au roi d’Arragon, 7037, 7041 Messagier (un –) : personnage qui avertit Bertrant de l’attaque de la Rochelle par le duc de Bourbon, 18449 Messagier (un joly –) : messager envoyé par Bertrant, 20950 Messagier : messager envoyé par Henry à Bertrant, 14461, 14467 le message, 14472 le messager, 14470 Meulent, 3459, 3651, 3858, 3892, 3893, 3911, 3915, 3919, 3932, 3947, 3963, 3969 la ville, 4008, 4010 Moulent, 3665 Michel (saint –), 5666, 5692, 20255 Micholay (saint –), 21031
- Index des lieux et des personnages Mineurs : mineurs qui creusnt sous la ville de Rennes, 1184, 1189 Miton (Robert –), 20892, 21261, 21266, 21292 cappitaine, 21262 le cappitaine, 21303 le chastellain gentilz, 20892 Molier (– de Monfort) : épouse du comte de Monfort ma moillier, 5453 Molines, 14297, 14463, 14747 en sa duché vaillant, 16880 la duché de Molines, 16876 Molleton (le conte de –), 11415 Moncantour, 18091 Moncel (chastel de –), 15752, 16168 du chastel, 16249, 16373 Moncel (tour de –), 16594 Moncel, 15703, 16177, 16216, 16229, 16233, 16245, 16355 le chastel, 16251, 16361 Moncler (Henry de –), 16242 Monconteur, 19184 cele ville gaie, 19433 Moncontour, 19188 Moncontour, voir Monconteur Monfort (cellui de –) : chevalier français, 20904 le sire de Monfort, 21409 Monfort (conte de – fils), 5435 Monfort (conte de – filz), 5355
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Monfort (conte de –) fils le ilz, 5341 Monfort (conte de –), 578, 623, 630, 826, 834, 1028, 1041, 2010, 2108, 2136, 2217, 2603, 2646, 2703, 2730, 2751, 2810, 2829, 2841, 2849, 3239, 3323, 3355, 3361, 5073, 5326, 5335, 5337, 5461, 5509, 5580, 5584, 5671, 5733, 5749, 5756, 5829, 5836, 5986, 6044, 6100, 6107, 6175, 6244, 6254, 6279, 6302, 6334, 6438 .i. moult noble baron, 6383 le conte, 606 au conte, 3335, 5500 au duc, 5706 au duc ?, 3340 cellui conte, 5336, 5345 cellui de Monfort, 2714, 2747, 5898, 6042 celluy de Monfort, 640, 2018 du duc qu’il ot chier, 6035 du pere, 5341 duc, 3355, 5999 l’escuier de Monfort, 6271 le conte, 830, 3325, 5997, 6004, 6282, 6289 le conte dont je vous dy, 5342 le conte gentilz, 591 le conte louhé, 6421 le duc, 5518, 5523, 6050, 6052, 6055, 6163 le duc ?, 3338 le duc qui la guerre mena, 6013 le quens de Monfort, 580, 2711,
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- Index des lieux et des personnages -
2734, 2925 le quenx, 6293, 6301 le quenx de Monfort, 5443 le queulx de Monfort, 5547 le sien pere, 5505 le vostre ennemi, 5575 Monfort, 5592 Monsiegneur qui se fait de Bertaigne appeller, 5470 quenx de Monfort, 5728 son pere, 5357 son seigneur, 6007 Monfort : cri de guerre de l’armée anglaise, 3125 Monfort : région de Monfort, 5504 Monfort : ville de Monfort, 5512 Monlaon, 20528 Monpaon, 17018 Mons (le – que l’on monte sans degré), 4134 le mont, 4352 Monssusanc (au porc de –), 15329 Montaigne : montagne près de Cocherel, 4226, 4242, 4276, 4457, 4712 la haulte montaigne, 4494 le mont, 4730 Monterueil Bellay, 21082 Monterueil Bonnim, 20884 Monsterueil Bonnin, 20889 Montesclaire, 14708, 14716, 14760 Monteclaire, 14723, 14726, 14755 Mont Jardin, 14771, 14777, 14786, 14796
Montlaon, 16718 Mont Sainte Marie : Noz barons sont venuz au mont Sainte Marie, 14766 Morassent, 14994 Morel, 19618 le gentilz messagier, 19620 le message, 19625 le messages, 19626 Mortain, 21006 Mortemer (le seigneur de –) le seigneur ou Mortemer appent, 18658 le sire qui tenoit la tour de Mortemer, 18667 Mortemer, 18912 Mothe de Bron, 51 Moulent, voir Meulent Moulines : territoire sous l’autorité de Bertrant, 32 Moustier (– de la virge Marie) : église de Burs, 12390 Moustier (– du Pont de Douve), voir Eglise Moÿse (– le sené), 10335 Mucidant (Pieron de –), 11418 cellui de Mucident, 11797, 12449 Myeulx, 3660 Nabugodonosor, 8901 Nadres (Enguerrant de –), 15432 Nadres, 2061, 11055, 11059, 11277, 11351, 11469, 11473, 11523, 11648,
- Index des lieux et des personnages 11981, 12008, 12085, 12108, 14015, 14081, 14088, 14435, 17709 Nadre, 11506 Nantes, 1241, 1259 Nante, 14033 Napples (la roÿne de –), 13703, 13736, 13798, 13859 Nature, 21772 Navarre (le roy –), voir Navarroys (le roy –) Navarre, 6350, 10960, 11048, 12457, 12513 Navarre la lee, 10955 ou païs navarrois, 10998 Navarroys (le roy –), 3438, 6496, 6500, 10959 cellui de Navarre, 10956 conte fu d’Evreux, 6354 icellui roy de Navarre, 3447 le roy de Navarre, 6351, 6459, 6489 mon frere de Navarre, 6318 Navarroys, 2940, 3457, 3460, 3478, 3650, 4056, 4899, 5309, 7577 aus fors Navarroys, 7292 Naymon, 11391 Nerbonne (le bon viconte de–), 17292 le noble viconte de Nerbonne, 17337 Nerons, voir norons Neuville (Robert de –) Robert, cellui de Neuville, 18287 Nonnencourt, 4770, 4784, 4806 Normans (duc des –), voir
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Bloiz (Charles de –) Normans, 2044, 3663, 3676, 4054, 5238, 17930, 21948 ceulx de Normendie, 5308 Normant, 3933, 7071, 8066, 11611 Normendie (Richart de –), 8721 Normendie (ceulx de –), voir Normans Normendie (duc de –), voir Charles V Normendie, 3435, 3440, 3446, 3844, 3859, 4031, 4066, 4068, 4074, 4935, 5120, 6352, 12020, 17547, 17566, 17714, 21807 ou païs normant, 9990 Normendie (duc de –) : ils du roi de France Philippe de Valois, 594 Norons, 18093 Nerons, 18139 Nostre Dame (au moustier –) : église d’Arragon, 12754 Nostre Dame (église de –) : église de la ville de Mante, 3803 l’eglise, 3817 le moustier, 3835, 3905 ou fort moustier, 3816 une église qui estoit bien muree, 3801 Nostre Dame : cri de guerre de Bertrant ?, 6120 cri de guerre du Besgues, 15951 nostredameNostre Dame (mmoustier Nostre
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- Index des lieux et des personnages -
Dame) : église de la ville de Burs où Henry est couronné roi, 8840 Noyon, 3660 Noyron (Pré –), 6481, 15031 Noyron, 9166 Nubie, 17115 Nycholas (– de Scambourne), voir Scamborne Nyort, 6306, 20929, 20966, 20972, 21009, 21033, 21049, 21068, 21468, 21469, 21473, 21478, 21483 Obecicourt (Huitasse d’–), 11360 Octident, 21810 Odrahan (le marechal d’–), 7379 Arnoul d’Odrahan, 8961, 9506, 9602, 9934 Arnoul d’Odrahan, le mareschal gentilz, 9589 Arnoul d’Odrehan, 9774, 10926, 11107, 11500, 11583, 11609, 11740 au bon mareschal, 11039, 12025, 16960 au mareschal de France qui Ernoul a nom, 7559 cellui d’Odrehan, 14292 cellui d’Odrehan le noble combatant, 10700 d’Odrahan, 8196 d’Odrehan...le mareschal puissant, 18047
Ernoul d’Odrahan, 7461 franc mareschal gentilz, 12036 le bon mareschal, 8140, 10831, 11499, 12051, 12105, 12338, 13025 le bon mareschal d’Odrahan le doubté, 10213 le bon mareschal d’Odrahan le eslis, 9811 le bon mareschal d’Odrehan, 11527, 12660, 13113, 13121, 18265 le bon mareschal d’Odrehan le guerrier, 12479 le bon mareschal que l’on nomme d’Odrehan, 11074 le bon mareschal qui Ernoul ot nom, 12731 le bon mareschal, cellui c’on dit d’Odrehan, 18166 le gentilz mareschal, 12772, 17166, 17877 le gentilz mareschal a la hardie chiere, 12001 le gentilz mareschal d’Audrehan, 17125 le gentilz mareschal d’Odrehan, 17148, 17599, 18279 le gentilz mareschal de d’Audrahan le vaillant, 7488 le gentilz mareschal, cellui c’on dit d’Odrehan, 17870 le mareschal, 7479, 7522, 17884 le mareschal d’Audrohan le proudons, 7977 le mareschal d’Odrehan, 17040 le mareschal d’Odrehan le proudon, 16957
- Index des lieux et des personnages le mareschal de France, 7462, 12053 le mareschal de France ?, 11098 le mareschal gent, 11220 le mareschal gentilz, 17153 le mareschal que Audrehan justissa, 17047 le mareschal que l’on doit d’Audrahan appeller, 8484 le mareschal que on nomme d’Odrehan, 10440 le plus proudomme qui peust etre trouvé, 7482 moult fu sage homs et moult amoderé, 7480 Ogier (– le puissant), 10640 Ogier, 11391 Olivet (mont –), 15364 Olivier (– de Gliçon), voir Clisson Olivier (– de Manny), voir Manny Olivier (– de Vienne), 11391 Olivier : ils de Lion de Bourges, 8575 roy Olivier, 8653, 8729 Olivier : frère de Bertrant, 2100, 2144, 2149, 2153, 2157, 2169, 2176, 2190, 15605 frere Bertrant, 2159 le bachelier, 2266 mon frere, 2262, 17007 mon frere gentilz, 16988 mon frere Olivier, 2255, 2556 Olivier, 2581 Olivier du Guesclin, 13770, 14955, 17608 Olivier le baron, 2198
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Olivier le bers, 2186 Olivier le minour, 16979 Olivier le sien frere, 13905 Olivier son frere, 14626 Olivier, du Guesclin suis nommé, 2158 son frere germain, 2273 son frere Olivier, 2408, 14285, 14907 un enfant, 2249 un mien frere, 2249 vostre frere, 2425 vostre frere Olivier, 2572 Olivier : personnage de La Chanson de Roland, 590, 8422 le ber Olivier, 10640 Olivier le puissant, 9035 Olivier : éclaireur envoyé par Henry vers Moncel, 15712 Oliviers (les Boys des –), 15709 Omer (Henry de saint –), 8494 Omer (saint –), 3974, 12703, 13547 Oncle : oncle de Bertrant qui vit à Rennes, 280 icellui oncle, 263 son mary, 272 son oncle, 262 Orblois, 15203 Ordalnay (le chastel d’–), 18283 Oriant, 9031, 10745, 11016 Orient, 16660 Oridon (Sandras d’–), 11417 Orient (les sains d’–), 16689,
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- Index des lieux et des personnages -
17685, 18648 Orion (les sains d’–), 16735, 19711 Orlains (le duc d’–), 17289, 17694 oncle du roy, 17290 Oron, voir Dandelee Jasme Orriz, voir Compaignon Orselay (Gieffroy d’–), 18044 Giefroy Hourselay ?, 17748 Hourselay ?, 18052 Oton, voir Portiugal (le roy de –) Oton : frère de Ganier d’Amberoche, 11414 Ourgueil, 10754 Ouste : personnage qui reçoit Bertrant du Guesclin dans son auberge, 14041 Oustel son pere : demeure des parents de Bertrant, 298 Oyse, 3656 Page : personnage qui accompagne Bertrant lors de son entrée à Poitiers, 20060, 20061 Paien (Gieffroy –), 18928, 20701, 20713, 20728, 20832 Giefroy, 20738 Giefroy c’on dit parent, 20699, 20733 Paien (le ber Jehan –), 18491 Paiens (troys –) : personnages attaqués par un des éclaireurs d’Henry à Moncel, 15719 Palais (– a Paris), voir Paris Palais (– du pape) : palais des
papes à Avignon, 13053, 13054 Palais : palais de Burs, 8845 Palaix (– plenier) palais du roi d’Arragon, 6993 Palays (le – au roy) : palais de Pietre à Seville, 9460, 9651 Palpegan, voir Palpignant Palpegant, voir Palpignant Palpigant, voir Palpignant Palpignant Palpegan, 7705 Palpegant, 7751, 7760 Palpigant, 7707 Palpignant : Perpignan, 7038 Papillon (Alain –), 13792, 13909 Pappe, voir saint Pere Parc (messire Morise du –), 20903 Morise du Parc, 21404 Morisse du Parc, 21062 Morisse du Parc le gentilz chevalier, 21210 Parc (un –) : réserve de chasse près d’Alroy, 5736, 5742, 5744, 5767, 5774, 5789, 5813 Parent (Gieffroy –), voir Paien (Giefroy –) Giefroy, 20736 Parent (un sien –) : membre de la famille du comte de Monfort qui porte les armes d’ermines, 5836 cellui qui en avoit mestier, 6034 le chevalier, 6039 le chevalier qui fu des hermines
- Index des lieux et des personnages armé, 5897 son propre cousin qui ses armes porta, 6005 un chevalier berton ?, 6022 vostre chevalier, vostre cousin charnel, 6045 Paris (le prevost de –), 17431 Paris (palais a –) : palais de justice de la ville de Paris, 579, 3371 Paris, 582, 2663, 2938, 3377, 3461, 3481, 3484, 3634, 3638, 3708, 3894, 3941, 4958, 6439, 6448, 6464, 7321, 7335, 7340, 7361, 11095, 12691, 16671, 16682, 16731, 16812, 16927, 16939, 17161, 17168, 17181, 17183, 17192, 17201, 17207, 17216, 17223, 17285, 17287, 17295, 17304, 17306, 17315, 17411, 17430, 18356, 18931, 20123, 20878, 20879, 20989, 21511, 21588, 21748 Paris la cité, 19149 Paris la cité bien garnie, 21496 Paris votre bonne cité, 7351 Paris, celle cité antie, 4082, 4931 Pars (le sire de –), 5869 chevalier fut la fait, n’ot pas .xv. ans passé, 5870 un escuier louhé, 5869 Partenay (cellui de –), 10666, 11445, 11799
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Partie (la –) : quartier juif de Seville, 9455 sa forteresse, 9458 Passe, 4784 Passeffer, 14576 Passefer, 14835, 14933, 14966, 14985 Pavie (les sains de –), 17104 Pavye (Tibaut de –), 14290 Pelerins (ces deux –), 15322 les pelerins, 15355, 15357, 15398, 15454 les pelerins de nom, 15331 pelerins, 15360, 15363, 15371 Penie (le bourc –), 14293 Pennebrot (le conte de –), 1057, 2219, 2636 cellui de Panebrot c’on va conte nommant, 18324 cellui de Pennebrot, 1776, 2109, 10674 le quenx de Pennebrot, 1531 le quenx Pennebrot, 11477, 12450 Panebrot, 18340 quenlx de Pennebrot, 2433 Pennehort : surnom du Tort Boyteux, voir Tort Boyteux, 1047 Penneterie : boulangers qui attaquent Bertrant lors de la prise de Forgeray, 973 Pepin : le bon roi Pepin, 13 Perceval, 21576 Perceval (– le Galois), 10643 Perceval, 381 Perche (le conte du –), 17610 le conte qui doit le Perche
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- Index des lieux et des personnages -
gouverner, 17887 Pere (Saint –), 16596, 16597 Pere (nostre –) : père d’Henry et de Pietre, 6709 au roy, 6970 au roy a l’aduré talent, 8118 au roy qui avoit nom Alfon, 7789 du bon roy, 8561 le roy, 6931, 6938, 7779 le roy gentilz, 6941, 6945 le roy leur pere, 6939 le roy son pere, 6929 le roys, 7778 mon pere, 7001, 8109 mon pere Alfon, 10577 mon pere qui fu roy, 10496 son pere, 6911 Pere (saint – de Romme) : le pape, 12900 Pere (saint –) : le pape, 7426, 7427, 7430, 7456, 7476, 7508, 7555, 7584, 12707, 12854 au pape, 12982 au pappe, 7658 du pape, 7534, 13059 du pappe, 7614, 13064, 13066, 13067 l’apostole, 7529, 7589, 7611, 7648, 7667 le pape, 19837 le pappe, 7448, 7580, 7608, 7635, 7665, 13054, 13062 le pappe beneïs, 7602 Pere saint, 7556 Pere (saint –) : saint Pierre, 7984, 15480
Perpegant, 12640, 12724 Perregort, voir Pierregort Perres (le Bourc de –), 7138 Pestiens, 2718, 3256 Pestien, 2966 Bestien, 2999 ce lieu qui est si enforcé maison, 3064 ceste maison, 3056 chastel de Pestien, 2935 du chastel, 3259 le chasteau, 3044 le chastel, 3187, 3209 le chastel qui si fort estoit, 3251 le fort chastel plenier, 3342 Pestien, 3023, 3024, 3117, 3342 Petien (danjon de –), 3140 Peyron (l’apoulstre –), 6862 saint Pere, 1104, 17369 saint Pierre, 7307, 11994 Peyron, voir Pietres Pharaon, 8896, 11404 Pharise, 9685, 15203 Phelippe (– de Beaugien), voir Beaugien Philippe de Valloys : roi de France le bon roy de France, 534, 535 le bon roy Phelippe, 13100 le noble roy hardy, 535 le roy, 547, 565 le roy Philippe, 541, 554, 10029 le roy son pere, 595 Philippe, 10031 Philippe de Valoys, 4048 Philippon que l’on nomma de Valoy, 2605 sans le congié du roy, 583
- Index des lieux et des personnages son frere le roy qui France gouverna, 557 Pictardie, 4087, 14292 Picardie, 21810 Pictars, 3662, 4055 Pierre (saint –), voir Peyron (l’apoulstre –) Pierrefort (Henry de –), 5395, 5875 Pierregort, 17041, 17072, 17088, 17150 Perregort, 21516 Perrgort l’antie, 21526 Pierregort : cri de guerre de Calerant, 17127 Piers (les douze –) : personnages de La Chanson de Roland, 9035 Pietre (– Ferrant), voir Ferrant (Pietre –) Pietre (– Gossalle), voir Gonssalle (Pietre –) Pietre (– de Saramante), voir Saramante (Pietre de –) Pietre : roi d’Espagne, 6611, 6627, 6636, 6901, 6971, 6977, 6983, 7018, 7781, 7784, 8120, 9283, 9286, 9288, 9299, 9512, 9947, 11599, 11892, 11931, 14338, 14539, 14705, 14707, 14834, 15152, 15195, 15570, 15687, 15701, 15848, 16011, 16013, 16064, 16236, 16330, 16354, 16363, 16396, 16435, 16454, 16471, 16544, 16548,
375
16555, 16575, 16582, 16600, 16622, 16633, 16737, 16772, 16833 .i. villain murdrier, 7223 roy Pietres, 10609 au riche roy Peyron, 12605 au roy, 10632, 12385 au roy d’Epaigne, 10566, 10583 au roy d’Espainge, 12597 au roy Pieron, 10522 au roy Pietre, 6369, 8981, 9265, 12580, 14589, 16187, 16328, 16329 au roy Pietres, 14441, 15530, 15741, 16070, 16314 beau sire, 6750 bel ilz, 6970 ce faulx mescreant, 8960, 14989 ce felon roy, 14992 ce glouton, 15029 ce larron, 15028 ce traitre larron, 15036 ce valleton present, 8119 cellui dam Pietre est traïtre forsenné, 7681 cellui deable, 15464 cellui traÿtre, 7777 d’un bel ilz, 6962 dam Pieron, 7934, 10163, 14603 dam Pietre, 6997, 7015, 7221, 7701, 7825, 7848, 7882, 7896, 8101, 8294, 9049, 9122, 9469, 9553, 10166, 10718, 12324, 12370, 13452, 13987, 14133, 14404, 14469, 14595, 14664, 14695, 14829,
376
- Index des lieux et des personnages 14833, 15004, 15022, 15739 dam Pietre le cremuz, 8369 dam Pietre le faulx roy, 16215 dam Pietre le felon, 16027 dam Pietre le felon, le hardy, le mescreant, 12140 dam Pietre le fol, 14380 dam Pietre le roy, 7690, 8318, 8497, 9764, 10204, 10418, 11023 dam Pietre, roy d’Espaigne, 7677 dam Pietres, 6617, 7878, 8863, 9096, 9150, 9326, 9432, 9495, 9527, 9573, 9715, 10921, 10934, 11252, 12081, 12382, 12474, 13268, 13419, 15249, 15303, 15707 dam Pietres le roy, 6537, 6540, 9415, 9552, 9718, 10472, 10535, 10537, 15234 de roy Pietres, 9800 Dempietre, 6364 du roy, 11840, 12672 du roy Pietre, 9026, 15127, 15550, 16608 du roy Pietres, 9859, 14450, 14699, 16163 du roy Pietres le grant, 15147 du tirant, 8942 icellui roy Pietres, 11957 icelui ilz, 6969 la roy Pietres, 15456 le faulx roy, 16411 le faulx roy Pieron, 10563 le fort roy Peyron, 12152
le oy Pietre, 16618 le plus meschant tant con soleil tournie, 15005 le plus noble roy qui peust estre trouvé, 6791 le prince, 10600 le renoyé Pietre le mescreant, 7093 le riche roy Pietre, 7803 le roy, 6546, 6586, 6589, 6599, 6602, 6603, 6697, 6699, 6776, 6813, 6822, 6823, 6828, 6836, 6842, 6873, 6889, 6908, 7829, 7834, 7836, 7841, 7849, 8386, 8387, 8403, 8430, 8438, 8451, 8872, 8887, 8993, 9154, 9190, 9336, 9337, 9366, 9461, 9463, 9468, 9475, 9515, 9547, 9555, 9711, 9788, 10385, 10392, 10395, 10435, 10475, 10519, 10540, 12397, 12417, 12583, 12595, 12599, 12607, 14559, 15000, 15039, 16443 le roy ?, 12518, 14657 le roy c’on dit Peron, 10400 le roy d’Epaigne, 10573 le roy d’Espaigne, 10432, 10464, 12289, 12414 le roy d’Espaigne Pietres, 10599 le roy dam Pietre, 7382, 8446, 9762 le roy mon frere, 6801 le roy Peyron, 6833, 7899, 10892 le roy Pieron, 8986, 9671
- Index des lieux et des personnages le roy Pietre, 7012, 7047, 7823, 7910, 8123, 8377, 8517, 9016, 9872, 11768, 12060, 14499, 14606, 14682, 15649, 15759, 16074, 16418, 16506, 16553 le roy Pietres, 6785, 7707, 7726, 8401, 8559, 8866, 9171, 9214, 9530, 9565, 9643, 9940, 9942, 10466, 10625, 10849, 11722, 11792, 11830, 12052, 12054, 12113, 12176, 12276, 12363, 12453, 12571, 12576, 12637, 14437, 14556, 14600, 14635, 14722, 14815, 14850, 14852, 14977, 15017, 15101, 15104, 15312, 15441, 15626, 15663, 15755, 16022, 16077, 16173, 16177, 16394, 16765 le roy Pietres d’Espaigne, 12402, 12670 noble roy, 6721 noble roy poestiz, 6719 Peyron, 12626, 15025 Piectre, 14409 Pieron, 16614 Pierron, 16375 Pietre, 6551, 6894, 7904 Pietre le derué, 16755 Pietre le doubté, 14495 Pietre le fel, 6995 Pietre le felon, 16266, 16545 Pietre le maudy, 15609 Pietre le parjuré, 9270
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Pietre le princer, 6877 Pietre le roy, 7861, 8351, 8976, 13175 Pietre le tirant, 9661, 16355 Pietre nostre roy, 8623 Pietre roy d’Espaigne, 7821 Pietre son fere qui s’aloit roy nommant, 7715 Pietre, roy d’Espaigne, 6581 Pietres, 7769, 7912, 8299, 8344, 8373, 8538, 8552, 8921, 8932, 8944, 8956, 9056, 9095, 9244, 9259, 9319, 9321, 9333, 9448, 9486, 9519, 9521, 9522, 9525, 9529, 9665, 10254, 10406, 10469, 10480, 11031, 12388, 12408, 12460, 12612, 12628, 13192, 13241, 13259, 13273, 14342, 14348, 14353, 14392, 14454, 14502, 14505, 14551, 14574, 14685, 14734, 14761, 14765, 14770, 14781, 14796, 14802, 14803, 14846, 14921, 14923, 14927, 14957, 14965, 14970, 14974, 14984, 14993, 15122, 15202, 15274, 15400, 15521, 15526, 15554, 15566, 15579, 15591, 15616, 15643, 15700, 15743, 15762, 15774, 15796, 15807, 15843, 15862, 15923, 16007, 16008, 16065, 16107,
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- Index des lieux et des personnages 16109, 16113, 16119, 16123, 16169, 16198, 16201, 16204, 16286, 16339, 16350, 16448, 16450, 16463, 16477, 16509, 16513, 16516, 16520, 16537, 16541, 16592, 16741, 16832 Pietres l’adverser, 16543, 16560 Pietres l’Espaignol, 15184 Pietres le chetif, 16504 Pietres le chief mescreant, 13786 Pietres le dervé, 15395 Pietres le desrué, 14804 Pietres le dolans roys, 15197 Pietres le faulx, 15639 Pietres le felon, 12150, 15833, 15871, 16827 Pietres le fol roy mescreant, 15168 Pietres le hardy, 6691, 15621, 16485 Pietres le mescreans, 8463 Pietres le mescreant, 9577, 14479 Pietres le roy, 6645, 6898, 8314, 8400, 9541, 9850, 10273, 10425, 10428, 11507, 12039, 12562, 14315, 14503, 14515, 14524, 14631, 14784, 14960, 15009, 15265, 15293, 15353, 16136 Pietres le soudant, 16210 Pietres le soudoieur, 16094 Pietres le tirant, 16416, 16430 plus malvaise creature ne fu de
mere nee, 6527 roy d’Espaigne, 12325, 15025 roy dam Pietre, 6988 roy dam Pietre d’Espaigne, 9870 roy Peyron, 7065 roy Pietre, 6573, 6810, 6903, 7021, 8096, 8298, 8886, 9782, 10404, 11633, 11780, 12012, 12543, 13224, 14329, 14334, 14674, 14696, 14776, 14963, 16437, 16500, 16624 roy Pietre mon baron, 6868 roy Pietres, 2066, 8029, 9053, 9085, 9220, 9304, 9450, 9460, 9532, 10239, 10382, 11816, 12016, 12521, 14548, 14562, 14826, 14861, 14903, 14911, 14933, 15096, 15268, 15527, 15600, 16090, 16249, 16278, 16302, 16307, 16335, 16388, 16469, 16525, 16610 roy Pietres d’Espaigne, 6530, 12525, 13257 roy Pietres le soudant, 12553 roy Pietres ot nom, 6526 sire, 6755 sire roy, 6745 son fere le roy, 6650 son ilz, 6968, 8558 tyrant, 6899 un ilz, 7002 un mescreant roy, 9088 un murtrier, 10607 un roy que l’on doi bien
- Index des lieux et des personnages redoubter, 8031 un roy qui oncques bien ne it en sa duree, 6525 un roy sans pitié, 9097 un valleton, 8117 vostre frere, 15470 Pietres (Thomas –), 13233 Place (la – jolye) : endroit près d’Alroy où les Français décident de passer la nuit, 5737 Plege (le –) : otage livré aux Anglais par les habitants d’Alroy en échange de nourriture, 5710 bon chevalier gentilz, 5710 Poictiers (Aymar de –), 5396, 5876 Poictiers (l’evesque de –), 19822 l’evesque, 19865, 19877 l’evesque d’onneur, 19894 l’evesque gentilz, 19870, 19884 l’evesque naturelz, 19832 monseigneur ?, 19836 Poictiers (le seneschal de–), 11795 Poictiers, 19159 Poictou, 16677, 18135, 19725, 19753, 20276, 20872, 20883, 21084, 21484, 21487, 21492 Poitevins, 10979, 17929 Poitiers, 2030, 19071, 19784 ceste cité, 19980 la cité, 19988, 20015 la cité jolye, 19982 la cité seignorie, 19994
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Poictiers, 10030, 11795, 18482, 18504, 18517, 18525, 18535, 18576, 18913, 19661, 19682, 19685, 19738, 19760, 19785, 19905, 19919, 19923, 19927, 20191, 20193, 20199, 20204, 20232, 20266, 20269 Poictiers le noble cité, 19680 Poictiers, la cité principaux, 19913 Poittiers, 9907, 20222 Poittiers, la cité de valour, 19887 Poitou, 10671 Poictou, 10715 Poittiers, voir Poitiers Pommiers (le sire de –), 10668, 10917, 14289 Aymerion, 10917 cellui de Pommiers...c’on nomme Aymerion, 11412 Emerions, 10669 Pons (le seigneur de –), 11417 le sire de Pons, 11800 Pont (Tibaut du –), 4438, 4588, 4751 Thibaut du Pont, 21520 Tibaut, 4755, 4762 Tiebaut, 4440 Tiebaut du Pont, 4742 un moult bon escuier que Bertrant amoit, 4439 Pont (– de Meulent), 3960, 3964, 4012, 4014 Pont de l’Arche, 4201, 4863
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- Index des lieux et des personnages -
Ponteau de Mer, 3445 Pontorson, 2191, 3643, 4018 Pont Urson, 21488 Pont Urson l’antie, 21493 Pont Valain, 17658, 17771, 17832, 17936, 17942 Porcïon (cellui de –), 17296 Porrus : frère du vicomte de Narbonne, 17293 Porter : portier de la ville de Forgeray, 929 portier, 941 Portes (huit –) : portes de la ville de Burs, 8681 Portier (un –) : geolier de Bertrant, 12827, 12838, 12861, 12866, 12871, 12886, 12888, 12890, 12918, 12919, 12931, 12934, 12938, 12944, 12953, 12959 Portiugal (le roy de –), 9510, 9663, 9671, 9689, 9716, 9737, 9781, 9823, 9849, 9856, 9890, 10043, 10080, 10087, 10096, 10106, 10126, 10128, 10139 ce roy, 9858 cellui de Portiugal, 9745 de roy, 9896 le riche roy Fagon, 9667 le roy, 9664, 9669, 9686, 9869, 9894, 10044, 10061, 10144, 10151, 10165 Oton, 10151 Portiugal (le roy du –), 9913, 9923, 9926, 9998,
10004 le roy, 9915, 9929, 9930, 9952, 9953, 9959, 9967, 9970, 9983, 9987, 9995, 10005, 10033 Portiugal, 7022, 8605, 9180, 9357, 9830 Portiugaloiz, 10050, 10105 Portiugalois, 10084, 10133 Portus, 19518 Praerie (la –) : champ près d’Alroy, 5735 Pré (– Noyron), voir Noyron Prevost (le – d’Avignon), 7638 beau sire, 7646 le prevost, 7656 Préz herbuz : plaine près de Cocherel où se déroule la bataille, 4485 les préz loriz, 4549 Prince (– d’onneur) : ils de Charles V ?, 20811 Prince (le – de Galles), voir Galles Princesse (la –) : épouse du prince de Galles, 10596, 10605 la dame, 10621, 13622, 14194 la plus tres noble dame qui au siecle regna, 10597 la princesse, 10611, 10629, 12356, 13616, 13632, 14190 la princesse de Gales, 10623 la vostre moullier, 14274 Prouvence, 7428 Provenceaux, 13885
- Index des lieux et des personnages Provencel, 19606, 20242 Pré (un – qui verdye) : champ près d’Alroy, 5743 Quain (Jehan de –), 4103 Quarrion (celui de –), 13237 Quarte (la –) : sœur de la reine de France et de la reine d’Espagne, épouse du conte d’Harcourt, 6374 celle de Halcourt, 6663 Quen, 17547, 17566, 17571, 17586, 17714 Quenx (le – de la Marche), voir Marche (conte de la –) Queulx : cuisiniers ataquant Bertrant lors de la prise de Forgeray, 951 queux, 973 Queux, voir Queulx Raguemaux, 17590 Raguenel, voir Tiphaine raineval (le sire de –), 17339 Rains (archvesque de –), 6340, 6384, 6414 l’archevesque, 6343 un moult gentilz prelat, 6341 Rains : ville de Reims, 2630, 2657 Rains de France, 4915 Rains la cité, 4918 Rayns, 4872 Riens, 4145 Ramee : bois près de Cocherel, 4242 Rayns, voir Rains Rays (le sire de –), 17892 cellui de Rays, 20313, 20480
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le seigneur de Rays, 18293 Regnalt, voir Regnaut Reli, 18093 Rely, 18139 Remy (saint –), 5231, 16291, 19651 Renes (l’evesque de –), 14212 Resnes, 50, 55, 189, 262, 313, 602, 1046, 1053, 1064, 1148, 1166, 1244, 1292, 1384, 1447, 1491, 1670, 1708, 1743, 1835, 1842, 1870, 1873, 1939, 1942, 5340 en plain marchié de –, 408 le marchié de –, 366 Resnes la cité, 1425, 2001 Reyne (la – Blanche), voir Blanche Reze, 11118 Richart (– de Normendie), voir Normendie Richier (– de Cantorbie) : beau frère de Jehan de Chando, 6138 un vaillant chevalier, 6140 Richier (saint –), 761, 13597 saint Richer, 9762, 17546 Riens, voir Rains Riledieu, 15888 Rin : jusques a l’ayve du Rin, 10 Riole (Jamet de la –), 15327 Jamet, 15349 Riole (cellui de la –), 11801 Rivere : rivière près de Bescherel, 2784 Riviere (Bureau de la –), 17357, 17358
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- Index des lieux et des personnages -
Riviere : rivière aux alentours de Toulecte, 13226 Riviere : rivière près de Cocherel, 4327 rivere, 4482 Riviere : rivière près de Cordonnes, 9200 Riviere : rivière près de Tarascon, 13795 Rivière : lieu où les Epagnols se noient lors de la bataille de Nadres, 11872, 11910, 11981 Robert (– de Bournonville), voir Bournonville Robert (– de Villequiers), voir Villequiers Robert (– le conte), 13789, 13908 Robin (– Canolle), voir Canoles (Robert –) Robin (– Secot), voir Secot (Robert –) Roche de Posay, 18488, 18589, 18923, 18953 celle tour maberine, 18923 Roche Doriant : cité donnée à Bertrant par Charles de Blois, 2004, 13965, 14214, 17692 Rochefort (cellui de –), 17889, 17962, 18066, 20480 cellui qui Rochefort doit tenir et garder, 18295 de Rochefort y fu le seigneur seignory, 20902 Rochefort, 20313
Rochefort le grant, 21404 Rochelle (la –), 14220, 18323, 18344, 18364, 18372, 18375, 18452, 20300, 20302, 20306, 20316, 20319, 20372, 20467, 20496, 20613, 20632, 20642, 20650, 20655 la ville, 20339, 20347 leur ville, 20453 nostre ville, 20413 Rochelle, 20329 Roche Sur Ion, 20924, 20944, 20956, 21014 Roen, voir Rouhen Rohen, voir Rouhen Roleboyse, 3651, 3664, 3672, 3683, 3861, 3872 Rollant, 380, 590, 2452, 4199, 8421, 10639, 21351, 21410 le temps de Rollant, 67 Rolant, 9034 Rollant, le nepvau Charlon, 11390 Rollant : personnage français qui terrasse un chevalier anglais à la bataille de Cocherel nommé estoit du Boys, 4562 un bon escuier qui fu nommé Rollant, 4561 Rome, 6481 Romme (le myrouer de –) : ?, 9072 Romme (le pappe de –), 13972 Romme, 7306, 7984, 15479 Romme : le pape, 12900 Ronceval, 380 Ronceveaux, 8423, 9037, 14282
- Index des lieux et des personnages Ronceveaux, voir Ronceval Rone, 13125 Ronnille (Moradas de –), 16369 Rouhen, 2724, 2776, 3455, 4016 Roen, 4911, 4935, 4971 Rohen, 4455, 4948, 5987 Rohen la cité, 4867 Rohen la freté, 2994 Rouhen la cité, 3670 Rouhen (viconte de –) : ils de l’épouse de Rogier David, 2724, 3320 ?, 2996 le noble conte de Rohen le grntilz ?, 18065 le vicomte de Rouhen, 2776 le viconte de Rohen ?, 17888, 17961, 20921 le viscoins de Rohen ?, 6057, 18291 Rohen ?, 6165, 20313 viconte de Rohen ?, 6234 viscoins de Roen ?, 5067, 5377, 5858 viscoins de Rohen ?, 6101, 14208 Royneval, 17277 Royne (– de France), 6534, 16057 la noble roÿne de France, 6583 la roÿne, 6371, 7064 ma seur aussi est de France couronnee, 6660 Royne : reine d’Espagne, femme de Pietre et sœur de la reine de France, 7061, 7066, 8858, 10338
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celle qu’il espousa, 6548 Dame, 6851, 6872 la bonne reigne, 6538 la dame, 6368, 6882, 6905, 10267, 10274 la dame ?, 6594 la meilleur, la plus belle qui estoit si benigne ?, 6588 la plus loiale dame c’on peüst trouver, 6367 la plus loiale dame de .xv. roiaultéz, toute le plus gentile qui soit en .c. citéz, 6766 la plus loiale dame qui fu en cent citéz, 7684 la reigne bonne, 7805 la reigne d’Espaigne, 6542 la reyne, 6654 la roÿne, 6581, 6837, 6850, 6874, 6896, 13453, 16274 la roÿne a la clere façon, 10371 la roÿne de nom, 6840, 6845 la roÿne dont le coprs fut murdry, 8855 la roÿne gentise, 9255 la roÿne plaisant, 10240 la roÿne sa femme, 6366 la roÿnne, 6853 le dame, 6888 ma dame, 6765 ma dame au corps vaillant, 10247 ma moulier, 9340 nostre ante, 7807 nostre cousine, 7685 nostre seur, 7094 sa bonne mouiller, 10850
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- Index des lieux et des personnages -
sa courtoise mouiller, 7741 sa courtoise mouillier, 7007 sa femme, 7683, 7728, 7773, 8545, 15032 sa femme la bonne, 10608 sa moillier premiere, 9271 sa mouillier, 7223 sa moulier, 7712 seur estoit germaine de la noble roÿne, 6583 suer au duc de Bourbon, 6533 suer de la roÿne de France, 6534 suer fu de la roÿne, 6371 ta moullier, 16055 une moiller, 6531 Rubion voir note, 9685 Ruffin, 15945 nepveu estoit du roy, 15944 son cousin, 15962 un Paien qui fu né en Surie, 15943 Ruyssel (un –) : ruisseau entre le parc et le château d’Alroy, 5743 le ruissel, 5815 rivière, 5814 Sabatayre, 6707 Sablonnier : terrain sablonneux près de Valongues, 5218 Saincte Foy, 21560 Saincte Severe, 19144, 19157, 19175, 19474 Sainte Severe, 19582, 20718 Saincte Seraine, 19548, 19552 Saine, voir Senne Sains : les sains de lessus, 401 les sains de paradis, 609
Saint Ander, 18337 Saint Denis, 13862, 17857, 20121, 21391, 21745, 21751, 21754, 21765 l’abbaïe de pris, 21751 Saint Denyse, 18006 Saint Denyse, voir Saint Denis Saint Donyn, 7899 Sainte Marie (mont –), 14766 Saintes en Poictou, 20874 Saint Esperit, 2298 Saint Fagon, 12157 Saint Jacques (le maistre de –), 13243, 14807, 14828, 14912, 14929, 14942 Saint Jacques, 12394, 12645, 13957 Saint Jacques : cri de guerre de l’armée du maître de Saint Jacques, 14866, 14913, 14943 Saint Jehan d’Angely, 20873 Saint Lo, 5043 Saint Maclo, 3515 Saint Mahieu, 18297 Saint Maixent, 20241, 20273, 20276 Saint Maquaire, 21573, 21579, 21581, 21584 Saint Marcel, 17179, 17232 Saint Mor, 18092, 18143, 18144, 18150, 18163, 18175, 18196 la ville, 18153, 18176 la ville souisant, 18178 Saint Pol (le conte de –), 17298 Saint Pol, 17170, 17364
- Index des lieux et des personnages Saint Sauveur, 5000, 5150, 5314, 6355 Saisi (Alain –), 18490, 18926 Salehadin : (du temps) Salehadin, 14 Salemon : personnage qui reconnaît Pietre dans le navire pour la Syrie, 15020 le juif, 15024, 15045 un bon marchant, 15019 Salerie, 15945 Salmanque, 13134, 13152, 13166, 13215 Salmon (le roy –), 21628 Salmon (temple –), 15342 Salmon : conseiller du roi Pietre, 8867 Samarant, voir Sormaseire ? Sampis, 6707 Sampy (icellui de –), 17301 Sanary, 17124 Sandras (– d’Oridon), voir Oridon (Sandras d’–) Sanson, 21627 Sanquainville (Pierre de –), voir Saquanville Sanquanville (Pieron –), 3647 Pierre, 4454 Pierre de Saquainville, 4157, 4277, 4406, 4452, 4571, 4763, 4812, 4882, 4904, 4941 Pierre de Saqueinville, 4041 Pierre dit Joiel ou Saquainville, 4331 Saquainville, 4840 un chevalier normant, 4041
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Sanqueinville (Pierre de –), voir Saquanville (Pieron de –) Sarmante (Pietre de –), 13242 Sarragoce, 10883 Sarrazin (un – puissant) : personnage attaqué par un éclaireur d’Henry vers Moncel, 15727 le paien, 15728 Sarrazin (un –) : personnage porte-parole des Sarrasins de Burs, 8584 Sarrazin (un –) : personnage tué par un éclaireur d’Henry vers Moncel, 15723 Sarrazin (un faulx –) : personnage qui transmet des nouvelles de Pietre aux habitants de Tolède assiègés, 15138 le paien, 15144 Sarrazin : personnage qui a forgé l’épée du Castal de Beuf, 11697 Sarrazins (quatre roys –), 15256 Sarrazins, 42, 6574, 6704, 6710, 6713, 7217, 7219, 7232, 7391, 7401, 7406, 7727, 7771, 7902, 7909, 7960, 7983, 8009, 8084, 8523, 8581, 8643, 8926, 8927, 8953, 9328, 9331, 9363, 9583, 9598, 9626, 9628, 9845, 10374, 10380, 10414, 10415, 11660, 12322,
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- Index des lieux et des personnages -
12600, 13251, 13266, 13448, 13464, 14334, 14344, 14382, 14408, 14453, 14617, 14619, 14653, 14720, 15199, 15214, 15261, 15372, 15374, 15378, 15438, 15465, 15477, 15501, 15510, 15525, 15528, 15534, 15563, 15573, 15617, 15710, 15735, 15782, 15809, 15830, 15844, 15987, 15998, 16054, 16134, 16179, 16181, 16276 gente sarrazine, 6606 les gens Mahon, 7562 les mescreans, 7502 les mescreants, 7496 Sarrasinoys, 6508 Sarrazinois, 15201 Sarrazins felons, 16060 Sart (Robert du –), 4695 un chevalier engloiz qui moult it a cremir, 4696 Satalie (le soudant de –), 7392 le roy de Satalie, 15259 Satalie, 7392, 7407, 8176, 15259 Saumur, 18159, 18164, 18207, 18278, 18320, 19050, 19181 Sausorre (le gentilz marechal d’–), 13115, 21521, 21674 cellui de Saussorre, 17335 de Sausorre le conte pourveü ?, 17291
de Saussorre aussi le mareschal de pris, 19169 le conte de Saussorre, 20477 le conte de Saussourre, 3814 le gentilz mareschal, 21723 le mareschal, 21695, 21699 mareschal, 21727 Saussourre (conte de –), voir Sausorre (le gentilz marechal d’–) Savoie (Perrin de –), 13791 Savoie (le conte de –), 6373 Savoie, 5875 Scaline (Huet de –), 18928 Scamborne (Nichole –) même personnage que Nicholas Esquabourne ?, 8488 Nycholas Scambourne, 8198 Scamborne, 8971 Sebile, 7858, 9007, 9179, 9295, 9310, 9319, 9321, 9396, 9399, 9584, 9641, 9659, 9677, 10155, 10211, 10878, 10932, 11824, 12120, 12410, 12581, 14330, 14343, 15021, 15145, 15155, 15466, 15531, 15538, 15618, 16180, 16591, 16613, 16767, 16831 icelle ville, 9324 la cité, 9582 la ville plaisant, 9651 Sebile la grant, 9809, 15437, 15553, 16203, 16211 Sebile la grant cité bien fermee, 9330 Sebile la lee, 15559
- Index des lieux et des personnages Sebille, 8413, 9219, 9306, 9369 Sebille la grant, 12182, 15262 Sebille, voir Sebile Sebilois, 16190, 16194 Seconde (la –) : une des sœurs du roi Henry, 8808 Secot (Robert –), 7133, 7468 Robin Cecot, 10444 Robin Secot, 8199 Secot, 11366 Seigneurs (les deux –) : Charles de Blois et le conte de Monfort, 5325 Senarpont (Jehan de –), 4099, 4623 Senne, 3477, 3893, 3942, 3960 Saine, 3480 Sepoulcre (le – Dieu), 15369 Sepoulcre (un roy de Saint –), 14578 Sergent : oicier de la ville de Rennes chargé de vériier les vivres encore en possession des habitants, 1911 Sergent : personnage qui discute avec Bertrant de sa rançon, 13370 Seur : sœur de Jehan de Chando, femme de Richier de Cantorbie, 6139 Seurs (les – Henry), 8755, 8801, 8803 Silmans ancien roi d’Epagne, 8418 Simon (saint –), 5632 saint Symon, 6861, 13494, 14247, 15348, 17233, 19665, 20540, 21635 Solizet (Thomelin –), 18063
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Sorie, 16930, 16946, 16959 Sormaseire, 15185 Samarant, une noble cité ?, 15232 Souldoier : soldat de l’armée anglaise retranchée à Pestiens, 3200 Sourmontant, 15174 Sousterrine (la –), 19537, 19610, 19615, 19659 une ville fermee, 19536 Suer (sa –) sœur de Pietres, femme de Ferrant de Castre, 8448 Suilly (le sire de –), 19128 Surgieres (la dame de –), 20849 Surgieres, 20848 Surgieres la grant, 20849 Surie, 14577, 14585, 15383, 15478, 15943, 16401, 17737 ou païs de Surie, 14999 Symeon (saint –), 2197 Symon (saint –) saint Simon, 7274 Table (la – ronde), 21832 Taletiere (le sire de la –), 14810 Tarascon, 13700, 13707, 13742, 13748, 13761, 13765, 13787, 13795, 13846, 13867, 13874, 13877, 13898 Tarascon, celle ville fermee, 13806 Terrascon, 13917
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- Index des lieux et des personnages -
Tartaire (le maistre de –), 14809, 14854, 14874, 14902 le maistre, 14857, 14880 Targvagant, 15153 Tervagant, 15971, 16186 Temple : maison du temple à Paris ?, 7353, 7362 Terce (la –) : sœur de la reine de France et de la reine d’Espagne, épouse du conte de Savoie, 6373 la dame de Savoie, 6662 Terce (la –) : une des sœurs du roi Henry, 8814 Terrascon, voir Tarascon Tergvagant, voir Tarvagant Thiphaine : épouse de Bertrant, 2312, 2589 celle de Raguenel, 2367 dame gentise et de noble lignie, 3410 de philizophie estoit sage esprouvee, 2318 fu de Raguemaux, 17590 icelle dame, 2326 la dame, 2312, 2332, 17582, 17584, 17705 la plus sage et la meulx doctrinee, 2315 la plus sage qu’il fust en France, 3409 m’amie, 21661 ma femme, 12940 ma mouiller au corps gent, 21661 sa femme, 17586 sa femme au corps gent, 17689
sa femme espousee, 17577 sa moillier, 6188 sa moillier o la clere façon, 4020 sa moullier de valeur, 17643 son espousee, 2324 une dame, 2311 une dame au cler vis, 2367 une dame qui moult est de hault pris, 2366 Thomas (– de Cantorbie) : chevalier qui prend en otage le frère de Bertrant devant Dinant, 2150, 2241, 2409 .i. Engloys, 2306 .i. angloiz, 2330 a l’autre champion, 2453 cellui chevalier, 2252 Dolant malotru, 2518 du felon chevalier, 2574 faulx chevalier, 2288, 2291, 2359 icellui chevalier, 2248 l’Anglois, 2564 l’Angloiz, 2503 l’Angloys, 2369 l’Englois, 2510 l’Engloys, 2491, 2504 l’engloys, 2496, 2521, 2523 le chevalier, 2173, 2183, 2265, 2276, 2293, 2516, 2533, 2534, 2536 le chevalier angloiz, 2187, 2409 le chevalier engloiz, 2403 le faulx chevalier, 2439 le nom du chevalier, 2204 son ennemi, 2337 Thomas le ousé, 2178 Traÿtre, 2521
- Index des lieux et des personnages un chevalier, 2240 un chevalier angloiz, 2199 un fort champion, 2421 vostre champïon, 2559 Thomas (saint –), 2160, 10021 Thomas : père de Lucas, 16583 l’escuier, 16598 Thomelin : châtelain de Turgot, 3260, 3276, 3315 le chastellain, 3300, 3394 le chastellain puissant, 3276 Thommelin, 3321 un chastellain, 3255 Thommelin, voir Thomelin Tibaut (– du Pont), voir Pont Tiebaut (– du Pont), voir Pont Triste Mare, 7949 Tristemare, 6641, 6900 Tollecte, voir Toulecte Tort Boyteux (le –), 1046, 1175, 1206, 1233, 1272, 1444, 1547, 1717, 2115 au cappitaine, 1726 de Pennehort, 1047 le bon cappitaine, 1204 le cappitaine, 1265, 1551, 1557, 1561, 1567, 1574, 1580, 1712, 1856, 1870, 1950, 1976 le cappitaine vaillent, 1206 le Tort, 1583 un chevalier vaillent, 2115 Toulecte (port de –), 15489, 15499 le port, 15500 Toulectes (l’evesque de –), 12248, 12251 un trop vaillent prelat, 12249
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Toulecte, 8394, 8398, 8404, 8450, 8452, 8465, 8861, 8865, 8956, 8980, 9064, 9109, 9137, 9157, 9179, 9217, 9676, 10883, 11825, 11970, 12117, 12251, 12411, 12565, 12579, 12715, 13170, 13182, 13194, 13203, 13208, 13219, 13220, 13235, 13245, 13254, 13958, 13963, 14307, 14311, 14346–14348, 14483, 14495, 14526, 14543, 14549, 14567, 14613, 14733, 14822, 15115, 15117, 15138, 15160, 15167, 15263, 15392, 15422, 15433, 15492, 15545, 15565, 15589, 15602, 16631, 16638, 16645, 16653, 16724, 16727, 16736, 16771, 16777, 16816, 16848, 16873 celle cité, 15125, 15128 la cité, 14317, 14323, 15132 la cité de Toulecte, 14370, 15650 la ville, 14320, 14321, 15139 Tollecte la lee, 7857 Toulecte la cité, 16649 Toulectes, 9082 Toullecte, 11874, 12261, 12571, 13154, 13247, 14302 Toullecte l’antye, 14304 Toullecte le donjon, 9153 Toullectes, 9078
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- Index des lieux et des personnages -
Toulectes (l’evesque de –), 9082 de Toulecte le bon prelat puissant ?, 15433 l’arcevesque, 12566, 12613, 12713, 13169, 13245, 13961, 14544, 15119, 16648, 16823, 16838 l’arcevesque bon, 15604, 15654 l’arcevesque de Toullecte, 14304 l’arcevesque gentilz, 16829 l’arcevesques, 12622 l’archevesques, 13148 l’archevé, 13146 l’evesque, 9094, 9098, 9099, 9101, 9105, 9107, 9127, 12294, 12306 Toullectes, voir Toulecte Toulouse, 7671 Tour (– de Meulent), 3963, 3967, 3969, 3971, 3975, 3979, 3980, 3995, 4003, 4009, 4011 le danjon, 4008 Tour (– de Toulecte), 13176 la tour bien quarree, 13199 Tour (– de la Rochelle), 20341, 20424 Tour (– encienne) : tour de la ville de Valongues, 4997, 5032, 5056 qui fu faicte du temps Clovis le coronné, 4998 Touraine (les saint –), 16455 Touraine, 19422, 20045, 21586 Tournant (Guion de –), 10642 Tournay, 542, 3660 Tournemine, 17891
Tours, 18916 Tragiduis, 21812 Trenchant (Guillaume –), 4104, 4626 bon escuier nommé, 4626 de Grantville nommee, 4104 Guillaume de Grantville, 4834 Trezorier : trésorier de Bertrant, 17792 Trie (chastellain de –), voir Chastellain Trinité, 12303 sainte Trinité, 19856 Tristant, 10643 Tristemare, 11972, 12228, 12652 Tudelle, 7859, 12458, 12514 Tunes, 13293 Turgot, 2719, 3000, 3254, 3299 au siege du chastel, 3375 le chastel, 3314, 3322, 3404 le nostre chasteau, 3305 son chastel, 3261, 3317, 3321 un fort chastel, 3385 un four chastel, 3382 Turquainville (cellui de –), 17296 Turquant : personnage responsable avec Daviot de la mort de l’épouse de Pietre, 9252, 9291, 9335, 9360, 9364, 9374, 9390, 9400, 9404, 9409, 9411, 9413, 9422, 9424, 9440, 9476, 9480, 9558, 9580, 9591, 9619, 9638, 9657, 10223, 10232, 10251, 10259, 10264, 10269,
- Index des lieux et des personnages 10275, 10304, 10317, 10319, 10327, 10331, 10340 Juif, 9620 le juif, 9625, 9627 Turquois, 15185, 15216 Turquoys, 15202 Turs, 9835 Un (l’–) : personnage qui pose son verre sur une fenêtre et découvre ainsi la mine sous la ville du Pont de Douve, 5255, 5259 Un (l’–) : un des deux personnages chargé de transmettre un pot-de-vin à Bertrant pour quitter l’Espagne, 9212 Un (l’–) : un des deux personnages chargés de transmettre au roi Pietre un pot de vin à Bertrant pour quitter l’Espagne, 9249 Une (l’–) : une des sœurs du roi Henry, 8804 Ussel, voir Huissel Val : vallon près de Cocherel, 4247 Valee : lieu de la bataille près de Cocherel, 4584 Valee : vallon près de Cocherel, voir aussi val, 4268 Vallés (cinquante –) : jeunes guerriers qui accompagnent Bertrant lors de la prise de Pestien, 3163 Vallet (un –) : personnage qui part chercher des renforts
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français lors de la bataille du pont de Lussac, 18689 Vallet : personnage qui accompagne l’Anglais dont Bertrant prend les armes, 698, 746, 752, 764 Valletz (– de chevaux) : palfreniers ataquant Bertrant lors de la prise de Forgeray, 974 Valletz (les – aus Engloys) : bataillon de domestiques vaincus devant Cocherel par les domestiques français, 4551 Valongues, 4962, 4976, 4984, 5004, 5090, 5221 le chastel seignory, 5221 Valongue, 4994, 5029 Valloys (Philippe de –), voir Philippe Vannes, 601 Vassal (le –) : messager envoyé par Henry à la reine, 13139 le message, 13143 Vast (Bernart du –), 20857 Vaulx, 18072, 18087, 18097, 18111, 18131 englesche fu la ville, 18073 la ville, 18102 Vaulx, la noble fermeté, 18148 Ventadour, 16969 Vernon : Vernon dans l’Eure, 3653 Vervon : Vernon dans l’Eure, 6487, 6497 Viaux (Jehan de –), 17334 Vienne (Jehan de –), 5856,
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- Index des lieux et des personnages -
17297, 17600, 17885, 18048, 18270 de Vienne Jehan, 17963 de Vienne y estoit Jehan, 20481 Vienne (Olivier de –), voir Olivier (– de Vienne) Vienne, 18528 la riviere, 18568 une riviere, 18527 Viennes (Jehan de –), 10704 Vignerons : soldats français déguisés en vignerons pour prendre la ville de Mante, 3750, 3774, 3792 celles gens, 3770 les compaignons, 3754 pouvre maignie, 3751 Vilaines : cri de guerre du Besgues, 15980, 15993 Villennes (Besgue de –), voir Villaines Villaines (Besque de –), 4291, 9636 au Besgue de Villennes, 4776 au Besgues de Villaines, 13119 au Besgues vaillant, 11038 Besgues, 15921, 16455 Besgues de Villaines, 14980 Besgues gentilz, 16430 Besgues vaillant, 16200, 16432 Besgus, 16443 cellui de Villaines, le Besgues souisant, 10699 de Villaines aussi le Besgues seignoris, 9812 de Villaines aussi le Besgues suisant, 9603 de Villaines y fu le Besgues
suisant, 5382 du Besgue de Villaines, 16450 du Besgue vaillant, 16151 du Besgues, 12973, 16415, 16477, 16514 du Besgues de Vilaines, 15099, 15181 Gentilz Besgue, 15982 gentilz Besgues, 16535 le Besgue de Vilaines, 13073 le Besgue de Villaines, 8195, 8947, 9207 le Besgue de Villennes, 8142 le Besgue ensuyvant, de Villaines tenant, 9507 le Besgues, 9933, 11887, 12029, 12161, 12172, 12774, 12971, 13081, 13082, 13084, 13085, 13124, 13226, 14418, 14424, 14746, 15628, 15937, 15946, 15964, 15965, 15979, 15993, 15997, 16004, 16192, 16377, 16386, 16420, 16421, 16440, 16467, 16482, 16502, 16531 le Besgues au vis cler, 16540 le Besgues de Vilaines, 10214, 10830, 10895, 11017, 11943, 12128, 12732, 14742, 15503, 15607, 15688, 15889, 15931, 16125, 16205, 16241 le Besgues de Vilaines au hardy convenant, 15430 le Besgues de Villaines, 6136, 7373, 8195, 8947, 9207,
- Index des lieux et des personnages -
le le le le le le le le le le le
10895, 10927, 11072, 11608, 11704, 11738, 11881, 11999, 12024, 12156, 12339, 12480, 13114, 13218, 13962, 14309, 14358, 14395, 14396, 14603, 14616, 14670, 14681, 14820, 14954, 15793, 16368, 16370, 16410, 16858 Besgues gentilz, 14908, 16406, 16464, 16519 Besgues gentilz de Villaines present, 5855 Besgues qui tint Vilaines en son nom, 5961 Besgues souisant, 15957, 15972 Besgues vaillant, 16434 Besgues...qui de Villaines a surnon en sa duree, 9776 bon Besgues, 15838 bon Besgues aussi de Villaines, 12659 chevalier, 8948, 11899 noble Besgues de Villaines gentil, 6579 noble combatant, 4291
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Ville (chasteau de –), 17655, 17721 Ville (la – d’environ) : ville située près d’Alroy prise par les Anglais, 5350 Villeneusve, 7537, 7601, 7604, 7639, 12987 Villequiers (Robert de –), 4294 Villiers (Pierre de –), 21522 Vinguenen (cellui de –), 20923 Virge, voir Marie Virgiles, 9069 Viscoins (– de Beaumont), voir Beaumont Voysin (Beau –), voir Beau Ysaïe : personnage biblique, 8702 Ysoré : bourjois de Poitiers, 19936 Yve (saint –), 13839 Yves (saint –), 2206, 16733, 17059, 19471 Yvon, 20908 Yvon (– de Manny), voir Manny Yvon (saint–), 13929 Yvon : chambellan de Bertrant, 13689, 14120
Répertoire des proverbes ne fait s’amie., 11504 Arc : chascun retient souvent en sa visee deux cordes en son art, ainsi qu’il lui agree, 1930 Argent : cellui qui n’a point d’argent n’a que faire au marché, 4416 cellui qui n’a point d’argent point de vallet n’a, 12870 meulx vault honneur que argent, 21133 on prent bien tel argent qui fait confusion, 12924 qui a de l’argent tousjours eschappe et ine, 18925 Assaillir il n’eschiet a cellui qui assaut le premier, 5834 Assenner : qui prent premerement, premier est assenné, 19690 Avant : qui a bon harnoiz touz jours il va avant., 10763 Avenir : bien doit avenir par bon comaincement, 10463 Aventure : en droite aventure met on les œufs couher,
Advis : en guerre fault advis et force en combatant, 4116 Alier : un homme est plain de grant folye qui estrange boyel nul jour au sien alie, 16141 Amander : il est au dessus qui tout puet amander, 3402 Amant : cellui qui son maistre sert sans penser a folie on le doit meulx amer que amans ne fait s’amie., 11504 Amer : cellui qui son maistre sert sans penser a folie on le doit meulx amer que amans ne fait s’amie., 11504 Ami : il ne scet qu’il pert qui pert ses bons amis, 2077 au besoin cognoist on son ami droiturer, 18728 il n’est rien qui vaille au besoign amis, 18920 qui pert ses amis, je di qu’il en vault pis, 16518 Amie : cellui qui son maistre sert sans penser a folie on le doit meulx amer que amans 395
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- Répertoire des proverbes -
4427 qui croust en sa maison, il n’aura ja que peine ny adventure n’aura qui a honneur le mayne, 16461 Avoir : l’avoir enfouy est laidement perduz//et aussi le sen, voyre qui est repeuz, 390 Ayde : le droit a la foy a bien mestier d’aÿde, 5420 Ayve : tant va le pot a l’ayve que en la in brisera, 6562 Batre : on doit batre le fer entreulx qu’il est bien chault, 19903 Besoign : au besoin cognoist on son ami droiturer, 18728 il n’est rien qui vaille au besoign amis, 18920 Bien : bien doit avenir par bon comaincement, 10463 Bois : nature fait tracer le cerf ou bois ramé, 19960 Bonté : la bonté ne la ierté ne scet on esprouver, 9761 Braire : de deux rouhes, la pire c’est celle qui brayra, 19883 Brebiz : Cellui fu aussi prins que une brebis portiere//quant celle voit le loux qui lié tient la gorgere c’est ainsi que le loux qui hors du boys descent,//il nous tient a brebiz, il nous monstre la dent, 1156 Brebiz : Cellui fu aussi prins que une brebiz portiere//quant
celle voit le loux qui lié tient la gorgere, 1118 en femme n’a de sen ny en plus que en la brebis, 2375 Brouhee : je louhe que sans oignons faisons une brouhee, 11846 Cerf : nature fait tracer le cerf ou bois ramé, 19960 Chalour : on ne puet les pastéz prendre en leur chalour que en l’eure proprement c’on les sache du four, 19900 Chat : la ou n’a point de chat, la sorit se tient iere, 17378 Chault : on doit batre le fer entreulx qu’il est bien chault, 19903 Cheoir : la ou le cheval chiet l’on le va escorchant., 10756 Chetifz : qui les chetifz suyt tantost si est chetifs, 797 Cheval : la ou le cheval chiet l’on le va escorchant., 10756 Chien : le chien qui dort a fait laidement reveiller, 7695 Comaincement : bien doit avenir par bon comaincement, 10463 Commencement : malvaise in vient de mal commencement, 2067 Confusion : on prent bien tel argent qui fait confusion, 12924 Conseil : de croyre mal conseil male in en sera, 6559
- Répertoire des proverbes qui bon conseil ne croit, il folie grandement, 12965 Corde : chascun retient souvent en sa visee deux cordes en son art, ainsi qu’il lui agree, 1930 Couher : en droite aventure met on les œufs couher, 4428 Croupir : qui croust en sa maison, il n’aura ja que peine ny adventure n’aura qui a honneur le mayne, 16460 Cuer : ce qui est au cuer, l’omme ne le dit mie, 10866 Cuer : onques large cuer malvaisement ina, 1527 Debat : meulx vault reculer une grant emjambee pour sa vie sauver quant l’eure est ordonnee que querrir le debat pour mourir a l’espee, 3807 Denree : tel en vendoit .ii. sols qui en faisoit denree, 1938 Deport : le plus riche homs toujours plus deport a, 6984 Desmesurer : l’homme qui ne mesure se va desmesurant, 5762 Dieu : Dieu paie quant lui plaist, bien pouoir en a, 6560 Dieu : on dit [...] la voix d’un commun peuple qui par le monde va que c’est la voix de Dieu qui le monde crea, 6631 Droit : le droit a la foy a bien
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mestier d’aÿde, 5420 Droiturer : au besoin cognoist on son ami droiturer, 18728 Enffant : homme qui est menacé de fort et de puissant, s’il pleure par menace, il ressemble l’enfant., 10747 Enjambee : meulx vault reculer une grant emjambee pour sa vie sauver quant l’eure est ordonnee que querrir le debat pour mourir a l’espee, 3805 Esbahyr : homme qui s’esbaÿst, il est mort a moitie, 17965 Eschapper : qui a de l’argent tousjours eschappe et ine, 18925 Eschars : eschars prince n’y a ja honneur conquerant, 17535 Escheoir il n’eschiet a cellui qui assaut le premier, 5834 Escorcher : la ou le cheval chiet l’on le va escorchant., 10756 Espee : meulx vault reculer une grant emjambee pour sa vie sauver quant l’eure est ordonnee que querrir le debat pour mourir a l’espee, 3807 Esprouver : la bonté ne la ierté ne scet on esprouver, 9761 Estal : a pouvr mercier convient petit estal, 383 Estrange : un homme est plain de grant folye qui estrange
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- Répertoire des proverbes -
boyel nul jour au sien alie, 16141 Eufz : en droite aventure met on les œufs couher, 4428 Eureux : car qui n’est eureux en fait ou en parler jamais jour a nul geu ne devroit jouer, 17899 Euvre : de malvaise euvre doit estre male souldee, 6529 Excuser : qui fait ce qu’il doit de riens ne mesfet, bon est a excuser, 18869 Faulx : on ne cognoist les faulx par leur faulse raison, 10868 Femme : en femme n’a de sen ny en plus que en la brebis, 2375 qui sa femme ne croist a la foy s’en reppent, 17713 Fer : on doit batre le fer entreulx qu’il est bien chault, 19903 Fier : il n’est mie preudons qui en traïtour se ie, 18020 Frierté : la bonté ne la ierté ne scet on esprouver, 9761 Fin : de croyre mal conseil male in en sera, 6559 Fin : malvaise in vient de mal commencement, 2067 Finer : il n’est rien qui ne ine, 18921 qui a de l’argent tousjours eschappe et ine, 18925 Finer : le pouvre toudis ine malvaisement, 20231 Finer : onques large cuer
malvaisement ina, 1527 Folie : cellui qui son maistre sert sans penser a folie on le doit meulx amer que amans ne fait s’amie., 11503 un homme est plain de grant folye qui estrange boyel nul jour au sien alie, 16141 Folier : qui bon conseil ne croit, il folie grandement, 12965 Force : en guerre fault advis et force en combatant, 4116 Force : force pait le pré, 14890, 20221 Forvoier : qui fait ce qu’il doit, il ne forvoie mie, 21499 Four : on ne puet les pastéz prendre en leur chalour que en l’eure proprement c’on les sache du four, 19901 Foy : cellui qui ne tient foy n’est point sans traÿson, 20190 Geu : car qui n’est eureux en fait ou en parler jamais jour a nul geu ne devroit jouer, 17900 Guerre : en guerre fault advis et force en combatant, 4116 Haïr : cellui qui est haÿ de ses hommes de nom ne doit estre par droit sire de son royon, 12630 Hanter : qui hante les bon a honneur vient touz diz, 796 Harnoiz : qui a bon harnoiz touz jours il va avant., 10763
- Répertoire des proverbes Haÿr : sires qui est haÿ en la in s’en reppent, 9699 Heure : la malvaise heure atrait la in, 6566 Homme : quant l’omme est mort, on n’y conte riens nee, 3808 car le bon vin fait homme a ardement parer, 19275 ce qui est au cuer, l’omme ne le dit mie, 10866 homme qui est menacé de fort et de puissant, s’il pleure par menace, il ressemble l’enfant., 10746 homme qui s’esbaÿst, il est mort a moitie, 17965 l’homme qui est mort jamais n’avra on, 12175 l’homme qui ne mesure se va desmesurant, 5762 l’omme qui mesure en lui ne mectra, mesure malgré lui dedens lui entrerra, 6563 l’omme qui vault vivre sans souspeçon il se doit bien garder de faire traïson, 21638 le plus riche homs toujours plus deport a, 6984 le péchié encombre homme dont il vaut pis, 6720 un homme est plain de grant folye qui estrange boyel nul jour au sien alie, 16140 ung homme desconfy vault autant que maté, 13374 Honneur : qui croust en sa maison, il n’aura ja que
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peine ny adventure n’aura qui a honneur le mayne, 16461 eschars prince n’y a ja honneur conquerant, 17535 meulx vault honneur que argent, 21133 Jeunesse : Il convient et c’est droit, que jeunesse soit passee // car il fault, comment que soit, getee, 273 Jouer : car qui n’est eureux en fait ou en parler jamais jour a nul geu ne devroit jouer, 17900 Large : larges et courtoys acquiert de bons amis, 342 Lieu : a sa nature va le lieu toujours tirant, 18349 Loux : Cellui fu aussi prins que une brebis portiere//quant celle voit le loux qui lié tient la gorgere, 1119 c’est ainsi que le loux qui hors du boys descent,//il nous tient a brebiz, il nous moustre la dent, 1155 Maison : de tel marrien qu’ai me fault faire maison, 10871 Maison : qui croust en sa maison, il n’aura ja que peine ny adventure n’aura qui a honneur le mayne, 16460 Maistre : cellui qui son maistre sert sans penser a folie on le
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- Répertoire des proverbes -
doit meulx amer que amans ne fait s’amie., 11503 Marché : cellui qui n’a point d’argent n’a que faire au marché, 4416 Marrien : de tel marrien qu’ai me fault faire maison, 10871 Menancer : homme qui est menacé de fort et de puissant, s’il pleure par menace, il ressemble l’enfant., 10746 Mercier : a pouvre mercier convient petit estal, 383 Mesure : l’omme qui mesure en lui ne mectra, mesure malgré lui dedens lui entrerra, 6563 Mesfaire : qui fait ce qu’il doit de riens ne mesfet, bon est a excuser, 18869 Mesprendre : trop sage est cellui qui onques ne mesprit, 16473 celui qui ne mesprent, il est moult soubtilz, 16487 Mestier : le droit a la foy a bien mestier d’aÿde, 5420 Mesurer : l’homme qui ne mesure se va desmesurant, 5762 Moitie : homme qui s’esbaÿst, il est mort a moitie, 17965 Mort : on doit plus doubter la mort que villennie, 2448 l’homme qui est mort jamais n’avra on, 12175 Mourir : meulx vault reculer une grant emjambee pour sa vie sauver quant l’eure est
ordonnee que querrir le debat pour mourir a l’espee, 3807 homme qui s’esbaÿst, il est mort a moitie, 17965 une foyz fault morir, si ne scet on comment, 15791 Nature : a sa nature va le lieu toujours tirant, 18349 nature fait tracer le cerf ou bois ramé, 19960 Obeÿr : bon fait obeÿr la ou raison l’octroie, 4943 Octroier : bon fait obeÿr la ou raison l’octroie, 4943 Qui laisse son seigneur et a autre s’octroie c’est raison que en la in recouvre villenie, 4944 Oignon : je louhe que sans oignons faisons une brouhee, 11846 Ortie : on dit souvent, raison le certiie, que on voit volunters quant poindre doit l’ortie que nouvellement point on le voit a l’oÿe, 196 Paitre : force pait le pré, 14890, 20221 Parer : car le bon vin fait homme a ardement parer, 19275 Parservir : qui sert et ne parsert, il ne peut prouiter, 8950 Partie : c’est plaidoie sans partie, 20000
- Répertoire des proverbes Pasté : on ne puet les pastéz prendre en leur chalour que en l’eure proprement c’on les sache du four, 19900 Péchié : le péchié encombre homme dont il vaut pis, 6720 Perdre : il ne scet qu’il pert qui pert ses bons amis, 2077 qui pert ses amis, je di qu’il en vault pis, 16518 Perte : voir perte ne vient pas seule, 21273 peuplePeuple : on dit [...] la voix d’un commun peuple qui par le monde va que c’est la voix de Dieu qui le monde crea, 6630 Plaidoie : c’est plaidoie sans partie, 20000 Plus : les plus a la foy vont victoire perdant, 5779 Pot : tant va le pot a l’ayve que en la in brisera, 6562 Pouoir : Dieu paie quant lui plaist, bien pouoir en a, 6560 Pouvre : le pouvre toudis ine malvaisement, 20231 Pré : force pait le pré, 14890, 20221 Premier : qui prent premerement, premier est assenné, 19690 Prendre : qui prent premerement, premier est assenné, 19690 Preudons : il n’est mie preudons qui en traïtour se ie, 18020 Prince : eschars prince n’y a ja honneur conquerant, 17535
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Prouffiter : qui sert et ne parsert, il ne peut prouiter, 8950 Raison : bon fait obeÿr la ou raison l’octroie, 4943 Qui laisse son seigneur et a autre s’octroie c’est raison que en la in recouvre villenie, 4945 Raison : on ne cognoist les faulx par leur faulse raison, 10868 Reculer : meulx vault reculer une grant emjambee pour sa vie sauver quant l’eure est ordonnee que querrir le debat pour mourir a l’espee, 3805 Reppentir : sires qui est haÿ en la in s’en reppent, 9699 Retenir : chascun retient souvent en sa visee deux cordes en son art, ainsi qu’il lui agree, 1929 Riens : quant l’omme est mort, on n’y conte riens nee, 3808 Rouhe : de deux rouhes, la pire c’est celle qui brayra, 19883 Royon : cellui qui est haÿ de ses hommes de nom ne doit estre par droit sire de son royon, 12631 Sachier : on ne puet les pastéz prendre en leur chalour que en l’eure proprement c’on les sache du four, 19901 Sage : trop sage est cellui qui onques ne mesprit, 16473
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- Répertoire des proverbes -
Sen : en femme n’a de sen ny en plus que en la brebis, 2375 Sen : l’avoir enfouy est laidement perduz//et aussi le sen, voyre qui est repeuz, 391 Servant : mais il convient servir maintefoiz les servans, 7295 Servir : mais il convient servir maintefoiz les servans, 7295 servir : qui sert et ne parsert, il ne peut prouiter, 8950 Sire : cellui qui est haÿ de ses hommes de nom ne doit estre par droit sire de son royon, 12631 Sire : sires qui est haÿ en la in s’en reppent, 9699 Solt : tel en vendoit .ii. sols qui en faisoit denree, 1938 Sorit : la ou n’a point de chat, la sorit se tient iere, 17378 Soubtil : celui qui ne mesprent, il est moult soubtilz, 16487 Souldee : de malvaise euvre doit estre male souldee, 6529 Souspeçon : l’omme qui vault vivre sans souspeçon il se doit bien garder de faire traïson, 21638 Tracer : nature fait tracer le cerf
ou bois ramé, 19960 Traison : l’omme qui vault vivre sans souspeçon il se doit bien garder de faire traïson, 21639 Traitour : il n’est mie preudons qui en traïtour se ie, 18020 Trayson : cellui qui ne tient foy n’est point sans traÿson, 20190 Vallet : cellui qui n’a point d’argent point de vallet n’a, 12870 Valoir : qui pert ses amis, je di qu’il en vault pis, 16518 Victoire : les plus a la foy vont victoire perdant, 5779 Vie : meulx vault reculer une grant emjambee pour sa vie sauver quant l’eure est ordonnee que querrir le debat pour mourir a l’espee, 3806 Villennie : on doit plus doubter la mort que villennie, 2448 Vin : car le bon vin fait homme a ardement parer, 19275 Voix : on dit [...] la voix d’un commun peuple qui par le monde va que c’est la voix de Dieu qui le monde crea, 6630
Table des matières Apparat critique
7
Notes
7
Glossaire
55
Index des lieux et personnages
295
Répertoire des proverbes
395
403